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Mon confinement avec Michel Houellebecq

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- Oui, euh… c’est en effet ce qu’elle a dit. Elle a peur d’attraper le sida !<br />

Il termina de manger sa tartine de pain trop cuit et but son café, tiède, pas très noir,<br />

<strong>avec</strong> un arrière-goût de terre humide ou d’huile de friture. Si les premiers rayons qui<br />

entraient par effraction pendant qu’il dormait encore à travers les vitres de sa fenêtre<br />

n’étaient pas les bienvenus, la vaste forêt de résineux et de hêtres servait d’entremetteuse<br />

pour une réconciliation <strong>avec</strong> le soleil d’avril, déjà haut dans le ciel. Alors que le personnel<br />

soignant s’affairait à la toilette et à l’habillage des personnes dépendantes, les autres<br />

résidents avaient pour leur part quartier libre avant de commencer les activités d’animation<br />

du matin. <strong>Houellebecq</strong> fumait, la capuche en fourrure de son anorak vert lui donnant un air<br />

d’inuit perdu sur le sommet du <strong>Mon</strong>te d’Oru.<br />

- C’est quoi cette déclaration à midi, d’après toi ? j’ai demandé.<br />

- Certainement la fin de la promenade.<br />

- Visites suspendues, interdiction de sortie, ça devient pire que dans une prison. T’es<br />

là pour quoi toi, au fait ?<br />

- Tu parles comme un taulard…euh, me fit remarquer <strong>Houellebecq</strong>.<br />

- C’est vrai, quoi, comment est-ce qu’une vedette comme toi se retrouve dans cet<br />

asile ?<br />

Leva les yeux au ciel, comme pour prier ou pour respirer des rémanences d’effluves<br />

qui lui caressaient les narines. L’air frais réveillait presque tous ses sens. Il s’exprimait<br />

invariablement <strong>avec</strong> le même timbre de voix, traînant, parfois agaçant quand on aurait voulu<br />

que la conversation s’emballât un peu sur quelque sujet d’importance ; parlait de ce ton<br />

ennuyeux et saccadé pour évoquer aussi bien les beaux seins de mademoiselle Faustine, les<br />

poils au menton de la craintive résidente de la chambre 6 qui ne voulait pas mourir à son âge<br />

d’une maladie sexuellement transmissible, refilée par un dandy décadent comme<br />

<strong>Houellebecq</strong> (même si elle lui trouvait un charme énigmatique et infailliblement tropical,<br />

sans qu’on puisse réellement comprendre à quoi elle faisait allusion), les menaces d’un<br />

effondrement de la civilisation par la faute irrécusable d’une chauve-souris jalouse du<br />

pauvre orphelin de Gotham City et d’un adorable pangolin, l’incompétence chronique d’un<br />

gouvernement français qui était à deux doigts d’instaurer la loi martiale et le couvre-feu à la<br />

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