Origines des Isaac - MultiMania

“ Depuis 40 ans, je vis parmi les ouvriers, depuis 20 ans, j’ai l’honneur de commander à des milliers de
charbonniers; aussi bien que n’importe quel économiste j’ai la prétention de connaître les besoins, les
aspirations de la classe laborieuse la plus intéressante ” : c’est pourquoi Isaac Isaac n’aura de cesse qu’il
n’ait ‘pratiquement’ défini le ‘juste salaire’. Son défit sera de confronter les théories économiques et
sociales connues en son temps, à l’histoire vécue en 1893, par les ouvriers du charbonnage :
“ Voici deux travailleurs, l’un de 25 ans, l’autre de 35 ans, exerçant le même métier, au service d’un même
patron, tous deux en ménage; mais le premier n’a qu’un enfant, tandis que le second en a six en bas âge.
Tous deux vont recevoir le même salaire, mais combien leurs besoins sont différents ! Le premier ‘vivra’,
mais le second sera dans la misère; le premier trouvera que le salaire est convenable, tandis que le second
s’écriera que ses ressources sont absolument insuffisantes; le premier sera satisfait de son sort, le second
deviendra un mécontent.
Revoyons ces deux ouvriers dix ans plus tard, exerçant toujours le même métier, toujours au service du
même patron; et recevant le même salaire. Leur situation est maintenant bien différente; le premier a six
enfants et est dans la misère; le second a plusieurs enfants au travail et se trouve dans une aisance relative.
Celui qui il y a dix ans était satisfait est devenu un révolté, tandis que celui qui était mécontent est
satisfait. ” (1)
Tour à tour il appliquera à la situation de nos deux travailleurs : la ‘Loi de l’offre et de la demande’
formulée par l’école de Manchester, ‘le minimum de salaire’ défendu par CH. Le Hardy de Beaulieu et par
A. Verhaeghen, la ‘Sliding scales’ inaugurée en Angleterre, la ‘Limitation du nombre d’heures de travail’,
‘la participation aux bénéfices’, L’épargne, le Malthusianisme, le Socialisme, les subventions et la charité...
et chaque fois il estimera que ce ne sont là que des fausses solutions toujours incomplètes !
Il entrevoit le remède dans les écrits du sociologue MF. Leplay qu’il reformule comme suit :
“ Le salaire de l’ouvrier comprend deux parties : l’une, le salaire proprement dit, est réglé par la loi de
l’offre et de la demande - loi de justice -; l’autre, les subventions, est proportionnelle aux besoins de la
famille- loi de charité -... ” (1)
Mais à qui confier le soin de mettre en oeuvre une telle réforme ? Sera-ce à l’état, à l’ouvrier, au patron
? Après avoir réfuté les deux premières options, Isaac Isaac affirme bien haut que c’est au patron
qu’incombera la recherche des moyens pour la réaliser. Et d’exalter un paternalisme (2) d’autant plus
émouvant qu’il est foncièrement sincère : “ Connaître l’ouvrier, en être connu; guider ses premiers pas au
travail; développer ses aptitudes professionnelles; veiller à en faire un artisan de mérite; s’enquérir de ses
besoins, de ses aspirations; l’aider dans ses jours difficiles; compatir à son labeur et à ses souffrances;
aimer l’ouvrier, en être aimé. Pour un patron, quel rêve ! ” (1)
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(1) 1893 / Conférence donnée à l’Association des patrons chrétiens de Charleroi
“ Devoir du patron dans la question du salaire ”
(2) XXs / paternalism - 1881- “ Doctrine selon laquelle les rapports entre patrons et ouvriers doivent être régis par les règles de
vie familiale caractérisées par l’affection réciproque, l’autorité et le respect. ”
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