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étendus, en ligne et dans l’ordre, à la même distance, bien<br />
rangés », avouera-t-il dans une interview réalisée quelques<br />
jours avant sa mort. Dans l’ivresse de la victoire, il n’avait<br />
pas vérifié les conditions de la descente.<br />
LE MYTHE FONDATEUR<br />
<strong>DE</strong> L’ALPINISME MO<strong>DE</strong>RNE<br />
La légende est faite. Dès lors, la Cervinomania s’empare<br />
de Zermatt. Le rite gagne d’abord la classe politique :<br />
pour prouver sa virilité et sa puissance, il est de bon ton<br />
d’affronter cette « nouvelle quête sublime de l’inutile », telle<br />
que la décrit le sociologue Paul Yonnet, l’un des grands<br />
connaisseurs de la littérature de montagne. « Les quatre<br />
morts de la tragédie du Cervin frappent les trois coups de<br />
l’alpinisme moderne : un louvoiement aux frontières de la<br />
mort. Le récit de Whymper est le mythe fondateur d’un<br />
rite sacrificiel de la connaissance de soi et de ses limites :<br />
les hommes ont découvert tout à coup ce qu’ils pouvaient<br />
venir chercher en montagne. » Dès 1891, le village suisse<br />
compte déjà un millier de lits et une voie ferrée. En 1896,<br />
le ministre de la guerre américain Henry Stimson y fait ses<br />
armes avec Joseph Pollinger, l’un des plus grands guides de<br />
Zermatt, trois ans après la tentative manquée de Churchill.<br />
La montagne voit également défiler Achille Ratti, futur Pie XI<br />
(1889), le duc des Abruzzes (1892), le prince Louis d’Orléans<br />
(1898), Albert 1er de Belgique (1910), le duc d’Aoste (1925),<br />
le prince impérial du Japon Chichibu (1926), Ferdinand de<br />
Bulgarie (1933), Marie-José de Piémont, reine d’Italie en<br />
exil (1941)...<br />
À cinquante années de là, le « rocher superbe » s’est<br />
démocratisé : entre 1000 et 1500 alpinistes grimpent chaque<br />
été sur ses pentes. Certains jours, ils sont plus de 100 à se<br />
bousculer au sommet. Et même si 500 grimpeurs y ont laissé<br />
la vie, la fascination opère toujours avec la même puissance,<br />
même auprès des badauds de passage. Théophile Gautier<br />
fut de ceux là. Il confiera avoir quitté la Suisse « souffrant<br />
d’une courbature d’admiration ». <br />
45<br />
PAUL MOLGA<br />
LE MAGAZINE GRATUIT OUTDOOR / NUMERO 22 /<br />
ITINÉRAIRE<br />
L’ascension du Cervin n’est techniquement<br />
pas difficile pour un alpiniste<br />
moyen, mais l’itinéraire n’est pas évident,<br />
surtout de nuit : en s’écartant de<br />
la voie, le rocher devient de plus en plus<br />
délité, et certains passages sont soumis aux chutes de pierres. Il faut donc savoir aller<br />
vite sans prendre de risques.<br />
De Schwarzsee (2583m) suivre un large sentier qui mène au pied du ressaut rocheux<br />
appelé le «Hirli». Prendre le chemin qui conduit facilement au sommet de ce ressaut.<br />
De là, continuer le chemin jusqu’à la cabane de Hörnli (3260m) à deux heures. On peut<br />
dormir à l’hôtel à côté (tel : +41(0)27 967 2769 / +41(0)27 967 2264).<br />
Depuis la cabane, un sentier mène à l’attaque en quelques minutes. Gravir la première<br />
dalle facilitée par une corde fixe, puis suivre un sentier sous l’arête jusqu’à un premier<br />
couloir (attention, chutes de pierres) qu’on remonte sur quelques mètres avant de<br />
traverser une vire vers la gauche puis rejoindre une cheminée. Il faut alors suivre les<br />
traces du sentier un court instant et s’enfiler sur la droite par un système de ressaut<br />
qui se termine par une sorte de cheminée menant à une nouvelle vire que l’on suit<br />
jusqu’à traverser un second couloir. Des traces partent dans la face. Il faut les laisser<br />
et remonter par quelques gradins jusqu’à l’arête et une tour caractéristique qui sert<br />
de repère à la descente. On prend alors une vire qui remonte parallèlement à l’arête et<br />
on s’élève légèrement dans sa direction avant de repartir dans la face jusqu’au pied<br />
d’une tour. La contourner pour grimper par des rampes, des gradins puis des dalles<br />
qui conduisent à l’ancienne cabane de Solvay. Traverser quelques mètres à droite et<br />
gravir le ressaut vertical pour rejoindre l’arête qu’on suit jusqu’à la base de l’épaule.<br />
Des grosses broches de fer aident à l’assurage. Attention : on rejoint l’arête qui ouvre<br />
sur le gouffre de la face nord. La suite est évidente : l’arête mène au pied de la tête<br />
du Cervin qu’on gravi avec l’aide de cordes fixes jusqu’à la pente de neige menant au<br />
sommet à 4478 m.