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— Estimation sans doute fort modérée, murmura Poirot. Je vous remercie, Miss Lemon, pour le mal<br />
que vous vous êtes donné.<br />
Les faits étaient sensationnels mais assez nets. Le commandant Charles Rich, riche célibataire, avait<br />
invité en soirée quelques amis chez lui. Ces amis consistaient en Mr. et Mrs. Clayton ; Mr. et Mrs. Spen<strong>ce</strong><br />
et le capitaine de frégate McLaren. Ce dernier était lié depuis longtemps <strong>au</strong>x Clayton et à Rich ; les<br />
Spen<strong>ce</strong>, plus jeunes, étaient une relation plus ré<strong>ce</strong>nte. Arnold Clayton travaillait à la direction du Trésor.<br />
Jeremy Spen<strong>ce</strong> était <strong>au</strong>ssi fonctionnaire. Rich avait quarante-huit ans, Arnold Clayton cinquante-cinq ;<br />
McLaren quarante-six, Jeremy Spen<strong>ce</strong> trente-sept. De Mrs. Clayton, on disait qu’elle était « be<strong>au</strong>coup<br />
plus jeune que son mari ». Clayton n’avait pu se rendre à <strong>ce</strong>tte soirée, appelé <strong>au</strong> dernier moment en<br />
Écosse pour une affaire urgente. Il était supposé avoir quitté King’s Cross par le train de 8 h 15.<br />
La réunion avait été <strong>ce</strong> qu’elle devait être. Chacun avait paru s’amuser, dans le calme, sans boire<br />
avec excès. Elle avait pris fin vers 11 h 45. Les quatre invités étaient partis en même temps, partageant le<br />
même taxi. McLaren était des<strong>ce</strong>ndu le premier à son club et les Spen<strong>ce</strong> avaient accompagné Margharita<br />
Clayton à Cardigan Gardens, de l’<strong>au</strong>tre côté de Sloane Street, avant de retourner eux-mêmes chez eux, à<br />
Chelsea.<br />
C’est le valet de Rich, William Burgess, qui avait fait la macabre découverte le lendemain matin. Le<br />
domestique, qui n’habitait pas chez le commandant, était arrivé de bonne heure pour mettre de l’ordre<br />
dans le salon avant de porter le thé à son maître. Une grande tache assombrissant le tapis clair sous le<br />
bahut espagnol avait attiré son attention. Il souleva le couvercle du meuble pour regarder à l’intérieur et<br />
fut horrifié de découvrir le cadavre de Mr. Clayton, égorgé.<br />
Obéissant à sa première impulsion, Burgess s’était précipité dans la rue pour chercher un agent.<br />
La poli<strong>ce</strong> s’était empressée d’informer Mrs. Clayton qui « avait été totalement prostrée ». Elle avait<br />
vu son mari pour la dernière fois la veille, un peu après six heures. Il était arrivé chez lui très ennuyé de<br />
devoir se rendre en Écosse pour une affaire urgente, relative à une propriété qu’il y possédait. Il avait<br />
insisté <strong>au</strong>près de sa femme pour qu’elle assiste à la soirée sans lui. Clayton avait ensuite rejoint son club.<br />
Il y but un verre en compagnie de son ami McLaren <strong>au</strong>quel il déclara avoir juste le temps de passer chez<br />
Rich avant de prendre son train. Il avait tenté de le joindre <strong>au</strong> téléphone mais la ligne semblait en<br />
dérangement.<br />
Selon le valet Burgess, Clayton était arrivé vers sept heures cinquante-cinq. Rich était sorti mais<br />
devait revenir d’un moment à l’<strong>au</strong>tre. Burgess suggéra à Clayton de l’attendre. Mais Clayton, pressé par<br />
le temps, décida de laisser une note à l’intention du commandant. Le domestique l’introduisit <strong>au</strong> salon et<br />
retourna dans sa cuisine où il confectionnait des canapés pour la ré<strong>ce</strong>ption. Il n’entendit pas son maître<br />
rentrer, mais il le vit dix minutes plus tard passer la tête par la porte pour lui demander d’aller, en toute<br />
hâte, acheter des cigarettes turques pour Mrs. Spen<strong>ce</strong>, dont c’était le tabac favori. Le domestique obéit et<br />
les apporta à son maître, dans le salon. Mr. Clayton ne se trouvait plus dans la piè<strong>ce</strong> et Burgess en<br />
conclut qu’il était allé prendre son train.<br />
Le récit de Rich était simple. Clayton n’était pas chez lui à son arrivée et il ignorait qu’il y soit venu.<br />
Il ne lui avait pas laissé de note et <strong>ce</strong> n’est qu’à l’arrivée des <strong>au</strong>tres invités qu’il avait entendu parler du<br />
voyage en Écosse.<br />
Mrs. Clayton, abattue par le choc, avait quitté son appartement de Cardigan Gardens. On la croyait<br />
chez des amis.<br />
Le commandant Charles Rich, accusé du meurtre d’Arnold Clayton, avait été arrêté.<br />
— Il fallait s’y attendre, dit Poirot en regardant Miss Lemon. Cette arrestation était à prévoir. Quelle<br />
affaire étonnante. N’est-<strong>ce</strong> pas votre avis ?<br />
— Ce sont des choses qui arrivent, dit Miss Lemon sans manifester <strong>au</strong>trement d’intérêt.