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34 LA COMMUNICATION ET SES ACTEURS U9K25-F1/1<br />

rediffusions. Globalement les recettes à succès sont identiques d’un pays à l’autre. L’achat par la télévision<br />

française de séries ou feuilletons est évidemment très rentable lorsqu’ils engendrent une forte audience, ce<br />

qui est souvent le cas.<br />

De ce point de vue, on ne peut que donner raison aux représentants de l’École de Francfort : l’offre de<br />

programmes s’uniformise progressivement à cause de la recherche maximale du profit et des « lois » de la<br />

concurrence.<br />

On retrouve la même logique économique à l’œuvre dans un autre secteur, celui de l’édition. La compétition<br />

dans ce domaine se résume, aujourd’hui en France, à la domination d’un duopole, Hachette Livre d’un côté,<br />

Editis de l’autre. Ces deux groupes produisent près de 60 % des livres de poche, 80 % des manuels scolaires,<br />

90 % des dictionnaires… La concentration est donc forte et l’édition de plus en plus aux mains d’industriels<br />

et de financiers.<br />

II. CULTURE DE MASSE ET CONSOMMATIONS CULTURELLES<br />

Longtemps, l’analyse de la culture de masse a été placée sous le signe de la dénonciation, voire de la<br />

diabolisation.<br />

Ainsi Herbert Marcuse1 pratiquant une critique en règle de la technologie censée asservir l’homme plutôt<br />

qu’elle ne le libère oppose la « culture supérieure » à la « culture de masse ». Tout en critiquant la première<br />

pour son caractère élitiste et socialement injuste, il lui reconnaît une « aura » particulière, une forme de<br />

transcendance, un côté subversif.<br />

Un roman tel que Madame Bovary ou un poème de Baudelaire favorisent en effet, selon lui, une<br />

transgression magique de la réalité quotidienne et recèlent de ce fait « une promesse de bonheur ». La<br />

culture de masse, en revanche, absorbe, affadit, voire élimine les effets subversifs de l’art et engage un<br />

processus de formatage des esprits. Il s’agirait donc d’une dynamique répressive en ce qu’elle remplace la<br />

satisfaction médiatisée par l’esthétique et la réflexion en une satisfaction immédiate, en une jouissance<br />

vulgaire. Ainsi Phèdre et Les Fleurs du Mal seraient les incarnations d’un « érotisme authentique » à<br />

l’inverse de Lolita de Nabokov ou d’Un tramway nommé Désir de Tennessee Williams, reflets d’une<br />

sexualité sauvage et obscène.<br />

La culture de masse ne fonctionnerait ainsi qu’au principe de plaisir, empêchant toute distanciation parce<br />

qu’elle obéit à la rationalité technologique et commerciale. Le drugstore moderne qui installe au même rang<br />

un roman à l’eau de rose, un ouvrage de philosophie et un roman classique représente pour Marcuse<br />

l’exemple type de la confusion des genres et du nivellement des hiérarchies.<br />

Globalement, les analyses de la culture de masse formulées durant les années 60 en ont toujours une vision<br />

dépréciative. Elles reposent sur une sorte de syllogisme du mépris :<br />

— Nous sommes entrés dans la société de consommation et de production industrielle,<br />

— or les médias constituent une forme d’industrie culturelle,<br />

— donc, la culture diffusée par les médias vers le public est une culture industrielle indifférenciée et<br />

avilissante.<br />

Quelques années plus tard émergeront des approches plus nuancées qui, à partir de la même opposition,<br />

procéderont à une différenciation progressive de la « masse ».<br />

Ainsi, si l’on en croit Edgar Morin2, la « culture des cultivés » est celle de l’élite qui défend une acception<br />

valorisante, aristocratique, de la culture et s’adonne à des plaisirs d’initiés. À l’inverse, la « culture de<br />

masse » peut être décrite à partir d’une série d’oppositions : elle privilégie la quantité à la qualité, la<br />

production à la création, le matérialisme à la spiritualité, la marchandise à l’esthétique, la grossièreté à<br />

l’élégance. Cette culture de masse véhiculée notamment par les « mass médias » est une culture sans racines,<br />

1 Herbert MARCUSE, L’homme unidimensionnel, Paris, Le Seuil, coll. « Points » (1964)<br />

2 Edgar MORIN, L’Esprit du temps (1976, 1 re édition 1962)

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