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L’orgueil fatal

Coup de théâtre! L’homme à qui tout souriait, ce Midas bancaire, dont la bonne étoile ne cessait de scintiller, abandonne la présidence d’Attijariwafa bank, après avoir réussi une fusion sans précédent entre deux mastodontes bancaires. Officiellement, Oudghiri démissionne, mais c’est officieusement qu’EE est allé enquêter. Bien avant l’affaire Boufettas, le péché originel de Oudghri sera celui de l’orgueil. Auréolé d’une invincibilité que lui confèrent ses compétences, il fraie avec le mauvais pôle makhzénien se plaignant auprès du clan El Himma de la mise à l’écart des partenaires français, dont Auchan, Axa et Danone. Cette trahison lui coûtera son poste et lui vaudra, quelques années plus tard, un mauvais feuilleton juridique qui broiera à jamais sa carrière au Maroc. EE s’est immiscé dans le secret de réunions ultraconfidentielles qui ont acté la mise à mort du génie des finances qu’était Oudghiri.

Coup de théâtre! L’homme à qui tout souriait, ce Midas bancaire, dont la bonne étoile ne cessait de scintiller, abandonne la présidence d’Attijariwafa bank, après avoir réussi une fusion sans précédent entre deux mastodontes bancaires. Officiellement, Oudghiri démissionne, mais c’est officieusement qu’EE est allé enquêter. Bien avant l’affaire Boufettas, le péché originel de Oudghri sera celui de l’orgueil. Auréolé d’une invincibilité que lui confèrent ses compétences, il fraie avec le mauvais pôle makhzénien se plaignant auprès du clan El Himma de la mise à l’écart des partenaires français, dont Auchan, Axa et Danone. Cette trahison lui coûtera son poste et lui vaudra, quelques années plus tard, un mauvais feuilleton juridique qui broiera à jamais sa carrière au Maroc. EE s’est immiscé dans le secret de réunions ultraconfidentielles qui ont acté la mise à mort du génie des finances qu’était Oudghiri.

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Stratégie<br />

C’est un véritable coup de massue, signé<br />

Hassan Bouhemou, que s’est vu asséner<br />

Khalid Oudghiri le jour de la tenue du<br />

conseil d'administration<br />

«Sa Majesté Mohammed VI a ordonné<br />

aux deux hommes de rester chacun dans<br />

son périmètre. Objectif: mettre fin aux<br />

interférences entre le sécuritaire et l’économique.<br />

Il aurait même demandé de<br />

diffuser l’information auprès de leurs<br />

cadres respectifs», raconte un proche<br />

des arcanes du pouvoir. Une décision<br />

qui concerne donc d’une part les walis,<br />

gouverneurs...et d’autre part les différents<br />

présidents de filiales du holding<br />

royal. Depuis, chacun évolue dans son<br />

camp. L’un s’est érigé en véritable roi du<br />

capitalisme marocain en prenant la tête<br />

des affaires royales et en les mettant<br />

au-devant de la scène. L’autre gère d’une<br />

main de maître le volet sécuritaire.<br />

Oudghiri, la tête à droite,<br />

le cœur à gauche<br />

Depuis, Mounir Majidi a les coudées franches<br />

dans la sphère économique. Plus<br />

rien ne l’arrête. Certains disent même<br />

qu’il profiterait de sa position dominante<br />

dans l’économie marocaine pour<br />

intervenir dans de grandes opérations<br />

boursières, en particulier au cours du<br />

second semestre 2006, et ainsi influencer<br />

fortement l’évolution de la place<br />

boursière de Casablanca. Bien entendu,<br />

il développe l’ONA à sa guise et prend<br />

en main même les affaires économiques<br />

de l’Etat. Certainement conforté par la<br />

puissance de son président et le degré<br />

d’influence qu’il a sur le Roi, le directeur<br />

général de la Siger développe des positions<br />

assez chauvinistes. Les résultats<br />

ne tarderont d’ailleurs pas à se faire<br />

ressentir. Les partenaires français sont<br />

mis à l’écart les uns après les autres.<br />

Seulement voilà, la croisade du couple<br />

Majidi/Bouhemou, qui jusque-là ne s’est<br />

heurté à aucun obstacle, va buter sur<br />

une affaire d’Etat. Yassine Mansouri, le<br />

patron du contre-espionnage, à savoir la<br />

DGED (Direction générale des études et<br />

de la documentation), reçoit en décembre<br />

2006 un courrier officiel des services<br />

secrets français (cf. E&E janvier 2007,<br />

p.21) s’inquiétant de la manière dont<br />

les entreprises royales malmenaient les<br />

intérêts français au Maroc, référence<br />

faite au divorce imminent entre l’ONA<br />

et Auchan, mais aussi celui entre l’ONA<br />

et AXA et les rumeurs sur le partenariat<br />

avec Danone. Les intérêts de l’Etat<br />

sont en jeu, le souverain est informé de<br />

la chose. C’est alors que Fouad Ali El<br />

Himma entre de nouveau en scène. Il est<br />

chargé de tirer au clair cette affaire. Car<br />

l’incident peut avoir de sérieuses répercussions<br />

sur les relations diplomatiques<br />

franco-marocaines. Une occasion s’offre<br />

à El Himma pour remettre de nouveau<br />

son nez dans la sphère économique. Mais<br />

de toute évidence, cette fois-ci, avec la<br />

bénédiction de la hiérarchie. Nous sommes<br />

dans la deuxième quinzaine de janvier.<br />

Une réunion vient d’être provoquée<br />

au ministère de l’Intérieur. Sont conviés:<br />

Mounir Majidi -président de la Siger-,<br />

Hassan Bouhemou -directeur général de<br />

la Siger et président directeur général<br />

de la SNI-, Rachid Tlemçani en remplacement<br />

de Saâd Bendidi - président<br />

directeur général de l’ONA- en voyage à<br />

cette date-là, et bien entendu et non pas<br />

des moindres Khalid Oudghiri. Présent<br />

Plus Oudghiri engrange les réussites, plus<br />

l’échec devient cuisant pour un Bouhemou<br />

déterminé à ce que toute décision<br />

stratégique soit d’abord de son ressort<br />

également, Mustapha Bakkoury en tant<br />

que président du groupe d’impulsion<br />

économique franco-marocain. Fouad Ali<br />

El Himma, Yassine Mansouri et Chakib<br />

Benmoussa, ministre de l’Intérieur, sont<br />

donc les maîtres de cérémonie. Majidi et<br />

Bouhemou, la mort dans l’âme, se plient<br />

au jeu des questions réponses des ténors<br />

du sécuritaire. Quant à Oudghiri, en véritable<br />

néophyte de ces réunions en haut<br />

lieu, il a davantage marqué les esprits<br />

de par la singularité de son attitude.<br />

Connu pour être un homme qui n’a pas<br />

vraiment la langue dans sa poche, il s’est<br />

distingué par un comportement inhabituel.<br />

«Sa gestuelle trahissait une envie<br />

irrépressible de crier haut et fort ce qu’il<br />

pensait de la gestion actuelle du groupe<br />

ONA/SNI», nous a affirmé une source<br />

digne de foi. Il n’en fera rien, et restera<br />

muet durant presque toute la rencontre.<br />

Jusque-là rien à signaler, chacun vaque<br />

de nouveau à ses occupations. Mais c’est<br />

sans compter sur le discernement des<br />

hommes de l’Intérieur qui auraient perçu<br />

la retenue d’Oudghiri. Une semaine plus<br />

tard, il est de nouveau convoqué en haut<br />

lieu. Hasard du calendrier ou rendez-<br />

90 Economie & Entreprises n°94

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