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Remise en liberté de Guy Turcotte

Jugement de la Cour Supérieure du Québec détaillant les motivations du juge sur la remise en liberté de Guy Turcotte en attendant son prochain procès

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700-01-083996-093 PAGE : 14<br />

Le fait que le prév<strong>en</strong>u <strong>en</strong>court, <strong>en</strong> cas <strong>de</strong> condamnation, une longue peine<br />

d’emprisonnem<strong>en</strong>t.<br />

[79] Il est inutile <strong>de</strong> repr<strong>en</strong>dre les conséqu<strong>en</strong>ces d’un verdict <strong>de</strong> culpabilité sur la peine<br />

imposée pour le meurtre au premier <strong>de</strong>gré.<br />

[80] Le Tribunal doit pondérer chacun <strong>de</strong> ces élém<strong>en</strong>ts et déci<strong>de</strong>r si le requérant s’est<br />

déchargé <strong>de</strong> son far<strong>de</strong>au <strong>de</strong> démontrer que sa dét<strong>en</strong>tion n’est pas nécessaire et que sa<br />

mise <strong>en</strong> <strong>liberté</strong> n’aura pas pour effet <strong>de</strong> miner la confiance du public dans<br />

l’administration <strong>de</strong> la justice.<br />

[81] Le Tribunal reti<strong>en</strong>t égalem<strong>en</strong>t les propos du juge Beaudoin dans R. c. Lamothe 10<br />

« ….S'agissant tout d'abord <strong>de</strong> la perception du public, comme on le sait, face<br />

aux criminels ou aux criminels <strong>en</strong> puissance, une large partie du public canadi<strong>en</strong><br />

adopte souv<strong>en</strong>t une attitu<strong>de</strong> négative et parfois passionnée. Il veut se voir<br />

protéger, voir les criminels <strong>en</strong> prison et les voir châtier durem<strong>en</strong>t. Se<br />

débarrasser du criminel, c'est se débarrasser du crime. Il perçoit alors indûm<strong>en</strong>t<br />

le système judiciaire et celui <strong>de</strong> l'administration <strong>de</strong> la justice <strong>en</strong> général comme<br />

trop indulg<strong>en</strong>t, trop mou, trop bon pour le criminel. Cette perception, presque<br />

viscérale face au crime, n'est sûrem<strong>en</strong>t pas celle sur laquelle le juge doit se<br />

fon<strong>de</strong>r pour déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la remise <strong>en</strong> <strong>liberté</strong>. Dans cette hypothèse <strong>en</strong> effet, les<br />

personnes accusées <strong>de</strong> certains types d'infraction ne serai<strong>en</strong>t jamais remises <strong>en</strong><br />

<strong>liberté</strong> parce que la perception du public est négative à l'égard du type <strong>de</strong> crime<br />

commis, alors que d'autres, au contraire, serai<strong>en</strong>t presque automatiquem<strong>en</strong>t<br />

libérées vu la perception plus neutre ou plus indulg<strong>en</strong>te du public. Le droit<br />

criminel et son exercice a aussi et doit avoir à l'égard du public une valeur<br />

éducative. Le public informé doit compr<strong>en</strong>dre que l'exist<strong>en</strong>ce <strong>de</strong> la présomption<br />

d'innoc<strong>en</strong>ce à toutes les étapes du processus pénal n'est pas une notion<br />

purem<strong>en</strong>t théorique, mais une réalité concrète et que, malgré ce qui peut passer,<br />

dans sa perception, pour certains inconvéni<strong>en</strong>ts quant à l'efficacité <strong>de</strong> la<br />

répression criminel1e, elle est le prix à payer pour une vie dans une société libre<br />

et démocratique. C'est donc à un niveau plus élevé qu'il faut se placer, soit celui<br />

d'un public raisonnablem<strong>en</strong>t informé <strong>de</strong> notre système <strong>de</strong> droit pénal et capable<br />

<strong>de</strong> juger et <strong>de</strong> percevoir sans passion que l'application <strong>de</strong> la présomption<br />

d'innoc<strong>en</strong>ce, même au niveau <strong>de</strong> la <strong>liberté</strong> provisoire, a pour effet<br />

qu'effectivem<strong>en</strong>t <strong>de</strong>s g<strong>en</strong>s qui, plus tard, seront trouvés coupables, même <strong>de</strong><br />

crimes sérieux, auront cep<strong>en</strong>dant retrouvé leur <strong>liberté</strong> <strong>en</strong>tre le mom<strong>en</strong>t <strong>de</strong> leur<br />

arrestation et celui <strong>de</strong> leur procès. En d'autres termes, le critère <strong>de</strong> la perception<br />

du public ne doit pas s'exercer à partir du plus petit commun dénominateur. Un<br />

public informé compr<strong>en</strong>d donc qu'il existe au Canada une présomption<br />

d'innoc<strong>en</strong>ce garantie constitutionnellem<strong>en</strong>t (art. 11 d) <strong>de</strong> la Charte) et le droit <strong>de</strong><br />

n'être pas privé sans juste cause d'une mise <strong>en</strong> <strong>liberté</strong> assortie d'un<br />

cautionnem<strong>en</strong>t raisonnable (art. 11 e) <strong>de</strong> la Charte).<br />

10 (1990) A.Q. no. 514

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