Peau noire, médias blancs

VI
Un mois dans la presse
quotidienne francophone
belge
« La presse écrite est finalement plus l’écho des
idées et des goûts de ses lecteurs que des opinions
et des choix de ses rédacteurs… Par là, elle exerce
dans la vie quotidienne de ses lecteurs une
influence considérable qui compense largement
celle qu’elle a perdu dans la vie politique au sens
large. »
Pierre Albert
La Presse, Que sais-je ?,
Presse Universitaire de France,
2002, p. 68-69
Depuis 2010, l’Association des Journalistes
Professionnels réalise des études sur la
question du genre, de l’égalité et de la diversité
dans l’information. La secrétaire générale
Martine Simonis soulignait quelques données
intéressantes : « Si l’on ouvre un quotidien
belge francophone, on ne croisera dans ses
pages que 18% de femmes, 17% d’intervenants
non-blancs, 6% de personnes de catégories
socioprofessionnelles autres que les cadres,
dirigeants, intellectuels et sportifs, 16%
d’intervenants n’appartenant pas à la période
d’âge active, et 0,33% d’intervenants ayant
un handicap (36) ». La dernière étude en date
confirme que les choses n’ont pas beaucoup
évolué depuis. Autres chiffres de cette étude : La
majorité des individus non-blancs, soit 21,96 %
se retrouvent principalement dans le sport au
niveau international. La deuxième catégorie
de non-blancs la plus représentée (18,21 %) est
principalement représentée dans la politique
internationale (37) .
Des milliers d’Européens lisent la presse
quotidiennement et quand les nouvelles parlent
des Noirs, l’essentiel du contenu tourne autour
des sujets suivants : étrangers, asile, pauvreté,
chômage, maladie, délinquance.
On a fait l’exercice durant environ un mois
avec un quotidien francophone en Belgique,
tiré à environ un million d’exemplaires par jour.
L’essentiel de l’information mentionnant des
Noirs, durant cette période, faisait référence à
des réfugiés, des sportifs, des musiciens et à des
personnes malades. L’absence de faits ordinaires
de la communauté accentue l’idée qu’« ils ne
sont pas comme nous », suspendue à l’esprit du
Blanc. La « vie normale (des minorités) demeure
dès lors totalement absente de l’image » (38)
Comment se fait-il que ce sont toujours des
experts blancs qui interviennent pour les affaires
dites « africaines » ? Peu de chances également
de voir un politique noir s’exprimer sur une
question de politique nationale : Un médecin
noir soigner un patient blanc ; un chercheur
noir à la clé d’une découverte scientifique ou se
prononcer sur une question du budget fédéral
par exemple.
Les Noirs (ou les non-Blancs) n’apparaissent pas
en tant qu’éclaireurs mais comme objets. « Les
seules exceptions à cette non-représentation
sont les musiciens et les sportifs. Ce sont les
deux échelons sociaux où les Noirs ont atteint
le « top-niveau » et ont, par la même occasion,
atteint des gains importants » (39) . En effet notre
échantillon révèlera notamment l’actualité des
sportifs mais aussi l’actualité des musiciens
africains et Afro-américains, et celle des chefs
d’Etat africains.
Dans les pages qui suivent, sont repris des
extraits d’articles piochés du 1 er au 30 juin
2015. La démarche a été de parcourir quelques
journaux pendant 30 jours et de ne relever que
tout ce qui concernait à première vue des Noirs
et/ou des Africains. Ils sont regroupés selon
trois thématiques récurrentes - Maladie, Migrant,
Musique - ou les « MaMiMu ».
36 Journalistes n°130, octobre 2011, p. 4.
37 Etude de la diversité et de l’égalité dans la presse quotidienne
belge francophone - AJP 2015, http://www.ajp.be/diversite/,
p. 24
38 Décoder l’image du Noir, Brochure éducative, Le Noir du
Blanc et Ecole sans Racisme, 1991, p56.
39 Décoder l’image du Noir, Brochure éducative, Le Noir du
Blanc et Ecole sans Racisme, 1991, p14
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