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Mon confinement avec Michel Houellebecq

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- Oui, oui ! fit-il à l’infirmière qui venait de nous apercevoir à travers les grappes de<br />

citrons pendantes.<br />

Et de fait, nous nous fîmes hargneusement pourrir par mademoiselle Elisabeth pour<br />

manquement délibéré au règlement. Les résidents des chambres 47 et 48, chargés de la<br />

lecture des journaux, n’apprécièrent pas du tout, non seulement l’attitude audacieuse de<br />

<strong>Houellebecq</strong> (accusé par quelques-uns d’être, de par son charisme, une sorte de leader et de<br />

compromettre l’intégrité morale de ses compagnons ; soupçonné par une grande majorité<br />

d’appartenir à un ancien réseau de la notoire French Connection et d’écouler d’ahurissantes<br />

quantités de chloroquine – ce qui est foncièrement insensé ; suspecté, par une dizaine de<br />

vieilles femmes scélérates, de vouloir se glisser dans les vestiaires au moment où<br />

mademoiselle Anne-Sophie prenait langoureusement sa douche – ce qui n’est sans doute<br />

pas entièrement exagéré) et lui jetèrent à la figure les grands quotidiens qui évoquaient<br />

l’écrivain dans leurs colonnes. Mais surtout, ils ne pardonneraient pas à ce monsieur-là, le<br />

fait de leur avoir honteusement dissimulé la vérité à tous. La revue de presse venait<br />

brutalement de se terminer. Un journal de droite titrait que <strong>Michel</strong> <strong>Houellebecq</strong> était mort,<br />

probablement emporté par la pandémie qui décimait la planète. Un journal de gauche titrait<br />

que <strong>Michel</strong> <strong>Houellebecq</strong> était mort, vraisemblablement emporté par le virus qui décimait la<br />

planète. La nuance se devait d’être soulignée. Il fallut à l’écrivain beaucoup de justifications<br />

embrouillées, de démonstrations laborieuses, d’argumentations entortillées, pour tenter de<br />

se disculper auprès de ses colocataires furieux, de leur assurer qu’il y avait maldonne, qu’il<br />

était aussi vivant qu’eux tous réunis ici, qu’il ne pouvait que démentir la nouvelle de sa<br />

propre mort lue dans la presse. Rien n’y fit ! Nombre des résidents ne furent qu’à moitié<br />

convaincus par les explications fumeuses de <strong>Houellebecq</strong> et n’y virent qu’une tentative<br />

désespérée de fuir ses responsabilités en s’en prenant à des journalistes d’investigation qui,<br />

au terme d’une véritable enquête de fond, relataient seulement la vérité à leurs lecteurs.<br />

Pour les médisants que ça intéresse, et qui me houspilleraient (comment leur en vouloir ?)<br />

pour mon manque de discernement dans la cohérence de ce récit, je me dois de signaler<br />

expressément que <strong>Houellebecq</strong> ferait savoir par droit de réponse et dans les délais les plus<br />

brefs, qu’il est bel et bien vivant, et ce, malgré les dires d’une certaine presse à sensation,<br />

friande de tapage et de scandales en tout genre. Comme il fallait s’y attendre, <strong>Houellebecq</strong><br />

fut convoqué toutes affaires cessantes dans le bureau du directeur. Un homme d’une<br />

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