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Compte-rendu dans son intégralité - Tram

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Pierre Bal-BlancCette question recoupe celle de la prise en compte d’une politique territoriale <strong>dans</strong> le développementd’un projet. Le centre d’art contemporain de Brétigny est passé d’une mission de la ville de Brétigny àcelle d’une communauté d’agglomération : les paramètres la géographie d’actions changent. Il fautdonc développer des actions en direction de cette géographie particulière. Ce travail se faitprogressivement, le temps de trouver des interlocuteurs, des relais et de constituer une véritable miseen réseau de nos activités ; d’autant que la répartition des conseillers pédagogiques ne répond pasaux géographies des communautés d’agglomérations. Ce travail doit en permanence se renouveler, iln’y a rien de définitif. Il faut du temps et des perspectives car les résultats n’arrivent que bien plustard.Caroline Coll-SerorMon expérience me confirme que les élus <strong>son</strong>t très attentifs aux chiffres de fréquentation et mesurentsouvent la réussite d’une action au nombre d’entrées ou au nombre de participants aux activités. Or,au sein des ateliers de pratique artistique, il se passe beaucoup de choses en terme de constructionde soi, de mieux-être. Cet accompagnement long et ambitieux demande beaucoup d’investissement.Les résultats ne se mesurent pas facilement. Les lieux d’art contemporain doivent gérer un doublehéritage. Dans les années 1980, Jack Lang a beaucoup œuvré pour doter le territoire d’un maillage delieux d’art contemporain. Le réseau tram en Ile-de-France est l’exemple de cette vivacité, fédérant deslieux avec des projets riches et divers. Parallèlement, il faut reconnaître que l’effort des pouvoirspublics s’est limité à une dotation en investissement, mais le fonctionnement à long terme ainsuffisamment été pris en compte. Une fois l’outil artistique mis en place, il est difficile de dégagerdes marges supplémentaires afin d’obtenir des moyens en terme d’action culturelle qui soient à lahauteur des moyens dévolus à l’artistique. Il faut combiner les deux, lutter pour obtenir des moyens etfaire preuve d’imagination pour être efficaces.La deuxième partie de l’héritage, c’est l’inexistence en France d’éducation en histoire de l’art. Il faut sebattre contre cette situation caractéristique de la France. En effet certains pays européens intègrentparfaitement l’enseignement de l’histoire de l’art au cursus scolaire.Caroline BourgeoisNous subis<strong>son</strong>s tous cette pression qui est culturellement très présente. Toutefois, notre rôle deproposer des projets de qualité. L’important, c’est la visibilité de l’œuvre et <strong>son</strong> aura. Néanmoins, parobligation, nous comptons les visiteurs et réali<strong>son</strong>s des rapports d’activités. Concernant les actionsdu service des publics - je préfère ce terme à celui de pédagogie – nous ne sommes pas deséducateurs mais des « passeurs ». Ce travail se fait petit à petit et bien souvent <strong>dans</strong> des relationsquasi individuelles. Il ne peut y avoir de « rentabilité » d’un quelconque financement <strong>dans</strong> le servicedes publics.Claire le RestifNous évoquions précédemment la question des équipes qui parviennent à fidéliser des contactsprivilégiés. Lorsque les équipes changent, cela peut engendre des baisses ou des changements. Lecrédac / Galerie Fernand Léger a beaucoup changé ces dernières années et par conséquent lescontacts ont dû également changer. Par contre, ce qui est très intéressant c’est que le public restefidèle au lieu. Il est intéressant de voir que les chiffres de fréquentation <strong>son</strong>t constants. Ceci dit, je n’aijamais ressenti de pression à ce sujet, peut-être est-ce une chance. La citation chère à Vilarss’applique bien à Ivry-sur-Seine. Si soudainement, il y avait défection des publics, c’est bien entenduquelque chose qui me poserait question. C’est important mais pas essentiel.Lionel BalouinConcernant les questions de quantité et de qualité, nous sommes toujours partagés entre les deux.Concernant la fréquentation des ateliers de pratiques artistiques, les chiffres ne nous ont jamaisvraiment été demandés par l’administration bien qu’actuellement la ville mène une étude des publics.L’enseignement pour les adultes à l’Ecole municipale des beaux-arts est un enseignement innovantqui reprend la pédagogie des écoles supérieures d’art. Il est axé sur l’acquisition d’une expressionper<strong>son</strong>nelle. C’est cette recherche d’excellence qui nous a permis d’échapper à la question de laquantité. Il en va de même pour tous nos publics. La question de la qualité est et reste primordiale.Cependant, nous ne pouvons faire l’impasse sur la question de la quantité car elle est, me semble t-il,importante pour les politiques et conditionne souvent toute demande et attribution de budgetsupplémentaire. Actuellement, nous tentons de réorienter l’enseignement artistique de la structure defaçon à garder la qualité tout en élargissant notre public par de nouvelles actions. Faire le lien entrequalité et quantité demande une adaptation et une créativité constante. Ces questions de qualité et de© tram 2005 8


quantité c’est aussi repenser nos missions de service public, de travail en direction d’un public deproximité sans pour autant aller vers la démagogie.Concernant le fonctionnement de la galerie, il faut tenir compte du fait que nous sommes implantés enproche banlieue parisienne. Nous devons avoir et avons une programmation sans complexe. En cequi concerne la médiation et notamment en matière d’art contemporain, notre tache n’est pas toujoursaisée <strong>dans</strong> la mesure où les centres d’arts et les grands musées parisiens exercent un fort attraitpour les publics. Certains de nos publics potentiels irons plus facilement voir une expositionparisienne plutôt qu’une exposition <strong>dans</strong> une structure de proximité. J’ai dirigé un centre d’art et uneécole d’art en province et j’ai constaté que la relation au public est totalement différente. Le travail demédiation était beaucoup plus aisé avec les différents partenaires.Une programmation de qualité implique des actions de médiation de qualité. Les artistes proposentdes œuvres qui <strong>son</strong>t un langage et donc un moyen de partager une vision du monde. Le travail demédiation consiste à faire le lien entre cette parole singulière qui revêt une forme tout aussi singulièreet nos publics. Pour cela nous organi<strong>son</strong>s des rencontres avec les artistes le premier samedi dechaque exposition. Nous présentons les expositions sous forme de visite-dialogues en nous appuyantsur des dossiers pédagogiques, aussi bien aux scolaires qu’aux centres de loisirs. Nous accueillonségalement des adultes. Cependant ce travail n’est pas toujours simple car nous nous heurtons auxidées reçues sur l’art de la part de certains de nos partenaires municipaux. Qui plus est, considérantque ce que nous propo<strong>son</strong>s n’est pas pour eux (désintérêt, complexe culturel, etc.), ils n’ont pastoujours conscience que favoriser, en tant que per<strong>son</strong>ne relais, une relation à l’art pour leur public,c’est leur offrir un accès privilégiés à la culture et une ouverture et un autre regard sur le monde. Notretravail est donc un travail de fourmi dont le but est de convaincre <strong>dans</strong> un premier temps lesper<strong>son</strong>nes relais pour <strong>dans</strong> un second temps toucher un public plus large. C’est du militantisme auquotidien !Pierre Bal-BlancLa plupart des artistes ont ce souci de proposer des projets qui tisseront des liens avec les publics.Je connais peu d’artistes qui viennent à Brétigny sans se soucier de ces questions. Si l’artiste n’a pasenvie d’entreprendre cette réflexion, nous sommes là pour le faire. La dimension de médiation doitelle-même être créative, une source d’expérimentation et nous devons pour chaque occasion ouchaque artiste, inventer de nouvelles formes. Etant donné que nous sommes très pris par ce travaild’expérimentation, de création de projet, nous ne pouvons en même temps être sur le terrain pourrelayer nos activités. A Brétigny, nous avons des relais avec lesquels nous arrivons à bien travailler,ce qui est rare et précieux. Cette question des relais est la plus grande difficulté que nousrencontrons. Les collectivités locales n’ont pas toujours les moyens suffisants pour mobiliser desper<strong>son</strong>nes qui vont s’investir et faire valoir nos activités. Pourtant c’est un principe simple : <strong>dans</strong> lecommerce, une per<strong>son</strong>ne ne peut pas être à la fois producteur et commercial. Sur des territoires quibougent, comme la banlieue, nous avons des difficultés à travailler avec une mise en place de relaisefficace. C’est un point qu’il faut étudier, autour de l’échange, de la communication ou de l’informationsur nos activités.Claire le RestifCertains artistes ont comme préoccupation même de leur travail artistique et plastique le rapport avecl’autre. C’est une question contenue <strong>dans</strong> le fondement de leur travail, donc rien que de plus naturelque de rechercher l’autre afin que l’œuvre soit accomplie. Pour d’autres artistes, la question de l’autreest moins présente. De manière générale, les artistes avec lesquels nous travaillons et que nousaccompagnons pour leur première exposition ont déjà fort à faire. Ils doivent réaliser une œuvre, bâtirune carrière, gagner leur vie… Très souvent, ces artistes <strong>son</strong>t tout à fait disposés à entrer <strong>dans</strong> undialogue, à un moment privilégié, avec le public. Les artistes que nous invitons à exposer ne refusentjamais le dialogue avec les publics mais il faut bien comprendre que ce n’est pas forcément leurpriorité.Caroline BourgeoisCette tendance à attendre de l’artiste qu’il réponde à tout m’inquiète un peu. Si un artiste a choisi lechemin de l’œuvre plastique, c’est qu’il souhaite développer un autre rapport au monde, qui ne passeparce pas forcément par la parole. On nous demande parfois si nous avons bien invité l’artiste àparler, comme si cela légitimait toute notre démarche. Notre rôle, en tant que directeur artistique, estde tout mettre œuvre afin que l’œuvre existe de la façon la plus aboutie. Ensuite, notre deuxième rôleest de faciliter les passages, les formulations, la « traduction » et de susciter l’envie chez le public.© tram 2005 9


Débat publicJean-Claude Anglade, directeur de l’école d’art de FresnesSuite à différentes remarques qui ont été faites, je voudrais témoigner des relations entre pédagogieet diffusion de l’art et des difficultés que rencontrent les structures qui en ont les missions. La difficultépour ces lieux de formation est de rendre vivant cet enseignement. Il y a quelques années uneassociation a été créée pour regrouper en France une cinquantaine d’écoles non agréées, qui font untravail sur la formation des publics avec lesquels elles <strong>son</strong>t en contact direct, à savoir entre 300 et 600élèves, allant de la toute petite enfance aux adultes. Ce travail a été beaucoup rénové durant ces dixdernières années grâce à la collaboration avec des centres d’art. Cette action est assez méconnuecar il existe encore un préjugé à l’égard des enseignements artistiques non supérieur qui ont souffertd’un certain archaïsme. Aujourd’hui, la situation s’est partiellement rénovée à l’initiative des directionsd’école. Il demeure cependant une grande question : Comment l’inspection artistique du ministère dela culture peut-elle jouer un rôle <strong>dans</strong> la dynamisation de ces enseignements ? On aurait sans doute àgagner d’une plus grande synergie entre les diffuseurs artistiques et l’enseignement. Pour prendrel’exemple de ma commune, Fresnes, nous allons passer sous tutelle de la communautéd’agglomérations et nous attendons beaucoup de ces nouvelles tutelles pour développer notre action<strong>dans</strong> le val de Bièvre. Un nouveau lieu va être construit pour pouvoir travailler.Caroline Coll-SerorEffectivement si l’on compare les actions <strong>dans</strong> le domaine des arts plastiques et les actions <strong>dans</strong> ledomaine de la musique ou de la <strong>dans</strong>e, on observe qu’il reste une belle marge de manœuvre. Ce quis’est fait <strong>dans</strong> les directions musique et <strong>dans</strong>e du Ministère de la Culture ne s’est absolument pas fait<strong>dans</strong> le domaine des arts plastiques. Cela rejoint aussi le problème du statut des artistes plasticienspar rapport à celui des intermittents du spectacle. Le secteur de l’art contemporain a accumulébeaucoup de retard <strong>dans</strong> sa structuration sur le plan juridique, sur le plan des enseignements, sur leplan salarial et de la reconnaissance des professions. Un énorme chantier demeure en dépit du travailaccompli de manière militante par un certain nombre d’acteurs de terrain.Christian Pallatier, directeur de Connaissance de l’art contemporain.Cela fait maintenant quatorze ans que nous sommes sur le terrain et nous constatons à quel point ilest difficile de relayer les informations. D’où la nécessité d’avoir des historiens d’art, des intervenantsqui ont la capacité de faire de la médiation pour l’art contemporain et en même temps d’avoir cettecarte VRP, c’est à dire de représenter les lieux. Il est extrêmement difficile de fabriquer des outilsculturels qui permettent de relayer l’information sur un territoire géographiquement très divers.Aujourd’hui nous sommes en charge de diffuser ces actions régulièrement sur le terrain. Il faut faire ensorte que le public vienne. Il faut arriver à croiser ces publics pour les amener aussi bien <strong>dans</strong> lesscènes nationales, les écoles d’art, les lieux de pratiques artistiques que <strong>dans</strong> les lieux de diffusion.Nous constatons qu’il est extrêmement difficile d’arriver à croiser ces publics et à en trouver desnouveaux. Les analyses <strong>son</strong>t claires : un audit fait par le conseil général de Seine et Marne sur les dixannées de conférences montre qu’à 85% nous sommes <strong>dans</strong> une population qui à bac +2, 3, 4, 5. Ilfaut être réaliste sur les per<strong>son</strong>nes que nous touchons : ce <strong>son</strong>t l’éducation nationale, le réseau desbibliothèques, le réseau de lecture publique. L’enjeu est d’engager de nouveaux travaux avec d’autrespublics, ce qui s’avère extrêmement long et compliqué.Claire le RestifNous avons collaboré avec Christian Pallatier, à la Ferme du Buis<strong>son</strong> il y a plusieurs années. Surl’ensemble des per<strong>son</strong>nes qui venaient entendre les conférences sur l’art contemporain, 95% d’entreelles ne venaient pas visiter le centre d’art alors que nous faisions tous les efforts possibles pourgarder le centre d’art ouvert jusqu’à 20h30. A l’époque, cela me choquait beaucoup. Aujourd’hui, celane me choque plus du tout qu’une per<strong>son</strong>ne puisse aller entendre une conférence sur MarcelDuchamp et ne pas être intéressée par le jeune artiste qui présente une pièce au centre d’artcontemporain. Je me suis beaucoup assouplie de ce point de vue et ce n’est en aucun cas de larésignation.Lionel BalouinJ’aimerais réagir par rapport aux missions et fonctions des écoles municipales d’art dont je suis l’undes représentants au sein du réseau tram. Dans la relation difficile des publics à l’art, l’éducationartistique à l’école en France est une question qui me semble très importante. Actuellement lesenfants suivent des cours d’arts plastiques jusqu’à la fin du collège ; ensuite, l’enseignement est© tram 2005 10


optionnel voire inexistant ! Or, l’adolescence est un moment où la per<strong>son</strong>nalité se forge. Cela pose laquestion du relais de la place de la culture <strong>dans</strong> notre société. Per<strong>son</strong>nellement, je me définis toujourscomme le petit boutiquier qui propose de la culture six jours sur sept à ceux qui n’y ont pas toujoursaccès.Claire Legrand, responsable du service des publics au Frac Bourgogne et présidente del’association Un moment voulu.Il me semble que nous ne nous po<strong>son</strong>s jamais cette question -volontairement provocante- : « Est-ceque c’est important qu’il y ait beaucoup de monde qui s’intéresse à ce que nous fai<strong>son</strong>s ? »Je crois sincèrement que l’art est susceptible de s’inscrire <strong>dans</strong> la vie de tout un chacun. Toutefois, enprenant les choses à priori par le plus grand nombre, est-ce qu’on ne se pose pas la mauvaisequestion ? Est-ce que nous ne nous fermons pas des portes sur le comment on va s’adresser au1+1+1… ? Dans les faits, c’est ce que nous fai<strong>son</strong>s. Ne pouvons nous pas nous dire que tous ceslieux <strong>son</strong>t aussi des lieux de recherche ? Je ne me sens pas capable de débarquer un jour <strong>dans</strong> unlaboratoire du CNRS et de savoir ce qui s’y passe. Je pense que <strong>dans</strong> la plupart des centres d’art, onest simplement en train d’ouvrir les portes à quelque chose d’un peu bizarre, dérangeant, déstabilisanttrès plaisant aussi. Et tout d’un coup, on s’étonne que le public ne s’intéresse pas à ce truc là ?! C’estincroyable ! Ne pouvons nous pas aussi argumenter et défendre des expositions en expliquant que leslieux <strong>son</strong>t complémentaires : il y a le centre Georges Pompidou et il y a aussi des lieux qui ne peuventpas fonctionner sur ce même registre, sur le grand nombre, sur le spectaculaire. Cela permettrait dese dégager de la pression qui repose la question du financement public. Nous sommes assaillisd’évaluations à tous les niveaux. N’est ce pas le moment de préciser ce que l’on propose sincèrementde faire, à qui on s’adresse, pour qui on travaille, etc. D’abord pour les artistes comme le soulignaitClaire mais pas seulement car il y a aussi des gens qui s’intéressent à explorer ces laboratoires.Claire le RestifEffectivement, chacun s’autorise souvent à donner <strong>son</strong> point de vue sur des champsd’expérimentations ou des champs de connaissance qui ne <strong>son</strong>t pas les leurs. Sur la question de l’art,il ne faut pas sombrer <strong>dans</strong> la prétention du discours et dire « C’est notre champ d’expérimentation etnous en sommes les gardiens du temple ». Au contraire, nous fai<strong>son</strong>s toujours preuve de notre désirde partage et nous nous interrogeons toujours sur le fait que les autres ne soient pas intéressésNéanmoins, il faut maintenir le dialogue en sachant bien exposer et communiquer autour de ce que<strong>son</strong>t nos activités.Caroline Coll-SerorSur le territoire sur lequel je me trouve, il est impossible de fonctionner sur le mode du laboratoire.Nous fonctionnons forcément comme laboratoire sur le plan artistique car c’est une discipline qui esttrès contemporaine, expérimentale et en devenir permanent. Pour ce qui est d’exister sur un territoire,nous n’existons qu’à partir d’une masse critique d’activités et du nombre de per<strong>son</strong>nes touchées. Jecrois beaucoup au fait que compte tenu de ce que <strong>son</strong>t nos structures et nos compétences, on doitavoir un positionnement stratégique en travaillant énormément la question des relais : se faire relayerpar des éducateurs, des correspondants au niveau académique ou au niveau rectoral sur l’éducationnationale, etc.…Claire LegrandL’objectif de cette table ronde était de mettre en lumière le fait que les projets artistiques et lesobjectifs ne <strong>son</strong>t pas les mêmes en fonction des lieux. Peut-être est-il temps de dire que toutes lesstructures n’ont pas les mêmes fonctions, les mêmes rôles et ne peuvent pas s’adresser à leur publicde la même façon. Il existe une infinité de propositions et de missions en relation avec des territoiresqui <strong>son</strong>t pris en compte à des niveaux divers.Jérôme Glicenstein, Université de Paris VIIIJe suis très content qu’il y ait cette table ronde, laquelle n’aurait pu avoir lieu il y a vingt ans. En effet,il y a eu une prise de conscience de l’importance de la médiation, ce qui est une bonne chose.Lorsqu’à été créé le ministère de la culture il y a 45 ans, on avait l’impression que les œuvres d’art sedonnaient d’elles mêmes. Malraux mettait en avant le fait qu’il n’avait pas reçu d’éducation lui même,et que tout un chacun pouvait avoir accès à toutes les œuvres. C’est en réalité impossible, des outilsde compréhension <strong>son</strong>t indispensables. La difficulté est d’acquérir une bonne image vis à vis du publicet des élus. Le problème n’est pas tellement la quantité du public mais davantage la visibilité : desavoir que le lieu existe, qu’il est ouvert potentiellement, que les choses ne <strong>son</strong>t pas imposées maisproposées, que chacun est libre de s’y rendre ou pas, etc. Faire en sorte que le lieu ait une bonneimage. Tout le monde ne se rend pas au CNRS, pourtant ce dernier a une bonne image. L’enjeu est© tram 2005 11


de ne pas imposer aux gens « d’avoir de l’art contemporain à tous les repas » mais de faire en sortequ’ils puissent obtenir des informations s’ils le souhaitent. La mauvaise image de l’art contemporainaujourd’hui, c’est l’hermétisme : des lieux où l’on est mal accueilli, où il n’y a pas de médiation, etc.…Nous devons combattre cette idée que les œuvres d’art se donnent d’elles-mêmes à tous les publics,que tous les artistes peuvent parler de leur travail. Il faut parvenir à faire en sorte que même les gensqui ne vont pas <strong>dans</strong> les centres d’art se disent : « je peux y aller, je ne méprise pas ce lieu, je saisqu’il y a quelque chose qui s’y passe et même si ça ne me concerne pas je n’ai rien contre ».Claire le RestifNotre leitmotiv au crédac est : « Toujours communiquer et parfois transmettre »Bernard Mathonnat, directeur des affaires culturellesNous avons le projet d’ouvrir un centre d’art contemporain à Gonesse. Suite à cette table ronde, j’aicompris qu’il existe un complexe des arts plastiques par rapport au reste de l’action culturelle. En tantque meneur de projets artistiques, de « passeur », j’ai conscience que l’art contemporain peut êtreinstrumentalisé : c’est un acte poétique qui ne doit pas s’expliquer, un lieu de recherchefondamentale, un objet politique, un objet social pour certains artistes, un instrument pédagogiquepour certains enseignants, etc. Cela n’est pas contradictoire. Nous pouvons mener des actionsparallèles, qui parfois vont se rencontrer et d’autres fois non. J’ai appris que ce que je croyais parfoisêtre très proche des gens était très loin, et inversement ce que je croyais être très loin était trèsproche. Dans mes quartiers je mène beaucoup d’actions avec l’éducation nationale. Cela ne signifiepas pour autant que les enfants vont venir voir l’œuvre contemporaine exposée. Peut-être un jourviendront-ils et ce n’est pas parce qu’ils ne viennent pas que je dois arrêter de monter des projets. Ona tout à faire pour faire avancer le problème en ne s’interdisant rien, ni la provocation ni la pédagogie,ni la récupération politique.Danièle Monge, professeur à l’IUFM de Créteil en arts plastiques.J’aimerais vous faire part d’une question et d’une observation. Il m’a semblé comprendre <strong>dans</strong> vosdivers positionnements, que certains d’entre vous prenaient plutôt l’entrée, pour ce qui est de larencontre avec le public, d’une pratique, et que d’autres plutôt l’entrée, sans dimension péjorative, deconsommateur. J’aurais aimé que vous précisiez la façon dont vous voyez ce rapport.Pierre Bal-BlancLa consommation n’est pas forcément péjorative. Consommer c’est expérimenter une situation,échanger quelque chose. Ceci dit, il ne faut pas tomber <strong>dans</strong> des systèmes où l’on se préoccupeuniquement de faire de la quantité. On travaille sur la qualité parce que on a des approches qui <strong>son</strong>tchaque fois renouvelées. Ce qui nous intéresse c’est d’arriver à proposer des expériences qui vontexpérimenter à chaque fois quelque chose de nouveau. Cela me semble être un souci que tout lemonde partage <strong>dans</strong> nos lieux.Claire le RestifConcernant le crédac, nous propo<strong>son</strong>s des pratiques artistiques. Soit c’est l’équipe du crédac qui meten place cette pratique, soit l’équipe du crédac choisit des relais et en priorité les artistes eux-mêmes,pour mettre en place cette pratique. Elle est parfois technique, plastique, mais aussi de l’ordre de laprésentation et du discours.Maëlle Dault, responsable du service des publics au Plateau- Frac Ile-de-France.Je voudrais répondre à la question de Danièle Monge concernant la pratique qu’on a nomméconsommation. Je pense que parler de fréquentation des œuvres est plus adéquate. On pourrait tousindividuellement se demander si notre rapport à l’art a été défini par une pratique ou par unefréquentation des œuvres et des expositions. Les plus grands mélomanes, pour trouver desmétaphores <strong>dans</strong> d’autres champs, <strong>son</strong>t-ils forcément musiciens ? Cette question de la pratiqueamateur est assez délicate. Il me semble par ailleurs que la fréquentation des œuvres, c’est à direapprendre à les regarder, à les questionner permet de sortir d’une attitude de consommation.Danièle MongeIl me semble qu’il y a des entrées de la rencontre avec l’œuvre qui <strong>son</strong>t pour certains d’entre voustravaillées, plutôt du coté d’une pratique et du geste, et pour d’autres plutôt travaillées du coté de latrace c’est à dire de l’être-la de l’œuvre.© tram 2005 12


Caroline BourgeoisNous ne sommes pas éducateurs, nous ne sommes pas là pour faire des cours. Notre rôle estl’accompagnement de l’art. Il y a donc toujours les deux positions : ce n’est pas le faire ou simplementdes mots qui va expliquer une œuvre. Ca dépasse, heureusement, ces 2 paramètres.Caroline Coll-SerorNous avons les deux entrées. Il y avait au départ une demande en termes de pratique artistiqueamateur qu’on essaie de faire évoluer pour qu’il puisse y avoir passage des ateliers de pratique à unintérêt pour la programmation. C’est long et difficile. Nous sommes aussi beaucoup <strong>dans</strong> latransmission par la parole, par la rencontre et l’échange autour des œuvres. Il arrive d’ailleurs que desartistes soient de très bons médiateurs de leur propre travail. Je voulais aussi préciser quelque chosepar rapport à l’intervention de Bernard Mathonnat. Notre débat est celui entre l’art et la culture. Si il y aune conquête à retenir sur ces 30 dernières années, c’est que la vision d’André Malraux a vécu. Toutle monde est persuadé que le simple fait d’être en présence d’une œuvre d’art ne fait pas la culture.Parfois <strong>dans</strong> le domaine de l’art contemporain, les œuvres <strong>son</strong>t comme des miroirs sans teint : ontrouve <strong>dans</strong> l’œuvre ce qu’on est en capacité d’y chercher par rapport à <strong>son</strong> histoire et à <strong>son</strong> parcoursper<strong>son</strong>nel. J’ai envie de montrer de l’art ce qui à mon sens est profondément anti-pédagogique, et parailleurs j’ai envie, c’est mon métier, de faire de la culture, c’est à dire d’utiliser l’œuvre d’art commesupport pour créer du lien. Je suis peut-être décalée mais je ne renonce pas du tout à ces ambitions.© tram 2005 13


Echelles de temps et de territoire <strong>dans</strong> la construction du partenariatJean-Marie BaldnerProfesseur-relais (Délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle de l’académiede Créteil) au Centre photographique d’Île-de-France et au Pôle national ressources Imagephotographie/ Professeur d’histoire à l’IUFM de CréteilCette courte intervention n’est conçue que comme une transition entre les interventions de la matinéeautour du projet artistique au cœur d’une politique de sensibilisation et de formation des publics etcelles de l’après-midi sur les actions des services des publics inscrites <strong>dans</strong> des territoires deproximité. Je n’évoquerai que quelques exemples liés au projet artistique et à la programmation duCentre Photographique d’Île-de-France 1 , aux projet et actions du Pôle National Ressource Image-Photographie 2 et de la Délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle del’académie de Créteil (DAAC de Créteil 3 ) pour essayer d’esquisser rapidement diverses géographieset temporalités des partenariats <strong>dans</strong> une politique de sensibilisation et de formation des publics sur lelong terme.Une précision s’impose en introduction. Professeur relais, détaché de l’éducation nationale par laDAAC de Créteil pour un nombre d’heures défini auprès du CPIF et du PNR Image-Photographie(trois heures hebdomadaires exercées en sus d’un service complet à l’IUFM de Créteil assurécomplémentairement en histoire, géographie, éducation civique, photographie et informatique), je nesuis ni « spécialiste » de la photographie, ni « spécialiste » de l’art contemporain. Toutes lesinterventions auprès du public, tous les projets artistiques et culturels évoqués ici, <strong>son</strong>t toujoursexercés <strong>dans</strong> le cadre d’un travail coopératif et partenarial, tant avec l’équipe du CPIF et du PNR(ainsi que celle de la Mission à l’art et à la culture), qu’avec les divers instances de l’éducationnationale (DAAC, IUFM, CRDP, réseau des conseillers pédagogiques) et le réseau des diverspartenaires 4 . Ainsi, tout en assumant complètement mes propos, je parlerai aussi au nom de plusieurscollectifs en accord avec Hélène Ratero responsable du service des publics du CPIF.Le rôle d’un professeur relais est d’aider à la mise en place de liens durables, par l’intermédiaire deprojets, de conventions, de jumelages, d’action de sensibilisation et de formation, entre le centre d’artet le public scolaire. J’entends par public scolaire autant les élèves et les étudiants de la maternelle àl’université que les enseignants, les conseillers et formateurs, les corps d’inspection. Pour rendre lepropos à la fois concret et bref, je ne retiendrai que cinq entrées : la visite d’exposition, le dossierpédagogique, l’intervention des artistes <strong>dans</strong> le monde scolaire, la formation initiale des enseignants,les stages de formation continuée des enseignants, les stages, formations et interventions quis’adressent à un public mixte montrant le fonctionnement des réseaux partenariaux selon desgéographies et des temporalités diverses.1 www.cpif.net.2 www.crdp.ac-creteil.fr/CRDP/artsculture/photo.html.3 www.ac-creteil/acl.4 Le réseau des partenaires constitué, lors de ma nomination comme professeur relais, avec la professeure relaisdu Centre Pompidou Myriam Gasparini autour des musées et centres d’art qui exposaient la photographiecontemporaine, comprend aujourd’hui comme noyau dur le CPIF, Le Plateau, le CREDAC, la Ferme duBuis<strong>son</strong>, la Mai<strong>son</strong> Européenne de la Photographie, le Centre Georges Pompidou, le Jeu de paume, la Galerie deNoisy-le-Sec, le MAC/VAL Musée d’art contemporain du Val-de-Marne. Dans le cadre de la mise en place destages de formation continuée des professeurs sous le chapitre Ouverture culturelle et partenariat, a été constitué,avec la DAAC, un groupe Arts visuels qui englobe ce partenariat <strong>dans</strong> un réseau plus large comprenant entreautres le musée du Louvre, le musée Rodin, le musée des Arts premiers, le musée d’Art et d’Histoire duJudaïsme, la Mai<strong>son</strong> d’Art Contemporain Chailloux de Fresnes, le Musée des Arts et Métiers, le Muséumd’Histoire Naturelle, le CRDP, le Forum Culturel du Blanc-Mesnil, la mai<strong>son</strong> populaire Mira Phaleina àMontreuil, la Cité de la Musique, le Bar Floréal, et des professeurs, notamment d’arts plastiques ou d’artsappliqués impliqués <strong>dans</strong> la formation de l’académie de Créteil. Ce groupe Arts visuels se réunit plusieurs foispar an pour élaborer avec le Rectorat et l’IUFM de Créteil une politique de formation continuée des enseignantsdu second degré.© tram 2005 14


La visite d’expositionComme <strong>dans</strong> tout centre d’art, les expositions au CPIF <strong>son</strong>t un des moments privilégiés de larencontre du public avec les œuvres et les artistes ainsi que de focalisation du développement desprojets. La visite d’exposition s’inscrit le plus souvent <strong>dans</strong> des territoires et des accompagnementsdéterminés (jumelage avec des établissements scolaires, travail avec des circonscriptionsélémentaires de l’éducation nationale, des conseillers pédagogiques attachés à une zoned’intervention, etc.) ainsi que <strong>dans</strong> des temporalités propres (projets inter-établissement 5 , classes àPAC, projets culturels, etc.) annuelles ou pluri-annuelles.La visite d’exposition, accompagnée du dossier pédagogique, est aussi souvent le point de départ departenariats avec différentes instances de l’éducation nationale à la géographie et aux temporalitésmoins définies.En ce moment deux expositions <strong>son</strong>t accrochées au CPIF : l’exposition de photographies de PatrickPardini, Arborescence : physionomie du végétal et expérience du paysage en Amazonie et unesélection d’œuvres de la collection du Fonds national d’art contemporain (œuvres de Brigitte Bauer,Boris Becker, Jean-Marc Bustamante, Yannick Demerle, Peter Hutchin<strong>son</strong>, Éric Poitevin, YoshikoSeino) intitulée Nature cultivée. Les recherches des artistes sur la représentation du paysage et de lanature cultivée, sur la photographie comme indice, comme trace d’œuvres ou d’interventions qui sedéfinissent avant tout comme action, sur la photographie qui fait « œuvre autour d’une œuvre » 6ouvrent littéralement quelques portes <strong>dans</strong> les programmes scolaires. Au niveau le plus immédiat, lesprogrammes de l’école élémentaire par exemple (français 7 , histoire et géographie 8 , arts visuels 9 )proposent des listes d’œuvres qu’il est loisible à tout enseignant de mettre en relation avecl’exposition 10 . La mise en évidence de ce type de liens est un moyen efficace de fidélisation despublics enseignants qui trouvent ainsi matière à donner une place à l’exposition, à l’œuvre, mais aussià la pratique 11 , <strong>dans</strong> le quotidien de leur enseignement.Depuis quelques années, les programmes ne manquent pas d’insister sur la place de l’image àl’école, à la fois document, <strong>dans</strong> le manuel par exemple, et archive d’intervention, d’action,d’événement. La notion de collection, les aspects formels n’en <strong>son</strong>t pas absents. Pour me limiter àl’exemple précédent, la rencontre du public scolaire avec l’œuvre de Patrick Pardini ouvre surl’expérience du paysage (un des points forts de la démarche géographique à l’école) et lareprésentation de l’arbre comme sujet qui permet, entre autres, <strong>dans</strong> différentes disciplines scolaires,de poser le problème de l’opposition, réelle ou rêvée, entre l’appareil perspectif de la peinture, dont lacondition du rapport à la réalité serait la position spatiale des objets, et celui de la photographie, dontle rapport à la réalité serait celui de la césure <strong>dans</strong> le temps, de la découpe d’un instant <strong>dans</strong> uncontinuum temporel, que ce moment soit unique ou cristallisation d’un ensemble de temporalitéshétérogènes 12 . La rencontre avec les œuvres de Peter Huchin<strong>son</strong> ou de Boris Becker instruit sur latransformation, la construction, le montage qui auscultent notre regard du paysage que lesprogrammes de géographie invitent à déconstruire et à reconstruire.5 Par exemple, le projet inter-établissement 2005-2006 autour de la photographie contemporaine, intitulé« Réalité, temporalité, théâtralité » qui regroupe une dizaine de collèges et lycées de l’académie de Créteilauxquelles se <strong>son</strong>t joints deux classes élémentaires et un groupe de professeurs stagiaires de l’IUFM de Créteil,<strong>dans</strong> lesquels interviennent autant d’artistes, est organisé en partenariat entre la DAAC de Créteil, la MEP et leCPIF. La visite d’exposition et l’intervention des chargés des publics de la MEP et du CPIF constituent une desprincipales articulations du projet, pour lequel il est prévu la mise en place d’un espace de travail collaboratif surla toile.6 Robert Delpire, Michel Frizot, Histoire de voir. De l’instant à l’imaginaire (1930-1970), Paris, Nathan Photopoche n° 42, 2001, p. 138.7 Lire et écrire au cycle 3, Documents d’application des programmes, Paris Scérén – CNDP, 2002.8 Histoire et géographie Cycle 3, Documents d’application des programmes, Paris Scérén – CNDP, 2002.9 La sensibilité, l’imagination, la création (école maternelle) Éducation artistique (école élémentaire),Documents d’application des programmes, Paris Scérén – CNDP, 2002.10 Il y a peu d’œuvres de photographes citées en tant que telles <strong>dans</strong> les programmes, mais ceux-ci induisent uneouverture large vers l’art contemporain. Seules les œuvres de six photographes <strong>son</strong>t proposées <strong>dans</strong> lesDocuments d’application des programmes d’arts visuels : Nadar, André Kertész, Henri Cartier-Bres<strong>son</strong>, ManRay, Robert Capa, William Wegman ainsi qu’une œuvre de Robert Smith<strong>son</strong> pour « illustrer » le Land Art.11 Jean-Marie Baldner, Thomas Baldner, Yannick Vigouroux, « La liberté et le plaisir du flou », in « Les imagesnumériques », Les dossiers de l’ingénierie éducative, Scérén – CNDP, n° 47-48, juin-octobre 2004, p. 6-9.12 L’exposition qui suit au CPIF met en évidence ces différents problèmes. Foto Povera 3, du sténopé autéléphone mobile, 4 janvier – 26 février 2006. Á ce sujet, voir entre autres Jean-Marie Baldner, « Le tempshésitant », in Foto Povera, carte blanche à Remi Guerrin, catalogue de l’exposition à la Mai<strong>son</strong> de l’Art et de laCommunication de Sallaumines, février-mars 2005.© tram 2005 15


Parallèlement, des ouvrages d’artistes 13 destinés à la jeunesse, des albums 14 figurant <strong>dans</strong> les listesde littérature de jeunesse proposées par le ministère de l’éducation jouent, à propos du paysage, surla multiplicité des décalages du regard. Utilisant plus rarement le médium photographique que ledessin et la peinture, ils traitent du paysage ou de l’arbre comme sujet, les prospectent, les fouillentsous différents plans et points de vue, les déconstruisent et les reconstruisent, les soumettent àl’expérimentation perspective 15 confrontée à la culture partagée 16 et aux jeux de l’actualisation de laréalité et de la mémoire 17 . La mise en relation de l’exposition et de la lecture d’albums en classe estainsi un possible fil conducteur de l’expérience de l’art contemporain <strong>dans</strong> l’exposition, <strong>dans</strong> larencontre avec l’artiste et, sur la durée, ou lorsque la sortie est <strong>rendu</strong>e difficile par des contraintesmatérielles ou politiques, par la navigation sur les sites de différents centres d’art. Les deux ne <strong>son</strong>tpas incompatibles et poser le problème de la reproduction de l’œuvre est un des fondamentaux del’étude de l’image en classe 18 . L’objectif est de créer une habitude, je dirais presque un réflexe, desortie, au minimum virtuelle de la classe. Pour l’élève, la visite d’exposition, ou à défaut sa découvertesur la toile, peut devenir familière, le centre d’art ne plus être un lieu exceptionnel dont l’on ne pousseles portes que par hasard ou lors d’une visite scolaire annuelle. Plusieurs actions aident à construirecette familiarisation, dont le partenariat actif est nécessairement le vecteur. J’en prendrais quelquesexemples :- La référence à l’exposition et au centre d’art est acquise très progressivement par l’inscriptionau moment de la rédaction des projets d’école ou lors de la mise en œuvre de ceux-ci : desécoles de Vitry-sur-Seine ont, en 2005-2006, pour projet l’étude de la transformation dupaysage urbain depuis un siècle, si je m’en tiens à quelques expositions du CPIF et àquelques noms, la mise en relation des travaux sur le paysage urbain et les monuments, surl’art de vivre la ville, etc. de Robin Collyer 19 , Leon Levinstein 20 , Raphaël Boccanfuso 21 , AlainBublex 22 , Valérie Jouve 23 , Beat Streuli 24 , Santu Mofokeng 25 … et d’albums de jeunesse commeceux de Georges Perec et Yvan Pommeaux 26 , de Peter Sís 27 …ouvre d’amples perspectivesque rien n’empêche de relier aux collections de cartes postales de la fin du XIXe siècle et dudébut du XXe siècle, aux aquarelles de Paul Capaul conservées aux Archivesdépartementales de Créteil, à certains tableaux impressionnistes, à quelques films 28 ou àquelques extraits d’œuvres littéraires 29 . Dans le cadre du partenariat entre le MAC/VAL13 Laëtitia Bourget, Emmanuelle Houdart, Les choses que je sais, Seuil Jeunesse, 2003. Sarah Moon, CharlesPerrault, Le Petit Chaperon rouge, Paris, Grasset Jeunesse, 1986 ; L’effraie, d’après un conte d’Andersen Lepetit soldat de plomb, Kyoto, Kyoto Museum of Comtemporary Art Foundation, 2005.14 Quelques exemples : Anne Herbauts, L’Arbre merveilleux, Casterman , 2001 ; Claude Ponti, Ma vallée,L’école des loisirs, 2003 ; Rémi Courgeon, Le Grand Arbre, Mango Jeunesse, 2002 ; Antoine Guillopé, Loupnoir, Les albums Duculot, 2004 ; Anthony Browne, Dans la forêt profonde, Kaléidoscope, 2004 ; Iela Mari,L’arbre, le loir et les oiseaux, L’école des loisirs, 2003…15 Peter Sís, Le chien de Madlenka, Paris, Grasset et Fasquelle, 2002 ; Madlenka, Paris, Grasset et Fasquelle,2002…16 Annalena McAfee, Anthony Browne, Des invités bien encombrants, Paris, Kaléidoscope, 2001 ; AnthonyBrowne, Les tableaux de Marcel, Paris, Kaléidoscope, 2000 ; Tout change, Paris, Kaléidoscope, 1990 ; Unehistoire à quatre voix, Paris, Kaléidoscope, 1998 ; Philippe Corentin, L'ogre, le loup, la petite fille et le gâteau,Paris, L'école des loisirs, 1995 ; Plouf !, L'école des loisirs, 1991…17 Peter Sís, Les trois clés d’or de Prague, Paris, Grasset et Fasquelle, 1995.18 Voir à ce sujet les interventions de Pierre-Lin Renié et Xavier Barral in Le document à l’œuvre, colloque PNRImage-photographie / CPIF / Ferme du Buis<strong>son</strong>, Noisiel, 2004, Actes à paraître, 2006.19 Robin Collyer 1973 – 2000, CPIF, 22 septembre – 3 décembre 2000.20 Leon Levinstein Obsession, CPIF, 15 décembre 2000 – 18 février 2001.21 Raphaël Boccanfuso Exposition / Intervention, CPIF – SAN de Sénart – Pontcarré, février – mars 2003.22 Alain Bublex in Home sweet home, CPIF, 17 janvier – 9 mars 2003.23 Valérie Jouve in Home sweet home, op. cit.24 Beat Streuli Marseille 1998, CPIF.25 Santu Mofokeng Rethinking Landscape, CPIF, 16 janvier – 21 mars 2004.26 Georges Perec et Yvan Pommeaux, Je me souviens, Éditions du Sorbier, 1978-1997.27 Peter Sís, Madlenka, op. cit. ; Les trois clés d’or de Prague, op. cit.28 Par exemple, même si ces films concernent plutôt les communes limitrophes : État de lieux de Jean-FrançoisRichet ; Série Noire d'Alain Cornault ; Mon Oncle de Jacques Tati, etc.29 Par exemple, même si ces œuvres concernent plutôt les communes limitrophes : Céline, Voyage au bout de lanuit, Paris Gallimard Folio, 1972 ; Georges Duhamel, Vue de la Terre Promise, Paris, Mercure de France, 1934 ;Jean Echenoz, Lac, Les éditions de Minuit, 1989 ; René Fallet, Banlieue Sud-Est, Paris, Gallimard Folio, 1974 ;© tram 2005 16


Musée d’art contemporain du Val-de-Marne, certains de ces artistes ont aussi pu être exposésà la bibliothèque de l’IUFM ou présentés aux professeurs-stagiaires de l’IUFM <strong>dans</strong> leurslocaux, c’est le cas par exemple des commandes publiques passées à Alain Bublex et àValérie Jouve par le Conseil général du Val-de-Marne ; <strong>dans</strong> la cadre du partenariat entrel’IUFM et le CPIF, des artistes, intervenants <strong>dans</strong> les classes ou <strong>dans</strong> les ateliers du centred’art peuvent être exposés à l’IUFM, comme Guillaume Pallat 30 .- Pour rester <strong>dans</strong> les mêmes thématiques, les animations de circonscriptions <strong>dans</strong> le premierdegré autour de l’étude du paysage local, de la littérature de jeunesse offrent d’autres pistesfructueuses <strong>dans</strong> le long terme. Un simple exemple en littérature de jeunesse lié à uneexposition. Au quatrième trimestre 2001, le CPIF a consacré une exposition à Mac Adamsintitulée One Hundred Eyes 31 , accompagnée d’un catalogue, portant le titre de l’exposition etd’un coffret intitulé Crimes of perception 32 . Les musées de Châteauroux ont proposé en 2004une exposition de Mac Adams sous le titre Beyond a Shadow of doubt 33 . Comme un des titresl’indique fort bien, l’œuvre de Mac Adams traite entre autres des crimes de perception, de laréalité et de la fiction, et, notamment par l’accrochage de diptyques et de triptyques, de lafaçon dont l’image, par ses indices, ses codes, etc. invite le spectateur à construire uneintrigue qui, à tout moment, peut être remise en cause, par les éléments mêmes de l’image.La visite de l’exposition, la confrontation des diptyques du coffret et d’albums de jeunesse telsque ceux d’Yvan Pommeaux 34 qui jouent sur la citation croisée de contes et de films noirscomme ceux de John Huston ou Howard Hawks lors d’ateliers d’écriture, réfère l’œuvre del’artiste aux rapports mimétiques des temps du récit 35 .- Les stages de formation continue, notamment ceux autour de l’image ou de la maîtrise de lalangue offrent des entrées similaires. Je n’en retiendrai là encore que quelques exemples. Lepremier enchaîne la découverte de l’œuvre de Mac Adams et celle des différents artistes, dontcertains déjà cités, qui travaillent sur le paysage à la lecture des différentes versions du « Petitchaperon rouge » 36 selon Charles Perrault et les frères Grimm. Il s’agit de montrer,notamment aux élèves, que l’illustration des albums de jeunesse n’est pas qu’illustration,qu’elle est œuvre à part entière <strong>dans</strong> sa relation au texte et que sa mise en forme peutdépendre d’appareils 37 différents comme le livre ou l’exposition, comme le montrent lesouvrage de Sarah Moon 38 . Le deuxième exemple vise à réfléchir sur le rapport du texte et del’image <strong>dans</strong> le paysage urbain en s’appuyant sur la rencontre de l’œuvre de Robin Collyer 39avec celle d’Eugène Atget et sa visite contemporaine par Jürgen Nefzger 40 , accompagnées dela lecture d’Arthur Rimbaud 41 .Ces quelques exemples, dont il ne faut évidemment pas exagérer l’importance <strong>dans</strong> le quotidien del’institution scolaire, appellent bien sûr à la modestie, mais tendent à montrer que l’action desensibilisation et de formation des publics se pérennise par des micro-interventions, souventJacques Réda, Hors les murs, Paris, Gallimard, 1982, etc. ou quelques bandes dessinées : Jean Teulé, « Banlieuesud » in Copy-Rêves, Paris, Glénat ; Violeff, Faux contact, Casterman, etc.30 Guillaume Pallat, exposition à l’IUFM, janvier – février 2006 en lien avec l’exposition Foto Povera, janvier –février 2006 au CPIF : photographies de Stéphane Brochier, Sandrine Calvet, Daniel Challe, Didier Cholonicki,Bruno Debon, Marc Donnadieu, Patrick Galais, Emma Géraud, Remi Guerrin, Claire Lesteven, ConstanceLewis, Patricia Martin, Felten-Massinger, Christophe Mauberret, Juliette Méliah, Corinne Mercadier, CatherineMerdy, Oscar Molina, Io Paschou, Olivier Péridy, Caroll’Planque, Bernard Plossu, Valérie Sarrouy, MarcTrivier, Yannicl Vigouroux, Nancy Wil<strong>son</strong>-Pajic.31 Mac Adams One Hundred Eyes, CPIF, 21 septembre 2001 – 6 janvier 2002.32 Mac Adams Crimes of perception, CPIF Éditions du Regard, 2001.33 Mac Adams, Beyond a Shadow of doubt, Châteauroux – Nantes, Musées de Châteauroux Editions Joca Seria,2004.34 Yvan Pommeaux, John Chatterton détective, L’école des loisirs, 1998 ; Le grand sommeil, L’école des loisirs,1998, etc.35 Paul Ricœur, Temps et récit, Paris, Points Seuil, 1991.36 Perrault et Sarah Moon, Le Petit Chaperon Rouge, Grasset, 2002 ; Grimm, Lisbeth Zwerger, Le PetitChaperon Rouge, Éditions Nord-Sud, 2003 ; Grimm, Suzanne Janssen, Le petit Chaperon Rouge, Seuil Jeunesse,2001 ; Rascal, Le petit chaperon rouge, Pastel, 2003, etc.37 Jean-Louis Déotte, L’époque des appareils, Paris, MSH Paris Nord – Éditions Lignes & Manifestes, 2004.38 Perrault et Sarah Moon, Le Petit Chaperon Rouge, Grasset, 2002 ; L’effraie, op.cit.39 Robin Collyer Photographs, Toronto, Art Gallery of York University, 1999.40 Itinéraires Parisiens, Musée Carnavalet, Paris, 1999.41 Arthur Rimbaud, « Paris », in Album zutique, Paris, Gallimard La Pléiade, 1963, p. 114-115.© tram 2005 17


ponctuelles, <strong>dans</strong> des temps et des espaces très divers, qui prennent en compte à leur justeproportion les inscriptions <strong>dans</strong> les programmes et la vie de la classe comme <strong>dans</strong> la formation desenseignants.Le dossier pédagogiqueChaque exposition au CPIF donne lieu à la rédaction en équipe d’un dossier pédagogique diffusésous forme papier et sur le site du CPIF ainsi que des pages spécifiques destinées aux professeursstagiaires sur le site de l’IUFM 42 , auxquelles s’ajoute cette année l’expérience d’un espace collaboratifde travail partagé sur la toile 43 entre les professeurs stagiaires et les artistes intervenants 44 . Le dossierpédagogique prépare et accompagne la visite, il est un outil de la médiation, mais en même temps,objet de médiatisation, il introduit une modalité communicationnelle en concurrence et encomplémentarité avec la visite, oralité, « médiation vécue <strong>dans</strong> l’immanence d’un rapportinterper<strong>son</strong>nel » 45 entre le public et la per<strong>son</strong>ne chargée du service des publics. Le dossierpédagogique, médiatisé par le papier ou le numérique, prépare et prolonge la médiation, mais eninsérant une coupure 46 , un écart avec la coïncidence médiatique entre l’émetteur, le message et ledestinataire, en mettant à distance l’unité de lieu propre à l’exposition, il participe à la prise de reculpar rapport à la médiation 47 et à la pérennisation d’un rapport singulier propre à l’autonomisationprogressive du spectateur. Si sa lecture ne s’accompagne pas de la visite de l’exposition, si elle estcomplètement autonome, par exemple après l’exposition, elle crée une objectivation et uneréflexivité 48 qui peut se développer sans la rencontre de l’œuvre ; le dossier pédagogique devient« une instance mémorielle d’objectivation réflexive » 49 entre le centre d’art et <strong>son</strong> public scolaire, d’oùl’hésitation fréquente <strong>dans</strong> sa réalisation entre la forme dialoguée et le ton imper<strong>son</strong>nel : le dossierest-il recherche d’une relation ou simple document, voire archive d’exposition passée ? Se pose alorsle problème singulier déjà évoqué de la reproduction et de la diffusion de l’œuvre, de sa connaissanceindirecte, déformée, décontextualisée et d’une certaine façon dématérialisée 50 .Une réponse sans nuance n’est bien sûr pas évidente, mais par la pérennisation de l’événementexposition au travers de l’archive, le dossier fait du centre d’art un référent pérenne <strong>dans</strong> le cadredocumentaire et artistique, dès lors que sa présence reste visible au public, et notamment <strong>dans</strong> lescas où il s’accompagne d’un document complémentaire expliquant comment il peut être une sourcede recherche pour les élèves. Je ne retiendrai que l’exemple du mini-catalogue/dossier pédagogiquede l’exposition L’invention du monde à la Galerie des enfants du Centre Georges Pompidouaccompagné d’un document 51 sur tous les jeux d’images réalisés par les cartographes 52 . Ce qui esten jeu <strong>dans</strong> la familiarisation et la fidélisation du public, c’est ici la visibilité fonctionnelle extérieure ducentre d’art comme référent.L’intervention des artistes <strong>dans</strong> le monde scolaireJe passerai très rapidement sur ce point parce que cette journée propose nombre d’exemples et je neconsidérerai ce paragraphe que comme une transition entre les interventions de la matinée et cellesde l’après-midi. Je m’attarderai juste, à titre là encore d’exemple, sur trois synergies qui me semblentintéressantes tant <strong>dans</strong> la mise en place de partenariats à diverses échelles de temps et d’espacesque <strong>dans</strong> l’inscription durable du projet <strong>dans</strong> le monde scolaire. Je partirai de la formation initiale desenseignants et de <strong>son</strong> articulation avec les projets de classe qui me paraissent un point d’entréeimportant avant de revenir plus spécifiquement <strong>dans</strong> une autre partie sur la formation desenseignants.La première, née de l’intervention d’Ilan Wolff <strong>dans</strong> une classe de l’école Picasso de Pontault-Combault et qui a donné lieu à un film réalisé par Laurence Hartenstein, Révélator, s’est rassemblée42 http://cd94-upbc.creteil.iufm.fr.43 http://bscw.creteil.iufm.fr.44 Laëtitia Bourget, Blanca Casas-Brullet, Pascal Lièvre, Jürgen Nefzger, Guillaume Pallat.45 Pierre Mœglin, Outils et médias éducatifs. Une approche communicationnelle, Grenoble, PUG, 2005, p. 82.46 Michel de Certeau, L’invention du quotidien 1. Arts de faire, Paris, Gallimard Folio Essais, 1990, p. 292.47 Pierre Mœglin, Outils et médias éducatifs. op. cit., p. 20.48Monique Linard, Des machines et des hommes. Apprendre avec les nouvelles technologies, Paris,L’Harmattan, 1996.49 Pierre Mœglin, Outils et médias éducatifs. op. cit., p. 91.50 Cf. Pierre-Lin Renié, Xavier Barral, op. cit. ; Jean-Marie Baldner, « Un anachronisme-pratique », in « Lesvoies traversières de Nicole Loraux. Une helléniste à la croisée des sciences sociales », EspacesTemps, n° 87/88,2005, pp. 147-155.51 http://cd94-upbc.creteil.iufm.fr52 Voir par exemple le site de Mappemonde : http://mappemonde.mgm.fr/© tram 2005 18


autour des pratiques pauvres <strong>dans</strong> la photographie contemporaine, du sténopé au téléphone mobileen passant par les journaux intimes numériques sur Internet 53 , entre :- un livre programmé et dirigé par le PNR Image-Photographie et co-édité par le CRDP deCréteil et un éditeur privé 54 dont la sortie est accompagnée d’un événement culturel à laMai<strong>son</strong> européenne de la Photographie et au Centre Photographique d’Île-de-France le 11janvier 2006 ;- une intervention <strong>dans</strong> le séminaire iconique de Serge Tisseron à l’INA ;- une exposition évolutive 55 , Foto Povera, déclinée à la Mai<strong>son</strong> de l’art et de la communicationde Sallaumines février - mars 2005, à la Mai<strong>son</strong> de l’Étudiant au Havre en novembre -décembre 2005 et au CPIF à Pontault-Combault en janvier-février 2006;- une pratique diversifiée <strong>dans</strong> la formation des enseignants et <strong>dans</strong> les classes avecl’intervention d’artistes comme Guillaume Pallat, Rémi Guerrin, Ilan Wolff ;- un projet inter-établissement sur la photographie « Réalité, théâtralité, temporalité » – déjàévoqué – ;- un espace de travail collaboratif sur la toile 56 – complémentaire à celui déjà évoqué – destinéaux professeurs stagiaires participant à une dominante photographie-vidéo sur laquelle j’aurail’occasion de revenir.La deuxième concerne une rencontre singulière, lors de l’exposition Témoins d’histoire 57 , de la classede quatrième du collège Jean Moulin, jumelé avec le CPIF, avec Jacques Gri<strong>son</strong>. La visite del’exposition a déclenché un projet de travail sur la mémoire et les lieux de mémoire, la trace que laissela mémoire <strong>dans</strong> le paysage et la transformation de celui-ci par les événements devenus mémorielsqui a conduit les élèves et leurs professeurs, sur les pas de Jacques Grizon à la découverte desderniers sites miniers de Lorraine et du futur musée de la mine ainsi que sur les lieux de mémoire dela Première Guerre mondiale autour de Verdun : couplage complexe de l’œuvre d’un photographe, del’analyse de paysage, d’une réflexion sur les rapports mémoire et histoire et de l’étude desprogrammes de collège.La troisième se déroule à une échelle toute différente puisqu’elle met en jeu des classes de la Franceentière. Il s’agit du projet Des clics et des Classes. Le Pôle national ressource Image-Photographie del’académie de Créteil et le Centre Photographique d’Île-de-France se <strong>son</strong>t déjà engagé <strong>dans</strong> deuxprojets dont les productions <strong>son</strong>t visibles sur le site de la Bibliothèque nationale de France 58 :- L’intervention de Guillaume Herbaut à l’école École Maternelle Picasso de Pontault-Combault(deux classes de grande section, soit 45 élèves).- L’intervention de Guillaume Janot à l’école du Puits du Gué à Montevrain (une classe deCM2).L’opération produite et inscrite <strong>dans</strong> le temps par le Scérén-CNDP / Département Arts et Culture laMission aux Arts et à la Culture nécessite une forte implication des enseignants de la classe qui mènele projet et de leurs collègues, des directeurs et directrices des écoles, des conseillers en artsplastiques et des inspecteurs. Chaque année l’opération se développe, non sans certaines difficultésd’organisation et de financement, et donne lieu à des expositions, qui, par l’intermédiaire de laphotographie, <strong>son</strong>t l’occasion d’entrer <strong>dans</strong> l’histoire du portrait, de faire connaître des projets menés<strong>dans</strong> d’autres classes, mais aussi tous les partenaires qui la soutiennent le ministère de la Culture etde Communication (DDAI, DRAC Île-de-France), le ministère de l’Éducation nationale, del’Enseignement supérieur et de la Recherche / DESCO et les quatre PNR photographie de France,avec le partenariat de la Bibliothèque nationale de France. À ce stade du développement del’opération, il semblait nécessaire de participer à <strong>son</strong> inscription <strong>dans</strong> une autre durée qui impliqueaussi la formation des enseignants susceptibles par la suite de mener de tels projets. Ainsi l’IUFM deCréteil a présenté une exposition de l’ensemble des bâches produites la première année 59 et s’est53 Sur ce sujet, voir les articles de Yannick Vigouroux <strong>dans</strong> www.exporevue.com sur Adeline Hauvel, SandrineCalvet, Caroll’Planque, etc.54 Jean-Marie Baldner, Yannick Vigouroux, Les pratiques pauvres du sténopé au téléphone mobile, Scérén –Isthme éditions, Pôle Photo, Paris, 2005.55 Commissariat Yannick Vigouroux et Remi Guerrin.56 http://bscw.creteil.iufm.fr/dominante photo.57 http://www.cpif.net/58 http://classes.bnf.fr/clics/59 Visibles sur le site de la BNF et disponibles auprès du CPIF.© tram 2005 19


engagé <strong>dans</strong> un travail similaire de réflexion et de production avec Blanca Casas-Brullet sur la photode groupe, lié à une étude historique d’une part du portrait, d’autre part de la photographie de classeet de la photographie de promotion, mené en relation avec une réflexion sur les rapports histoiremémoire 60 .L’intérêt de telles synergies, outre les économies d’échelle qu’elle permettent par le croisement desprojets à destination des publics, largement compensées par la multiplication des réunions entre leschargés des publics et les formateurs de l’éducation nationale, est la rencontre, l’échange, lamutualisation de certaines actions entre les quatre pôles photographie, les différents centre d’art etmusées permettant de construire des projets en commun et de combiner les échelles d’inscription desprojets <strong>dans</strong> les différents territoires de proximité, de la commune au département, à l’académie, voireà la France ou à l’Europe.La formation initiale des enseignantsLà encore je n’évoquerai que quelques-unes des polarisations, qui mettent en jeu de façondifférentielle divers partenariats en réseau, à travers deux exemples, l’un plus général sur la formationdisciplinaire des enseignants, l’autre sur une expérience menée <strong>dans</strong> une dominante de formation desenseignants de l’école élémentaire consacrée à la photographie et à la vidéo.L’exposition et le manuelAu cours des dernières années, le CPIF a proposé plusieurs expositions qui interrogeaient le statutactuel du photoreportage. J’en retiendrai deux : Luc Delahaye Winterreise et Témoins d’histoire(œuvres de Guillaume Herbaut, Julien Goldstein, Olivier Coret, Paul Fusco, Raphaël Dallaporta, OlgaChernysheva, Galina Moskaleva). Selon une définition donnée il y a quelques années par LucDelahaye, « faire des images qui donnent au monde ce que le monde a envie de voir » 61 , le reportages’inscrit <strong>dans</strong> un système concurrentiel d’information où il s’agit, <strong>dans</strong> la temporalité la plus courtepossible, de faire événement, de rendre visible et présent un référent par la transparence du médium,selon des normes de visibilité définies. En interrogeant la position d’extériorité par rapport àl’événement, la posture du photographe entre empathie et distance, en fouillant les régimes de réalitéet de vérité, le rapport de l’art au document, ces expositions s’invitent <strong>dans</strong> une réappropriation del’outil spécifique du maître et de l’élève, le manuel et sa place <strong>dans</strong> le développement de nouveauxappareils 62 comme les technologies de l’information et de la communication.Au-delà de la visite de l’exposition, de l’attention portée aux cartels et à la lecture du dossier depresse et du dossier pédagogique, au-delà de l’intérêt dirigé vers le médium autant que le référent, letirage autant que l’accrochage, les professeurs stagiaires <strong>son</strong>t conduit, en vue d’une ré-exploitationsur le long terme adaptée <strong>dans</strong> leurs futures classes, à rechercher la place de la photo de reportage<strong>dans</strong> les manuels, prioritairement, mais pas seulement <strong>dans</strong> les manuels d’histoire et de géographie.Quels en <strong>son</strong>t les auteurs, les circonstances, mais aussi les conditions de reproduction, de mise enpage, de mise en rapport entre l’image et le texte de façon à ce que le document étudié en classe nesoit pas une « entité indéfinie, sans âge, sans maturité, sans disparités » 63 . Ils <strong>son</strong>t conviés às’interroger sur la notion d’œuvre et de document, sur la diffusion de l’œuvre et sa reproduction <strong>dans</strong>le manuel, sur l’ « indicialité » 64 à laquelle invite le texte des auteurs et sur sa critique 65 , sur larencontre entre une réalité singulière et une culture iconique partagée, d’un marché du visible quicirconscrit et rend compréhensible le montrable en un enregistrement autonome et distancié 66 .Sans plus s’étendre sur une problématique et un descriptif qui seraient trop longs à exposer ici, di<strong>son</strong>sque, par un anachronisme contrôlé 67 , il s’agit de soumettre les interrogations contemporaines du60« Le temps réfléchi. L’histoire au risque des historiens. », EspacesTemps, n° 59/60/61, 1995 ;« Histoire/géographie, 1. L’arrangement. » et « Histoire/géographie, 2. Les promesses du désordre. »,EspacesTemps, n° 66/67 et 68/69/70, 1998.61 Luc Delahaye, « Le conflit israélo-palestinien vu par les photographes », Libération, 3 novembre 2000.62 Qu’est-ce qu’un appareil ?, Paris, La Dispute, 2004.63 Michel Frizot, « Faire face, faire signe. La photographie, sa part d’histoire », in Face à l’histoire 1933 1996.L’artiste moderne devant l’événement historique, Paris, Flammarion – Centre Georges Pompidou, 1996, p. 49.64 Roland Barthes, La chambre claire. Note sur la photographie, Paris, Cahiers du cinéma, Gallimard Seuil,1980.65 André Rouillé, La photographie, Paris, Folio Essais, 2005.66 Marie José Mondzain, L’image peut-elle tuer ?, Paris, Bayard Éditions, 2002 ; Le commerce des regards,Paris, Seuil, 2002. Image, icône, économie. Les sources byzantines de l’imaginaire contemporain, Paris, Seuil,1996.67 Jean-Marie Baldner, « Un anachronisme-pratique », op. cit.© tram 2005 20


photoreportage aux documents récents et anciens des manuels 68 , d’utiliser le questionnement sur cesdocuments pour approcher la photographie contemporaine pour analyser le « style commun » (AndréMalraux) de la photographie <strong>dans</strong> le manuel où les images d’événements, de per<strong>son</strong>nages, d’objets,de monuments… <strong>son</strong>t égalisées et actualisées, où, par les liens qui s’instaurent entre elles, lesœuvres et les objets reproduits <strong>dans</strong> le manuel perdent leur spécificité (leur matière, leurs dimensions,leur échelle, leur statut…). C’est un niveau bien spécifique d’intervention où en retour l’analyse dumanuel en cours devient le catalyseur de la découverte des expositions des centres d’art partenaires.Les concours de recrutement qui proposent des analyses de documents invitent à cette démarche, lesprogrammes insistent sur cette prise en compte des manuels. Le centre d’art invite ainsi, notammentpar la proposition d’une documentation et d’un accompagnement, à nourrir ces parallèles. On pourraiten retenir comme exemple la mise à disposition par le CPIF des panneaux de l’exposition Manière devoir 69 comme vecteur privilégié de ces entrées.Un autre niveau d’intervention se fait jour ici, plus précisément <strong>dans</strong> la formation initiale desenseignants, qui s’actualise <strong>dans</strong> la mise en relation de l’exposition et de l’étude du manuel. À unautre niveau, départemental et académique, le partenariat s’exerce avec l’université et l’IUFM, tant<strong>dans</strong> la préparation du concours de recrutement dont les épreuves comprennent des analyses dedocument que <strong>dans</strong> les introductions aux disciplines où les formateurs d’IUFM prennent le tempsd’ausculter les manuels.Une dominante de formationLes interventions touchent surtout le premier degré <strong>dans</strong> le cadre d’un partenariat entre le CPIF etl’IUFM. Il s’agit <strong>dans</strong> des dominantes d’une cinquantaine d’heures de formation autour de laphotographie et de la vidéo de lier histoire de la photographie, notamment avec l’exposition Histoirede voir déjà citée, analyse de l’image préconisée par les programmes, découverte de l’œuvre dequelques artistes et pratique avec l’intervention de ceux-ci. L’objectif est triple :- sensibiliser un public d’enseignants débutants à l’art contemporain <strong>dans</strong> une continuité entrel’école et le collège, pour ce faire, en accord avec le Musée de Vitry et le Conseil général duVal-de-Marne, les futurs enseignants du primaire ont été associés à l’action du Conseilgénéral qui vise à offrir un livre d’art à chaque collégien 70 , l’action ayant été relayée par uncycle de conférence et l’exposition à l’IUFM, déjà évoquée, de quelques-unes descommandes aux artistes, avec la publication d’un quatre page publié en partenariat et destinéaux professeurs stagiaires ;- sensibiliser ce même public aux conditions du partenariat, en proposant par exemple auxfuturs enseignants de prendre eux-mêmes en charge des visites d’expositions ou des ateliersavec des élèves de classes qui mènent des projets avec le CPIF, deux expérience ont pu êtremenées <strong>dans</strong> l’exposition Michel François Théâtre des opérations et <strong>dans</strong> les expositions déjàévoquée Patrick Pardini Arborescence : physionomie du végétal et expérience du paysage enAmazonie et Nature cultivée. La première a donné lieu à un double montage photographiqueet vidéo réalisé par les professeurs stagiaires, <strong>dans</strong> le cadre de cours sur le traitement del’image numérique ; d’autres séances <strong>son</strong>t prévues pour l’exposition Foto Povera avecl’intervention des artistes exposés ;- sensibiliser ce même public aux temporalités du travail avec des artistes intervenants,notamment en proposant à quelques professeurs stagiaires de suivre, parallèlement au travailmené avec l’artiste à l’IUFM, <strong>son</strong> intervention <strong>dans</strong> une classe, l’expérience a été menée àl’école Paul Éluard de Vitry l’an dernier et a donné lieu à un montage photographique detravaux menés au sténopé avec Guillaume Pallat.La sensibilisation prend sens dès lors que les futurs enseignants <strong>son</strong>t <strong>rendu</strong>s en partie autonomes<strong>dans</strong> la construction d’un projet. Pour ce faire, la dominante est couplée avec une intervention d’unedemi-journée hebdomadaire sur quinze semaines <strong>dans</strong> des classes en présence du titulaire de laclasse et de formateurs, intégrant cette sensibilisation auprès des élèves <strong>dans</strong> les disciplinesclassiques telles que le français – où est privilégié le rapport texte image <strong>dans</strong> la littérature dejeunesse –, les arts visuels, l’histoire, la géographie <strong>dans</strong> le respect des programmes. Il s’agitparallèlement de créer un intérêt plus pérenne pour l’art contemporain à l’école et, <strong>dans</strong> une68 Jean-Marie Baldner, « La délicieuse achronie du document photographique. À la découverte de quelquesmanuels d’histoire », in Éric Bruillard (dir.), Manuels scolaires, regards croisés, Scérén – CRDP BasseNormandie, Caen, 2005.69 Panneaux de l’exposition publiés <strong>dans</strong> Robert Delpire, Michel Frizot, Histoire de voir. Paris, Nathan Photopoche n° 40-41-42, 2001.70 Hervé Le Goff, La photographie, Paris, Cercle d’art, 2003© tram 2005 21


perspective à long terme de faire émerger progressivement une demande et une habitude departenariat.Il serait loisible de multiplier les exemples, ceux-ci suffisent à montrer que les partenariats entre lescentres d’art et le monde scolaire peuvent se développer à différentes échelles d’espaces comme detemps, mais que la pérennisation, en sus des jumelages et des projets déjà évoqués, passe aussi parl’attention bilatérale à la rencontre entre le projet artistique du centre d’art et le quotidien de l’école,dès la formation initiale des maîtres. Il ne s’agit de rien moins que de donner une évidence <strong>dans</strong> laclasse à l’art contemporain, en activant avec les chargés des publics la complémentarité entremédiation et médiatisation <strong>dans</strong> l’acquisition des connaissances.La formation continue des enseignants, les stages destinés à un public mixteCe <strong>son</strong>t <strong>dans</strong> ces actions que se manifeste pleinement, <strong>dans</strong> le second degré, le rôle de la DAAC etdes professeurs relais qu’elle nomme <strong>dans</strong> les centres d’art. Participant en partie à la vie du centred’art et en même temps extérieurs à celui-ci lorsqu’ils exercent leur fonction principale de professeurd’arts visuels, de français, d’histoire et de géographie, etc., ceux-ci font partie de différents réseauxdont le rôle est entre autres de produire des stages de formation continuée destinés aux professeursdes collèges et lycées. Ces stages publiés <strong>dans</strong> les plans départementaux et académique deformation ainsi que <strong>dans</strong> les plans nationaux lorsqu’il s’agit de partenariat avec les pôles nationauxressources, et dont il est inutile de décliner ici les modalités de réalisation et de mise en œuvre,ouvrent d’abord la nécessité de partenariats, entre le Rectorat qui fournit le Cahier des charges,l’IUFM qui met en place les plans de formation et les différents centres d’arts. Un stage dit d’ouvertureculturelle – c’est la rubrique du plan de formation –, c’est une problématique de formation mise enadéquation avec les projets et les programmations des centres d’art. Monter un stage, c’est déjàparticiper à un réseau de partenariat qu’il a fallu mettre en place antérieurement.Ainsi, peu à peu depuis quelques années, se <strong>son</strong>t constitués des réseaux qui regroupent, entreautres, et selon des modalités diverses avec la DAAC de Créteil, les responsables, les chargés despublics et les professeurs relais des différents partenaires déjà évoqués. Ces réseaux <strong>son</strong>tpartiellement activés selon la demande du Rectorat et de l’IUFM pour proposer une offre de stage, lamonter et la mettre en œuvre qu’il s’agisse sous l’égide de la DAAC et de l’IUFM de Créteil de stagesacadémiques de formation s’adressant aux enseignants et documentalistes ou sous l’égide du Pôlenational ressource Image – Photographie de Créteil de stages nationaux ouverts à un public mixte.Ma conclusion sera en forme de transition entre les interventions de ce matin qui définissaient leservice des publics et <strong>son</strong> orientation à partir de la nature du projet artistique, de l’histoire du territoire<strong>dans</strong> lequel s’inscrit le projet, des missions et de la structure juridique et des effectifs du centre d’art etles préoccupations de cet après-midi autour de l’inscription des actions <strong>dans</strong> le territoire en réponsesà des publics diversifiés : comment inscrire le projet <strong>dans</strong> la durée et valoriser la qualité de larencontre, comment croiser les pratiques en lien avec des institutions et des associations de statutsdifférents, comment construire une relation sur le long terme par le développement d’une curiosité etd’une fréquentation individuelle du lieu <strong>dans</strong> le désir du partage, comment s’insérer <strong>dans</strong> les projetséducatifs locaux ? J’ai voulu montrer avec quelques exemples rapidement tracés que tout projet, dontle seul objectif réaliste sur le long terme – et ceci malgré la réduction drastique des crédits et dessoutiens ministériels qui réduisent en cendres bien des projets, malgré une politique qui génère deplus en plus d’inégalités, notamment <strong>dans</strong> les banlieues <strong>dans</strong> lesquelles nous travaillons – ne peutêtre qu’une formation et « un art d’élite pour tous », s’inscrit <strong>dans</strong> une multiplicité de déterminations oùle partage du quotidien au général, la coopération, de l’intervention ponctuelle au projet à long terme,le partenariat <strong>son</strong>t les conditions d’une réussite qui force constamment à être aussi ambitieux <strong>dans</strong> lesexigences que modeste <strong>dans</strong> les résultats. La fréquentation de l’œuvre, la familiarisation à l’artcontemporain <strong>son</strong>t œuvre de très longue haleine et, <strong>dans</strong> le cas spécifique du public scolaire,s’attachent à un travail générationnel.© tram 2005 22


Débat publicVéronique Garnier, rectorat de l’académie de Versailles, DAACJ’aimerais relever quelque chose en lien avec cette question du temps du partenariat. Il a étébeaucoup question de travailler avec des relais, de la difficulté de trouver le nombre suffisant de relaiset la qualité nécessaire. Ces relais, que peut-être je représente modestement, ont besoin de travailler<strong>dans</strong> l’anticipation. C’est un élément extrêmement important à prendre en compte si l’on veutconstruire <strong>dans</strong> la durée et articuler un cycle d’expositions sur un projet d’école. Ça ne peut pas sefaire <strong>dans</strong> la quinzaine, au moment où l’on reçoit le carton d’invitation. On a besoin quasiment d’uneannée à l’avance pour construire, articuler les projets et leur donner du sens. C’est un élémentfondamental <strong>dans</strong> la construction du partenariat.Jean-Marie BaldnerC’est un problème important, celui des temporalités différentes des centres d’art et de l’éducationnationale. Il faut faire un pari, celui de concilier la problématique de stages, <strong>dans</strong> le cadre des plansde formation académiques et départementaux, de projets d’école ou de classes, un an ou un an etdemi à l’avance, avec des programmations que nous ignorons, d’où l’importance d’un travail departenariat sur le long terme qui associe l’éducation nationale et les centres d’art, non seulement <strong>dans</strong>la mise en œuvre des actions, mais aussi <strong>dans</strong> la réalisation des cahiers des charges, la préparationdes plans de formation et le suivi des projets de la source à l’évaluation. Le rôle des professeurs relaisnommés par la DAAC est ici primordial.Caroline BourgeoisLes trois quarts des lieux, à ma connaissance, ne peuvent faire leur programmation au maximum queun an à l’avance puisqu’ils dépendent de conseils d’administration, de budgets et de financements quise construisent d’une année sur l’autre. Par ailleurs, je suis un peu mal à l’aise avec le fait qu’uneexposition puisse illustrer un programme scolaire.Jean-Marie BaldnerLe terme était à peine provocateur. Ce qui m’intéresse, c’est la mise en relation. Une exposition peut àcertains moments illustrer – au sens d’éclairer, mettre en lumière – un programme scolaire comme unprogramme scolaire peut illustrer une exposition. Une illustration est une image forte qui, parl’éclairage qu’elle apporte, conduit à une réflexion, une recherche. Dans de nombreux programmesd’histoire, de français, de mathématiques, nous trouvons des illustrations d’œuvres modernes oucontemporaines. Au-delà de l’illustration, au sens d’ornementation, je trouve intéressant de sedemander comment cette œuvre en est venue à éclairer une notion, une page, un manuel et commentà partir de cette œuvre on peut construire quelque chose : au minimum aller voir cette œuvre, allervoir une exposition de cet artiste… et les mettre en relation avec les pages concernées.Claire LegrandJe voudrais aussi revenir sur ce que vous disiez sur l’anticipation car pour moi on touche au cœur dece qui constitue le partenariat ? Nous avons chacun des modalités de travail qui <strong>son</strong>t des réalitéspropres. Construire le partenariat, c’est apprendre à connaître les modalités de chacun et définir unterritoire commun où justement un travail sera possible avec les réalités d’activités et les contraintesdes deux parties. J’ai aussi envie d’aborder une question cruciale en ce moment. Les moyens del’éducation nationale <strong>son</strong>t en réduction <strong>dans</strong> des proportions énormes. Il y a 60% de baisse de créditde formation continue. Par exemple pour ma région, il n’y a plus un seul stage de formation ni àl’action culturelle ni en stage de formation disciplinaire « arts plastiques ». Je crois qu’on ne peut pass’épargner la réalité des choix qui ont été faits récemment malgré les déclarations d’intention desministères sur les partenariats entre culture et éducation nationale. La réalité du terrain n’est pas dutout celle là.Jean-Marie BaldnerLa réduction des crédits, la minoration des exigences culturelles et l’abandon progressif des politiquesde la culture pour tous, nous en vivons tous, à des degrés divers, les répercussions <strong>dans</strong> lacroissance des inégalités et la dévaluation du lien social. Le travail en partenariat demande du tempset de l’argent, ne serait-ce que pour connaître l’autre et prendre en compte ses modalités de travail etses contraintes. Déjà, nous sommes obligés, <strong>dans</strong> les formations, de mettre <strong>dans</strong> la balance du choix,le coût des intervenants, quelquefois au détriment du contenu. Dans l’avenir, nous serons sans douteobligés d’abandonner un certain nombre de formations, c’est la rai<strong>son</strong> pour laquelle j’insistais sur letravail avec les enseignants <strong>dans</strong> le quotidien de la classe.© tram 2005 23


→ Place des arts plastiques <strong>dans</strong> les établissements scolaires et d'enseignements supérieursMaëlle DaultAvant de passer plus précisément au projet du lycée Galilée, je rappelle les missions du service despublics telles qu’elles ont été définies dès l’ouverture du Plateau. Elles se déclinent selon plusieursaxes avec notamment l’idée qu’un travail de transmission ne se réalise pas sans un contact très fortavec le projet artistique. Le travail en direction des publics au Plateau Frac Ile-de-France a étésouhaité <strong>dans</strong> une diversité. Nous travaillons aussi bien avec des enfants, des adultes, desindividuels, des scolaires, des enseignants en formation, des universitaires, des habitants du quartier,des associations, un foyer de femmes, des écoles d’art ou d’architectures, des commerçants, etc. Cetravail accompagne autant la programmation des expositions que les mouvements de la collection,afin de partager avec le public cette double missions du lieu. Nous avons par ailleurs privilégié despropositions pédagogiques qui s’appuient sur le développement du regard à partir des œuvres et desexpositions et non sur une pratique. Il y a pour finir 2 réalités géographiques qui se côtoient, à la foiscelle de la proximité <strong>dans</strong> le 19 ème arrondissement et celle d’une irrigation régionale <strong>dans</strong> le cadre deprojets liés à la collection.Concernant le lycée Galilée, l’objectif du projet était triple :- travailler à l’échelle d’un établissement scolaire en impliquant activement l’équipe enseignante et lesélèves <strong>dans</strong> la sélection d’œuvres de la collection du Frac Ile-de-France, la rédaction de textes et laprésentation du projet <strong>dans</strong> l’établissement lui-même.- créer un lieu de visibilité de cette collection <strong>dans</strong> un établissement scolaire tout en connaissant lesimpératifs et les contraintes (bac, l’absence d’option histoire des arts, etc.)- insister sur le cadre professionnel des missions du Frac et du Plateau en permettant une rencontreavec l’ensemble de l’équipe. Dans ce cadre, les élèves et les enseignants ont rencontré le directeurdu Frac, la directrice artistique du Plateau, la responsable de la collection, le régisseur et moi-même.Je vais faire un bref historique du projet. Le 1 er contact a été pris par le lycée Galilée avec le Frac en1999, à partir du catalogue Cdrom de la collection. Je trouve remarquable que ce désir de partenariatnaisse d’une édition, d’un désir en lien à des outils que nous produi<strong>son</strong>s. Bernard Goy, à l’époquedirecteur du Frac Ile-de-France, a fait une conférence <strong>dans</strong> le lycée. Un second contact a été pris en2001 par 2 enseignants, suite à l’annonce de l’ouverture du Plateau. En 2002-2003 à partir d’uneexposition présentée au Plateau « Objets de réflexion », nous avons présenté <strong>dans</strong> le lycée un choixd’œuvres de l’exposition et de la collection qui interrogeaient la question de l’objet. Une trentained’œuvres ont été exposées <strong>dans</strong> la totalité du lycée.En 2003-2004, nous avons organisé une nouvelle exposition <strong>dans</strong> le lycée, laquelle a suscité un grandenthousiasme. Porté par cet enthousiasme, j’ai insisté pour que puisse se mettre en place une galerieà l’intérieur du lycée. Il y a eu un travail de repérage autour d’un lieu possible à l’intérieur del’établissement. Ce projet a vue le jour grâce à l’implication d’une l’équipe d’enseignantspluridisciplinaires : Sylvie Lougarre, professeur de lettres, Luc Marcenac, professeur d ‘économie et unprofesseur d’arts plastiques qui intervient <strong>dans</strong> le cadre de la Licence de communication visuelle. Parailleurs, les 2 proviseurs qui se <strong>son</strong>t succédés sur une période d’à peu près 4 ans, ont soutenu leprojet. Le soutien des partenaires financiers également a été important : le rectorat de Versailles, larégion Ile-de-France, la mairie de Cergy-Saint-Christophe et le Rotary Club. Je souligne égalementl’engagement des artistes qui ont fait preuve d’un investissement remarquable <strong>dans</strong> le cadre desproductions réalisées in situ <strong>dans</strong> une ancienne école maternelle (annexe du lycée) et des rencontresrégulières avec les étudiants durant ces quatre années de partenariat. Pour conclure, j'ajoute quedepuis 2004-2005, le lycée gère de manière plus autonome ce projet qui prit <strong>son</strong> envol il y a 4 ans.Claire LegrandPuisque l’origine a été une demande des enseignants, j’aimerais vous poser une question : pourquoicette demande ?Sylvie LougarreUn concours de circonstances nous a amené à engager ce partenariat. Dans la vie d’un établissementscolaire, il y a des opportunités que l’on saisit ou pas. Nous avions besoin à un moment donné del’intervention professionnelle du directeur du Frac pour expliquer un certain nombre de choses à nosélèves de communication culturelle. La relation s’établissant bien, cette première rencontre a eu uneffet « boule de neige ». Je me rends compte que c’est toujours un peu de manière rétrospective quedes objectifs peuvent être définis. Le lycée Galilée est implanté depuis 20 ans <strong>dans</strong> la ville nouvelle deCergy. Il accueille entre 900 et 1000 élèves. Il est situé <strong>dans</strong> des abords peu hospitaliers, sans café nicommerce. L’architecture du lycée est très moderne, très ouverte mais depuis 5 ans pour des rai<strong>son</strong>s© tram 2005 25


Maëlle DaultLe fait de proposer une galerie <strong>dans</strong> un établissement scolaire permet qu’il y ait une culture de l’artcontemporain qui se mette en place petit à petit. Le 1 er projet, même si il était peut-être plusévénementiel (représenter une trentaine d’œuvres) a permis que cette réalité de fréquentation desœuvres soit vécue <strong>dans</strong> la régularité et non pas comme un événement.Claire LegrandOn voit que d’emblée se pose aussi la question : comment l’établissement scolaire à l’occasion de cetengagement peut aussi s’ouvrir à d’autres visiteurs que les premiers destinataires. Celam’impressionne que les élèves se rendent disponibles pour faire des permanences. Ca poseévidemment immédiatement la question de comment s’inscrit le temps de la scolarité <strong>dans</strong> le parcoursd’un enfant ou d’un adolescent. Qu’est ce que ça signifie de s’adresser à l’enfant en tant que scolaire,si on ne peut pas réfléchir ce temps scolaire <strong>dans</strong> un cadre plus élargi ? Les collectivités territoriale<strong>son</strong>t réfléchi à cette réalité. C’est la 2 ème intervention. Elle s’inscrit <strong>dans</strong> un contrat éducatif local visantà réfléchir un projet culturel <strong>dans</strong> un temps élargi de l’enfant.→ Travail collectif avec différents services d’une municipalité et contrat éducatif localAlfredo da SilvaLe contrat éducatif local, c’est d’abord deux circulaires : la circulaire interministérielle du 9 juillet 1998précisée par la circulaire interministérielle du 25 octobre 2000. Je cite : « L’aménagement des tempset des activités de l’enfant constitue un enjeu de société important. La manière dont un enfant met àprofit <strong>son</strong> temps en dehors des heures de classe est importante pour sa réussite scolaire,l’épanouissement de sa per<strong>son</strong>nalité et <strong>son</strong> apprentissage de la vie sociale. Il convient donc deprévoir, en particulier pour ceux qui ont le plus de difficultés à accéder aux différentes formes deculture, une organisation de ce temps propre à favoriser leur développement harmonieux. »Le contrat éducatif local vise donc à mettre en œuvre un projet éducatif local, partagé et conçu par lesdifférents partenaires concernés par l’éducation des enfants et des jeunes (parents, enseignants,associations, élus). Il recherche une cohérence entre les différents temps de l’enfant et tente defédérer l’ensemble des acteurs locaux. Le public visé est celui des 3-16 ans.Les activités incluses <strong>dans</strong> le CEL doivent permettre :-le développement de l’inventivité et des aptitudes logiques notamment par la pratique de jeuxindividuels et collectifs-le développement de la curiosité et de l’esprit scientifique par l’expérimentation-l’aptitude à la communication en particulier par l’utilisation des technologies de l’information et de lacommunication-la connaissance de <strong>son</strong> corps et sa maîtrise par diverses activités physiques et sportives-le développement de la sensibilité, de la créativité et de la curiosité par l’accès aux pratiquesartistiques et culturelles-l’amélioration des résultats scolaires grâce à des actions respectant les principes de la charte del’accompagnement scolaire-l’apprentissage de la vie collective et de la citoyennetéEn 2000, on a précisé à nouveau quelles actions il convenait d’inclure <strong>dans</strong> les contrats éducatifslocaux : l’éducation à l’image, au cinéma et au multimédia, la musique, le chant choral, l’architecture,le cadre bâti, le paysage, l’éducation à l’environnement, la culture scientifique, l’environnement desobjets et des signes visuels, les pratiques physiques et sportives l’éducation à la santé.Le contrat éducatif sur un territoire est placé sous la responsabilité d’un comité de pilotage local, luimême sous la responsabilité d’un comité de pilotage départemental. On peut retrouver l’ensemble dela composition de ces comités <strong>dans</strong> les différentes circulaires.A titre d’information, en 2004, en France, 2686 contrats avaient été signés pour 9275 communes (plusde communes que de contrats puisque la majorité d’entre elles concernent des groupements decommunes). 122 avaient été signés en Ile-de-France surtout <strong>dans</strong> les territoires défavorisés, ce quiconcerne 41% de la population française. Le budget en 2003 des contrats éducatifs locaux était de367 millions d’euros, ce qui est considérable. 52% des actions de ces contrats avaient pour objectif ladémocratisation de tous aux activités sportives et culturelles dont 30% spécifiquement des activitésculturelles.Quelle est la démarche qui a été mise en œuvre sur Ivry ?© tram 2005 27


Ivry est une ville 56 000 habitants en périphérie de Paris. Il y a 13 écoles maternelles, 11 écolesélémentaires, 4 collèges, 2 lycées, 8000 enfants et jeunes scolarisés sur la commune.Il y a aussi 4 centres de loisirs qui accueillent en moyenne 1000 enfants les mercredi et 800 durant lesvacances scolaires. Il y a pour finir un centre d’art, un cinéma associatif, une médiathèque, un théâtremunicipal, un conservatoire, 2 piscines, quelques gymnases et quelques stades.La démarche a commencé en 1999, soit un an après la circulaire, par la constitution du comité depilotage local. Cette mise en œuvre du contrat éducatif local sur la ville a été l’occasion d’une mise àplat des différentes actions réalisées. En 2000, 6 ateliers publics de réflexion ont été constitués :-partenariat avec l’école-améliorer les accès aux activités sportives-améliorer les accès aux activités culturelles-interclasse et restauration scolaire-santé, aide à la parentalité-les 11-16 ansCes ateliers se <strong>son</strong>t réunis à rai<strong>son</strong> de 1 fois par mois pendant un an et ont permis l’élaboration dudiagnostic et du projet éducatif local partagé. Ils réunissaient des per<strong>son</strong>nels municipaux, desper<strong>son</strong>nels de l’éducation nationale, des parents, des per<strong>son</strong>nels d’équipements sportifs et culturels,beaucoup de membres d’associations. Ce dernier a été validé en 2001 et s’appuie sur 4 axes :-Compléter la connaissance des besoins des publics 11-16 ans-Développer l’accès de tous à la culture, arts, sport, savoir-créer une dynamique partenariale au sein du quartier-améliorer la cohérence et la continuité éducative <strong>dans</strong> le quotidien de l’enfant et du jeuneUne fois ces 4 axes définis, nous avons constitué 5 ateliers afin de monter des projets. Nous avonsproposé des actions sous forme d’appels à projet, pouvant s’inscrire <strong>dans</strong> le contrat éducatif local.Cela a duré jusqu’en novembre 2003, date de la signature du CEL : c’est pratiquement 4 ans dedémarches.Le contrat éducatif local sur Ivry ce <strong>son</strong>t 29 actions réparties <strong>dans</strong> 11 fiches actions :-travail partenarial entre acteurs éducatifs-formation des animateurs-amélioration de l’interclasse-diversification de l’offre des centres de loisirs-diagnostic 11-16 ans-diversification de l’offre « cap jeune », cap jeune étant un centre de loisirs adolescent-accompagnement à la scolarité-contrats locaux d’accompagnement scolaire-accès au cinéma pour les enfants et les jeunes-activités de théâtre et de sensibilisation culturelle-temps culturel partagé parents-enfantsC’est surtout <strong>dans</strong> la diversification des offres des centres de loisirs que j’ai eu à intervenir. Il s’agissaitde proposer des actions exclusivement réservées au public des centres de loisirs, ce qui estparadoxal. Le public centre de loisirs est un public captif qui ne concerne que 15 % de la populationscolarisée sur la ville… donc quid des 85% restant…à priori plutôt concernés par le CEL et à prioriéloignés des différents dispositifs et des différentes offres sur une collectivité.En conclusion, je dirai qu’il y a autant de CEL qu’il y a de communes. Le plus court à maconnaissance a été rédigé et réalisé en 3 mois, le plus long est le notre.Le plus intéressant a été la phase des ateliers de réflexion publique qui a permis aux acteurs de serencontrer, d’échanger et de construire des actions ensemble. La partie la plus importante de ladémarche a été de pouvoir élaborer et de formaliser des objectifs avec l’ensemble des partenaires.Ce CEL permet aujourd’hui d’inscrire un certain nombre d’actions. Etre labellisé CEL sur la ville d’Ivrysur-Seine,c’est la garantie d’un financement local.Les CEL <strong>son</strong>t subventionnés par les collectivités pour 55% en moyenne, par l’état pour 15%, le resteétant assurée par la CAF (10%) et la participation des usagers. Cette volonté interministérielle de1998, presque unique <strong>dans</strong> l’histoire des dispositifs ayant trait au temps scolaire, extrascolaire etpériscolaire, est aujourd’hui exclusivement portée par les collectivités territoriales qui ont fait le choixde s’inscrire <strong>dans</strong> cette démarche.© tram 2005 28


Aujourd’hui, en 2005, le CEL devrait disparaître. Il est le volet éducatif des contrats de ville, et lesbudgets alloués aux contrats de ville <strong>son</strong>t plus bas. Les projets éducatifs locaux eux devraient rester.Clémence ThébaultL’éducation artistique est un enjeu de premier plan pour les centres d’art depuis leur création ; lamultiplication des services des publics <strong>dans</strong> les structures culturelles, ces dernières annéeségalement.Le centre d’art contemporain d’Ivry propose une multitude d’activités toutes gratuites, toujours encohérence avec la programmation artistique du lieu. Nous travaillons avec deux grandes catégoriesdes publics : les adultes et les enfants ou jeunes.Concernant ce dernier public, deux grands chantiers ont été mis en œuvre par l’état au début desannées 2000 : le plan Tasca-Lang et un travail au niveau du temps hors scolaire. Le CEL entretotalement <strong>dans</strong> ce second grand chantier. Il a permis l’ouverture des champs d’action des uns et desautres sur le temps péri et extrascolaire et d’engager du lien culturel, éducatif, social et territorial.A Ivry, le CEL a permis un lien entre les services culturels de la ville (le centre d’art, le théâtre, lamédiathèque, le cinéma) et les services enfance, jeunesse, loisirs et éducation. Les actions departenariat avec le centre d’art entrent <strong>dans</strong> l’élaboration de deux des quatre grands axes du projetéducatif local qui <strong>son</strong>t :- développer l’accès de tous à la culture, arts, sport, savoirs• concrétisé <strong>dans</strong> le CEL par la formation des per<strong>son</strong>nels et des actions menées sur le territoire- améliorer la cohérence et la continuité éducative <strong>dans</strong> le quotidien de l’enfant et du jeune• concrétisé <strong>dans</strong> le CEL par toutes les actions de partenariat.Ainsi les collaborations du centre d’art avec d’autres services municipaux, <strong>dans</strong> ce cadre précis duCEL, entrent <strong>dans</strong> un politique culturelle et d’éducation sur un territoire donné. Les actions concernentl’ensemble des structures artistiques et culturelles de la ville d’Ivry. Les activités proposées aurontpour finalité de donner à tous les enfants et tous les jeunes le moyen de découvrir de nouvellesformes d’activités liées aux arts plastiques, de s’approprier, au contact des intervenants, desdémarches et des processus adaptés, et ainsi de les placer <strong>dans</strong> des situations d’expérimentationactive leur demandant un engagement per<strong>son</strong>nel. Elles doivent ainsi par le biais de l’art, leurpermettre d’acquérir des compétences transférables, de développer leur per<strong>son</strong>nalité et leur créativitéet de se socialiser <strong>dans</strong> le cadre d’un projet éducatif local qui associe projet d’établissement scolaireet politique communale de l’enfance et de la jeunesse.Ceci nous amène plus concrètement à aborder les objectifs territoriaux, les objectifs pédagogiques etles effets escomptés <strong>dans</strong> le positionnement du centre d’art de la ville d’Ivry et plus particulièrementde <strong>son</strong> service des publics.Je vais vous énumérer brièvement les objectifs de départ :-apporter des connaissances théoriques sur la dimension culturelle et l’éducation artistique-sensibiliser à la création contemporaine de tous les publics-développer l’éducation à l’art dès le plus jeune âge-travailler l’accès à la culture pour tous et pour les publics de l’offre culturelle-apporter la connaissance de la notion du projet d’action culturelle-construire un projet en commun culture-animation socio-culturelle-formation et action, des animateurs et des équipes culturelles concernées-mieux connaître les lieux de travail et les réalités des uns et des autresLes effets escomptés et produits <strong>son</strong>t :-intégrer la culture comme une dimension locale-intégrer la culture comme une dimension réelle de l’animation est le résultat essentiel de la formation-développer de nouvelles compétences et de nouvelles fonctions-élargir et favoriser la notion de projet d’action culturelle à l’échelle de la ville-favoriser le partenariat entre toutes les structures culturelles de la ville, la mise en réseau desopérateurs culturels, la mise en cohérence des actions déjà en place-connaître les ressources-articuler l’offre à la demande pour un travail de fond plus coordonné© tram 2005 29


Ces différents points permettent l’élaboration d’un projet <strong>dans</strong> l’approche d’un schéma Voir-Faire-Interpréter : Voir <strong>dans</strong> le sens d’un rapport direct aux œuvres, faire <strong>dans</strong> la pratique effective descadres d’ateliers, et interpréter <strong>dans</strong> l’approche analytique de l’appropriation des œuvres.Plus concrètement, le CEL a commencé à être élaboré à Ivry en 1999. Dès l’année scolaire 2001-2002, les premières expériences se <strong>son</strong>t mises en place entre le centre d’art et les centres de loisirs,autour de visite d’exposition au centre d’art, de rencontre avec un artiste <strong>dans</strong> <strong>son</strong> atelier, etc. Cesactivités ont mis en évidence un certain nombre de questions. Comment développer la participationaux pratiques culturelles auprès de ceux qui n’en pratiquent pas aujourd’hui ? Quelle cohérence entreles temps péri et extra-scolaires avec le temps scolaire <strong>dans</strong> les domaines d’une pratique artistique ?A partir de 2003, les formations <strong>son</strong>t mises en place à destination des per<strong>son</strong>nes encadrant lesenfants, en lien avec chaque structure culturelle de la ville. Chaque animateur a crée un projet pourles enfants autour d’un domaine culturel. Suite à ces formations, des rendez-vous plus ponctuels ontété pris avec les centres de loisirs afin de visiter et échanger sur chaque exposition. Des demandesdes centres de loisirs afin d’organiser des expositions au centre d’art ont émergées. A partir de ceconstat une action importante de partenariat s’est structurée pour la construction d’un projet communen 2005-2006. Le service des publics du centre d’art d’Ivry met en place pour la seconde annéeconsécutive un projet intitulé « espace de l’objet ». Sous forme d’atelier, deux artistes de laprogrammation du centre d’art interviennent <strong>dans</strong> 6 classes d’établissements scolaires allant del’élémentaire au lycée sur une durée de 3 mois répartis en 12 heures chacun. L’idée était d’insérer àce projet inter établissement un processus identique d’atelier <strong>dans</strong> un cadre extra scolaire. Le projetglobal « espace de l’objet » sera finalisé en avril par une exposition au centre d’art regroupant lesréalisations des élèves et des enfants des centres de loisirs. Le coût du projet uniquement pour lecentre de loisirs est de 800 euros. Ce projet met donc en rapport des actions scolaires et extrascolaires sur un même territoire, et permet de faire glisser des activités dite complémentaire à undispositif transversal.L’engagement de chacun construit le rôle de chaque acteur pour laisser de coté celui du simpleconsommateur. A Ivry, le CEL a commencé à être élaboré en 99 et aujourd’hui seulement on démarreles actions. Il faut donc faire preuve de patience et de ténacité. Ces projets ne <strong>son</strong>t pas figés, ilspeuvent toujours être modifiés et modulés. Pour finir, je dirai que tous ces projets <strong>son</strong>t possibles grâceaux artistes qui exposent au centre d’art.Julie Papin, mairie de Rueil-Malmai<strong>son</strong>Quelle est la place de l’évaluation ? Comment vous avez évalué le projet mis en place au Crédac ?Comment évaluer la réception des projets par rapport au public ?Alfredo da SilvaEst ce qu’on est <strong>dans</strong> l’évaluation des actions ou <strong>dans</strong> l’évaluation globale du dispositif ? Monsentiment per<strong>son</strong>nel, très subjectif, c’est que l’évaluation du contrat éducatif local est impossible.Au niveau des actions, elle s’organise <strong>dans</strong> le travail régulier. Les centres de loisirs <strong>son</strong>t encadrés pardes animateurs titulaires de la fonction publique territoriale. Cette évaluation fait partie de leur mission.Ceci dit, il est difficile de déterminer l’impact de ce type d’action sur les enfants ? Il faudrait pouvoirleur poser la question <strong>dans</strong> 15 ou 20 ans. Plus immédiatement, nous avons des temps de discussionavec eux. On essaie d’évaluer leur satisfaction de l’activité. Il y a aussi des retours sur la poursuite del’activité : quelle activité pourra être menée à la suite et en dehors du centre d’art ? Etc.Clémence ThébaultDans l’évaluation, il est toujours difficile de savoir si les enfants reçoivent les choses comme nousl’avions souhaité. Quelques signes au jour le jour nous aident à évaluer les projets mis en place : estcequ’ils reviennent avec leurs parents, par exemple ?Après effectivement, il faudrait voir <strong>dans</strong> 20 ans….→ Actions à destination du public individuel de proximitéAurélie SellierLa ferme du Buis<strong>son</strong> est une scène nationale <strong>dans</strong> laquelle <strong>son</strong>t implantées différentes structures : uncentre d’art contemporain, deux salles de cinéma art et essai et une programmation spectacle vivant.L’équipe des relations avec les publics, constituée de 3 per<strong>son</strong>nes, est organisée d’une façon© tram 2005 30


pluridisciplinaire. Je suis plus particulièrement chargée des actions liées au centre d’art mais je suisaussi amenée à travailler autour de la programmation du cinéma et du spectacle vivant. L’équipeappréhende tous les champs artistiques qui <strong>son</strong>t présents <strong>dans</strong> notre structure, ce qui est assezcompliqué. Notre territoire d’actions est aussi très particulier. Noisiel se situe <strong>dans</strong> la ville nouvelle deMarne-la-Vallée. Les populations <strong>son</strong>t arrivées à la fin des années 70 au moment de la constructiondes villes, ce que l’on appelait l’époque des pionniers. Aujourd’hui, les constructions continuent, plus àl’est, autour du parc Eurodisney qui influence énormément toute la politique d’urbanisation de Marnela-Vallée.Les populations <strong>son</strong>t aussi en train de changer, restent maintenant <strong>dans</strong> les communesproches de la ferme du Buis<strong>son</strong> des populations de plus en plus précaires, tandis que les classesmoyennes et supérieures se déplacent de plus en plus vers l’est.Je vais vous décrire une action que l’on mène en direction des publics individuels, plusparticulièrement des publics « jeunes » : les lycéens et les étudiants. Elle s’inscrit <strong>dans</strong> un objectif dedéveloppement et de recherche des publics et pas de médiation spécifique autour des contenuscomme on a pu en parler jusqu’à présent, bien que nous menions aussi des projets de « médiation »avec le milieu scolaire et les associations.Il y a 3 ans, nous nous sommes <strong>rendu</strong>s comptes que nous menions énormément de projets avec lemilieu scolaire et les enseignants. Malgré cela, nous ne retrouvions pas individuellement à la Ferme,les lycéens qui participaient à ces projets. Ils venaient <strong>dans</strong> un cadre scolaire, mais ne fréquentaientpas individuellement les expositions, les salles de spectacle ou le cinéma. Nous avons décidé, aprèsréflexions, de mettre en place une action à destination de ces jeunes en essayant de travailler aveceux individuellement. Cette action s’inscrit <strong>dans</strong> le local : elle touche les lycéens et les étudiants des 5lycées à proximité de la Ferme ainsi que l’université de Marne-la-Vallée. L’action a démarré toutdoucement avec 3 ou 4 jeunes et aujourd’hui elle commence à prendre une autre ampleur.L’idée est de leur proposer de devenir des relais, des correspondants au sein de leur établissementscolaire, de leur université, de leur famille, de leur entourage. On leur propose de se transformer enpetit « chargé des publics » afin de partager avec les per<strong>son</strong>nes qu’ils connaissent ce qu’ils ont puapprendre et ressentir à la ferme. Pour se faire, ils viennent à la ferme environ une fois par mois nousrencontrer et discuter de la programmation développée au niveau de l’art contemporain, desspectacles et du cinéma. Nous leur donnons des clés de lecture de que nous présentons : ils assistentà des répétitions, ils regardent des captations vidéo de spectacles, ils font des visites d’expositions oudes visites de montage d’exposition, ils rencontrent les artistes, les membres de l’équipe, etc.L’idée est de leur faire comprendre comment fonctionne notre structure, pourquoi on accorde autantd’importance à la création contemporaine, comment elle se met en place, comment est ce qu’on laproduit, etc. Nous essayons de les amener à réfléchir sur ce qu’est une création, sur la prise de risqueque cela représente de présenter une œuvre pour la première fois, qu’elle soit plastique ou de l’ordredu spectacle vivant. L’objectif est qu’ils puissent se familiariser avec nos missions, qu’elles deviennentconcrètes pour eux. Nous travaillons à leur favoriser l’accès aux œuvres afin qu’ils puissent ensuitecommuniquer sur la programmation artistique de la ferme.Nous n’avons aucun moyen et nous n’avons pas développé d’outils spécifiques afin de mettre enœuvre cette action. C’est une expérience très modeste et très simple. L’outil est avant tout le contactindividuel et la relation avec les correspondants. Nous communiquons avec eux par téléphone ou parmail. Nous nous voyons régulièrement, quasiment d’une façon amicale avec certains.Aujourd’hui, après 3 ans, nous fai<strong>son</strong>s le bilan. Nous sommes en contact avec 30 et 40 relais, lycéenset étudiants. La relation individuelle est un peu plus compliquée à gérer quand on se retrouve engroupe, pour discuter, partager des choses ou des questionnements. Nous souhaitons garder uneéchelle humaine et individuelle pour continuer à travailler correctement.Dans l’ensemble, nous constatons que ces étudiants et ces lycéens <strong>son</strong>t devenus des spectateursactifs de l’ensemble des propositions artistiques. Ils vont voir beaucoup de choses, ils s’interrogentaussi énormément après les spectacles et les expositions. Nous essayons toujours de remettre enperspective avec eux ce qu’ils ont vu. Nous ne leur avons pas imposé des obligations ou desrésultats. Nous avons souhaité leur laissé carte blanche, chacun fait comme il peut, comme il veut,tout seul ou à plusieurs. Certains <strong>son</strong>t vraiment <strong>dans</strong> cet esprit de partage et de diffusion de ce qu’il<strong>son</strong>t découvert. Un grand nombre n’en <strong>son</strong>t pas du tout à ce stade. Nous avons découverts qu’ilsconsidéraient ces réunions comme une sorte de formation. Ils viennent pour eux-mêmes pour senourrir, pour apprendre, écouter, discuter et n’en <strong>son</strong>t pas encore du tout au stade de pouvoir partager© tram 2005 31


avec les autres. Beaucoup d’entre eux nous disent à quel point il leur est difficile de partager ce qu’ilsvoient avec leurs camarades, pour lesquels l’acte premier culturel reste le centre commercial et lecinéma multiplex. Nous leur avons également proposé de s’investir <strong>dans</strong> la vie de la « mai<strong>son</strong> » etnotamment pour les lycéens et les étudiants majeurs, d’avoir un petit boulot : faire de l’accueil sur lesexpositions, les spectacles, etc. Certains ont fait des stages en technique. Certains d’entre eux ont faitdes choix d’orientation par rapport à cette expérience de relais, et se <strong>son</strong>t dirigés vers des filières demédiation culturelle ou de formation artistique. Certains de ces lycéens <strong>son</strong>t aujourd’hui étudiants ou<strong>dans</strong> la vie active, 2 <strong>son</strong>t notamment enseignants. Un autre mode de relation se crée avec euxmaintenant. Par ailleurs, nous réfléchis<strong>son</strong>s à la mise en place d’une action similaire avec des relaisadultes au sein des entreprises, des associations, etc.Claire LegrandCette nature de la transmission est aussi une réalité <strong>dans</strong> le champ de l’art. Nous apprenons l’art, lapratique artistique à travers aussi la conversation avec les artistes, les critiques d’art, les acteurs, lesorganisateurs d’exposition. Par ailleurs, votre action se situe à une étape importante : vous suscitezdu désir en attendant qu’émerge une volonté d’en savoir plus.Aurélie SellierNous les sollicitons depuis peu pour monter des projets. Nous leur demandons de nous proposer desinterventions, des actions, que ce soit à l’intérieur de leur lycée ou ailleurs.Per<strong>son</strong>ne du publicComment avez-vous pris le 1 er contact avec ces élèves et étudiants et comment leur avez-vousformulé cette proposition de devenir relais ?Aurélie SellierNous travaillons activement avec un lycée situé proche de la ferme depuis plusieurs années. Certainsdes lycéens scolarisés <strong>dans</strong> cet établissement venaient seuls voir des expos. C’est avec eux que leprojet est vraiment né. Nous leur avons expliqué le constat que nous avions fait et ensemble nousavons imaginé enclencher cette action. Nous leur avons également demandé d’en parler autour d’eux,et parallèlement nous sommes allés à la recherche de correspondants <strong>dans</strong> les lycées ou à la fac.Cela s’est fait par le contact direct.→ Structures culturelles intercommunales et croisement des publicsFrançois PourtaudL’école et espace d’art Camille Lambert est une seule entité gérée en régie directe de la Communautéde communes Les Portes de l’Es<strong>son</strong>ne regroupant les villes d’Athis-Mons, Juvisy-sur-Orge et Parayvieille-poste.La structure est assez identique à celle décrite ce matin par Lionel Balouin. Elle regroupeune école d’art de pratiques amateurs, non diplômante, et un espace d’art. Cette école a été fondée<strong>dans</strong> les années 30 avec un développement <strong>dans</strong> les années 70 de nombreux ateliers de métiersd’art. A partir des années 80, les orientations ont changé, les métiers d’art ont été relativementsupprimés et remplacés par des ateliers de peinture, sculpture, des interventions d’artistes, etc.L’ouverture de l’espace d’art se fait en 1987 et se créent progressivement des ateliers nouvellestechnologies, infographie et vidéo. Nos missions de sensibilisation se développent autour de deuxaxes : les pratiques amateurs et le service pédagogique du centre d’art qui fait un travail desensibilisation à l’art contemporain autour des expositions de pratiques actuelles.Nous sommes une des premières communes à avoir participé aux communautés de communes. Al’époque, per<strong>son</strong>ne ne savait ce que cela voulait dire. Du jour au lendemain, il y a eu un transfert decompétence de la commune via la communauté de communes. Les transferts comprenaient leconservatoire de musique, le théâtre, l’école et l’espace d’art, la voierie et les encombrants ! Celanous a semblé au départ assez curieux : l’effet obtenu est une sorte de satellisation au sens où vousêtes mis virtuellement sur orbite, vous retombez au même endroit mais plus per<strong>son</strong>ne ne vousreconnaît. Ce n’est plus la commune qui gère votre budget, mais la communauté de communes ; dujour au lendemain vous n’avez plus du tout affaire aux mêmes per<strong>son</strong>nes. Tout est différent <strong>dans</strong> lefonctionnement y compris au niveau des relations avec les partenaires, les scolaires, l’administration.Il y a un laps de temps d’adaptation et lorsque vous avez reconnu votre terrain, vous reprenezprogressivement contact avec tous les gens que vous connaissiez au départ. Nous avons avancéainsi progressivement <strong>dans</strong> cette redécouverte d’un terrain connu à la rencontre des nouveaux© tram 2005 32


partenaires : les médiathèques, les conservatoires, le théâtre, le centre culturel et nous avons réfléchiavec eux aux moyens de faire circuler les publics d’une structure à l’autre, de provoquer des intérêtsdifférents et de croiser les trajectoires.Pour ce faire, il était important de trouver un projet fort et commun axé sur le croisement despratiques. Les actions proposées ont permis de développer des soirées thématiques etévénementielles chez différents partenaires en conservant un point de vue très actuel sur la création:des soirées autour des nouvelles technologies, de la vidéo interactive, du livre d’artiste, de la poésiecontemporaine, de la bande dessinée, de la création de jeux vidéos, etc. Ces soirées se déroulaient<strong>dans</strong> différents endroits afin de faire circuler progressivement les publics. Nous menons ces actionsdepuis 3 ans, l’objectif étant de créer une vie artistique sur un territoire, d’intéresser le public àdifférentes thématiques et pratiques. Il faut reconnaître que le département appuie énormément tousles projets de transversalité culturelle autour des communautés de communes et des communautésd’agglomérations. Nous avons eu un partenariat très privilégié, notamment sur le département del’Es<strong>son</strong>ne par rapport à ce type d’actions.Deuxième objectif que l’on s’est donné : réfléchir à la manière dont le public pouvait participer.Pourquoi ne pas organiser les manifestations chez les particuliers ? Dans ce cas, le particulier est coorganisateuret il a la possibilité et le privilège de passer quelques jours avec un artiste. La premièrede ces manifestations a eu lieu il y a deux ans et s’intitulait « œuvre à domicile ». Le principe de miseen place a été assez long. Nous avons fait une 1 ère expérience en ciblant un quartier : 350 per<strong>son</strong>nes,300 envois de courriers co-signés par les élus et 2 réponses favorables en retour de courrier ! Celafait peu ! Nous avons donc essayé d’élargir la cible en prenant contact avec les habitués desstructures et progressivement, nous avons organisé des rencontres entre les particuliers et lesartistes. Dans un projet de ce type, les particuliers jouent le rôle d’organisateurs et nous jouons celuide médiateur régisseur. La médiatisation de la manifestation est assurée par le public organisateur, cequi a permis une véritable traînée de poudre. On a commencé il y a 2 ans avec 10 particuliers ;l’année dernière, pour la deuxième manifestation, il y avait 15 participants.Pour cette dernière édition, nous avions par ailleurs organisé les transversalités artistiques autour d’unparcours chez les habitants mais aussi <strong>dans</strong> des lieux publics et culturels à proximité. Il y aaujourd’hui une surenchère des partenaires mais il faut penser que les gens ont aussi envie de faireautre chose, regarder la télévision par exemple ! La transversalité artistique peut aussi exister auniveau du monde scolaire. On ne peut pas faire des surenchères en permanence, notamment avecl’éducation nationale. Les projets de transversalité <strong>son</strong>t des projets d’avenir pour le milieu scolaire etle partenariat des centres d’art.Je reconnais que notre structure est très privilégiée parce que nous étions la seule structure centred’art et école d’art passée en transfert de compétences sur ce territoire. Je crois par expérience surles 4 dernières années, que les choses peuvent s’établir réellement au niveau des partenariats. Nousn’avons strictement rien à perdre à être à plusieurs sur un territoire, au contraire : lescomplémentarités permettent de développer une richesse culturelle et en faire bénéficier les publics.Claire LegrandJe soulignerai en conclusion le rôle de l’engagement politique des tutelles et l’importance d’être <strong>dans</strong>un contexte qui favorise la mise en œuvre des projets.© tram 2005 33


Synthèse et mise en perspectiveDominique Blanc, chargé des publics pour le Centre de photographie de Lectoure <strong>dans</strong> le Gers.Pierre Oudart, chef du service de l'innovation et de l'action territoriale (SDAT) de la Drac Ile-de-France.Dominique BlancM’incombe la tache de rassembler tout ce qui a été dit aujourd’hui. Je vais essayer de dégagerquelques grands axes. Je travaille au centre de photographie de Lectoure, centre d’art en zone rurale<strong>dans</strong> une petite ville de 6000 habitants. Le temps fort de notre programmation est un festival qui a lieul’été. Nous sommes par ailleurs la structure associée au Pole national ressource (PNR) photographiede l’académie de Toulouse. La région Midi-Pyrénées regroupe 8 départements. Elle est, à l’inverse dela région Ile-de-France, la région la plus vaste de France et la moins dense en terme de population.On pourrait penser qu’à priori les problèmes <strong>son</strong>t différents, mais aux problèmes posés les réponsesapportées <strong>son</strong>t en fait assez proches, elles reposent beaucoup sur la construction de projets et departenariats.Quand on construit un projet <strong>dans</strong> lequel <strong>son</strong>t impliqués plusieurs partenaires, la première questionqui se pose est la définition des objectifs. On a vu <strong>dans</strong> les exemples cités cet après-midi des objectifsassez différents. Ces objectifs liés au projet vont tenir compte aussi de projets plus généraux liés à lastructure culturelle associée et du ou des partenaires associés. Cela peut être évidemment l’éducationnationale mais aussi d’autres partenaires associatifs. Dans cette définition des objectifs, il faut trouverun terrain commun de travail, d’où l’importance de la connaissance et de la reconnaissance dechacun des partenaires. Cette reconnaissance implique de laisser du temps et de la place à lanégociation mais aussi à la formation et à l’appui sur des per<strong>son</strong>nes relais. La négociation estnécessaire car <strong>dans</strong> le cadre de la mise en œuvre du projet se rencontrent des cultures de travail, desmodalités de fonctionnement, des situations économiques très différentes. L’important est d’identifier<strong>dans</strong> ces cultures différentes ce qui va permettre un champ de travail commun. Ce temps de lanégociation peut être très long et peut durer quasiment tout le temps du projet. J’ai remarqué quel’intervention d’un tiers était parfois nécessaire et facilite les choses. Le partenariat ne repose pas surun fonctionnement pyramidal avec une per<strong>son</strong>ne décisionnaire tout en haut de la hiérarchie mais sebase, bien au contraire, sur des décisions collectives. Je citerai pour exemple la mise en place duPNR photographie à Toulouse avec le centre de Lectoure, l’IUFM et le CRDP de Toulouse. La miseen route a été difficile parce qu’on avait du mal à faire la part des choses entre les enjeux financiers etla définition d’actions et d’objectifs. Le recrutement des chargés de projet <strong>dans</strong> les PNR ont ainsiénormément facilité les choses et a permis de remettre un peu chacun à sa place et de commencer àretravailler ensemble. Dans ce travail de partenariat, la question du repérage de per<strong>son</strong>nes relais estquelque chose que nous vivons au quotidien. On se repose sur des gens que l’on repère petit à petiten travaillant. La relation individuelle, voire amicale, compte énormément <strong>dans</strong> l’avancée des projets.Ensuite, et c’est une part non négligeable de ces constructions de projet, il y a le temps de laformation, temps qui peut être formel ou informel : les stages pour les enseignants, formation eninterne pour les chargés des publics de la région, formation des per<strong>son</strong>nes qui font l’accueil <strong>dans</strong> leslieux. La construction du projet doit se faire avec une prise en compte permanente et évolutive de toutce qui est contrainte budgétaire et des moyens. Il est vrai que le problème des budgets est récurrent.L’art contemporain et un des parents pauvres de la culture. Ce manque se retrouve à plusieursniveaux : peu de moyens alloués au projet artistique et à la sensibilisation, restriction budgétaire ducoté de l’éducation nationale, précarité économique des plasticiens, seuls artistes qui ne bénéficientpas du régime des intermittents.Autre axe : la question de la pérennisation du projet <strong>dans</strong> le temps. Pratiquement tous les projets citésinsistent sur cette question du temps, du travail sur le long terme. Elle génère parfois une tensionentre une vision qu’on pourrait qualifier de « rentabiliste » voulue par les institutions et les financeurs(on a bien vu ce matin que même si la question de la quantité n’était pas complètement au cœur desexigences des élus, les institutions ont de plus en plus de pression pour donner des chiffres) et laqualité. Cette question renvoie à celle de l’évaluation. Ce qui m’a frappé ce matin <strong>dans</strong> ce que j’aientendu c’est qu’il y avait beaucoup de « peut-être » pour parler de l’impact des actions menées. Onest <strong>dans</strong> des hypothèses. Face à cette question, on ne sait pas trop quoi faire à part refuserl’évaluation quantitative pure et simple. Un chantier sur ce sujet nous attend, d’autant plus depuis lamise en place de la loi de finance par le gouvernement, pousse les services déconcentrés de l’état à© tram 2005 34


faire remonter des évaluations. Ces outils d’évaluation <strong>son</strong>t essentiellement quantitatifs, lesquels s’ilsne <strong>son</strong>t pas inutiles, ne <strong>son</strong>t qu’une partie de l’évaluation. Au niveau de la région et de la formationdes chargés des publics sur laquelle je travaille depuis 3 ans, nous avons pris à bras le corps cettequestion afin de ne pas se laisser imposer des outils qui n’ont rien à voir avec ce que nous voulonsfaire apparaître sur les actions qu’on mène. Nous travaillons donc à proposer des outils d’évaluation,aussi modestes soient-ils, aussi partiels soient-ils. Pour ce faire, nous allons nous associer à deslaboratoires universitaires pour faire un travail de recherche action.Pour conclure, je crois qu’il ne faut pas oublier que l’on reste <strong>dans</strong> le domaine des arts plastiques, cequi reste central c’est l’œuvre, c’est l’artiste. Quelque soit la complexité <strong>dans</strong> laquelle on travaille,quelque soit le nombre de partenaires avec lequel on travaille, il est important de ne jamais oublierqu’on parle de l’œuvre, de l’artiste, d’une relation humaine.Pierre OudartLa première question que j’ai retenue de cette journée est celle du public. Qui est le public ? A cettequestion, nous n’avons pas de réponse. En Ile-de-France, nous aimons envisager que le public estmobile. Nous devons donc penser les publics <strong>dans</strong> une certaine mobilité, sans oublier qu’elle estgénéralement entravée. On sait que plus les per<strong>son</strong>nes <strong>son</strong>t <strong>dans</strong> des situations sociales etéconomiques difficiles, plus leur territoire se restreint, jusqu’à se restreindre pour certains à un bout detrottoir. Dans cette salle, chacun d’entre-nous vit sur des territoires assez vastes ; plus on grimpe <strong>dans</strong>l’échelle sociale, plus ces territoires vont se superposer et s’étendre : Venise, à Bale etc. Noussommes <strong>dans</strong> une région qui se construit autour de la mobilité, des transports et de ce centreparisien. La question de Paris est une question importante. Cette région se construit autour de Pariset il faut continuer à créer des équipements culturels un peu partout sur le territoire francilien tout enorganisant la mobilité. En ce sens, le réseau tram est un outil intéressant <strong>dans</strong> cette relation avecParis. C’est pour cela aussi que le Frac, parce qu’il est à la fois parisien et régional, est une institutionparticulièrement importante.Quand on essaie d’analyser les publics, on a besoin d’outils d’analyses. Or ces outils utilisés par lasphère de l’équipement ou des aménageurs ne <strong>son</strong>t pas adaptés à ce que l’on veut faire, parce qu’ils<strong>son</strong>t sociodémographiques ou socio-économiques, etc. On retombe sur la question des outilsd’évaluation non adaptés. Je partage tout à fait l’opinion de mon voisin. Un des premiers enjeuxaujourd’hui pour ceux qui s’occupent de médiation culturelle est de se pencher sur les outilsd’évaluation, d’analyse et de diagnostic du territoire, en les articulant autour de la mobilité. Cela nousforce aussi à réinterroger cette question de proximité. L’enjeu est-il toujours nécessairement laproximité ? Il est important d’articuler les différents niveaux de proximité pour ne pas se laisserenfermer <strong>dans</strong> la question de faire pour le plus proche. L’enjeu est que chaque collectivité apporte <strong>son</strong>niveau de responsabilité : que le conseil général ait une vision départementale de la proximité, que leconseil régional ait une vision régionale de la proximité et que l’État porte cette question de la visionnationale – ce qu’il fait lorsqu’il donne des labels de centre d’art pour l’art contemporain, de centredramatique national ou de scène nationale pour le spectacle vivant, ou de musée de France pour lesmusées.Ensuite nous avons parlé de l’éducation nationale. Nous vivons <strong>dans</strong> notre partenariat avecl’éducation nationale sur un poids historique qui est celui du spectacle vivant. Rappelez vous <strong>dans</strong> lesDrac, il y a encore quelques années, le conseiller action culturelle était le conseiller théâtre ; laquestion de l’action culturelle interdisciplinaire est venue plus tard. La répartition des financements àla Drac Ile-de-France au service de l’action culturelle respecte à peu près la répartition historique deces financements en Ile-de-France puisque 80% du budget de la Drac est consacré au spectaclevivant. Alors comment faire bouger les curseurs à un moment où il n’y a pas abondance de nouveauxcrédits ? En passant par le territoire….A cet égard, l’expérience de Camille Lambert ou de la ferme duBuis<strong>son</strong> est extrêmement importante. C’est bien en travaillant en réseau que l’on va pouvoir bougerles choses. L’absence de relais est, <strong>dans</strong> ce cadre, une question importante, à laquelle une nouvellefois la Ferme du Buis<strong>son</strong> apporte une réponse intéressante.Les dispositifs peuvent jouer un rôle <strong>dans</strong> le repérage de relais et le travail de mise en réseau. Ledispositif « école ouverte » propose aux structures artistiques et culturelles de monter des projetsavec des établissements scolaires ouverts pendant les vacances. Concernant d’autres dispositifs quipeuvent être mobilisés, nous avons en Ile-de-France une convention avec l’agence régionaled’hospitalisation pour les actions en milieu hospitalier. Un appel à projet pour 2006 vient d’être publiésur le site de l’ARH et du ministère de la culture. En matière d’action <strong>dans</strong> les pri<strong>son</strong>s, il y a une action© tram 2005 35


à la Santé menée avec le théâtre de la cité internationale. Dans ce domaine l’action la plusdéveloppée aujourd’hui reste celle avec la mai<strong>son</strong> d’arrêt de Fresnes où l’action culturelle se fait avecles établissements culturels du département.Pour terminer et mettre en perspective - j’ai appelé ça « l’ailleurs des publics », il y a aussi d’autresformes d’action telle que l’art <strong>dans</strong> l’espace public, qui peuvent être aussi reliées avec des démarchesde médiation. On connaît tous les nouveaux commanditaires de la Fondation de France. La Dracsoutient une expérience assez passionnante à Sevran, <strong>dans</strong> le quartier des Beaudottes, avec SylvieBlocher, vidéaste et plasticienne, associée à un architecte et une sociologue. Ce projet mis en placeavec un groupe d’habitants visait à travailler sur une question précise : <strong>dans</strong> cet endroit <strong>dans</strong> lequelon n’est jamais seul, quel serait un lieu de solitude ? Ce projet a donné lieu à une démarche trèsprogressive. Notamment le projet a été sélectionné pour la biennale de Venise de 2003 et unemobilisation a permis aux habitants de s’y rendre. L’observation de ce projet est pour moi la meilleureévaluation de tout ce qu’on dit sur l’action culturelle. Quand on travaille vraiment sur l’accès auxœuvres, cela a un effet positif qui est une affaire de société. Il ne faut pas faire semblant de croire quece genre d’expériences peut être généralisé, qu’on va faire des commandes publiques avec tous lesgroupes d’habitants et particulièrement <strong>dans</strong> les cités pour empêcher que les voitures brûlent. Noussouhaiterions mettre en place à la DRAC une démarche d’évaluation de ce type de projets qui aide àgarder les traces du processus.Le SDRIF est un schéma directeur régional qui est mis en place depuis plusieurs années. Pour lapremière fois, il va l’être sous la tutelle du conseil régional. La culture y est présente sous plusieursaspects. Il me semble que la question de l’art <strong>dans</strong> l’espace public, <strong>dans</strong> le cadre d’un schémad’urbanisme à vingt ans, est une question dont le Frac, dont tram, dont les artistes pourraient se saisir<strong>dans</strong> le cadre de la réflexion qui devrait aboutir en 2007.Dernier point d’actualité : le pôle culture. Après 30 ans et pour la 1 ère fois, un nouveau dispositif varenforcer la collaboration de la Drac avec l’ensemble des établissements publics nationaux duministère de la culture <strong>dans</strong> la région Ile-de-France. Un des thèmes de travail qui va se développer estles publics et l’éducation artistique. En cela, tram était préfigurateur, puisque <strong>dans</strong> tram on a à la foisune structure d’initiative privée : la mai<strong>son</strong> rouge, et un établissement public du ministère : le palais deTokyo.© tram 2005 36

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