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Le champ magnétique dans l'univers - Palais de la découverte

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20DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007<strong>Le</strong> <strong>champ</strong><strong>magnétique</strong><strong>dans</strong> l’UniversPhotographie Aurore boréale.© C. Pérez.JOHAN KIEKENMédiateurscientifiqueau départementd’astronomieastrophysiquedu <strong>Pa<strong>la</strong>is</strong><strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>découverte</strong>L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>sen astrophysique est une discipline re<strong>la</strong>tivement récente.<strong>Le</strong>ur prise en compte à toutes les échelles <strong>dans</strong><strong>la</strong> compréhension et <strong>la</strong> modélisation <strong>de</strong> situationscomplexes, comme par exemple, <strong>la</strong> naissance <strong>de</strong>s étoiles,l’évolution <strong>de</strong>s disques protop<strong>la</strong>nétaires et <strong>la</strong> formation<strong>de</strong>s ga<strong>la</strong>xies, apporte un éc<strong>la</strong>irage nouveau sur <strong>de</strong>sphénomènes astronomiques fondamentaux. Dans cetarticle, nous présenterons les propriétés et les domainesd’influence <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s stel<strong>la</strong>ires et à plusgran<strong>de</strong> échelle, <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s ga<strong>la</strong>ctiques etinterga<strong>la</strong>ctiques.


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200721IntroductionUne fraction importante <strong>de</strong> l’Univers setrouve sous <strong>la</strong> forme d’une matière ténue etfaiblement ionisée (1) appelée p<strong>la</strong>sma. <strong>Le</strong>smouvements <strong>de</strong>s particules et ions lecomposant sont sévèrement contrôlés par les<strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s ambiants.En effet, considérons l’exemple suivant : soitun proton typique émis par le Soleil, animéd’une vitesse voisine <strong>de</strong> 400 km.s -1 et soumisau <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> interp<strong>la</strong>nétaire dontl’origine se trouve <strong>dans</strong> le Soleil. Au niveau<strong>de</strong> l’orbite terrestre, l’intensité <strong>de</strong> ce <strong>champ</strong>faible s’élève à 5 nanotes<strong>la</strong>s (nT). Un rapi<strong>de</strong>calcul montre alors que <strong>la</strong> force d’origine<strong>magnétique</strong> s’exerçant sur cette particule esttrente millions <strong>de</strong> fois plus gran<strong>de</strong> que <strong>la</strong> forcequi l’attire gravitationnellement vers leSoleil (2) ! L’exemple cité, quoique simpliste,présente au moins l’intérêt <strong>de</strong> convaincre <strong>de</strong>l’importance considérable mais méconnue <strong>de</strong>s<strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s en astrophysique. Eneffet, ils jouent un rôle capital à l’intérieur <strong>de</strong>sétoiles en y altérant le transport <strong>de</strong>s élémentschimiques <strong>dans</strong> leurs atmosphères. Ils modifientaussi leurs environnements circumstel<strong>la</strong>ireset participent <strong>de</strong> manière significative à<strong>la</strong> formation <strong>de</strong>s étoiles et à l’interaction entreelles et leur disque protop<strong>la</strong>nétaire. L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><strong>la</strong> topologie <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s stel<strong>la</strong>iresai<strong>de</strong> les astronomes à déterminer leurorigine, qu’elle rési<strong>de</strong> <strong>dans</strong> <strong>de</strong>s « effetsdynamo » comme pour notre Soleil ou <strong>dans</strong><strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s fossiles ga<strong>la</strong>ctiques amplifiés par<strong>la</strong> contraction <strong>de</strong>s proto-étoiles. Elle permetaussi <strong>de</strong> comprendre l’impact <strong>de</strong> ces <strong>champ</strong>ssur l’évolution stel<strong>la</strong>ire à long terme. <strong>Le</strong>magnétisme rend également compte <strong>de</strong>certaines propriétés exotiques <strong>de</strong>s nainesb<strong>la</strong>nches, <strong>de</strong>s étoiles à neutrons, <strong>de</strong>s pulsars et<strong>de</strong>s magnétoiles, sta<strong>de</strong>s ultimes <strong>de</strong> l’évolutiond’étoiles au moins aussi massives que leSoleil. À plus gran<strong>de</strong> échelle, les <strong>champ</strong>sga<strong>la</strong>ctiques et interga<strong>la</strong>ctiques sont susceptiblesd’agir sur <strong>la</strong> matière en sculptant <strong>de</strong>sfi<strong>la</strong>ments et les courants <strong>de</strong> particuleschargées. <strong>Le</strong>s astronomes ont ainsi découvertun <strong>champ</strong> proche <strong>de</strong> quelques centaines <strong>de</strong>nanotes<strong>la</strong>s au centre <strong>de</strong> notre Voie <strong>la</strong>ctée etd’autres ga<strong>la</strong>xies. Enfin, à l’échelle cosmique,on a recueilli les preuves indirectes <strong>de</strong> l’existence<strong>de</strong> gigantesques courants <strong>de</strong> particules(10 19 ampères !) véritables ponts entre amas<strong>de</strong> ga<strong>la</strong>xies traduisant <strong>la</strong> présence <strong>de</strong> <strong>champ</strong>strès faibles d’environ 0,05 nT s’étirant surprès <strong>de</strong> 500 millions d’années-lumière.L’intensité d’un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> – on<strong>de</strong>vrait en toute rigueur parler d’induction<strong>magnétique</strong> – s’exprime en tes<strong>la</strong> (T). <strong>Le</strong> tes<strong>la</strong>étant une unité assez gran<strong>de</strong>, on utilise parfoisle gauss (G) qui vaut 10 -4 tes<strong>la</strong>. <strong>Le</strong> tableau Idonne les ordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> l’intensité <strong>de</strong>quelques <strong>champ</strong>s remarquables.(1) Au cœur <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière, il y a les atomes. Un atome estcomposé d’un noyau central positif, assemb<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> protons et<strong>de</strong> neutrons et concentrant pratiquement toute <strong>la</strong> masse <strong>de</strong>l’atome et d’un nuage périphérique négatif d’électrons.Lorsqu’un atome perd ou gagne un ou plusieurs électrons, ilprend le nom d’ion, positif ou négatif.(2) Avant d’aller plus loin, il faut toutefois bien comprendreque les effets <strong>de</strong>s forces <strong>magnétique</strong>s, électriques et gravitationnellessont très différents. Un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> ne peutque faire dévier les particules, alors qu’un <strong>champ</strong> électriqueou gravitationnel peut en plus augmenter ou diminuer leurvitesse.


22DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007Tableau IUnités et ordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>urChamp <strong>magnétique</strong>Ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>urChamp interga<strong>la</strong>ctique 0,05 nanotes<strong>la</strong> (5.10 -11 T)Champ interp<strong>la</strong>nétaire au niveau <strong>de</strong> l’orbite <strong>de</strong> Neptune 0,5 nanotes<strong>la</strong> (5.10 -10 T)Champ interp<strong>la</strong>nétaire au niveau <strong>de</strong> l’orbite terrestre 5 nanotes<strong>la</strong>s (5.10 -9 T)Champ terrestre au niveau du sol 50 microtes<strong>la</strong>s (50.10 -6 T)Champ mesuré à 2 cm d’un fil infini parcouru 0,1 millites<strong>la</strong> (10 -4 T)par un courant <strong>de</strong> 10 AGros aimant en fer à cheval 1 millites<strong>la</strong> (10 -3 T)Tache stel<strong>la</strong>irequelques tes<strong>la</strong>sChamp artificiel statique record50 tes<strong>la</strong>sChamp artificiel pulsé record avec <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> <strong>la</strong> source 2 000 tes<strong>la</strong>sÉtoile à neutrons 1 à 100 mégates<strong>la</strong>s (10 6 T à 10 8 T)Magnétoile 0,1 à 100 gigates<strong>la</strong>s (10 8 T à 10 11 T)<strong>Le</strong> <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong><strong>de</strong>s étoilesEn général, les <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s n’ontqu’un très faible impact sur le bi<strong>la</strong>n énergétiqued’une étoile. En effet, leur énergie nereprésente qu’une petite fraction <strong>de</strong> l’énergiegravitationnelle qui <strong>la</strong> maintient en un tout.Pourtant, ces <strong>champ</strong>s se manifestent tout aulong <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie <strong>de</strong> l’étoile, <strong>de</strong> sa formation auxsta<strong>de</strong>s ultimes <strong>de</strong> son effondrement gravitationnel.Étudions tout d’abord le cas <strong>de</strong>l’étoile <strong>la</strong> mieux connue : notre Soleil.Comment se manifeste son magnétisme etd’où provient-il ?<strong>Le</strong> Soleil<strong>Le</strong> Soleil est une étoile banale du type nainejaune. Une <strong>de</strong>s manifestations les plusévi<strong>de</strong>ntes <strong>de</strong> son magnétisme se trouve <strong>dans</strong>les taches sombres que l’on trouve à sasurface (fig. 1).Ces taches furent <strong>découverte</strong>s par lesChinois il y a <strong>de</strong>ux millénaires mais il fallutattendre le début du XVII e siècle et l’utilisation<strong>de</strong> <strong>la</strong> lunette à <strong>de</strong>s fins astronomiquespour que Johannes Fabricius (1587-1615),Thomas Harriot (1560-1621), ChristophScheiner (1575-1650) et Galilée (1564-1642)en fissent une étu<strong>de</strong> systématique. En 1843,Samuel Heinrich Schwabe (1789-1875)découvrit que les taches so<strong>la</strong>ires variaient ennombre suivant une périodicité d’environ dixans. Enfin, c’est en 1908 que George ElleryHale (1868-1938) y détecta <strong>de</strong> puissants<strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s grâce à l’effet Zeeman(se reporter à l’encadré).L’aspect sombre <strong>de</strong>s taches so<strong>la</strong>ires provient<strong>de</strong> leur température re<strong>la</strong>tivement faible. Eneffet, si <strong>la</strong> température moyenne <strong>de</strong> <strong>la</strong> surfaceso<strong>la</strong>ire s’élève à 5 500 °C, celle <strong>de</strong>s taches nes’élève qu’à 3 500 °C et c’est donc uniquementpar contraste qu’elles nous semblentsombres. Si nous pouvions isoler une tache<strong>de</strong>vant un fond noir et l’observer <strong>de</strong> très loin,celle-ci brillerait d’une belle teinte rougeorangée.Amenée près <strong>de</strong> <strong>la</strong> surface par <strong>de</strong>smouvements ascendants convectifs que nousdécrirons plus loin <strong>dans</strong> cet article, <strong>la</strong> matièrebrû<strong>la</strong>nte provenant <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs du Soleilévite les zones <strong>magnétique</strong>s. Ceci bloquelocalement le transport <strong>de</strong> <strong>la</strong> chaleur, là où le<strong>champ</strong> est intense. Voici pourquoi les tachessont plus froi<strong>de</strong>s et donc plus sombres que lereste <strong>de</strong> <strong>la</strong> surface. <strong>Le</strong>s lignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong> émergentà <strong>la</strong> surface du Soleil sous <strong>la</strong> forme <strong>de</strong>boucles et une paire <strong>de</strong> taches <strong>de</strong> po<strong>la</strong>ritésopposées se créée au pied <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong> cesboucles. Voilà plus d’un siècle que les


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200723FIGURE 1Une tache so<strong>la</strong>ire observéeà très haute résolution.Des détails <strong>de</strong> 100 km sontvisibles. Notez <strong>la</strong> pénombrecomposée <strong>de</strong> fi<strong>la</strong>ments quiconvergent radialement versl’ombre.@ National So<strong>la</strong>rObservatory, SacramentoPeak, Nouveau-Mexique.L’effet ZeemanPieter Zeeman (1865-1943, prix Nobel<strong>de</strong> physique en 1902) observa en 1896un phénomène qui porte désormais son nomet dont l’interprétation ne peut se fairecomplètement que <strong>dans</strong> le cadre <strong>de</strong> <strong>la</strong>physique quantique. Zeeman découvrit qu’enprésence d’un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>, une raiespectrale est décomposée en plusieurscomposantes décalées en fréquence etpo<strong>la</strong>risées*. <strong>Le</strong>s composantes sontrégulièrement espacées et l’espace entre <strong>de</strong>uxcomposantes successives est proportionnelleà l’intensité du <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> régnant<strong>dans</strong> <strong>la</strong> zone d’émission <strong>de</strong> <strong>la</strong> raie (fig. I).L’application <strong>de</strong> ce résultat permit à George Hale<strong>de</strong> découvrir en 1908 que les taches so<strong>la</strong>ires sont<strong>de</strong> puissantes sources <strong>de</strong> <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>pouvant atteindre 0,3 tes<strong>la</strong>, soit près <strong>de</strong> dix millefois <strong>la</strong> valeur du <strong>champ</strong> terrestre.* La lumière peut être considérée comme unepropagation simultanée d'un <strong>champ</strong> électriqueet d'un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> oscil<strong>la</strong>nts etperpendicu<strong>la</strong>ires entre eux. Selon <strong>la</strong> trajectoiredécrite par l’extrémité du vecteur <strong>champ</strong>électrique que l’on suit <strong>dans</strong> sa propagation,on parle <strong>de</strong> po<strong>la</strong>risation rectiligne, circu<strong>la</strong>ireou elliptique.FIGURE IL’effet Zeeman.Un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> fortdécompose une raie spectraleen <strong>de</strong>ux ou plusieurscomposantes.L’intensité du <strong>champ</strong>peut être calculéeen mesurant <strong>la</strong> séparation<strong>de</strong>s composantes.En <strong>de</strong>hors<strong>de</strong> <strong>la</strong> tacheso<strong>la</strong>ireSur<strong>la</strong> tacheso<strong>la</strong>ireEn <strong>de</strong>hors<strong>de</strong> <strong>la</strong> tacheso<strong>la</strong>ire


24DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007FIGURE 2Comparaison <strong>de</strong> trois photographies en faussescouleurs prises par le télescope ultravioletextrême EIT embarqué à bord <strong>de</strong> l’observatoirespatial américano-européen SOHO. À l’approche<strong>de</strong> son maximum <strong>de</strong> l’an 2000, l’activité so<strong>la</strong>ireaugmente notablement. @ SOHO/EIT, NASA/ESA.(3) L’activité so<strong>la</strong>ire désigne un ensemble <strong>de</strong> phénomènesayant trait aux couches observables <strong>de</strong> notre étoile et liés auxvariations locales ou globales <strong>de</strong> son <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>.astronomes ont remarqué que l’activitéso<strong>la</strong>ire (3) n’est pas constante (fig. 2) maisqu’elle passe par un maximum tous les onzeans environ.Au début d’un cycle, les taches apparaissentd’abord aux moyennes <strong>la</strong>titu<strong>de</strong>s et <strong>dans</strong>chaque hémisphère. Elles se forment ensuite<strong>de</strong> plus en plus près <strong>de</strong> l’équateur et l’atteignentau minimum du cycle (fig. 3). Outreles <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s locaux qui leur sontliés, le Soleil possè<strong>de</strong> un <strong>champ</strong> global dipo<strong>la</strong>iresemb<strong>la</strong>ble à celui que créerait un aimantgéant. Dans un groupe <strong>de</strong> taches, celle <strong>de</strong> têtepossè<strong>de</strong> <strong>la</strong> même po<strong>la</strong>rité que le pôle le plusproche. La tache <strong>de</strong> queue possè<strong>de</strong> unepo<strong>la</strong>rité opposée. De plus, l’orientation <strong>de</strong>spaires <strong>de</strong> taches s’inverse tous les onze ans.Un cycle <strong>magnétique</strong> complet dure doncvingt-<strong>de</strong>ux ans.L’interprétation du magnétisme du Soleilnécessite une bonne compréhension <strong>de</strong> sastructure interne (fig. 4). <strong>Le</strong> Soleil est unesphère <strong>de</strong> p<strong>la</strong>sma et <strong>de</strong> gaz <strong>de</strong> 700 000 km <strong>de</strong>rayon. Son cœur est le siège <strong>de</strong> réactions thermonucléairescomplexes où <strong>de</strong> l’hydrogèneest transformé en hélium avec production <strong>de</strong>neutrinos et <strong>de</strong> rayonnement gamma (γ)?. Cecœur est entouré d’une première coquilleappelée zone radiative, épaisse d’environ300 000 km. Cette zone tourne sur elle-mêmed'un seul bloc en vingt-sept jours. Elle estencore très <strong>de</strong>nse, aussi les photons γ issus ducœur y passent un temps considérable, étantabsorbés, réémis, réabsorbés etc. par <strong>la</strong>matière environnante tout en perdant <strong>de</strong>l’énergie au passage. Son transport se faitdonc par rayonnement, <strong>de</strong> proche en proche,<strong>de</strong> choc en choc, vers l’extérieur. Ensuite, unecouche <strong>de</strong> 200 000 km d’épaisseur appeléezone convective sert d’interface entre <strong>la</strong> zoneradiative et <strong>la</strong> surface so<strong>la</strong>ire. La faible <strong>de</strong>nsité<strong>de</strong> cette couche autorise les mouvements <strong>de</strong>matière et le transport d’énergie s’y fait parconvection, comme <strong>dans</strong> une casserole d’eaubouil<strong>la</strong>nte. Cette zone tourne sur elle-mêmeavec une vitesse qui varie selon <strong>la</strong> <strong>la</strong>titu<strong>de</strong>.Il lui faut ainsi entre vingt-cinq jours à l'équateuret trente-trois jours près <strong>de</strong>s pôles pourfaire un tour complet. Ce phénomène typique<strong>de</strong>s objets flui<strong>de</strong>s en rotation s’appelle <strong>la</strong>rotation différentielle. Enfin, <strong>la</strong> surface duSoleil manifeste d’innombrables granulesd’environ 1 000 km <strong>de</strong> diamètre et dont <strong>la</strong>durée <strong>de</strong> vie n’excè<strong>de</strong> pas quelques minutes.En 1955, Eugene Parker (1927-) expliquacomment est généré le <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>so<strong>la</strong>ire. Détaillons ce mécanisme aujourd’huiencore <strong>la</strong>rgement accepté <strong>dans</strong> ses gran<strong>de</strong>slignes. Il faut tout d’abord comprendre que <strong>la</strong>majeure partie du Soleil se trouve sous <strong>la</strong>


26DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007Cœur00,3Distance / RayonZone radiativeZone convective0,71FIGURE 4Structure interne du Soleil.L’énergie so<strong>la</strong>ire est produite <strong>dans</strong> le cœurpar <strong>de</strong>s réactions thermonucléaires.Au-<strong>de</strong>ssus, on trouve <strong>la</strong> zone radiativeoù l’énergie est transmise par lerayonnement ; enfin, <strong>la</strong> zone extérieure,appelée zone convective,est caractérisée par <strong>de</strong>s mouvements<strong>de</strong> matière à gran<strong>de</strong> échelle.@ Groupe <strong>de</strong> physique so<strong>la</strong>ire/MarshallSpace Flight Center/NASA.<strong>Le</strong> milieu interp<strong>la</strong>nétairevent so<strong>la</strong>ireNous venons <strong>de</strong> montrer comment le Soleilgénère en permanence son <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>et <strong>de</strong> quelle manière celui-ci se manifeste.Notre étoile ne constitue toutefois pas unsystème isolé. Elle émet <strong>la</strong> plus gran<strong>de</strong> partie<strong>de</strong> son énergie vers l’extérieur sous <strong>la</strong> forme<strong>de</strong> rayonnements électro<strong>magnétique</strong>s visibleset invisibles et <strong>de</strong> neutrinos. Chauffée par unmécanisme encore mal compris, où lemagnétisme joue certainement un rôle actif,sa haute atmosphère atteint une température<strong>de</strong> plusieurs millions <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés – c’est <strong>la</strong>couronne so<strong>la</strong>ire – et est également <strong>la</strong> sourced’un flux <strong>de</strong> p<strong>la</strong>sma appelé vent so<strong>la</strong>ire. Sacomposition est celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> couronne so<strong>la</strong>ire :une écrasante majorité <strong>de</strong> protons et d’électronset une petite quantité d’ions plus lourds.<strong>Le</strong>ur vitesse moyenne est <strong>de</strong> 450 km.s -1 et leur<strong>de</strong>nsité au niveau <strong>de</strong> l’orbite terrestre est <strong>de</strong>5 particules.cm -3 . <strong>Le</strong> vent so<strong>la</strong>ire est soumisau <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> émanant du Soleil et entant que p<strong>la</strong>sma conducteur, il le transporteaux frontières du système so<strong>la</strong>ire tout en l’amplifiant.<strong>Le</strong> mouvement du p<strong>la</strong>sma est <strong>la</strong>composition d’un mouvement radial vers l’extérieuret d’un mouvement tangentiel dû à <strong>la</strong>rotation <strong>de</strong> notre étoile sur elle-même. <strong>Le</strong>slignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong> étant gelées <strong>dans</strong> ce p<strong>la</strong>sma,elles acquièrent une structure en spirale quel’on nomme spirale <strong>de</strong> Parker (fig. 6).Piégées par le <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> <strong>de</strong>certaines p<strong>la</strong>nètes, <strong>de</strong>s particules du ventso<strong>la</strong>ire s’accumulent <strong>dans</strong> leur magnétosphère(zone d’influence <strong>de</strong> leur <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>),y sont accélérées après un voyage complexe etprovoquent les aurores po<strong>la</strong>ires lorsqu’ellespénètrent <strong>dans</strong> leur haute atmosphère. <strong>Le</strong>smagnétosphères, en particulier celles <strong>de</strong> <strong>la</strong>Terre, constituent donc <strong>de</strong>s boucliers face auxparticules du vent so<strong>la</strong>ire, qui les déforment etles compressent du côté jour alors qu’elless’éten<strong>de</strong>nt sur <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s distances côté nuit.<strong>Le</strong> vent so<strong>la</strong>ire est également responsable <strong>de</strong><strong>la</strong> rectitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s secon<strong>de</strong>s queues (bleutées)<strong>de</strong>s comètes, toujours à l’opposé du Soleil. Lazone d’influence du vent so<strong>la</strong>ire au sein dumilieu interstel<strong>la</strong>ire s’appelle l’héliosphère(fig. 7). Elle a <strong>la</strong> forme d’une vaste bulle dont<strong>la</strong> frontière – l’héliopause – symbolise <strong>la</strong>limite <strong>de</strong> notre système so<strong>la</strong>ire. La distance <strong>de</strong>cette <strong>de</strong>rnière n’est pas connue avec précisionmais on <strong>la</strong> situe bien au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’orbite <strong>de</strong>Neptune.


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200727PôleNordPôleNordPôleNordPôleNordPôleNordChamps <strong>magnétique</strong>s stel<strong>la</strong>ires<strong>Le</strong> Soleil n’est pas <strong>la</strong> seule étoile à possé<strong>de</strong>run <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>. La première détectiondu magnétisme sur une étoile fut effectuée parHorace Welcome Babcock (1912-2003) en1947 grâce à <strong>la</strong> mesure <strong>de</strong> <strong>la</strong> po<strong>la</strong>risation <strong>de</strong>certaines raies spectrales. En un peu plus d’un<strong>de</strong>mi-siècle, les astronomes ont obtenu lespreuves directes <strong>de</strong> l’existence dumagnétisme stel<strong>la</strong>ire sur une centained’étoiles. Elles se répartissent en <strong>de</strong>uxgroupes : celles dont le mécanisme est i<strong>de</strong>ntiqueà celui mis en jeu <strong>dans</strong> le Soleil et cellesFIGURE. 5La dynamo so<strong>la</strong>ire.On part d’un <strong>champ</strong> analogue à celuid’un barreau aimanté où le pôle positif estconfondu avec le pôle Nord héliographique.La rotation différentielle du Soleil étireles lignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong> jusqu’à ce qu’ellesrésistent, se déten<strong>de</strong>nt, remontent à <strong>la</strong> surfacepuis émergent en créant une paire <strong>de</strong> tachesso<strong>la</strong>ires. Elles disparaissent rapi<strong>de</strong>ment maisleur <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> subsiste longtemps.La po<strong>la</strong>rité <strong>de</strong> <strong>la</strong> défunte tache <strong>de</strong> queue arriveau pôle Nord et contribue à l’inversiondu <strong>champ</strong> global. Onze années plus tard,ce <strong>champ</strong> s’est inversé et le cycle recommence.


28DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007SoleilTerreJupiterFIGURE 6Spirale <strong>de</strong> Parker.Au niveau <strong>de</strong> l’orbite terrestre, le <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>so<strong>la</strong>ire fait un angle <strong>de</strong> 45° avec <strong>la</strong> direction Terre-Soleil.dont le magnétisme est sans doute le vestiged’une étape antérieure, telles les nainesb<strong>la</strong>nches.Magnétisme par effet dynamoIl fut rapi<strong>de</strong>ment démontré que lemagnétisme dynamo avait <strong>de</strong>s conséquencessur <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> rotation <strong>de</strong>s étoiles. Prenonsune étoile <strong>de</strong> faible masse. Elle est re<strong>la</strong>tivementfroi<strong>de</strong> et possè<strong>de</strong> une zone convective.En son sein se développe un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>selon le mécanisme décrit plus haut, quichauffe fortement <strong>la</strong> haute atmosphère et crééainsi un vent stel<strong>la</strong>ire. Cette perte <strong>de</strong> matièrefreine l’étoile <strong>de</strong> <strong>la</strong> même manière qu’unepatineuse ralentit en écartant les bras, envertu <strong>de</strong> <strong>la</strong> conservation du moment cinétiquedu système étoile-vent stel<strong>la</strong>ire. UnFIGURE 7En s’éloignant du Soleil, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’orbite <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières p<strong>la</strong>nètes, nous rencontrons d’abord le chocterminal.<strong>Le</strong> vent so<strong>la</strong>ire y est brusquement ralenti par le gaz interstel<strong>la</strong>ire. On peut affirmer que l’héliogaine matérialise<strong>la</strong> frontière <strong>de</strong> notre système so<strong>la</strong>ire. C’est une vaste région où le vent so<strong>la</strong>ire est chaud et turbulent. <strong>Le</strong>s ventsinterstel<strong>la</strong>ires entrent plus loin en collision avec l’héliogaine et une on<strong>de</strong> <strong>de</strong> choc se forme. On a égalementreprésenté les positions <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux son<strong>de</strong>s Voyager au sein <strong>de</strong> ces structures complexes. @ NASA/Walt Feimer


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200729phénomène supplémentaire est susceptible<strong>de</strong> ralentir notre étoile, surtout si elle estjeune. Son <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> s’ancre <strong>dans</strong>le disque d’accrétion qui a accompagné sanaissance et synchronise sa rotation sur <strong>la</strong>vitesse correspondant à une orbite <strong>de</strong>quelques rayons stel<strong>la</strong>ires. Cette vitesse étantinférieure à <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong> rotation originelle<strong>de</strong> l’étoile, elle est freinée. Il n’est donc passurprenant <strong>de</strong> constater que les étoiles peumassives possédant donc une zone convectiveet un magnétisme dynamo tournentmoins vite que les étoiles massives, chau<strong>de</strong>set dénuées <strong>de</strong> zone convective.Magnétisme fossile47 Virginis, l’étoile étudiée par Babcock,intrigua immédiatement les astronomes. Sonmagnétisme différait sensiblement <strong>de</strong> celuidu Soleil. <strong>Le</strong>s observations permirent <strong>de</strong>découvrir que les variations périodiques <strong>de</strong>son <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> ne résultaient que <strong>de</strong><strong>la</strong> rotation <strong>de</strong> l’étoile et pas d’une variationintrinsèque et cyclique. De plus, sa structuresemb<strong>la</strong>it plus simple, analogue en premièreapproximation au <strong>champ</strong> dipo<strong>la</strong>ire d’unbarreau aimanté. On pense aujourd’hui queces <strong>champ</strong>s proviendraient <strong>de</strong> l’amplificationd’un fragment du <strong>champ</strong> ga<strong>la</strong>ctique emprisonnépar le nuage ayant engendré l’étoile pareffondrement gravitationnel. <strong>Le</strong>s <strong>champ</strong>sfossiles modifient également le transport <strong>de</strong>séléments chimiques au sein <strong>de</strong>s atmosphèresstel<strong>la</strong>ires. On a ainsi pu montrer que surl’étoile epsilon <strong>de</strong> <strong>la</strong> Gran<strong>de</strong> Ourse,l’oxygène est présent en quantité so<strong>la</strong>ire près<strong>de</strong> l’équateur mais qu’il a presque complètementdisparu près <strong>de</strong>s pôles <strong>magnétique</strong>s. <strong>Le</strong>magnétisme intervient à tous les sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>la</strong>vie <strong>de</strong>s étoiles. Quel rôle joue-t-il lors <strong>de</strong> leurnaissance ?La naissance <strong>de</strong>s étoiles<strong>Le</strong>s étoiles naissent par effondrement d’unnuage <strong>de</strong> gaz et <strong>de</strong> poussières. Intéressons-nous au sta<strong>de</strong> ultérieur : une proto-étoile s’estformée et accrète encore <strong>de</strong> <strong>la</strong> matière. Elle<strong>de</strong>meure invisible, cachée <strong>de</strong>rrière un épaiscocon <strong>de</strong> poussières qui baigne <strong>dans</strong> le <strong>champ</strong>ga<strong>la</strong>ctique local. On sait aujourd’hui que lesétoiles jeunes, comme les T Tauri, sont <strong>la</strong>source d’éruptions violentes et d’un rayonnementX qui ionise <strong>la</strong> matière environnante.Champ <strong>magnétique</strong> et matière – il s’agit <strong>de</strong>p<strong>la</strong>sma – sont alors couplées près <strong>de</strong> l’étoile.Des phénomènes complexes mê<strong>la</strong>nt turbulence,pression thermique et forcescentrifuges sont alors à l’origine <strong>de</strong> jets <strong>de</strong>matière canalisés (fig. 8).Là où les jets rencontrent le milieu interstel<strong>la</strong>irese produisent <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s <strong>de</strong> chocs matérialiséespar les objets <strong>de</strong> Herbig-Haro. Cesjets contribuent à ralentir l’étoile, mais ilsseraient aussi à l’origine <strong>de</strong>s fortes excentricités<strong>de</strong> nombreuses p<strong>la</strong>nètes extraso<strong>la</strong>ires<strong>découverte</strong>s à ce jour.Cadavres d’étoiles<strong>Le</strong>s naines b<strong>la</strong>nchesLa vie d’une étoile est un combat permanententre <strong>la</strong> gravité, qui tend à <strong>la</strong> faire s’effondreret <strong>la</strong> pression <strong>de</strong> radiation qui tend elle, aucontraire, à <strong>la</strong> di<strong>la</strong>ter. Dans le Soleil, <strong>la</strong> pression<strong>de</strong> radiation provient <strong>de</strong>s réactionsnucléaires se dérou<strong>la</strong>nt en son sein.L’hydrogène se transforme en hélium avec unfort dégagement d’énergie. Quand l’hydrogèneviendra à manquer d’ici cinqmilliards d’années, <strong>la</strong> diminution du débitd’énergie provoquera l’expansion <strong>de</strong> sonatmosphère et <strong>la</strong> contraction <strong>de</strong> son cœur. Plus<strong>de</strong>nse, plus chaud, ce <strong>de</strong>rnier sera alors lesiège <strong>de</strong> nouvelles réactions nucléaires transformantl’hélium en carbone et oxygène. <strong>Le</strong>Soleil entrera <strong>dans</strong> une nouvelle pério<strong>de</strong>d’équilibre mais cette <strong>de</strong>rnière ne durera paséternellement. Lorsque le combustible héliumsera épuisé, nulle échappatoire ne seraautorisée car <strong>la</strong> masse du Soleil étant tropfaible, <strong>la</strong> pression résultante au centre ne sera


30DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007jamais assez gran<strong>de</strong> pour permettre une fusiondu carbone ou <strong>de</strong> l’oxygène. Notre étoileconnaîtra alors <strong>de</strong>s phases d’instabilité,expulsera ses couches externes et donneraainsi naissance au très photogéniquephénomène <strong>de</strong> nébuleuse p<strong>la</strong>nétaire. En lieu etp<strong>la</strong>ce du cœur effondré, on trouvera le cadavre<strong>de</strong> ce qui fut jadis le Soleil : une naineb<strong>la</strong>nche. La naine b<strong>la</strong>nche est un objet auxpropriétés exotiques et elle constitua un défiinsurmontable pour <strong>la</strong> physique c<strong>la</strong>ssique.Imaginez un astre qui concentre <strong>la</strong> massed’une étoile <strong>dans</strong> le volume d’une p<strong>la</strong>nète <strong>de</strong><strong>la</strong> taille <strong>de</strong> <strong>la</strong> Terre… sa <strong>de</strong>nsité, prodigieuse,équivaut à un million <strong>de</strong> fois celle <strong>de</strong> l’eau.Lors <strong>de</strong> son effondrement, le cœur ionisé <strong>de</strong>l’étoile emporte avec lui les lignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong><strong>magnétique</strong> qui se trouvent donc resserrées.L’intensité du <strong>champ</strong> augmente <strong>de</strong> manièreconsidérable et influence certainement <strong>la</strong> rotation<strong>de</strong> <strong>la</strong> naine b<strong>la</strong>nche. En effet, <strong>de</strong>s calculsmontrent que l’effondrement <strong>de</strong> notre Soleil<strong>de</strong>vrait conduire à un astre dont <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>rotation s’élèverait à environ trois minutes.Or, les astronomes ont réussi à prouver que lesFIGURE 8HH30 est une étoile très jeune,âgé d’à peine 500 000 ans.En cinq années d’observation, le télescope spatialHubble a dévoilé <strong>de</strong>s changements <strong>dans</strong> sondisque et ses jets. La scène est rendue visiblepar <strong>la</strong> réflexion <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière <strong>de</strong> l’étoile sur<strong>la</strong> poussière située au-<strong>de</strong>ssus et sous le p<strong>la</strong>ndu disque. <strong>Le</strong> diamètre <strong>de</strong> ce disque s’élèveà 450 unités astronomiques, soit 450 fois <strong>la</strong>distance moyenne Terre-Soleil. <strong>Le</strong> <strong>champ</strong><strong>magnétique</strong> stel<strong>la</strong>ire joue un rôle majeur <strong>dans</strong><strong>la</strong> formation <strong>de</strong>s jets, qui quittent le disqueà près d’un million <strong>de</strong> kilomètres par heure.@ NASA, A<strong>la</strong>n Watson (Universidad NacionalAutonoma <strong>de</strong> Mexico, Mexique), Karl Stapelfeldt(Jet Propulsion Laboratory), John Krist (SpaceTelescope Science Institute) et Chris Burrows(Agence Spatiale Européenne/Space TeslecopeScience Insitute).naines b<strong>la</strong>nches mettent quelques heures àquelques jours pour faire un tour sur ellesmêmes.Il faut donc que <strong>de</strong>s mécanismes <strong>de</strong>perte <strong>de</strong> moment cinétique interviennent, bienqu’ils ne soient pas encore bien compris. Nuldoute que les puissants magnétismes dont lesnaines b<strong>la</strong>nches sont <strong>la</strong> source n’y sont pasétrangers…


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200731<strong>Le</strong> rayonnement synchrotron<strong>Le</strong> rayonnement synchrotron est lerayonnement émis par <strong>de</strong>s électrons enmouvement <strong>dans</strong> un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>.Son spectre est caractéristique et diffèresensiblement <strong>de</strong> <strong>la</strong> courbe en cloche durayonnement thermique du corps noir.Examinons-le en détail et voyons quellesinformations on peut en extraire. Lorsqu’unélectron se dép<strong>la</strong>ce à <strong>la</strong> vitesse v <strong>dans</strong> un<strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> B, il est soumis à une forceorthogonale à v et à B. Cette force lui imposeun mouvement <strong>de</strong> spirale autour <strong>de</strong>s lignesdu <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>. Or, une charge accéléréeémet <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière. Ce<strong>la</strong> peut sembler curieux<strong>de</strong> parler d’accélération alors que l’électronne voit pas sa vitesse varier en norme <strong>dans</strong>un <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>. Toutefois, n’oublions pasque cette vitesse varie en direction et qu’ilexiste bien ici une accélération au sensvectoriel du terme. De manière générale,plus <strong>la</strong> vitesse <strong>de</strong>s électrons est gran<strong>de</strong>,plus <strong>la</strong> fréquence <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière qu’ils émettentest élevée. L’émission <strong>de</strong> cette lumière setraduisant par une diminution <strong>de</strong> leur énergie,les électrons ralentissent et produisent unrayonnement se déca<strong>la</strong>nt vers les gran<strong>de</strong>slongueurs d’on<strong>de</strong> (fig. II). Il s’ensuit qu’unesource <strong>de</strong> rayonnement synchrotron continue,comme les vestiges <strong>de</strong> supernovae, ne peutqu’être alimentée en permanence par <strong>de</strong>sélectrons frais. L’énergie <strong>de</strong> ces électrons fraisdétermine <strong>la</strong> fréquence maximale v du spectre(fig. III), qui peut se situer <strong>dans</strong> l’ultravioletet même les rayons X si <strong>la</strong> source estparticulièrement puissante. La mesure<strong>de</strong> v fournit une contrainte sur les processusénergétiques à l’œuvre <strong>dans</strong> <strong>la</strong> source<strong>de</strong>s électrons.Trajectoireen spirale<strong>de</strong> l'électronRayonnementsynchrotronabsorbéLignes du<strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong>Rayonnementsynchrotron émisvers l'extérieurLogarithme <strong>de</strong> l'intensité86420Unités arbitrairesSourced'électrons- 2- 4 - 2 0 2Logarithme <strong>de</strong> <strong>la</strong> fréquenceFIGURE IIUne source quelconque projette <strong>de</strong>sélectrons <strong>dans</strong> une région où règne un<strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> B.Ceux-ci se mettent à spiraler autour <strong>de</strong>slignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong> et émettent un rayonnementabsorbé par les électrons environnants.FIGURE IIIUn exemple <strong>de</strong> spectre synchrotron.Notez l’échelle logarithmique, <strong>la</strong> brusquecoupure du spectre aux hautes énergieset le fait que le spectre ne possè<strong>de</strong> pas vraiment<strong>de</strong> pic d’émissivité à <strong>la</strong> différence du spectredu corps noir.


32DÉCOUVERTE N°346 MARS 2007<strong>Le</strong>s étoiles à neutronsS’il y a <strong>de</strong>s objets où le magnétisme se manifeste<strong>de</strong> manière exacerbée, ce sont bien lesétoiles à neutrons. Elles constituent le sta<strong>de</strong>ultime <strong>de</strong>s étoiles massives après leur explosionen supernovae. L’étoile à neutrons estune version exagérée <strong>de</strong> <strong>la</strong> naine b<strong>la</strong>nche. Plusmassive que le Soleil, c’est une sphère d’àpeine vingt kilomètres <strong>de</strong> diamètre dont <strong>la</strong><strong>de</strong>nsité dépasse l’enten<strong>de</strong>ment : une cuillère àcafé <strong>de</strong> sa matière aurait une masse <strong>de</strong>plusieurs milliards <strong>de</strong> tonnes ! La gravité y estsi intense qu’elle pousse les électrons <strong>dans</strong> lesnoyaux avec pour bi<strong>la</strong>n une création<strong>de</strong> neutrons. <strong>Le</strong> <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong><strong>de</strong> ces astres estimmense et équivaut auminimum à <strong>de</strong>sdizaines <strong>de</strong> milliards<strong>de</strong> fois le <strong>champ</strong>terrestre. De plus,ils tournent trèsvite. <strong>Le</strong>s plusRayons Xrapi<strong>de</strong>s effectuentjusqu’à plusieurscentaines <strong>de</strong> tourssur eux-mêmes enune secon<strong>de</strong>. À <strong>la</strong>surface d’une étoile àneutrons, le <strong>champ</strong>électrique est très gran<strong>de</strong>t il peut en extraire <strong>de</strong>sélectrons qu’il accélèrefortement près <strong>de</strong>s pôles<strong>magnétique</strong>s. Ces électrons,se dép<strong>la</strong>çant rapi<strong>de</strong>ment leLignes<strong>de</strong> <strong>champ</strong>Axe <strong>de</strong>rotationlong <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong> <strong>magnétique</strong> en s’enrou<strong>la</strong>ntautour d’elles, émettent un rayonnementradio dit synchrotron (se reporter à l’encadré <strong>Le</strong>rayonnement synchrotron).<strong>Le</strong> faisceau du rayonnement synchrotron esttrès étroit et suit l’axe <strong>de</strong>s pôles <strong>magnétique</strong>s.Or, celui-ci n’est pas confondu avec l’axe <strong>de</strong>rotation <strong>de</strong> l’étoile à neutrons. Ainsi, lors <strong>de</strong> <strong>la</strong>rotation <strong>de</strong> l’étoile, le faisceau ba<strong>la</strong>ye l’espace<strong>Le</strong>s magnétoiles<strong>Le</strong> 5 mars 1979, <strong>de</strong>ssatellites équipés <strong>de</strong>et décrit un cône. Si par chance <strong>la</strong> Terre setrouve <strong>dans</strong> <strong>la</strong> zone ba<strong>la</strong>yée, elle reçoit trèsrégulièrement une brève impulsion radio. Ondonne alors le nom <strong>de</strong> pulsar à cet astre(fig. 9). <strong>Le</strong> premier objet <strong>de</strong> ce type fut <strong>découverte</strong>n 1967 par Bell (1943-) et Hewish(1924-). La régu<strong>la</strong>rité <strong>de</strong> <strong>la</strong> source d’émissionétait si stable qu’elle leur a paru suspecte etpeut-être artificielle. Malheureusement pourles amateurs d’extraterrestres, d’autressources radio périodiques furent <strong>découverte</strong>set leur origine rapi<strong>de</strong>ment attribuée auphénomène naturel décrit précé<strong>de</strong>mment.détecteurs <strong>de</strong>Accrétiondu gaz rayons gamma –les photons lesplus énergétiquesdu spectreélectro<strong>magnétique</strong>– captèrentet enregistrèrent<strong>dans</strong> le ciel unecolossale émissiongamma dont le pic,décroissant rapi<strong>de</strong>menten intensité, présentait <strong>de</strong>ssursauts toutes les cinqsecon<strong>de</strong>s. À ce jour, lesastronomes ont recenséquatre événements différents<strong>de</strong> ce type. Ils purent aussi montrer qu’àl’émission <strong>de</strong> rayons gamma s’ajoutait un flux<strong>de</strong> rayons X moins énergétiques et que leurétaient associés <strong>de</strong>s vestiges <strong>de</strong> supernovae.Pendant plus <strong>de</strong> dix ans, les théoriciens nesurent expliquer ces phénomènes mystérieuxmais ils soupçonnaient l’implication <strong>de</strong>sétoiles à neutrons. <strong>Le</strong>ur interprétation futapportée par Robert Duncan et ChristopherFIGURE 9Structure d’un pulsar.Axe du <strong>champ</strong><strong>magnétique</strong>


DÉCOUVERTE N°346 MARS 200733Thompson en 1992. Ils découvrirent que <strong>dans</strong>certaines conditions, l’effet dynamo à l’œuvre<strong>dans</strong> <strong>de</strong> très jeunes étoiles à neutrons pouvaitengendrer <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s extrêmes,<strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 11 tes<strong>la</strong>s. Ces <strong>champ</strong>s exercent<strong>de</strong>s contraintes énormes sur <strong>la</strong> croûte soli<strong>de</strong><strong>de</strong> ces astres, qui réajustent leur structurelocalement ou globalement par le biais <strong>de</strong>gigantesques « tremblements d’étoiles ». <strong>Le</strong>szones <strong>magnétique</strong>s se dép<strong>la</strong>cent en suivant <strong>la</strong>croûte et lorsque <strong>de</strong>ux zones <strong>de</strong> po<strong>la</strong>ritésopposées se rencontrent, elles voient leurslignes <strong>de</strong> <strong>champ</strong>s s’annihiler et libérer l’énergiequ’elles contiennent. Cet afflux d’énergieaccélère considérablement <strong>de</strong>s électronsqui sont alors <strong>la</strong> source d’un rayonnementsynchrotron gamma. Dans le même temps,<strong>de</strong>s morceaux <strong>de</strong> <strong>la</strong> surface sont vivementchauffés et se refroidissent en émettant <strong>de</strong>srayons gamma. Comme l’étoile tourne, lespoints chauds apparaissent et disparaissentsuccessivement aux yeux <strong>de</strong>s détecteurs et ilssont détectés sous <strong>la</strong> forme d’une émissionpériodique. Ce modèle théorique a pour avantaged’expliquer <strong>de</strong> nombreuses caractéristiques<strong>de</strong>s magnétoiles : par exemple <strong>la</strong> formedu sursaut gamma ou <strong>la</strong> faible vitesse <strong>de</strong> rotation<strong>de</strong> ces étoiles à neutrons particulières,ralenties efficacement par l’énorme <strong>champ</strong><strong>magnétique</strong> qu’elles génèrent.vestiges <strong>de</strong> supernovae, <strong>de</strong> sursauts gamma oud’autres phénomènes encore méconnus ?Enfin, à l’échelle cosmique, on a mis enévi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s d’intensité aussi faibleque 5.10 -11 tes<strong>la</strong> et circu<strong>la</strong>nt entre <strong>de</strong>ssuperamas <strong>de</strong> ga<strong>la</strong>xies. Ces superamas et doncces <strong>champ</strong>s font partie <strong>de</strong>s plus gran<strong>de</strong>sentités connues à l’heure actuelle, avec <strong>de</strong>stailles supérieures à cent millions d’annéeslumière.ConclusionL’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s en astrophysiqueest une discipline re<strong>la</strong>tivementrécente. Nous avons vu combien lemagnétisme est une composante active mais ilest vrai, souvent secondaire, <strong>dans</strong> <strong>de</strong>sphénomènes aussi variés que <strong>la</strong> formation, <strong>la</strong>vie <strong>de</strong>s étoiles et leurs sta<strong>de</strong>s ultimes d’évolution.Il joue aussi un rôle important à uneéchelle plus vaste au sein <strong>de</strong>s ga<strong>la</strong>xies et <strong>de</strong>sespaces interga<strong>la</strong>ctiques mais nous touchonsici à un domaine <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> pointe.Il nous reste encore beaucoup à apprendre…J. K.À plus gran<strong>de</strong> échelleNotre revue, évi<strong>de</strong>mment non exhaustive, <strong>de</strong>l’influence <strong>de</strong>s <strong>champ</strong>s <strong>magnétique</strong>s en astrophysiqueprend fin sur une vision à plusgran<strong>de</strong> échelle. Notre ga<strong>la</strong>xie, <strong>la</strong> Voie <strong>la</strong>ctée,baigne <strong>dans</strong> un <strong>champ</strong> très faible, un million<strong>de</strong> fois moins intense que le <strong>champ</strong> terrestre.Pourtant, ce <strong>champ</strong> parvient à aligner lesvestiges ionisés <strong>de</strong>s supernovae. Son originereste encore un mystère. Peut-être est-il lerésultat d’un <strong>champ</strong> originel qui a été amplifiélors <strong>de</strong> l’effondrement <strong>de</strong> notre proto-ga<strong>la</strong>xie? Peut-être n’est-il que le résultat ultérieur <strong>de</strong>4Titu<strong>la</strong>ire d’un DEA d’astrophysique,Johan Kieken a effectué trois années<strong>de</strong> thèse <strong>dans</strong> le domaine <strong>de</strong> <strong>la</strong>p<strong>la</strong>nétologie. Il intègre le <strong>Pa<strong>la</strong>is</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong><strong>découverte</strong> en 2005 en tant quemédiateur scientifique au sein dudépartement d’astronomieastrophysique.Il assure, à ce titre, <strong>de</strong>sséances <strong>de</strong> p<strong>la</strong>nétarium et <strong>de</strong>s exposéspour le grand public.

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