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L'évaluation sommative et ses rôles multiples - Faculté des sciences ...

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L’évaluation <strong>sommative</strong><br />

<strong>et</strong> <strong>ses</strong> <strong>rôles</strong> <strong>multiples</strong><br />

Gérard Scallon (1999)<br />

Deuxième révision: mai 2000<br />

Département <strong>des</strong> fondements <strong>et</strong> pratiques en éducation<br />

<strong>Faculté</strong> <strong>des</strong> <strong>sciences</strong> de l’éducation, Université Laval<br />

Dans les écrits francophones européens, on utilise de plus en plus l'expression<br />

"évaluation certificative". Au Québec, l'adjectif "<strong>sommative</strong>" a été adopté d'abord<br />

comme traduction libre du terme anglais. Il a été ainsi utilisé <strong>et</strong> toléré comme un<br />

néologisme. Le qualificatif est ambigu <strong>et</strong> suggère, à première vue, l'idée de somme.<br />

Était-ce là une façon de désigner l'évaluation continue qui procède de plusieurs<br />

résultats chiffrés cumulés en cours de route pour donner une somme ou un total.<br />

Et si on donne à l'évaluation <strong>sommative</strong> le sens d'une évaluation terminale, d'autres<br />

problèmes surgissent. <strong>L'évaluation</strong> <strong>sommative</strong>, telle que menée dans le cours de la<br />

formation <strong>des</strong> individus, peut être à la fois au terme <strong>et</strong> au début d'un processus. Par<br />

exemple, <strong>des</strong> résultats de fin d'année (évaluation <strong>sommative</strong>) peuvent servir à<br />

l'entrée d'une autre année pour prescrire <strong>des</strong> activités de rattrapage (évaluation<br />

diagnostique). Pour l'instant <strong>et</strong> pour un certain temps encore, on va se perm<strong>et</strong>tre de<br />

qualifier indifféremment l'évaluation de "<strong>sommative</strong>" ou de "certificative", tout en<br />

étant conscient que l'évaluation certificative recevra tôt ou tard <strong>ses</strong> l<strong>et</strong>tres de<br />

noblesse.<br />

Introduction<br />

Pendant de nombreu<strong>ses</strong> années, le discours de l’évaluation <strong>des</strong> apprentissages a été<br />

confiné aux examens de fin d’année, comme cela se passait au Québec, avant 1964, au<br />

temps du Département de l’Instruction publique. Les préoccupations d’ordre théorique<br />

visaient particulièrement les instruments de mesure à utiliser lors de ces moments<br />

fatidiques. Il s’agissait alors d’accorder le diplôme de fin d’étude primaire ou de fin d'étude<br />

secondaire ou encore de décider du passage d’un élève d'un degré à l'autre à l'intérieur<br />

d'un même niveau. Sans aucun doute, l’évaluation occupait un espace beaucoup plus<br />

grand mais les procédés utilisés n’étaient pas traités comme ils le sont aujourd’hui.


La reconnaissance de deux fonctions bien identifiées de l’évaluation nous est venue de<br />

Scriven (1967) au regard de l’évaluation <strong>des</strong> moyens d’enseignement: l’évaluation<br />

formative, pour ce qui est d’ajuster les diver<strong>ses</strong> étapes d’une démarche pendant le<br />

processus même d’élaboration d’un produit <strong>et</strong> l’évaluation <strong>sommative</strong>, pour ce qui est<br />

d’attester de la qualité du produit dans sa phase finale. C’est c<strong>et</strong>te typologie qui a été<br />

transposée par Bloom, Hastings <strong>et</strong> Madaus (1971) à l’évaluation <strong>des</strong> apprentissages en y<br />

ajoutant une fonction reconnue de longue date: l’évaluation diagnostique.<br />

Un parallèle entre deux applications de la même<br />

typologie<br />

En premier lieu, il apparaît intéressant de dresser un parallèle entre la notion d’évaluation<br />

<strong>sommative</strong> telle qu’entendue par Scriven <strong>et</strong> celle qui a été transposée à l’évaluation <strong>des</strong><br />

apprentissages. Dans l’esprit de Scriven, <strong>et</strong> cela est très vraisemblable, l’évaluation<br />

<strong>sommative</strong> survient au moment où l’élaboration d’un produit (programme d’étude ou<br />

programme d’intervention) est complètement terminée. En poursuivant l’idée de l’auteur,<br />

on peut penser à un rapport définitif décrivant un proj<strong>et</strong> , acheminé en plusieurs<br />

exemplaires imprimés à <strong>des</strong> autorités compétentes. Aucune r<strong>et</strong>ouche n’est envisagée <strong>et</strong> la<br />

décision sera prise d’accepter le proj<strong>et</strong> en tout ou en partie ou encore de le refuser<br />

globalement .<br />

Ces caractères de "terminal" <strong>et</strong> de "définitif" de l’obj<strong>et</strong> de l’évaluation <strong>sommative</strong> émergent<br />

avec assez d’évidence de la position de Scriven. Mais il y a plus! Les auteurs du proj<strong>et</strong> tel<br />

que décrit dans notre exemple, c'est-à-dire les responsables de son élaboration, qui y ont<br />

participé, qui ont réalisé en cours de route les correctifs qui s’imposaient (évaluation<br />

formative) ne sont pas les mêmes (ou ne devraient pas être les mêmes) que ceux qui sont<br />

responsables de l’évaluation <strong>sommative</strong>.<br />

Lorsque l’obj<strong>et</strong> de l’évaluation <strong>sommative</strong> est l’apprentissage, la transposition de la<br />

typologie de Scriven n’est pas aussi simple qu’elle n’en paraît. On doit comprendre que<br />

Bloom, Hastings <strong>et</strong> Madaus (1971) devaient avoir pour souci que l’évaluation <strong>sommative</strong><br />

<strong>des</strong> apprentissages puisse s’accorder à une pratique qu'ils connaissaient déjà <strong>et</strong> par<br />

laquelle <strong>des</strong> pri<strong>ses</strong> d’information sont réalisées bien avant que l’on ait un produit fini,<br />

définitif. Sinon, l’évaluation <strong>sommative</strong> surviendrait à la toute fin de la formation <strong>des</strong><br />

individus, lorsque ceux-ci atteignent un âge très avancé.<br />

Une transposition non réussie<br />

Les deux caractères de la typologie de Scriven ne se prêtent pas facilement à l'évaluation<br />

<strong>des</strong> apprentissages ou à celle <strong>des</strong> élèves.<br />

Premièrement, dans une bonne majorité de systèmes éducatifs, l’idée d’une prise<br />

d’information rigoureusement terminale est pratiquement exclue lorsqu’il s’agit<br />

d’évaluer <strong>des</strong> apprentissages.<br />

Deuxièmement, il est difficile, voire pratiquement impossible, de séparer les <strong>rôles</strong><br />

d’évaluation au point de s’assurer que les personnes chargées d’évaluation<br />

<strong>sommative</strong> seront différentes de celles chargées de la formation <strong>et</strong> de l’évaluation<br />

formative (comme le suggère Scriven pour l'évaluation <strong>des</strong> moyens d'enseignement).


Dans le monde scolaire en général, on a confié aux enseignants la double responsabilité<br />

de l’évaluation formative <strong>et</strong> de l’évaluation <strong>sommative</strong>. C’est un premier suj<strong>et</strong> de réflexion<br />

que d’examiner de près s’il y a là un conflit d’intérêts!<br />

PARALLÈLE: l’évaluation <strong>sommative</strong> selon...<br />

SCRIVEN BLOOM <strong>et</strong> al. a<br />

obj<strong>et</strong>: moyens d’enseignement apprentissages<br />

moment:<br />

lorsque le produit<br />

est fini<br />

pendant <strong>et</strong> à la fin de la<br />

période de formation<br />

responsables:<br />

autres que ceux de<br />

l’év. formative<br />

les mêmes:<br />

év. form. <strong>et</strong> év. som.<br />

a.- C’est aussi une position traditionnelle qui relève de l’évaluation continue.<br />

En bref, l’évaluation <strong>sommative</strong> <strong>des</strong> apprentissages ne peut renvoyer à une pratique<br />

d’évaluation exclusivement terminale <strong>et</strong> les enseignants ne peuvent être dégagés<br />

<strong>des</strong> responsabilités qui s’y rattachent. L’évaluation <strong>sommative</strong> continue <strong>et</strong> la<br />

responsabilité <strong>des</strong> enseignants sont deux aspects qui demandent à être justifiés.<br />

Précisions additionnelles au suj<strong>et</strong> de l'évaluation<br />

<strong>sommative</strong> terminale<br />

Rappelons que c<strong>et</strong>te pratique se reconnaît à l'utilisation d'examens de fin d'année (ou de<br />

fin de programme si c'est la période de temps considérée). Examens, travaux, exercices<br />

passés en cours d'année ou en cours de période ne comptent pratiquement pas. Le sort<br />

<strong>des</strong> individus, leur attestation d'étude ou leur diplôme dépendent presque exclusivement<br />

de leur performance à l'examen terminal. C<strong>et</strong>te pratique soulève de nombreu<strong>ses</strong> difficultés<br />

que corrige l'évaluation <strong>sommative</strong> continue dont il sera question à la section suivante.<br />

C<strong>et</strong>te évaluation terminale n'a pas que <strong>des</strong> côtés négatifs. Elle intéresse ceux <strong>et</strong> celles qui<br />

veulent à tout prix obtenir un portrait récent de chaque individu tel qu'il se présente au<br />

terme d'une longue période de formation. C'est là un avantage très recherché que ne<br />

possède pas l'évaluation continue cumulative qui rassemble, en un total arithmétique, une<br />

multitude de portraits plus ou moins lointains. L'idée de portrait récent refait de plus en<br />

plus surface avec l'approche par compétences.


1.- À la défense de l’évaluation <strong>sommative</strong> continue<br />

Si, par rapport à une longue période de formation ou d’enseignement <strong>et</strong> d’apprentissage,<br />

l’évaluation <strong>sommative</strong> était rigoureusement terminale, on s’approcherait alors<br />

substantiellement du concept d’évaluation <strong>sommative</strong> tel qu’entendu par Scriven au regard<br />

de l’évaluation <strong>des</strong> moyens d’enseignement. Tel n’est pas le cas <strong>et</strong> nombre de systèmes<br />

éducatifs ont adopté, depuis longtemps, une pratique d’évaluation continue dont la raison<br />

d’être semble se perdre dans la nuit <strong>des</strong> temps. La notion même d’évaluation continue a<br />

été traitée pour la première fois, de façon directe, dans un ouvrage de De Landsheere paru<br />

en 1974. Plusieurs auteurs américains y ont fait également allusion. Pour appuyer c<strong>et</strong>te<br />

pratique on trouve essentiellement trois ordres de justifications.<br />

• Éviter le bachotage (ou la procrastination).<br />

Dans un contexte où l’évaluation (officielle) est terminale, certains élèves ont<br />

tendance à rem<strong>et</strong>tre à la toute fin, presque à la veille <strong>des</strong> examens, le travail <strong>et</strong> les<br />

efforts qu’ils auraient du répartir tout au long de la période d’enseignement <strong>et</strong><br />

d’apprentissage.<br />

• Assurer un meilleur échantillonnage <strong>des</strong> éléments d’observation.<br />

Pour ce qui est de l’éventail <strong>des</strong> questions ou problèmes à poser ou <strong>des</strong> tâches<br />

complexes à faire accomplir comme procédés d’évaluation, on ne peut comparer ce<br />

que peut contenir un seul examen terminal <strong>et</strong> plusieurs examens partiels disséminés<br />

en cours de route. En évaluation continue, le temps d’examen <strong>et</strong> l’échantillonnage<br />

<strong>des</strong> questions sont substantiellement plus élevés que ceux que l’on pourrait<br />

associer à un examen terminal. C’est sans doute dans le cadre de ce raisonnement<br />

que l’on peut miser sur les deux à la fois dans une pratique d’évaluation continue:<br />

examens partiels coiffés d’un examen terminal.<br />

• Réduire l’anxiété<br />

Le fait de savoir que le passage d’un degré à l’autre ou l’obtention d’un diplôme sont<br />

tributaires d’un seul examen terminal est une source importante d’anxiété pour<br />

plusieurs élèves, <strong>et</strong> fort probablement une source de démotivation. Dans une<br />

succession d’examens partiels les résultats obtenus sont souvent les signes avantcoureurs<br />

d’un échec tout en étant <strong>des</strong> stimulants pour apporter <strong>des</strong> correctifs<br />

dont les résultats seront connus lors d’examens partiels subséquents. L’eff<strong>et</strong> surprise<br />

est réduit d’autant.<br />

En bref, l’évaluation <strong>sommative</strong> qui serait menée de façon rigoureusement terminale<br />

comporte plusieurs eff<strong>et</strong>s pervers tant chez les élèves que du point de vue métrologique<br />

(qualités <strong>des</strong> instruments utilisés), eff<strong>et</strong>s qui semblent être corrigés par une pratique<br />

d'évaluation continue.<br />

2.- Impliquer les enseignants dans l’évaluation <strong>sommative</strong><br />

L’évaluation <strong>sommative</strong> <strong>des</strong> apprentissages serait-elle mieux servie si elle était<br />

réservée à <strong>des</strong> experts, à <strong>des</strong> personnes qui s’y consacreraient pleinement ou<br />

encore si elle était sous la responsabilités de personnes autres que les<br />

enseignants? On laisserait ainsi plus de temps aux enseignants pour s’occuper<br />

d’enseignement, d’apprentissage ou de formation tout en évitant quelque conflit d’intérêt.<br />

La question ne se pose pas avec l’évaluation formative <strong>et</strong> le problème soulevé touche


principalement l’évaluation <strong>sommative</strong>.<br />

Il n’y a pas de réponse "tout ou rien" à la question soulevée. Au Québec, le ministère de<br />

l’Éducation intervient dans plusieurs programmes d’étude du primaire <strong>et</strong> du secondaire<br />

avec <strong>des</strong> épreuves uniques (secondaire), <strong>des</strong> épreuves obligatoires de fins de cycle <strong>et</strong> <strong>des</strong><br />

épreuves d’appoint. Ce sont là <strong>des</strong> pratiques d’évaluation "<strong>sommative</strong>" (utilisons encore le<br />

terme pour l’instant) dont la source est externe par rapport à une classe ou à une école. La<br />

responsabilité est partagée avec les établissements scolaires, ce qui amène une part de<br />

responsabilité assumée par les enseignants. Le portrait à dresser est loin d’être négatif <strong>et</strong><br />

ce, pour les raisons suivantes.<br />

1.- Les enseignants connaissent bien leurs élèves <strong>et</strong> sont plus en mesure que d’autres<br />

professionnels de porter <strong>des</strong> jugements éclairés, notamment pour ce qui est du passage<br />

d’un degré scolaire à un autre ou du passage du primaire au secondaire.<br />

2.- Les enseignants de plusieurs établissements scolaires (notamment au Québec) sont<br />

encadrés (équipes disciplinaires) pour réaliser l’évaluation <strong>sommative</strong>. Ils ont accès à <strong>des</strong><br />

gui<strong>des</strong> d’évaluation, à <strong>des</strong> modèles d’instruments, voire à <strong>des</strong> recueils déjà prêts à être<br />

utilisés (p. ex., la Banque d’instruments de mesure (BIM) produite par la Société GRICS).<br />

3.- Enfin, les programmes d’étu<strong>des</strong> doivent être transposés en activités quotidiennes à<br />

faire vivre aux élèves, ce qui amène <strong>des</strong> adaptations inévitables de l’évaluation<br />

pédagogique à toutes sortes de circonstances. Par rapport à une source externe, <strong>et</strong> de ce<br />

point de vue, l’enseignant demeure la personne la plus compétente pour assumer une<br />

bonne part de l’évaluation <strong>sommative</strong>.<br />

Les buts <strong>multiples</strong> de l’évaluation <strong>sommative</strong><br />

Il ne faudrait pas penser que la fonction <strong>sommative</strong> de l’évaluation renvoie à une façon<br />

stéréotypée voire unique de faire les cho<strong>ses</strong>. Les examens à visée <strong>sommative</strong>, qu’ils<br />

soient pris isolément ou groupés ensemble dans une pratique d’évaluation continue,<br />

peuvent servir à diver<strong>ses</strong> fins. Bloom, Hastings <strong>et</strong> Madaus (1971) <strong>et</strong> Bloom, Madaus <strong>et</strong><br />

Hastings (1981) ont été les premiers à le reconnaître. Voici les buts spécifiques pour<br />

lesquels on utilise <strong>des</strong> examens dits sommatifs dans l’esprit de ces auteurs (1981, pages<br />

88-93).<br />

L’attribution de notes (gra<strong>des</strong>) souvent exprimées en l<strong>et</strong>tres.<br />

(attribution qui peut être critériée ou normative)<br />

La prédiction de la réussite d’un cours subséquent.<br />

(recherche <strong>des</strong> composantes critiques d’un examen )<br />

La détermination du point d’entrée dans un cours subséquent.<br />

(un recouvrement avec la fonction diagnostique de l’évaluation)<br />

L’information en r<strong>et</strong>our aux étudiants.<br />

(un recouvrement avec la fonction formative;<br />

il s’agit d’un feed-back d’une tout autre nature).<br />

La certification (attestation, confirmation) d’habil<strong>et</strong>és <strong>et</strong> de compétences<br />

(le domaine <strong>des</strong> compétences minimales - - - résultat séparé pour chaque cellule d’un<br />

tableau de spécifications).


Jusqu’ici, c’est l’élève qui est obj<strong>et</strong> d’évaluation. Dans certains cas, le but de l’évaluation<br />

<strong>sommative</strong> peut être de comparer <strong>des</strong> groupes d’élèves quant aux apprentissages<br />

réalisés. C’est le groupe qui devient alors obj<strong>et</strong> d’évaluation.<br />

Il est important de signaler que la préparation <strong>des</strong> instruments doit être adaptée à chacun<br />

de ces buts. Dans certains cas, on doit chercher à amplifier les différences individuelles à<br />

cause de l’approche normative. En d’autres cas il faudra découper les objectifs d’un cours<br />

de façon telle que l’on puisse déterminer un point d’entrée significatif. Enfin, l’attestation de<br />

compétences exige une définition claire <strong>des</strong> objectifs d’apprentissage visés par la<br />

démarche d’évaluation (voir Bloom, Madaus <strong>et</strong> Hastings, 1981, p. 93).<br />

Dans un article traitant d’instrumentation à développer pour diver<strong>ses</strong> fonctions de<br />

l’évaluation, Cardin<strong>et</strong> (1984) a décrit diver<strong>ses</strong> formes de bilans dont la généralité est plus<br />

grande que ceux établis en évaluation formative. Il apparaît donc que ces bilans<br />

intéressent la méthodologie de l’évaluation <strong>sommative</strong>. En voici quelques uns qui ont été<br />

décrits par l’auteur:<br />

- - - le bilan effectué à la fin d’une boucle d’apprentissage pour déterminer l’élément<br />

constitutif d’un objectif global maîtrisé par un élève;<br />

- - - le contrôle du niveau terminal d’intégration d’un objectif. (bilan qui correspond le mieux<br />

à la demande sociale de certification <strong>des</strong> compétences - - - page 107)<br />

- - - le contrôle d’un objectif opérationnel unique (épreuve de maîtrise);<br />

- - - le contrôle d’un ensemble d’objectifs (le tableau de spécifications est cité comme l’un<br />

<strong>des</strong> outils propres à ce type de bilan - - page 103);<br />

- - - les bilans individuels ou collectifs.<br />

D’un point de vue plus technique, Cardin<strong>et</strong> (1986) a identifié deux ba<strong>ses</strong> distinctes pour la<br />

certification. Si l’on veut rendre compte d’apprentissages relevant d’un programme officiel<br />

("formation définie à l’avance"), on parlera d’évaluation par objectifs. Si on veut apprécier<br />

une formation obtenue en dehors <strong>des</strong> programmes officiels, on parlera de reconnaissance<br />

<strong>des</strong> acquis. Ce sont deux perspectives distinctes pour l’évaluation <strong>sommative</strong> <strong>et</strong> l’auteur a<br />

fait état de nombreu<strong>ses</strong> difficultés qui leur sont spécifiques <strong>et</strong> qui doivent être surmontées.<br />

Signalons que c’est dans le contexte de la reconnaissance <strong>des</strong> acquis, lorsqu’un adulte<br />

reprend la route de l’école ou qu’un élève d’une classe régulière change d’établissement<br />

que survient la notion de "passeport de formation" ou de "portefeuille de compétences".<br />

La justification de l’appellation "certificative"<br />

Dans un article documenté sur le suj<strong>et</strong>, <strong>et</strong> à l’instar de plusieurs auteurs qui l’ont précédé,<br />

Tourneur (1985) préconise l’appellation "évaluation certificative". L’auteur affirme que, de<br />

tous les buts reconnus de l’évaluation <strong>sommative</strong> (notation, attestation, feed-back, <strong>et</strong>c.), la<br />

certification <strong>des</strong> compétences constitue son rôle le plus spécifique <strong>et</strong> le plus important. (p.<br />

11). Il y aurait donc là l’explication d’origine de l’expression "évaluation certificative".<br />

Tourneur reconnaît deux fonctions principales que remplit la certification: une fonction<br />

externe <strong>et</strong> une fonction interne. La certification externe s’intéresse aux compétences<br />

telles qu’on veut les voir démontrer au terme de la formation <strong>et</strong> telles que reliées à la vie<br />

sociale <strong>et</strong> au monde professionnel. La certification interne vise à attester les<br />

apprentissages à divers moments, dans le but de s’assurer que la personne est en mesure<br />

de progresser dans sa formation.


En considérant plusieurs points de vue, Tourneur a dressé un parallèle entre les deux<br />

fonctions, sous forme de tableau. On voit bien que les décisions ne sont pas les mêmes.<br />

En certification interne, il s’agit d’adm<strong>et</strong>tre l’étudiant dans une classe, un cycle ou dans une<br />

formation subséquente. En certification externe, il s’agit d’accorder un diplôme (électricien,<br />

ajusteur, médecin, pour prendre les exemples de l’auteur). Du point de vue <strong>des</strong> obj<strong>et</strong>s<br />

souhaitables de la mesure, il y a aussi <strong>des</strong> différences importantes entre les deux<br />

fonctions. En certification interne, ce sont les objectifs intermédiaires <strong>et</strong> terminaux<br />

d’intégration (un concept introduit par De K<strong>et</strong>ele en 1983) qui sont visés. En certification<br />

externe, ce sont <strong>des</strong> situations réelles ou simulées (représentatives de la profession). Nous<br />

nous approchons ici de l’authentic as<strong>ses</strong>sment <strong>des</strong> auteurs américains.<br />

En conclusion<br />

Dans les ouvrages anglo-saxons, l’évaluation <strong>sommative</strong> est de moins en moins<br />

évoquée. Nombre d’auteurs font maintenant allusion à la notion d’as<strong>ses</strong>sment <strong>et</strong><br />

plus particulièrement à celle d’authentic as<strong>ses</strong>sment à la suite <strong>des</strong> travaux de<br />

Wiggins (1989). Là encore, on sent un certain malaise à conserver le vocabulaire de<br />

l’évaluation <strong>sommative</strong>. L’as<strong>ses</strong>sment est une entreprise beaucoup plus englobante,<br />

beaucoup plus complexe <strong>et</strong> repose sur une multiplicité de procédés de collecte<br />

d’informations. Le terme n’est pas facile à traduire <strong>et</strong> le mot "appréciation" a été<br />

quelque fois utilisé dans les textes francophones. C’est trop peu pour dégager une<br />

tendance manifeste.<br />

Ce qu’il faut r<strong>et</strong>enir de c<strong>et</strong> exposé, c’est que l’évaluation <strong>sommative</strong> renvoie à une<br />

multitude de fonctions qui ne doivent pas être confondues à celle qui est<br />

caractéristique de l’évaluation formative. Lorsque menée en cours de formation, son<br />

caractère "sommatif", entendu dans le sens rigoureux du terme, disparaît quelque<br />

peu pour faire place à <strong>des</strong> usages qui la rapprochent de l’évaluation formative. Il ne<br />

s’agit pas de se substituer à c<strong>et</strong>te dernière mais d’entr<strong>et</strong>enir avec elle <strong>des</strong> liens de<br />

complémentarité. L’important est de maintenir le cap sur la qualité de la formation <strong>et</strong><br />

sur la justesse <strong>des</strong> décisions à prendre pour faire progresser les individus.<br />

RÉFÉRENCES<br />

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Summative Evaluation of Student Learning. New York: McGraw-Hill Book. Co.<br />

Bloom, B. S., Madaus, G. F. & Hastings, J. T. (1981). Evaluation to Improve Learning. New<br />

York: McGraw-Hill Book. Co.<br />

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Cardin<strong>et</strong>, J. (1986). De nouvelles ba<strong>ses</strong> pour la certification. Neuchâtel: Institut romand de


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De K<strong>et</strong>ele, J. M. (1983). Objectif <strong>et</strong> évaluation: comparaison <strong>et</strong> confrontation de quelques<br />

terminologies utilisées. Louvain-la-Neuve: Laboratoire de Pédagogie expérimentale.<br />

De Landsheere, G. (1974). Évaluation continue <strong>et</strong> examens. Précis de docimologie (3e<br />

édition). Bruxelles-Paris: Labor-Nathan.<br />

Scriven, M. (1967). The M<strong>et</strong>hodology of Evaluation, In Perspectives of Curriculum<br />

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http://www.grics.qc.ca<br />

Tourneur, Y. (1985). La certification <strong>des</strong> compétences. Mesure <strong>et</strong> évaluation en éducation,<br />

7(4), 9-20.<br />

Wiggins, G. (1989). Teaching to the (authentic) test. Educational Leadership. 46(7), 41-47.

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