EVOLUTION - EPISODE 1 Neil Shubin (V/O) 00 04 C'est un ... - Arte

1 

EVOLUTION - EPISODE 1 

Neil Shubin (V/O) 00 04 C’est un besoin essentiel de la nature humaine de se 

demander : 

… … Qui sommes-nous ? 

… … D’où venons-nous ? 

… … Comment en sommes-nous arrivés là ? 

… … Pourquoi sommes-nous ainsi ? 

Commentaire 00 22 L’histoire de notre propre évolution n’est en réalité 

qu’un court chapitre dans une histoire bien plus 

vaste : l’histoire de l’évolution de tous les êtres 

vivants. 

Neil Shubin (V/O) 00 33 L’évolution nous apprend… 

00 … que nous sommes liés au reste du monde vivant d’une 

manière bien plus forte… 

Neil Shubin (interview) 00 … que nous n’aurions pu l’imaginer. 

Commentaire 00 43 Il est aisé de reconnaître ces liens avec nos proches, 

mais, si l’on sait comment chercher, on les trouve 

aussi chez d’autres mammifères, des oiseaux, des 

reptiles, des poissons et même des insectes. 

01 01 Plus on remonte dans le temps, plus on saisit que tout 

ce qui vit a évolué à partir d’un seul point de départ. 

01 12 L’arbre de vie n’a cessé de se ramifier depuis plus de 

4 milliards d’années. Et l’on peut remonter de ses 

branches jusqu’à ses racines. 

Neil Shubin (V/O) 01 22 En étudiant le passé, … 

Neil Shubin (interview) … … on trouve certains carrefours, certains moments-clés, 

les grandes transformations, les grandes phases de 

l’évolution. 

Commentaire 01 31 Dans l’histoire de notre planète, quelques grandes 

transformations ont ouvert la voie à de nouvelles 

façons de vivre – et à des formes de vie nouvelles. 

… … Il y a 50 millions d’années, les mammifères terrestres 

ont évolué en animaux marins. 

… … Bien avant cela, les poissons ont colonisé la terre. 

… … À l’aube de la vie animale, les premiers corps sont 

apparus. 

… … Ce sont là quelques chapitres dans l’histoire de la vie 

– notre histoire. 

Neil Shubin (V/O) 02 09 L’intérêt d’étudier cette histoire, c’est d’en 

comprendre chaque chapitre.

2 


Neil Shubin (interview) … … Car en comprenant ces chapitres, nous commençons à 

voir l’unité de la vie, l’histoire commune à toute vie 

sur terre. 

TITRE (S/T) … … ÉVOLUTION 

TITRE (S/T) … … LES GRANDES TRANSFORMATIONS 

Commentaire 03 01 La civilisation humaine remonte à des milliers 

d’années. 

… … Mais comparé à l’âge de la terre, nous, les hommes, 

venons juste d’arriver. 

Neil Shubin (interview) 03 14 La terre est extrêmement vieille. 

Neil Shubin (V/O) … … Si l’on prend l’histoire entière de la terre, 4,6 

milliards d’années, et si l’on réduit cette durée à 

l’échelle d’une heure, 

… … les 50 premières minutes se passent surtout dans un 

monde de microbes, d’organismes unicellulaires. 

… … La vie animale apparaît dans les 10 dernières minutes 

de cette heure. 

… … Toute l’histoire humaine, notre civilisation, notre 

évolution, se produit dans l’ultime 100 e de seconde de 

cette heure. 

Commentaire 03 53 Nous sommes donc arrivés sur le tard. Mais nous 

avons été formés par les mêmes forces qui ont 

contribué à former toute vie sur terre. 

… … Pour comprendre notre place, il nous faut remonter 

loin dans le temps, bien avant nos propres origines, et 

voir comment les autres êtres vivants ont évolué. 

… … Les baleines sont les plus gros animaux vivants. 

Comme nous, les baleines et les dauphins n’ont pris 

leur forme actuelle que relativement récemment. 

… … Pendant longtemps, l’origine de ces mammifères 

marins est resté un mystère scientifique. 

Philip Gingerich (V/O) 04 32 Les baleines sont tellement différentes des autres 

mammifères, 

Philip Gingerich (interview) … … qu’il nous est difficile de les relier à quoi que ce soit 

– et elles forment une branche à part de l’évolution 

des mammifères. 

Commentaire 04 44 Les mammifères sont apparus sur notre planète il y a 

environ 200 millions d’années – et ce, sur terre. 

… … Les mammifères sont des êtres à sang chaud, ils 

donnent naissance à des petits vivants. Et ils 

respirent. 

… … Ce sont là des adaptations pour vivre sur terre.

3 


… … Mais les baleines et les dauphins sont aussi des 

mammifères. 

Neil Shubin (V/O) 05 12 Ce sont des mammifères qui vivent dans l’eau. 

… … Mais nous savons que les mammifères ont évolué sur 

terre. La manière dont les baleines ont évolué, à 

l’origine, est donc un vrai mystère. 

Neil Shubin (interview) … … Mais en comprenant ce processus, nous saisirons 

comment, dans l’ensemble, se déroulent ces 

changements considérables, ces grandes 

transformations. 

Philip Gingerich (V/O) 05 33 Les gens s’intéressent aux baleines, et je le 

comprends aisément. 

… … Elles sont tellement belles. 

… … Leur origine est un tel mystère. 

… … Les baleines sont un des rares groupes de 

mammifères à posséder un cerveau vraiment 

complexe, comme le nôtre. 

Philip Gingerich (interview) … … Donc, en un sens, elles sont nos alter ego marins ; 

elles dominent les mers tandis que nous dominons la 

terre. 

… … Je crois que c’est pour cette raison que nous 

cherchons à comprendre ce qui se passe là, comment 

elles en sont arrivés là, à l’image d’un reflet de notre 

propre histoire à travers les temps géologiques. 

Commentaire 06 10 Au début de sa carrière, il y a 30 ans, Phil Gingerich 

ignorait tout des baleines, et cela ne le dérangeait pas. 

… … Il était attiré par la géologie – surtout parce qu’il 

n’envisageait pas de passer sa vie derrière un bureau. 

Philip Gingerich (V/O) 06 26 La géologie m’intéressait parce que c’est une science 

qui se pratique en plein air. 

Philip Gingerich (interview) … … Au sein de la géologie, je me suis passionné pour la 

paléontologie, parce qu’elle portait sur la vie, et 

l’histoire de la vie. 

Commentaire 06 38 L’intérêt que Phil Gingerich portait aux premiers 

mammifères terrestres a fini par le conduire au 

Pakistan. 

… … C’est là qu’il a fait le genre de découverte dont rêve 

tout paléontologue. 

06 52 Un fossile qui allait amener à réécrire l’une des plus 

importantes histoires de l’évolution.

4 


Philip Gingerich (V/O) 06 57 J’ai trouvé l’arrière d’un crâne que je ne parvenais 

pas à identifier. 

Philip Gingerich (interview) … … La région de l’oreille était très bien préservée, et c’est 

ce qui a permis l’identification. 

Commentaire 07 08 La forme était familière, mais, à d’autres égards, 

Gingerich n’avait jamais rien vu de pareil. 

Philip Gingerich (interview) 07 16 Voilà le spécimen original, celui que nous avons 

trouvé en 1978. 

Philip Gingerich (V/O) … … Il y a plusieurs choses frappantes. En particulier, il 

ressemble beaucoup, 

Philip Gingerich (interview) … … tant par la taille que par la forme, à l’occiput d’un 

loup. 

Commentaire 07 28 Mais ce crâne était étrange. 

… … Il y avait au-dessous une bosse, de la taille d’une 

noix. 

Philip Gingerich (V/O) 07 37 Si elle n’avait pas été là, j’aurais pensé qu’il s’agissait 

d’un ancien 

Philip Gingerich (interview) … … mammifère carnivore, un créodonte. Mais elle est là. 

Commentaire 07 45 C’était une partie de l’oreille interne de l’animal, et 

elle avait une forme caractéristique. 

… … Une forme que l’on trouve aujourd’hui chez une seule 

espèce d’animaux : 

… … les baleines. 

08 00 Que faisait donc l’oreille d’une baleine sur le crâne 

d’un animal qui ressemblait à un loup ? 

… … Gingerich était perplexe. 

… … Il a alors fabriqué un modèle pour représenter le 

crâne entier de l’animal. 

… … Il s’est demandé si sa découverte était un chaînon 

manquant essentiel. 

… … Si c’était le premier fossile jamais découvert qui 

prouvait une des théories les plus audacieuses de 

Darwin ? 

… … Le fait que les baleines avaient évolué à partir de 

mammifères terrestres. 

… … Pour être certain, Gingerich avait besoin de trouver 

d’autres fossiles. 

… … Des fossiles qui montreraient chaque étape de la 

transformation des baleines, 

… … ce que les scientifiques appellent les formes de 

« transition ».

5 


Philip Gingerich (interview) 08 50 Je voulais aligner la série complète. Je voulais que 

tout le monde puisse le voir et le croire, parce qu’ils 

l’avaient vu. 

Commentaire 09 00 Gingerich a tenté de retourner au Pakistan afin d’y 

poursuivre ses recherches. 

… … Mais la guerre avait éclaté, et les frontières étaient 

fermées. 

… … Déçu, Gingerich a décidé de chercher ailleurs. 

… … De nombreuses personnes affirmaient avoir vu des 

squelettes de baleine dans un endroit très inattendu. 

… … Il a donc décidé de vérifier lui-même. 

… … Le Sahara est l’un des endroits les plus secs de la 

planète. 

… … Mais, il y a 40 millions d’années, il en allait tout 

autrement. 

Philip Gingerich (V/O) 09 38 Ici, c’était autrefois la mer. 

… … Imaginez cet endroit il y a 40 millions d’années, 

comme si c’était la côte de la Méditerranée, en 

Égypte, environ 100 kms plus au sud qu’elle n’est 

aujourd’hui. 

Commentaire 09 56 Ici, dans ce qui fut jadis le sud de la Méditerranée, [la 

Thétys], on trouve une bande de strates de grès de 

260 km 2 , qui porte un nom surprenant. 

… … « La Vallée des Baleines ». 

… … Elle porte bien son nom. 

… … Ce paysage aride est jonché de ce qui ressemble à des 

amas de pierres roses. 

Philip Gingerich (S/T) 10 26 Là, c’est un basilosaurus. 

Commentaire … … Mais il ne s’agit pas de pierres. 

Philip Gingerich (S/T) … … Voyez un peu la taille des vertèbres – là, c’est une 

lombaire, en partie érodée. 

Commentaire … … Ce sont des squelettes de baleines, vieux de 40 

millions d’années. 

Philip Gingerich (S/T) 10 42 Il y en un autre, là, qui sort du champignon. 

… … Un autre, par ici. 

… … Et encore un, là-bas. 

… … Cet endroit est rempli de baleines.

6 


Commentaire 11 00 Pourquoi y a-t-il tant de baleines concentrées à cet 

endroit ? 

… … Gingerich pense que la Vallée des Baleines était jadis 

une baie, 

… … protégée de la mer par des barres de sable sousmarines. 

… … Les baleines venaient peut-être y mettre bas, 

… … et y revenaient pour mourir. 

… … Mais même avec des centaines d’ossements de 

baleines à ses pieds, Gingerich était déçu. 

… … Presque tous les squelettes étaient des squelettes de 

basilosaurus. Une espèce de baleine vieille de 40 

millions d’années, déjà connue des scientifiques. 

… … Les basilosaurus avaient uniquement vécu dans l’eau. 

… … Si les baleines avaient évolué à partir de mammifères 

terrestres, cela s’était produit bien avant les 

basilosaurus. 

… … Gingerich pensait donc que ces ossements 

n’apporteraient guère d’informations. 

… … Il ne mesurait pas l’étendue de son erreur. 

… … À peine après quelques jours de fouilles, il fit une 

deuxième découverte extraordinaire. 

… … Il s’est avéré que le basilosaurus possédait quelque 

chose que les baleines des temps modernes avaient 

perdu depuis longtemps. 

Philip Gingerich (S/T) 12 24 Pour la première fois, on a des baleines qui ont des 

pattes. 

Commentaire 12 30 Mêmes petits, les os étaient évidents. 

… … Un bassin, 

… … une rotule – et même des orteils. 

… … Cette baleine possédait une ossature de la jambe 

complète. 

… … Gingerich a ramené tout ce qu’il pouvait de ce 

squelette. 

… … Cela prouvait avec force que les baleines avaient été 

des quadrupèdes. 

… … Depuis les découvertes de Gingerich, lui et d’autres 

ont complété cette histoire fabuleuse. 

… … Les scientifiques pensent désormais que les premiers 

ancêtres des baleines étaient semblables à ce 

mammifère lupiforme, âgé de 50 millions d’années, 

appelé sinonyx. 

… … Le sinonyx était un charognard prédateur qui chassait 

sur les rives d’une mer disparue. 

… … Ses descendants ont peut-être trouvé que l’eau 

représentait une source abondante de nourriture, et un 

refuge, loin de la compétition.

7 


… … Sur des millions d’années, les pattes antérieures sont 

devenues des nageoires, 

… … les membres postérieurs ont disparu, le corps a perdu 

ses poils et pris sa forme profilée. 

… … Depuis la première découverte de Gingerich, le 

pakicetus, on connaît d’autres formes de baleines de 

« transition ». On compte ainsi : 

… … l’ambulocetus, 

… … le rhodocetus, 

… … le dorudon, 

… … en plus du basilosaurus. 

… … Ces transitions révèlent un autre élément de 

l’évolution des baleines – le déplacement graduel des 

narines sur le sommet de la tête, à mesure qu’elles 

s’adaptaient à respirer dans l’eau. 

Philip Gingerich (S/T) 14 30 Comment les baleines perdirent-elles leurs pattes ? 

enfant (S/T) … … Au fil des ans, elles ont évolué, 

sous des types nouveaux. 

Commentaire 14 38 Les travaux de Gingerich illustrent ce que Darwin 

défendait : 

… … les preuves de l’évolution abondent autour de nous, si 

nous décidons de les chercher. 

… … Les os ne sont pas la seule preuve de l’évolution des 

baleines. 

… … Leur ascendance se voit également dans la manière 

dont elles se déplacent. 

… … Frank Fish étudie comment nagent les mammifères 

marins actuels. 

… … Il cherche comment ils ont évolué, 

… … en étudiant la manière dont ils se déplacent dans 

l’eau. 

Frank Fish (V/O) 15 18 Voilà la vraie question : 

Frank Fish (interview) … … comment passe-t-on d’un mammifère terrestre, qui se 

déplace sur 4 pattes, à un animal tel que le dauphin, 

qui ne possède pas de pattes et qui est parfaitement 

adapté pour nager dans les océans ? 

Commentaire 15 34 Mêmes si les baleines ressemblent à des poissons, 

elles ne nagent pas comme eux. 

… … Les poissons nagent en fléchissant leur épine dorsale 

d’un côté sur l’autre, comme ce requin. 

… … Mais les mammifères nagent différemment. 

15 50 Cette loutre nage en faisant onduler son épine dorsale 

de bas en haut, 

… … exactement comme les baleines.

8 


… … Et, comme on peut le constater, les mammifères 

terrestres utilisent leur épine dorsale de la même 

manière, lorsqu’ils courent. 

… … Les baleines ont conservé dans l’eau leur façon de se 

déplacer originelle, et nous le voyons encore, 

… … 50 millions d’années plus tard. 

Neil Shubin (V/O) 16 25 En un sens, l’évolution n’a rien inventé de nouveau 

avec les baleines. Elle a remanié ou retouché les 

mammifères terrestres. 

Neil Shubin (interview) … … Cela revient à faire du neuf avec du vieux. Une sorte 

de recyclage. Et l’évolution agit ainsi sans arrêt au 

cours de l’histoire, pour tous les groupes d’animaux. 

Commentaire 16 43 Au départ, les baleines étaient des quadrupèdes 

terrestres qui vivaient il y a plus de 50 millions 

d’années. 

… … Mais les animaux terrestres étaient aussi le produit 

d’une transformation, 

… … bien plus ancienne. 

… … Il y a des centaines de millions d’années, il n’y avait 

aucun animal sur terre. 

Neil Shubin (V/O) 17 04 Auparavant, 

Neil Shubin (interview) … … nos ancêtres reculés vivaient dans l’eau. Donc, à un 

moment, il y a eu le passage de la vie dans l’eau, 

… … à la vie sur terre. 

… … Et c’est un changement énorme. 

Commentaire 17 17 C’est le moment où les poissons ont rampé hors de 

l’eau. 

Jenny Clack (V/O) 17 22 Si ces animaux n’avaient pas effectué cette transition, 

nous ne serions pas là aujourd’hui ; 

Jenny Clack (interview) … … il est donc capital de comprendre comment, quand, et, 

si possible où, s’est produit cette transition. 

Commentaire 17 35 Les premiers animaux à quitter l’eau ont vraiment 

initié quelque chose d’essentiel. 

… … Leurs descendants ont évolué dans les reptiles, 

… … les oiseaux, 

… … et les mammifères d’aujourd’hui. 

… … Et les origines communes de ces animaux sont 

toujours visibles, dans leurs corps. 

… … Comme nous, leur corps compte quatre membres. 

… … Ce sont tous des tétrapodes. 

Neil Shubin (V/O) 18 07 Cela signifie que tous ces animaux…

9 


Neil Shubin (interview) … … descendent d’un ancêtre commun qui possédait 

quelque chose de très similaire ou apparenté à des 

membres. 

Commentaire 18 20 Quel était cet ancêtre commun ? Et comment a-t-il 

quitté l’eau, il y a 370 millions d’années ? 

18 30 Ce sont là les questions auxquelles les paléontologues 

Neil Shubin et Ted Daeschler cherchent à apporter 

des réponses. 

… … Et ces falaises de Pennsylvanie recèlent peut-être des 

indices. 

Neil Shubin (S/T) 18 48 Belle journée pour [chercher] des fossiles. 

Ted Daeschler (S/T) … … Oui, super. 

Neil Shubin (S/T) … … Salut Doc, ça va ? 

3 e homme (S/T) … … Salut. 

Neil Shubin (S/T) … … On va essayer par là. 

Commentaire 19 00 Un endroit inattendu pour chercher des fossiles de 

tétrapodes. 

… … Mais les roches de ces montagnes datent de l’époque 

appropriée, 

… … elles se sont déposées à une ère précise de l’histoire : 

le dévonien. 

Neil Shubin (V/O) 19 16 Au dévonien, cet endroit était très différent. 

Neil Shubin (interview) … … Il se trouvait au sud de l’équateur. 

… … N’oubliez pas que les continents ne cessent de 

bouger. Et, à cette époque, le climat était tropical en 

Pennsylvanie. 

Commentaire 19 30 Il y a des centaines de millions d’années, les fossiles 

et les sédiments de ces couches se déposaient dans le 

lit du fleuve. 

Neil Shubin (interview) 19 40 On a ici un instantané de la vie dans un fleuve, il y a 

environ 370 millions d’années. 

Neil Shubin (V/O) 19 47 Voici des fossiles, des fossiles brisés… 

… … d’écailles, 

19 51 de dents. 

19 53 Ce petit os, là, c’est l’épine dorsale d’un requin 

épineux. 

Commentaire 19 59 La plupart des fossiles sont trop fragmentaires pour 

être utilisables. 

… … Mais, en 1995, à cet endroit précis, Daeschler a 

découvert un fossile qu’il n’avait jamais vu.

10 


… … Un petit os d’épaule, mais pas d’un poisson. 

… … C’était une épaule de tétrapode, vieille de 370 

millions d’années. 

… … Shubin et Daeschler avaient exhumé les restes d’un 

des premiers quadrupèdes de l’histoire. 

Ted Daeschler (V/O) 20 36 C’était la première preuve de l’existence de ces 

tétrapodes en Amérique du Nord. Ce qui était 

d’autant plus fascinant. 

Commentaire 20 48 Ils n’étaient pas au bout de leurs surprises. 

… … Comme ce tétrapode avait été trouvé dans le lit d’un 

fleuve, il vivait probablement dans l’eau. 

Neil Shubin (interview) … … Cette découverte était très surprenante, nous étions 

loin de pouvoir l’imaginer. 

Commentaire … … Pourquoi un animal doté de membres vivait-il dans 

l’eau ? 

… … On pensait que les membres résultaient d’une 

évolution, pour se déplacer sur terre. 

Jenny Clack (interview) 21 08 On pensait jadis que les poissons s’étaient d’abord 

échoués, 

… … puis qu’ils avaient développés des pattes. 

… … Maintenant, on pense que les tétrapodes ont d’abord 

développé des doigts, puis qu’ils ont quitté l’eau. 

Commentaire 21 22 Jenny Clack, de l’université de Cambridge, 

soupçonnait que les théories présentées dans la 

plupart des livres étaient fausses. 

Jenny Clack (interview) … … Ce que l’on voit dans les vieux manuels, dans les 

livres pour enfants et dans les musées, c’est la 

représentation d’un poisson, 

Jenny Clack (V/O) … … bloqué dans une mare en train de s’assécher, 

… … et qui tente de se hisser hors de l’eau. 

… … Cela paraît vraiment bizarre, si on y pense de manière 

objective. 

Commentaire 21 50 Pour Jenny Clack, il devait y avoir une meilleure 

explication. Mais où la chercher ? 

… … On connaissait seulement quelques fossiles des 

premiers tétrapodes, qui avaient presque tous été 

trouvés dans une partie reculée du Groenland, à la fin 

du siècle.

11 


… … Pour se guider, elle disposait uniquement d’une note 

dans le journal d’une expédition au Groenland, 

effectuée des années plus tôt. 

… … On y mentionnait des fossiles de tétrapodes, sur une 

montagne dont le nom n’était pas précisé. 

… … Jenny Clack s’est rendue au Groenland, afin de 

chercher ces ossements. 

Jenny Clack (V/O) 22 28 Nous avons fini par trouver l’endroit, sur le versant 

d’une montagne, à 800 m d’altitude. 

Commentaire 22 38 Jenny Clack a ramené 4 tonnes de roches. 

… … Et elle a passé quatre ans à les trier et à les examiner. 

22 46 Pour finir, elle disposait du plus complet squelette de 

tétrapode ancien. Cette découverte devait 

radicalement changer les manuels. 

Jenny Clack (interview) 22 54 Une des premières choses que avons trouvée, 

… … c’est ce membre antérieur. 

Commentaire 23 02 À l’extrémité de ce membre d’animal, il y avait une 

série d’os qui ne laissait aucun doute : 

… … une main. 

Jenny Clack (V/O) 23 10 C’est une reconstruction grandeur nature. 

Jenny Clack (interview) … … L’artiste a imaginé les couleurs et les yeux, 

… … mais le reste est aussi fidèle que possible. 

Commentaire … … Cet animal, l’Acanthostega, vivait clairement dans 

l’eau : 

… … il possédait une queue, comme un poisson, et des 

branchies, pour respirer dans l’eau. 

23 35 Mais l’extrémité de ses bras avait la forme d’une 

patte, et ce sont peut-être là les premières mains sur 

terre. 

Jenny Clack (V/O) 23 43 C’était un animal qui nageait, 

Jenny Clack (interview) … … nous ignorons s’il a pu avancer sur terre, mais il 

n’aurait pas pu marcher, dans le sens exact du mot. 

Jenny Clack (V/O) … … C’est essentiellement un poisson muni de doigts. 

Commentaire 23 58 La découverte de Jenny Clack était capitale. 

… … Elle prouvait que certains poissons possédaient des 

bras et des jambes dans l’eau. 

… … Ainsi, les tétrapodes n’avaient pas eu besoin de 

développer des membres après être passés sur terre. 

… … Leurs membres avaient déjà évolué,

12 


… … et contribué à leur survie hors de l’eau. 

… … La structure élémentaire des membres était donc en 

place depuis des millions d’années. 

Neil Shubin (V/O) 24 29 Voici le fossile de la nageoire 

Neil Shubin (interview) … … d’un poisson vieuxde 370 millions d’années, 

… … et le bras d’un homme. 

… … Dans le bras humain, on a : 

… … un os [l’humérus], 

… … puis deux os [le radius et le cubitus], le poignet et les 

doigts. 

… … Et qu’a-t-on dans cette nageoire ? 

… … On a un os, 

… … deux os, 

… … et même des petits os comparables à ceux du poignet, 

… … et des rayons qui se dégagent du reste de l’appendice. 

Exactement comme nos doigts et nos orteils. On 

trouve donc déjà, dans une nageoire de poisson d’il y 

a 370 millions d’années, un grand nombre des os 

utilisés dans un membre de tétrapode. 

Commentaire 25 14 Avec la structure déjà présente, la transition de 

nageoire à membre s’est faite par une série de petits 

changements, sur une période de millions d’années. 

Neil Shubin (V/O) 25 24 L’évolution n’a pas de buts. L’évolution n’essayait 

pas de créer des membres. Elle ne cherchait pas à 

pousser nos ancêtres lointains hors de l’eau. 

Neil Shubin (interview) 25 33 Ce qui s’est produit, c’est une série d’expériences. 

Commentaire 25 37 Dans les cours d’eau surpeuplés, où évoluaient les 

tétrapodes, la lutte pour la survie était féroce. 

Neil Shubin (V/O) 25 45 Ces petits cours d’eau fonctionnaient comme un 

moteur, ou un creuset, pour les changements de 


Commentaire 25 52 Les poissons ont expérimenté toutes sortes de 

stratégies de survie. 

… … Certains sont devenus prédateurs. 

… … Celui qui possédait cette mâchoire était un tueur, long 

de 4 m. 

… … Ses dents avaient la taille d’un crampon de voie 

ferrée. 

… … Des poissons plus petits ont développé des défenses 

complexes, comme cette cuirasse pesante.

13 


… … D’autres ont mis l’accent sur l’armement, comme 

cette épine pointue, qui dépassait du dos. 

26 32 Ces armes étaient des outils destinés à survivre dans 

un monde plein de dangers. 

… … Leurs nouvelles pattes ont peut-être offert aux 

premiers tétrapodes un autre moyen de survie. 

Neil Shubin (V/O) 26 44 Il s’agissait de se mettre à l’abri, d’aller sur terre. 

… … Et ce qui a permis à ces animaux de se mettre à l’abri, 

de sortir de l’eau, ce sont ces nouvelles 

caractéristiques, comme les membres. 

Commentaire 26 55 Ceux qui sont parvenus à s’échapper ont trouvé un 

monde totalement différent, 

… … rempli de perspectives. 

… … Le passage de l’eau à la terre n’était que l’ultime 

exemple de l’évolution expérimentant avec des 

formes radicalement nouvelles. 

… … Une transformation antérieure, peut-être la plus 

importante de toutes, s’est produite il y a un demimilliard 

d’années. 

… … Elle a conduit à tous les animaux, tels que nous les 

connaissons. 

Neil Shubin (interview) 27 35 L’évolution a « remanié » le poisson pour obtenir des 

membres. 

… … Mais le poisson possédait le bagage de son propre 

passé. 

… … Prenez un poisson : 

Neil Shubin (V/O) … … il a une tête, une queue et une série de nageoires entre 

les deux. 

… … C’est le plan de formation, la manière dont le corps 

est organisé. 

Neil Shubin (interview) … … Mais ce n’est qu’une manière de former les animaux. 

D’autres ont la forme d’un disque, 

Neil Shubin (V/O) … … comme les méduses. 

… … D’autres animaux ont plein de petites pattes. 

… … La question est alors : quelle sorte de 

« remaniement » a généré ces plans de formation ? 

… … Et là, on touche réellement à l’origine des animaux. 

Commentaire 28 17 Les fossiles nous apprennent que les animaux sont 

apparus sur terre, de manière soudaine, il y a environ 

570 millions d’années. 

… … Les scientifiques appellent cette transformation 

cruciale : 

… … l’explosion du Cambrien.

14 


Simon Conway Morris (V/O) 28 33 De fait, l’explosion du Cambrien est l’une des plus 

grandes avancées dans l’histoire du vivant. 

… … Il y a environ un demi-milliard d’années, 

brusquement tout change, et l’on a cette 

extraordinaire explosion de diversité. 

Simon Conway Morris (interview)… … Et cette apparition brutale des fossiles a donné cette 

expression : l’explosion du Cambrien. Et Darwin, 

comme toujours, s’est montré très franc : « C’est un 

problème pour ma théorie. Comment se fait-il que les 

animaux semblent surgir de nulle part, si 

soudainement ? » Et, dans une certaine mesure, c’est 

toujours un peu un mystère. 

Commentaire 29 04 La majeure partie de ce que l’on sait sur l’explosion 

du Cambrien est le résultat d’une seule découverte, 

peut-être la plus importante découverte de fossiles de 

l’histoire. 

… … En 1913, alors qu’il faisait de l’alpinisme dans les 

Rocheuses canadiennes, le paléontologue Charles 

Walcott a découvert une couche de schiste contenant 

des milliers de fossiles extraordinairement détaillés. 

… … Ces animaux, qui vivaient tous dans la mer, avaient 

été pris dans un gigantesque glissement de terrain 

sous-marin. Au cours des 500 millions d’années 

suivantes, le fond de l’océan qui avait enseveli ces 

fossiles s’est élevé, pour former le sommet d’une 

montagne. 

… … Walcott a extrait 60 000 fossiles du site, qu’il a 

appelé le Schiste de Burgess. 

… … Simon Conway Morris étudie les fossiles depuis plus 

de 30 ans. 

Simon Conway Morris (interview)30 03 C’est comme si vous aviez atterri sur une autre 

planète. On vous a donné un bateau de pêche et un 

filet, et vous avez eu le droit de lancer ce filet dans 

les profondeurs de l’océan, sans savoir ce que vous 

allez récolter. 

Commentaire 30 14 Certains animaux du Schiste de Burgess étaient bien 

connus. 

Simon Conway Morris (V/O) … … Voilà un des trilobites. On voit les parties molles du 

corps également conservées. 

Commentaire 30 22 Les trilobites sont des arthropodes disparus, des 

animaux au squelette externe.

15 


… … Les arthropodes actuels, comme les crabes, les 

homards, les insectes et les araignées descendent tous 

d’animaux semblables. 

… … D’autres animaux du Schiste de Burgess étaient 

curieux, étranges même. Ainsi, un animal à 5 yeux et 

une longue trompe. 

… … Un autre présente des piquants hérissés sur son dos. 

… … Un autre encore, un cercle de dents autour de la 

bouche. 

… … Pourtant, aussi étranges ces animaux puissent-ils 

paraître, ils sont étonnamment familiers. 

31 13 À l’instar des animaux vivants, ils possèdent des 

corps comprenant têtes, queues, appendices, 

… … des segments spécialisés effectuant des fonctions 

spécialisées. 

… … Tous les plans de formation des corps rencontrés dans 

la nature se trouvent ici. 

… … Tous les animaux qui ont vécu au cours du demimilliard 

d’années écoulé sont descendus de ces 

structures initiales. 

… … Peut-être verrons-nous même peut-être ici nos 

propres ancêtres. 

Simon Conway Morris (V/O) 31 47 Voici sans doute le joyau du Schiste de Burgess : 

Pikaia. 

Commentaire 31 52 Pikaia, un ver minuscule, est l’un des fossiles les plus 

rares du Schiste de Burgess. 

… … C’est le seul à posséder une corde dorsale interne qui 

ressemble à une colonne vertébrale. 

… … Cela signifie que les animaux comme Pikaia étaient 

peut-être les premiers ancêtres de tous les animaux à 

squelette. 

Simon Conway Morris (V/O) 32 10 Le fait est qu’il s’agit peut-être du précurseur du 

poisson, et finalement, à travers la longue histoire de 

l’évolution, de nous-mêmes. 

Simon Conway Morris (interview)32 19 Pourquoi l’explosion du Cambrien est-elle 

importante ? Pour des tas de raisons. Cela fait partie 

de notre histoire, c’est de là que nous venons. 

Simon Conway Morris (V/O) 32 26 C’est le moment où les animaux apparaissent. En 

remontant le temps, nous voyons se dérouler une 

partie de notre histoire. 

Neil Shubin (interview) 32 37 Qu’apprend-on en observant 600 millions d’années 

d’histoire de la faune ? 

Neil Shubin (V/O) … … L’évolution a remanié « l’essence du mammifère » 

pour produire des baleines,

16 


… … de même qu’elle a remanié « l’essence du poisson » 

pour produire des tétrapodes, 

… … Et elle a remanié « l’essence de l’animal » pour 

produire tous les plans de formation différents que 

nous connaissons. 

32 58 Tous ces animaux différents sont des variations du 

même thème, répété encore et encore. 

… … La question était alors : mais que « remaniait » donc 

l’évolution ? 

… … Une des découvertes les plus remarquables de ces 20 

dernières années a été de montrer que l’évolution ne 

« remanie » pas les corps. 

Neil Shubin (interview) 33 19 Elle « remanie » la recette, le mécanisme qui 

construit les corps. Quelle est cette recette, quel est ce 

mécanisme ? Ce sont les gènes. 

Commentaire 33 32 Les fossiles enregistrent les changements dans les 

corps des animaux sur la durée. Mais l’on ignorait 

comment les corps changeaient. 

33 41 La compréhension du mécanisme génétique de 

l’évolution a pris la quasi-totalité du XX e siècle. 

33 47 Quand les scientifiques ont finalement trouvé 

l’explication, ils ont été stupéfaits. 

Par sa simplicité. 

33 59 Un des principaux acteurs de cette découverte est 

Mike Levine. 

Mike Levine (V/O) 34 03 Je crois que, j’étais, euh, un gamin bizarre. 

Mike Levine (interview) … … J’ai toujours aimé les insectes. 

… … Nous avions une grande cour derrière la maison, et 

j’y allais sans cesse. C’était une sorte de réserve. 

Mike Levine (V/O) 34 14 Et, euh, je jouais avec les insectes. Je le disséquais, je 

les manipulais. 

… … Ce sont vraiment mes meilleurs souvenirs. 

Commentaire 34 22 L’affinité de Levine avec les insectes l’a amené à 

étudier la biologie. Un insecte l’a particulièrement 

fasciné : la drosophile. 

Mike Levine (V/O) 34 32 Elle a un temps de reproduction très court, et présente 

des tas de structures. 

Mike Levine (interview) … … On ne le dirait pas en la voyant de loin. Mais si on 

observe au microscope une drosophile adulte , on est 

stupéfait 

Mike Levine (V/O) … … par le nombre d’antennes, par la complexité de leurs 

ailes, par la structure de leurs yeux. 

Mike Levine (interview) 34 52 Mais leurs embryons, c’est autre chose. J’adore les 

embryons.

17 


Commentaire 34 56 Les scientifiques se doutaient depuis longtemps que 

les embryons détenaient la clef de l’évolution des 

animaux. 

… … Au début, les embryons forment un agglomérat de 

cellules quasi-identiques. 

… … Puis, très vite, l’embryon se divise en segments 

spécialisés, 

… … qui se développent pour donner la forme définitive de 

l’animal. 

… … Qu’est-ce qui contrôle ce processus ? Comment les 

embryons savent-ils quelle forme prendre ? 

… … Une des premières personnes à se pencher sur ces 

questions était William Bateson, un naturaliste du 

XIX e siècle. 

… … D’après Bateson, le squelette des animaux révélait 

une structure sous-jacente de segments répétés. 

… … Il a également observé que les animaux se 

développaient parfois avec certains segments au 

mauvais endroit. 

Sean Carroll (V/O) 36 06 Des insectes avec des pattes mal situées, 

… … des crabes chez qui la pince est transformée en patte, 

Sean Carroll (interview) … … des pythons avec des anneaux supplémentaires, des 

grenouilles avec une vertèbre cervicale en plus, et 

ainsi de suite. 

Commentaire 36 19 Pour Bateson, ces erreurs de développement 

signifiaient que le schéma directeur de l’animal avait 

été perturbé. 

36 28 Il ignorait comment cela se produisait, mais il se 

disait que ces changements aléatoires dans le 

développement des corps alimentaient peut-être 


36 39 Autour de 1940, les scientifiques étudiant les 

drosophiles savaient comment occasionner des 

perturbations dans le schéma directeur du 

développement, 

36 50 en soumettant des embryons en cours de croissance à 

des radiations... et à du poison. 

Matthew Scott (V/O) 36 56 Ce faisant, 

Matthew Scott (interview) … … ils ont trouvé des drosophiles avec des structures 

d’ailes modifiées, des pattes modifiées, d’autres qui 

avaient une partie du corps au mauvais endroit, ou un 

double d’une partie normale du corps à un autre 

endroit.

18 


Commentaire 37 16 Les scientifiques avaient déclenché ces changements 

en endommageant l’ADN des drosophiles. 

… … Au sein de chaque cellule de l’embryon en 

développement, il y a une molécule, en forme de 

chaîne, appelée ADN. 

… … Les expériences ont montré que l’ADN amenait 

l’embryon à se diviser en segments. 

… … Mais comment ? 

37 42 Les scientifiques commençaient juste à saisir que 

l’ADN lui-même était composé de segments : les 

gènes. Chaque gène semblait jouer un rôle différent. 

… … La question était alors : comment les gènes 

donnaient-ils forme au corps ? 

38 01 Un chercheur, le Dr Edward Lewis, de Caltech, a 

étudié cette question pendant 30 ans, 

… … en croisant des milliers de drosophiles. 

… … Ses travaux l’ont conduit à une thèse discutée. Il a 

proposé qu’un mécanisme étonnamment simple 

donnait forme aux embryons. 

… … La croissance de chaque segment de la drosophile 

était dirigée par un seul gène. 

38 29 Une petite série de gènes, une sorte de trousse à outils 

génétique, semblait concevoir le corps entier. 

Matthew Scott (interview) 38 38 Il a regardé ces gènes et dit : « Celui-ci affecte cette 

partie du corps, celui-ci la partie suivante, et celui-là 

la partie suivante. » C’était une observation 

stupéfiante. 

Commentaire 38 49 Stupéfiante, parce qu’elle semblait trop simple. 

Personne n’avait pensé que de simples gènes fussent 

assez puissants pour contrôler une chose aussi 

complexe que la structure du corps. 

39 01 Les sceptiques ont répliqué que la thèse de Lewis 

n’était que des conjectures. 

39 06 Bien sûr, il n’avait jamais vu les gènes, puisque les 

techniques pour le faire n’existaient pas. 

Mike Levine (interview) 39 13 Des années 20 aux années 70, il n’était pas possible 

d’isoler physiquement un gène spécifique. 

Heureusement, c’est devenu possible à l’époque où 

moi, j’étais étudiant. Et nous avons été nombreux à 

nous dire, « Super ! », nous pouvons enfin nous 

plonger là-dedans et identifier ces gènes mystérieux. 

Commentaire 39 37 Mike Levine a fait appel à son confrère Bill 

McGinnis.

19 


39 43 Le premier gène qu’ils ont étudié portait un nom 

étrange, antennaepedia, ce qui signifie « patteantenne 

». 

… … On pensait que ce gène contrôlait la croissance des 

pattes. 

… … Quand le gène fonctionnait mal, les drosophiles 

avaient des pattes qui croissaient au mauvais endroit, 

… … sur leur tête, à la place des antennes. 

40 11 Chez les drosophiles normales, les pattes poussent sur 

la section médiane, le thorax. 

… … Levine et McGinnis ont donc décidé de traquer le 

gène dans le thorax d’un embryon normal. 

Mike Levine (interview) 40 26 On attendait que l’antennaedepia soit actif, qu’il 

apparaisse dans le thorax en développement de 

l’embryon. Mais comment savoir ? 

Commentaire 40 36 Levine et McGinnis devaient réaliser quelque chose 

de totalement nouveau. 

40 42 Il leur fallait trouver un moyen de voir un gène en 

action. 

Mike Levine (interview) 40 47 Nous voulions marquer le gène, 

… … et c’était un travail très laborieux. 

Commentaire 40 53 Ce projet exigeait des méthodes nouvelles qui 

n’avaient jamais été testées. 

William McGinnis (V/O) 40 58 Au début, ça ne marchait pas, et il y avait certains 

problèmes techniques à résoudre. 

Commentaire 41 08 L’équipe devait trouver l’équilibre entre des tests 

radioactifs et des enzymes toxiques. Trop de l’un ou 

de l’autre détruirait les embryons. 

Mike Levine (V/O) 41 21 Le processus n’était guère agréable, au quotidien. 

Incroyablement répétitif. 

Commentaire 41 32 Cela prit des mois de tâtonnements. 

William McGinnis (V/O) 41 40 Les gens nous disaient souvent, « Essayez autre 

chose, il y a peu de chance que ça marche. 

William McGinnis (interview) … … Vous perdez votre temps. » Mais nous avons 

continué. 

Commentaire 41 56 Et, un soir, le travail a enfin porté ses fruits.

20 


Mike Levine (V/O) 42 11 Et, à ce moment-là, 

… … nous avons vu le gène, qui apparaissait comme une 

bande au milieu d’un embryon. Cela n’avait jamais 

été observé. 

Commentaire 42 33 Le gène de l’antennaepedia agissait comme un 

interrupteur, qui mettait en marche le segment de 

l’embryon qui allait devenir le thorax. 

… … Les implications étaient ahurissantes. 

… … Si des gènes uniques, comme l’antennaepedia, 

pouvaient définir des segments entiers d’un animal, 

ces gènes agissaient comme les architectes du corps. 

42 50 Et si l’un de ces gènes se mettait en marche au 

mauvais endroit, il en résulterait des changements 

saisissants sur le corps. 

… … Apparemment, Levine et McGinnis avaient découvert 

les gènes responsables de l’évolution des corps. 

… … Mais certains doutaient encore. Le travail avait 

seulement porté sur des drosophiles. 

… … Et les autres animaux ? Utilisaient-ils le même 

mécanisme pour former leurs corps ? 

43 20 Une réponse allait venir de Suisse. 

… … En 1994, Walter Gehring, de l’université de Bâle, a 

isolé le gène qui déclenche la croissance des yeux 

chez les drosophiles. 

43 35 Ce gène a été appelé « Eyeless », car les drosophiles 

qui en étaient privé n’avaient pas d’yeux. 

… … Gehring connaissait un gène qui agissait de la même 

façon chez la souris. 

43 50 Il s’est demandé si les deux gènes n’étaient pas 

identiques. 

Walter Gehring (V/O) 43 55 Nous avons testé ce point 

Walter Gehring (interview) … … en prenant le gène de la souris et en le plaçant dans 

les drosophiles. Pour voir si les drosophiles pouvaient 

comprendre le message de la souris. 

Commentaire 44 08 Gehring a remplacé le gène des yeux de la drosophile 

par le gène des yeux de la souris. 

Walter Gehring (V/O) 44 14 À la surprise générale, 

Walter Gehring (interview) … … le gène de la souris fonctionne parfaitement et produit 

un œil complexe chez la drosophile. 

Commentaire 44 27 La drosophile a développé des yeux normaux de 

drosophile en utilisant un gène d’une souris.

21 


… … Non seulement les deux animaux utilisent le même 

mécanisme, 

… … mais ils utilisent le même gène. 

44 40 C’était le mécanisme qui expliquait l’apparition 

d’ailes supplémentaires, 

… … les pattes surgissant sur les têtes, 

… … et les animaux difformes de Bateson. 

… … La recherche, qui avait duré un siècle, était achevée. 

Le moteur génétique de l’évolution du corps se 

révélait être un petit nombre de gènes puissants. 

Sean Carroll (V/O) 45 06 Cela signifie que 

Sean Carroll (interview) … … l’évolution est un processus plus simple que nous le 

pensions. 

Sean Carroll (V/O) … … Surtout si l’on songe à l’énorme diversité des formes 

qui existent. 

… … On a d’abord cru que cela impliquerait toutes sortes 

de créations nouvelles, recommençant à chaque fois à 

zéro, encore et encore. Désormais, nous savons que 

Sean Carroll (interview) 45 28 l’évolution agit avec des paquets d’information et 

s’en sert de manières nouvelles et différentes, par des 

combinaisons nouvelles, sans être nécessairement 

obligée d’inventer quelque chose de 

fondamentalement nouveau, mais en créant des 

combinaisons nouvelles. 

Commentaire 45 42 Soudain, on comprenait la standardisation des formes 

chez les animaux. 

… … Les animaux se ressemblent parce qu’ils utilisent tous 

la même série de gènes pour développer leurs corps, 

… … une série de gènes hérités d’un ancêtre commun qui 

vivait il y a très longtemps. 

Matthew Scott (interview) 46 02 Et ce que nous voyons maintenant chez tous les 

animaux ne sont que des variations d’un plan de 

formation [du corps] qui existait il y a un demimilliard 

d’années. 

Sean Carroll (interview) 46 10 Et une seule conclusion s’impose, c’est que si toutes 

ces branches possèdent ces gènes, il faut remonter à 

la base, qui est le dernier ancêtre commun de tous les 

animaux ; et l’on déduit que celui-ci devait posséder 

ces gènes. Ainsi, le rayonnement de l’espèce animale, 

le foisonnement de sa diversité ont été 

essentiellement alimentés par la même série de gènes.

22 


Commentaire 46 35 Edward Lewis a partagé le prix Nobel en 1995 pour 

ses découvertes sur l’ensemble universel des gènes 

[de contrôle] du développement des animaux. 

Mike Levine (interview) 46 48 Cela a constitué une énorme surprise, pour ceux qui, 

comme ma mère, disaient : « Oh mon Dieu, un ver de 

terre et une souris ? Un ver de terre et moi, nous 

avons des choses en commun ? » Mais les 

scientifiques aussi ont été surpris de voir cette 

conservation profonde du mécanisme de 

développement des embryons, chez toutes les 

différentes espèces d’animaux. 

Commentaire 47 13 Et nous ? 

… … Nos corps se développent à partir des mêmes gènes 

qui participent au développement de tous les 

animaux. 

… … Cependant, nous sommes différents. 

… … Aucun autre animal n’invente et ne créé comme nous. 

… … Nous semblons tellement spéciaux, qu’il est difficile 

de croire que nous ne sommes pas une exception dans 


… … Mais nous ne sommes pas une exception. 

… … La transformation qui a mené jusqu’à nous ne 

différait pas des autres transformations. 

… … En ce qui nous concerne, le tournant crucial semble 

s’être produit lorsque nos ancêtres sont descendus des 

arbres et ont commencé à marcher sur deux jambes. 

Don Johanson (V/O) 48 04 On ne sait pas exactement quand, ni même où, nos 

ancêtres sont devenus des bipèdes. On pense que cela 

remonte à plus de 4 millions d’années. 

Don Johanson (interview) 48 13 Quand ces ancêtres sont descendus des arbres et ont 

commencé à exploiter des ressources de nourriture 

sur le sol et dans les habitats terrestres, un des 

éléments très utile aurait été de libérer leurs membres 

antérieurs, leurs mains, afin de pouvoir ramasser et 

porter de la nourriture sur des longues distances. 

… … Quand cela s’est produit, cela a ouvert un éventail 

extraordinaire de possibilités et de perspectives. 

Commentaire 48 38 La plupart des hominidés bipèdes ont disparu. 

… … Mais une branche a évolué, pour avoir un cerveau 

plus grand. 

… … Cette branche a fini par conduire aux humains 

modernes. 

… … Comment cette transition cruciale, de la marche sur 

deux jambes, a-t-elle commencé ?

23 


… … Liza Shapiro, de l’université du Texas, cherche des 

indices chez les primates actuels. 

Liza Shapiro (V/O) 49 02 Quand on regarde des fossiles, 

Liza Shapiro (interview) … … tout ce que l’on a, c’est un tas d’ossements. Une 

entité immobile. Cela ne vous apprendra pas grand 

chose, à moins de chercher des analogues vivants. 

Liza Shapiro (V/O) … … Si on prend des animaux vivants, on a les os, et l’on 

peut observer la manière dont ils se déplacent. 

Commentaire 49 24 Par leurs mouvements, les makis actuels 

s’apparentent aux primates arboricoles qui vivaient il 

y a 50 millions d’années. 

… … Nous n’avons pas évolué à partir des makis, mais ce 

sont peut-être eux qui ressemblent le plus à nos 

ancêtres lointains. 

Liza Shapiro (V/O) 49 38 Quand on essaie de reconstruire le scénario sur la 

manière dont les humains sont devenus des bipèdes à 

partir de cet ancêtre, il faut connaître le point de 

départ, 

Liza Shapiro (interview) … … si l’on veut expliquer non seulement comment cette 

transition s’est faite, mais aussi pourquoi. 

Commentaire … … Aujourd’hui, Liza Shapiro recueille des informations 

sur le type de mouvements d’un maki. 

… … De petits réflecteurs ont été délicatement placés sur le 

dos de l’animal. 

… … Une multitude de caméras infra-rouges vont suivre le 

maki pendant qu’il traverse ce pont improvisé. 

… … Bien sûr, amener un maki à faire ce que l’on veut sur 

commande ne va pas sans mal. 

… … Finalement, l’animal parvient de l’autre côté. 

… … On peut maintenant analyser le déplacement de la 

colonne vertébrale du maki en 3 dimensions. Les 

informations révèlent que la colonne vertébrale est 

extrêmement flexible 

… … et capable de plusieurs sortes de mouvements. 

Liza Shapiro (V/O) 50 59 Les makis marchent comme des quadrupèdes, mais 

ils peuvent aussi très bien sauter. 

Commentaire 51 05 Comme ces makis, les premiers primates se 

déplaçaient probablement de plusieurs façons – 

… … à quatre pattes, 

… … en grimpant aux arbres, 

… … et en sautant même, en position verticale.

24 


… … Ils n’étaient pas limités à un seul type de mouvement. 

Ils peuvent donc servir de point de départ à un grand 

nombre d’études sur l’évolution. 

… … Mais nous n’avons pas été les seuls à évoluer à partir 

de cet ancêtre lointain : 

… … il en va de même pour la plupart des primates actuels. 

… … L’animal vivant le plus proche de nous est le 

chimpanzé. 

… … Nous n’avons pas évolué à partir du chimpanzé. 

… … Mais nous partageons un ancêtre commun récent. 

… … C’est pourquoi notre ADN est quasi-identique au 

leur, 

… … et pourquoi notre squelette compte le même nombre 

d’os, disposés presque de la même façon. 

… … Mais ces quelques différences physiques qui nous 

séparent ont eu une importance capitale. 

… … Les chimpanzés ne marchent pas sur deux pieds. 

… … Ils ont développé un type de déplacement différent, et 

appuient sur le sol le dos de la main. 

Don Johanson (interview) 52 29 S’appuyer sur le dos de la main est une adaptation 

très spéciale que l’on observe 

Don Johanson (V/O) … … chez les chimpanzés et les gorilles. C’est une 

adaptation destinée à marcher sur le sol. 

Commentaire 52 41 Cette façon de marcher était une expérience de 

l’évolution aussi pertinente que la marche sur deux 

pieds. 

52 48 Mais cette différence dans les façons de marcher, qui 

a peut-être affecté nos cerveaux, se reflète dans de 

légères particularités de notre squelette. 

Don Johanson (V/O) 52 58 Voici les squelettes de deux primates actuels. Vous 

reconnaissez sûrement celui-ci, car c’est un squelette 

semblable au vôtre et au mien. C’est celui d’un être 

humain. 

53 06 Mais ce squelette plus petit appartient à l’un de nos 

parents les plus proches, un chimpanzé. 

Don Johanson (interview) 53 14 Nous avons commencé à marcher sur deux jambes, et 

cela a entraîné toute une série de modifications dans 

le squelette. 

Don Johanson (V/O) 53 20 Chez l’homme, la moelle épinière sort de la base du 

crâne et descend directement, 

… … au lieu de sortir par l’arrière du crâne. 

Don Johanson (interview) 53 29 Le bassin est de forme très différente, 

Don Johanson (V/O) … … celui du chimpanzé est long et étroit, 

… … le nôtre est court et tassé. 

Don Johanson (interview) … … Nous marchons avec les genoux rapprochés,

25 


… … les chimpanzés marchent avec les genoux écartés. 

Don Johanson (V/O) … … Ce sont des différences mineures. 

Don Johanson (interview) … … Le genre de remaniement effectué par l’évolution. 

Don Johanson (V/O) … … Pour nous transformer en bipèdes. 

Commentaire … … Et si nos ancêtres ne s’étaient pas redressés ? 

… … Et s’ils avaient pris un autre tournant sur le chemin 

qui conduisait à l’homme ? 

Don Johanson (V/O) 54 09 Une des grandes méprises que commettent la plupart 

des gens, 

… … c’est de croire que parce nos ancêtres se sont 

redressés, il était presque inévitable 

Don Johanson (interview) … … que nous soyons là aujourd’hui, que cette espèce 

égocentrique, l’Homo Sapiens, évolue de cette 

manière. Or nous voyons que l’évolution a œuvré 

avec nous de la même manière qu’avec chaque 

organisme de cette planète. 

… … Nous en sommes arrivés là 

Don Johanson (V/O) … … par une série de hasards, d’adaptations spécifiques, de 

possibilités choisies. Je crois que lorsque nous 

examinons nos origines, 

Don Johanson (interview) … … nous saisissons à quel point il est extraordinaire que 

l’homme soit là, et capable de réfléchir sur son passé. 

Neil Shubin (interview) 54 53 Alors nous ne serions pas uniques ? Bien sûr que non. 

Nous sommes capables de raconter cette histoire. 

… … Et c’est très important, 

Neil Shubin (V/O) … … que l’évolution, que la vie, soit parvenue au point où 

elle est en mesure de raconter cette histoire. 

Adaptation : Alain Gnaedig

26 


Liste des intervenants, par ordre d’apparition à l’écran : 

Neil SHUBIN, Université de Chicago [attention, il parle très vite] 

Philip GINGERICH, Université du Michigan 

Frank FISH, Université de West Chester 

Jenny CLACK, Université de Cambridge 

Simon CONWAY MORRIS, Université de Cambridge 

Mike LEVINE, Université de Californie – Berkeley 

Sean CARROLL, Université du Wisconsin, - Madison 

Matthew SCOTT, Université de Stanford 

William McGINNIS, Université de Californie – San Diego 

Walter GEHRING, Université de Bâle [lui, il parle très lentement, avec un fort accent suisse] 

Dan JOHANSON, Université d’Arizona 

Liza SHAPIRO, Université du Texas – Austin

EVOLUTION - EPISODE 1 Neil Shubin (V/O) 00 04 C'est un ... - Arte

Create successful ePaper yourself

Delete template?

Save as template?