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L<br />
’une est américaine, Gore-Tex, l’autre est néo-zélandaise,<br />
Icebreaker. La première maîtrise l’argumentation affûtée<br />
des seniors (elle vient de fêter ses cinquante ans), l’autre<br />
affiche la fougue impertinente d’une jeunesse dorée (elle<br />
n’a été créée qu’en 1994 et enregistre déjà 100 millions de<br />
dollars de chiffre d’affaires et une progression moyenne de<br />
40% par an...). On connaît les qualités protectrices de la<br />
fibre de Nemours ; on (re)découvre celle de la laine Mérinos<br />
employée par la firme des antipodes. Deux façons de voir<br />
la protection contre le froid (l’imper-respirabilité synthétique<br />
d’un côté, la respirabilité naturelle de l’autre). Deux discours<br />
pour convaincre.<br />
« La force de Gore-Tex réside dans la performance et la<br />
qualité de ses laminés, défend Edouard Frignet, le responsable<br />
de la division textile de Gore France. En écho,<br />
la communication répond par des visuels impactants et<br />
des slogans qui tranchent ». On se souvient de la première<br />
campagne européenne du groupe qui prétendait « changer<br />
la vie » de ceux qui s’habillait en Gore-Tex. Ce seront ensuite<br />
les promesses fortes : « Vous serez toujours au sec »,<br />
« L’important est à l’intérieur »… Les visuels de mauvais<br />
temps s’accumulent. Un slogan provoc « Quelle belle journée<br />
! » colle sa signature sous toutes les situations météo.<br />
Enveloppés de Gore-Tex, même les pieds en redemandent,<br />
sourires d’orteil à l’appui !<br />
Dans la lignée, Windstopper adopte le discours technique,<br />
osant présenter en 2004 « une respirabilité extrême vue<br />
par la peau » avec un fond de micropores sur des photos<br />
de sport outdoor. Avec la crise, l’heure est maintenant<br />
aux valeurs. « Notre slogan Experience More (Vivez plus<br />
d’expérience) dépasse les promesses d’étanchéité et de<br />
respirabilité pour mettre en avant des notions de confort<br />
et de symbiose avec la nature », poursuit Edouard Frignet.<br />
Comparatif à l’appui : la résistance de l’écorce de séquoia<br />
géant, l’efficacité du plumage des oiseaux…<br />
Aux antipodes, Icebreaker entend « briser la glace entre la<br />
nature et l’homme, et explorer les relations intimes qui les<br />
49<br />
POUR GARANTIR SON APPROVISIONNE-<br />
MENT, ICEBREAKER A SIGNÉ UN CONTRAT<br />
PLURIANNUEL AVEC LES PRODUCTEURS À<br />
UN TARIF 30 % PLUS<br />
ÉLEVÉ QUE LES PRIX<br />
DU MARCHÉ. UN<br />
INVESTISSEMENT <strong>DE</strong><br />
50 MILLIONS <strong>DE</strong> DOL-<br />
LARS POUR CETTE<br />
SOCIÉTÉ QUI RÉALISE<br />
100 MILLIONS <strong>DE</strong><br />
DOLLARS D’ACTIVITÉ,<br />
À 80 % HORS <strong>DE</strong> SON<br />
PAYS.<br />
LE MAGAZINE GRATUIT OUTDOOR / NUMERO 24 /<br />
HONNÊTETÉ, LIBERTÉ,<br />
ENGAGEMENTS<br />
PERSONNELS,<br />
COLLÉGIALITÉ… SUR 96<br />
GRAN<strong>DE</strong>S ENTREPRISES<br />
ÉVALUÉES EN FRANCE,<br />
WL GORE EST LA<br />
<strong>DE</strong>UXIÈME CLASSÉE<br />
COMME CELLES OÙ IL<br />
FAIT BON TRAVAILLER.<br />
PLUS <strong>DE</strong> 200 MARQUES UTILISENT LES TEXTILES<br />
<strong>DE</strong> LA SOCIÉTÉ QUI RÉALISE 2,1 MILLIARDS <strong>DE</strong><br />
DOLLARS <strong>DE</strong> CHIFFRE D’AFFAIRES<br />
unis », selon son fondateur Jeremy Moon. Au cœur de la<br />
campagne pub, les photos de Rob Achton dérangent à<br />
cause du rapprochement parfois troublant des genres. Mais<br />
elles interpellent. Pour figurer la symbiose sous-jacente au<br />
fait de porter de la laine, l’artiste s’est inspiré des images<br />
de la mythologie : homme arborant fièrement des cornes,<br />
femmes aux oreilles de moutons, eden partagé avec les<br />
ovins, minotaures… « Cette année, le décor figure également<br />
un mélange entre les univers où évoluent nos produits,<br />
de la montagne aux forêts vierges. C’est Amazeland,<br />
l’Amazone près de chez nous », explique le photographe<br />
néo-zélandais.<br />
Icebreaker n’est pas à un paradoxe près. Organisée industriellement,<br />
l’entreprise puise sa matière première auprès<br />
des familles isolées de bergers. « Notre usine à fibre compte<br />
120 fermes dans les Alpes néo-zélandaises qui produisent<br />
un total d’un millier de tonnes de laine par an. La meilleure<br />
qui soit pour réguler la température du corps », poursuit<br />
Jeremy Moon. Partant de là, l’entreprise produit deux millions<br />
de pièces textiles (des t-shirts pour<br />
l’essentiel) qui sont toutes tracées à<br />
l’aide d’un « Baacode » permettant<br />
de remonter – via Internet - jusqu’à<br />
l’élevage d’origine. « Cette traçabilité<br />
est essentielle pour raconter l’histoire<br />
de la famille et du lieu où vit le produit<br />
». Le mouton mérinos est élevé<br />
à plus de 1800 mètres d’altitude. Sa<br />
laine est un remarquable isolant l’hiver,<br />
mais elle respire durant les mois<br />
chauds. Avantage supplémentaire :<br />
elle détruit naturellement les odeurs.<br />
« En absorbant jusqu’à 35% de son<br />
poids en humidité, la fibre de mérinos<br />
permet d’assécher comme nul<br />
autre la couche d’air entre la peau et<br />
le vêtement », assure Jeremy Moon.<br />
Portée à même la peau, la laine peut<br />
en gratter certains. Assurément,<br />
celle d’Icebreaker démange tous<br />
les marchés.<br />
PAUL MOLGA