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S'ANEANTIR OU S'EPANOUIR : - ResearchSpace@Auckland - The ...

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CHAPITRE DEUX<br />

MADAME GERVAISAIS ET LES SCRUPULES<br />

[...] elle retombait à la sévérité du Livre qui commande<br />

le sacrifice des “affections désordonnées” ; et elle en<br />

arrivait à se reprocher ces transports, sans pouvoir<br />

trouver la règle qui pouvait être la mesure religieuse, le<br />

degré de l’amour permis aux mères. 1<br />

L’objet de ce chapitre sera Madame Gervaisais, héroïne du roman éponyme des<br />

frères Goncourt, paru en 1869, et basée sur la vie et le caractère de leur tante, Nephtalie de<br />

Courmont. 2<br />

Il faut avant de commencer notre analyse de ce roman faire quelques observations<br />

sur les origines du texte. Les questions usuelles se soulèvent sur les intentions des auteurs<br />

lorsqu'un roman incorpore des réminiscences : ici, celles de neveux dévoués à propos de la<br />

fin tragique de leur tante, celle-là même qui les avait initiés à l'Art. 3 La question des<br />

motivations qui poussent ces auteurs à écrire s'avère primordiale.<br />

L'intention avouée des frères Goncourt est de faire comprendre à leurs lecteurs, en<br />

exerçant leur grand talent d'auteurs, un fait scientifique, d’étudier la pathologie d'une<br />

névrose religieuse : « [l]es premiers nous avons été les écrivains des nerfs. » 4 Les frères<br />

sont fascinés par « ces maladies du foie, du cœur, des poumons, si liées et attenantes aux<br />

sentiments et aux idées du malade : toutes les révolutions de l’âme dans la souffrance du<br />

corps. » 5 Maria Watroba souligne le lien visible dans le roman entre émotion érotique et<br />

émotion religieuse, et y ajoute l’émotion artistique (de Jules), dont elle voit un reflet dans<br />

les extases non mystiques mais hystériques, voire tuberculeuses, de son héroïne, objet d’un<br />

déplacement des extases également hystériques de l’auteur rendu poète et (donc) femme<br />

hystérique par l’extrémisme de son émotion, sans doute exacerbée par la maladie qui le<br />

1<br />

Edmond et Jules de Goncourt, Madame Gervaisais (Paris, Flammarion et Fasquelle, [s.d.], (ci-après « Mme<br />

G »), p.217A.<br />

2<br />

Maria Watroba, « Madame Gervaisais, roman hystérique ou mystique ? », dans Nineteenth-Century French<br />

Studies, vol. 25 : N°s 1&2, Fall-Winter 1996-97, p. 155A. V. aussi Barbey d’Aurevilly, article cité, sans en<br />

donner le titre, par Gustave Geffroy dans son Postface à Mme G, paru dans Le Nain jaune, 7 mars 1869,<br />

recueilli dans Le Roman contemporain (Paris, Lemerre, éditeur, 1902), [ci-après « Geoffroy »], Mme G,<br />

p. 289D.<br />

3<br />

Geffroy, p. 289.<br />

4<br />

Edmond et Jules de Goncourt, Journal, 3 tomes (Paris, Robert Laffont, Bouqins, 1989) [ci-après :<br />

« Goncourt, Journal »] cité dans Geffroy, Mme G, p. 285A.<br />

5<br />

Goncourt, Journal, t.II, p. 151D, et note (1).<br />

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