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LUNDI 30 MAI 2005<br />

<strong>france</strong> 11<br />

RÉFÉRENDUM DU 29 MAI<br />

Analyse Les résultats bouleversent les équilibres au sein même des partis et entraînent un remaniement ministériel<br />

Chacun va devoir<br />

se refaire un « non »<br />

Depuis quelques<br />

jours, les partisans<br />

du « oui »<br />

ne se faisaient<br />

plus d’illusions. Ce matin,<br />

le paysage politique français<br />

est chamboulé. « Si le<br />

“non” l’emporte, pronostiquait<br />

Michèle Alliot-<br />

Marie, ministre de la Défense,<br />

la France aura la<br />

gueule de bois. » Trois ans<br />

après le séisme du 21 avril<br />

2002, qui avait vu Jean-<br />

Marie Le Pen parvenir au<br />

second tour de la présidentielle,<br />

le « non » au référendum<br />

va redistribuer<br />

toutes les cartes. Seule<br />

certitude : le seul qui reste<br />

en place, c’est Jacques<br />

Chirac.<br />

S. POUZET / 20 MINUTES<br />

Matignon :<br />

cinq candidats en lice<br />

Que le « oui » ou le « non »<br />

l’emporte, le sort de Jean-<br />

Pierre Raffarin était semblet-il<br />

scellé depuis un moment.<br />

« Il nous dit qu’il avait hâte<br />

d’être au 29 mai pour retrouver<br />

une vie normale », assurait<br />

fin avril un proche du Premier<br />

ministre après une visite dans<br />

sa région Poitou-Charentes.<br />

Le « non » a en effet recruté<br />

une bonne partie de son électorat<br />

au sein des mécontents de<br />

l’action gouvernementale.<br />

Reste à savoir qui sont les successeurs<br />

possibles. Dominique<br />

de Villepin, en campagne depuis<br />

plusieurs mois, tient la<br />

corde. Vendredi, il a été convié<br />

à un petit déjeuner à Matignon<br />

avant d’être reçu à l’Elysée par<br />

le Président. Probablement<br />

pour parler de « nouvelle impulsion<br />

». Ce choix ne serait pas<br />

forcément bien perçu des parlementaires<br />

qui lui reprochent<br />

de ne pas être élu. Les autres<br />

candidats en lice : Philippe<br />

Douste-Blazy, Michèle Alliot-<br />

Marie, Jean-Louis Borloo et,<br />

bien sûr, Nicolas Sarkozy. Jean-<br />

Pierre Raffarin doit réunir son<br />

Rue Solferino,<br />

au siège du PS.<br />

gouvernement ce matin. « Le<br />

Premier ministre aura des<br />

choses à dire à ses ministres »,<br />

explique son entourage. Pour<br />

annoncer sa démission ?<br />

A gauche :<br />

le 21 avril 2002 en pire<br />

Scindé en deux camps bien distincts,<br />

le PS ne pourra pas faire<br />

l’économie d’un congrès fratricide.<br />

Après avoir soutenu le<br />

« oui », François Hollande<br />

peut-il toujours être le patron<br />

du PS ? C’est la question que<br />

tous les chefs de clan vont<br />

poser. Jusqu’ici, le premier secrétaire<br />

du Parti socialiste avait<br />

tout réussi : relever le parti<br />

après le 21 avril, le remettre<br />

en ordre de bataille puis gagner<br />

à nouveau des élections.<br />

Ce référendum réduit à néant<br />

cette reconstruction.<br />

Laurent Fabius a toujours dit<br />

qu’il ne voulait pas que le PS implose,<br />

mais il peut aujourd’hui<br />

prétendre en prendre les rênes.<br />

En pensant à ses ambitions pour<br />

le présidentielle de 2007, s’il<br />

parvient à rassembler la gauche<br />

autour de son nom. Dominique<br />

Strauss-Kahn soulève un autre<br />

problème : « Les partisans du<br />

“non” vont être malmenés<br />

car, en réalité, voter<br />

ne va rien changer et les<br />

attentes seront déçues. »<br />

Et conclut que « les<br />

chances du PS sont<br />

gravement atteintes pour<br />

2007 ».<br />

Un peu plus à gauche,<br />

Marie-George Buffet<br />

(PCF) et Olivier Besancenot<br />

(LCR) apparaissent<br />

comme les vainqueurs.<br />

Sauf qu’il leur<br />

sera difficile de poursuivre<br />

cette alliance<br />

contre-nature entre<br />

trotskistes et communistes.<br />

A l’UMP :<br />

des fissures visibles<br />

Ce scrutin découvre les<br />

fissures au sein d’une UMP<br />

qu’on présentait comme monolithique.<br />

Depuis plusieurs<br />

semaines, Nicolas Sarkozy faisait<br />

campagne du bout des<br />

lèvres. Ses déboires conjugaux<br />

l’ont encore davantage éloigné<br />

des débats. Au sein du<br />

parti de la majorité, tous les regards<br />

se tournent vers les élections<br />

de 2007. Aucun parlementaire<br />

UMP ne voudra<br />

payer les pots cassés de la politique<br />

gouvernementale et<br />

tous vont commencer à choyer<br />

leurs électeurs dans leur circonscription.<br />

L’UDF qui n’a pas réussi à faire<br />

entendre sa voix européenne<br />

lors de la campagne sort affaiblie<br />

de ce scrutin. C’est l’inverse<br />

pour Philippe de Villiers<br />

qui, une nouvelle fois, profite<br />

d’un scrutin européen pour redorer<br />

son blason. Il devra se<br />

souvenir qu’il n’a jamais réussi<br />

à capitaliser sur son nom pour<br />

les autres scrutins. Enfin,<br />

comme à son habitude, Jean-<br />

Marie Le Pen va tenter de<br />

prendre à son compte le résultat<br />

du vote, malgré une campagne<br />

plutôt discrète.<br />

David Carzon<br />

édito<br />

La France racornie<br />

C’est la France du repli, la France<br />

recroquevillée sur ses craintes qui a gagné<br />

ce référendum. Elle a succombé à des mois<br />

d’un discours social-pleurnichard dans<br />

lequel la réalité des faits avait cédé le pas<br />

à l’émotionnel collectif. Il suffisait qu’un<br />

patron voyou fasse travailler illégalement<br />

des étrangers, qu’un hurluberlu lance un site<br />

prônant le dumping à l’emploi, pour que<br />

les démagogues du « non » y voient le travail<br />

de la puissante tectonique néolibérale.<br />

Les médias leur ont donné un sérieux coup<br />

de main car, contrairement aux affirmations<br />

des défenseurs du « non », une grande partie<br />

de la presse et de l’audiovisuel a, simplement<br />

par ses hiérarchies éditoriales, largement<br />

contribué à nourrir le « non » (de gauche<br />

comme de droite, d’ailleurs).<br />

Il y avait des<br />

raisons de voter<br />

contre ce texte<br />

mais les avantages<br />

l’emportaient.<br />

par Frédéric Filloux<br />

Il y avait évidemment<br />

de bonnes raisons de<br />

voter contre ce texte.<br />

Au lieu d’être le fruit<br />

d’une vision,<br />

il est un salmigondis<br />

technocratique. Ce<br />

traité constitutionnel<br />

aurait dû être un cadre général, construit sur<br />

des valeurs communes au peuple européen,<br />

offrant des garanties d’avenir, de démocratie.<br />

Un peu comme la Constitution américaine<br />

qui repose sur sept articles, modifiés par<br />

27 amendements. Par comparaison, le traité<br />

européen ressemble à un contrat de<br />

500 articles, tellement alambiqués que<br />

chacun peut en toute bonne foi les brandir<br />

pour défendre des thèses opposées.<br />

Mais les avantages de ce texte l’emportaient<br />

largement, sur trois plans. En premier lieu,<br />

ce traité marquait un progrès ; il était plus<br />

démocratique, plus abouti, assurait une<br />

meilleure représentativité pour la France.<br />

Deux, c’était un instrument de défense<br />

collectif. Car la mythologie de l’exportation<br />

de notre modèle social ne tient pas la route.<br />

Il suffit de faire douze heures d’avion pour<br />

voir que le « marché » a gagné, et qu’il faut<br />

s’organiser pour en contenir les forces, sur<br />

la base de valeurs européennes communes.<br />

La troisième motivation était le stimulus que<br />

donnerait une Europe cohérente et puissante<br />

à des réformes que la classe politique<br />

française, par lâcheté et faiblesse, a retardé.<br />

La France donne l’image d’un pays<br />

en panne, où la parole des démagogues<br />

de tous bords l’a emporté sur ce qui aurait<br />

dû être un acte fondateur.

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