L'Europe et ses boat people - Peace Palace Library

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La coopération maritime à travers la Méditerranée 67 certains Etats méditerranéens ne sont pas défavorables à ce modèle de maintien de la paix, dans d’autres, qui le perçoivent comme un système contrôlé et utilisé de manière sélective par les pays riches et puissants, l’opposition politique pourrait y voir une manifestation de la diplomatie de la canonnière. Même le Maroc, qui accepte les grandes lignes de l’EUROMARFOR et a été invité à en observer les exercices, refuse de se laisser duper et de croire qu’il est possible de maintenir la paix et la sécurité en Méditerranée « grâce à la présence d’un simple policier dans la région » 113 . Seules des mesures économiques et politiques favorables pourront susciter dans ces pays une interprétation plus positive des questions de sécurité militaire. En outre, le potentiel de participation dans la sphère maritime est très asymétrique étant donné la prépondérance Europe/OTAN. Au niveau régional, les opérations maritimes multinationales ont été, pour la plupart, menées par des Etats européens et n’appartenant pas à la région (bien que l’Egypte ait été associée de près aux exercices BRIGHT STAR et CLEOPATRA). Envoyer un petit contingent de troupes pour une opération de maintien de la paix bénéficiant d’un vaste consensus est une chose, participer à un groupe de travail concernant une opération navale dans un environnement hostile en est une autre – et dans ce cas, les Etats du sud et de l’est de la Méditerranée manquent encore des capacités, de la formation et de l’équipement nécessaires. Néanmoins, dans un contexte considéré comme favorable et pour des missions incluant la protection des boat people (par exemple, la surveillance discrète des couloirs maritimes), les perspectives de coopération sont plus prometteuses. L’échange d’informations sur les trafics illicites en tous genres n’implique nullement des opérations conjointes, de nature militaire ou autre ; mais les Etats du sud et de l’est de la Méditerranée disposent de capacités de patrouille territoriale susceptibles d’être renforcées afin d’appliquer le concept AMAC à une coopération dans le domaine humanitaire 114 . 113 General Abdelhak El Kadiri, du Conseil national de défense marocain, cité dans le document 1543 de l’Assemblée de l’UEO, op. cit. dans note 111, p. 37. 114 Par exemple, Algérie : 3 frégates, 24 patrouilles côtières, 11 dragueurs de mines et environ 30 garde-côtes ; Egypte: 6 frégates, 43 navires côtiers , 10 dragueurs de mines, 19 hélicoptères navals ; Israël : 55 garde-côtes et 40 navires de patrouille ; Jordanie : 5 navires de patrouille ; Liban : 14 navires de patrouilles ; Libye : 2 frégates, 36 gardecôtes, 30 hélicoptères navals ; Morocco: 1 frégate, 26 garde-côtes ; Syrie : 2 frégates, 27 garde-côtes, 29 hélicoptères navals ; Tunisie : 23 garde-côtes. The Military Balance
68 L’Europe et ses boat people En conclusion, le PEM semble fournir un cadre de sécurité global pour la Méditerranée, au sein duquel les intérêts des Etats riverains en matière de sécurité - tout fragmentés qu’ils soient - pourraient être favorisés par des fonctions AMAC, surtout si la Charte du PEM est acceptée et développée. La question des réfugiés et migrants maritimes en ferait bien entendu partie. Comme l’indique l’accord italo-albanais, même une situation sécuritaire aussi instable que celle du sud-est de l’Europe n’interdit pas l’adoption de mesures de sécurité coopérative ; mais le phénomène de l’immigration par voie maritime en Méditerranée orientale, en Adriatique et au Maghreb/Machrek requiert des actions différentes auxquelles conviendraient des arrangements ad hoc. La sécurité coopérative à travers la Méditerranée s’oriente vers plusieurs directions prometteuses dignes d’être explorées. L’une d’elles consiste à persister dans la voie des mesures bilatérales, qui, comme dans le cas des exercices italo-maltais, pourraient constituer le fondement d’un réseau élargi ; une autre suit le schéma pilote du PEM pour la gestion des catastrophes naturelles, en faisant éventuellement appel à la formation de base de l’EUROMARFOR pour les situations humanitaires ; une autre possibilité encore est le recours à l’UE/O, et en particulier aux bons offices du Haut Représentant pour la PESC, dans le contexte de la « stratégie commune » pour la Méditerranée que les Etats membres doivent mettre en œuvre depuis la réunion ministérielle de l’UE tenue à Vienne en décembre 1998 115 . Des échanges d’informations, des exercices, une formation et une évaluation étroitement imbriqués pourraient avoir lieu dans le cadre de la future Charte du PEM, tandis que la coordination opérationnelle de certaines 1996/97, Oxford University Press for the International Institute for Strategic Studies, Oxford, 1996. 115 Conseil européen de Vienne, Conclusions de la présidence, 11-12 décembre 1998, paragraphes 74 et 116.
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