129 IMPORTANT ET PRECIEUX COFFRET DE VOYAGE AUX ARMES DE MADAME ADELAÏDE CONTENANTUN RARE SERVICE A THE CAFE EN PORCELAINE DE VINCENNES D’ EPOQUE LOUIS XV Important <strong>et</strong> précieux coffr<strong>et</strong> en maroquin rouge (1) doré aux « p<strong>et</strong>its fers» aux armes de Madame Adélaïde (2) , une <strong>des</strong> filles de Louis XV.Il est garni d’un rare service à thé – café en porcelaine tendre de VINCENNES (3) à fond partiel « bleu céleste » délimité par <strong>des</strong> feuillages en dorure gravée <strong>et</strong> orné de guirlan<strong>des</strong> de fleurs polychromes. Les prises <strong>des</strong> couvercles sont en forme de fleurs de camomille. Il se compose de : - d’une théière couverte « Hébert » à anse rocaille : l<strong>et</strong>tre - date « B » pour 1754, décorateur : Levé - HAUT. 13 CM - un pot à sucre couvert « Hébert – l<strong>et</strong>tre - date « C » pour 1755, décorateur : Levé HAUT. 11,5 CM - un pot à lait couvert « Hébert » : l<strong>et</strong>tre - date « C » pour 1755, décorateur : Levé (p<strong>et</strong>it choc au col) - HAUT. 13,5 CM - 6 tasses <strong>et</strong> soucoupes « Hébert », les anses <strong>des</strong> tasses en brins entrelacés : l<strong>et</strong>tre - date « B » pour 1754, décorateurs : Denis Levé, Taillandier <strong>et</strong> Bin<strong>et</strong> - HAUT. D’UNE TASSE : 6,5 CM - Une suite de six cuillers à café, modèle à spatule violon, fil<strong>et</strong>s <strong>et</strong> coquilles en argent le complète. Poinçon du maître - orfèvre : Sébastien IGONET, reçu maître en 1725 <strong>et</strong> actif jusqu’en 1766. Poinçon de décharge de PARIS – 1750/56. Le coffr<strong>et</strong> en maroquin rouge doré aux « p<strong>et</strong>its fers » porte les armes de Madame Adélaïde sur le couvercle. Belle ornementation de frises de feuilles <strong>et</strong> entrelacs avec aux angles <strong>des</strong> fleurs de lys qui ont été matées de p<strong>et</strong>ites rosaces sous la Révolution, de même que les armoiries. L’intérieur est tendu de soie verte <strong>et</strong> les compartiments sont soulignés d’un liseré en fil de métal doré. Ferrures <strong>et</strong> poignées sont en laiton. Il est compl<strong>et</strong> de sa clef en fer poli. Par Pierre VENTE (cf. note n° 1) - Epoque Louis XV 150 000/200 000 € N.B. : Comme les autres membres de la cour, Madame Adélaïde avait coutume de se fournir auprès <strong>des</strong> marchandsmerciers, le plus connu étant Lazare Duvaux dans le Livre Journal duquel ont relève une grande quantité d’achats de porcelaines de Vincennes entre 1749 <strong>et</strong> 1759, le plus souvent par l’intermédiaire de la duchesse de Beauvilliers. On peut supposer qu’elle continua ses achats de porcelaines de Sèvres jusqu’à la fin puisqu’il est noté dans le Registre <strong>des</strong> Livraisons, en 1783, l’achat d’une paire de « vases buire Boizot ». Indiquons pour mémoire à la date de mai 1751 : « une boite en lacq garnie d’entrée <strong>et</strong> charnières or avec compartiment d’étoffe – 365 1. ». (1) Les Archives <strong>des</strong> Menus Plaisirs révèlent que fut livré aux filles de Louis XV « pour leur convenance » <strong>et</strong> déplacements un ou plusieurs grands coffr<strong>et</strong>s armoriés, garnis de «cuivre doré d’or moulu » exécutés par Pierre VENTE, né en 1722, maître relieur, relieur <strong>des</strong> Menus Plaisirs du Roi en 1753, <strong>et</strong> de Mesdames, filles du Roi. Cf. : E. THOINEAU : « Les Relieurs Français de 1500 à 1800 » - 1893 <strong>et</strong> R. DEVAUCHELLE : « La Reliure en France » - 1960. (2) Pour les armoiries, cf. Olivier HERNAL DE ROTON : « Le Manuel de l’Amateur de Reliures Armoriées » - Paris 1929-1939, pl. 8 (armoiries similaires sur un Grand Dictionnaire de Bruzen de la Martinière). (3) Cf. Marcelle BRUNET <strong>et</strong> Tamara PREAUD : « Les Porcelaines de Vincennes : Les Origines de Sèvres» - Catalogue de l’Exposition – Grand Palais – Paris, 1977, p. 47, fig. 76, pour un déjeuner de même style. Louis XV devait avoir une dizaine d’enfants avec la reine Marie Leszczynska, dont six filles : Adélaïde, Victoire, Louise <strong>et</strong> Sophie, qui passèrent à la postérité sous le nom de « Mesdames de France », qui ne se marièrent pas <strong>et</strong> l’infante, duchesse de Parme. Née le 23 mars 1732, Adélaïde, pour qui la reine eut toujours une affection particulière, montra dès son plus jeune âge quelque caractère. L’anecdote est restée célèbre de Louis XV, décidant que ses filles, à l’instar de toutes celles de l’aristocratie, se devaient d’être éduquées au couvent. C’est celui de Fontevrault, éloigné de Paris qui fut désigné. Mais Adélaïde fit preuve de réticence <strong>et</strong> supplia le roi en se prosternant à ses pieds. Et ainsi, elle échappa à c<strong>et</strong>te r<strong>et</strong>raite qui rappelait probablement par trop les temps révolus de Madame de Maintenon. C’est sa présence <strong>et</strong> son implication dans tout ce qui pouvait appuyer l’action royale à la cour de Versailles, <strong>et</strong> ce jusqu’en 1791, qui r<strong>et</strong>iennent l’attention dans la «carrière» d’Adélaïde. Plusieurs récits soulignent avec quels scrupules, jalouse de son rang, elle défendait les plus infimes questions d’étiqu<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> de protocole sur lesquelles elle se posait en grand arbitre. On en comparait sa parfaite connaissance avec celle qu’avait pu en avoir en son temps « Monsieur », frère du roi. Elle ne manquait pas une occasion de ramener avec hauteur tout à l’essentiel. A celui qui lui donnait de l’Altesse Royale, elle savait répondre : « Dites Madame, tout court ». Elle eut la grande chance d’avoir pour maître parmi les plus beaux esprits de son temps. Entre autres, Pierre Caron de Beaumarchais, introduit à la cour comme horloger du Roi, <strong>et</strong> qui réussit à être admis dans la « société » <strong>des</strong> filles de Louis XV pendant un moment. Apparu côté cour, il disparut pour ainsi dire côté jardin comme son héros « Figaro », craignant, de son propre aveu, que le fait « d’être bien de sa personne… ne fasse le délice <strong>des</strong> femmes <strong>et</strong> plus particulièrement celui d’Adélaïde… » ce qui aurait pu lui « monter au bonn<strong>et</strong> ». (sic). Toute l’impertinence <strong>et</strong> l’esprit frondeur du Barbier de Séville est inscrit dans ces commentaires… Elle fut également la brillante élève de Hordion <strong>et</strong> de Goldoni. Il fut un <strong>des</strong> « maestro » de Mesdames qui lui apprirent le français… Entre Comédie Française <strong>et</strong> Comédie Italienne, Marivaux n’est pas loin… En 1766, un <strong>des</strong>sin allégorique de Taré consacre la « Gloire d’Adélaïde » représentée entourée <strong>des</strong> Vertus <strong>et</strong> <strong>des</strong> Arts ; elle y symbolise les qualités morales <strong>et</strong> intellectuelles. C’est la seule <strong>des</strong> filles de Louis XV à avoir reçu <strong>des</strong> cours d’équitation, la rendant ainsi à même de suivre les chasses royales <strong>et</strong> séjourner dans les divers châteaux qui y étaient attachés. Son indépendance <strong>et</strong> sa faculté d’adaptation étaient gran<strong>des</strong>. Louis XV se plait dans la compagnie d’Adélaïde <strong>et</strong> chaque jour, il a pour habitude de venir prendre le café – café qu’il prépare lui-même – dans les appartements de sa fille, à laquelle il donne, comme à toutes ses filles, un sobriqu<strong>et</strong>, celui de « Torche », que ses sœurs lui donneront jusqu’à sa mort. Elle obtient du roi la permission de le voir sans protocole, venant simplement « gratter à sa porte ». Durant le « règne » de Mme de Pompadour, l’autorité de la favorite est telle que Louis XV avoue dans un souffle (1757) : « ils en feront tant que je ne pourrais garder Marchaut (d’Arnouville) » (1) désignant par là l’action de la chère marquise <strong>et</strong> de ses créatures. On peut imaginer que, durant c<strong>et</strong>te période, Adélaïde connut le fameux dressoir que son père faisait installer dans un <strong>des</strong> salons de Versailles pour présenter à la cour « la Porcelaine de France », en d’autres termes les créations de la manufacture de Vincennes – Sèvres, qui bénéficiait du protectorat royal, en présence de la Marquise qui délivrait à l’occasion de chaque achat un « brev<strong>et</strong> de bon français ». Peu à peu, les princesses de France perdent de leur pouvoir à la cour. La mort du Dauphin, puis celle de la reine Marie Leszczynska sont cruellement ressenti à Versailles <strong>et</strong> Adélaïde ne peut prétendre à l’autorité que seule pouvait avoir la dauphine, tant à la fois mère <strong>des</strong> enfants de France que princesse de Saxe. Enfin, le roi s’intéresse beaucoup à sa nouvelle favorite, future comtesse du Barry, <strong>et</strong> il exige d’Adélaïde qu’elle lui cède ses appartements ! Ce qui aura pour eff<strong>et</strong> d’attiser un peu plus la haine de la fille aînée de Louis XV qui « mène ses cad<strong>et</strong>tes » dans une véritable cabale contre la nouvelle favorite. En 1770, leur crédit a beaucoup diminué. La nouvelle Dauphine, Marie Antoin<strong>et</strong>te, princesse autrichienne n’a pas la sympathie d’Adélaïde qui lui est ouvertement hostile. Le jeune Louis XVI accède en 1774 à un trône auquel de son propre aveu il n’était pas préparé. Il écoute un peu tout le monde <strong>et</strong> sa tante Adélaïde a quelque ascendant sur ce jeune <strong>et</strong> hésitant monarque. A la suite d’un imbroglio, Adélaïde qui veut favoriser Machaut pour le « bien de la France », par un hasard d’étiqu<strong>et</strong>te, introduit Maurepas auprès du roi, <strong>et</strong> c’est lui qui sera désigné comme Premier ministre, nomination qui est une erreur qu’elle reconnaîtra par la suite. Mais une cassure se produit entre le roi <strong>et</strong> ses tantes qu’on lui conseille d’exiler au château de Commercy, mais cela sera sans suite. A la mort de leur père, Mesdames avaient hérité d’une immense fortune de 1 650 000 livres assortis d’une rente viagère individuelle de 200 000 livres. Elles rach<strong>et</strong>èrent le château de Bellevue, qui avait coûté à la marquise de Pompadour la somme colossale de 2 256 927 livres <strong>et</strong> que le roi rach<strong>et</strong>a 800 000 livres (1). Dans le parc, se trouvait la statue en pied de Louis XV par Pigalle. L’épisode de la Révolution fut « mal vécu » par les Princesses qui furent condamnées à une résidence surveillée aux Tuileries, dans de misérables pièces du château. La réplique est restée célèbre d’Adélaïde corrigeant Marie Antoin<strong>et</strong>te qui avait laissé échapper en voyant le spectacle du soulèvement populaire : « Ces indignes français », « dites plutôt indignés »… En 1791, après quelques péripéties, les princesses peuvent fuir la France – Adélaïde toujours accompagnée de sa fidèle dame d’honneur, la duchesse de Narbonne – se réfugient à Turin d’abord, puis à Trieste où Adélaïde meurt le 27 février 1800, oubliée de tous. (1) Machaut d’Arnouville, super intendant <strong>des</strong> Finances, grand protecteur de la Manufacture de Vincennes : il engagea le fameux chimiste Hellot qui inventera le « bleu céleste », fond de couleur utilisé pour le grand service de Louis XV (qui avait coûté 60.000 livres) <strong>et</strong> attaché à la Manufacture Duplessis, grand sculpteur, créateur de modèles d’orfèvrerie <strong>et</strong> qui fournira à Vincennes-Sèvres ses plus belles formes. Ouvrages consultés : Casimir Stryenski : « Mesdames de France » - Paris, 1911. « Mémoires de la Comtesse de Boigne, née d’Osmond » - Editions Emile-Paul Frères – Paris, 1931. 110 111
ANCIENNES COLLECTIONS JOSETTE DAY-SOLVAY lots A à U (second catalogue) 112 113
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