Guy A. Lepage a unefeuille de route impressionnante.Né dans l’est de Montréal d’unefamille modeste, ce diplômé del’UQAM a d’abord choisi la voiede l’humour pour exprimer àfond son côté justicier. On connaîtla suite. Le groupe RBO dont ilfaisait partie, a remporté 35 prix,en plus de recevoir l’annéedernière, la Médaille del’Assemblée nationale àl’occasion de ses 30 ans. Un garsune fille a été adaptée dans unetrentaine de pays et sespremiers pas au cinéma ontété tout aussi concluants.Camping sauvage, où il estproducteur au contenu, coréalisateuret premier rôle, raflela Bobine d’or aux Jutra de 2005.Parallèment, Lepage trouve letemps de partager le micro avecson ami Marc Labrèche dans unhommage à Joe Dassin, de foulerla scène avec les Porn Flakeset de se faire écrivain aux côtésd’India Desjardins.De son propre aveu, Guy n’ajamais rêvé ce type de parcours.Mais la vie vous fait parfois deces clins d’œil… Il aura falluen effet qu’il soit tour à tourhumoriste, acteur, scénariste,animateur et producteur avantd’interviewer les grands bonzesde l’actualité à l’occasion de Toutle monde en parle, la grandemesse du dimanche soir. Avouezqu’on touche de près le journalisme,profession qu’il espéraitembrasser tout jeune.À l’aube de la cinquantaine,plus zen que jamais, Guy A.Lepage continue de jeter unregard critique sur la société.Malgré la centaine de prixrécoltés au cours de sa prolifiquecarrière, l’homme n’a pasla grosse tête. Sa nouvellepaternité lui sied bien.Villégiateur laurentien à sesheures, celui qui tient un rôlemajeur dans L’Empire Bo$$é,accorde ici sa première entrevueà vie à un média de la région.TEXTES : Nathalie DeraspePHOTOS : colombine drouinTu es co-producteur aucontenu de L’empire Bo$$é.C’est un éditorial signéGuy A. Lepage, non ?L’empire Bo$$é est signé par tout lemonde ; par la productrice qui a eul’idée, par les trois auteurs, par leréalisateur, et au niveau de l’éditorial,on est sept personnes qui pensonsexactement ça. Oui, c’est un filméditorialiste. Il y a un message qui esttrès mesuré par rapport à l’indignationque Claude Legault et moi on a dans lavie parce qu’on est plus « sanguins ».Mais c’est un jugement très pausé,très réfléchi. Et c’est encore plusimplacable, je trouve.C’est pas parce qu’on ritque c’est drôle…Je pense que si Croc n’avait paspris ce slogan-là, je l’aurais prispour le film.Comment conjuguer uneposition comme celle-là avecta job d’animateur de Tout lemonde en parle, n’est-ce pasdifficile par moments ?Non, parce que quand j’anime Toutle monde en parle, je ne suis paslà pour donner mon avis. Je suis làpour entendre des gens intelligentsexpliquer leur point de vue. C’est sûrque s’ils ne sont pas intelligents ousi leur point de vue est mal expliqué,je vais peut-être rentrer dans lesinterstices pour donner mon avis. Maissi cette émission-là existait pour que jedonne mon avis deux heures et demiepar semaine, elle n’aurait pas duréhuit ans. On m’aurait dit : Arrête ! C’esthautement désagréable. À mon âge, jesuis capable d’être mesuré.Est-ce que certains propos de tesinvités t’indignent encore ?Oui. Quand je suis indigné en dedans,je le dis. À moins que la personnesoit en train de tout nous servir; leplat, le dessert et l’entrée principaleen même temps. Je pense que lestéléspectateurs sont intelligents. Sije te montre en gros plan quelqu’unqui a l’air de mauvaise foi ou qui al’air menteur et que je le laisse sedépatouiller dans son histoire, je nesuis pas obligé d’ajouter à la fin : Tu esincompétent et tu es menteur. On l’atous compris.Il y a des gens qui considèrent queTout le monde en parle est beaucoupmoins cinglant et cynique qu’audépart. Comment réagis-tu à ça ?Je dirais que j’ai changé de ton. Jepose les mêmes questions maisplus mollo, ce qui fait que les gensrépondent au lieu de se braquer. Mesquestions sont même pires qu’avant.Au début, je posais ça comme unéditorial et la personne se braquait.J’avais l’air d’être virulent mais çamenait à rien.Ça n’a pas été risqué d’inviterdes gens comme Raël ? As-tu étésurpris de voir Serge Chapleau luitapoter le crâne ?Je n’ai aucune pitié pour lespersonnalités publiques qui vivent deleurs entrevues et de ce qu’ils vendentQuand j’anime Tout le mondeen parle, je ne suis pas là pourdonner mon avis. Je suis là pourentendre des gens intelligentsexpliquer leur point de vue.au public. Je n’ai pas de compassionpour eux. Mais ça m’a surpris. Et jesuis d’accord avec certaines personnesqui disaient que c’était un gested’agression. Mais ce sont des adultes,qu’ils s’arrangent. J’anime pas unegarderie.Garou me disait apprécier cet espritbon enfant qu’ont les Québécoisquand ils vous abordent dans la rue.Toi, tu vis ça comment ?Depuis une couple d’année je suisdevenu Monsieur Lepage. Ça je trouveça « weird ». Je suis passé de : « HeyGuy A ! » à… « Monsieur Lepage ». Il ya comme une distance que je trouvebizarre et il y a du respect. Ça, jetrouve ça cool. Par exemple, moiqui n’ai jamais vouvoyé personne,maintenant je vouvoie les gens quime vouvoient.On voit beaucoup d’artistes impliquésdans des causes. Toi ça été « Àcharité bien ordonnée » avec les PornFlakes. Est-ce que cette aventure-làse poursuit ?Ça dépend de mes horaires. Il faut queje rentre ça entre deux projets. Là,ce n’est pas prévu mais j’adore ça. Etj’admire le Dr Julien. Quand je ne peuxpas l’aider en public je l’aide en privé.T’as un bac en communications.Ça fait de toi un humoriste, unanimateur, un scénariste, unproducteur. Avec tous les outils quetu as utilisés, quel est le meilleurmoyen de communiquer ce que tuveux dire ?24 avril2012 – www.flechemag.com L’artdevivre…
J’ai toujours eu un côté un peuRobin des bois. Je voulais être policierquand j’étais jeune puis après ça,avocat. Mais je me suis rendu compteque les avocats défendaient pasnécessairement les victimes.Auteur. C’est la seule affairequ’en cinq minutes, tu dis :Écris-moi un poème, une chanson,un texte humoristique, trois pages descénario… Je comprends toutes lesformes d’écriture. Et s’il y en a que jene maîtrise pas je les pastiche assezbien pour que t’aies l’impressionque je suis bon là-dedans alors quej’utilise des recettes. Pour moi c’estmon meilleur outil. C’est rare que jeregrette quelque chose que j’ai écrit.C’est très très rare.Tu as fait de la pub aussi…Ça, j’ai haï ça.Est-ce que tu en referais aujourd’hui ?J’en referais si j’étais obligé d’enfaire. Il fallait que je nourrisse mafamille. Ce qui exclut la pub sociétale.Ça c’est honorable. Je trouve ça trèssympathique ce que fait St-Hubert.S’ils me demandaient de faire ça, jeleur demanderais 200 000 $. Parce quec’est ce que ça vaut.Et c’est le Dr Julien quiserait content ?Exactement.Le petit gars né dans l’est deMontréal d’une famille modeste,il rêvait de quoi ?Il rêvait pas de ça. C’est pas ça que jevoulais faire dans la vie. J’ai toujourseu un côté un peu Robin des bois.Je voulais être policier quand j’étaisjeune puis après ça, avocat. Mais jeme suis rendu compte que les avocatsPhotographe : Karine DufourÀ ses débuts en 2004, Tout le monde en parle attirait en moyenne 1,8 million de téléspectateurs. L’émission commel’animateur ont été récompensés 23 fois depuis (Gémeaux, Rockie, Artis, Gémeaux Immortel).défendaient pas nécessairement lesvictimes. Ils défendaient leurs clients.Après, je voulais être journaliste. Unpeu comme Tintin. Mais ce n’est pastout le monde qui peut faire ça. Pourêtre un bon journaliste faut que tufasses aussi les chiens écrasés. Fautque tu fasses tes classes et ça prenddes années. Je pense que ça se gagnece respect-là du journaliste qui devientcommentateur et qui prend un certainrecul. Un peu comme les éditorialistes.C’est par hasard que je suis tombélà-dedans et je remercie le hasard.Tu es aussi hyper-mélomane. C’estune autre facette de toi. Tu as donnéun bon coup de pouce au pianisteAlain Lefèvre qui lui à son tour, a faitconnaître André Matthieu…Je suis un bon amateur de musique.D’où ton implication aux FêtesNationales… C’est ton côténationaliste ?T’es obligé ! T’animes la St-Jean, tupeux pas être pour le fédéralismerenouvelé.lesLaurentides !www.flechemag.com – avril201225