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#I<br />
Octobre - Novembre - Décembre
L’ÉQUIPE ALPHABETA<br />
#I<br />
AXELLE MINNE VICTOIRE DE CHANGY JEHANNE MOLL ELLI MASTOROU MATTHIEU MARCHAL<br />
AURÉLIA MORVAN SÉBASTIEN HANESSE FLORENCE<br />
VANDENDOOREN<br />
ÉMELINE BRULÉ<br />
QUYNH-ANH PHAM<br />
CHARLOTTE BEAUPÈRE<br />
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TABLE DES MATIÈRES<br />
A<br />
B<br />
C<br />
D<br />
E<br />
A la bonne heure<br />
Chroniques musicales<br />
Bienvenue au BAM Festival<br />
Interview<br />
Chroniques littéraires<br />
Double je<br />
Interview de Céline<br />
Sciamma<br />
Everybody can dance<br />
Interview de If Human<br />
F<br />
G<br />
H<br />
Foggy Flowers<br />
Edito photo par Alice<br />
Lemarin<br />
Garder une image de l’été<br />
Billet d’humeur par Justine<br />
Neubach<br />
Happy birthday, AB<br />
Souvenirs<br />
L’illustration #I<br />
Maud Zabcynski<br />
Jouer décalé<br />
Interview de Moutain Bike<br />
K<br />
L<br />
M<br />
N<br />
O<br />
Kaléidoscope extatique<br />
Interview de Lara<br />
Gasparotto<br />
L’effet de Maud<br />
Interview de Maud<br />
Zabczynski<br />
Miko’s stories<br />
Interview de Pauline Miko<br />
Nouchi, L-G<br />
Interview L-G Nouchi<br />
Orageux épiciers<br />
Interview
TABLE DES MATIÈRES<br />
#G<br />
Q<br />
R<br />
S<br />
T<br />
Petite annonce<br />
Queen Moustache<br />
Interview d’Aurélie William<br />
Levaux<br />
Rose piqué à vif<br />
Exposition de Richard<br />
Mosse<br />
Swimming Pool<br />
Edito photo par Jehanne<br />
Moll<br />
Top 10 : Cinéma d’art &<br />
d’essai<br />
U<br />
V<br />
W<br />
X<br />
Y<br />
Un beau brin de fille<br />
Interview de Gaëlle Sutour<br />
Va voir ailleurs<br />
Wind & Nature<br />
Interview de Kings of<br />
Edelgran<br />
Xavier Diskeuve<br />
Les premières fois<br />
Z<br />
Zoom sur Alphabeta
EDITO<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
EDITO<br />
Déjà quelques jours que la rentrée s’est<br />
installée dans les quotidiens de chacun<br />
d’entre nous. Retour au boulot, reprise<br />
d’un rythme de croisière ponctué par<br />
quelques apéros, douceur ocre, en terrasse,<br />
métro-boulot-dodo que l’on essaye<br />
de repousser encore un peu… Il y a toujours<br />
dans l’air, à cette période de l’année,<br />
un curieux mélange d’effervescence et de<br />
torpeur tiède ; entre la nouvelle année qui<br />
débute, emplie de projets et de nouveaux<br />
espoirs, et l’été qui se dissipe peu à peu,<br />
nous laissant ses souvenirs qui sentent<br />
bon la peau rougie au soleil.<br />
Ici, la rentrée s’annonce pleine de rebondissements,<br />
de nouvelles têtes et d’idées<br />
concrètes à mettre en place. Mais si l’humeur<br />
se met tout doucement au travail,<br />
elle aime aussi se complaire un peu dans<br />
des reliques estivales. Là où il fait bon se<br />
prélasser encore un tout petit peu.<br />
Oui là, juste là.<br />
I comme Indolente, I comme Intrépide.<br />
Cette huitième édition oscille, elle aussi,<br />
entre une volonté furieuse de mettre le<br />
monde en branle et le désir de profiter de<br />
quelques rayons sous son nouveau chandail,<br />
ou de filer, à la poudre d’escampette,<br />
vers des horizons plus radieux.<br />
Des images en bord de piscine ou de<br />
champs fleuris, des anniversaires, des<br />
révolutions à échelle humaine, des petits<br />
dessins que l’on aurait aimé gribouiller<br />
sur nos bancs d’école, des coups de cœur<br />
musicaux ramenés de notre été festivalier,<br />
des anciennes rubriques et puis de nouvelles,<br />
de quoi ravitailler sa bibliothèque<br />
ou filer en salle obscure indépendante à
EDITO<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
l’approche des journées moins longues…<br />
Comme une grande carte postale, de<br />
celles qu’on aime placarder au mur, et<br />
devant laquelle on ne peut s’empêcher<br />
d’esquisser un sourire…<br />
Avec vous
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
À LA BONNE HEURE<br />
Quand on cherche un disque à écouter,<br />
le premier critère de sélection est souvent<br />
le moment de la journée. On en essaie un<br />
mais ce n’est pas trop ça, puis un autre et<br />
un autre jusqu’à trouver le bon, grosse prise<br />
de tête. Du coup on vous facilite un peu<br />
la tâche mais n’oubliez pas de prendre en<br />
compte la météo, le feng shui de la pièce et<br />
l’alignement des planètes, c’est important.
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
08.00 / Ólafur Arnalds<br />
– Living Room Songs (2011)<br />
Durant une semaine, Ólafur Arnalds a composé<br />
une chanson par jour dans son salon, et<br />
chaque jour cette nouvelle composition était<br />
disponible gratuitement sur le web. C’était<br />
il y a quelques années maintenant, mais les<br />
sept titres finalement réunis dans l’album<br />
gardent ce quelque chose de très temporel<br />
et résistent à la disparition de son concept.<br />
Chaque piste résulte de sa propre combinaison<br />
aléatoire quotidienne : la lumière,<br />
le temps, l’humeur, la qualité du sommeil,<br />
les gens que l’on croise, les images qui ont<br />
retenu notre attention, avec constamment<br />
en filigrane l’empreinte du salon, du confort<br />
d’être chez soi. L’autorisation de relâcher les<br />
épaules. Si c’est le piano qui dans les premières<br />
notes capte notre attention, doucement,<br />
celui-ci se dissipe - ou plutôt se dilue,<br />
dans de plus grandes évocations : les instruments<br />
à cordes qui chauffent implicitement<br />
comme le poing se serre ou les larmes qui<br />
menacent de se déverser, et les manipulations<br />
électroniques qui faussent le rythme<br />
cardiaque, qui détournent la pensée. Doucement<br />
pris et doucement relâchés, Living<br />
Room Songs est le premier disque à écouter<br />
de la journée parce qu’Ólafur est là pas loin,<br />
on peut parfois entendre son tabouret grincer<br />
sur le parquet et des pas au loin. Il est bon<br />
d’être chez soi.<br />
10.00 / The Broken Circle<br />
Breakdown Bluegrass Band<br />
– The Broken Circle<br />
Breakdown (2013)<br />
Au risque de déplaire aux puristes du bluegrass<br />
qui ne savent quoi penser de la hype<br />
soudaine du genre suite au succès du film<br />
The Broken Circle Breakdown de Felix Van<br />
Groeningen, on vous en touche quand même<br />
quelques mots tant la bande originale du film<br />
est une belle porte d’entrée vers les vastes<br />
territoires du bluegrass et de la country en<br />
général. D’autant plus que jamais ni le réalisateur<br />
ni le compositeur Bjorn Eriksson<br />
n’avaient prévu que le film génère un tel<br />
engouement. Et pourtant, depuis sa sortie<br />
au cinéma, le groupe fictif est devenu réel.<br />
Les deux acteurs principaux entourés de cinq<br />
musiciens se sont lancés dans plus d’une<br />
année de concerts à l’honneur de Bill Monroe,<br />
entre reprise de titres cultes et compositions<br />
contemporaines. Alors si des titres comme<br />
l’emblématique « The boy who wouldn’t hoe<br />
corn », le chaloupé « Country in my genes »<br />
ou encore l’instrumental « Sand mountain »<br />
permettent aux gens accrochés par le son de<br />
découvrir le genre et de creuser un peu pour<br />
découvrir ce qui se cache derrière, on n’y voit<br />
aucun problème. Bien au contraire.
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
12.00 / Sharon Van Etten<br />
– Are We There (2014)<br />
14.00 / Mac DeMarco<br />
– Salad Days (2014)<br />
Midi, les images la soirée de la veille sont<br />
toujours brouillées, les choses restées en<br />
suspens languissent au fond de la gorge. Les<br />
émotions reviennent doucement, l’écume de la<br />
nuit passée, des yeux lourds, du sommeil qui<br />
ne vient pas et de l’ivresse qui se transforme,<br />
dangereuse. Difficile de s’y retrouver. Estce<br />
triste parce que c’était beau ou beau<br />
parce que triste Les questions deviennent<br />
migraine flottante oppressée par l’obligation<br />
de la journée productive, tout va trop vite que<br />
pour s’arrêter, alors on garde tout, toujours,<br />
au milieu de la gorge, et on avance jusqu’à en<br />
étouffer. Ca ne fonctionnera pas longtemps.<br />
On devrait s’échapper un peu plus, même à<br />
midi, même au travail, surtout quand le dernier<br />
album de Sharon Van Etten semble être fait<br />
pour l’introspection, pour la convalescence.<br />
D’une grâce lancinante, le disque est à fleur<br />
de peau mais ne tombe jamais dans le<br />
pleurnichage mélodramatique, il nous parle à<br />
tous, presque comme un manifeste à la vie. Il<br />
est mélancolique, il crie de tous ses poumons<br />
et se réfugie les jambes contre la poitrine,<br />
accolé au mur. Les accords claqués au piano,<br />
les cordes qui dansent, électriques, et Sharon,<br />
sa voix qui nous souffle de l’intérieur, qui<br />
finalement nous fait bomber le torse et lever la<br />
tête. Emouvant.<br />
Complètement dingue, super drôle et à priori<br />
pas crédible pour un sou, Mac Demarco révèle<br />
derrière ses airs de clown un songwriter d’une<br />
classe pas possible. Comme quoi, l’habit ne<br />
fait pas le moine, hé. Partisan du son lo-fi et<br />
des chansons enregistrées à l’arrache, on<br />
s’attendait à quelque chose un brin crade, mais<br />
là est le génie du jeune folkeux : c’est propre,<br />
fluide et intelligent. Tous les instruments sont<br />
un peu saouls, guitares fantaisie, synthés<br />
surannés et vision trouble. On se laisse aller<br />
à la joie ivre et son caractère changeant. Joie<br />
triste, joie excitée, joie fatiguée, joie dansante,<br />
joie érotique. Le tout dans une nonchalance<br />
naturelle qui fait de ce troisième disque du<br />
jeune Canadien un album parfait pour chiller<br />
en début d’après-midi.
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
16.00 / Neneh Cherry<br />
– Blank Project (2014)<br />
Débutant sur un presque a capella, « Across<br />
The Water » prouve d’emblée que Neneh<br />
Cherry n’a rien perdu avec les années. Tout<br />
l’inverse, sa voix est devenue encore plus<br />
ahurissante. On pourrait penser l’espace d’un<br />
instant qu’elle a trouvé une forme de sagesse<br />
dans un minimalisme plus acoustique,<br />
mais c’est là qu’arrive « Blank Project »<br />
: percussions martiales, scintillements<br />
électroniques qui pulsent et la dame qui<br />
déborde d’énergie. Le disque se poursuit et<br />
devient de plus en plus impressionnant, ne se<br />
positionnant jamais dans aucun cadre. On y<br />
entend des influences hip-hop, des sonorités<br />
ultra-contemporaines, des arrangements rock<br />
et plus encore. Mais le vrai prodige du disque,<br />
c’est son rythme comme nul autre. Sur « Spit<br />
Three Times » on plonge en plein mantra,<br />
obsédés et convaincus par ses déclamations,<br />
avec le beat se rajoutent quelques notes de<br />
synthé, une cymbale, et ça suffit pour nous<br />
faire danser tant le rythme est bon ! C’est<br />
fou quand même. Le reste du disque est du<br />
même calibre (on notera le featuring rétro<br />
avec Robyn) et il y a fort à parier que même<br />
à plus de cinquante ans, Neneh Cherry nous<br />
enterrera tous.<br />
18.00 / Kendrick Lamar<br />
– Good Kid, M.A.A.D City<br />
(2012)<br />
Sortie du boulot : ce n’est pas du tout le<br />
moment pour relâcher l’énergie sinon on ne<br />
va rien faire de la soirée (et être un minimum<br />
social fait partie de nos obligations, si<br />
si). Bon moment pour écouter l’album de<br />
l’Américain Kendrick Lamar. Clairement<br />
dans une branche plutôt mainstream du hiphop<br />
actuel et ponctué de temps en temps<br />
par quelques clichés gangsta-shit (que l’on<br />
pourrait presque considérer comme des<br />
étapes obligées), il reste en nous que rien que<br />
pour certains moments d’une beauté dingue<br />
(le rap principal de « The Art Of Peer Pressure<br />
» ou « Black Boy Fly » et son instru ultraefficace),<br />
pour un passage kiffant de Madame<br />
Mary J. Blige sur « Now Or Never » et pour du<br />
hip-hop de club avec « Swimming Pools » (on<br />
aime tous danser gangsta avec un verre à 12€<br />
en main, no shame) le disque est absolument<br />
à écouter !
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
20.00 / Christian Löffler<br />
– Young Alaska (2014)<br />
22.00 / Röyksopp & Robyn<br />
– Do It Again (2014)<br />
A mi-chemin entre electronica, house et (une<br />
once de) pop, le dernier Christian Löffler<br />
déploie un son précieux, calme et entraînant.<br />
Véritable carnet de voyage, il nous dépeint le<br />
contraste de l’Alaska et son jeu d’ombre et de<br />
lumière. A l’image du soleil absent en hiver<br />
et toujours présent en été, ce clair-obscur<br />
transparaît dans les passages bleus et les<br />
envolées étoffées. Beau de bout en bout, on<br />
saluera le trio « Notes – Beirut – Roman »<br />
pierre angulaire du disque et le génialissime «<br />
All Comes ».<br />
Oui, le cinq-titres de Röyksopp et Robyn<br />
sonne comme un cliché d’eurodance des<br />
années 2000, mais un cliché vachement bien<br />
branlé ! La première piste longue de près de<br />
dix minutes est la moins affectée par le clin<br />
d’œil kitsch du disque, déployant de longues<br />
phrases musicales ascendantes et descentes<br />
sur la voix lascive de Robyn - et quand le<br />
saxo, qui semble venir de loin, apparaît c’est<br />
plutôt sexy. Puis il y a « Say It », et là c’est la<br />
foire, boum, ça sort de nulle part, retour en<br />
2001 dans discothèque pleine de néons rosebordel,<br />
basses métronomiques et vieil ecsta<br />
de campagne. On garde l’ambiance mais on<br />
y rajoute un peu d’émotion et de BPM, hop ça<br />
donne « Do It Again » hommage ultra-réussi<br />
et décomplexé à ces groupes à sensation qui<br />
peuplaient les hit-parades d’il y a quelques<br />
années. Une bombe. Les deux dernières<br />
tracks clôturent l’album sur un spleen rythmé<br />
et édulcoré. Un plaisir coupable certes, mais<br />
un gros plaisir quand même.
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
00.00 / Nosaj Thing<br />
– Drift (2009)<br />
02.00 / Eric Holm – Andøya<br />
(2014)<br />
T’es en soirée, il reste pas mal de temps<br />
encore avant l’aurore mais la playlist est déjà<br />
en perdition et personne ne semble avoir<br />
envie de prendre les devants. Tu observes<br />
les mouvements sociaux et tu commences<br />
à sentir le de devoir divin s’imposer en toi.<br />
Tu juges de l’ambiance, les conversations<br />
sont calmes mais éveillées et l’alcool se<br />
distille doucement dans les veines, il te faut<br />
quelque chose de pas trop up-tempo mais<br />
de suffisamment dynamique pour inviter les<br />
nuques à doucement entrer en mouvement.<br />
Tu sais maintenant qu’il n’y a que toi pour<br />
prendre l’initiative, oui toi, tu as le sort de la<br />
soirée entre les mains. Ils ne le savent pas<br />
encore mais tu es l’élu, celui qui assure la<br />
transition entre aujourd’hui et demain. Alors<br />
tu te lèves, héros au grand cœur, et tu mets<br />
« Drift » de Nosaj Thing sur la platine. Parce<br />
qu’en plus de ton immense courage, tu as bon<br />
goût.<br />
Insomnie. Les yeux sont grands ouverts.<br />
Ouverts par les pensées qui tournent en<br />
spirales, elles en génèrent d’autres qui en<br />
génèrent d’autres et l’on devient prisonnier<br />
d’une sensation qui griffe et obsède à tel<br />
point que tout le reste s’efface. Plutôt que<br />
de tourner en rond, autant profiter de nos<br />
cernes naissants pour offrir un bon contexte<br />
d’écoute à « Andøya » d’Eric Holm. Le garçon<br />
jusque-là inconnu au bataillon est allé capter<br />
des sons avec un microphone superpuissant<br />
sur des lignes haute-tension quelque part sur<br />
une île Norvégienne (chacun son obsession).<br />
Le résultat est incomparable et pourtant<br />
toujours sur le point de rupture, les basses<br />
déployées traversent la cage thoracique et la<br />
noise qui recouvre l’ensemble est tellement<br />
texturée qu’elle en devient un objet à part.<br />
L’ensemble oscille dans ses variations<br />
aléatoires et nous absorbe totalement<br />
dans une expérience sombre, intense et<br />
incroyablement captivante. Indescriptible,<br />
mais assurément un des disques les plus<br />
intéressants de l’année.
A<br />
À LA BONNE HEURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
04.00 / Bohren & Der Club<br />
Of Gore – Piano Nights<br />
(2014)<br />
Bonne nuit.
B<br />
BIENVENUE AU BAM FESTIVAL<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
BIENVENUE AU<br />
BAM FESTIVAL<br />
Du 30 septembre au 3 octobre prochain<br />
se tiendra à Liège le BAM Festival,<br />
consacré aux arts numériques.<br />
Premier évènement dédié aux arts<br />
électroniques dans la cité ardente,<br />
le BAM propose un panel d’activités<br />
variées mettant en valeur les créations<br />
d’artistes belges et internationaux.<br />
Concentré sur quatre jours, il se déploie<br />
sur divers sites de la ville présentant<br />
installations, performances live,<br />
workshops, conférences et tables<br />
rondes permettant des échanges avec<br />
divers professionnels du secteur. Il<br />
s’agit d’une collaboration avec l’Ecole<br />
Supérieure des Beaux-Arts de Liège<br />
et le Cadran, dans le cadre et avec le<br />
support de la Quinzaine Numérique
B<br />
BIENVENUE AU BAM FESTIVAL<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
de la Fédération Wallonie-<br />
Bruxelles ! Le noyau<br />
organisateur est piloté<br />
par Mike Latona, qui s’est<br />
prêté pour nous au jeu des<br />
questions-réponses<br />
Mike Latona, comment est née l’idée de ce<br />
festival <br />
Je suis graphiste depuis les années 2000. En<br />
même temps que le graphisme, j’ai commencé le<br />
vjing : des projections de vidéos sur des écrans<br />
lors de soirées. Il y a 5 ans, le mapping est apparu,<br />
donc j’ai commencé à en faire aussi. Petit à petit,<br />
j’ai laissé tomber mon travail de graphiste pour<br />
m’occuper exclusivement de l’art numérique, et<br />
désormais je ne fais plus que ça ! J’ai eu l’occasion<br />
de faire pas mal de festivals en Europe, mais<br />
aussi dans le monde entier, et j’ai développé un<br />
gros carnet d’adresses grâce à tout ça. Je bosse<br />
également depuis 4 ans dans l’équipe du Mapping<br />
Festival de Genève, où j’avais commencé<br />
en tant qu’artiste. J’ai eu l’occasion de rencontrer<br />
des gens calés dans ce domaine, et on est devenus<br />
une grande famille. Il y a un an j’ai été contacté<br />
par le Cadran afin de réaliser un événement<br />
sur les arts numériques. J’ai donc demandé au<br />
Mapping festival s’ils voulaient être partenaires,<br />
et la réponse fut oui ! Il faut savoir qu’il n’existe<br />
presque rien au niveau des arts numériques à<br />
Liège : ce sont toujours les 2-3 mêmes personnes<br />
que l’on contacte pour les expos. Je voulais donc<br />
« C’est un milieu super ouvert au point de<br />
vue humain »<br />
que le festival mette cet art en avant, et que l’on<br />
puisse voir ses différents domaines, comme les<br />
spectacles interactifs, les spectacles de danse,<br />
les installations… Je voulais pouvoir montrer cela<br />
gratuitement aux gens. Montrer comment les arts<br />
numériques se sont développés ces dix dernières<br />
années. J’ai voulu créer un événement complet,<br />
que les gens puissent baigner dans cet univers<br />
pendant quatre jours.<br />
Pourquoi avoir choisi la ville de Liège <br />
Parce que j’y habite. J’aurais pu le faire à<br />
Bruxelles, mais je voulais organiser quelque<br />
chose sur Liège. De plus, le BAM Festival tombe<br />
pendant la Quinzaine Numérique : quinze jours<br />
durant lesquels plusieurs évènements numériques<br />
se mettent en place à travers le pays. Ici, il<br />
y a par exemple le Liège Web Fest, le FAB.WHAT<br />
et le festival Voix De Femmes (dont nous avions<br />
rencontré la fondatrice à la lettre Q de l’édition G,<br />
NDLR). Du coup le BAM Festival s’inscrit parfaitement<br />
dans le contexte de cette quinzaine.
B<br />
BIENVENUE AU BAM FESTIVAL<br />
FLORENCE VANDENDOOREN #I<br />
#I<br />
Quel public vise le BAM Festival <br />
C’est un milieu super ouvert au point de vue humain.<br />
On partage tous notre savoir, il n’y a aucun<br />
esprit de compétition. Je fais venir de grosses<br />
têtes d’affiche qui pourtant ne sont pas connues à<br />
Liège, car le milieu n’est pas développé. Le but est<br />
de faire connaître cet art à un large public, initié ou<br />
non.<br />
Concrètement, quel sera le contenu de ce festival <br />
Le BAM Festival ouvrira ses portes le mardi 30<br />
septembre à 18h lors de son vernissage à l’Ecole<br />
Supérieure des Beaux-Arts de la Ville de Liège, lieu<br />
où se tiendront des expositions d’artistes internationaux<br />
encore jamais présentés en Belgique. Tout<br />
est gratuit : l’expo est ouverte tous les jours de<br />
midi à 20h, les conférences se passent en soirée.<br />
Elles sont suivies par les performances à la tombée<br />
de la nuit, car il faut qu’il fasse totalement noir.<br />
Le tout est clôturé par la soirée « Visuel Party » au<br />
Cadran qui sera, comme son nom l’indique, musicale<br />
et visuelle puisque se côtoieront des pointures<br />
de la musique techno minimale allemande et<br />
des génies internationaux de l’art visuel et numérique.<br />
Les trois salles seront ouvertes : la Rotonde<br />
Louise, le Cadran, ainsi que le Studio 22. Les 2300<br />
mètres carrés du cadran seront utilisés, avec 16<br />
projecteurs installés dans les salles, des installations<br />
interactives, du mapping, des installations<br />
stage design (c’est-à-dire une scène ou le DJ est<br />
englobé dans une scénographie). Le but c’est qu’à<br />
la soirée, les gens s’assoient, boivent un verre et<br />
profitent du spectacle. Qu’ils n’oublient pas directement<br />
ce qu’ils ont vu.<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
www.bamfestival.be<br />
Facebook<br />
https://www.facebook.com/BAMFESTIVALectronikartfestival<br />
Actualité<br />
Du 30 septembre au 3 octobre 2014 à l’Académie<br />
Royale des Beaux-Arts de Liège et au Cadran<br />
Crédits<br />
BAM Festival
C<br />
CHRONIQUES LITTÉRAIRES<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
CHRONIQUES LITTÉRAIRES<br />
Que lire quand il n’y a plus de saisons <br />
Nous n’avons pas eu d’hiver, nous n’aurons<br />
pas plus d’été. Des lectures nouvelles,<br />
passées ou déphasées qu’importe, mais<br />
terriblement vivantes, à consommer en<br />
septembre ou en avril, de jour ou bien de<br />
nuit, lorsque vous aurez enfin décidé de la<br />
date de votre rentrée.
C<br />
CHRONIQUES LITTÉRAIRES<br />
AXELLE VICTOIRE MINNE DE CHANGY<br />
#I<br />
« Parfois je rêve que je reviens à la fiction, je<br />
me roule dedans, j’invente, j’élucubre, j’imagine,<br />
j’opte pour le plus romanesque, le moins vraisemblable.<br />
J’ajoute quelques péripéties, m’offre<br />
des digressions, je suis mes chemins de traverse,<br />
je m’affranchis du passé et de son impossible<br />
vérité. Parfois je rêve au livre que j’écrirai<br />
après, délivrée de celui-ci. »<br />
Rien ne s’oppose à la<br />
nuit,<br />
Delphine de Vigan, éd. Jean-<br />
Claude Lattès, 2011.<br />
C’est l’histoire de Lucile, une petite fille à la<br />
beauté irradiante, de Lucile, femme en devenir<br />
échappée par la première porte, de Lucile,<br />
enfin, mère. Mais pas que. C’est l’histoire de<br />
Lucile avec ses tourments et ses aspirations,<br />
de Lucile et les drames qui l’entourent, elle, et<br />
sa famille, c’est l’histoire d’une construction<br />
minutieuse où l’on démarre par la fin pour<br />
décortiquer, petit à petit, ce qui aura mené à<br />
ça, à tout ça. Lucile, c’est avant tout la mère<br />
de l’auteur. Un personnage réel, auquel l’on se<br />
confronte de visu, sans pudeur, sans gants,<br />
mais avec ô combien de dentelle entre les<br />
mots. Une construction remarquable, ciselée<br />
avec précision, pour nous mettre en garde,<br />
en bouche, en haleine, nous décrocher des<br />
exclamations tout haut à la lecture… Ponctuée<br />
ça et là d’interventions de l’écrivain et de<br />
l’être humain qui rédige, qui doute, qui hésite<br />
à poursuivre, qui persévère, qui est terrorisée<br />
mais qui mènera son projet à terme, vaille que<br />
vaille. Les apprendre par cœur. Une merveille !<br />
N’oublie pas les<br />
oiseaux,<br />
Murielle Magellan – Julliard,<br />
2014
C<br />
CHRONIQUES LITTÉRAIRES<br />
AXELLE VICTOIRE MINNE DE CHANGY<br />
#I<br />
« Bien sûr il y a tout ce que je ne sais pas. Et<br />
puis la subjectivité. Le filtre de la mémoire. La<br />
mise à distance de l’écriture. Mais je n’ai rien<br />
inventé. Ou presque rien. C’est parce que cette<br />
histoire est vraie en tout point – à d’infimes<br />
détails près – que la romancière que je suis<br />
a voulu la raconter. Pour en extraire la réalité<br />
romanesque, et la restituer, la partager, dans sa<br />
nudité, sa beauté, sa cruauté, et sa douceur. »<br />
Murielle, jeune provinciale, débarque à Paris<br />
le cœur avide d’apprendre. Elle y tombe sous<br />
le charme d’un de ses professeurs de vingtcinq<br />
années son ainé. « C’est l’histoire d’un<br />
amour. L’histoire vraie d’un amour ». Murielle<br />
Magellan raconte, à travers cette histoire qui<br />
est la sienne, la complexité du genre, puis<br />
des rapports surtout, humains. On peut y lire<br />
comment d’une terre arride, peu fertile, peu<br />
propice selon les idées que l’on se fait de la<br />
chose et les règles qu’on lui impose, peut<br />
naître un véritable amour. On y comprend que<br />
les contours des battemements peuvent être<br />
flous, que les définitions des liens n’ont pas<br />
lieu d’être. Le roman est ponctué ça et là de<br />
carnets intimes que l’auteur tenait alors, les<br />
confronte avec ses souvenirs d’une étonnante<br />
précision. A vivre encore davantage qu’à lire.<br />
Nouons-nous<br />
Emmanuelle Pagano – P.O.L.<br />
(2013)<br />
«L’aimer c’est m’inquiéter. L’air devient solide<br />
dans ma gorge. Mon ventre contient des<br />
objets qui pèsent. J’essaie de trouver des<br />
occupations pour mon corps. Marcher, cuisine,<br />
laver les sols et le linge. J’essaie de penser à<br />
des choses insignifiantes, de remplacer mon<br />
inquiétude pleine, pleine de lui, par de petites<br />
préoccupations légères, inoffensives. Mais<br />
il m’inquiète à la gorge, au ventre, dès que je<br />
m’arrête. Et mon corps alors me rappelle le<br />
poids, au ventre, à la gorge, ce poids qui est de<br />
l’aimer. »<br />
Il ne s’agit-là ni d’un roman, ni d’un recueil de<br />
nouvelles, mais de fragments. De fragments<br />
de sensations, de sentiments, d’esquisses de<br />
quotidien, des regards, des séparations, des<br />
évolutions. Nouons-nous se lit dans l’ordre<br />
ou le désordre, d’une traite ou par-ci par-là,<br />
en apnée ou entre de profondes inspirations.<br />
Des micro-histoires, longues de deux lignes<br />
ou de deux pages, composées de phrases<br />
à souligner tant elles sont belles, à recopier<br />
pour soi ou à transmettre à d’autres. Des<br />
paragraphes qui tombent à pic lorsqu’on a pas<br />
les mots pour dire, une vraie poésie à toujours<br />
garder pour la consulter encore sur la table de<br />
nuit.
C<br />
CHRONIQUES LITTÉRAIRES<br />
AXELLE VICTOIRE MINNE DE CHANGY<br />
#I<br />
« Dans ma période « belge », La Mansarde reste<br />
comme une clairière, une belle saison où fleurissent<br />
des âmes joyeuses et claires. Entretemps,<br />
je ne cesse de bouger. Je marche. J’autostoppe<br />
entre Bruxelles et Charleroi. Maintenant,<br />
j’ai des amis ici et là. J’auditionne dans des<br />
petites boites ; je ne me souviens pas trop de ce<br />
que j’y chante. Je rencontre des autres, des différences.<br />
Cela dure deux ans et puis, à nouveau,<br />
je vais dériver : mes amis m’ont déjà tant donné<br />
que je ne veux plus rien accepter. Un soir, sans<br />
l’avoir prémédité, je sors de la ville. Je marche.<br />
Je prends la route du « Sud ». Je ne me rends<br />
même pas compte que je m’en vais. Je suis vêtue<br />
d’une salopette verte, chaussée de grosses<br />
bottes lourdes ; c’est là toute ma richesse. Je<br />
n’ai plus mes papiers, je les ai abandonnés dans<br />
un hôtel que je ne pouvais plus régler. Je n’ai<br />
plus rien.»<br />
Cet objectif la mènera par bien des chemins<br />
de traverse, de la plonge au bord de la<br />
prostitution, des amours fugaces et perdues.<br />
Quelques lignes rédigées alors qu’elle<br />
ne pouvait plus chanter, d’une étonnante<br />
sincérité. A lire si vous aimez l’entendre, si<br />
vous aimeriez comprendre.<br />
Il était un piano noir<br />
Barbara – Le livre de Poche,<br />
1999<br />
Le livre regroupe les mémoires de Barbara,<br />
restées inachevées. Ces témoignages<br />
interrompus retracent son parcours, ses<br />
blessures, l’origine de ses paroles et de<br />
ses mélodies. On y reconnait les ruelles de<br />
Bruxelles à la vieille époque, et Paris, grand<br />
et affolant. On peut y lire son obstination,<br />
sa plus grande aspiration, chanter face à<br />
un piano noir, peu importe comment mais<br />
chanter, chanter !
D<br />
DOUBLE JE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
DOUBLE JE : LE CINÉMA<br />
DE CÉLINE SCIAMMA<br />
Dans le monde impitoyable du cinéma<br />
français, la personnalité au centre de<br />
cet article fait partie des trentenaires<br />
qui montent… et en plus, c’est une<br />
femme ! En 2014, la « Next Gen » du<br />
septième art se conjugue plus que<br />
jamais au féminin, et c’est aussi un<br />
peu grâce à Céline Sciamma. Et elle<br />
n’est pas la seule. Rebecca Zlotowski,<br />
Justine Triet, Mia Hansen-Love ou<br />
encore Katell Quillévéré sont autant<br />
de réalisatrices de talent dont le<br />
nom court sur toutes les lèvres qui<br />
comptent. Elles se font remarquer dans<br />
les festivals par leur travail exigeant et<br />
arpentent le tapis rouge sans besoin<br />
de minauder : normal, on ne les veut<br />
pas pour leur « beauté magnétique<br />
», leur « regard pénétrant » ou leurs
B<br />
DOUBLE JE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
« jambes interminables », mais bien<br />
pour leur cerveau. A bientôt 34 ans,<br />
cette réalisatrice au nom d’origine<br />
italienne peut se targuer d’avoir monté<br />
plus d’une fois les marches de Cannes,<br />
d’avoir alimenté malgré elle des débats<br />
houleux, et d’avoir révélé une des<br />
comédiennes les plus prometteuses<br />
de ces dernières années. A la fois<br />
organique et cérébral, son cinéma<br />
se joue avec agilité des frontières<br />
identitaires, entre quête de soi et perte<br />
d’innocence. A l’occasion de la sortie<br />
de son très beau dernier film Bande<br />
de filles, Alphabeta vous propose une<br />
plongée dans le triptyque adolescent de<br />
sa filmographie naissante.<br />
(cliquez pour voir la bande-annonce)<br />
Naissance des pieuvres, 2007<br />
— Frustrations et odeur de<br />
chlore<br />
Née en novembre 1980, Céline Sciamma<br />
découvre le cinéma grâce à E.T. de Spielberg<br />
comme nombre de gamins de sa génération,<br />
mais aussi grâce à Noémie Lvovsky (La vie ne<br />
me fait pas peur), qui lui fait réaliser que ce<br />
métier peut être aussi fait par des filles. Après<br />
des études littéraires, elle s’inscrit donc à la<br />
Fémis (Rien qu’une des écoles de cinéma les plus<br />
prestigieuses au monde). Elle en ressort avec<br />
les honneurs et un conseil de Xavier Beauvois :<br />
faire de son scénario de fin d’études le terreau<br />
de son premier film. C’est ainsi que voit le jour<br />
Naissance des pieuvres, un premier opus contenu<br />
mais maîtrisé sur l’éveil à la sexualité de trois<br />
adolescentes entre les couloirs d’une piscine de
D<br />
DOUBLE JE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
Cergy. Anne rêve de coucher avec François, mais<br />
est complexée par son physique. Marie fantasme<br />
en secret sur Floriane, l’entraîneuse de l’équipe<br />
de natation synchronisée. Floriane, elle, se fait<br />
passer pour la bombasse du coin mais flippe<br />
comme n’importe quelle pucelle à l’idée de se faire<br />
déflorer. Entre trahisons juvéniles, regards en coin<br />
et maillots mouillés, le film de Sciamma aborde<br />
délicatement cet âge ingrat où tout nous fait honte<br />
grâce à un scénario nourri de son propre vécu,<br />
où le point de vue est démultiplié. Mais aussi en<br />
s’appuyant sur un univers codifié à l’esthétique<br />
froide et bleutée, dans lequel ni adultes, ni garçons<br />
n’ont droit de cité. Fugaces, ils s’effacent derrière<br />
ces trois pieuvres, dont l’une nagera jusqu’aux<br />
eaux profondes de celle derrière la caméra…<br />
puisque Floriane, alias Adèle Haenel, partage la vie<br />
de Céline (même si elles font semblant de rien).<br />
(cliquez pour voir la bande-annonce)<br />
de se faire passer pour un garçon, le film ravit le<br />
Festival de Berlin. Après la froideur de la banlieue<br />
parisienne de Naissance des Pieuvres, place aux<br />
Tomboy, 2011<br />
— Même pas peur !<br />
En 2011, après un passage au Festival de Cannes<br />
et une nomination pour un César, Céline Sciamma<br />
est attendue au tournant et elle le sait. Elle décide<br />
alors de se jouer de la pression et des risques du<br />
métier en tournant son second film très vite, avec<br />
un minimum de séquences et une équipe réduite.<br />
« J’ai voulu démontrer qu’un système plus maigre et<br />
plus alternatif n’était pas une utopie », explique-telle<br />
à Libération. L’idée arrive en mai, le tournage<br />
suit dans la foulée, et hop emballez c’est pesé,<br />
Tomboy est né. Un choix politique qui porte ses<br />
fruits : contant l’histoire d’une petite fille qui décide<br />
couleurs chaudes de la fin de l’été. Tourné en forêt,<br />
Tomboy a des airs de conte intemporel, dans lequel<br />
Laure joue au foot avec la bande sans éveiller les<br />
soupçons –même si elle pisse cachée dans les<br />
buissons pour maintenir l’illusion. Au cœur de cet<br />
âge innocent où le corps n’est pas formé et où<br />
tout est encore permis, Sciamma construit son<br />
scénario comme un thriller, rendant le spectateur<br />
complice de ce petit agent double infiltré chez<br />
le sexe opposé. Ces choix astucieux valent à<br />
Tomboy un accueil critique chaleureux… mais<br />
aussi une levée de boucliers en février dernier : la<br />
faute aux cathos-coincés du groupe Civitas, qui<br />
demandent à Arte d’annuler sa diffusion télé pour<br />
des obscures histoires de « théorie du genre » (lol).<br />
Une requête aberrante rendue caduque dans la<br />
foulée par une instance d’experts de l’Education
D<br />
DOUBLE JE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
Nationale, d’après lesquels il faut « faire confiance à la<br />
capacité d’analyse des élèves et ne pas projeter des peurs<br />
d’adultes sur ce que pourraient penser des enfants » (on<br />
n’aurait pas mieux dit). Résultat <br />
Le 19 février, Tomboy attire 1,25 million de<br />
téléspectateurs pour un score historique. Les illuminés<br />
peuvent aller se rhabiller.<br />
Bande de filles, 2014<br />
— Le contre-pouvoir au pouvoir !<br />
Après avoir fait sensation au dernier Festival de<br />
Cannes, Bande de filles débarque bientôt sur les écrans<br />
pour notre plus grand bonheur. Ce dernier opus en<br />
date s’inscrit plus que jamais dans la thématique de<br />
l’exploration chère à la réalisatrice, qui la pousse ici un<br />
cran plus loin : après les débuts timides-humides et le<br />
conte estival contenu, Sciamma franchit la barrière du<br />
Cinémascope et le résultat est une véritable explosion<br />
d’images, de couleurs et d’énergie. Bande de filles<br />
évolue dans le microcosme codifié des banlieues «<br />
difficiles ». C’est là que vit Marieme, une jeune Black<br />
de 16 ans discrète et réservée. Jusqu’au jour où son<br />
chemin croise celui de quatre filles bien décidées à<br />
être tout sauf les « meufs » sages qu’on veut faire<br />
d’elles. Langues de vipère, féminité virile, gouaille à<br />
toute épreuve et free fight avec arrachage de soutif à<br />
même le béton : pour survivre en téci, mieux vaut être<br />
un bonhomme qu’une tepu. Même si on n’a pas les<br />
couilles qui vont avec. Alors, Marieme et les autres<br />
font semblant – et elles le font bien. Transcendant sa<br />
passion des séries (elle cite régulièrement The Wire<br />
ou Friday Night Lights), Sciamma sépare son récit en<br />
chapitres-ellipses marqués par des fondus au noir,<br />
(cliquez pour voir la bande-annonce)<br />
explorant l’évolution d’une personnalité fictive -<br />
qui se cherche sans forcément se trouver - jetée<br />
dans un monde qui est lui, bien réel. Car qui n’a<br />
pas déjà tourné la tête dans le métro, agacé par<br />
les voix de ces filles trop maquillées Sciamma<br />
les porte aux nues avec un regard tendre mais<br />
conscient, dessinant avec l’air de ne pas y<br />
toucher l’omniprésente pression patriarcale, le<br />
poids du regard masculin, l’exigence constante<br />
de réussir sa vie- mais pas trop non plus – qui<br />
étouffent. Et comment certaines filles s’en jouent,<br />
troquant les quatre murs de leur cité contre des<br />
chambres d’hôtel payées en cash, pour fumer des<br />
joints et manger des bonbons sur un lit king size.<br />
Pour retrouver une liberté arrachée à la sauvette,<br />
dans un espace secret où les bonhommes<br />
redeviennent des princesses, moulées dans des<br />
robes piquées chez H&M, à faire du play-back sur<br />
Rihanna dans une scène en passe de devenir<br />
culte. Shine bright like a diamond !
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
Un vendredi soir, 18 heures, des Halles de<br />
Schaerbeek désertes. Habituée des lieux,<br />
je me faufile à travers le dédale de pièces et<br />
de matériel qui s’amoncelle un peu partout.<br />
La saison n’a pas encore commencé mais<br />
on sent qu’il se trame quelque chose,<br />
là, dans cet espace aux mille possibles.<br />
J’aperçois au loin une effervescence de fin<br />
de journée, mélange d’excitation pour ce qui<br />
a été produit au cours des dernières heures<br />
et de fatigue accumulée. Immédiatement,<br />
Gaia Saitta et ses grands yeux expressifs<br />
m’accueillent : « Je termine une ou deux<br />
choses et je suis toute à toi ! » Deux<br />
minutes plus tard, me voilà installée dans<br />
la silencieuse cafétéria en compagnie de la<br />
metteuse en scène et de deux de ses fidèles<br />
compagnons : Hervé Guerrisi et Cédric<br />
Eeckhout. Récit d’une rencontre humaine.
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
If Human, qu’est-ce que c’est <br />
Gaia. Il faut partir d’abord de Fear & Desire je<br />
crois, qui est le spectacle que l’on a présenté la<br />
saison passée ici aux Halles de Schaerbeek.<br />
Ce n’est donc pas la première fois que vous<br />
êtes en contact avec les Halles <br />
G. Non, en effet. En fait, c’était un projet<br />
d’acteurs qui n’avaient jamais dansé et qui,<br />
pour l’occasion de Fear & Desire, voulaient le<br />
faire. Mais c’est surtout le projet grâce auquel<br />
le collectif est né. C’est une rencontre d’artistes<br />
très hétérogènes en termes de provenance :<br />
on a des langues différentes, des formations<br />
différentes. Et c’était, je crois, l’envie de se<br />
réinvestir par rapport à une foi artistique qu’il<br />
fallait révéler, sur ce qui est urgent aujourd’hui<br />
et pourquoi faire de l’art aujourd’hui, qui nous<br />
a constitués. Ça semble très grand et vaste,<br />
et en même temps, parfois, il faut revenir à<br />
des racines simples, très proches de nous.<br />
On avait donc envie d’une rencontre humaine<br />
véritable, de se mettre en danger, d’être<br />
vulnérables sur le plateau et de communiquer<br />
tout simplement, nous-mêmes. Le collectif<br />
est composé d’acteurs plus ou moins formés<br />
au mouvement, mais personne n’a étudié la<br />
danse. Pour le projet, on s’est demandé ce que<br />
nous avions envie d’amener sur un plateau.<br />
Et la réponse était : la vie. Comment amener<br />
la vie sur un plateau En prenant un vrai<br />
risque, en étant fragiles sur scène - même si<br />
cela fait 15 ans que l’on fait du théâtre. Et en<br />
même temps, comment oublier ce que l’on<br />
connait pour donner quelque chose de plus<br />
intime Fear and Desire, c’était un groupe de<br />
comédiens mais aussi une danseuse, Daisy,<br />
une chorégraphe, Julie Anne, et un producteur,<br />
Bram Smeyers, ainsi que Frédérick Denis, notre<br />
costumier : Des gens qui nous ont rejoints<br />
en cours de route et nous accompagnent<br />
encore aujourd’hui. Des gens qui ont voulu se<br />
mettre ensemble pour faire quelque chose qui<br />
ait du sens. Quelque chose qui redonnait un<br />
sens à ce que c’est « être sur un plateau », et<br />
comment l’amener de manière personnelle et<br />
intime.<br />
Salon de la CIA - Yes. No. Maybe - Nicolas Van Caillie<br />
« C’est sans doute le point de départ<br />
de notre histoire : on a été contagieux,<br />
viraux. »
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
Ce qui intéresse les gens ce sont les gens. Il y<br />
avait ce désir d’humanité. C’est de là que vient<br />
le nom IF Human, parce qu’on voulait faire<br />
de l’art (même si ce mot est tellement vaste)<br />
avec l’humain. On voulait s’engager réellement<br />
par rapport à qui nous sommes. Pas parce<br />
que l’on se prend pour des œuvres d’art, mais<br />
bien parce que l’espace entre toi et moi est<br />
potentiellement de l’art. Et si on a la chance de<br />
savoir le mettre sur un plateau, c’est terrible.<br />
C’est sans doute le point de départ de notre<br />
histoire : on a été contagieux, viraux. On ne<br />
s’attendait pas à être en première d’un grand<br />
festival, d’être associés à un théâtre comme<br />
Les Halles de Schaerbeek et du coup, d’avoir<br />
une résidence, la possibilité de continuer notre<br />
recherche et la chance de montrer plusieurs<br />
choses en octobre.<br />
« Pas besoin de parler chinois pour comprendre<br />
l’amour ! »<br />
Avec toutes ces influences mêlées, comment<br />
se passe la création <br />
G. Ce qui est très beau, c’est la participation à<br />
tout ça. Au début il y avait une grande volonté<br />
d’Hervé et moi de créer une famille artistique,<br />
et chacun de nous met quelque chose sur la<br />
table. Ce n’est pas juste une participation, c’est<br />
vraiment un engagement même au niveau du<br />
temps, des idées. Par exemple, on a travaillé<br />
avec Igor qui fait de la lumière et de la vidéo,<br />
avec Tom qui est ingénieur du son... C’est par<br />
hasard que je me trouve à la mise en scène, en<br />
fait. C’est vraiment une création If Human et<br />
c’est très horizontal. Je ne demanderai jamais<br />
à Tom comment il faut faire le son, il sait bien<br />
ça. Il me fait des propositions et m’apprend.<br />
C’est quelque chose de très participatif : la<br />
matière sur le plateau appartient à chacun<br />
d’entre eux… Et moi, je regarde.<br />
Fear and Desire - Nicolas Van Caillie
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
Yes. No. Maybe - NIcolas Van Caillie
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
« Not everyone can be a dancer but everybody<br />
can dance » semble être votre devise. Un petit<br />
mot là-dessus <br />
Hervé. Je pense qu’il y a l’idée du<br />
rassemblement. « Not everyone can be a<br />
dancer », ça pourrait être une manière d’exclure<br />
quelqu’un sous prétexte qu’on saurait faire tel<br />
mouvement qui ferait de nous un danseur dans<br />
une définition particulière de la danse. Mais<br />
If Human c’est l’histoire d’un rassemblement<br />
dont la volonté est de communiquer. Gaia<br />
parlait toute à l’heure de contagion : entre<br />
nous, vu que tout le monde vient d’endroits<br />
différents, le seul dénominateur commun c’est<br />
notre corps. Parce qu’on n’a pas besoin de<br />
parler chinois pour comprendre la tristesse,<br />
l’amour et le désespoir. Donc on a va se<br />
rencontrer pour ajouter à la tristesse, l’amour<br />
et le désespoir, la joie. La joie de danser, de<br />
vivre et de communiquer.<br />
G. Deux choses que je voulais dire par rapport<br />
à qui est If Human : Il y a d’un côté ces<br />
moments de vulnérabilité de quelqu’un qui<br />
utilise un langage qu’il ne connaît pas, mais<br />
qui a cette envie de communiquer. Le fait<br />
de choisir quelque chose qu’on ne sait pas<br />
faire nous mettait dans un risque physique.<br />
C’est comme quand tu tombes amoureux<br />
mais que tu n’as pas encore la réponse de<br />
l’autre personne : tu n’as plus de mots, il y<br />
a un tremblement. Et la recherche, c’est ce<br />
tremblement. Même si on est sûrs de nos<br />
armes, quand tu regardes tes relations avec<br />
les autres, avec la vie, t’es jamais sûr. C’est<br />
ça qu’on recherche en dansant. Ça c’est la<br />
première chose… et la deuxième j’ai oublié.<br />
G. Ah oui, la joie ! Il faut prendre du plaisir. On<br />
a vraiment envie de raconter quelque chose<br />
de l’intérieur, d’être très fragiles, et d’arriver<br />
jusqu’au bout de notre douleur, sans peur.<br />
Mais notre dernier mot, c’est toujours la joie,<br />
parce que je pense que notre révolution, notre<br />
contribution, passe par là.<br />
H. Je trouve ça très important ce que tu<br />
nommes révolution et ce rapport à la joie. On<br />
attend souvent d’un artiste qu’il dénonce, qu’il<br />
pointe du doigt mais c’est souvent associé à<br />
quelque chose de sombre, alors que cela peutêtre<br />
une révolution de la joie.<br />
Yes. No. Maybe - NIcolas Van Caillie
E<br />
EVERYBODY CAN DANCE<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
Si je vous dis : « Ne me parle pas d’amour,<br />
parle-moi de ...» <br />
G. Mmh... (long silence)<br />
Plus d’info<br />
On peut y revenir plus tard si vous voulez.<br />
G. Non, non. J’ai envie de répondre (silence).<br />
« Ne me parle pas d’amour… mais parle-moi. »<br />
Simplement.<br />
En octobre vous allez donner rendez-vous à<br />
la vie aux Halles de Schaerbeek. Qu’aimeriezvous<br />
justement lui dire <br />
G. Viens ! C’est le moment, viens !<br />
Oui à…<br />
G. Oui à toutes les raisons qui me font me lever<br />
le matin et qui me font encore dire « oui ! »<br />
malgré tout.<br />
Site Internet<br />
www.ifhuman.com<br />
www.halles.be<br />
Page Facebook<br />
https://www.facebook.com/pages/Les-<br />
Halles/128465060574451ref=br_tf<br />
Actualité<br />
Ne parlez pas d’amour<br />
Les 13, 14, 15, 20 & 21/10 à 20h30<br />
Apputamento con la vita, le bal<br />
Le 18/10 à 20:30<br />
Non à …<br />
G. Non à l’impossible.<br />
Yes. No. Maybe (or the anatomy of lack)<br />
Le 24.10 à 20:30<br />
Peut-être …<br />
G. Peut-être, ça va venir !<br />
Crédits photo<br />
Nicolas Van Caillie pour Les Halles de Schaerbeek<br />
Qu’est-ce qu’on ne sait probablement pas sur<br />
If Human Quelque chose à révéler à nos<br />
lecteurs…<br />
G. Celle-là est pour toi Cédric. Un gossip If<br />
Human !<br />
C. (cherche longtemps)<br />
G. Lorsqu’on est sur le plateau, on joue à faire<br />
du théâtre.
F FOGGY FLOWERS AXELLE MINNE<br />
#I<br />
FOGGY FLOWERS<br />
par Alice Lemarin
F FOGGY FLOWERS AXELLE MINNE<br />
#I
F FOGGY FLOWERS AXELLE MINNE<br />
#I
F FOGGY FLOWERS AXELLE MINNE<br />
#I
F FOGGY FLOWERS AXELLE MINNE<br />
#I
F FOGGY FLOWERS<br />
AXELLE MINNE #I<br />
Plus d’info<br />
Photographe<br />
Alice Lemarin<br />
Site Internet<br />
www.alicelemarin.fr<br />
Modèle<br />
Anna Bozovic
G<br />
GARDER UNE IMAGE DE L’ÉTÉ<br />
JEHANNE VICTOIRE MOLL DE CHANGY #I<br />
GARDER UNE IMAGE<br />
DE L’ÉTÉ<br />
par Justine Neubach<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
http://silencieuse.net/
G<br />
GARDER UNE IMAGE DE L’ÉTÉ<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Après septembre, l’été, c’en est fini. Ne subsistent de la saison<br />
que des compartiments : petits étés indépendants au cœur du<br />
grand été, qui se tournent le dos comme des irréconciliables.<br />
Ils portent chacun le début et la fin d’une histoire ; ils méritent<br />
chacun leur album dans les rayons de la mémoire.<br />
L’été suisse sur le lac Léman, avec son chassé-croisé de<br />
mouettes bondées - ces bateaux où l’on grimpe comme on<br />
prendrait le bus, pour passer d’une rive à l’autre -, avec sa<br />
lumière de grands ciels prise aux filets du jet d’eau, avec le long<br />
soupir des paquebots prêts à quitter la rade. Le fond sonore,<br />
comme cela se produit dans les grandes capitales, mêle aux<br />
bruits des moteurs le phrasé de l’anglais, du français, de l’italien,<br />
du suisse alémanique et combien d’autres langues encore.<br />
Une enfant s’émerveille de ce moineau qui lui mange presque<br />
dans la main.<br />
L’été sur l’île déserte. Une île qui ne parle que de cailloux blanchis par<br />
le sel et brûlants de fièvre, une île au sommet de laquelle sommeillent<br />
les ruines d’une tour. On entend la mer se cogner contre la falaise.<br />
On l’entend claquer sur la roche. On entend la faim de ces eaux qui<br />
voudraient manger l’île. Et l’on entend aussi la réponse immobile de<br />
l’île. Son refus d’être prise. Au niveau des falaises, elle a comme le<br />
torse bombé ; au niveau de la tour en ruines, un front de pierre offert<br />
au vent.<br />
L’été dans les campagnes allemandes. Nous sommes début août :<br />
depuis quelques semaines, la saison est basse de plafond – un soleil<br />
timide sur les prés et sur le verger, le temps de cueillir quelques fruits,<br />
de faire marcher en main la jument prise de coliques, de faire sauter<br />
les crêpes, et déjà, il nous faut rentrer. L’orage nous surprend, au retour.<br />
Il approche en grognant, droit vers le couchant. Il avance contre les<br />
nuages roses dans une lumière surnaturelle. Il a le ventre lourd de<br />
pleurs. Et quand il craque enfin, il me donne envie de chanter.
H<br />
HAPPY BIRTHDAY, AB !<br />
QUYNH-ANH PHAM<br />
#I<br />
HAPPY BIRTHDAY, AB !<br />
L’Ancienne Belgique a 35 ans ! Ce 21<br />
septembre, le temple du rock lance le coup<br />
d’envoi des festivités avec un mini-festival<br />
autour des suédois de Goat. Entre dimanche<br />
sans voitures, renommage de la rue des<br />
Pierres en rue de la Musique et distribution<br />
de goodies pour les premiers spectateurs,<br />
l’AB nous montre que le rock expérimental<br />
peut aussi rimer avec mobilité, écologie et<br />
convivialité. Tout au long de la saison 2014-<br />
2015, l’Ancienne Belgique proposera chaque<br />
mois un événement interdisciplinaire<br />
en collaboration avec d’autres grandes<br />
institutions telles que Bozar, le Botanique, le<br />
MIM ou encore le KVS. De quoi nous rendre<br />
chèvre encore de nombreuses années !
H<br />
HAPPY BIRTHDAY, AB !<br />
QUYNH-ANH PHAM<br />
#I<br />
Pour l’occasion, nous avons<br />
récolté les témoignages de vos<br />
meilleures rencontres musicales<br />
et de vos souvenirs de concerts<br />
les plus intenses entre les quatre<br />
murs de ce lieu (de) culte. Et en<br />
bonus, les membres de l’équipe<br />
ont concocté pour vous une<br />
playlist à partir du line-up de la<br />
saison prochaine. Des morceaux<br />
de choix à déguster qui vous<br />
évoqueront probablement vos<br />
propres millésimes !<br />
35 ans de l’AB, c’est…<br />
Sébastien H. Le dernier concert d’Emilie Simon,<br />
le passage très mouvementé de Crystal Castles,<br />
l’invitation sur scène de Vive La Fête, et encore bien<br />
d’autres.<br />
Jehanne M. Le concert de Local Natives, le 31<br />
octobre 2013. Beaucoup mieux qu’au Pukkelpop car de<br />
meilleures conditions et surtout une bonne tranche de<br />
rire avec un clin d’œil pour Halloween où les musiciens<br />
sont revenus déguisés.<br />
Didier B. J’y ai travaillé en 1979, au tout<br />
début, à l’époque où il y avait encore le bar<br />
Américain… Que de bons souvenirs !<br />
Gaëtan D. Indochine fin des années 90<br />
quand ils ne remplissaient plus les salles… Au<br />
premier rang à papoter avec Nicolas qui nous<br />
demandait ce que nous voulions qu’il chante et<br />
tournait et retournait les pages d’un classeur<br />
avec les paroles…<br />
Sophie V. Avril Lavigne, mon tout premier<br />
concert mais aussi Moderat, Metronomy et<br />
Channel Zero. Toujours de très beaux moments<br />
de folie entre<br />
amis !<br />
Catherine C. Dire « Mais quel talent ! » à<br />
la petite blonde effacée à ma gauche lors du<br />
concert de Biolay l’année dernière.<br />
Olivier M. Adèle à l’AB Club en 2008 avec à<br />
peine 200-350 personnes… et Sia en mai 2010 !<br />
Delphine E. Tellement de souvenirs à l’AB.<br />
J’ai dû y aller 40 ou 50 fois… Dropkick Murphys<br />
en janvier 2007, un groupe au top et un public<br />
tellement déchaîné que le bassiste nous a<br />
proposé, avec une amie, de venir voir le concert<br />
sur scène, tranquillement. Sinon les concerts à<br />
l’AB Club. Enter Shikari une vraie tuerie (un t-shirt<br />
y a laissé la vie) !
H<br />
HAPPY BIRTHDAY, AB !<br />
QUYNH-ANH PHAM<br />
#I<br />
Yann L. Indubitablement, le concert<br />
de LCD Soundsystem de 2007 reste mon<br />
meilleur souvenir à l’AB. Je n’ai plus jamais vu<br />
un concert en salle qui ait fait autant danser<br />
les gens. Je me rappelle être au balcon<br />
pendant le morceau « Yeah » pour regarder<br />
la foule, c’était complètement dingue. Un des<br />
meilleurs concerts que j’aie faits.<br />
Daniel B. My Bloody Valentine, et le jeudi<br />
30 avril 1992<br />
Sarah G. Balthazar and the SX, deux des<br />
meilleurs concerts de ma vie…<br />
Claude K. J’y ai vu Claude François avec<br />
ma maman… !<br />
Nicolas B : Les concerts de Daughter, de<br />
Passenger et de M !<br />
Françoise D. Le passage de mon oncle<br />
Paul Dermont, imitateur de talent, dans les<br />
années 60.<br />
Gilles F. L’avant-dernier concert de<br />
Velvet Revolver. Le lendemain, à Amsterdam,<br />
ils terminaient leur tournée et se séparaient<br />
de leur chanteur Scott Weyland. Un excellent<br />
concert et l’occasion d’admirer le talent de<br />
Slash en direct !<br />
La saison 2014-2015 de l’AB,<br />
c’est…<br />
…Une playlist concoctée par<br />
nos soins, à découvrir ici<br />
Marie-Claire H. Au premier rang pour<br />
voir Mick Hucknall !
H<br />
HAPPY BIRTHDAY, AB !<br />
QUYNH-ANH PHAM #I<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
www.abconcerts.be<br />
Facebook<br />
https://www.facebook.com/ABconcerts<br />
Actualité<br />
21 septembre - Anniversaire avec Goat + Moon<br />
Duo + Madensuyu + White Hills + Bo Ningen +<br />
Crows<br />
Crédits photo<br />
Houtkaai Zeven
I<br />
L’ILLUSTRATION<br />
MAUD ZABCZYNSKI<br />
#I<br />
maudzabczynski.blogspot.be
J<br />
JOUER DÉCALÉ<br />
JEHANNE MATTHIEU MOLL MARCHAL<br />
#I<br />
JOUER DÉCALÉ<br />
On les croise parfois en basketteurs, parfois<br />
travestis en femmes des années 50, on<br />
pourrait les croire cyclistes ou rockeurs<br />
débridés, mais Mountain Bike, contre toute<br />
les attentes, c’est surtout un condensé de<br />
garage-pop décontracté et instinctif. Avec<br />
leur premier album acclamé, le groupe<br />
s’installe en fer-de-lance d’une nouvelle<br />
scène hybride où tout le monde est copain.
J<br />
JOUER DÉCALÉ<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
On entend de plus en plus parler de vous<br />
depuis un peu moins d’un an, notamment<br />
grâce à votre premier album. C’était quoi le<br />
déclic <br />
On a d’abord sorti un 45tours dont le délire<br />
était d’être vraiment garage, enregistré par<br />
nous-mêmes, quelque chose de lo-fi. Mais<br />
pour l’album, on a eu la chance de travailler<br />
avec Pierre Vaffrey, qui construisait son studio<br />
(Snapshot Studio, NDLR), du coup on était le<br />
groupe-cobaye ! Le mec est super calé, et il<br />
nous a donné un son comme on le voulait,<br />
finalement un peu plus ’90s que garage. Ca a<br />
surpris tout le monde dans notre milieu mais<br />
on cherchait quelque chose de très personnel<br />
et ça s’est imposé comme ça.<br />
Comment êtes-vous arrivés à ce résultat plus<br />
personnel, moins classifié <br />
On arrive tous en répétition avec des idées<br />
d’harmonie, quelques accords. Parfois des<br />
morceaux davantage construits… mais en<br />
ce moment c’est surtout des morceaux<br />
de morceaux ! Généralement on part d’un<br />
matériau très brut, une idée vite fait de refrain<br />
par exemple, et ensuite on joue aux Lego (rires)<br />
! Il faut travailler vite pour garder l’énergie,<br />
être assez instinctif sur ce qui sonne bien.<br />
Evidemment quand on ne trouve pas, on<br />
s’acharne.<br />
« Le rire c’est un plaisir, non La musique<br />
aussi, alors si tu peux faire le<br />
con en même temps, bon plan ! »<br />
Quel était le morceau le plus dur à finaliser <br />
Sur l’album, « Russian Roulette Casino », elle<br />
change de tempo, elle est longue et il ne faut<br />
pas perdre la tension et ça c’est très dur. C’est<br />
de la pop, donc l’essence du bazar c’est que ça<br />
doit fonctionner immédiatement…<br />
Justement, vous utilisez le terme pop pour<br />
parler d’une de vos chansons : quel est votre<br />
rapport aux étiquettes de genres musicaux <br />
On s’en tape (rires) ! Ça dépend de comment<br />
on se lève le matin. Parfois on fait un truc pop<br />
et on le réécoute plus tard en se disant qu’il<br />
faut le salir un peu, puis une fois que c’est<br />
fait on le trouve trop crade alors on revient en<br />
arrière. Ce ne sont que des termes, mais en<br />
soi on se situe entre l’énergie du garage et le<br />
plaisir de la pop. Cela dit, on pourrait balancer<br />
du grunge sur le prochain hein, pourquoi pas !<br />
Vous pensez déjà au prochain album <br />
Ouais, Charles en a déjà marre de jouer les<br />
titres de l’album (rires) !
J<br />
JOUER DÉCALÉ<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
Toute votre communication et visuels sont<br />
empreints d’un second degré pas prise-detête-rock’n’roll<br />
pour un sou, c’est une sorte de<br />
manifeste <br />
Non, on n’est pas trop méchants, pas trop<br />
militants. On n’aime juste pas les clichés<br />
rock’n’roll et tête-de-mort. Puis finalement à<br />
l’heure actuelle dans notre milieu si tu te la<br />
pètes comme une star tu ne réussis pas. Ça<br />
c’est seulement bon pour faire de l’audience<br />
à The Voice, et encore vite fait. On préfère<br />
être sincères. En tout cas, on ne fait pas ça<br />
en réaction par rapport à quelque chose, c’est<br />
juste comme ça que ça nous vient et c’est<br />
plus communicatif en concert. Le rire c’est<br />
un plaisir, non La musique aussi, alors si tu<br />
peux faire le con en même temps, bon plan !<br />
J’ai cru comprendre que vous aviez un certain<br />
succès dans le monde du cyclisme <br />
On a eu quelques propositions (rires). On nous<br />
a proposé de jouer au mondial du cyclisme<br />
à Anvers, ils avaient tripé sur notre nom. Et<br />
il y a un autre gars à Lille qui veut nous faire<br />
jouer dans son atelier de réparation de vélos,<br />
c’est marrant !<br />
Votre concert le plus mémorable <br />
A Liège, il y a une fille qui s’est pointée sur<br />
scène bien bourrée à la fin de notre concert<br />
pour demander son mec en mariage, mais<br />
il n’est jamais venu. C’était complètement<br />
improbable, à la fois un peu pathétique et<br />
beau, il y avait une sorte de détresse. Drôle de<br />
moment.
J<br />
JOUER DÉCALÉ<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
http://mountainbike.bandcamp.com<br />
Facebook<br />
https://www.facebook.com/mountainbikeband<br />
Actualité<br />
21 septembre à l’Ancienne Belgique
K<br />
KALÉIDOSCOPE EXTATIQUE<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
KALÉIDOSCOPE<br />
EXTATIQUE<br />
Lara Gasparotto, liégeoise de 24 ans<br />
émigrée à Bruxelles, nous propose<br />
une approche de la photographie dans<br />
laquelle la dualité entre l’image réfléchie<br />
et l’instantané se conjuguent. Diplômée<br />
de l’Ecole supérieure des arts Saint-Luc à<br />
Liège, elle compte déjà deux livres et de<br />
nombreuses expositions en solo à son actif,<br />
et est représentée depuis 2010 par la galerie<br />
anversoise Stieglitz 19. Dans son travail, les<br />
images en noir et blanc côtoient celles en<br />
couleurs, dévoilant son approche intuitive<br />
de la photographie. Pour citer Michel<br />
Poivert, auteur de l’introduction de son<br />
livre Rivages : « L’extatique naît ainsi d’un<br />
kaléidoscope de pratiques visuelles qui ne<br />
cesse de recomposer les figures du désir. »
K<br />
KALÉIDOSCOPE EXTATIQUE<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
Bonjour Lara ! D’où t’es venue l’envie de faire<br />
de la photographie <br />
En sortant de mes secondaires, je ne savais<br />
pas trop vers quoi me diriger. Je réalisais des<br />
photos pour moi, et je m’inspirais des photos<br />
des autres pour faire des peintures, des<br />
collages etc. Alors je me suis dit que j’avais<br />
envie d’apprendre à faire mes propres images<br />
photographiques. Au départ, j’ai choisi cela<br />
pour me permettre de prendre une pause et<br />
savoir vers où je voulais me diriger dans la<br />
vie, car j’étais un peu perdue. Mais ensuite la<br />
photo m’a directement plu.<br />
Tu as donc choisi de te concentrer sur la<br />
photo, et mettre de côté tes autres pratiques<br />
artistiques comme le collage et la peinture.<br />
Elles ne te manquent pas <br />
Non, je pense que j’y reviendrai sûrement.<br />
Techniquement, j’ai appris beaucoup de<br />
choses lors de mes secondaires artistiques.<br />
Pour le moment la photo me satisfait, mais<br />
j’y reviendrai quand j’en aurai envie. J’essaye<br />
quand même d’expérimenter plein d’autres<br />
techniques dans la photographie, et de ne pas<br />
faire qu’une seule sorte de photo. J’utilise plein<br />
de supports différents, j’emploie des vieux<br />
procédés… Du coup jusqu’ici cela ne me frustre<br />
pas.<br />
«On ne sait pas directement identifier<br />
si une photo prise sur le moment ou<br />
non »<br />
Tes photographies donnent l’impression<br />
d’instantanés, y a-t-il un travail en amont <br />
Au fil des années il y a eu une évolution dans<br />
mon travail qui, je pense, se construit de plus<br />
en plus. Pour mon travail de fin d’études, j’ai<br />
choisi de me pencher sur les images qui ne<br />
se lisent pas directement, où l’on ne peut pas<br />
savoir d’emblée si elles ont été mises en scène<br />
ou si ce sont des instants spontanés. J’ai voulu<br />
prolonger cette réflexion dans mes installations,<br />
mes expos ou même à travers mes livres, où<br />
les images ont plusieurs interprétations. On ne<br />
sait pas directement identifier si une photo a<br />
été prise sur le moment ou non. Certaines sont<br />
totalement instantanées, et d’autres un peu plus<br />
réfléchies. Même si je pense les photos avant<br />
de les prendre, elles ne sont jamais exactement<br />
comme je les avais imaginées. J’aime jouer sur<br />
cette dualité.<br />
Tu nous parlais de tes installations, en quoi<br />
consistent-elles <br />
En général j’essaye d’avoir une partie de<br />
l’expo assez classique avec juste des images<br />
encadrées, et une autre où j’expérimente, je<br />
colle des trucs sur les murs, j’imprime des<br />
images sur des vieux papiers... Je mélange avec<br />
des photos bichromatées, qui sont obtenues<br />
par de vieilles techniques avec des pigments.
K<br />
KALÉIDOSCOPE EXTATIQUE<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
J’essaye de faire en sorte qu’il y ait à chaque<br />
fois une composition différente.<br />
« L’esthétique féminine m’attire plus<br />
que celle de la masculinité »<br />
peintures. Moi je photographie mes amies. Pour<br />
le moment j’ai un projet d’édition avec une amie<br />
qui va écrire sur mes photographies. C’est un<br />
échange. On se base sur le fait qu’on a toutes<br />
des univers artistiques assez différents mais<br />
Quelles sont tes inspirations principales <br />
Disons que je m’inspire de tout ce que je vois.<br />
Je peux être inspirée par la musique que<br />
j’écoute en travaillant, les films que je regarde.<br />
J’ai puisé aussi beaucoup d’inspiration dans<br />
toute l’histoire de la peinture : je pense que c’est<br />
de là que viennent tous mes nus féminins. Tout<br />
peut être une source d’inspiration, mais c’est<br />
sûr que quand je voyage je suis beaucoup plus<br />
inspirée en rentrant. J’ai pleins de nouveaux<br />
paysages et de nouvelles couleurs en tête et<br />
j’ai envie de retranscrire toutes ces émotionslà.<br />
Je photographie également plus de femmes<br />
que d’hommes. C’est venu naturellement. J’ai<br />
toujours préféré dessiner des filles. C’est un<br />
choix esthétique je pense, l’esthétique féminine<br />
m’attire plus que celle de la masculinité.<br />
Tu fais partie du collectif Big Girls Don’t Cry,<br />
vous avez réalisé des expositions ensemble.<br />
Comment cela se passe-t-il <br />
C’est différent lorsque l’on travaille ensemble,<br />
car on doit toutes communiquer et choisir ce<br />
que l’on va montrer. Créer avec des copines<br />
permet de s’inspirer mutuellement. Des amies<br />
à moi utilisent mes photos pour réaliser leurs<br />
qu’on a le même background. C’est amusant de<br />
pouvoir sortir du milieu artistique très fermé pour<br />
faire un truc où l’on s’éclate !<br />
Ta sœur, Lissa, est également dans le milieu<br />
artistique, puisqu’elle réalise principalement des<br />
illustrations. As-tu déjà pensé à travailler avec<br />
elle <br />
Oui, c’est un projet sur lequel j’aimerais vraiment<br />
me pencher. J’aimerais commencer à travailler
K<br />
KALÉIDOSCOPE EXTATIQUE<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
sur un projet où je montrerais mes travaux mais<br />
aussi ceux de tous les gens qui m’entourent et<br />
que je trouve exceptionnels. Et essayer de faire<br />
quelque chose de commun en mélangeant des<br />
textes, des photos, des dessins, avec ma sœur<br />
notamment.<br />
Tu as à peine 24 ans et tu as déjà sorti deux<br />
livres, tu es représentée par une galerie à<br />
Anvers… As-tu eu l’impression que tout allait<br />
fort vite <br />
Oui, bien sûr. Notamment dans l’année ou le<br />
premier livre est sorti, je me posais plein de<br />
questions car j’avais 22 ans et je me demandais<br />
ce que j’allais faire de ma vie, si je voulais<br />
réellement être photographe. Je me remettais<br />
en question. Puis à un moment il y a eu une<br />
phase d’acceptation, où je me suis dit que<br />
c’était peut-être pour ça que j’étais douée. J’ai<br />
appris à moins dénigrer ce que je faisais et à<br />
le faire mieux. J’ai réfléchi à comment trouver<br />
un sens à ce que je faisais, car au début je<br />
n’y réfléchissais pas et je fonçais juste. C’est<br />
sûr qu’il y a toujours des moments de doute,<br />
mais c’est le cas chez tout le monde. Je dis<br />
finalement que j’ai eu de la chance que ça aille<br />
si vite, car beaucoup d’autres gens talentueux<br />
n’ont pas cette chance. Je n’ai plus trop le<br />
temps de me poser des questions, car j’ai<br />
toujours des nouveaux projets qui se succèdent.<br />
Je fais mes trucs, et tant mieux si cela va vite,<br />
j’essaye de me focaliser davantage sur le fait de<br />
prendre le temps de réfléchir à comment faire<br />
évoluer mon travail.
K<br />
KALÉIDOSCOPE EXTATIQUE<br />
FLORENCE VANDENDOOREN<br />
#I<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
http://laragasparotto.tumblr.com/<br />
Actualité<br />
14/09 – 09/11 : Exposition « Rivages » au<br />
Cultuurcentrum de Hasselt<br />
Novembre 2014 : Exposition collective au<br />
Bonnefantenmuseum<br />
Crédits photo<br />
Lara Gasparotto
L<br />
L’EFFET DE MAUD<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
L’EFFET DE MAUD<br />
Il y a quelque chose de magnifique dans<br />
nos histoires. A chaque instant, à chaque<br />
seconde, quelque chose se passe partout.<br />
Un ciel bleu qui se couche sur l’horizon,<br />
et une rencontre d’une intensité rare.<br />
Illustratrice aux multiples facettes, Maud<br />
Zabczynski réveille nos souvenirs et calme<br />
nos troubles. Elle donne cette délicate<br />
impression que tout peut s’envoler, comme<br />
pour nous aider à aimer le pire chez l’autre,<br />
et à s’attacher au meilleur avec le temps.<br />
Elle illustre nos certitudes de ne jamais être<br />
assez bien, nos espoirs d’être indispensable<br />
à l’Univers. Elle met des images sur notre<br />
refus d’une sagesse trop longue, et donne<br />
une couleur à nos extraits d’étincelles.<br />
Sept moments intenses, comme si ce petit<br />
bout de femme était à la fois l’île et le<br />
bateau, pour aller à notre rencontre et nous<br />
emmener au bord des choses.
L<br />
L’EFFET DE MAUDE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Les premiers pas<br />
Ma maman commence par me mettre<br />
des pinceaux dans les mains, elle me<br />
laisse m’exprimer, elle m’inscrit à des<br />
ateliers artistiques et elle m’emmène à des<br />
expositions. Je découvre l’univers artistique<br />
très jeune. Je me rappelle des cabanes en<br />
tissu que je construisais, j’ai la chance d’avoir<br />
eu une maman près de moi quand j’étais petite.<br />
Grand saut dans le temps. Je suis Lilloise,<br />
presque Belge. Je rentre dans un lycée d’arts<br />
appliqués à Roubaix, une sorte de petit cocon<br />
ou j’évolue parmi des personnes créatives.<br />
Je me suis ensuite orienté vers le stylisme, à<br />
Tourcoing. A 20 ans, je m’installe à Bruxelles,<br />
je prends des cours du soir en bande dessinée<br />
et je commence à étudier l’illustration à Saint-<br />
Luc.<br />
La quête de sens<br />
Certaines thématiques me sont chères, comme<br />
des idées de célébration, de communion avec<br />
les autres et la nature, le monde onirique. C’est<br />
une idée de partage dans la création. Cette<br />
créativité m’apporte simplement un bien-être,<br />
se sentir avec l’idée du monde qu’on a envie de<br />
partager ou de véhiculer, le lien entre le réel et<br />
la fiction. Par l’image, tu peux communiquer<br />
avec n’importe qui, sans utiliser les mots.<br />
Et même quand le mot et l’image sont<br />
associés, ils ne disent pas la même chose<br />
et se complètent. Il y a toujours une histoire,<br />
une ambiance, une atmosphère dans ce que<br />
j’essaie de créer. Mais tout commence toujours<br />
par une recherche d’images. Il y a un perpétuel<br />
aller-retour et la phase de liberté sans<br />
intentions et ce moment où l’intention doit être<br />
clairement exprimée. Il faut avoir cet équilibre<br />
entre la technique et la sensibilité.<br />
« Les failles deviennent les forces avec le<br />
temps, et dans un travail comme celui-ci,<br />
l’hypersensibilité est canalisée »
L<br />
L’EFFET DE MAUD<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Mosaïque<br />
Je m’intéresse à de nombreuses techniques.<br />
J’ai tendance à la dispersion, mais il y a<br />
toujours un je-ne-sais-quoi qui relie tout. J’ai<br />
toujours le dilemme entre le côté graphique<br />
et le côté pictural, entre la poésie simple et la<br />
force de la couleur. Je m’intéresse aussi aux<br />
matières textiles, les boutiques de vêtements<br />
sont de véritables musées pour moi. Je me<br />
suis intéressée à la mosaïque avec une amie,<br />
Murielle Lô, avec qui j’ai réalisé ce travail à<br />
Saint-Gilles. Suite à un appel à projets, notre<br />
dossier a été retenu. Nous proposions à la<br />
fois de la réaliser avec de la peinture et des<br />
touches de mosaïque mais la commune a<br />
uniquement souhaité une mosaïque. Gros<br />
challenge pour nous car c’était une première<br />
fois.<br />
La mélancolie<br />
Elle est inhérente au vécu de chacun. Elle est<br />
complémentaire à mon euphorie, elle est liée<br />
à une certaine idée du romantisme. C’est une<br />
sorte de constat de l’époque dans laquelle<br />
on vit, des choses positives mais aussi de la<br />
désillusion. Il y a la dureté du monde, mais<br />
ce n’est pas la fin du monde, c’est la fin d’un<br />
monde. Nous sommes parfois tristes, parfois<br />
mélancoliques, mais nous restons solidaires<br />
dans ce genre de moment, ce n’est pas<br />
quelque chose de pessimiste. J’ai plein de<br />
failles, je pense les connaître. Je les connais<br />
mieux maintenant qu’à 19 ans. Les failles<br />
deviennent les forces avec le temps, et dans<br />
un travail comme celui-ci, l’hypersensibilité est<br />
canalisée.
L<br />
L’EFFET DE MAUD<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Rencontre avec Pierre Huyghe<br />
Beaucoup d’artistes m’inspirent, mais je ne sais<br />
pas si ça se ressent dans mon travail. Pierre<br />
Huyghe est un artiste plasticien, un architecte<br />
français. Il travaille sur le rapport entre la fiction<br />
et le réel. J’ai une image de lui que j’avais affichée<br />
dans ma chambre quand j’étais petite sans savoir<br />
ce que j’allais faire plus tard. Plus tard, j’ai fait<br />
un voyage à Barcelone et je me suis retrouvée<br />
dans une expo de lui, et j’ai vu un des films qu’il a<br />
réalisés. Son travail et sa poésie me bouleversent.<br />
La femme-enfant<br />
J’ai besoin de me nourrir de mes expériences<br />
réelles en gardant beaucoup de fiction. Je suis<br />
autant inspirée par ma vie que par mes rêves. Il y<br />
a une grande part d’intimité que je veux préserver.<br />
L’enfance est encore très présente dans ma vie,<br />
l’adolescence aussi. Je ne peux pas me lasser<br />
de la nature, elle me ressource. Les nombreuses<br />
représentations de femmes dans mes travaux<br />
évoquent la nécessité de douceur et simplement<br />
de leurs présences.
L L’EFFET DE MAUD<br />
#I<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
Les projets<br />
Je participe à un appel à projets dans la<br />
campagne belge, à Hélécine. La thématique<br />
proposée est le carnaval, et ça me parle<br />
bien. J’ai proposé une mosaïque et aussi un<br />
autre travail, on verra ce que ça donne. Je<br />
pense aussi à réaliser un livre pour enfants.<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
http://maudzabczynski.blogspot.be/<br />
Tumblr<br />
http://maudzabczynski.tumblr.com/<br />
Actualité<br />
Mosaïque à Saint-Gilles, sur les murs à<br />
l’angle de la rue de la Perche et de l’avenue<br />
du Parc (de l’angle jusqu’à la friterie).<br />
Illustration #I
M<br />
MIKÓ’S STORIES<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
MIKÓ’S STORIES<br />
Tel un carnet de voyage, le travail de Pauline<br />
Mikó, composé d’objets, de minéraux, de<br />
textures et de nuances, de bouts et de<br />
fragments éphémères, nous a beaucoup<br />
touchés. C’est donc avec joie que nous<br />
nous sommes empressés de lui proposer<br />
une interview. Petit air malicieux et regard<br />
pétillant, elle nous a partagé son univers<br />
énigmatique. En constante recherche<br />
sur son environnement qu’elle analyse et<br />
maîtrise pleinement, elle réussit à capter<br />
l’âme des objets dans une esthétique sobre<br />
et pure telles ses roches d’Islande.
M<br />
MIKÓ’S STORIES<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
Qu’est-ce qui t’inspire au quotidien <br />
J’aime aller fouiller dans des souvenirs de<br />
famille, dans mes souvenirs d’enfance. La<br />
plupart de mes projets sont basés sur la<br />
relation aux objets et les traces que l’on laisse.<br />
Ils sont souvent liés au souvenir, à ce qui reste<br />
ou ce qui est éphémère. Ce qui m’inspire ce<br />
sont les choses qui traversent le temps. La<br />
photographie m’aide à les capter et à leur<br />
donner vie à travers leur image.<br />
Ton premier appareil photo <br />
Mon père est photographe, j’ai donc eu très tôt<br />
toutes sortes d’appareils en main. Mais mon<br />
premier appareil photo m’a été offert par ma<br />
mère pour mes vingt ans, c’était un Hasselblad<br />
moyen format.<br />
Parlons de ton projet Negatives : des<br />
autoportraits enterrés ou submergés dans<br />
l’eau pendant plusieurs semaines. Quel est le<br />
message ou le but (s’il y en a un) <br />
Enterrer, c’est enlever quelque chose du<br />
quotidien, le soustraire à la vie. Je prends une<br />
photo de moi, je l’enterre et après un certain<br />
temps ce n’est plus du tout une photo de moi<br />
; cela ressemble plus à un paysage. C’est une<br />
expérience chimique, j’observe l’effet de la<br />
terre ou de l’eau sur le négatif.<br />
Quels sont tes outils de travail <br />
Je fais beaucoup de scannographie grâce<br />
à mon scanner à négatifs. Je travaille sur la<br />
matière des choses, je scanne des objets ;<br />
c’est une manière de rentrer à l’intérieur de la<br />
matière. Ma mère est médecin et cela m’a pas<br />
mal influencée. Les microscopes, les livres de<br />
biologie… C’est une esthétique qui me plaît.<br />
Je fais beaucoup d’expérimentations, j’aime<br />
observer, analyser. Toute une partie de mon<br />
travail est basée sur des négatifs, je leur fais<br />
faire plein d’expériences. Je les altère, les<br />
maltraite même parfois.
M<br />
MIKÓ’S STORIES<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
Un peu comme le processus de la mémoire<br />
: les souvenirs se dégradent, ils perdent des<br />
éléments et des couleurs mais la réalité, l’âme<br />
de l’objet est toujours là.<br />
A project for later : Peux-tu nous expliquer ta<br />
démarche <br />
Quand j’étais petite, j’adorais cacher des objets.<br />
Un jour j’ai enterré une boîte avec des objets qui<br />
m’appartenaient dedans et je n’ai jamais arrêté.<br />
J’enterre des boîtes contenant des images,<br />
des cailloux, des textes, des petits objets. Des<br />
choses qui ont marqué mon quotidien à un<br />
moment de ma vie et que je décide un jour de<br />
regrouper en un endroit. Chaque boîte contient<br />
une histoire. Parfois ce sont des fictions, des<br />
vies que je m’invente ; parfois c’est la réalité. Ce<br />
sont des petits bouts de moi enterrés aux quatre<br />
coins du monde. Cela m’aide à me repérer dans<br />
une période de ma vie, à m’en souvenir. Un peu<br />
comme les gens qui se tatouent pour marquer<br />
un moment de leur vie. À l’intérieur de chacune<br />
il y a un petit mot : « If you find this, please send<br />
it back to Pauline Mikó. » J’attends de voir si elles<br />
vont me revenir. J’en ai enterré une en Islande,<br />
une dans l’Ohio et une autre au Maroc. Un jour,<br />
je ne sais pas quand, je déciderai d’aller toutes<br />
les chercher.<br />
Tu as également photographié des familles<br />
immigrées en collaboration avec Médecins du<br />
Monde. Qu’est-ce que ce projet t’a apporté <br />
Aimes-tu faire de la photographie engagée et<br />
comptes-tu faire d’autres projets de ce type <br />
Les familles que j’ai photographiées ont vécu<br />
dans un squat près de l’ULB pendant plus<br />
d’un an. Chaque année, Médecins du Monde<br />
mène son Plan Hiver afin de venir en aide<br />
aux sans-abri. Cette fois-ci, ils avaient décidé<br />
de demander à des étudiants de La Cambre<br />
de venir faire un travail photographique sans<br />
aucune consigne ni contrainte, dans le but<br />
d’apporter un regard artistique à leur travail.<br />
Ils cherchaient à se donner une image moins<br />
commerciale, sans message incitateur ou<br />
culpabilisateur. Ma première visite a été très
M<br />
MIKÓ’S STORIES<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
quelque chose, même symboliquement. Il n’y<br />
a pas besoin d’être médecin pour les aider. Un<br />
an plus tard, nos photos ont été exposées avec<br />
le KVS. On a pu toucher certaines personnes<br />
et cela nous a donné le sentiment qu’on<br />
pouvait changer le regard des gens, les éclairer<br />
sur des choses qu’ils ne savaient pas. Je n’ai<br />
pas refait de projet comme cela car c’était<br />
très difficile émotionnellement. Les contrastes<br />
étaient très prononcés, parfois absurdes : ces<br />
enfants s’étaient réfugiés dans une université,<br />
mais ils ne pourront probablement jamais faire<br />
d’études. Des rats côtoyaient les petits coins<br />
décorés de fleurs en plastique par les familles.<br />
Je ne me sens pas capable de faire cela tout le<br />
temps, mais si l’occasion se représente je me<br />
lancerai sans hésiter.<br />
dure. J’ai été choquée par les conditions dans<br />
lesquelles ces personnes vivaient mais j’ai<br />
décidé d’y retourner avec une traductrice.<br />
Malgré cela, le contact fut très difficile car ils<br />
avaient peur. Les enfants, eux, étaient plus<br />
avenants, ils voulaient essayer l’appareil photo.<br />
La confiance a fini par s’installer. Ce fut une<br />
grande expérience humaine mais au-delà de<br />
cela, j’ai apprécié pouvoir contribuer à ma<br />
manière. J’ai appris que l’on peut tous faire<br />
Quels domaines t’attirent en-dehors de la<br />
photographie <br />
La musique. J’ai fondé Oh My Garden avec<br />
des amis il y a quatre ans : chaque mois, on<br />
organise un concert dans un jardin dans le<br />
but de faire découvrir des artistes, mais aussi<br />
de réduire la barrière entre le public et les<br />
artistes ; les faire se rencontrer. Les concerts<br />
sont toujours organisés chez des personnes<br />
différentes, le cadre est très intimiste. Au<br />
début, c’étaient de petites sessions entre amis.<br />
Aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux et au<br />
bouche à oreille, le projet a pris de l’ampleur ;<br />
ce sont les artistes qui viennent vers nous.
M<br />
MIKÓ’S STORIES CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
Que fais-tu actuellement As-tu des<br />
projets <br />
Actuellement je travaille dans mon<br />
nouveau studio. Je fais une résidence<br />
de 2 ans au MAD In-Situ à Bruxelles. J’y<br />
expérimente beaucoup de choses et je<br />
travaille également sur des projets de<br />
design et de mode, plus commerciaux.<br />
C’est la première fois que j’ai la chance<br />
de bénéficier d’autant d’espace. J’y fais<br />
des mises en scène, desinstallations,<br />
des expérimentations ; j’imprime, je<br />
scanne, j’essaye. Je sens que mon<br />
travail est en train de prendre une<br />
toute autre dimension où l’espace (et<br />
la taille de mes tirages) ont de plus en<br />
plus d’importance. En dehors de ça je<br />
prépare mon prochain projet : je pars<br />
au Japon cet hiver pour réaliser une<br />
série de portraits de jeunes entre 20<br />
et 30 ans et travailler autour du thème<br />
de la destruction. La lente propagation<br />
des nuisances nucléaires et le silence<br />
autour de ce sujet est assez effrayant<br />
: la jeune génération n’en parle pas<br />
beaucoup et c’est cela qui m’intéresse.<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
http://mikopauline.wix.com/paulinemiko#<br />
Tumblr<br />
http://mikomikomikomiko.tumblr.com/<br />
Instagram<br />
http://instagram.com/miko.miko.miko.miko<br />
Actualités<br />
Miko/Miko Studio Opening<br />
Le 4 décembre<br />
4 Rue du Vautour, 1000 Bruxelles<br />
Expo Rossi Contemporary<br />
Bruxelles, Janvier 2015
N<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
Louis-Gabriel Nouchi, fraîchement diplômé<br />
de la Cambre et propulsé à l’avant de la<br />
scène par sa sélection au célébrissime<br />
festival de Hyères, nous raconte sa vision<br />
peu commune de la mode, minutieuse et,<br />
dirait-il, presque scientifique !
M<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Qui es-tu, Louis Gabriel Nouchi <br />
Je m’appelle Louis Gabriel, Je suis né et j’ai<br />
grandi à Paris. J’ai 26 ans. Je suis diplômé de<br />
La Cambre à Bruxelles depuis juin dernier.<br />
Quand as-tu décidé de te diriger vers le<br />
stylisme Etait-ce un coup de tête, une<br />
franche certitude depuis l’enfance, ou entre<br />
les deux <br />
On peut dire que j’ai un parcours scolaire un<br />
petit peu particulier : j’ai étudié 2 ans en fac<br />
de médecine et obtenu une licence en droit<br />
avant de me lancer dans la mode. J’ai toujours<br />
voulu faire ce métier. J’ai été très marqué<br />
par les défilés Lacroix et Yamamoto que je<br />
voyais en version résumée à la télévision<br />
quand j’étais enfant. Il n’y avait pas tous les<br />
moyens d’accès aux défilés à l’époque et ces<br />
souvenirs me restent très précieux. Malgré cet<br />
engouement, le monde de la mode était, et est<br />
toujours, un milieu très effrayant pour moi, je<br />
voulais donc être certain de mon choix avant<br />
de commencer de telles études. Je pense<br />
également qu’il n’est pas facile d’entamer<br />
des études artistiques à l’âge de 16/17 ans,<br />
et je suis très content d’avoir eu un peu de<br />
background avant de commencer. Alors oui,<br />
il s’agit là d’un rêve de gosse que j’ai mis un<br />
certain temps à assumer, mais aujourd’hui je<br />
ne pourrais plus envisager ma vie sans cette<br />
passion, cette profession.<br />
« J’ai un raisonnement très scientifique<br />
pour mes collections (...) tout se doit d’être<br />
justifié. »
M<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Tu as dernièrement présenté à Hyères<br />
une collection inspirée du thème central,<br />
l’antagonisme, du chef d’oeuvre « Princesse<br />
Mononoké » de Miyazaki. Tu nous racontes <br />
Ce film est sans conteste la plus grande<br />
claque visuelle que je me suis prise au<br />
cinéma, et d’elle a découlé toute mon<br />
obsession sur le Japon. J’avais besoin de<br />
travailler là-dessus pour pouvoir passer à<br />
autre chose. Travailler à partir d’un manga n’a<br />
pas été une mince affaire, car cette discipline<br />
n’est que trop peu considérée comme «une<br />
référence sérieuse» pour une collection de<br />
mode (surtout en Belgique où tout est très<br />
conceptuel). Je souhaitais surtout travailler<br />
sur la notion d’équilibre développée au sein du<br />
film : équilibre entre les hommes et la nature,<br />
les hommes et les femmes, l’état sauvage<br />
et la civilisation, … En somme, comment<br />
des opposés doivent vivre ensemble et en<br />
harmonie. J’ai également été inspiré par<br />
l’incroyable travail de l’artiste Geta Brătescu.<br />
L’objectif a été de réaliser une collection avec<br />
10000 informations, couleurs et techniques<br />
par pièce et par look et que d’un même<br />
tenant l’ensemble soit cohérent et «digeste»<br />
visuellement. Une autre idée était également<br />
de travailler la coupe ethnique (les kimonos)<br />
comme des tailleurs et inversement, ou<br />
bien de partir de broderie pour arriver à des<br />
illusions de jacquard.
M<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Faire partie des dix créateurs en compétition<br />
à un tel festival doit être sacrément<br />
encourageant. Comment en arrive-t-on à être<br />
sélectionné à Hyères <br />
C’est un immense honneur en effet, surtout<br />
quand on voit les créateurs qui sont passés<br />
par là ! J’ai mis un certain temps à réaliser,<br />
parce que tous les étudiants en rêvent.<br />
C’était assez compliqué car je me devais<br />
de gérer ma collection de 5ème année en<br />
même temps que le festival. A Hyères, il y a<br />
également énormément d’attention braquée<br />
sur soi, ce qui n’est pas forcément évident à<br />
gérer lorsqu’on n’a pas l’habitude. Comment<br />
en arriver là Dans la promo de cette année,<br />
on était tous de grands bosseurs. Il y avait<br />
énormément de travail et d’investissement<br />
dans chaque projet. Je pense qu’il faut avoir<br />
de la chance, tomber sur le bon jury pour<br />
que le dossier soit sélectionné. Il n’y a pas<br />
de formule miracle, je pense qu’il faut savoir<br />
provoquer la chance, être au bon endroit et au<br />
bon moment dans la mesure du possible.<br />
« J’aime avoir un côté racoleur ! »
M<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Tes collections s’appellent Alcools ou I hate<br />
humans !, pourquoi le choix de tels noms <br />
Je démarre toujours d’un thème précis<br />
(un film, un livre) que je développe autour<br />
de problématiques. J’ai un raisonnement<br />
très scientifique pour mes collections, je<br />
ne supporte pas les éléments décoratifs<br />
et tout se doit être justifié. Le titre permet<br />
d’interpeller. Il constitue généralement un des<br />
points de départ de la collection, donne une<br />
atmosphère ou une envie. I hate Humans est<br />
une des phrase du film de Miyazaki et Alcools<br />
et le titre du recueil de poème d’Apollinaire<br />
sur lequel j’ai travaillé pour ma collection<br />
homme. Apres j’aime bien aussi avoir un côté<br />
racoleur (rires) !<br />
Tu as terminé récemment tes études à la<br />
Cambre. Que t’aura apporté la Belgique dans<br />
ton travail <br />
Tout ! Je ne savais même pas coudre un<br />
bouton avant mon concours d’entrée à<br />
la Cambre. Certains profs que j’ai eu làbas<br />
sont incroyables. La Belgique a un<br />
potentiel énorme de création et je suis assez<br />
triste de partir d’ici, même si je compte<br />
faire régulièrement des allers-retours. Les<br />
gens, sans surprise, sont beaucoup plus<br />
ouverts qu’à Paris, il est plus facile de se<br />
faire des contacts, de sortir, de trouver un<br />
appartement.... Je reviendrai y vivre, c’est<br />
certain ! A Hyères, on me présentait comme<br />
le Français de la sélection, alors que je me<br />
sentais complètement Belge !<br />
Et Bruxelles en particulier <br />
Bruxelles serait la perfection faite ville s’il y<br />
avait un système de transports en commun<br />
ne datant pas du 19ème siècle. A part ça rien<br />
à redire, il fait vraiment bon y vivre !
N<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I
N<br />
NOUCHI, LOUIS-GABRIEL VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Quels seraient selon toi les nouveaux<br />
créateurs à suivre de près <br />
Je regarde davantage le menswear, pour moi<br />
les créateurs londoniens et belges sont les<br />
plus rafraichissants et dynamiques : Craig<br />
Green, Christopher Shannon, JW Anderson,<br />
Christopher Kane. En Belgique, il faut<br />
suivre de près A.Knackfuss et Emmanuelle<br />
Lebas. Sinon, il y a un étudiant qui est sorti<br />
de L’académie d’Anvers dont j’ai adoré la<br />
collection : Yens Cuyvers. A Paris, Coperni (ils<br />
viennent de remporter le prix des premières<br />
collection à L’Andam), ainsi que Etienne<br />
Deroeux. La Suisse est le pays qui monte le<br />
plus également au niveau de la mode.<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
www.louisgabrielnouchi.com<br />
Facebook :<br />
www.facebook.com/louis.nouchi<br />
Crédit photo<br />
Emilie Gomez
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
L’épicerie de l’orage, c’est l’histoire d’un<br />
amour, non de deux amours, de dix, oh.<br />
L’épicerie de l’orage, c’est une histoire<br />
amour. Rencontre avec les épiciers.
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Qui êtes-vous, les épiciers de l’orage<br />
Nous sommes Catherine et Jean-Marie. Nous<br />
avons eu plusieurs vies professionnelles :<br />
l’enseignement, le journalisme jeunesse, la<br />
création multimédia, etc. Aujourd’hui, nous<br />
partageons notre temps entre l’épicerie de<br />
l’orage et un autre job alimentaire. Nous avons<br />
un petit garçon ensemble, et au total quatre<br />
enfants à nous deux. L’épicerie de l’orage, c’est<br />
une aventure de création et une aventure de<br />
couple en même temps. On est super fusionnels,<br />
très passionnés, on poursuit ensemble un idéal<br />
commun. On est ultra bavards, on parle jour et<br />
nuit. On est aussi très entiers, on adore ou on<br />
déteste – on a parfois de grosses colères mais<br />
plus souvent de grands coups de coeur. On<br />
est parfois difficiles à suivre... mais ceux qui y<br />
arrivent ne le regrettent jamais (ou presque) !<br />
Tous les jours on se dit qu’on vit une aventure<br />
singulière. Souvent on se dit qu’on va la raconter.<br />
Parfois on y travaille.<br />
quotidien, celles qu’on avait envie de raconter<br />
de façon « différente » ; et puis l’orage, c’est<br />
la lumière, l’étincelle qu’on y ajoute, celle<br />
aussi qui donne du sens, l’énergie créatrice.<br />
L’épicerie : le documentaire ; l’orage : faire «<br />
tilter » le monde en y mettant de soi !<br />
Pourquoi le choix d’un tel nom Peut-on<br />
envisager de s’offrir un peu de foudre dans votre<br />
échoppe <br />
Notre histoire amoureuse a débuté un jour<br />
d’orage devant une épicerie... Quelques années<br />
plus tard, quand nous avons décidé de créer<br />
la maison d’édition, nous avons longuement<br />
cherché un nom. Il y en a eu beaucoup, aucun<br />
ne nous plaisait vraiment... Et puis un jour,<br />
une évidence : l’épicerie de l’orage... Ce groupe<br />
de mots que nous employions si souvent<br />
pour parler de ce moment précieux de notre<br />
histoire, c’était ça, il collait parfaitement à notre<br />
nouveau projet ! L’épicerie, ce sont les choses du<br />
« L’idée de départ est très simple : il s’agit<br />
de regarder un peu le monde qui nous<br />
entoure, de l’appréhender sous toutes ces<br />
facettes, de l’apprendre et de le goûter et<br />
d’y ajouter sa touche, son grain de sel, y<br />
consigner son avis et sa vie »
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Comment l’aventure a-t-elle démarré <br />
On peut dire qu’elle a débuté le jour où<br />
l’on s’est rencontrés. Très vite, nous avons<br />
aimé travailler ensemble. Réfléchir, créer,<br />
élaborer, proposer des choses à ce public –<br />
des préados aux jeunes adultes – que nous<br />
avions en commun. Nous avons travaillé sur<br />
un premier projet avec un éditeur, nous avions<br />
l’idée d’une collection. Mais assez rapidement<br />
nous avons senti que nous avions besoin<br />
d’indépendance, qu’un partenaire pouvait<br />
« tordre » l’idée. Alors on a un peu « sauté<br />
dans le vide », en lâchant nos deux boulots<br />
salariés, en quittant notre vie parisienne<br />
pour partir nous installer à Marseille. Il fallait<br />
créer la maison et lancer à côté une activité<br />
qui nous fasse vivre, mais qui soit en même<br />
temps suffisamment souple pour nous laisser<br />
du temps pour l’épicerie de l’orage. Nous<br />
avons commencé par deux premiers titres<br />
que nous avons écrits et réalisés seuls. Très<br />
vite une petite communauté de lecteurs s’est<br />
agrégée autour de nous, notamment grâce<br />
aux réseaux sociaux et au blog que nous<br />
avions créé. Cette communauté, c’est encore<br />
aujourd’hui une partie de l’ADN de la maison...<br />
Qu’est-ce qui fait la particularité d’un livre de<br />
l’épicerie de l’orage <br />
L’idée de départ est très simple : il s’agit de<br />
regarder un peu le monde qui nous entoure,<br />
de l’appréhender sous toutes ces facettes,<br />
de l’apprendre et de le goûter et d’y ajouter<br />
sa touche, son grain de sel, y consigner<br />
son avis et sa vie. «.... Décrire le monde non<br />
pas comme il est, mais comme il est quand<br />
je m’y ajoute » écrivait Giono. Et il ajoutait<br />
: « ce qui évidemment ne le simplifie pas »...<br />
C’est un peu ça l’idée... Nos ouvrages sont<br />
donc tout à la fois des livres et des carnets.<br />
Des documentaires créatifs. Ils partent<br />
du principe que nos lecteurs savent déjà<br />
beaucoup de choses sur le monde qui les<br />
entoure, et qu’on peut les accompagner dans<br />
la consolidation de ce savoir. Qu’on leur parle<br />
d’amour ou de politique, d’orthographe ou<br />
de famille, on a besoin pour cela de « greffer<br />
de l’inconnu sur du connu », pour que les<br />
nouvelles connaissances s’enracinent. Nos<br />
livres proposent donc à la fois du contenu<br />
documentaire, pour apprendre et découvrir,<br />
et des espaces où l’on peut écrire, poser sa<br />
réflexion, consigner sa vie et son expérience<br />
du monde... Parfois, quand le sujet s’y prête,<br />
nous y proposons aussi des textes littéraires,<br />
parce que découvrir le monde, c’est aussi<br />
y accéder à travers la création. Ne pas se<br />
contenter d’expliquer le monde ; le donner à<br />
voir, aussi.
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Quel élan vous anime-t-il lorsque vous vous<br />
lancez dans un nouveau projet Comment<br />
jetez-vous votre dévolu sur ce dernier <br />
Des idées, on en a mille par jour. Ce qui est<br />
compliqué, c’est de choisir entre ces mille<br />
titres possibles... La grande difficulté c’est<br />
de concrétiser, de passer au réel. C’est ce<br />
moment où on donne vraiment vie à nos<br />
désirs. C’est donc souvent quand on arrive<br />
à associer un nom – ou des noms – à une<br />
de nos idées qu’un projet embraye. Et là, en<br />
général, ça démarre à fond !<br />
Quelle est votre démarche en tant qu’éditeur <br />
« Editeur », ça fait peur, hein ! Toute l’imagerie<br />
associée, les attentes que cela suscite, les<br />
fantasmes... On ne se reconnaît pas làdedans<br />
– ce qui génère parfois quelques<br />
malentendus... L’épicerie de l’orage, c’est<br />
plutôt une aventure – une aventure éditoriale<br />
d’abord, mais pas uniquement – dans laquelle<br />
nous faisons entrer des gens au fil des envies<br />
et des rencontres. C’est un collectif d’idées,<br />
d’écriture, de création.<br />
Vous financez, principalement ou<br />
exclusivement, vos ouvrages par le<br />
crowdfunding. Les participants, de la sorte,<br />
fonctionnent « au cœur ». Quels sont, pour<br />
vous, les avantages et travers de cette<br />
démarche <br />
En réalité nous n’avons financé que deux<br />
titres sur 10 à travers une plateforme de<br />
crowdfunding. Mais très sincèrement, nous<br />
n’y voyons aujourd’hui que des avantages !
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Ça règle évidemment des problèmes de<br />
trésorerie propres aux micro-structures<br />
comme la nôtre, surtout si on ne veut pas<br />
imprimer à bas coût en Chine mais continuer<br />
de fabriquer dans une démarche écoresponsable<br />
: impression sur papier recyclé,<br />
localement, chez des gens respectueux des<br />
conditions de travail... Evidemment, cette<br />
approche a un coût important, et le principe de<br />
la souscription nous permet de l’amortir. Cette<br />
trésorerie nous permet aussi de verser des<br />
à-valoir aux auteurs. Mais ce n’est pas la seule<br />
vertu de l’opération ! La présence pendant<br />
trois mois sur une plateforme de financement<br />
participatif nous permet aussi de tester le<br />
projet : on échange avec les internautes,<br />
on devient visible, on implique les lecteurs,<br />
on raconte vraiment une histoire qui va de<br />
l’idée à la diffusion du projet, en passant par<br />
sa réalisation et sa fabrication - un makingof<br />
vivant et en temps réel, passionnant à<br />
produire ! Et la famille de l’épicerie de l’orage,<br />
tout autour de nous, participe et s’agite, c’est<br />
vraiment très stimulant. On se sent embarqué<br />
dans une grande marche qui parfois nous<br />
dépasse un peu et c’est très agréable aussi<br />
comme ça ! La limite de l’exercice pourrait<br />
être de lasser les gens au bout d’un moment<br />
- « Oooh, encore un Ulule... ». Mais en réalité,<br />
nous pensons l’inverse la plupart du temps, au<br />
point de réfléchir à en faire le cœur du modèle<br />
économique de l’épicerie de l’orage. Avec cette<br />
ligne directrice : si un projet n’est pas financé,<br />
c’est que ce n’est pas une bonne idée, nous le<br />
produisons pas...<br />
Comment envisagez-vous le futur des petites<br />
structures en édition, tant en France qu’à<br />
l’étranger <br />
La survie des petites structures comme<br />
la nôtre dans le milieu de l’édition,<br />
c’est extrêmement difficile... On le voit<br />
pratiquement tous les mois avec une maison<br />
qui ferme ses portes sans avoir réellement<br />
trouvé sa place, ou à bout de trésorerie. La<br />
faiblesse économique se double d’un énorme<br />
problème de visibilité et de diffusion. Il n’est<br />
pas du tout évident de faire sa place dans<br />
une production éditoriale pléthorique : de<br />
très nombreux libraires sont particulièrement<br />
frileux et ont du mal à travailler avec des<br />
petits éditeurs auto-diffusés. Il faut donc être<br />
super imaginatif et trouver de nouvelles voies,<br />
être créatif jusque dans l’élaboration de son<br />
business plan et de son plan de diffusion. Et<br />
nous sommes convaincus que pour survivre,<br />
les petites structures doivent sortir des<br />
schémas classiques diffuseur-distributeurlibraire<br />
pour aller inventer, en s’appuyant<br />
notamment sur Internet, un nouveau modèle<br />
économique viable.<br />
Composition familiale, votre dernier projet, est<br />
en cours d’impression. Quelle est la suite du<br />
programme <br />
La suite immédiate, c’est Montreuil, le salon<br />
du livre jeunesse. Le moment fort de notre<br />
année. Celui où on rencontre nos lecteurs, où<br />
l’on échange avec nos pairs éditeurs... et où<br />
l’on boit quelques coups avec tous ceux qui<br />
partagent l’aventure : auteurs, illustrateurs,<br />
copains en tous genres !
O<br />
ORAGEUX ÉPICIERS<br />
VICTOIRE DE CHANGY<br />
#I<br />
Et attention, scoop: en exclusivité mondiale<br />
pour Alphabeta, nous sortons cette année du<br />
grand marché (l’espace réservé aux petits<br />
éditeurs) pour avoir notre propre stand ! On<br />
passe dans la cour des grands, en partageant<br />
un grand espace avec deux autres éditeurs<br />
dont nous partageons l’approche éditoriale et<br />
l’univers visuel. Nous souhaitons davantage<br />
mutualiser nos pratiques, partager les<br />
petites difficultés et les grandes avancées<br />
(et l’inverse...) dans cet esprit atypique et<br />
indépendant que nous défendons tous les<br />
trois. Quant à la suite éditoriale Ce qui nous<br />
plaît dans cette aventure c’est que l’on voit le<br />
chemin en train de se faire. On n’a pas pensé<br />
en amont une collection parfaite, formatée,<br />
immuable. On tâtonne, on cherche, on se<br />
nourrit, on fait entrer dans la danse des gens<br />
qui nous font grandir, on approche peu à peu<br />
de ce que l’on a vraiment envie de faire mais<br />
ce que l’on a vraiment envie de faire change<br />
aussi, c’est donc une éternelle course mais<br />
la route est belle ! On est en perpétuelle<br />
mutation. Aujourd’hui, sans rien renier, on<br />
ne referait pas les mêmes livres qu’il y a<br />
trois ans et c’est bien ! Les lecteurs, le jeune<br />
public et leurs parents, nous suivent dans ces<br />
changements et apprécient d’être parfois un<br />
peu déroutés, en tout cas surpris. La suite,<br />
c’est donc la prochaine métamorphose. Une<br />
forme différente encore et un public élargi.<br />
Dans la veine de ce que nous avons déjà fait<br />
mais, avec pas mal de nouveauté. Un projet<br />
fou : une sorte de consigne automatique<br />
pour fragments de vie. Ce qui évidemment ne<br />
simplifie pas la nôtre...<br />
Plus d’info<br />
Site Web<br />
http://www.lepiceriedelorage.net<br />
Facebook<br />
https://www.facebook.com/lepicerie.deloragefref=ts
P PETITE ANNONCE<br />
TOI <br />
#I<br />
PAGE BLANCHE<br />
POUR CONTRIBUTEUR<br />
ENTHOUSIASTE
Q<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
AURÉLIA MORVAN<br />
#I<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
Aurélie William Levaux, blonde et Liégoise<br />
comme la Curtius, utilise des supports<br />
divers pour créer des mondes où Marguerite<br />
Duras et Freddy Mercury chevauchent<br />
des arcs-en-ciel entourés de poissons.<br />
Elle n’en a pas l’air comme ça, mais elle ne<br />
mange pas les êtres humains. Par contre<br />
elle aime les poils, les poils au-dessus de<br />
la bouche des garçons. Ah et elle sort un<br />
nouveau livre aussi.<br />
« Duras et le marin de Zanzibar », Aurélie William Levaux
Q<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
SÉBASTIEN AURÉLIA MORVAN HANESSE<br />
#I<br />
Où, quand, quoi, comment, qui : qui est<br />
Aurélie William Levaux <br />
Je suis née en 1981, je suis l’aînée d’une<br />
famille catholique de onze enfants. Dans ce<br />
type de famille, il faut trouver un lieu à soi, une<br />
manière de s’échapper en étant là, et de se<br />
démarquer. Mon espace à moi fut rapidement<br />
l’écriture et le dessin, je me planquais<br />
derrière mes feuilles et me racontais des<br />
histoires. Ça ne m’a jamais quitté. Je suis une<br />
personne angoissée, révoltée, en perpétue<br />
questionnement et relativement explosive.<br />
Sans le rapport à l’écriture, au dessin, et à la<br />
création en général, j’ai l’impression de ne<br />
pas exister totalement, de me décomposer,<br />
de perdre la raison. Créer est vital pour moi,<br />
c’est ça ou tout démolir. Et comme j’ai une<br />
tendance à m’ennuyer très vite, j’essaie<br />
d’avoir un maximum de projets différents, et<br />
d’avoir toujours quelque chose sur le feu. Une<br />
manière de ne pas voir le temps qui passe,<br />
d’échapper à la morbidité de la vie, aux rides<br />
et au monde qui crève.<br />
Après Johnnychrist et Prédictions, votre livre<br />
Le verre à moitié vide, sort prochainement aux<br />
éditions Atrabile. Comment en parleriez-vous<br />
à quelqu’un qui ne l’a pas encore eu entre les<br />
mains <br />
C’est un bouquin qui parle des<br />
questionnements quotidiens, de la relation<br />
homme/femme et de la relation au monde.<br />
C’est assez difficile pour moi d’en parler et<br />
d’avoir du recul par rapport à mon travail.<br />
Le verre à moitié vide, Aurélie William Levaux / Les éditions Atrabile<br />
Quand je bosse, je sais très bien où je vais, ce<br />
que je veux transmettre, il y a une forme de<br />
transe dans le processus. Ensuite, je range les<br />
dessins et ne les regarde plus. Quand mes livres<br />
sortent, j’arrive difficilement à les regarder et<br />
à les lire, comme si j’étais face à ma connerie<br />
subitement. Je me mets tellement à nu, que cela<br />
me dérange, je me dérange moi-même. Mon<br />
mari Moolinex a lu le livre hier, il m’a dit de ne<br />
pas trop me tracasser, parce qu’on n’y comprend<br />
rien si on ne passe pas une demi-heure à<br />
chercher le sens sur chaque page. Je ne sais<br />
pas si c’est rassurant, mais bon, du coup je ne<br />
suis pas totalement à poil, il faut un peu creuser<br />
apparemment.
Q<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
AURÉLIA MORVAN<br />
#I<br />
« Une moustache, pour moi, c’est comme<br />
une bite »<br />
« C’est un boulot super compliqué mais<br />
qui me tient à cœur parce que je trouve<br />
qu’il est rare d’être bien baisée »<br />
Des femmes nues, des hommes poilus, des<br />
animaux, Gérard Depardieu : vos créations<br />
regorgent de sujets, de symboles. Qu’est-ce<br />
qui vous inspire <br />
L’inspiration est partout, tout est sujet, une<br />
phrase entendue ou lue, le ciel, les gens qui<br />
passent, les informations, les films. J’aime les<br />
symboles de toutes sortes, j’aime créer des<br />
liens entre des choses qui n’en ont pas au<br />
premier abord, décaler le propos de l’image<br />
pour donner plusieurs lectures, plusieurs sens<br />
en un, j’aime la complexité des choses. Je<br />
suis marquée par les images religieuses et<br />
populaires. Je peux me baser sur à peu près<br />
n’importe quoi pour raconter quelque chose.<br />
Mais ce qui m’intéresse le plus, ce sont les<br />
rapports humains, l’humain et ses émotions,<br />
et pour ça, on peut se servir de tout, une<br />
plante peut aussi bien parler qu’une licorne.<br />
Les moustaches, c’est parce que j’adore ça.<br />
Quand j’avais six ans, je suis tombée sur<br />
un livre de cul, les hommes y portaient des<br />
moustaches, et du coup, pour moi, c’est un<br />
symbole sexuel. Une moustache, pour moi,<br />
c’est comme une bite.<br />
Vous avez une technique de travail un peu<br />
particulière puisque, pour certaines oeuvres,<br />
vous alliez le dessin et la broderie. Comment<br />
se passe le processus de création d’une<br />
oeuvre concrètement <br />
Je travaille un peu n’importe comment,<br />
comme une grosse brute, je n’ai aucune ligne.<br />
Je peux commencer à écrire une phrase et<br />
dessiner par-dessus, ou l’inverse, commencer<br />
des projets papier et faire un truc qui n’a rien<br />
à voir juste après. J’écris énormément, et<br />
c’est la base de tout mon travail, un travail de<br />
réflexion. Mais pour le reste, je suis décousue<br />
dans ma manière d’aborder un dessin. Je<br />
suis incapable de concevoir un scénario<br />
digne de ce nom, je recompose tout au fur et<br />
à mesure. Le tissu est un support que j’aime<br />
bien, avec lequel je suis à l’aise, et la broderie<br />
me calme. Je sais ce que je veux dire, mais<br />
jamais comment, et souvent, ça donne des<br />
compositions franchement bizarres.
Q<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
AURÉLIA MORVAN<br />
#I<br />
Si vous deviez ne me parler que d’un seul de<br />
vos dessins, lequel serait-ce et pourquoi <br />
Bon, ça c’est compliqué. Je vais prendre « Ta<br />
violence », je l’aime bien, je le trouve assez<br />
doux et poétique malgré le sujet un peu dur.<br />
Je crois que c’est représentatif de ce que je<br />
fais, une image qui peut de loin ressembler à<br />
une icône, et en se rapprochant, découvrir le<br />
sens et la noirceur du propos. Ce dessin me<br />
ramène, comme chaque dessin, à un moment<br />
de ma vie, à ces étapes compliquées, à<br />
dépasser. J’ai l’impression qu’en marquant les<br />
choses dans le tissu, j’arrive à les évacuer et<br />
à avancer. Et ici, la violence passée a fini par<br />
disparaître.<br />
D’autres projets en cours ou en tête <br />
Oui, un livre avec Caroline Lamarche va<br />
sortir ce mois-ci. Deux autres en janvier<br />
logiquement. Je travaille sur des installations<br />
avec Moolinex, pour des galeries et nous<br />
travaillons aussi ensemble sur un livre<br />
d’éducation sexuelle, c’est un boulot super<br />
compliqué, mais qui me tient à cœur, parce<br />
que je trouve qu’il est rare d’être bien baisée.<br />
Et là, en ce moment, je fais des étendards, en<br />
broderie.<br />
« Ta violence », Aurélie William Levaux
Q<br />
QUEEN MOUSTACHE<br />
AURÉLIA MORVAN<br />
#H #I<br />
Plus d’info<br />
Site web<br />
www.aureliewilliamlevaux.be<br />
Facebook<br />
www.facebook.com/aurelie.levaux<br />
Actualité<br />
Le verre à moitié vide de Aurélie William Levaux,<br />
parution en août 2014 aux éditions Atrabile, 104<br />
pages, 20 x 28 cm, 19.50 €<br />
www.atrabile.org<br />
Crédits<br />
Photo 1 et 3 : Aurélie William Levaux<br />
Photo 2 : Aurélie William Levaux / Les éditions<br />
Atrabile
R<br />
ROSE PIQUÉ À VIF<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
ROSE PIQUÉ À VIF<br />
Si je vous dis rose vif ou bleu sarcelle, il y a<br />
peu de chances que des photographies de<br />
guerre soient la première chose qui vous<br />
vienne à l’esprit, et pourtant… The Enclave,<br />
l’installation multimédia du photographe<br />
Richard Mosse exposée en ce moment au<br />
FoMu à Anvers risque bien de chambouler<br />
votre imaginaire guerrier.<br />
Lac Vert, 2012
R<br />
ROSE PIQUÉ À VIF<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
En utilisant un film à sensibilité<br />
infra-rouge, matériel initialement<br />
employé par les militaires lors<br />
d’opérations camouflage, Richard<br />
Mosse exacerbe la tension existant<br />
entre la photographie de guerre et les<br />
situations de conflit persistant encore<br />
actuellement dans l’est du Congo.<br />
Etendues de vallées aux dimensions<br />
presque irréelles, détails quotidiens<br />
presque poétiques, se confrontent à la<br />
noirceur d’un pays en guerre où<br />
5,4 millions de personnes ont perdu<br />
la vie depuis 1998.<br />
Grâce à cette esthétique troublante,<br />
perchant le spectateur au bord<br />
du malaise, le photographe bouscule<br />
les codes de la photographie de guerre<br />
traditionnelle, la manière usuelle de<br />
documenter et de communiquer<br />
sur des tragédies sévissant à travers<br />
le monde.<br />
Safe from Harm, 2012<br />
Son installation The Enclave,<br />
actuellement au FoMu à Anvers,<br />
« confronte le spectateur à une<br />
installation multimédia désorientante<br />
et physiquement immersive. L’œuvre<br />
comprend six grands écrans avec un<br />
son ambiophonique douze points, créant<br />
une expérience kaléidoscopique en<br />
couches, très esthétisée tout en restant<br />
fermement ancrée dans la dure réalité. »
R<br />
ROSE PIQUÉ À VIF<br />
AXELLE MINNE<br />
#H #I<br />
Of Lilies and Remains, 2012
R<br />
ROSE PIQUÉ À VIF<br />
AXELLE MINNE<br />
#H #I<br />
Plus d’info<br />
Site Web<br />
www.richardmosse.com<br />
Page Facebook<br />
https://www.facebook.com/pages/Richard-<br />
Mosse/352530351445810<br />
Sur l’exposition<br />
The Enclave de Richard Mosse<br />
Jusqu’au 11/11/2014<br />
au FoMu à Anvers<br />
FoMu - FotoMuseum Provincie Antwerpen<br />
Waalsekaai 47<br />
2000 Antwerpen<br />
T: +32 (0)3 242 93 00<br />
info@fomu.be<br />
Site Internet<br />
http://www.fotomuseum.be/fr.html<br />
Page Facebook<br />
https://www.facebook.com/fomufotomuseumantwerp
S SWIMMING POOL JEHANNE MOLL<br />
#I<br />
SWIMMING POOL<br />
par Jehanne Moll
S SWIMMING POOL JEHANNE MOLL<br />
#I
S SWIMMING POOL JEHANNE MOLL<br />
#I
S SWIMMING POOL JEHANNE MOLL<br />
#I
S SWIMMING POOL JEHANNE MOLL<br />
#I
F SWIMMING POOL<br />
AXELLE MINNE #I<br />
Plus d’info<br />
Photographe<br />
Jehanne Moll<br />
Site Internet<br />
www.jehannemoll.com<br />
Créatrice<br />
Claire-Lise Lieutenant<br />
Maquilleuse<br />
Allison Irskens<br />
Modèle<br />
Marine Boland
T TOP 10 : CINÉMAS D’ART & D’ESSAI CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
TOP 10 : CINÉMAS<br />
D’ART & D’ESSAI<br />
Petites pépites cachées à<br />
l’abri des regards dans les<br />
galeries et les ruelles, les<br />
cinémas d’art et d’essai<br />
survivent tant bien que<br />
mal aux gros complexes<br />
cinématographiques de<br />
notre monde de plus en<br />
plus capitalisé. Le terme<br />
désigne en France les<br />
établissements montrant<br />
des films recommandés «<br />
art et essai » par le CNC et<br />
l’AFCAE (le Centre National<br />
de la Cinématographie et<br />
l’Association Française<br />
des Cinémas d’Art & Essai)<br />
officiellement mandatés. Il<br />
n’existe pas d’organismes<br />
similaires en Belgique, mais<br />
ces cinémas existent bel<br />
et bien ! Lieux de rencontre<br />
de la culture, de la création<br />
et de l’esthétique, endroits<br />
intimistes et surprenants, ils<br />
proposent des alternatives<br />
à la culture de masse et<br />
organisent une multitude<br />
d’événements participant à<br />
l’avancement de la société<br />
et des mentalités sur le plan<br />
politique et culturel.<br />
1. Aventure<br />
Rue des Fripiers 57<br />
1000 Bruxelles<br />
cinema-aventure.be<br />
Baptisé « cinéma confort »<br />
depuis sa rénovation, l’Aventure<br />
illumine le fond lugubre de la<br />
Galerie du Centre. Sa réputation<br />
lui vient de ses sièges vastes<br />
et moelleux, l’une des salles<br />
disposant même de fauteuils<br />
inclinables. La salle 2, quant à<br />
elle, est dotée d’une rangée de<br />
sièges doubles permettant de<br />
savourer le film dans les bras de<br />
son amoureux(se).<br />
La programmation est très variée<br />
et permet aux retardataires de<br />
rattraper certains films déjà<br />
déprogrammés depuis plusieurs<br />
semaines dans les gros cinémas.<br />
Y sont projetés aussi bien des<br />
blockbusters que des films<br />
d’auteur, des films d’animation<br />
pour enfants ou encore et<br />
surtout, des documentaires.
T TOP 10 : CINÉMAS D’ART & D’ESSAI CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
L’Aventure organise également<br />
des avant-premières, de petits<br />
festivals et des rétrospectives<br />
; des projections gratuites de<br />
documentaires en partenariat<br />
avec l’ASBL BXL laïque, appelées<br />
Ciné-club des libertés, ainsi<br />
que Short screens, courtsmétrages<br />
projetés tous les<br />
mois. Enfin, si vous aimez les<br />
sorties de dernière minute, il<br />
vaut la peine d’aller faire un<br />
tour sur le site Arsene50.be qui<br />
offre quotidiennement pour le<br />
soir même des places de ciné à<br />
moitié prix.tout se rejoint t’as vu).<br />
2. Nova<br />
Rue d’Arenberg 3<br />
1000 Bruxelles<br />
www.nova-cinema.org<br />
Largement connu et fréquenté<br />
par le milieu underground, le<br />
Nova ne rentre dans aucune<br />
case. Sa programmation décalée<br />
et expérimentale se compose<br />
de films de tous genres, des<br />
navets aux chefs d’œuvres peu<br />
connus en passant par des films<br />
engagés, trashs, gays, de science<br />
fiction ou documentaires. Son<br />
enseigne un peu foutraque faite<br />
à partir d’objets de récup attire<br />
l’œil de tous les passants.<br />
À l’intérieur, une salle unique<br />
assez dépouillée, et au soussol,<br />
un bar auquel on peut aller<br />
commander une bière après<br />
la séance et discuter avec des<br />
cinéphiles ou bien aller faire<br />
un tour dans la galerie d’art qui<br />
expose régulièrement. Tenu<br />
par des bénévoles, le lieu est<br />
hyperactif et organise une<br />
multitude d’événements : le<br />
génial festival PleinOPENair qui a<br />
lieu tous les étés, les Nocturnes,<br />
mais aussi Cineketje pour les<br />
enfants, etc.<br />
3. Galeries<br />
Galerie de la Reine 26<br />
1000 Bruxelles<br />
www.galeries.be<br />
Installé à la place de l’ancien<br />
Arenberg, le cinéma Galeries<br />
touche un large public grâce<br />
à sa localisation dans les<br />
prestigieuses galeries royales<br />
St Hubert en plein coeur de<br />
Bruxelles. Projetant des films<br />
à grand ou petit budget mais<br />
généralement tournés vers<br />
l’auteur, le lieu a conservé son<br />
architecture art déco et un<br />
charme inédit. Galeries possède<br />
également un immense espace<br />
d’exposition au sous-sol qu’il<br />
est possible de réserver (c’est<br />
d’ailleurs là qu’Alphabeta avait<br />
organisé sa fête d’anniversaire<br />
en mai dernier !) Y sont<br />
organisées en parallèle à leur<br />
activité cinématographique<br />
des expositions d’artistes<br />
contemporains dédiées au<br />
cinéma d’art et essai, ainsi<br />
que des expositions annuelles<br />
sur des cinéastes mettant en<br />
lumière leur méthode de travail<br />
; une autre façon d’appréhender<br />
leur œuvre. À côté de cela,<br />
de nombreux événements : la<br />
semaine de la pop philosophie,<br />
Focus Cynthia Beatt au Wiels,<br />
rendez-vous et expos Panorama<br />
/ Fresnoy et David Lynch…<br />
Bonus : la carte UGC est acceptée !
T<br />
TOP 10 : CINÉMAS D’ART & D’ESSAI<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
une verrière et des soirées courtmétrages<br />
chaque dernier jeudi du<br />
mois.<br />
Bonus : la carte UGC est acceptée !<br />
belges ou internationaux. Films<br />
culturels et contemporains,<br />
qui nécessitent une certaine<br />
réflexion ou qui apportent un<br />
regard novateur sur un aspect<br />
du monde. Le Vendôme participe<br />
à l’organisation de nombreux<br />
festivals afin de promouvoir un<br />
cinéma engagé, à petit budget<br />
ou moins accessible. C’est un<br />
cinéma de valeurs qui s’efforce<br />
de nous faire partager son goût<br />
pour la diversité culturelle et<br />
l’ouverture au monde : il nous<br />
invite au voyage.<br />
4. Actor’s Studio<br />
Petite rue des Bouchers 16<br />
1000 Bruxelles<br />
Difficile à trouver car caché au<br />
fond d’une minuscule galerie,<br />
il vous faudra passer par les<br />
ruelles envahies de restaurants<br />
touristiques nauséabonds<br />
près de la Grand-Place pour<br />
accéder à l’Actor’s Studio.<br />
C’est certainement que ce<br />
genre d’endroit se mérite : une<br />
programmation de qualité, un<br />
prix peu élevé, trois petites salles<br />
intimistes ainsi qu’un bar sous<br />
5. Vendôme<br />
Chaussée de Wavre 18<br />
1050 Ixelles<br />
www.cinema-vendome.be<br />
Juste derrière la Porte de<br />
Namur s’amorcent les ruelles<br />
du quartier animé de Matongé.<br />
C’est ici que le Vendôme<br />
affiche une programmation<br />
renommée pour ses films<br />
d’auteur, originaux, indépendants,<br />
6. Styx<br />
Rue de l’Arbre Bénit 72<br />
1050 Ixelles<br />
cinema-styx.wikeo.be<br />
Dans une ruelle très calme entre<br />
la place Flagey et la Porte de<br />
Namur, un lieu authentique et<br />
pittoresque : le charmant cinéma<br />
Styx, ses toutes petites salles<br />
et ses trois films à l’affiche<br />
semblent vivre dans un autre<br />
espace-temps. C’est un petit<br />
cinéma de quartier où l’on peut<br />
se rendre seul afin de faire une<br />
vraie rencontre, que ce soit<br />
avec le lieu, avec le film ou avec<br />
son voisin. Par ailleurs, le Styx
T<br />
TOP 10 : CINÉMAS D’ART & D’ESSAI<br />
CAPUCINE CHANDON<br />
#I<br />
organise en partenariat avec<br />
le Goethe Institut un cycle de<br />
cinéma appelé « Allemagnifik »,<br />
séances de films allemands tous<br />
les premiers jeudis du mois.<br />
7-8-9. Les Grignoux<br />
http://grignoux.be/<br />
Les Grignoux est une ASBL qui<br />
gère trois salles de cinéma à<br />
Liège : le Parc, le Churchill et<br />
le Sauvenière. Les Grignoux<br />
organisent des événements<br />
musicaux et littéraires, des<br />
expositions mettent en valeur<br />
les films contemporains en<br />
organisant des avant-premières<br />
et des conférences autour de<br />
différents thèmes. Ils diffusent<br />
également des grands classiques<br />
sélectionnés par la Cinémathèque<br />
royale de Belgique. Très engagée<br />
dans l’éducation aux médias<br />
et l’éducation permanente,<br />
l’association réalise des dossiers<br />
pédagogiques et des analyses<br />
sur des films récents ou plus<br />
anciens à l’intention des écoles.<br />
Ayant la volonté d’offrir un<br />
éventail de films très diversifié,<br />
les Grignoux mettent l’accent sur<br />
des films des « trois continents<br />
» (Asie, Afrique, Amérique du<br />
Sud) qui sont sous-représentés<br />
sur le marché européen,<br />
des productions belges peu<br />
exposées, des genres sousreprésentés<br />
ou peu connus<br />
(Anima, Festival du dessin animé,<br />
Genres d’à côté, Festival du gay,<br />
lesbien et transgenre ; etc.), des<br />
documentaires ou encore des<br />
productions moins rentables qui<br />
n’auraient pas trouvé de place<br />
dans les plus grosses structures.<br />
- Le Parc<br />
22, rue Paul-Joseph Carpay<br />
B-4020 Liège-Droixhe<br />
- Le Churchill<br />
20, rue du Mouton Blanc<br />
B-4000 Liège<br />
- Le Sauvenière<br />
Place Xavier Neujean<br />
B-4000 Liège<br />
10. Mais aussi...<br />
Mention spéciale également<br />
aux établissements appelés<br />
« hors-norme », cinémas ou<br />
espaces culturels diffusant<br />
des documentaires, des essais<br />
cinématographiques, du cinéma<br />
expérimental ou underground,<br />
des films inhabituels dans le<br />
fond ou la forme. On pense<br />
immédiatement au Nova, mais<br />
il y a aussi le Flagey, centre<br />
culturel disposant d’une salle<br />
consacrée en permanence<br />
au cinéma et qui projette<br />
des films programmés par la<br />
Cinémathèque ainsi que des<br />
cycles à thème tout au long<br />
de l’année. Enfin, le Palais des<br />
Beaux-Arts organise sous le nom<br />
de Bozar Cinéma des séances,<br />
avant-premières et événements<br />
en présence d’artistes, de<br />
musiciens ou de réalisateurs<br />
destinés à sensibiliser son public<br />
à l’art et explorant les relations<br />
entre le cinéma, la musique,<br />
l’audiovisuel et l’art en général.<br />
Démarche d’indépendance<br />
et d’autonomie artistique,<br />
économique et éthique, ces lieux<br />
donnent accès à des oeuvres qui<br />
témoignent d’une recherche au<br />
niveau de la forme comme du<br />
contenu. Œuvres audiovisuelles<br />
liées à un contexte créatif et<br />
politique contemporain. Œuvres<br />
cinématographiques ayant<br />
un caractère de recherche<br />
ou de nouveautés dans<br />
le domaine de la création<br />
cinématographique ; œuvres<br />
présentant d’incontestables<br />
qualités, mais n’ayant pas obtenu<br />
l’audience qu’elles méritaient ;<br />
œuvres de reprise présentant<br />
un intérêt artistique ou<br />
historique, et notamment œuvres<br />
cinématographiques considérées<br />
comme des “classiques” de<br />
l’écran ; œuvres de courte<br />
durée tendant à renouveler<br />
par leur qualité et leur choix le<br />
spectacle cinématographique.<br />
Un lieu convivial où cohabitent<br />
art, culture, émotion, sensibilité<br />
esthétique, réflexion, découverte,<br />
création et récréation.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
Les traces de l’enfance ne disparaissent<br />
pas toujours. Elles laissent derrière elles<br />
des hommes et des femmes de papier,<br />
des personnes nuageuses aux contours<br />
souvent fragiles. Gaëlle Sutour dessine<br />
ces petits instants remplis de grandes<br />
émotions. A la fois graphiste, illustratrice et<br />
photographe, elle raconte avec humilité ces<br />
histoires d’amour qui changent forcement<br />
quelque chose à notre comportement, ces<br />
petits drames ordinaires qui bouleversent<br />
notre quotidien. Des œuvres à la fois<br />
minimalistes, graphiques et féminines,<br />
qui surprennent et laissent s’échapper<br />
un univers à la fois enfantin et poétique<br />
semblable à celui d’Hayao Miyazaki.<br />
Rencontre particulièrement drôle sur fond<br />
d’espiègleries.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Quels sont les grands moments de ton<br />
parcours artistique <br />
Tout a commencé à La Cambre, où j’ai<br />
délaissé un peu le graphisme pour me<br />
concentrer sur l’illustration. Au début,<br />
j’avais juste dû illustrer un poème puis, en<br />
fin d’année, je me suis dit que mon travail<br />
manquait de personnalité, alors j’ai vite<br />
rempli un petit carnet avec mes anecdotes<br />
du moment. Il a eu beaucoup de succès,<br />
alors j’ai continué pendant quelques années.<br />
Et puis j’ai commencé à travailler et j’ai un<br />
peu laissé tomber tout ça. Je me demande<br />
souvent pourquoi je ne continue pas ces<br />
petites histoires.<br />
Alors je me dis que ma petite fontaine de<br />
l’imagination est vide, qu’elle a été asséchée<br />
par mon travail. Mais pour en revenir à mon<br />
parcours, disons que ma petite fontaine est<br />
parfois réalimentée avec joie par des demandes<br />
à gauche à droite, ainsi que par le cours de BD<br />
que j’ai décidé de suivre pour ne pas m’endormir.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#G #I<br />
Quel est le sens profond que tu veux donner<br />
à tes dessins Qu’est-ce que tes œuvres<br />
t’apportent sur le plan personnel Est-ce<br />
aussi une manière de remplacer les mots <br />
On m’a souvent reproché de ne pas être<br />
claire quand je parle. Mais je ne pense pas<br />
que ce soit très important au fond, on a tous<br />
nos propres façons de s’exprimer et c’est<br />
probablement par le dessin que j’y arrive le<br />
mieux. Même si ce n’est toujours pas très<br />
clair pour tout le monde. Pour ce qui est du<br />
sens, je pense qu’il vient de la fatalité. Quand<br />
je dessine un immeuble rempli de vieux, je<br />
pense à ma grand-mère qui vit seule, et à<br />
côté d’elle une autre vieille et puis plus loin un<br />
autre vieux et puis tout plein de vieux partout,<br />
qui s’ennuient chacun de leur côté. Parfois<br />
c’est aussi une façon de faire aboutir une<br />
idée sans issue, comme pour l’émasculation<br />
: combien de fois je n’ai pas eu cette envie<br />
comme punition envers certains hommes.<br />
Alors je l’ai dessiné. Globalement, ce sont des<br />
sujets qui me marquent, et que je ramène à<br />
une plus petite échelle, plus dérisoire.<br />
« Chaque dessin part d’une situation vécue<br />
ou d’un sentiment éprouvé »<br />
Tes dessins racontent tous de petites<br />
histoires, mais parfois tu y ajoutes quelques<br />
phrases. D’où vient ton inspiration <br />
Généralement les phrases sortent juste de<br />
mon quotidien, je fais en sorte que tout reste<br />
naturel et fluide. On ne dirait pas comme<br />
ça, mais je suis un peu une maniaque des<br />
mots. Il y en a beaucoup que je déteste, je<br />
les contourne en utilisant des mots plus<br />
ronds, plus harmonieux. Mais je ne suis pas<br />
une experte des textes, alors j’en use peu,<br />
et je préfère aller voir les œuvres d’autres<br />
personnes qui les assemblent à merveille,<br />
comme les pièces de théâtre créées par<br />
Jean-Baptiste Calame, un jeune auteur basé à<br />
Bruxelles.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
La forme de tes personnages est très<br />
identifiable. Comment est né ce petit<br />
personnage Comment a-t-il évolué au fil du<br />
temps, quel va être son avenir <br />
Il est né en illustrant un poème de Jack<br />
Kerouac, à l’école. C’était un mélange<br />
entre un homme et un vers de terre, sans<br />
expressions ni personnalité. Puis c’est à<br />
partir de sa forme que sont nés les autres<br />
personnages. On m’a déjà demandé de les<br />
faire plus « girly » ou plus « normaux », mais<br />
ce ne sera pas le cas.<br />
« Je trouve ça chouette de pouvoir dessiner<br />
un truc mignon avec un fond moche. »<br />
Quelle est la part d’intimité que tu mets dans<br />
tes dessins Comment travailles-tu sur tes<br />
différents projets <br />
Je pense qu’elle est assez importante.<br />
Chaque dessin part d’une situation vécue<br />
ou d’un sentiment éprouvé. Quand on me<br />
demande de travailler sur un thème bien<br />
spécifique, je patauge pendant plusieurs<br />
semaines, puis j’essaye juste de me mettre<br />
à la place du sujet (que ce soit un objet ou<br />
une personne) ou de rattacher l’histoire à la<br />
mienne. Ça vient souvent par des anecdotes.<br />
J’aime bien mettre des petites parenthèses<br />
avec ces anecdotes, parfois j’aime bien me<br />
moquer aussi des gens. Ce sont de petites<br />
vengeances.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Tes dessins sont à la fois minimalistes,<br />
complexes et singuliers. Est-ce que tu peux nous<br />
en parler <br />
La plupart du temps je ne me perds pas dans<br />
des détails, et préfère me concentrer sur le fond.<br />
C’est donc le ressenti que je tente de faire sortir<br />
de ce trait simple. Même si mes personnages<br />
restent visuellement simples, je consacre parfois<br />
plus de temps sur les décors, ils soutiennent soit<br />
l’ambiance autour du personnage, soit ils sont<br />
simplement là à titre informatif.<br />
Ton univers peut être à la fois sérieux via tes<br />
sujets, et enfantin via tes dessins. Y a-t-il<br />
pour toi une connexion entre les deux Que<br />
te reste-il de ces souvenirs d’enfance <br />
Pas grand-chose, en tout cas pas dans les<br />
souvenirs. Je ne fais donc pas de lien direct<br />
entre les deux, mais il y en a sans doute un<br />
bien caché. Je pense que le traitement plus<br />
naïf du dessin me permet d’aborder sans trop<br />
de lourdeur des sujets qui me fâchent ou<br />
m’attristent. Parfois, j’essaye de fuir ce côté<br />
enfantin, mais ça ne marche pas vraiment.<br />
Et puis finalement il m’arrange. Je trouve ça<br />
chouette de pouvoir dessiner un truc mignon<br />
avec un fond moche.<br />
Qui sont les artistes qui t’ont influencé et quels<br />
sont ceux qui t’influencent actuellement <br />
J’ai toujours admiré le travail de Tardi, avec<br />
son trait cru qui se marie très bien aux sujets<br />
tantôt absurdes tantôt horribles qu’il traite.<br />
Sempé m’a également marqué par son élégance<br />
et sa poésie. En fait il y en a tellement, mais<br />
disons que parmi les plus connus, j’ajouterais<br />
Charles Burns et pour sortir des sentiers de la<br />
BD, j’admire les peintures de Gustave van de<br />
Woestijne, un peintre flamand dont je n’aime pas<br />
toutes les périodes, mais qui est souvent à la<br />
frontière entre le beau et le laid.
U<br />
UN BEAU BRIN DE FILLE<br />
SÉBASTIEN HANESSE<br />
#I<br />
Plus d’info<br />
Site Web<br />
http://www.gaellegaelle.be/<br />
Actualité<br />
Sa fresque sur un des murs de l’ancien White<br />
Hôtel, actuellement Ibis Style, sur l’Avenue Louise.<br />
Quels sont tes projets actuels et ceux pour<br />
l’avenir <br />
Pour le moment je n’ai pas beaucoup<br />
d’activité malheureusement. Je passe<br />
beaucoup de temps à mon travail de<br />
graphiste et mon côté huitre ne me pousse<br />
pas à passer à autre chose. Mais j’aimerais,<br />
dans un futur proche, avoir plus de temps<br />
pour faire du dessin mon activité principale.<br />
Il y a quelques mois j’ai fini le dessin d’un<br />
immeuble sur un mur d’hôtel et pour le<br />
moment je fais ponctuellement des petits<br />
dessins pour les cuberdons Léopold. Je finis<br />
aussi une mini BD sur la première guerre<br />
mondiale pour le collectif Jacadit. Mon but<br />
lointain est de réaliser une énorme BD dont «<br />
on est le héros », donc avec plein de chemins<br />
à suivre en fonction de nos choix au fil de<br />
l’histoire.
W<br />
WIND & NATURE<br />
MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
WIND & NATURE<br />
Quelques mois après un premier EP autoproduit,<br />
Kor Isen, Josias et Jérôme sont<br />
sélectionnés pour le concours Court-Circuit:<br />
les Kings of Edelgran et leur envie de<br />
grands espaces ne laissent pas insensibles!<br />
On y reconnaît l’influence de Bon Iver et<br />
de Sigur Ros à travers de longs titres bien<br />
maîtrisés qui annoncent d’ores et déjà que<br />
nous avons là un groupe à suivre.
W WIND & NATURE MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
Votre premier EP qui vient de sortir est<br />
intégralement autoproduit, pourquoi avoir<br />
voulu tout faire vous-mêmes <br />
Jérôme. Je trouve ça génial ! Tu as vraiment<br />
la mainmise sur la production, tu peux faire<br />
ce que tu veux avec le son. Quand tu vas<br />
dans un studio, ils te font un bon mix mais<br />
ce n’est pas vraiment personnel. Le faire tout<br />
seul te laisse plein de possibilités, une liberté<br />
totale !<br />
Josias. On a par exemple recoupé des pistes,<br />
des signaux, on a fait des trucs que l’on<br />
n’aurait pas pu faire dans un studio parce qu’il<br />
y a une « méthode à respecter ».<br />
Jé. Le seul point difficile c’était le matériel, on<br />
a du se procurer ce qu’il nous manquait.<br />
A l’origine, que vouliez-vous mettre dans ce<br />
premier EP Quelle était sa source <br />
Jé. D’une certaine façon je crois que l’on<br />
souhaitait donner l’impression de grands<br />
espaces nordiques. Provoquer ce sentiment<br />
face à l’immense nature et son énergie, son<br />
silence. Que ça provoque un dépaysement.<br />
Jo. Il y a quelque chose dans les paysages<br />
d’Ecosse ou d’Islande qui est plus qu’une<br />
belle vue, c’est un sentiment. Et c’est ça que<br />
l’on souhaite transmettre à notre musique,<br />
cette expérience.<br />
L’EP est composé d’énormément de piste<br />
son, des prises qui se recoupent, le mixage<br />
inhabituel, comment vous vous y prenez <br />
Jé. J’arrive en premier avec un petit squelette,<br />
des arrangements guitare, et ensuite avec<br />
Josias on se met à travailler. On décide des<br />
directions rythmiques, on enregistre, on<br />
recompose, parfois on copie-colle des parties<br />
de morceaux dans un autre (rires).<br />
Jo. Le gros du travail se fait à deux devant<br />
un ordinateur en fait, on bricole pas mal les<br />
matériaux enregistrés, on recommence ou on<br />
les utilise complètement différemment que<br />
prévu.<br />
C’est un mode de création très studio,<br />
comment avez-vous transposé les<br />
compositions en live <br />
Jo. On a eu la chance de trouver des<br />
musiciens qui ont vraiment compris le truc,<br />
qui sont bons techniquement, c’est déjà<br />
beaucoup !
W WIND & NATURE MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
Jé. Effectivement, le live est différent de<br />
l’album, mais ce n’est pas un mauvais écart.<br />
On ne s’y attendait pas mais on a trouvé via<br />
l’utilisation de nouvelles pédales, de<br />
nouveaux effets, une nouvelle ambiance à<br />
nos matériaux.<br />
Vous êtes en course dans le concours Court-<br />
Circuit, est-ce un objectif que de le gagner ou<br />
vous voyez surtout ça comme une façon de<br />
lancer la machine <br />
Jo. Ouais c’est surtout ça. Déjà être<br />
sélectionné pour Court-Circuit seulement<br />
quelques mois après la sortie de notre<br />
premier EP, c’est plutôt pas mal. Et c’est<br />
une bonne façon de commencer, grâce à la<br />
visibilité et l’occasion de se produire en live.<br />
Jé. Puis ça nous a donné un petit coup de<br />
fouet, on s’est mis à répéter comme des<br />
cinglés (rires).<br />
Votre dernier coup de cœur musical <br />
(En chœur) BRNS !<br />
(NDLR : Redécouvrez notre interview de BRNS<br />
à la lettre C de notre édition B)
W WIND & NATURE MATTHIEU MARCHAL<br />
#I<br />
Plus d’info<br />
Bandcamp<br />
http://kingsofedelgran.bandcamp.com/releases<br />
Facebook<br />
https://www.facebook.com/kingsofedelgran<br />
Actualité<br />
En concert au Rock Classic le 23.10.2014 – Entrée<br />
gratuite
X<br />
XAVIER DISKEUVE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
XAVIER DISKEUVE :<br />
LA PREMIÈRE FOIS QUE...<br />
Il n’en porte pas souvent, mais il aime les<br />
collectionner : Xavier Diskeuve, c’est un<br />
mec à casquettes. La première, celle du<br />
journaliste, il la porte depuis ses débuts aux<br />
Editions de L’Avenir, il y a presque trente<br />
ans. Couplée à celle du cinéphile, elle lui<br />
a permis de rencontrer des personnalités<br />
incontournables du milieu, de se dandiner<br />
dans des soirées pleines de strass et de<br />
paillettes (un peu) et de traîner sur des<br />
tournages où Benoît Poelvoorde faisait<br />
le guignol (beaucoup). Habitué à manier<br />
la plume, Xavier Diskeuve porte aussi<br />
la casquette de l’auteur, avec laquelle<br />
il accouche de recueils de nouvelles<br />
nombreuses fois primés, ou met des mots<br />
qui font mouche dans la bouche des autres,<br />
que ce soit à la radio ou pour des one-manshows.
X<br />
XAVIER DISKEUVE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
Mais il y a aussi une autre casquette<br />
que Xavier Diskeuve a enfilée un jour<br />
de 2002 et qui ne le quitte plus : celle<br />
du réalisateur. Après trois courtsmétrages<br />
multi-primés dévoilant un<br />
univers cocasse et coloré à mi-chemin<br />
entre Jacques Tati et Aki Kaurismäki,<br />
le Namurois se lance dans l’aventure<br />
du long, avec une comédie burlesque<br />
et inattendue dans laquelle un cousin<br />
halluciné devient le seul espoir d’un<br />
village menacé de gentrification. En<br />
attendant de le découvrir en salles, le<br />
pétillant Jacques a vu sera présenté<br />
en exclusivité mondiale en octobre<br />
au Festival de Namur. L’occasion<br />
idéale pour l’auteur de ce premier<br />
long-métrage de nous parler de ses<br />
premières fois.<br />
Jacques a vu – sortie 2015<br />
Le premier souvenir d’enfance <br />
Je suis né à Namur, mais j’ai grandi à Dinant.<br />
Petit, j’allais à l’école à pied. Je devais<br />
traverser une rue, et mes parents m’avaient<br />
dit de toujours demander à quelqu’un de me<br />
faire traverser. Un jour, je devais avoir 6 ou<br />
7 ans, je n’ai trouvé personne. C’est la rue<br />
devant la Collégiale, elle doit faire environ<br />
quatre mètres, mais je ne sais pas pourquoi,<br />
je n’ai pas osé la traverser seul. Donc je<br />
suis rentrée chez moi, et j’ai prétexté qu’il y<br />
avait congé. Dans le doute, mes parents ont<br />
appelé un copain pour voir si c’était vrai... Et<br />
il se trouve que par coïncidence, le copain<br />
avait fait la même chose de son côté ! Il avait<br />
trouvé un bobard aussi... Donc voilà, ce jour-là<br />
j’ai eu un jour de congé gratuit (rires) !<br />
La première fois où tu t’es dit « Ca y est, je<br />
suis journaliste » <br />
Le premier jour de mon premier stage à Vers<br />
L’Avenir (aujourd’hui L’Avenir, NDLR). Je n’avais<br />
pas eu grand-chose à faire, des copies de
X<br />
XAVIER DISKEUVE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
correspondants régionaux à corriger, j’avais<br />
trouvé ça un peu ennuyeux... Donc vers<br />
16-17 heures j’en avais déjà un peu marre,<br />
j’avais envie d’y aller. Je demande : « Je dois<br />
rester jusque quelle heure » Le chef me dit<br />
« Oh tu sais, nous en général on termine vers<br />
19h-19h30... » ! Je me suis dit « Oh purée,<br />
qu’est-ce que c’est que ça pour un métier... ! »<br />
Alors j’ai rétorqué : « Mais là je n’ai plus rien<br />
à faire… » Et il a fait : « Oh, comme c’est ton<br />
premier jour, tu peux y aller... ». Je suis parti<br />
à 17 heures, j’avais l’impression que c’était<br />
la nuit ! Après, bon, je me suis adapté aux<br />
longues journées, et j’ai moi-même travaillé<br />
jusque 19h30... (Rires) ! En général vers cette<br />
heure-là c’est plus calme, les bureaux se<br />
vident, la pression retombe. C’est ce qui fait<br />
que des gens aiment traîner, car ils se sentent<br />
plus concentrés que durant les heures de<br />
digestion – le matin, n’en parlons même pas...<br />
La première émotion de cinéma <br />
Frankenstein Junior de Mel Brooks, un<br />
cinéaste dont j’ai vu presque tous les films<br />
et aimé un grand nombre d’entre eux. Mais<br />
devant celui-là, j’ai eu peur pendant tout le<br />
long ! Donc je ne me suis absolument pas<br />
amusé, j’en suis ressorti tétanisé. Et un<br />
autre aussi, mais c’était à la TV : La Maison<br />
du diable de Robert Wise, un thriller assez<br />
stylisé en noir et blanc : en gros, je n’ai jamais<br />
eu aussi peur de ma vie. Tout était dans la<br />
suggestion, avec des micro-événements<br />
anormaux dans une maison a priori normale...<br />
Après ça m’a posé problème quand je devais<br />
rester seul à la maison !<br />
« A l’époque, la Semaine de la Critique,<br />
c’était un petit bureau avec une secrétaire<br />
et un attaché de presse. Et la secrétaire est<br />
devenue… la femme de Poelvoorde ! »<br />
La première fois où tu t’es dit « Je veux faire<br />
du cinéma » <br />
Sur le tournage des Randonneurs de Philippe<br />
Harel, en Corse. J’y suis resté 4-5 jours, ce qui<br />
est long par rapport à d’habitude où tu restes<br />
une heure et il ne se passe rien... Là, t’as le<br />
temps de voir le tournage, c’était une super<br />
expérience. J’ai rencontré à peu près tous les<br />
métiers : la scripte (qui est celle de Mocky), le<br />
preneur de son (de Desplechin), le chef-op’ (de<br />
Pialat)... qui ne rencontrent pas beaucoup de<br />
journalistes, donc c’était génial de parler avec<br />
eux... et puis Philippe Harel lui-même bien<br />
sûr. Comme il y en a toujours un qui traîne, je<br />
lisais le scénario, et je me suis dit : « Mais il<br />
ne fait pas grand-chose, finalement ! » (Rires). Il<br />
arrive, il donne des indications, et puis après,<br />
le chef-op’ filme, le cadreur cadre... c’est des<br />
pros, donc il ne peut rien se passer, ils sont<br />
très sereins et consciencieux !<br />
Le premier Festival de Cannes <br />
Le Festival de C’est arrivé de près de chez vous,<br />
en 1992. J’avais été aussi sur le tournage du<br />
film, on s’est même retrouvés tous les deux<br />
figurants avec Benoît Mariage, qui faisait<br />
les photos. J’ai dû écrire le dialogue d’une
X<br />
XAVIER DISKEUVE<br />
ELLI MASTOROU<br />
#I<br />
scène, devant le Palais de Justice, un faux<br />
compte rendu de journaliste, car Rémy ne<br />
savait pas comment faire ! Le mercredi avant<br />
l’ouverture du Festival, j’avais été à la vision<br />
de presse parisienne du film : il y a un peu<br />
de rires au début, puis les journalistes s’en<br />
vont sans rien dire. Sur le coup, j’étais moimême<br />
un peu déçu, j’avais trouvé que ça se<br />
répétait beaucoup. Donc en apparence il ne<br />
s’était rien passé. Mais quand ils sont arrivés<br />
à Cannes, il y avait déjà une rumeur qui<br />
traînait, qu’un petit film belge à la Semaine<br />
de la Critique faisait scandale. A l’époque, la<br />
Semaine de la Critique, c’était juste un petit<br />
bureau avec une secrétaire et un attaché de<br />
presse. Et la secrétaire est devenue la femme<br />
de Poelvoorde ! C’est là qu’il l’a rencontrée.<br />
Rapidement, on parlait de projections qui<br />
avaient fait salle comble, que de gens avaient<br />
été refusés, qu’il y avait eu des émeutes… (en<br />
même temps c’était une salle de 70 places,<br />
forcément…). Et voilà, en quelques jours, ils<br />
sont devenus célèbres.<br />
La première fois que tu as reçu un prix <br />
Au Festival de Gand pour La Chansonchanson.<br />
J’avais été très surpris d’avoir un<br />
prix, surtout que la projection s’était passée<br />
dans un silence de mort... alors que c’est<br />
une comédie ! Du coup j’étais sorti en rasant<br />
les murs... Et puis bonne nouvelle au final,<br />
j’apprends que j’ai gagné, donc j’y vais, on<br />
me donne mon prix, et alors j’ai fait un petit<br />
speech, en disant que j’ai fait un film wallon<br />
mais que l’humour était sans doute plus<br />
flamand. Ce qui expliquait que le film avait été<br />
refusé au FIFF de Namur mais primé à Gand !<br />
« J’aimerais habiter dans le Sud de la<br />
France, faire du vélo tous les jours... puis<br />
prendre l’apéro ! »<br />
La première fois que tu as dit : « Moteur - Ça<br />
tourne - Action ! » <br />
La première scène du premier jour de<br />
tournage de mon premier court-métrage. Et<br />
en fait je ne savais même pas que je devais<br />
le dire ! C’était une scène dans une ferme,<br />
alors on arrive, on met tout en place... Et je<br />
dis : « Bon, ben, on y va - Ben oui, tu dois dire<br />
Moteur... - Ah... » Je ne savais pas très bien<br />
comment je devais le dire… Et puis j’ai oublié<br />
de dire « Coupez » à la fin, aussi (rires) !<br />
La première fois que tu t’es dit : « Ras-le-bol<br />
de tous ces cons, je pars devenir bûcheron en<br />
Australie » <br />
Presque tous les jours (rires) ! Non, je ne me<br />
suis jamais dit ça exactement, mais je me<br />
suis déjà souvent dit que j’aimerais habiter<br />
dans le Sud de la France, faire du vélo tous<br />
les jours... puis prendre l’apéro !
X XAVIER DISKEUVE ELLI MASTOROU #H<br />
#I<br />
Plus d’info<br />
Actualité<br />
Votez Pour Moi, tous les matins 8h30 sur Bel<br />
RTL<br />
Jacques a vu – sortie 2015<br />
Jacques a vu, de Xavier Diskeuve.<br />
Sortie 2015<br />
Avant-Première au Festival International du<br />
Film Francophone de Namur<br />
- dimanche 5 octobre, 15h30, Eldorado 1<br />
- mercredi 8 octobre, 18h15, Maison de la<br />
Culture<br />
Crédits photo<br />
Portrait : Xavier Diskeuve<br />
Jacques a vu : Marianne Grimont
Z ZOOM SUR ALPHABETA<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
ZOOM SUR ALPHABETA<br />
Le projet évolue, la famille s’agrandit et<br />
les espoirs se confirment. Derrière ces<br />
8 éditions, ce 208 articles trimestriels,<br />
cette centaine d’articles publiés sur le site<br />
Internet se cache une équipe qui fluctue<br />
entre 9 et 11 personnes, parfois plus, pour<br />
vous raconter la culture et vous plonger<br />
dans la création. Après un peu plus de<br />
26 mois en votre compagnie, nous nous<br />
sommes dits qu’il était peut-être temps de<br />
vous partager l’envers du décor : les douces<br />
nouvelles qui font avancer ce magazine, les<br />
victoires et pourquoi pas les défaites mais<br />
aussi nos aspirations et (grandes) idées<br />
pour le futur... Allez, hop, c’est parti !
Z<br />
ZOOM SUR ALPHABETA<br />
AXELLE MINNE<br />
#I<br />
Nouvelles recrues<br />
Deux nouvelles personnalités nous ont rejoint<br />
cet été. D’abord Quynh-Anh, prête à sonder<br />
tout partenaire culturel potentiel pour vous<br />
en faire profiter ! Concours, relations avec<br />
les institutions et autres initiatives créatives<br />
seront désormais son lot quotidien.<br />
Ensuite, Charlotte, à qui nous avons confié<br />
le sale rôle de money maker (rires) ! Trêve de<br />
plaisanteries, sous son titre de responsable<br />
du développement commercial, elle participera<br />
activement à la création d’un modèle<br />
économique pour le magazine. Et oui, les<br />
choses sérieuses commencent !<br />
ASBL Mon Amour<br />
La sauvagerie administrative, c’est (bientôt)<br />
fini ! Alphabeta se prend enfin en main et<br />
signe ses beaux statuts d’ASBL dans les jours<br />
à venir !<br />
Plein de nouveautés !<br />
On sait, on vous le dit à chaque fois mais<br />
cette fois-ci, cette nouvelle année risque bien<br />
de bouleverser notre petit univers culturel et<br />
le vôtre aussi ! Au programme chez nous : de<br />
nouvelles rubriques, un rythme de publication<br />
plus soutenu, de belles rencontres, de<br />
nouveaux venus au sein de l’équipe, des<br />
événements labellisés et soutenus par notre<br />
plateforme...<br />
Une envie d’être plus proche de la culture,<br />
d’être plus proche de vous mais surtout, la<br />
mise en place d’éléments concrets pour enfin<br />
mettre tout ça sur pied !<br />
Drink entre copains - 20/09/2014<br />
Avec En Stoemelings & Barù
COPYRIGHT ALPHABETA MAGAZINE 2014<br />
RENDEZ-VOUS LE 21/12<br />
POUR DÉCOUVRIR L’ÉDITION #J !