72 Suzanne Farrell dans A Midsummer Night’s Dream <strong>de</strong> George Ba<strong>la</strong>nchine et Dan Eriksen, 1966 La Cinémathèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> Danse bientôt 30 ans www.<strong>la</strong>cinematheque<strong>de</strong><strong>la</strong><strong>danse</strong>.com tel : 01 44 75 42 75
LE cARRé D’AS La Cinémathèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> Danse n’a pas cherché à « illustrer » <strong>les</strong> chorégraphies présentées par le Miami City Ballet au Théâtre du Châtelet, mais à <strong>les</strong> éc<strong>la</strong>irer d’un jour différent. Des heures <strong>de</strong> visionnage et <strong>de</strong> négociations avec <strong>la</strong> télévision américaine nous furent nécessaires pour obtenir ces images rares que nous présentons, toute <strong>la</strong> journée, à <strong>la</strong> Cinémathèque Française le lundi 11 juillet. George Ba<strong>la</strong>nchine, Jerome Robbins et Twy<strong>la</strong> Tharp ont chacun travaillé pour Hollywood : ils col<strong>la</strong>borèrent à plusieurs films célèbres et cette connaissance du 7 e art se perçoit, du reste, dans le rythme <strong>de</strong> leurs écritures chorégraphiques. On avait écouté avec passion à New York Edward Villel<strong>la</strong> évoquer, en public, le tournage du seul ballet-film que Ba<strong>la</strong>nchine réalisa (1967) pour le cinéma avec Dan Eriksen, A Midsummer Night’s Dream (Le Songe d’une nuit d’été). Il était bien p<strong>la</strong>cé pour parler <strong>de</strong> ce film puisqu’il y dansait au côté <strong>de</strong> <strong>la</strong> sublime Suzanne Farrell. Rencontrant ensuite Villel<strong>la</strong> dans un restaurant, on pouvait admirer, tandis que nous parlions, <strong>la</strong> précision toute cinématographique, avec <strong>la</strong>quelle il soulignait certains aspects <strong>de</strong> ce film mythique qui avait disparu pendant <strong>de</strong>s années et que l’on crut perdu. Saluons à ce propos Robert Gottlieb, éditeur américain célèbre, proche du Miami City Ballet, grâce à qui une copie <strong>de</strong> ce film introuvable a rejoint nos collections. Il présentera à <strong>la</strong> Cinémathèque Française le 11 juillet <strong>la</strong> séance consacrée à George Ba<strong>la</strong>nchine. Edward Villel<strong>la</strong> évoque Jean Babilée, et aussi <strong>Bar</strong>yshnikov. Il n’est pas grand, mais vif. Une noncha<strong>la</strong>nce toute popu<strong>la</strong>ire, mais aussi une élégance aristocratique : ce serait le personnage parfait d’un film <strong>de</strong> Scorsese... Comme <strong>danse</strong>ur, il était éblouissant : simplicité inspirée, style nerveux et retenu tout à <strong>la</strong> fois, que nous découvrons dans le portrait filmé par Robert Drew en 1968 Man Who Dances : Edward Villel<strong>la</strong> (5 ème séance du 11/07) Le regard <strong>de</strong> six <strong>danse</strong>uses proches <strong>de</strong> George Ba<strong>la</strong>nchine (1 ère séance du 11/07) ouvre le bal <strong>de</strong> ce programme avec le documentaire d’Anne Belle, Dancing for Mister B, Six Ba<strong>la</strong>nchine Ballerinas (1989). Chacune d’entre el<strong>les</strong> témoigne <strong>de</strong> ses re<strong>la</strong>tions, parfois complexes, avec Mr. B. Un montage <strong>de</strong> <strong>la</strong> Cinémathèque <strong>de</strong> <strong>la</strong> Danse (5 ème séance du 11/07) présente, par ailleurs, <strong>de</strong>s séquences <strong>de</strong> comédies musica<strong>les</strong> « surréalisantes » qu’il chorégraphia pour Hollywood dans <strong>les</strong> années 30-40, ajoutant un aspect insolite à l’œuvre <strong>de</strong> Ba<strong>la</strong>nchine. Jerome Robbins avec West Si<strong>de</strong> Story, chef d’œuvre absolu, où comme le disait Cocteau à propos du Jeune Homme et <strong>la</strong> Mort « <strong>les</strong> gestes <strong>de</strong> <strong>la</strong> rue sont élevés à <strong>la</strong> dignité <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>danse</strong>... » West Si<strong>de</strong> Story sera présenté au Théâtre du Châtelet le lundi 18 juillet sur écran géant pour le 50 e anniversaire du film. La chorégraphie <strong>de</strong> Jerome Robbins NY Export : Opus Jazz (1958), «ballet in sneakers», a été remontée pour le cinéma par <strong>de</strong> jeunes <strong>danse</strong>urs du New York City Ballet dans un film, tourné en 2010, projeté dans <strong>la</strong> 4 ème séance du 11/07. La manière <strong>de</strong> filmer <strong>les</strong> corps, <strong>les</strong> lieux <strong>de</strong> tournage dans Manhattan, <strong>la</strong> virtuosité <strong>de</strong>s <strong>danse</strong>urs évoquent le timing trépidant <strong>de</strong> West Si<strong>de</strong> Story. Judy Kinberg qui pendant <strong>de</strong>s années a été <strong>la</strong> productrice <strong>de</strong> l’émission « Dance in America » sur Channel 13 (WNET) a réalisé un riche essai cinématographique, Jerome Robbins, Something to Dance About (2009), extrêmement précis et documenté avec <strong>de</strong>s archives inédites en France, non seulement sur l’œuvre chorégraphique <strong>de</strong> Robbins, mais également sur sa vie et l’ambiguïté <strong>de</strong> ses positions politiques. Cet homme, dont on ignorait presque tout, nous est ici révélé avec force (2 ème séance du 11/07). Twy<strong>la</strong> Tharp a créé bien <strong>de</strong>s merveil<strong>les</strong>, notamment ce film qu’elle réalisa avec <strong>Bar</strong>yshnikov sur <strong>de</strong>s standards <strong>de</strong> Sinatra, <strong>Bar</strong>yshnikov by Tharp. Tout simplement l’un <strong>de</strong>s plus beaux films <strong>de</strong> <strong>danse</strong> jamais réalisé (3 ème séance du 11/07). Et enfin Fancy Free, première chorégraphie <strong>de</strong> Jerome Robbins (1944), remarquable <strong>de</strong> fraîcheur et <strong>de</strong> fantaisie (4 ème séance du 11/07). Ce ballet a inspiré <strong>de</strong>ux films majeurs <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> comédie musicale américaine, On the Town et Fair Weather <strong>de</strong> Stanley Donen et Gene Kelly : trois marins en permission découvrent d’un même mouvement l’amour et <strong>la</strong> magie <strong>de</strong> Manhattan… La boucle est presque bouclée… Le rêve américain se renouvelle et se poursuit avec <strong>les</strong> jeunes interprètes du Miami City Ballet. Le « carré d’as » d’Edward Villel<strong>la</strong>, Twy<strong>la</strong> Tharp, Jerome Robbins et George Ba<strong>la</strong>nchine continue <strong>de</strong> régner à <strong>la</strong> fois en vie et en images sur <strong>les</strong> scènes et <strong>les</strong> écrans <strong>de</strong> notre mon<strong>de</strong>. « … Une fois que vous êtes parti, vous ne vous en souvenez plus, tout ce qui vous reste c’est l’écho fantomatique d’une obsédante merveille » écrivait Truman Capote à propos <strong>de</strong> New York en 1946. Patrick Bensard / Lo<strong>la</strong> Chalou Remerciements : A<strong>la</strong>in Sinturel (Les trois petits cochons/New York), Marie-Hélène <strong>de</strong> Rancher, Agnès Schnei<strong>de</strong>r, Christopher Pennington, Twy<strong>la</strong> Tharp, Robert Gottlieb, Edward Villel<strong>la</strong>, Jan Schmidt et <strong>la</strong> NY Public Library, Xavier Baert, René Sirvin, Jennifer Bertani, Judy Kinberg et Hélène Van Dantzig, et l’équipe <strong>de</strong>s Etés <strong>de</strong> <strong>la</strong> Danse. 73