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Escape #37

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28 |AdrenAline| <strong>Escape</strong> <strong>#37</strong><br />

Que de chemins parcourus depuis son enfance dans la<br />

campagne vaudoise. Après avoir entamé une carrière à<br />

l’aéroport de Genève, elle se lance à 21 ans dans le grand<br />

bain du freeride en acceptant une invitation pour à l’Xtrême<br />

de Verbier. Elle signe sa première victoire dès sa première<br />

participation et décide de s’engager totalement dans cette discipline. En<br />

parallèle de cette carrière professionnelle, elle s’initie à un autre rêve de<br />

gosse, le base jump. Déterminée, elle enchaîne les sauts d’avions afin<br />

d’acquérir les bonnes techniques de vol, puis peaufine sa maîtrise du pliage<br />

avant d’aller se jeter seule du haut d’un pont. Devenue aussi célèbre pour<br />

ses prouesses sur neige que dans les airs, Géraldine s’est aussi lancée dans<br />

les expéditions avec de nombreux exploits à la clef. Aujourd’hui, avec vingt<br />

podiums internationaux –dont trois titres à l’Xtrême de Verbier - et de<br />

nombreuses premières en base jump et wingsuit, la belle helvète s’est bâtie<br />

l’un des plus beaux palmarès des sports extrêmes. Consciente d’avoir vécu<br />

à 100% sa carrière de compétitrice, elle a désormais besoin de s’éloigner du<br />

tumulte du circuit pour laisser libre court à ses désirs d’aventure.<br />

<strong>Escape</strong> : Qu’est-ce qui t’a décidé à arrêter la compétition ?<br />

Géraldine : Ce qui m’a vraiment fait réfléchir, c’est notre dernière<br />

expédition en Antarctique. En rentrant, un mois avant l’Xtrême, j’étais<br />

fatiguée. Après deux mois d’expé où l’on ne mange pas forcément<br />

super équilibré, je suis rentrée avec des monstres carences. Je me suis<br />

rendu compte que soit tu fais de la compétition et tu as le temps de te<br />

préparer, soit tu fais des expés. Et puis, quand tu vis isolée pendant 2<br />

mois, au bout du monde et en harmonie avec la nature, et que tu rentres<br />

à Verbier en pleines vacances scolaires, le choc est total (rires). Tout le<br />

monde court partout, ça pousse pour rentrer dans les bennes, et puis<br />

tu te dis que dans 4 semaines tu as l’Xtrême. En plus, cette année-là, la<br />

météo n’était pas top, du coup, au sommet des Gentianes, ils disaient<br />

‘on annule, on n’annule pas’. Après, une fois au sommet, on te dit :<br />

“finalement on monte pas la porte, mais il faut y aller quand même.<br />

Et dans 3 min c’est à toi.” T’es trop décalée, t’es plus dans le truc. Et c’est<br />

vraiment là où je me suis dit que j’avais switché. Mes projets ont pris<br />

trop d’espace dans ma vie. Je ne suis plus faite pour la compétition.<br />

Raconte-nous cette expédition en Antarctique.<br />

On était un groupe de quatre : Sam Beaugey (son compagnon, NDLR),<br />

Manu Pellisier, Sébastien Collomb-Gros et moi. Le but, c’était de sauter<br />

depuis l’Holtanna pour effectuer le premier saut en base jump sur<br />

le continent Arctique, et puis, finalement, on a aussi réussi à ouvrir<br />

depuis l’Holstinnd. L’Holstinnd, c’est plus haut, c’est un saut de 1000<br />

mètres contre 800 mètres pour l’Holtanna. Ce sont vraiment des sauts<br />

incroyables. Quand tu vois ces parois, c’est comme des météorites<br />

tombées du ciel et plantées dans la glace. Et des couleurs grandioses<br />

tout le temps, comme tu trouves au nord de la Norvège : du rose, du<br />

violet. Et il ne fait jamais nuit, le soleil touche l’horizon et remonte. Par<br />

contre au niveau température, il faisait vraiment froid la nuit. Donc on<br />

essayait de faire le maximum de choses la journée pour pouvoir être<br />

au chaud dans nos tentes et duvets quand le froid tapait.<br />

Comment se sont passées les ascensions ?<br />

Sam, comme il sait tout faire, il venait à la fois pour grimper et pour voler.<br />

Manu, qui est très fort grimpeur et alpiniste, était son compagnon de<br />

cordée pour l’ascension. Collomb et moi, on était plus wingsuit et ride.<br />

On montait tous les quatre aux pieds des voies pour emmener le matos.<br />

Pour l’Holstinnd on avait 200 mètres de stat à monter, et 400 mètres pour<br />

l’Holtanna, ça devient vite lourd. Manu et Sam grimpaient et fixaient.<br />

Ils partaient légers et profitaient du jour constant pour enchaîner. Ils ne<br />

prenaient ni réchauds, ni rien, en espérant que ça ne fasse pas trop froid<br />

et que ça ne gèle pas dans les thermos. Pour l’Holstinnd, ils ont mis 10 h<br />

aller-retour, et pour l’Holtanna, 27 heures. En plus ils voulaient répéter<br />

une voie ouverte dix ans en arrière par une expé française, belge et suisse.<br />

Ce sont d’ailleurs les photos d’André Georges qui nous ont donné envie<br />

d’aller là-bas. Ils cherchaient cette voie super esthétique qui suit la proue<br />

de l’Holtanna. Ils sont tombés dessus après 4 ou 5 longueurs. Quand ils<br />

sont rentrés au camp de base, ils étaient dématés. Manu je crois qu’il a<br />

dormi pendant 30 h non stop.<br />

Et ensuite vous remontiez direct pour aller sauter ?<br />

Oui, on devait enchaîner assez vite pour aller ouvrir le saut derrière. Le<br />

problème là-bas, c’est le vent catabatique (vent gravitationnel produit<br />

par le poids d'une masse d'air froide dévalant un relief géographique,<br />

NDLR) qui souffle super fort. Comme le rocher est super coupant, ils<br />

avaient peur que les stats ne se fassent couper en tapant contre le rocher.<br />

Là-bas, on était vraiment loin de tout. Si on avait besoin d’un secours,<br />

le temps qu’on rentre au camp de base pour appeler la base scientifique<br />

la plus proche, qu’ils affrètent un avion, ça mettait vraiment beaucoup<br />

de temps. Sans compter que l’avion puisse décoller. Donc, il fallait<br />

vraiment faire super gaffe. Mais du coup, c’était une super expérience.<br />

Puis quand tu as rêvé d’un truc comme ça pendant des années et que,<br />

finalement, tu y es et que tu peux réaliser ton truc, c’est classe quoi.<br />

Vous étiez donc trois à voler, que faisait Manu ?<br />

Il nous donnait les conditions en bas. Parce que le vent catabatique, c’est<br />

n’importe quoi. Au sommet de la falaise, tu n’as pas du tout de vent,<br />

zéro, t’entend rien. Forcément parce que t’es à mille mètres au-dessus<br />

du sol. En fait, le vent catabatique est vraiment collé au sol, jusqu’à<br />

200 mètres d’altitude environ. Et ça peut venter jusqu’à 60-80 km/h.

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