versification latine - Biblioteca Nacional de Colombia
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©<strong>Biblioteca</strong> <strong>Nacional</strong> <strong>de</strong> <strong>Colombia</strong>
PRÉFACE<br />
DE LA PREMIÈRE ËDITION<br />
(1826).<br />
Les Prosodies adoptées dans nos colléges sont <strong>de</strong>s ouvrages élémentaires<br />
plus ou moins complets, plus ou moins méthodiques;<br />
mais enfin ce ne sonL que <strong>de</strong>s ouvrages élémentaires. Leur objet<br />
unique est d'opprendre la quantité <strong>de</strong>s syllabes et la structure du<br />
vers. Enes ajoutent à ces règles quelques mots 5111' la ca<strong>de</strong>nce, sur<br />
les coupes du vers hexamètre, sur l'harmonie imitative et sur les<br />
licences; mais, comme elles ne font qu'efneurer ces matières, elles<br />
<strong>de</strong>viennent bientôt superflues. Dès la Troisième elles sont abandonnées,<br />
et il faut que les maltres par leurs leçons, les élèves par l'étu<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>s poëtes , relilplissent cette lacune.<br />
RoUin, le premier, sentit que cette partie toute technique <strong>de</strong>s<br />
Métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>versification</strong> avait besoin d'un complément, et il a<br />
laissé quelques pages où il pénètre avec sagacité jusqu'aux plus secrètes<br />
intentions <strong>de</strong> la poésie, L'auteur du Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Humanistes,<br />
s'emparant <strong>de</strong> ces esquisses, les a transportées da os un cadre plus<br />
étendu; et son livre, malgré quelques défauts dont la prolixité cst<br />
le plus saillant, offre beaucoup <strong>de</strong> reillarques judicieuses, et mérite<br />
d'être consulté, Un céièbre professeur <strong>de</strong> l'Académie <strong>de</strong> Paris 1 publia,<br />
il y a quelques années, le 1J1'anue! du Ver sificateuT latin,<br />
ou Supple'ment au petit Trailé <strong>de</strong> Bollin SUT la l'ersification<br />
<strong>latine</strong>, On pouvait espérer que ce travail ne laisserait rien à désirer:<br />
il sortait <strong>de</strong> mains habiles; le poëte avait précédé le critique,<br />
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."
Yj<br />
1'1lEF.\Cr, ,<br />
et <strong>de</strong>s ,'ers connus <strong>de</strong> tous les littérateurs déposaient en raveur du<br />
nouvel ouvrage, Cependant J'auleur a-t-il bien recueilli tous scs<br />
souvenirs sur celte matière? Nous croyons qu'il est loin <strong>de</strong> l'avoir<br />
épuisée; et, après avoir rendu hommage à lu justesse <strong>de</strong>s aperçus<br />
qu'il a jetés dans ce peu <strong>de</strong> pages, nous tenterons d'en offrir <strong>de</strong><br />
nouv ea ux, Nous nous adressolls aux élè"es qui connaissent les règles<br />
<strong>de</strong> la quantité et le mécanisme du l'ers hexamètre, et nous avons<br />
pour but <strong>de</strong> rechercher les effets que produit la poésie <strong>latine</strong>, pour<br />
les désigner à leur admiration, et <strong>de</strong> les initier dans le secret <strong>de</strong>s<br />
ressources poétiques , afin <strong>de</strong> faciliter leur travail.<br />
Ici une objection se présente, un scrupule nous arrête, La versifica<br />
tion <strong>latine</strong> mérite-t-elle ces laborieuses recherches et ces offirieuses<br />
recommandations? Le temps que l'on consacre à en poser<br />
les préceptes n'est-il pas perdu, aussi bien que celui que l'on passe<br />
à les appliquer? Tel est, je le sais, l'avis <strong>de</strong> plus d'un détracteur ;<br />
CHI' la poésie <strong>latine</strong> es t en butte à <strong>de</strong> nombreuses attaques, et notre<br />
siètle surtout lui prodigue un superbe mépris, L' industrie, le commerce,<br />
les sciences exactes ont pris <strong>de</strong> nos jours un développement<br />
qui frappe tous les yeux, L'élan <strong>de</strong>s esprits vers ces objets a<br />
dû les babituer aux résultats matériellement utiles, aux solutions<br />
rigoureuses, à ce qu'on appelle le positif, et les rendre peu sensibles<br />
aux arts d'imagination , dont l'utilité, tout intellectuelle,<br />
est moins facile à apprécier, et n'est pas soumise au calcul. Ils n'y<br />
"oient qu'un jeu d'esprit frivole , qui pouvait séduire quand les sociétés,<br />
moins civilisées, étaient occupées <strong>de</strong> moindres intérêts ,<br />
mais dont un siècle <strong>de</strong> lumières doit faire justice, et que dédaigneront<br />
également le l'rai philosophe et le l'rai citoyen, Le rêve <strong>de</strong><br />
platon, sous ce rapport du moins, n'est pas loin <strong>de</strong> se réaliser; Ics<br />
poëtes seront chassés <strong>de</strong> nos sages gouvernements:<br />
Ignavum fucos pecus a prresepibus arcenl.<br />
Toutefois n'exagérons point. Si rami <strong>de</strong>s arts est soul'cnt froissé<br />
par les sèches doctrines <strong>de</strong> l' indush'ialisme > il faut avouer que ces<br />
idées n'ont pas encore tout envahi, et que la réforme n'est pas encore<br />
opérée, II est <strong>de</strong>s gens qui sentent et honorent les beaux-art. ,<br />
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'liij<br />
l>flÉFACE.<br />
travail. quols fruiJs üs en out recueillis, et ils sont tres-conséquents<br />
en voulant le proscrire. Envisageons-le sous un point <strong>de</strong><br />
vue plus élevé, et essayons <strong>de</strong> le défendre contre les dédains <strong>de</strong> la<br />
paresse et l'erreur du préj ugé.<br />
Le but <strong>de</strong> l'instruction est <strong>de</strong> développer l'esprit. L'étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
langues est très-propre à remplir- cet objet. Les langues anciennes<br />
ont été cboisies <strong>de</strong> préférence, tant à cause <strong>de</strong> la beauté qui les recomman<strong>de</strong><br />
qu'à cause <strong>de</strong>s nombreux trésors dont elles sont dépositaires.<br />
L'enfant qui commence cette étu<strong>de</strong> a <strong>de</strong>s mots, <strong>de</strong>s règles il<br />
apprendre; sa mémoire surtout est mise en jeu. Peu à peu son jugement<br />
se forme; on lui donne à traduire d'une langue dans un e<br />
autre. Ce travail exige <strong>de</strong> lui une parfaite intelligence du texte; il<br />
s'habitue à se rendre compte <strong>de</strong>s idées d'un auteur; le besoin d'analysel'<br />
pénètre insensiblement dans cette jeune tête. Jusqu'ici il<br />
s'agit <strong>de</strong> comprendre, et non <strong>de</strong> produire: <strong>de</strong>s pensées étrangères<br />
doivent être reRdues avec exactitu<strong>de</strong>; y ajouter, ce serait manque\'<br />
au<strong>de</strong>voir d'intcrprète. Ce n'est qu'en Secon<strong>de</strong>, et surtout en Rhétorique,<br />
qu'on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux élèl'es, non plus seulement l' œune <strong>de</strong><br />
leur jugement, mais r œuvre <strong>de</strong> leur imagination. La <strong>versification</strong><br />
<strong>latine</strong>, qui les prépare à ce travail, sert <strong>de</strong> lien, d'intermédiaire<br />
entre la Rhétorique et les classes in férieures. Les sujets qu'ils ont à<br />
trailer provoquent leur activité: ils s'interrogent, pour trouver en<br />
eux-mêmes ce que la matière a omis à <strong>de</strong>ssein. Une épithète heureuse,<br />
une phrase inci<strong>de</strong>nte, un court développement, tel est d'abord<br />
le résultat <strong>de</strong> leurs mo<strong>de</strong>stes décou"ertes; mais dt!jà leurs essais<br />
portent l'empreinte <strong>de</strong> leur pensée. plus tard ils trouveront <strong>de</strong>s<br />
développements plus étendus; ils ajouteront <strong>de</strong> nouvelles idées; on<br />
re,connaîtra que les données <strong>de</strong> la matière ont passé par une intel.<br />
ligence : ici un trait <strong>de</strong> sensibilité, là <strong>de</strong>s détails <strong>de</strong>scriptifs en<br />
réyèleront les traces. Qu'il est intéressant <strong>de</strong> voir ainsi la pensée<br />
comme jaillir d'un esprit; <strong>de</strong> le voir <strong>de</strong>l-enir créateur, c'est-à-dire<br />
s'élever à toute la dignité <strong>de</strong> sa nature! Non, il n'est pas perdu<br />
pour lui, ce travail par lequel il pénètre les sentiments <strong>de</strong> l'homme.<br />
ou se transporte <strong>de</strong>vant une scène <strong>de</strong> la natuTe; il n'est pas perdu<br />
pour lui, ce travail paT lequel il chcrche la forme qu'il donnera â<br />
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XIV<br />
PRÉFACE.<br />
Iicatesse et même le scrupule. On trouvera peut-être que j'ai quelquefois<br />
prodigué les exemples: il m'a bien fallu appuyer certains<br />
principes que je ne voyais nune part, ou qui étaient en contradiction<br />
avec quelques règles que je trouvais établies; ensuite, je<br />
pense que <strong>de</strong>s exemples frappent bien plus qu'un précepte ari<strong>de</strong>, et<br />
qu'on les retient souvent, quand le précepte est oublié. J'ajouterai<br />
que les règles <strong>de</strong> la poésie, ainsi que cenes <strong>de</strong>s autres arts, ne sont<br />
pas susceptibles d'une rigueur mathématique. 111" adressant à <strong>de</strong>s<br />
jeunes gens déjà avancés dans leurs étu<strong>de</strong>s, je n'ai pu affirmer<br />
dogmatiquement certains préceptes, dont la lecture <strong>de</strong>s poëtes aurait<br />
fait reconnaltre lïmpru<strong>de</strong>nte générclité. Il a donc fallu comme<br />
transiger avec le précepte général, et produire plusieurs exemples<br />
dans lesquels il avait été violé, pour que J'on reconnût à quelles<br />
conditions il peut l'être. On verra que certains développements,<br />
qui font diversion à la sécheresse <strong>de</strong>s règles générales et sont <strong>de</strong>stinés<br />
à former le goüt, n'ont besoill que d·une lecture attentive, et<br />
on les distinguera <strong>de</strong> la partie didactique 1 qui doit être apprise par<br />
cœur.<br />
Sans avoir la moindre prétention au système, je crains <strong>de</strong> contrarier<br />
quelquefois <strong>de</strong>s idées reçues. Je suis prêt à me rendre à<br />
toutes les remarques dont on me fera sentir la justesse; je recevra:<br />
avec soumission et reconnaissance les lumières qu'on voudra bien<br />
me communiquer. Heureux si cet ouvrage, tel quïl est, peut faciliter<br />
le travail <strong>de</strong>s élhes, et alléger la tâche <strong>de</strong>s professeurs! heureux<br />
si quelques sulIrages sont pour moi la récompense d'une<br />
jeunesse vouée sans réserve à Iïnstruction publique!<br />
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CHAPITRE 111.<br />
CHANGHIENTS DU SUnSTANTII'.<br />
1° On peut remplacer un nom pluriel par 110 nom<br />
collectif au singulier. Exemple:<br />
Armorum sonitum toto Germania cœlo<br />
Audiit. Y.<br />
au lieu <strong>de</strong> Germani.<br />
Nobili/as eum plcbe peril. L.<br />
au lieu <strong>de</strong> nobiles.<br />
Servitus obnoxia ...<br />
AfTectus proprios in fabellas translulit. PIl.<br />
au lieu <strong>de</strong> set·vi.<br />
2° Les poëtes mettent élégamment un adjectir ù la<br />
place d'un substantif au génitif:<br />
Pacatumque reget patriis virtutibus orbem. v.<br />
au lieu <strong>de</strong> patris.<br />
Casus abies visura marinas. V.<br />
au lieu <strong>de</strong> maris.<br />
Addit el Herculeos arcus, hastamque MincrvlE. J.<br />
au lieu <strong>de</strong> Herculi:;.<br />
Qualem virgineo <strong>de</strong>messum pollice norem ... v .<br />
. au lieu <strong>de</strong> vù·yinis.<br />
3° Ils prennent la cause pour l'efl"et:<br />
Cujus ab alloquiis anima hœc morilmnda revilit ,<br />
ut vigil infusA palla<strong>de</strong> flamma solet. O ..<br />
c'est-à-dire oleo.<br />
Bacchus amal colles, Aquilonem et frigora ta:li. \'.<br />
c'est-à-dire vitis.<br />
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12<br />
Cll.Al'1TI\E ur.<br />
12° Un subsLantif <strong>de</strong> qualité se change quelquefois<br />
cn un substantif <strong>de</strong> personne, <strong>de</strong> cetta maniûre :<br />
Parenl promissis, dissimulantque <strong>de</strong>os. u.<br />
Vultuque <strong>de</strong>am confessa, rt'cessit. Y.<br />
c'est-à-dire divinitatem.<br />
Mentirisjuvenem tinctis, Lentine ,.capillis. M.<br />
c'est-à-dire j7lVentam.<br />
!!Idue mente patrem. CL.<br />
c'est-à-dire paternos sensus.<br />
ncdidicit jam pace ducem. L.<br />
c'est-à-dire ducis munia.<br />
13° Quelquefois encore on peut remplacer un substantif<br />
par un verbe à l'infinitif ou au gérondif:<br />
Au lieu <strong>de</strong><br />
Lacrimarum pu<strong>de</strong>t.<br />
Mortem oplare. . .<br />
on pourra dlre<br />
flere pu<strong>de</strong>t.<br />
velle morio<br />
JJlemoriam horreo. . meminisse borreL<br />
Dulces querelœ (sunt). . dulce queri.<br />
Dignus vitâ. . . . . . • .. digous vivere ou qui vivat.<br />
A1l1ieu <strong>de</strong> me<strong>de</strong>ndi, qu'on voit dans le vers sUIvant:<br />
Beire potestates berbarum, usumque me<strong>de</strong>ndi. Y.<br />
une matière <strong>de</strong> vers pourrait donner medicinœ.<br />
Forsilan et, pingues hortos quœ cura colendi<br />
OrnareL, canerem. Y.<br />
culturœ.<br />
Quidquid solamen humandi est. Y.<br />
sepulturœ.<br />
Superanda ornois Cortuna (erendo est. v.<br />
patientiâ.<br />
Sic quisque pavendo<br />
Dat vires ramie. L.<br />
metu.<br />
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ClliNGEMENTS DU SUBST.lNTlf.<br />
14° Enfin le substantif se remplace par un verbe à<br />
l'indicatif> <strong>de</strong> cette manière:<br />
Ut sibi commiltal quidquid dolet. O.<br />
au lieu <strong>de</strong> dolores.<br />
lias odisse viros, atque omnia ferre sub auras,<br />
'Si qua tegunt. V.<br />
au lieu <strong>de</strong> arcana.<br />
" ,<br />
, .<br />
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13
CHAPITRE V.<br />
CHANGEMENTS DE L'ADJECTIF.<br />
1° L'adjectif peut se changer en un substantif au<br />
génitif:<br />
Jarnpridcm cœU Dobis le regia , Cœsar ,<br />
Invi<strong>de</strong>t. V.<br />
au lieu <strong>de</strong> cœlestis.<br />
Depulsus ab ubere matris. V.<br />
au lieu <strong>de</strong> matemo.<br />
Mais en générall'adjeclif doit être préruré:<br />
iJ'Iatcrnâ redimitus tempora lauro. V.<br />
1I1aternas agooscit aves. V.<br />
2° Les poëles mettent quelquefois au neutre l'adjectif<br />
attribut se rapportant à un substantif masculin ou<br />
féminin:<br />
Triste lupus stabulis, maluris frugibus irnbres. V.<br />
Du/ce salis humor. V.<br />
Triste rigor nimius? Torquati <strong>de</strong>spue mores. CL.<br />
Dulcis amor re"oni blandumque poteslas. ST.<br />
3° On trouve souvent une autre construction, empruntée<br />
aux Grecs COJ;llme la précé<strong>de</strong>nte. Au lieu <strong>de</strong><br />
faire accor<strong>de</strong>r l'adjectif avec le nom, les poëtes<br />
l'emploient substantivement, et le mettent au pluriel<br />
neutre; le nom passe au génitif :<br />
Obse<strong>de</strong>re alii tclis angusta viarum. v.<br />
pour angustas vias.<br />
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CBANGEME:'lTS DU VEllBE.<br />
Gravioraque lcla mcreri<br />
Servalus Cayaneus. ST.<br />
6° Ils mettent l'infinitif au lieu du supin. Ainsi Horace<br />
a dit: Niveus vi<strong>de</strong>ri.<br />
Roma capi racilis. Luc.<br />
EL, dcsit si Jarga Ceres, lune horrida cerni,<br />
Fœdaquc contingi maculato carpere morsu. ST.<br />
Ibat et hirsutas ille vi<strong>de</strong>re feras. PuoP.<br />
Non nos aut ferro Libycos populare penates<br />
Venimus. V.<br />
7° Ils emploient indifféremment le subjonctif ou<br />
l'inllnilif après les verbes timere> vetare> sua<strong>de</strong>,.e><br />
hortari> jubere> necesse est> oportet> et quelques<br />
autres:<br />
Quid trepidas et adire limes? O.<br />
U!teriùs tentare veto. V_<br />
Juturnam misero , fateor, succurrere fratri (suasi). V.<br />
Hortatur Cltherea lagant. CL.<br />
IIorlnmur tari quo sanguine cretus. Y.<br />
Seu Troas fierijuheas. Teucrosque vocari. V.<br />
Magnâ ditione jubelo<br />
Cn.rthago premat Ausoniam. V.<br />
Il. TEMPS.<br />
1 ° Rien n'est plus fréquent, en prose comme en<br />
poésie, que <strong>de</strong> remplacer dans un récit le parfait par<br />
le présent. Cette tournure donne <strong>de</strong> la vivacité au discours:<br />
ce que l'écrivain raconte semble se reproduire<br />
à nos yeux; nous assistons à la scène qu'il décri t.<br />
2° Le parfait peut remplacer à son tour le présent.<br />
Lorsqu'on veut donner une idée frappante <strong>de</strong> la rapi-<br />
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23
24<br />
CHAPITRE VI.<br />
dité d'nne actIOn, on la représente, non plus comme<br />
se faisant actuellement, mais comme déjà faite:<br />
Terra tremit, {tlgère ferre, et mortalia corda<br />
per gentes humilis slravil pavor. V.<br />
Et pavidœ matres pressere ad pectora natos. V.<br />
Tum ycro incumbunt : urgcl prreseDtia Turni,<br />
Atque ornois facibus pubes accingi tur atris ;<br />
Diripuere focos. v.<br />
Même sans vouloir produire cet effet, ct en parlant<br />
d'une chose habituelle, vraie dans tous les temps, les<br />
poëtes mettent quelquefois le parfait au lieu du présent;<br />
ils imitent l'aoriste <strong>de</strong>s Grecs.<br />
Dicendum et qure sint duris messoribus arma,<br />
Quîs SiDè nec potuere seri ncc surgere messes. V.<br />
Dree ea<strong>de</strong>m argenli rivos rerisque melalla<br />
Ostendit vcnis, alque auro plurima flux;t. v.<br />
Non reris acervus el auri<br />
b:groto domini <strong>de</strong>duxit corpore febrrn:. 11.<br />
3° Il est très-commun <strong>de</strong> voir le parfait <strong>de</strong> l'infinitif<br />
employé pour le présent:<br />
Baccbatur vates, magnum si peclore possit<br />
Excussisse <strong>de</strong>um. v.<br />
Si curaI cor speClanlis tetigisse querclà. U.<br />
Prrecipilanlque suos luctus, neuterque rece<strong>de</strong>ns<br />
SustinuiL dixisse : Yale. L.<br />
Membraque qui ferro gau<strong>de</strong>L pinzisse Gelonus. CL.<br />
Non ultrà patiens Fabius texisse dolorem. SIL.<br />
ri semblerait qu'alors le poëte, fidèle au temps qu'il<br />
adopte, ne <strong>de</strong>vrait point en changer: cependant les<br />
exemples <strong>de</strong> parfaits mêlés avec <strong>de</strong>s présents dans ce<br />
cas sont si fréquents, qu'on ne saurait en blâmer le<br />
mélange:<br />
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· .<br />
CHANGEMENTS DU VERBE. 27<br />
pourvu que le sujet auquel on fuit rapporter le verbe<br />
soit au singulier;<br />
Et genus, et virlus 1 nisi cum re, vilior algâ est. Il.<br />
Si forlunalum species, et gratia prœstat. H.<br />
Crerulere cui terga notre, maculosus et auro<br />
Squamam incen<strong>de</strong>bat fulgor. v.<br />
Est Amathus, est celsa mihi Paphos atque Cytbcra ,<br />
Idalireque domus. v.<br />
Quemjuvat clamor, gale
CHAPITRE VItI.<br />
CHANGEMENTS DES CONJOiiCTlONS.<br />
Nous ne pouvons passer en revue toutes les conjooc··<br />
tions; mais nous présenterons quelques remarques<br />
sur les plus usitées.<br />
1 0 Et> ae> atq1tc, que. - Ces conjonctions sont<br />
souvent répétées d'nne manièl'e toule poétique,<br />
comme dans les exemples sui\'ants :<br />
Regcrnque <strong>de</strong>dit. qui fϝerc certo<br />
El prerncre et laxas sdrct dare jussus hnhcnas. V.<br />
o qui res horninumque dct1mquD<br />
JElcrnis regis impcriis. Y.<br />
Lilloraqtte et yaeuos scnsit sinè remige portus. V.<br />
Alque dcos ntque aSira yocat erudcliù mater. Y.<br />
Voici plusieurs <strong>de</strong> leurs synonymés \es plus fréquents:<br />
Nec non galhancos sua<strong>de</strong>ho illcen<strong>de</strong>re odores. Y.<br />
Nec non et Teueri sociâ simul urhe fruuntur . Y.<br />
Cum stabulis armenta trahit. Y.<br />
Armenire tigres. iracundique leones ,<br />
Cumque lupis ursi. O.<br />
Et Melus , et malesuada Fames. ue turpis Egc;las,<br />
Terribiles visu formre, Lelumque. Labosque,<br />
Tum consanguincus Leti Sopor. V.<br />
Mactal leclas <strong>de</strong> more hi<strong>de</strong>nles<br />
Evandrus pari ter, pm·iter Trojana juventus. Y.<br />
C.orpusque simul, simul elue crimen. O.<br />
On trouve très-souvent dans les poëles aut ou ve<br />
signiBant et:<br />
Tectusque recusat<br />
Pra<strong>de</strong>re voce suà quemquam , aHl opponere morti. Y.<br />
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CHAPlTE.E IX.<br />
CHANGEMENTS DE TOURNURE.<br />
Il ne suffit pas <strong>de</strong> savoir ainsi changer un mot <strong>de</strong> la<br />
phrase, il faut encore pouvoir au besoin substituer<br />
une tournure à une autre. Rien ne facilite plus la <strong>versification</strong><br />
que la connaissance <strong>de</strong> ces transformations<br />
diverses.<br />
1 0 Le vocatif peut remplacer différents cas:<br />
Nox ubi jam media est. somnoque silcntia prmbet •<br />
El canis. ct variœ conlicuislis aves. O.<br />
au lieu <strong>de</strong> aves au nominatif 1.<br />
Terretur miDimo penDre slridore columba,<br />
UDguibus, accipiter, saucin racta luis. O.<br />
au lieu <strong>de</strong> unguibus accipitris saucia.<br />
Dextra sed Ausonio manus est subjecta peloro ,<br />
Lœvn, Pachyne, libi. O.<br />
Lœva Pachyno.<br />
Et te, Catilina, minaci<br />
PCDdcntem scopulo. v.<br />
Et Catilinam.<br />
Il ne faut pas abuser <strong>de</strong> ces apostropnes, comme le<br />
fait Lucain, qui met à chaque page: Roma, Fortuna,<br />
Magne, clc .<br />
. 2 0<br />
Supposons qu'on ait dans une matière; Quis te,<br />
Palinure, <strong>de</strong>us nobis eripuit? On chercherait peut-<br />
1 Lt!' quantité est la même' mais on voit que le verbe a subi un ebang c -<br />
men lmpOnam. '<br />
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32<br />
CHAPITRE IX.<br />
être longtemps) avant <strong>de</strong> trouver cette substitutJOIl si<br />
simple:<br />
Quis te, Palinure, <strong>de</strong>OTum<br />
Eripuit nobis ? v.<br />
Voici d'autres exemples:<br />
Alnean hominwn quisquam divlÎmquc subegit<br />
Della sequi? V.<br />
Namque alial, nullis hominum cogentibus , ipsœ<br />
Sponte suâ venient. V.<br />
3° On a fréquemment besoin <strong>de</strong> changer un actif<br />
en passif, et vice vel'sâ. Ainsi au lieu <strong>de</strong> , Eamque<br />
cœcus ignis carpit, on met:<br />
Et cœco carpitur igni. V.<br />
La quantité <strong>de</strong> certains moti> peut embarrasser. Par<br />
exemple Cynthiam, cOllsciâ, ne peuvent guère entrer<br />
dans un vers hexamètre 1. En changeant l'actif' en<br />
passif, ou le passif en actif, les mêmes mots p.ourrou t<br />
être admis. Au lieu <strong>de</strong>, Non ulhtm damnum Cynthiam<br />
gl'aviùs tentat, on aura:<br />
Non ullo graviùs tentatur Cynthia damno. Pnop.<br />
Souvent il raut avoir recours à un verbe qui régi t un<br />
autre cas que celui <strong>de</strong> la matière. Ainsi, au lieu <strong>de</strong> ,<br />
Habeo fis tu lam , on dira:<br />
Est mihi disparibus septem compacta cicutis<br />
FistuZa. Y.<br />
Au lieu <strong>de</strong>, L enlam salicem superat pallens oliva :<br />
Lenla saUx quaolùm pallenti cedit olivœ. V.<br />
1 A la rigueur ces mOLS pourraient y ë ,'e admis 11 l'ai<strong>de</strong> d'une élisiùn;<br />
mais l'emploi cn eSllri's·rnro, el,l fauL re,·iter.<br />
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CHANGEMENTS DE TOURNURE.<br />
4° Quelquefois on changera un verbe en un sub<br />
&lantif:<br />
Vos ducebam <strong>de</strong>viendra:<br />
Dua; ego vester aram. V.<br />
Non diva te genuit :<br />
Non tihi diva parens. V.<br />
5° Le partiei pe, après vi<strong>de</strong>re, audil'e, peu t se remplacer<br />
par l'infinitif;<br />
Te quoque magllanimœ vi<strong>de</strong>runt, Ismare, gentes<br />
Vulocra dirigere, et caJamos armare vencno. V.<br />
Demcns! nce Zcpbyros audis .pirare secundos ! Y.<br />
Le vers suivant sc prête au même changement:<br />
Gau<strong>de</strong>lque comantes<br />
Ea;cutiens cervice toros. v.<br />
On serait libre <strong>de</strong> mettre excutere ou excussisse J si la<br />
quantité le <strong>de</strong>mandait.<br />
6° On peut souvent changer le participe présent<br />
actif en un substantif:<br />
Geminœ quum fortè coJumbœ<br />
Ipsa sub ora viri cœlo venêre volantes. V.<br />
A la place <strong>de</strong> volantes, on pounait mettre volatil J<br />
mais il serait bon alors d'ajouter une épithète au substan<br />
tif:<br />
Trepido petit arva volatu. O.<br />
Pulchroque secat Galatea l'lata lu<br />
Flumco. CoL.<br />
Au lieu <strong>de</strong> turpiter formidantes J on Ji l élégalllment:<br />
Pars ingentcm {ormidine tl/rpi<br />
Sc.1ndunl rursus equum. V.<br />
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33
DES PÉRIPHRASES. 39<br />
2° La périph1'ase supprime entièrement le nom <strong>de</strong>s<br />
objets, et les désigne en rappelant leur famille, leur<br />
patrie, leur nature, etc. :<br />
Hrec ait, et il'Iaiâ gcnitum <strong>de</strong>mittit ab alto. v.<br />
au lieu <strong>de</strong> 1I1ercurùtm.<br />
Un us Pellœo juveni non sufficit orbis. loy.<br />
au lieu <strong>de</strong> Alexandro.<br />
Qualem ministrum fulminis alitem ... B.<br />
au lieu <strong>de</strong> aquilam.<br />
lam maris immensi prolem et genus omne natantllm<br />
Proluit ( Iluctus). V.<br />
au lieu <strong>de</strong> pisces.<br />
3° Si l'on veut développer un verbe au moyen<br />
d'une périph1'ase, on peut employer le substantif qui<br />
correspond à ce verbe. Ainsi, au lieu <strong>de</strong> quiescere ,<br />
on dira:<br />
Oeulos ubi languida pressit<br />
Nocte quies. V.<br />
Corpus mandare quieti. Ln.<br />
Procuhuit, seramquc <strong>de</strong>dit per membra quietem. V.<br />
Placidâ laxârant membra quiete. V.<br />
4° Ou bien Oil remplace le verbe par une courte<br />
<strong>de</strong>scription. Au lieu <strong>de</strong> navigare, on dit:<br />
Vela dare, {aecre, etc.<br />
Fluelus, œquor, etc., sein<strong>de</strong>re, tranare, metiri, ctc.<br />
Au lieu <strong>de</strong> arare :<br />
Terram exercere , domare., etc.<br />
Glebas inuertere , convellere, etc.<br />
Telluri infin<strong>de</strong>re !Uleos.<br />
Ces <strong>de</strong>ux manières sont souvent réunies:<br />
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DfS Él'll'BÈTES.<br />
avoir été créée pour la circonstance. L'épithète <strong>de</strong> cornipes<br />
ajoutée à equus n'a certainement rien <strong>de</strong> bien<br />
remarquable: Virgile a su lui donner un grand sens,<br />
lorsqu'il parle <strong>de</strong> Salmonée imitant le bruit <strong>de</strong> la<br />
foudre:<br />
Demens! qui nimbos ct non imilabile Culmen<br />
.!Ere ct cornipedum pulsu simulàrat equorum !<br />
L'épithète <strong>de</strong> Neptunia donnée à Troja n'est qu'une<br />
épithète historique j mais quelle valeur elle acquiert<br />
dans ce vers du même poële, où la ruine <strong>de</strong> Troie<br />
contraste d'une manière si frappante avec sa céleste<br />
origine!<br />
Ornois huma fumal Neptunia Troja.<br />
ÉPITHÈTES DE CARACTÈRE. - Elles expriment la qualité<br />
dominante d'un homme ou d'une chose, considérés<br />
hors <strong>de</strong> leur espèce. Ces épithètes sont déjà meilleures<br />
que les précé<strong>de</strong>ntes, parce qu'elles sont plus<br />
individuelles; elles n'appartiennent pas nécessairement<br />
à toute une classe, mais clles en caractérisent certains<br />
membres:<br />
Sum pius .!Encas, famà super rethera Dolus. V.<br />
Transadigit cos las , et pcctora candida rumpit. v.<br />
Énée couronne sa tête <strong>de</strong> myrte; il est fils <strong>de</strong><br />
Vénus:<br />
Sic fatus, velat maternâ tempora llluro. V.<br />
ÉPITHÈTES DE CIRCONSTANCE. - Les épithètes que<br />
l'on doit surtout rechercher sont les épithètes <strong>de</strong><br />
circonstance. Elles ne sont pas l'attrihut inhérent<br />
d'une classe ni même d'un individu; elles ne conviennent<br />
à Un individu que dans un cas donllé : il s'en-<br />
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45
DES ÉPll'llÈTES.<br />
IV. DE LA PLACE DES EPITRÈTES.<br />
L'épithète doit se placer avant le substantif, et, autant<br />
que possible, en être séparée:<br />
Tityre, tu patulœ recubans sub tegmine fagi ,<br />
Silvestrem tenui musam meditaris avenâ ;<br />
Nos patriœ fines et dulGia linquimus arva. V.<br />
1 re Remarque. C'est surtout lorsque l'épithète aurait<br />
la même consonnance, qu'il faut l'éloigner dl:!<br />
substantif. Ainsi l'oreille n'aime pas:<br />
Quis tamenexiguos elegos cmiscrit auctor. B.<br />
Banciàum ap .... m antiqui laudabÏlnt. Il.<br />
2' Remarque. Mais l'adjectif et le substantif peuvent<br />
se suivre immédiatement quand l'un et l'autre<br />
sont terminés en a :<br />
Transadigit costas, et peetora candida rumpit. v.<br />
Subit aspera silva. V.<br />
3' Remarque. TI est permis <strong>de</strong> rapprocher l'épithète<br />
du substantif si leurs déswences diffèrent:<br />
Immortalejecur ton<strong>de</strong>ns. V.<br />
Pallentes violas 1 et summa papavera carpens. V.<br />
Hoc juvenem egregiumprœstanti munere donat. v.<br />
4" Remarque. Quelquefois le goût lui-même exige<br />
. :\ Ceci ne COntredit pas la règle précé<strong>de</strong>mment établie. Si dans ce vers<br />
11 n'y avaIt pas un second régime, et rumma papavera, on mettrlrll Pallenles<br />
carpens vIolas, plutôt que Palle ni •• violas carpons. Nous voyon.<br />
dans le mêmo pocte :<br />
. Non corporc nolœ<br />
Sufficmntvir .. , Dec vox aut verba sequnntur.<br />
et DOD pas: "o/œ Vire. sufficiunt.<br />
Maria antè cxurere TUJ'no<br />
Quàrn sacras dabitur pi"' ... Y.<br />
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51
Ince-nsœ. \'. ,<br />
DES ÉPITnÈTES. 53<br />
Succurritis urbi<br />
dit Énée à ses compagnons, qui préten<strong>de</strong>nt sauver<br />
Troie; et cet adjectif) d'une effrayante énergie, a dû<br />
porter le découragement dans leur âme.<br />
On frémit comme si i'on voyait la main gigantesque<br />
<strong>de</strong> Polyphême , en lisant ce vers <strong>de</strong> Virgile:<br />
Vidi egomet, duo <strong>de</strong> numero quum corpora nosLro ,<br />
Prensa manu magnâ, medio resupinus in antro ,<br />
Frangeret ad saxum.<br />
"<br />
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CHAPITRE XII.<br />
DES SOURCES DE DÉVELOPPEMENTS.<br />
La pé1'iphrase et l'épithète offrent déjà le moyen<br />
d'enrichir une matière. Nous parcourrons successiyement<br />
toutes les autres sources <strong>de</strong> développements, et<br />
nous arriverons par <strong>de</strong>grés jusqu'aux plus fécon<strong>de</strong>s.<br />
1 0 RtpÉTITION. - Elle consiste à reproduire un mot<br />
sur lequel on veut attirer l'attention:<br />
Sequitur pulcherrimus Astur ,<br />
.As/ur equo fi<strong>de</strong>ns. V.<br />
Vincis me miserum, vincis, Datura, pareDtem. ST.<br />
Dat populus, dat gratus equcs, dat tura senatus. 1\1.<br />
Terra Degat se<strong>de</strong>m , se<strong>de</strong>m negat ossibus unda. O.<br />
2 0 EXPRESSION REDOUBLÉE.- Non contente <strong>de</strong> se servir<br />
d'un mot pour exprimer une idée, la poésie en emploie<br />
souvent <strong>de</strong>ux qui ont le même sens:<br />
Ex quo re!liquias dil'inique ossa parentis<br />
CODdidimus terrà. V.<br />
l'iunc ultro ad cineres ipsius et ossa parentis ...<br />
Adsumus. v.<br />
Sed non idcirco flammœ atque incendia vires<br />
Indomitas posuere. V.<br />
Quum vitam in sill'is , inter <strong>de</strong>serta ferarulD<br />
bistra domosque traho. V.<br />
Littora tum patrire lacrimans por/usque relinquo. v.<br />
Si les <strong>de</strong>ux substantifs ont chacun Ulle épithète, le<br />
redoublement <strong>de</strong>vient encore plus poétique:<br />
vivo teDtat prrevcl'tere amore<br />
lam pri<strong>de</strong>m resi<strong>de</strong>s animos <strong>de</strong>suetaque corda. V.<br />
Errantesque <strong>de</strong>os agitataque n1.lmina Trojre. V.<br />
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DES sounCES DE- DÉVELOPPEUENTS. 55<br />
Threïciâ fretus citharâ fidibusque canoris. V.<br />
ut notœ fulsere aquilœ Romanaque signa. L.<br />
Au lieu <strong>de</strong> mettre <strong>de</strong>ux substantifs synonymes, souvent<br />
les poëtes emploient d'abord une expression générale,<br />
puis une autre dont le sens est plus restreint.<br />
et qui précise et éclaircit la première:<br />
Arentem in silvam , et virgulta sonantia lawro. V.<br />
Sanguine placâstis ventos et virgine cœsâ,<br />
Quum primùm Iliacas, Danai, venistis ad oras;<br />
Sanguine qurerendi reditus, animâque litandum<br />
Argolicâ. Y.<br />
IlIa fugâ sil vas saltusque peragrat<br />
Dictœos. Y.<br />
3° ApPOSITION. - L'apposition est un substantif qui<br />
sert d'attribut à un autre substantif :<br />
Elfodiuntur opes, irritamenta malorum. O.<br />
Nec tamen interea l'aucre, tua cura, palumbes.<br />
Nec gemere aeriâ cessabit turtur ab ulmo. Y.<br />
Et geminas, causam lacrimis , sacraverat aras. Y.<br />
Atque hic ingentem comitum affiuxisse novorum<br />
lnvenio admirans numerum, matresque Yirosque,<br />
Collectam exsilio pubem, milerabile vulgus. Y.<br />
On peu joindre l'apposition au substantif principal<br />
. par une conjonction. On dirait, par exemple: Effodiuntur<br />
opes et irritamenta malontm. De même:<br />
protinus Androme<strong>de</strong>n et tanti prremia facli<br />
Indotala rapit. O.<br />
nic malè dcfensus Uammis et dote palernâ<br />
Cacus. O.<br />
He, rates curyas et leti lexite causas. Pnol'.<br />
Quelquefois l'apposition seri d'attribuL, non plus à<br />
un substantif, mais à toute une phrase:<br />
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56<br />
CllAl'lTIlE XlJ.<br />
Primus tmmas invasit agrestes<br />
JEneas, omen pl/gnœ. V.<br />
Vieina coegi<br />
ut quamvis avido parerent arva colouo.<br />
Gratum opus agricolis. V. (?)<br />
4° INCISE. - L'incise n'est pas indispensable dans<br />
la phrase; mais elle la rend plus pleine, en y introduisant<br />
une nouvelle idée:<br />
Nalam perquircre Cadmo<br />
Imperat, et pœnam, si non invenerit, addit<br />
Exsilium, facto pius et seelemtus eo<strong>de</strong>m. O.<br />
Fatale aggressi sacfato avellere templo<br />
Palladium , cœsis summœ eustodibus arcis. V.<br />
Egressi superant fossas, noctisque per Ulnhrum<br />
Castra inimica petunt, mullis tamen antt! (u/uri<br />
Exitio. v.<br />
L'incise est quelquefois une exclc.mation ùe douleur,<br />
d'indignation, <strong>de</strong> surprise, etc. :<br />
Invalidasque tibi ten<strong>de</strong>ns, heu! non tua, palmas. Y .<br />
.Egyptum, viresque Oricntis, et ultima sccum<br />
Baetra vehit, sequiturque (ne{as!) JEgl'ptia conjux. Y.<br />
Ecce autcm gemini a Tenedo, tranquiIla per (llla,<br />
(Horresco re{erens ) immensis orhibus angues<br />
Incumbunt pelago. v.<br />
Dujus apes sumplUm <strong>de</strong>nSifl, mirabile diclU!<br />
Obse<strong>de</strong>re apieem. Y.<br />
D'autres fois, c'est une parenthèse sans momement:<br />
)Encas ( neque enim patrius consistere mentem<br />
Passus amor ) rapidurn ad naves prremittit .\chalen:. Y.<br />
lm pas tus ceu plena Ico per oyilia turbans<br />
(Sua<strong>de</strong>t enim vesana rames ) mandilquc trahitque<br />
Molle pecus. Y.<br />
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66 CHAPITRE XIII.<br />
Cette licence a besoin d'être légitimée par l'exemple<br />
d'un bon auteur. Beaucoup <strong>de</strong> tmèses, employées par<br />
Lucrèce t, étaient déjà tombées en désuétu<strong>de</strong> dans le<br />
siècle d'Auguste:<br />
Exanimalque indignos inque merenles ,<br />
au lieu <strong>de</strong> immerentes.<br />
Languidior porro disjeclis disque sipatis,<br />
au lieu <strong>de</strong> dissipatis.<br />
ELLIPSE. - 1 0 La poésie retranche SOuvent certaines<br />
prépositions que la prose exigerait:<br />
NuIli cerla domus, Iucis habilamus opacis. Y.<br />
sous-entendu.in.<br />
Devenere locos lallos el amœna ,irela. Y.<br />
sous-entendu in.<br />
Iri, <strong>de</strong>cus cœli, quis te mihi nuhibus aclam<br />
Delulit in terras? Y.<br />
sous-entendu <strong>de</strong>.<br />
sous-entendu cum.<br />
Gemitu quum ta lia reddit. Y.<br />
Quas vento accesserit oras. Y.<br />
sous-entendu ad.<br />
2 0 En prose on peut sous-entendre ut après quelques<br />
verbes, tels que oportet, necesse est, vola,<br />
royo, etc. Chez les poëles cette ellipse a lieu avec un<br />
plus grand nombre <strong>de</strong> verbes:<br />
Hortantur socii, Cret am proavosque petamus. Y.<br />
Experiar i tu <strong>de</strong>io<strong>de</strong>jubclo cerlel Amyntas. V.<br />
t ,"oyez la Dute à la lin du ,·olllDle.<br />
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LICEN(,'ES l'OtTIQUES. 67<br />
30 L'ellipse du verbe esse est si fréquente à la troisième<br />
personne du singulier et du pluriel, qu'il est<br />
inutile d'cn donner <strong>de</strong>s exemples. Avec la première<br />
Ct la secon<strong>de</strong> personne, elle est particulière à la<br />
poésie:<br />
Protinus ad Priami se<strong>de</strong>s c1amore vocati. v.<br />
sous-enten<strong>de</strong>z sumus.<br />
Nunc jl1as promite vires,<br />
Nunc animos , quihus in Gretulis Syrtihus usi. v.<br />
sous-enten<strong>de</strong>z estis.<br />
Rine fore duetores, revocato a sanguine Teuer; ,<br />
Pollicitus. v.<br />
sous-enten<strong>de</strong>z eras.<br />
4° Les poètes omettent as'sez souvent le pronom<br />
personnel, sujet d'un infinitif :<br />
Testor in occasu veslro nec tela nec ul1as<br />
Vitavisse vices Danadm. V.<br />
c'est-à-dire me vitavisse.<br />
[nfclix Dido , verus mihi nnntius ergo<br />
veneraI exstinctam. V.<br />
c'est-à-dire te exstinctam.<br />
Spero equidcm mediis, si quid pia nUIDina possunt.<br />
Supplicia hausurum scopulis. v.<br />
c'est-à-dire te hausurum.<br />
Quiane aurilio juvat anlè levatO$? v.<br />
c'est-à-dire' eos levatos.<br />
5° Les prosateurs disent plus volontiers: Rerum<br />
natura, orbis terrarum, aeies oeulorum. Les poëles<br />
suppriment d'ordinaire ces génitifs.<br />
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74<br />
CHAPITRE XlII.<br />
Daret ut catenis<br />
Fatale monstrum. Quœ 1 generosiùs<br />
Perire qurerens, elc.<br />
Quœ ne se rapporte pas à rnonstrum, mais à Cléopâtre,<br />
que ce mol fait entendre.<br />
Raura Parretonio <strong>de</strong>cedunt agmina Nilo,<br />
Quum fera poniL biems. IUœ, clangore fuguci ,<br />
Umbra CreUs arvisque volant. ST.<br />
Illœ ne s'accor<strong>de</strong> avec aucun mot <strong>de</strong> la phrase précé<strong>de</strong>nte,<br />
mais avec grues> sous-entendu, el désigné par<br />
agmina rauca> Nilo.<br />
ule genus antiquum Terral, Titania pub es ,<br />
Fulmine <strong>de</strong>jectl. Y.<br />
Titania pubes équivaut ici à Titanes.<br />
TOURNURE NON SUIVrE. - On trouve <strong>de</strong>s passages<br />
ùans lesquels un verbe régit d'abord \ln substantif,<br />
puis un autre verbe:<br />
Discitejustitiam moniti) et non temnere dil'os. V.<br />
DI, JOI'is in tectis, tram miserantul' inanem<br />
Amborum, et tantos morlalibus esse labores. Y.<br />
Non illa colo calathisve Minerval<br />
Femineas assuela manus, sed prœlia virgo<br />
Dura pati, cursuque pedumprœvertere VCDtoS. V.<br />
Viresque peractas<br />
IDgemit ' , et cam pis alios regnare Icones. ST.<br />
Les phrases suivantes offrent <strong>de</strong>s irrégularités analogues<br />
:<br />
Arca<strong>de</strong>s ad portas ruere, et <strong>de</strong> more vetusto<br />
Funereas rapuere faces. V.<br />
1 On trouve <strong>de</strong> même dans Térence ea se rapporlanl à monl/nom (Anelr.<br />
J, 5, 15).<br />
2 bo.<br />
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,<br />
LICENCES POÉTIQUES.<br />
Pbaselus ilIe , quem vi<strong>de</strong>tis, bospites,<br />
Ait fuisse navium celerrimus. CAT.<br />
pour se celerl'imurn.<br />
Sed eoim quia rettulit Aj aI.<br />
Esse JOI'is pronepos. O.<br />
pour se pronepotem.<br />
3° Les poëles emploient dans un sens rélléchi certains<br />
verbes qui sont toujours actifs dans la prose:<br />
.MDeas: Quo <strong>de</strong>in<strong>de</strong> ruis? quo proripis? inquit. V.<br />
Dixit, et avertens roseà cervice refulsit. V.<br />
Et lateri agglomera"l nostro. V.<br />
Accingunl ornnes operi. v.<br />
PcdibusquevoZulans. V.<br />
Il faut expliquer tous ces verbes comme s'ils étaient<br />
accompagnés <strong>de</strong> te ou <strong>de</strong> se.<br />
4° Ils mettent quelquefois le présent au lieu du<br />
passé:<br />
Hei mihi, qualis erat! quantùm mutatus ab ilIo<br />
Hectore, qui redii eluvias indulus Acbillis ! V.<br />
Craterll antiquum, qu€m dat Sidonia Dido. V.<br />
At Maiam) auditis si quidquam credimus, Atlas ,<br />
I<strong>de</strong>m Atlas generat> cœli qui si<strong>de</strong>ra tollit V.<br />
Aeriam cœlo nam Jupiter Irim<br />
DeIDÏsit, germanre baud molliajussa ferentem,<br />
Ni Turnus cedat Teucrorum mœnibus aILis. V.<br />
Tum, ne qua futuri<br />
spes saltem trepidas mentes levet. addita fati<br />
pejoris manifesta fi<strong>de</strong>s. L.<br />
5° Le présent au lieu du futur:<br />
Nec cre<strong>de</strong>re quivi<br />
BUDC taDtum tibi me discessu {crre doJorem. V.<br />
pour laturum.<br />
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77
LICENCES POÉTIQUES.<br />
pour adventurn socia1'um ratium 1.<br />
Irruimus ferro, et divas ipsumque vocamus<br />
In partern prœdamque Jovem. V.<br />
pour in partem prœdœ.<br />
Hic tamen 'ndicio pœnam linguâque vi<strong>de</strong>ri<br />
COmIDeruisse polest. o.<br />
pour linguâ indice.<br />
Cras nato Cresare restus<br />
DaI veniam somnumque dies. H.<br />
pour veniam somni.<br />
Noctis erat medium, curasque et pectora somnus<br />
Solverat. o.<br />
pour pectora curis.<br />
8' D'autres fois l'ordre <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux idées est interverti.<br />
Le Dom d'hystérologie a été donné à cette figure<br />
(ôa'!ëpoÀ0i'(cx, <strong>de</strong> Banpov, Mi'w, prœposterè dico). Virgile<br />
dit <strong>de</strong> Minos:<br />
Casligatque auditque dolas.<br />
Castigat présuppose audit.<br />
Moriamur, et in media arma ruamU$. v.<br />
Moriamur n'est que le résultat <strong>de</strong> leur action.<br />
Tum yila per auras<br />
Concessit mœsta ad Man es , corpusque reliquit. V.<br />
Il faut que l'âme ait quitté le corps, pour qu'elle puisse<br />
<strong>de</strong>scendre au séjour <strong>de</strong>s ombres.<br />
Dardaniumque ducem ...•<br />
Alloquere, et celeres <strong>de</strong>ter mea dicta per auras. v.<br />
Mercure ne peut adresser la parole à Énée qu'après<br />
avoir traversé les airs.<br />
1 Natium se trouve dans les Halieutique. d'O,-i<strong>de</strong> (v. 100), ct dans<br />
Lucain ( UI. 579 et 705).<br />
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79
CHAPITRE XIV.<br />
RÉSUMÉ.<br />
ANALYSE D'UN MORCEAU DE VIRGILE, OU L'ON MONTRE L'EMPLOI DES<br />
RESSOURCES CI-DESSUS INDIQUÉES.<br />
Matiire.<br />
Ille (Sol) etiam, post Cresaris mortem, Romam<br />
miseratus est, quum caput texit ferrugine, ita ut relas<br />
impia retérnam noctem metuerit. Quanquam tune temporis<br />
signa quoque a terrâ, ponto, canibus avibusque<br />
dabantur. Srepe JEtnam vidimus in Cyelopeos agros<br />
efferventem , et flammas saxaque volventem. Arma in<br />
rethere sonantia audierunt Germani; Alpes prreter<br />
morem tremuere. Ingens etiam in silvis vulgo audita<br />
vox, et pallida simulaera sub obseuram noetem visa;<br />
et peeu<strong>de</strong>s ver bis usre sunt. Sistunt amnes; <strong>de</strong>ruseit<br />
terra; templorum cbur lacrimis, res sud ore ma<strong>de</strong>t.<br />
Silvas contorquet Eridanus, et undique armenta stabulaque<br />
rapit. Tune etiam semper victimarum fibrre<br />
minaees apparuere, sanguis pt.teis manavit, et nocLu<br />
luporum ululatibus sonuere urbes. Tune potissimÙIn<br />
cœlo sereno eeci<strong>de</strong>re fulgura, et cometre arserunt.<br />
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94 CHAPITRE XV.<br />
Énée arracbant le ràmeau d'or qui doit lui ouvrir le<br />
chemin <strong>de</strong>s enfers:<br />
Corripit eltemplo lEneas, avidusque refringit<br />
Cunctantem.<br />
un voyageur reculant d'effroi <strong>de</strong>vant un serpent que<br />
son pied vient <strong>de</strong> fouler:<br />
Trepidusque repentè refugiL<br />
Âltollentem iras et cœruZa colZa tumentsm.<br />
un guerrier qui expire:<br />
Dedit obvia ferro<br />
Pectora> nec misero dypei mora profuit rem:.<br />
les Troyens rendant les <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>voirs à Misène:<br />
Corpusque lavant frigentis et ungunt.<br />
Quelquefois le pronom se remplace par le substantif<br />
même, que l'on répète:<br />
Et Lausum increpitat, Lausoque minatur. v.<br />
Qui bene pro patriâ cum patriâque jacenL. o.<br />
D'autres fois, par le participe du verbe précé<strong>de</strong>nt:<br />
Germanamque rapit> raptœque insignia Bacchi<br />
Induit. o.<br />
ou par ce participe joint au substantif:<br />
Umbra viri visa est, 'tJisam fera salvil in umbram. o.<br />
ou enfin par un substantif nouveau, ou même par<br />
uue phrase entière. Dans la fable du Lion <strong>de</strong>venu<br />
vietrX, Phèdre dit:<br />
Infeslis Taurus mOl coniodit cornibus<br />
Hostile corpus.<br />
Nous avons vu Diomè<strong>de</strong>, disent les députés <strong>de</strong>s Latins,<br />
et notre main a touché la sienne:<br />
COntigimusque manUID quâ concidit nia teUus. v.<br />
Mettez manum ejus, et comparez!<br />
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96 CHAPITRE XV.<br />
4" RÉPÉTITION. - La répétition d'un mot peut donner<br />
au style beaucoup <strong>de</strong> grâce ou <strong>de</strong> force:<br />
Ad cœlum tollens ar<strong>de</strong>ntia lumina frustra,<br />
Lumina, nam teneras arcebanL vineula palmas. V.<br />
Per tamen ossa viri subito malè Leeta sepulero,<br />
Semper judicüs ossa verenda meis. O.<br />
Regina e1:tulerat noturo penetralibus ensem ,<br />
Ensem seeptriferi spolium lat:riroabile Laii. ST.<br />
Un monosyllabe (adverbe ou pronom) répété <strong>de</strong>llx<br />
fois consécutivement ajoute à la phrase <strong>de</strong> la vivacilu<br />
et <strong>de</strong> l'énergie:<br />
sed moriamur, ait: sic, sic juvat ire sub umbras. \'.<br />
Hortatur Mnestheus : Nunc, nunc consurgite remis. Y.<br />
Me, me, adsum qui feci. V.<br />
Quo, quo, scelesti, ruitis? D.<br />
Te, te, laborum socia eL adjutrix, precor. SE".<br />
Quand le poëte veut fixer encore plus fortement<br />
J'intérêt sur un objet, il répète un mot jusqu'à troIS<br />
fois:<br />
Quum proeul obseuros colles humilemque vi<strong>de</strong>rous<br />
ltaliam: Italiam primus conclamat Achates ;<br />
ltaliam [
DU STYLE POÉTIQUE. 97<br />
cher symétriquement <strong>de</strong>ux mots semblables. Elle emploie<br />
le môme nom ou le même adjectif à <strong>de</strong>ux cas<br />
différents, ou bien le même verbe à <strong>de</strong>ux temps différents<br />
, ou encore un nom et un verbe <strong>de</strong> la même famille.<br />
Cette répétition s'appelle polyptote ('ltoÀU'lt"ttoJ"rO'I,<br />
<strong>de</strong> 'l't-o).ûç , 'It(,tTW, mullos casus habens) :<br />
LiUora littoribus contraria, tluctibus undas<br />
Imprecor, arma m·mis. v.<br />
lIfortali urgemur ab hoste ,<br />
Mortales. V.<br />
Illum absens absentem audilque vi<strong>de</strong>lque. V.<br />
Falle dolo, '.lt notos pueri puer indue vultns. V.<br />
Ullor amans {lentem, flens acriùs ipsa, Lenchal. O.<br />
Non mibi, qui pœnam ratror meruissc 0 scd illi<br />
Parcite, quœ nullo digna dolore dolet. O.<br />
6° ANTITllÉSE. - Si l'on rapproche <strong>de</strong>ux mots qui<br />
expriment une idée opposée, il Y a antithèse;<br />
Taliter e3.uta est veterem nova Roma senectam. M.<br />
Flagrabant sancti sceleratis ignibus ignes ,<br />
Mixlaque erat Oammre fiamma profana piœ. O.<br />
Solatia luclûs<br />
Exigua ingentis. V.<br />
L'usage <strong>de</strong>s contrastes est connu dans tous .es arts.<br />
L'éloquence a Souvent recours il l'antithèse; mais la<br />
poésie en faIt au moins un aussi fréquent usage, et il<br />
est à propos ?e. voir les effets qu'clle en lire. Dans les<br />
exemples prece<strong>de</strong>nts, les mots étaient opposés aux.<br />
mots. Les meilleures antithèses sont celles qui opposent<br />
les pensées aux pensées.<br />
Virgile, parlant d'Évandre, qui conduit Énée au<br />
Capitole, offre un beau rapprochement;<br />
5<br />
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98 CHÀl'lTr.E x v.<br />
Bine ad Tarpeiam se<strong>de</strong>m eL Capitolia duciL,<br />
Aurea nunc, olim savestribus horrida dumis.<br />
Lorsque Troie va succomber sous la ruse <strong>de</strong> Sinon,<br />
il rappelle les vains efforts <strong>de</strong> la Grèce armée:<br />
Talihus insidiis perjurique arte Sioonis<br />
Credita res, captique dolis lacrimisque coactis,<br />
Quos neque Tydi<strong>de</strong>s , nec Larissœus Achilles,<br />
Non anni domuere <strong>de</strong>cem, non mille carinœ.<br />
Lucain, décrivant les funérailles <strong>de</strong> Pompée, rappelle,<br />
par une antithèse pleine <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur, que ce<br />
héros avait reçu trois fois les honneurs du triomphe:<br />
Collegit vestes, miserique iosigoia Magni ,<br />
Armaque, et impressas auro, quas gesseraL olim,<br />
EIuvias, pictasque togas, velamina summo<br />
Ter conspecta Joui.<br />
Claudien, montrant Proserpine occupée à cueillir '<br />
<strong>de</strong>s fleurs, introduit au milieu <strong>de</strong> cette scène riante<br />
un contraste fort touchant:<br />
Quas inter, Cereris proIes, nunc gloria mat ris ,<br />
itfox dolor, requaIi lendit vestigia gressu.<br />
7° APOSTROPHE. - La figure nommée apostrophe<br />
sert à rendre un sentiment soudain <strong>de</strong> douleur, <strong>de</strong><br />
tendresse, d'indignation, etc.; elle fait éviter la monotonie<br />
d'une énumération, d'une <strong>de</strong>scription, ou<br />
simplement elle donne à la phrase un tour plus<br />
élégant.<br />
Virgile, après avoir fait la <strong>de</strong>scription du temple <strong>de</strong><br />
Cumes orné par la main <strong>de</strong> Dédale, s'écrie:<br />
Tu quoque magnam<br />
partem opere in tanto, sineret dolor , Icare, haheres!<br />
Énée, racontant le funeste stratagème <strong>de</strong>s Grecs,<br />
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DU STYLE POÉTIQUE 99<br />
déplore l'aveuglement <strong>de</strong> ses concitoyens, qui :lléprisèrent<br />
les conseils <strong>de</strong> Laocoon:<br />
Et, si fata <strong>de</strong>Ùlll, si mens non 131va fuisset,<br />
Impulerat ferro ArgoHcas fœdare latebras ;<br />
Trojaque nunc stares, Priamique au aUa maneres! v.<br />
Le même poëte, énumérant les soldats qui forment<br />
l'armée <strong>de</strong> Turnus, varie la forme du récit par quelques<br />
apostrophes :<br />
Et te monlos31 misêre in prœlia Nersœ,<br />
Ufens, insignem famâ et felicibus armis.<br />
Séreste veut offrir en trophée au dieu Mars les<br />
armes <strong>de</strong> son ennemi :<br />
Arma Serestus<br />
Leeta referl humeris, tibi 1 rex Gradive 1 tropœum! v.<br />
8° H.uWIESSE n'EXPRESSION. - La poésie est surtout<br />
remarquable par la hardiesse <strong>de</strong> ses expressions: on<br />
regar<strong>de</strong>rait comme ambitieuse la prose qui voudrait<br />
rivaliser avec elle sous ce rapport.<br />
Voyons comment Virgile exprime cette idée: pousser<br />
<strong>de</strong>s cris :<br />
lncendunt clamoribus urbem '.<br />
Plangorib!1s 3l<strong>de</strong>s<br />
Femineis ululant.<br />
lmmugit regia Juctu.<br />
Adresser <strong>de</strong>s vœux au ciel :<br />
Oneravitque rethera volis.<br />
Il dit d'un nuage : Solis inar<strong>de</strong>scit radiis; d'un<br />
homme: Si<strong>de</strong>reo flagrans clypeo.<br />
1 Ailleurs; Clamorl incfflàunt cœlum.<br />
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100 CUAPITRE xv.<br />
L'éclat d'une pierre précieuse est rendu d'une manière<br />
non moins hardie dans ce vers:<br />
Vivis gau<strong>de</strong>bat digitos incen<strong>de</strong>re gemmis. ST.<br />
S'agit-il <strong>de</strong> peindre une armée rangée en bataille?<br />
Lalè ferreus hastis<br />
norret ager, campique armis sublimibus ar<strong>de</strong>nt. V.<br />
La maison d'Ucalégon est déjà la proie <strong>de</strong>s flammes:<br />
Ucalegon. v.<br />
Jam prO:cimus ar<strong>de</strong>t<br />
HerClùe est dévoré par la robe sanglante <strong>de</strong> Nessus:<br />
Totusque furil per viscera Nessus. S-:.<br />
9° PÉRIPHRASE. - La périphrase est d'un grand<br />
usage en poésie : clle présente la pensée sous une<br />
forme moins commune et plus ingénieuse. Ovi<strong>de</strong> ,<br />
parlant <strong>de</strong> l'hiron<strong>de</strong>lle qui fait son nid, se sert <strong>de</strong> ceLte<br />
périphrase :<br />
Et luteum celsâ sub trabe fingit opus.<br />
Il dit, pour désigner la grue:<br />
Et, qure pygmœo sanguine gau<strong>de</strong>t, aI'em.<br />
Lucain met silva Dodones , pour q1terCus.<br />
1JIel!ifer electis exercitus obslrepit hcrbis. CL .<br />
c'est-à-dire apes.<br />
La p ériphrase sert aussi à donner plus d'énergie à.<br />
la pensée:<br />
Si furor Enceladi projectâ mugiat .iEtnâ. CL.<br />
Frange manu telum Phrygii prœdonis , et ipsum<br />
Pronum sterne solo. V.<br />
LEneœ serait un mot bien froid dans la bouche <strong>de</strong>s<br />
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102 CHJ.l'lTHE xv<br />
PyUœ nec rala senectal<br />
Maluerit, PJ.rygiis aut <strong>de</strong>gere longiùs annis.<br />
c'est-à-dire la vieillesse <strong>de</strong> l\estor et <strong>de</strong> Priam '.<br />
Les forêts étaient attirées par la lyre d'Orphée:<br />
SilYaque Bistoniam srepè secuta chel)n. C, ..<br />
mot à mot la lyre <strong>de</strong> Thrace.<br />
L'antonomase met encore un nom particulier pour<br />
un nom général. Cet emploi est bien moins fréquent<br />
que le précéùedt.<br />
Nous venons <strong>de</strong> voir: Et nunc ille Paris, en parlant<br />
d'Énée: Paris signifie ici ?tn homme efféminé.<br />
Horace dit qu'il faut soumettre ses ouvrages à la censure<br />
d'un ami: Fiet Aristarchus. On lit dans Ovi<strong>de</strong>:<br />
[TUS et est subito. qui modo Crœsus erat.<br />
c'est-à-dire, le riche <strong>de</strong>vient pauvre.<br />
11 0 COURTE PROSOPOPÉE. - Elle transporte aux objets<br />
insensibles <strong>de</strong>s expressions qui ne conviennent<br />
qu'aux êtres animés:<br />
Dissultanl ri pre , reJluitque exterl'itus anmis. V.<br />
l>urpureus yeluli quum Jlos succisus aratro<br />
Languescit moriens. v.<br />
Mira/urque noyas fron<strong>de</strong>s et non sua po ma (arbos). Y.<br />
Pontem indiana/us Araxe. Y.<br />
On trouve plusieurs expressions semblables dans<br />
l'exemple suivant, où Virgile décrit la chute d'un<br />
arbre que l'on abat :<br />
t Ces antonomases semblent aVOIr eu vogue dans ce siècle, elle, sc retrou"ent<br />
fréquemment dans Martial'.<br />
Longa, precor • py/ioque yeni nUlDerosior œ,o ( dies ) ...<br />
Promisi' pylwm quater .enecuru.<br />
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104 CHAPITRE XV.<br />
La louve qui allaite les fondateurs <strong>de</strong> Rome:<br />
Fccerat ct viridi fctam lIJavorlis in antro<br />
Procubuisse lupam : geminos huic ubera circum<br />
Lu<strong>de</strong>re pcndrnles pueros , et lamberc matrem<br />
Impavidos; iIIam tereti cervicc rel1exam<br />
Mu]cere alternos , et corpora fingere linguâ.<br />
13° ABONDA.NCE DU STYLE. - La poésie se distingue<br />
par la richesse et la variété <strong>de</strong> ses expressions. Admirons<br />
dans Virgile le tableau d'une éruption <strong>de</strong> l'Etna:<br />
Horrificis juxlà tonaliEtna ruinis,<br />
Jnterdumque atram prorumpit ad œlbera nubem<br />
Turbine fllmantem piceo et can<strong>de</strong>ntc favillâ ,<br />
Attollitque globos l1ammarum , et si<strong>de</strong>ra lambit ;<br />
Interdllffi scopulos avulsaque viscera montis<br />
Erigil eructans, liquefactaque saxa sub auras<br />
Cum gemilu glornerat, fundoque exrestuat irno.<br />
Le fond <strong>de</strong> l'idée est que l'Etna vomit <strong>de</strong>s matières<br />
embrasées: quel parti le génie fécond du poële a su<br />
en tirer!<br />
Ailleurs il offre la pcintw'e d'une eau en ébullition<br />
:<br />
Magno veluti quum l1amma sonore<br />
Virgea suggeritur costis undantis aheni,<br />
Exsultantque restu latices : furit iutus aqure vis,<br />
Fllffiidus atque allè spumis eluberat amllis,<br />
Nec jam se capit uuda, volaI vapor aler ad auras.<br />
L'eau, qui est le sujet <strong>de</strong> cette comparaison, est<br />
désignée avec variété par tuus ces mots, undantis,<br />
latices> aquœ vis, fumidus amnis, unda > vapor.<br />
Dans le combat d'Hercule et <strong>de</strong> Cacus, la caverne<br />
du monstra est appelée spelunca> vastum recessum><br />
saxum opccum, vastU7n antrum> ingells l'elJïa> umo<br />
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110 CHAl'ITllE XVI.<br />
Cette expression trop éloignée ne désigne pas suffisamment<br />
le héros.<br />
Sénèque parle d'un crime qui fait presque reculer<br />
d'horreur le soleil;<br />
Stat ecce Titan dubius , emerito die,<br />
Suâne currat, an Tltyesleâ viâ.<br />
L'énergie ici n'est que <strong>de</strong> l'exagération et <strong>de</strong> l'obscurité.<br />
Racine, empruntant cette idée, mais éclaircissant<br />
l'expression, fait dire à Clytemnestre:<br />
Et toi, soleil, eL loi, qui dans celle contrée<br />
Reconnais l'hérilier et le vrai fils d'Atrée ,<br />
Toi qui n'osas du père éclairer le festin,<br />
Recule: ils l'ont appris ce funeste chemin!<br />
6° Nous avons vu quel parti les poëtes peuvent tirer<br />
.<strong>de</strong>s expressions figurées; mais on trouve aussi <strong>de</strong>s<br />
métaphores bizarres et forcées. ,<br />
Claudien représente Proserpine occupée à bro<strong>de</strong>r<br />
un ouvrage dont les zones étaient le sujet, Voici<br />
comment il s'exprime au sujet <strong>de</strong> la zone torri<strong>de</strong>;<br />
Squalebat aduslus<br />
Limes, et assiduo sitiebant stamina sole.<br />
Et peu après, il dit <strong>de</strong>s zones glaciales:<br />
Torpentes trnit geminas, brumàque perenni<br />
Fœdat, eL reterno contristat frigore telas.<br />
Cet exemple nous montre un tissu sensible aux impressions<br />
du froid et du chaud. Il y a loin <strong>de</strong> cette<br />
prétention à la simplicité <strong>de</strong> Virgile:<br />
QUÎ!lque lenent cœlum zonal, quarum una corusco<br />
Semper sole rubens , el lorrida semper ab igni ;<br />
Quam circum extremœ <strong>de</strong>-rtrà lœvàquc trahuntur<br />
Creruleà glacie concrelœ alque imbribus alTi;;.<br />
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112 ClLU'ITRE :XVI.<br />
Nec facilè dicam, corpora an flammœ. ma gis<br />
Gemuere. piceus ignis in fnmos abit ;<br />
"Et ipse fumus , tris/is ne nebnlà gravis,<br />
Non rectus exit.<br />
Ces vers diffus offrent en outre le défaut qui sera<br />
signalé à l'article 9.<br />
8° La périphrase trop prolongée rend le style languissant<br />
: alors, en croyant ajouter <strong>de</strong> la richesse à<br />
la pensée, on ne fait qu'en retar<strong>de</strong>r la marche.<br />
Virgile a dit:<br />
Antè , pererratis amborum finibus·, exsul<br />
Aut Ararim Parthus bibet , aut Germania Tigrim,<br />
Quàm nostro illius labalur peclore vultus.<br />
La piriphrase contenue dans le second vers a plusieurs<br />
fois été reproduite par les Latins et les mo<strong>de</strong>rnes.<br />
Tout le mon<strong>de</strong> connaît les vers <strong>de</strong> Boileau:<br />
Avant qu'un tel <strong>de</strong>ssein m'entre dans la pensée ,<br />
On ponrra voir la Scine à la Saint-Jean glacee ,<br />
Arnaud à Charenton <strong>de</strong>venir huguenot ,<br />
Saint-Sorlin janséniste, et Saint-PaIin bigot.<br />
La même idée est rendue par Sénèque avec une<br />
abondance fastidieuse:<br />
. Lucida dnm eurrent annosi si<strong>de</strong>ra mundi,<br />
Oceanus clausum dum fluctibns ambiet orbem,<br />
Lnnaqne dimissos dum plena recolliget igncs ,<br />
Dona matutinos prœdicet Lucifer ortns,<br />
Altaque cœruleum dum Nerea nesciet Arctos,<br />
Candida formosi vencrabirnur ara Lyœi.<br />
9° En voulant offrir uu tableau pittoresque, on<br />
s'appesantit quelquefois sur <strong>de</strong>s détails qui inspirent<br />
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116<br />
ABUS DU STYLE l'OtTIQUE<br />
blés; 4° enfin, et cette différence est capitale, Virgile<br />
décrit un fait extraordinaire; il doit insister sur son<br />
idée pour bien nous pénétrer <strong>de</strong> ce pouvoir miraculeux<br />
<strong>de</strong> l'harmonie; au lieu que Pluton parle tous les<br />
jours: pourquoi tout ce luxe <strong>de</strong> développements!<br />
Virgile, comme nous l'avons vu, et Homère qu'il imitait,<br />
n'ont pas mis cinq vers pour dire que Jupiter<br />
fait trembler l'Olympe d'un signe <strong>de</strong> tête.<br />
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118 CHAPIT!lE XVII.<br />
Clamorem immensum tollit, quo pontus et omnes<br />
Intremuere undal, penitusque exterrita telIus<br />
Italial, curvisque immugül 1Etna cavernis. v.<br />
Voyez cette idée: Bellorum l'eliquias ara 101' inveniet><br />
amplifiée dans les Géorgiques:<br />
Scilicet et tempus veniet quum finibus illis<br />
Agricola, incurvo lerram moUlus aratro ,<br />
Exesa inveniel scabrâ rllbigine pila;<br />
Aut gravibus ras tris galeas pulsabit inanes,<br />
Grandiaque elfossis mirabitur ossa sepulcris. \".<br />
L'amplijlcation est une manière d'insister fortement<br />
sur une idée: or l'idée doit mériter ce privilége. Si<br />
l'on veut rendre un sentiment profond ou présenter un<br />
tableau pittoresque, le goût <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu'on choisisse<br />
tous les traits qui pourront communiquer au lecteur<br />
cette impression énergique, ou mettre sous ses yeux<br />
celte peinture 'vivante; mais si l'amplijication recouvre<br />
une idée secondaire, accessoire, <strong>de</strong> peu <strong>de</strong><br />
valeur, elle glace l'intérêt, et fatigue l'esprit, dont<br />
la juste impatience s'élance au <strong>de</strong>là.<br />
Examinons les exemples précé<strong>de</strong>nts, pour reconnaître<br />
si l'amplification a été légitime. 1° Nous voyons<br />
d'abord le regret cuisant <strong>de</strong> fuir la patrie: l'idée est<br />
touchante: la développer, c'est prolonger l'émotion.<br />
2° Cette pompe et cette richesse dans l'expression<br />
nous pénètrent <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> Troie, et nous compatissons<br />
davantage à sa chute. 3° Quelle consolation<br />
pour un béros <strong>de</strong> reposer auprès <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> héros!<br />
Énée justifie à nos yeux son regret, en énumérant<br />
tant <strong>de</strong> nobles victimes. 4° Virgile ... 'eut rendre d'une<br />
manière frappante la voix redoutable <strong>de</strong> Polyphêroe :<br />
pouvait-il mieux Y réussir qu'en montrant toute la<br />
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120 CITAI'lTltE {VII.<br />
Fcrreique Eumcnidum thalami, et Discordiu <strong>de</strong>mens,<br />
Vipcreum crinem vitLis innexa erucntis.<br />
Ovi<strong>de</strong> chante le retour du printemps:<br />
Omnia tune florent , tune est nova tempo ris retas :<br />
Et nova <strong>de</strong> gravido palmite gemma tumet;<br />
Et modô formatis amicitur frondihus arbor ,<br />
Prodit et in summum seminis herba solum'<br />
Et tepidum volueres conccntibus aera mulcc;t ,<br />
Ludit et in pralis luxuriatque pecus.<br />
Tum blandi soles, ignotaque prodi! birundo ,<br />
Et luteum celsâ sub trabe fingi! opus.<br />
Nous voyons ici <strong>de</strong>s développements fort étendus;<br />
mais ne perdons pas <strong>de</strong> vue l'intention <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />
poëles. Peindre les divinités <strong>de</strong>s ellfer's et l'influence<br />
du printemps, voilà tout leur objet: la richesse <strong>de</strong>s<br />
détails rendra le tableau plus achevé.<br />
Mais si l'idée n'était qu'accessoire, il faudrait abréger<br />
<strong>de</strong> beaucoup l'énumémtion : autrement on ferait<br />
languir l'intérêt. Virgile, parlan t <strong>de</strong>s différents arbres<br />
coupés pour construire un bûcher, dit, avec son goût<br />
ordinaire:<br />
Hur in antiquam silvam, slabula alla ferarum :<br />
Procumbunt piceœ ; sonat ieta securibus ilex,<br />
Fraxineœque trabes, cuncis el fissile robur<br />
Scinditur; ad volvunt ingeDtes montibus ornos.<br />
Et ailleurs :<br />
l?erro sonat icta bipelllli<br />
FrmnuS; ever!un 1 actas ad si<strong>de</strong>ra pinus .<br />
Robora nec coneis et olentem scin<strong>de</strong>re cedrum,<br />
Nec plaustris cessant vectare gemelltibus ornos.<br />
Lucain même, qui souvent est si prodigue <strong>de</strong> détails<br />
inutiles, est resté dans une juste mesure, 10rs-<br />
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122<br />
CHAPITRE XVl1.<br />
-comme <strong>de</strong>s bons, et ensuite parce que chaque vers<br />
pris à part est digne <strong>de</strong> servir <strong>de</strong> modèle:<br />
Non CLaonis abfuit arhor,<br />
Non nemus IIeliadum , non frondibus œsculus altis,<br />
Non lilire molles, nec fagus, et innuha laurus ,<br />
Et coryli fragiles, et fraxinus ulilis hastis,<br />
Enodisque abies, eurvataque glandihus ilex ,<br />
Et plalanus genialis, acerque coloribus impar •<br />
Amnicolreque simul saliees, et aqualica lOlos.<br />
perpeluôque virens buxus. lenuesque mYTicm.<br />
Et bieolor myrtus , baccis et cœrula linus.<br />
Vos quoque. ilexipe<strong>de</strong>s he<strong>de</strong>rœ ,venistis. et lInù<br />
Parnpineœ viles, et amiclœ vitibus ulmi,<br />
Ornique et picere, pornoque onerala rubenli<br />
Arbutus, et lentre, vieloris prœmia , palmre •<br />
Et succincla comas hirsulaque vertice pin us,<br />
Grata <strong>de</strong>ûm Malri : siqlli<strong>de</strong>m Cybelelus ALys<br />
Exuit hac hominem, lruncoque induruit iIIo.<br />
Adfuit huic lurbre melus imitata cupressus.<br />
30 ACCUMULATION. - On peut appliquer à celte figure<br />
tout ce que nous avons dit <strong>de</strong> la précé<strong>de</strong>nte: car on<br />
ne saurait faire une énumération <strong>de</strong> parties, sans<br />
faire à la fois une accumulation, et réciproquement.<br />
On peut relire les exemples d'Ovi<strong>de</strong> que nous avons<br />
donnés cî-<strong>de</strong>ssus(p. 62), et qui pèchent déjà par l'étendue.<br />
Nous renvoyons les jeunes gens studieux à la<br />
lecture <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux passages du même auteur, où la diffusion<br />
est encore plus frappante: dans l'un il accumule<br />
les noms <strong>de</strong>s chiens qui dévorent Actéon (Met. lU,<br />
207 -225); dans l'autre il énumère les guerriers qui<br />
doivent combattre le sanglier <strong>de</strong> Calydon (ib. VJIJ,<br />
300-318 ).<br />
Virgile et Horace seront ici, comme sous les autres<br />
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124 CUAl'lTl\E XVII.<br />
ceux que lui fournit une pénible recherche. Ovi<strong>de</strong> a<br />
aussi fait une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> tempête (Metam. XI,<br />
4.40, suiv. ) : elle ne renferme pas moins <strong>de</strong> quatrevingts<br />
vers. Le poëte décrit pOUl' décrire : heureux<br />
<strong>de</strong> trouver un champ ouvert à son imagination, iloublie<br />
Céyx et Halcyone. Virgile, au contraire, ne perd<br />
pas <strong>de</strong> vue son héros; tous les détails <strong>de</strong>scriptifs ne<br />
sont que secondaires; ils sont <strong>de</strong>stinés à émouvoir<br />
plus vivement la pitié en faveur d'Énée; on le suit au<br />
milieu <strong>de</strong> la tempête; on entend, au milieu du bouleversement<br />
<strong>de</strong> la nature, l'expression pathétique <strong>de</strong> sa<br />
douleur.<br />
Lucain est tombé dans le même défaut qu'Ovi<strong>de</strong>:<br />
on peut voir sa <strong>de</strong>scription au livre V (v. 560, suiv.)<br />
<strong>de</strong> la Pharsale. Mais rien n'est plus chargé que le détail<br />
qu'il donne <strong>de</strong>s prodiges qui annoncèrent la guerre<br />
civile (liv. l, 522, suiv. ) :<br />
Tum, ne qua fuluri<br />
Spes saItem trepidas mentes levet, addita fati<br />
pejoris manifesta !i<strong>de</strong>s, Superique minaces<br />
Prodigiis terras implêrunt, rethera, ponlum.<br />
Ignota obscurœ vidcrunt si<strong>de</strong>ra noctes ,<br />
Ar<strong>de</strong>nlemque polum flammis, cœloque volanle;<br />
Obliquas per inane faces, crinemque timeodi<br />
Si<strong>de</strong>ris, et terris mutantem regna cometen.<br />
Fulgura fallaci mieueruot crebra sereno ,<br />
Et varias ignis <strong>de</strong>nso <strong>de</strong>dit aere formas.<br />
Il reste encore une soixantaine <strong>de</strong> vers, qu'on peut<br />
achever dans l'original. On fera bien <strong>de</strong> comparer à<br />
ce morceau la fin du premier livre <strong>de</strong>s Géorgiques.<br />
S'il faut éviter <strong>de</strong> trop prolonger les <strong>de</strong>scriptions, on<br />
doit à plus forte rah;on prendre gar<strong>de</strong> qu'elles ne<br />
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126 CIl!PITflE '\.VII.<br />
colore, embellit son objet, souvent l'élève et l'agrandit.<br />
Si la comparaison présente une image simple et fidèle,<br />
elle atteint son but. On a cité bien <strong>de</strong>s fois ces<br />
beaux vers <strong>de</strong> Virgile où Didon, égarée par l'amour,<br />
est comparée à une biche qui fuit, emportant le trait<br />
enfoncé dans son flanc:<br />
Qualis con je cl à cervn sagittâ ,<br />
Quam procuJ incautam ncroora inter Cressia fhil<br />
Pastor agen, tclis, liquitque volatilcferrum<br />
lXescius : iIla fug1l silvas saltusquc peragraL<br />
Dictreos ; hrerel laleri lelalis arundo.<br />
Lucain dit que Pompée dans sa vieillesse était encore<br />
entouré du respect <strong>de</strong>s Romains, qui n'avaient<br />
pas oublié sa jeunesse triomphante. Il le compare à<br />
un vieux chêne chargé d'offran<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> trophées;<br />
Qualis frugifeTo quercus sublimis in agro,<br />
Exuvias veteres populi sacra laque geslans<br />
Dona ducum; nec jam \'alidis radicibus hrerens ,<br />
Pon<strong>de</strong>re fixa suo est; nudosque per aera ramos<br />
Effun<strong>de</strong>ns, lrunco , non frondibus emci" umbram :<br />
At, quamvis primo nutet casura sub Euro,<br />
Tot ckcùm silvre firmo se robore tollant,<br />
Sola lamen coli LuI'.<br />
On ne peut trouver un rapport mieux saisi el plus<br />
poétiquement exprimé.<br />
Un poëte moins connu, et qui ne manque pas <strong>de</strong><br />
comparaisçns heureuses, Stace, peignant le désespoir<br />
d'Ilypsipyle, lorsqu'elle aperçoit Archémore, son<br />
nourrisson, baigné dans son sang, ajoute:<br />
Ac velut aligerœ se<strong>de</strong>ro felusque parentis<br />
Quum piger umbrosâ populatus in il ice serprns,<br />
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J)E LA COl\II'ARAISON. 129<br />
objet du rapport. On a reproché à Virgile d'avoir comparé<br />
Amale, agitée par les plus vives inquiétu<strong>de</strong>s, à<br />
la toupie que l'enfant fouelte sans relâche. Par défaut<br />
<strong>de</strong> convenance: la comparaison ne peut pas s'employer<br />
indistinctement dans tous les cas. Placée mal à propos,<br />
elle produit un mauvais effet. Dire qu'elle marque<br />
toujours un travail <strong>de</strong> l'esprit, c'est la proscrire <strong>de</strong><br />
tous les cas où l'on ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qu'un élan du cœur.<br />
Pour en déterminer l'emploi, nous ne saurions mieux<br />
faire que <strong>de</strong> citer les judicieuses observations <strong>de</strong><br />
Marmontel. " Plus l'âme est occupée <strong>de</strong> son objet di<br />
.. rect, moins elle regar<strong>de</strong> autour d'elle; plus le mou<br />
.. vement qui l'emporte est rapi<strong>de</strong>, plus il est impa-<br />
1( tient <strong>de</strong>s obstacles et <strong>de</strong>s détours; enfin) plus le<br />
Il sentiment a <strong>de</strong> chaleur et <strong>de</strong> force) plus il maîtrise<br />
1( l'imagiuatioll et l'empêche <strong>de</strong> s'égarer. Il s'ensuit<br />
" que la narration tranquille admet Jes comparaisons<br />
Il fréquentes; qu'à mesure qu'elle s'anime, elle en<br />
" veut moins, les veut plus concises et aperçues <strong>de</strong><br />
Il plus près; que dans le pathétique elles ne veulent<br />
Il être qu'indiquées par un trait rapi<strong>de</strong>; ct que) s'il<br />
Il s'en pr.ésente quelques-unes dans la véj1émence <strong>de</strong><br />
" la passlOn , un seul mot les doit exprimer. "<br />
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136 CHAPITRE XVIlI.<br />
Agglomerant, ealeo donee se earcere claudanl<br />
sponte suA: lanta esl e<strong>de</strong>ndi gloria lili '. (rida.)<br />
La femelle du paon contemple avec joie sa petite<br />
famille:<br />
Adspiee, maternam quàm dulcia gaudia mentem<br />
Pertenlant '. (Vanière.)<br />
Un jeune rhétoricien 3 apostrophait ainsi saint Antoine,<br />
qui s'empressait d'aller retrouver saint Paul,<br />
mort pendant son absence;<br />
Quid facis, Antoni? jam friget paulus, ct allas,<br />
Immixlus superis, nec jam Iuus, attigit arces •<br />
Dieu adoucit la barbarie <strong>de</strong>s Gaulois;<br />
Posuere {erocia Galli<br />
Corda, volente Deo '.<br />
Une prêtresse annonce la victoire <strong>de</strong> Salamine:<br />
Te Marathon rediviva manet; jam part us Athenis<br />
Aller Millia<strong>de</strong>s ' .<br />
Ici l'on a peint la démarche incertaine d'un bom me<br />
ivre:<br />
Murorum alterno vi<strong>de</strong>n' ut ruat impete duros<br />
Crecus in amplel.Us, quanquam fecunda lucernis<br />
Addi<strong>de</strong>rit numerum generosi copia Bacchi 7 ?<br />
t Virgile fi dit, en différents endroits: j[ille rugit rerugilque 'ja •....<br />
orbibuJ orb" .mp.d.unl ... tanta .. , generana. gloria mel/i •.<br />
li Lalonœ tacitum pertentant gaudia pectus. V.<br />
:; Cité par Rollin.<br />
140 CUAPITIIE XVIII.<br />
ArgoliCi, quos bla <strong>de</strong>cct concessa libido,<br />
J'aUa connubia el l"'les celebrant hymenœos,<br />
Ce <strong>de</strong>rnier vers, auquel le poële a donné ici un<br />
sens figuré, est pris au propre dans Virgile.<br />
On a dit d'un écolier:<br />
l\Jusarum phœbique recens doctoris alumnus ,<br />
Poslquam Longa <strong>de</strong>cem tulcrant fastidia memes "<br />
On sent ici la nécessité <strong>de</strong> connaître les poëtes<br />
latins, et surtou t Virgile, dont le lecteur se souviendra<br />
plut6t. Les O<strong>de</strong>s d'Horace offrent aussi une source<br />
fécon<strong>de</strong> d'heureuses imitations. Qu'on tâche <strong>de</strong> transporter<br />
quelques-unes <strong>de</strong> ses expressions dans le vers<br />
hexamètre: c'est une conquête légitime.<br />
DU CENTON.<br />
Nous dirons quelques mots du centon, non pas que<br />
nous attachions une gran<strong>de</strong> valeur au résultat <strong>de</strong> ce<br />
travail, mais parce qu'il présuppose la connaissance<br />
<strong>de</strong>s poëtes classiques, ct offre un utile exercice <strong>de</strong><br />
mémoire 2, Nous savons que plusieurs professeurs<br />
proposent ce genre <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir, sinon à toute une<br />
classe, du moins aux élèves d'élite,<br />
Le centon est une pièce entièrement composée <strong>de</strong><br />
vers ou <strong>de</strong> fragm ents <strong>de</strong> vers empruntés iL nn poëte.<br />
Le plus ancien centon latin qui nous ait été conservé<br />
est la Médée d'Hosidius Géta, écrivain du siècle<br />
l Matr; longa dcccm lulerunt raSlidia menses. V.<br />
\1 Centonem vacant qui primi hac concinnatione luse-mnt. Solit ..<br />
memoriœ negotiunl sparsa col/tgere, rI i,,/egrare larera /a. (AusOn. ad<br />
Paul. )<br />
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CHAPITRE XIX.<br />
DE LA FIN DU VERS HEXA.MÈTRE.<br />
Il faut soigner avec une attention particulièt'e les<br />
<strong>de</strong>ux pieds qui terminent le vers hexamètre. L'oreille<br />
en juge sévèrement l'harmonie, et l'esprit <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> la valeur aux mots qui les remplissent.<br />
LONGUEUIl. DU MOT FINAL. - Le <strong>de</strong>rnier mol du vers<br />
hexamètre doit être un mol <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ou <strong>de</strong> trois syllabes;<br />
Conticuere omnes, intentique ora tenebant .'<br />
In<strong>de</strong> toro pater ./Eneas sic ors us ab alla. V.<br />
Remarques. 1" Un vers peut finir yuelquefois pal'<br />
<strong>de</strong>ux monosyllabes, ou par le verbe est précéd é d'une<br />
élision:<br />
Versibus exponi tragieis res comica non vu!t. Il.<br />
Grammatici certant, et adhuc sub judice lis est. H.<br />
Corripiunt, spirisque ligant ingentibus; ctjant<br />
Bis medium amplexi. V.<br />
Qum poslquam vates sic ore effatus amico est. Y.<br />
Les monosyllabes que, ve et ne ( interrogatif) se<br />
mettent très-bien à la fin du vers: . lnvoll'ens umbrâ magnâ terramqu e polurnque. V.<br />
Si quis in adversum rapiat casus\'e <strong>de</strong>usve. V.<br />
o magnis poslhac inimicus risus! utm'ne<br />
Ad casus dubios /i<strong>de</strong>t sibi cerlius! H.<br />
C'est qu'en effet ces mots ne sont plus <strong>de</strong>s mono-<br />
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146 CIlAPITRE XIX.<br />
Les ycrs hypcrmètrcs 1 finissent pour l'œil par un<br />
mot <strong>de</strong> quatre syllabes, mais réellement par un mot<br />
<strong>de</strong> trois, puisc/ue la <strong>de</strong>rnière est élidée. On met bien:<br />
Et magnos membrcrum artus , magna ossa lacer/osque<br />
Exuit. Y.<br />
li n'est pas non plus qnestion ici du vers .pondalqllc><br />
lequel, il peu d'exceptions près, finit pal'<br />
un mot <strong>de</strong> quatre syllabes 2, mais <strong>de</strong> quatre syllabes<br />
longues:<br />
Cara <strong>de</strong>ùm soboles, magnum Jovis incremcntum. v.<br />
3° On doit encore bannil' <strong>de</strong> la fin du vers les mols<br />
<strong>de</strong> cinq syllabes, tels que ceux-ci:<br />
Su nt igilur soliùà primordia simplicilate. Ln.<br />
Te noslris ducibus, te Graiis ante{ercndo. n.<br />
Ullinguns manc;piortnn<br />
Contemnas. J.<br />
4° Évitez à plus forte raison les mots <strong>de</strong> six syllabes,<br />
comme:<br />
Quisquis luxurià, tristivc superstitione,<br />
Aut alio mentis morbo calet. II.<br />
NATUUE DU MOT fl;,{AL. - 1 0 Si nous examinons malDtenant<br />
les mots, non plus par rapport ù leur quantité,<br />
mais pal' rapport à leur nature, nous reconnaîtrons<br />
que la par lie du discours qui termine le plus souvent<br />
J Pog. 81.<br />
51 On trouve à la vérité dans Virgile;<br />
Cum sociis, ualoquC, .Pcnalihlls ct mognis dh ...<br />
Quœ f}(londdm ill lJuSL1$, aut culminiblls <strong>de</strong>serUs.<br />
)f;Js ces exceptions très-l'arcs ne dCLl'uisent pas la l'èGle.<br />
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CHAPITRE XX.<br />
DE L'EUS ION .<br />
A moins qu'elles ne se trouvent au milieu d'un concours<br />
désagréable <strong>de</strong> consonnes, ou qu'elles ne soient<br />
placées à certains pieds que nous allons indiquer, les<br />
élisions ne produisent point un mauyais e[et, ct les<br />
poëtes du second ordre les ont évitées avee une a/l'ectalion<br />
puérile. Virgile, dans les ouvrages mêmes auxquels<br />
il a mis la <strong>de</strong>rnière main, cL Horace, daus ses<br />
O<strong>de</strong>s, en font un assez fréquent usage: elles donnent<br />
<strong>de</strong> la variété au vers, qui, sans elles, finit par être<br />
monotone.<br />
Il ne faut pas croire qu'Lln vers soit d'autant plus<br />
dur qu'il renferme plus d'élisions. JI yen Il trois dans<br />
chacun <strong>de</strong>s suivants, ct cependant Ïls sont très-coulants<br />
:<br />
Qui cultus babendo<br />
siL pecori, ntque apibus quanta ex pcrienlia parcis. V.<br />
NUill fictu ingemuit nos/ra, aul miscralus amantcm cs.t? v.<br />
Au contraire uno seule élision peut être choquante,<br />
comme nous le verrons bientôt.<br />
1 0 Si la voyelle élidée ct celle qui commence le mot<br />
suivant sont les mêmes, l'élision n'a l'ion <strong>de</strong> désagréable<br />
à l'oreille:<br />
Flumina amcm sihasquc inglorius. v.<br />
Ille eLiam clslinclo miscralus Cœsarc U
CHAPITRE XXII.<br />
DE L'HARMONIE EN Gf;NÉRAL.<br />
Si l'harmonie du style est nécessaire à l'éloquence,<br />
elle l'est bien plus encore à la poésie. Le poëte, en<br />
adoptant le rhythme ca<strong>de</strong>ncé du vers, s'est engagé à<br />
offrir à l'oreille un charme qu'elle ne trouvait pas dans<br />
la prose : à plus forte raison doit-il, à l'exemple <strong>de</strong><br />
l'orateur, choisir, parmi les mols qui sc présentent à<br />
lui, ceux qui sont les plus doux à prononcer, ct<br />
faire en sorte que leur mélange produise encore une<br />
agréable impression. Il sern parlé plus tard <strong>de</strong> l' harmonie<br />
imitative; nous verrons alors quelles restrictions<br />
il faut mettre au précepte général.<br />
L'harmonie a pour juge le sentiment, ct ne peut<br />
guère être soumise à l'analyse. Qui serait insensible<br />
à la douceur <strong>de</strong> ces vers?<br />
Tilyre, tu palulre rccuhans suh lrgminc fagi ,<br />
Silvcstrcm tenui musam meditaris a"cnâ :<br />
Nos patrire fines et dulcia linquimus ar"a,<br />
Nos palriam fugimus ; lu, Tilyrc, Icnlus in umbrà.<br />
Formosam resonare doces Amar)llida sih:as. Y.<br />
Ver erat relernum. placidique tcpentibus auris<br />
Mulcebant Zcph)'ri natos sinè semine Dores.<br />
11101 eliam fruges tenus inarata ferehat •<br />
Nec rellovatuS. ager gra"iùis canebat aristis.<br />
Fluminu jum lactis , iam ilumina neclaris ibant •<br />
Flavaque <strong>de</strong> "iridi slillahunt ilice mella. o.<br />
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CHAPITRE XXIV.<br />
DES DIfFÉRENTES COUPES DE LA PÉRIODE POÉTIQUE.<br />
Le génie <strong>de</strong> la poésie <strong>latine</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong> essentIellement<br />
que chaque ,-ers ne soit pas terminé par un repos,<br />
et que, la plupart du temps, un ou plusieurs<br />
mots, nécessaires au sens d'une phrase, soient reportés<br />
au vers suivant: en un mot, l'enjambement, interdit<br />
à notre poésie, est une condition <strong>de</strong> la poésie<br />
laline. Après un certain nombre <strong>de</strong> pareils rejets, que<br />
l'on a eu soin <strong>de</strong> varier pour éviter la monotonie, la<br />
pério<strong>de</strong> se termine avec le vers, et l'esprit, dont l'attention<br />
a été soutenue par cct hellreux enchaînement,<br />
se repose un instant pour la prêter encore.<br />
Le poële ne renvoie pas sans choix au second vers<br />
les mols qui n'auraient pu entrer dans le premier: il<br />
tient compte et <strong>de</strong> leur nature et <strong>de</strong> leur quantité.<br />
Sous le premier rapport, les mots rejetés n'auront<br />
pas une médiocre importance dans l'ensemble <strong>de</strong> la<br />
phrase. Destinés à fixer les regards, ils doivent en<br />
être dignes; et rien ne nuit plus à l'effet d'une phrase<br />
qu'un rejet insignifiant. Les mots que l'on réservera<br />
pour le vers suivant seront donc le substantif, ou<br />
le verbe, ou une épithète remarquable, ou plusieurs <strong>de</strong><br />
res mots à la fois.<br />
Sous le rapport <strong>de</strong> la quantité, nous allons établir,<br />
d'après l'exemple <strong>de</strong>s poëles, les règles qu'il faut<br />
suivre.<br />
On peut rejeler un monosyllabe, pourvu qu'un<br />
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Î::IIIODE l'Oi'TIQUE.<br />
173<br />
autre membre <strong>de</strong> phrase lui soit étroitement uoi par<br />
une c:onjonction :<br />
Non reddita contrà<br />
Vox, fidamque negant suspecta silcnlia paeem. ST.<br />
Cœperat humcnLi cœlum subLexere pallâ<br />
Nox, ct cœruleam terris infu<strong>de</strong>ral umbram. ST.<br />
Mais ce cas est rare.<br />
Il est aussi permis <strong>de</strong> rejeler un trochée:<br />
lnfestisque obvia SigDis<br />
Signa, pares aquilas , et pila miDanlia piUs. L.<br />
TUDe etiam faLis aperit Cassandm fuLuris<br />
Üf"a, <strong>de</strong>i jussu non unquam credita Teucris. v.<br />
Mais les rejets les plus fréquents sont:<br />
1° Un dactyle:<br />
lLaliam , falo profugus, Lavinaque venit<br />
Litlora. V.<br />
2° Un dactyle est une longue:<br />
Quidve doleDs regina dClÎm Lot volvere casus<br />
Insignem pietaLe virum, LoL adire labores<br />
Impulerit. V.<br />
3° Deux pieds et <strong>de</strong>mi (ou la césure penthémimère) :<br />
Necdum eliam C3usœ irarum sœvique do1ores<br />
Exci<strong>de</strong>rant animo. v.<br />
Trois pieds et <strong>de</strong>mi (ou la césure hephthémimère):<br />
Quam JUDO ferLur terris magis omnibus UDam<br />
Posthabitâ coluisse Samo. v.<br />
Le poële peut choisir à son gré parmi ces différentes<br />
coupes, à moins que l'harmonie imitative ne le<br />
force d'adopter l'une <strong>de</strong> préférence, ou même d'aVOIr<br />
recours à d'autres moins usitées dont nons parlerons<br />
,<br />
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174<br />
CHAPITRE XXIV.<br />
plus tard. il doit aussi avoir gl'and soin <strong>de</strong> les varier.<br />
II y a <strong>de</strong> la monolouie dans les vers suivants:<br />
Siculasque relcgat in oras.<br />
Ingenio confisa loci. Trinacria quondam<br />
ltaliœ pars una fuit. CL.<br />
Et plus encore dans ceux-ci:<br />
FestinaL eniro <strong>de</strong>currere velox<br />
Flosculus, angustœ miserœque brevissima vital<br />
Portio : dum bibimus. dom serta, unguenta rosasque<br />
Poscimus, obrepit non intellecta seneetus. J.<br />
Un seul vers renferme quelquefois un sens complet;<br />
d'autres fois l'idée est exprimée en <strong>de</strong>ux, trois,<br />
quatr,e vers, etc. La pério<strong>de</strong> poétique peut comprendre<br />
jusqu'à sept ou huit vers: il est rare qu'elle<br />
en ait neuf.<br />
L Tantre molis erat Romanam con<strong>de</strong>re gentem !<br />
2. Defessi .!Eneadre , quœ proxima littora, cursu<br />
contendunL petere, et Libyœ vertuntur ad oras. V.<br />
5. Postera quum primo stellas Oriente fugâral<br />
Clara dies, socios in cœtum Iittore ab omni<br />
Advocat .!Eneas, tumulique ex aggere fatur. V.<br />
4. Dardanidœ magni, genus alto a sanguine divûm.<br />
Annuus exacLis completur mensibus orbis<br />
Ex q,uo relliquias divinique ossa parentis<br />
Condidimus terrâ. mœstasque sacravimus aras. V.<br />
5. At sreva e speculis tempus <strong>de</strong>a naeta nocendi •<br />
Ardua teeta petit slabuli , et <strong>de</strong> culmine summo<br />
Pastorale callit signum. cornuque recurvo<br />
Tartaream intendit vocem : quâ prote nus omne<br />
Contremuit nemus, et sil Val intonuere profl1ndœ. v.<br />
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178<br />
CllAPITRE XXIV.<br />
Qua\is, ubi hibernam Lyciam Xanthique fluenla<br />
Desel'it, ac De\um malernam invisit A\Jollo,<br />
Instauratque choros, mixtiquc altaria circum<br />
Cretesque Dryopesque Cremunt pictique Agalbyrsi :<br />
Ipse jugis cynlhi graùilur , mollique fluenlem<br />
Fron<strong>de</strong> premil crincm fingens, arque implicat auro;<br />
Tela sonant humeris. Daud i1l0 segnior ibat<br />
lEneas; tan turo egrcgio <strong>de</strong>cus en îlet ore. V.<br />
Non sic, aggeribus l'uptis quum spumeus amnis<br />
Elüt, oppositasque evicit gurgite moles,<br />
Fertur in ana furens cumulo , camposque per ornnes<br />
Cum stabulis armen!a trahit. Viùi ipse furenlem<br />
Cœ<strong>de</strong> NeoptoJemum, etc. V.<br />
Lorsqu'un discours a une certaine étendue, il finit<br />
ordinairement avec le vers. Au contraire, quelques<br />
paroles prononcées dans une situation violente se<br />
terminent fort bien sans que le vers soit complet. On<br />
trouve même d'assez longs discours qui sont dans ce<br />
<strong>de</strong>rnier cas. Quand Énée sort du nuage où il était<br />
caché, et se montre à la cour <strong>de</strong> Carthage, il dit<br />
(après douze vers) :<br />
In freta dum fluvii current, dum montllus umbrm<br />
Lustrabunl convcxa, polus dum si<strong>de</strong>ra pascet,<br />
Semper honos nomenque luum lau<strong>de</strong>sque manebunt,<br />
Quœ me cumque vocan! !errœ. Sic fatus, amicum<br />
Ilionea petit <strong>de</strong>xtrà, etc. v.<br />
Lucain semble affectionner cette manière <strong>de</strong> terminer<br />
ses discours: il réserve alors pour le vers imparfait<br />
un trait énergique, dont l'effet est souvent fort<br />
heureux.<br />
Caton veut ranimer ses soldats découragé,; par la<br />
journée <strong>de</strong> Pharsale: il finit par les imiter à porter sa<br />
tête au tyran pour mériter leur gràce:<br />
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180<br />
PÉRIODE POÉTIQUE.<br />
Ilium, et omnis bumo fumat Neptunia Troja,<br />
Diversa exsilia et dcsertas quœrere terras<br />
Augurüs agirour divûm, classeroque sub ipsâ<br />
Antandro ct pbrygiœ moHrour montibus Idill,<br />
Incerti quo fata fera nt , ubi sistere <strong>de</strong>tur;<br />
Contrahimusque viros. Vix prima incepcrat restas,<br />
Et pater Allcbises dure falis vela jubebat, etc.<br />
Le <strong>de</strong>rnier trait, Contrakimusque vi1'os, nuit à l'effet<br />
<strong>de</strong> cette belle pério<strong>de</strong>. Il est faiLle après tout ce qui<br />
précè<strong>de</strong>, et il trompe l'oreille, qui aLtendait un repos,<br />
au moins après le septième vers.<br />
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IJARMONIE IMITATIVE.<br />
183<br />
J. IIAR!!ONIB IMITA TlVE RÉSULTANT DU CHOIX DE CERTAINES LETTRES,<br />
DE CERTAINES SYLLABES.<br />
A. - Les vers suivants, pleins <strong>de</strong> douceur et <strong>de</strong><br />
grâce, le doivent à la voyelle a, qui Y est multipliée:<br />
lI{ollia luteolà pingit vaccinia caHbâ. V.<br />
Indum sanguineo veluli violaverit ostro<br />
Si quis ebur, auL mixta rubent ubi lilia multà<br />
Alba rostl. v.<br />
Elle exprime la majesté dans ce vers:<br />
Omnia suh magntl labentia llumina terrâ. v.<br />
E. - La voyelle e est propre à rendre un bruit<br />
sourd et lugubre, un sentiment douloureux:<br />
Insonuere cavœ gerniturnque <strong>de</strong>dêre cavernre. Y.<br />
Obseenique canes irnportunreque volueres. v.<br />
Te, veniente die, te, <strong>de</strong>ce<strong>de</strong>nte, eanebat. v.<br />
U. - Un son plus éclatant, un cri est imité par la<br />
syllabe um:<br />
Urgeri volucrum rauearum ad lillora nuhem. V.<br />
Hine exaudiri gemitus irœque leonum<br />
viucla recusanttlm , el serâ sub nocte ru<strong>de</strong>nttlm;<br />
Setigerique sues, alque in prresepibus ursi<br />
Srevire, ae for roœ magnorum Illulare luporurn. V.<br />
s. - Cette lettre pourra exprimer le gazouillement<br />
d'un ruisseau:<br />
Unda levi somnum sua<strong>de</strong>bil inire susurro. V.<br />
le sifflement <strong>de</strong>s serpents:<br />
Sibila lambcbanl linguis vibranlibus ora. V.<br />
R, S, T, X. - Les lettres les plus dures à prononcel',<br />
comme 1', S, t, X, serviront à peindre tout ce<br />
qui affecte désagréablement un <strong>de</strong> nos sens.<br />
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184 CHAPITIU> xxv.<br />
Écoutez le cultivateur promenant le raleau SUr la<br />
terre:<br />
Ergo œgre rastris terram rimantur. v.<br />
le bruit d'un atelier:<br />
Turn ferri rigor, atque argutœ lamina semc. v.<br />
N'entend-on pas icila bruyante manœuvre <strong>de</strong>s vaisseaux?<br />
Unù omnes ruere, ae tolum spumare reductis<br />
CODl'ulsum remis rostrisque tri<strong>de</strong>ntibus œquor. ,'.<br />
Les membres d'Hippolyte se brisent avec fracas:<br />
Ossa gravem dare fracta sonum. O.<br />
C'est maintenant un torrent qui mugit:<br />
Fractorurn suhitas tOITCntllm audire ruinas. ST.<br />
Virgile imite ainsi le brult <strong>de</strong> la grêle et celui <strong>de</strong> la<br />
charrue:<br />
Tarn mulla in tectis crepitans salit borrida grando, ..<br />
Post, valido nitens 511b pon<strong>de</strong>re, faginus axis<br />
Instrepat, et junctos temo trabat œreus orbes.<br />
Il sait rendre une sensation pénible pour le goût,<br />
pour le toucher :<br />
Et ora<br />
Tristia tentantÛIll sensu torquebit amaro.<br />
Aret<br />
Pcllis , et ad tactum tractanti dura resistit.<br />
Il nOus fait assister aux détonations <strong>de</strong> l'Etna:<br />
Portus ab accessll Yentorllm immolus, et i ngens<br />
Ipsc : sed horrificis juxtù tonat ..Etna ruinis, etc.<br />
Ce qu'il y a encore <strong>de</strong> remarquable dans ces <strong>de</strong>ux vers.<br />
c'est le calme qui règne dans le premier, si bien opposé<br />
au fracas du second.<br />
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186 CHAPITRE XX.V.<br />
,<br />
Hicgaieam tectis trepidusrapil; ille fremenles<br />
Ad juga cogit equos. v.<br />
Celui-ci, la mobilité d'une âme inquiète:<br />
Namque agor ut pel plana citus sola verbere turbo. TIB<br />
Ici c'est une lionne poursuivant le ravisseur qUi<br />
emporte ses lionceaux:<br />
Signaque nacla pedum, sequitur, quem non vi<strong>de</strong>t, hostem. O.<br />
Ne voit-on pas le mouvement léger d'un rat, en lisant<br />
ce vers?<br />
Hrec ubi dicta<br />
Agreslem pepulere, domo levis exsilit. H.<br />
Écoutons le langage pressé <strong>de</strong> la fureur:<br />
Sequar atris ignibus abscils ;<br />
El, quum rrigida mOTS animâ seduxeril arlus,<br />
Omnibus umbra lods ad.ero : dabis, improbe, pomas. V.<br />
Et, dans le même endroit, les cris <strong>de</strong> la vengeance:<br />
Non arma expedient, totâque ex urbll sequentur ,<br />
Diripientque rates alii navalibus? !te,<br />
Ferle citi flammas, date vela, impellite rcmos. v.<br />
Voyez quel élan règne dans ces yers! Et comparez à<br />
ce mouvement si naturel un passage où Lucain rend<br />
la même idée:<br />
Prœcipitate rates e sicr.o littore, naulre;<br />
Classis in ad versos erumpal remige ventos ;<br />
Ile duces mecum.<br />
Que ces vers sont froids et inanimés! quel contresens,<br />
sous le rapport <strong>de</strong> la ca<strong>de</strong>nce, dans ces syllabes lentes<br />
e sicco, adversos e1'Umpal!<br />
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IlARi\lONIE LlUTA.l'lVE.<br />
187<br />
2° La marche du spondée est plus grave. Il sert à<br />
ex primer la difficulLé , la lenteur, la majesté, la tristesse.<br />
Nous avons trouvé que dans ce vers :<br />
Ergo œgre rastris tcrram rimantur ,<br />
Virgile avait fait un habile usage <strong>de</strong> la leUre,.; nous<br />
remarquerons maintenant que les spondées concourent<br />
aussi à produire l'harmonie imitative.<br />
Le pénible travail du laboureur est encore beureu .<br />
sement exprimé par les vers suivants:<br />
Agricola, incurvo terrom moU tus aratro ,<br />
Exesa inveniet scabrâ rubigine pila. V.<br />
Ceux-ci ren<strong>de</strong>nt d'une manière pittoresque les efforts<br />
<strong>de</strong>s cyclopes et <strong>de</strong>s matelots;<br />
llli inter sese multâ vi bracbia tollunt. v.<br />
Adnixi torquent spumas, et cœrula vermnt. v.<br />
On semble partager la fatigue d'Hercule, qui trois<br />
fois a tenté vainement <strong>de</strong> pénétrer dans l'antre <strong>de</strong><br />
Cacus, quand on lit dans Virgile:<br />
Ter saxea tenlal<br />
Limina nequ.idquam; ter fessus valle resedit.<br />
Le même poële nous montre Thésée dans les enfers:<br />
(Dfelix Theseus.<br />
Se<strong>de</strong>t, œternùmque se<strong>de</strong>bit<br />
Ces spondées peignent admirablement l'éternité du<br />
supplice.<br />
Quel morne abattement règne dans le passage suivant,<br />
où Virgile exprime la tristesse du laboureur qui<br />
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188 CllAPIrRE xxv.<br />
a perdu un taureau, et le découragement <strong>de</strong> celui qui<br />
survi t à son frère!<br />
lt lristis aralor,<br />
Mœrenlem ahjungens fralernâ morle juvencum.<br />
Ceux-ci respirent aussi une profon<strong>de</strong> doulrur :<br />
El casum insonlis mecum indignabar amici. v.<br />
Al non infelix animi Phœnissa. v.<br />
La lenteut' d'un vieillard, la dignité d'un roi, sont<br />
encore rendues avec vérité par l'emploi du même<br />
pied:<br />
Olli sedato respondit cor<strong>de</strong> Latinus. v.<br />
Contemplez le calme et la majesté du maître <strong>de</strong>s<br />
dieux:<br />
vullu quo cœlum lcmpestatesque serenat,<br />
Oscula libavit natoo. V.<br />
Uemarquons ces grands mots indignabar, tempestates,<br />
et reconnaissons qu'ils sont propres à produire<br />
les mêmes effets, c'est-à-dire à exprimer la tristesse<br />
ou la gran<strong>de</strong>ur..<br />
Cassandre est tombée au pouvoir <strong>de</strong>s Grecs. Virgile<br />
commence cette scène par un vers d'une harmonie<br />
lugubre:<br />
Ecce trahebatuT passis priameïa virgo<br />
Crinibus.<br />
Il rend ainsi [e <strong>de</strong>uil profond ùes Troyennes, qui,<br />
fatiguées <strong>de</strong> leurs longs voyages, promènent <strong>de</strong>s<br />
yeux humi<strong>de</strong>s sur l'immensité <strong>de</strong>s flots:<br />
At procul in solà secretœ Tron<strong>de</strong>s actâ,<br />
Amissum Anchisen fichant, cunct:eque profundum<br />
Ponlum adspectabant fientes.<br />
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19-i ClLU'JTRE XXV_<br />
Ici le poëte a su reproduire la gravité d'une cérémonie<br />
religieuse:<br />
Armati Jovis ante aras, paterasque lenente. ,<br />
Stabant. V.<br />
Stace offre un bel exemple d'un spondée ainsi rejeté.<br />
11 parle du supplice <strong>de</strong> Tityus :<br />
Ipsre borrent , si quando pectore ab alto<br />
Emergnnt volucres, immensaquc membrajacentis<br />
Spectant> dum miserre crescunt in pabula fihrœ.<br />
Dans ce tableau les vautours sell}blent se complaire<br />
à contempler leur victime.<br />
3° Le rejet du dactyle, au contrarre: aura pour<br />
but <strong>de</strong> peindre la rapidité.<br />
Nisus lance une javeline :<br />
DixeraL, et loto connixu3 corpore, ferrum<br />
Conj'icit: basta volans noctis diverberat umbras. V.<br />
En lisant le mot conjicit, on suit le mouvement léger<br />
du trait. Un habile contraste fait encore ressortir davantage<br />
cette beauté : le premiers vers, et toto<br />
connixus, se traîne avec peine, parce qu'il imite<br />
l'effort du guerrier.<br />
lei l'on assiste à la chute d'un soldat blessé:<br />
Bic jn"enis primam ante aciem, stri<strong>de</strong>nte sagittâ ...<br />
Ste1"nitur. v.<br />
Didon fait un <strong>de</strong>rnier effort pour ouvrir les yeux à<br />
la lumière:<br />
flla, graves oeulos conata attollere 1 rursns<br />
Deficit. v.<br />
Le vers suivant offre une chute analogue:<br />
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196 CHAPITRE XXV.<br />
rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> Nisus, conjicit : vous reconnaltrez <strong>de</strong> part<br />
et d'autre le peintre habile <strong>de</strong> la nature.<br />
L'arrivée d'Énée a suspendu les travaux <strong>de</strong> Cartbage:<br />
Non cœplre assurgunl lurres, non armajuvcntus<br />
Exercet. V.<br />
Quelle langueur dans ce rejet! Les spondées du premier<br />
vers contribuent aussi à la peinture <strong>de</strong> cette<br />
ville qui semble inanimée.<br />
Le même poétc dit <strong>de</strong> Polyphême :<br />
Jacuitque peT antrum<br />
[mmensus.<br />
et il nous met sous les yeux l'image colossale du cyclope.<br />
Créuse veut retenir Énée qui se pl'écipite au COIllbat:<br />
Ecce autem complexa pe<strong>de</strong>s in !imine conjux<br />
Hœrebat, parvumque patri ten<strong>de</strong>bat lulum. V.<br />
Le mot hœrebat rend parfaitement les efforts obstinés<br />
<strong>de</strong> la tendresse conjugale.<br />
Énée arrache le rameau d'or qui doit lui frayer 1e<br />
chemin <strong>de</strong>s enfers :<br />
Corripit extemplo lllneas, avidusque refringit<br />
Ctlnctantem. v.<br />
Quelle rapidité dans le mouvement d'Énée, avid1tsque<br />
refringit! Mais le rameau résiste un instant à son impatience,<br />
cunctantem.<br />
5" On trouve quelquefois rejeté un grand mOL,<br />
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202 CH!J'ITRE xxv.<br />
7' La secon<strong>de</strong> suspension que nous avons annoncée<br />
a lieu après le cinquième pied.<br />
Laocoon court au secours <strong>de</strong> ses fils et il est à<br />
son tour enlacé par les serpents:<br />
Post ipsum, auxilio suheuntem ae tela ferentem,<br />
Gorripiunt, spirisque ligant ingentibu$ ; et jam<br />
Bis medium amplexi, etc. v.<br />
Tableau d'un vaisseau jouet <strong>de</strong> la tempête:<br />
Tol1imur in cœlum curvato gurgite, et I<strong>de</strong>m<br />
Subductâ ad lianes imos <strong>de</strong>sidimus undà.. v.<br />
Tibulle rend ainsi le mouvement d'une <strong>de</strong>vineresse<br />
qui tire un nom <strong>de</strong> l'urne:<br />
Ilia sacras pueri sortes ter sustulil : illi<br />
Reltulit e triviis omina certa puer.<br />
v. JURlIONIE fMlTATIVE RÉSULTANT DES tUSIONS.<br />
Les poëtes savent aussi tirer parti <strong>de</strong> l'élision. Souvent<br />
indifférente, elle <strong>de</strong>vient, au besoin, susceptible<br />
<strong>de</strong> produire <strong>de</strong>s effets frappants.<br />
Virgile rend pal' <strong>de</strong>s élisions accumulées la difformité<br />
<strong>de</strong> Polyphême :<br />
Monstrum horrendum, informe, ingens, cui lumen a<strong>de</strong>mptum.<br />
Il veut peindre l'hydre qui veille à la porte <strong>de</strong>s<br />
enfers:<br />
Quinquaginta atris immanis hiatibus hydra.<br />
Le hiat1ls produit par le concours <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux<br />
voyelles offre l'image du monstre, dont on croit voir<br />
les cinquante gueules béantes.<br />
Didon, près d'expirer, fait un <strong>de</strong>rni-er effort pour<br />
entr'ouvrir sa pesante paupière:<br />
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210<br />
CruPITRE XXVI.<br />
très-nombreuses; nous nous bornerons à en indiquer<br />
quelques-unes:<br />
Dooec eris felix, muItos oumerabis amicos;<br />
Tempora si fuerint oubila, solus eris. O.<br />
Semiscpulla rirûm curvis feriHolur aratris<br />
Ossa; ruiDosas occulit herba domos. O.<br />
Sed mihi quid pro<strong>de</strong>st vestris dis je ct a lacertis<br />
llios, et, murus quod fuit ùo!.è, solum? O.<br />
Ossa mei fralris c1avâ pcrfracta trinodi<br />
Sparsit humi; soror est prreda rcliela reris. O.<br />
Cujus opes auxere mem; cui dives egenli<br />
Munera multa <strong>de</strong>di, multa datura fui. O.<br />
Est tibi , sitque precor , natus , qui mollibus annis<br />
10 patrias artes erudiendus crat. O.<br />
Srepe fui meodax pro le mibi; sœpe pulavi<br />
Alba procellosos vela referre Notos. O.<br />
Ula dies fatum miserre mihi dixit: ab iIIâ<br />
pessima mutati cœpit amoris hiems. O.<br />
FIN DU VERS. - Le vers pentamètre se termine par<br />
un mot <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux syllabes, dont la quantité est un<br />
iambe. La <strong>de</strong>rnière syllabe doit être longue <strong>de</strong> nature<br />
:<br />
SOrte nec ulla meà tristior esse potest. O.<br />
ou douteuse<br />
Vix Pnamus Lanti, totaque Troja fuit. O.<br />
ou commune:<br />
Quod tibi donavi, perfi<strong>de</strong>, littus emo. o.<br />
Le "ers finit moins bien par une brève;<br />
Materiam credis ab hoste pete. O.<br />
La recherche <strong>de</strong> cet ïambe doit donc occuper avant<br />
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218 Cll!PlTRE XXVlI.<br />
Quicüm-\-que re-\-gnii fi-I-dit, et 1 magnâ 1 pOlens<br />
DomYna-l-tur au-l-lâ, nec Ileves J mëtüit J dcos,<br />
Anirnum-J-que Te-I-bus cre-J-dulum Ilœtis J <strong>de</strong>dit,<br />
:AIè vï<strong>de</strong>-I-at, et 1 te, Tro-Ha. Non 1 unquam J tulit<br />
Docnmen-\-ta fOTS \ majo-\-Ta, quàm J fragili Iloco<br />
SlaTent J super-\-bL COlu-\-rnen e-I-versum oc-I-cidit<br />
pollen-\-tïs lsï-\-œ, cœ-\-litum c-\-gl'egius Ilabor ...<br />
Yictam-\-que quam-I-vis vi<strong>de</strong>-\-at, haud J credit 1 sibi,<br />
Potuis-\-se vin-\-ci. spoli-\-li Popu-\-lator \ rapit. SEN.<br />
Sénèque admet quelquefois au premier pied le procéleusmatifJue<br />
(v on met bien:<br />
1 0 Un ïambe> un spondée> un dactyle ou un anapeste<br />
au premier pied;<br />
2 0 Un dactyle au troisième;<br />
3° Un anapeste au cinquième.<br />
1 Sanè accidil l10nnllnquam ut pro anapœslo, au! dactylo, aUI<br />
.pond,o, qUf,tuO" breves pnmo pe<strong>de</strong> ponanlur, lanquam :<br />
Beneficia pro re eolere , sapientis viri est.<br />
()Jar. ViCI. p. 2572.)<br />
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VERS LUlnIQUE.<br />
223<br />
diguée comme nous le voyons dans l'exemple suivant:<br />
Quin ipsa lanti penieax cla<strong>de</strong>s mali<br />
Siccavit oculos ; quodque in extremis sol et •<br />
Periere lacrimœ. Portat hune œger parens<br />
Supremum ad ignem; mater hunc amens gerit. SEN.<br />
Le vers ïambique, dont beaucoup <strong>de</strong> poëles ont fait<br />
usage 1, l'esta soumis aux règles essentielles suivies par<br />
Catulle, HOl'ace et Sénèque. Au <strong>de</strong>uxième et au quatrième<br />
pieds il présente toujours l' ïambe ou lc tribraque.<br />
Voici le commencement <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription qu'en fait<br />
Térentianus Maurus (p. 2432) :<br />
A<strong>de</strong>slo, iambe prrepes et tui tenax<br />
vigoris ; ad<strong>de</strong> concitum celer pe<strong>de</strong>m,<br />
Nec alterius indigcns opis, veni.<br />
Le propre <strong>de</strong> ce vers était la rapidité: pes citus> a<br />
dit Horace. Ausone le caractérise élégamment dans<br />
une <strong>de</strong> ses Épîtres 2 :<br />
Iambe, Parthis et Cydonum spiculis 1<br />
Iambe, pinnis alilum velocior<br />
Padi ruenUs impetu torrentio/,<br />
MagnA sonorœ grandinis vi <strong>de</strong>nsior,<br />
Flammis Corusci fulminis vibratior 1<br />
Jam nunc per auras Persei talaribus 1<br />
pctasoque ditis Arcados YeCtu5, 101a.<br />
Il. TRlUÈTRES DES ANCIENS TRAGIQUES ET DE PlIÈDRE.<br />
Les anciens tragiques latins n'ont pas imité la sévé-<br />
1 Maniai, Pétrone, Ausone, Pauli" <strong>de</strong> N 1 Pru<strong>de</strong>nce Sidoine ApoUifl<br />
alr!?, ctc. 0 e, !<br />
2 Epis/. 21.<br />
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238<br />
CnAl'ITRE XXVII.<br />
« blance avec la conversation, qu'à peine pouvait-on<br />
" y reconnaître la mesure i. »<br />
Horace, qui a jugé Plaute avec sévérité, à cause du<br />
dédain que son siècle professait pour les productions<br />
contemporaines, a dit :<br />
Al noslri proavi Plaulinos el numeros , el<br />
Laudavere sales, nimiùm patienter uLrumque,<br />
Ne dicam slultè mirati.<br />
Toutefois cetté critique ne porte pas expressément<br />
sur les trimètres du comique.<br />
Quintilien reconnaît l'harmonie <strong>de</strong> l'ïambique t7'imètre<br />
<strong>de</strong> Térence, quand il exprime le regret que le<br />
poëLe ne se soit pas borné à ce mètre!.<br />
Priscien s'étonne qu'on nie la ca<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s vel'S<br />
<strong>de</strong>s Comiques, et que cel'Lains savants préten<strong>de</strong>nt<br />
en pénétrer seuls le secret: Mir01' quosdam veZ abnegare<br />
esse in Terentii comœdiis metra> veZ ea quasi<br />
arcana, et ab omnibus doctis semota> sibi solis esse<br />
cognita corifirmare. C'est pour révéler ce prétendu<br />
mystère, qu'il a rédigé, en cinq pages, les règles <strong>de</strong><br />
la métrique <strong>de</strong>s Comiques 3.<br />
Pour faire juger <strong>de</strong> cette <strong>versification</strong>, je citerai un<br />
fragment pris au hasard dans Plaute (Trin J, 1).<br />
1 c?micorum &enarii, prol>ter 3imiLitudinem &ermonis ,1 sic sœlle sun ,<br />
abject!, ul nonnunquam "ja; in eis "umerus el l1e-rsu. illtelligi l,ossil.<br />
(Oral, ;;5.)<br />
2 Pl", adhuchabitura graliœ (scripla)J si inlra 'Jersu. trimelro.<br />
sletissenl. (bu/.I. Or. X, l, 99.)<br />
;) Ce grammairien, COmme nous l'avons déjà "", consl.ale que, <strong>de</strong> sou<br />
temps, [es vers <strong>de</strong>s. Comiques él.aienL souvenL dMccLUCUX par la faule <strong>de</strong>s<br />
copistes: Versus, $1 quo • • mp.rilia. .crip/orum coarud./, a.d ir,tegl'ullI<br />
,.uttluer. mwicœ locum (p. 1321 ). Que doit-ce êLre aujourd'hui 1<br />
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VERS ASC.LÉI'UDE. 263<br />
La plus agréable et la plus fréquente consiste à rejeter<br />
la césure penthémimère ;<br />
Luctantem lcariis fluctibus Africum<br />
11ercator metuens , oLium eL oppidi<br />
Laudat ,"ura sui. H.<br />
Me doctarum he<strong>de</strong>rre prremia frontium<br />
Dis miscent superis ; me gelidum nemus,<br />
Nympharumque lev es cum Satyris chori<br />
Secernunl populo. B.<br />
On rejette bien un spondée:<br />
Gau<strong>de</strong>nLem patrios fin<strong>de</strong>re sarculo<br />
Àgros, AUalicis conditionibus, eLc. U.<br />
Nec partern solido <strong>de</strong>rnerc <strong>de</strong> die<br />
Spernit, nunc viridi membra sub arbuto<br />
Stralus, nUDC ad aquœ lene caput sacrœ. H.<br />
Quelquefois aussi on rejette trois longues:<br />
lIlanet sub Jove frigido<br />
Venator, tenerm eonjugis immemor ...<br />
Donarem tripodas, prœmia fortium<br />
Graiorum: neque tu pessima munerum, etc. H.<br />
On doit rarement se permeltre une élision à la<br />
césure:<br />
Elegi monumentum œre perennius. n.<br />
surtout s'il y a un repos avant les <strong>de</strong>ux dactyles:<br />
Non omnis moriar ; multaque pars mel<br />
vitabit Libitinam: usque ego posterA, etc. H.<br />
Un monosyllabe, non précédé d'un autre monosyllabe<br />
J fait une mauvaise césure:<br />
Quod non imber edax, non Aquilo impotens<br />
possit diruere, aul innumerabilis ...<br />
Per qum spiritus et vila redit bonis. H.<br />
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264 VERS ASCLÉPIADE.<br />
Dans ce vers, comme dans le vers pentamètre f ,<br />
avec lequel il a une gran<strong>de</strong> ressemblance' , la césure<br />
rime souvent avec la fin du vers:<br />
o et prresidium et du1ce <strong>de</strong>cus meulII ..<br />
Evitata rotis j palmaque nobilis<br />
Terrarum dominos evehil ad <strong>de</strong>os :<br />
Hune si mobilium lurba Quiritium ...<br />
Ilium si proprio condidil horreo<br />
Quidquid <strong>de</strong> Libycis verl'itur areis. U.<br />
Ce mètre, fréquent dans les chœurs <strong>de</strong> SénèquE',<br />
se trouve aussi dans Ausoae et dans Pru<strong>de</strong>nce.<br />
1 re Remarque. L'asclépia<strong>de</strong>, composé <strong>de</strong> douze syllabes<br />
3, avec son repos obligé après la sixième, se<br />
rapproche beaucoup <strong>de</strong> notre vers alexand1'in '. Aussi<br />
nous semble-t-il plus harmonieux que les autres<br />
mètres lyriques.<br />
2 e Remarque. On voit dans Sénèque un asclépia<strong>de</strong><br />
dans lequel le premier pied est un dactyle:<br />
vitre dirus umor, quum pateat malis<br />
Ëlfûg'î-I-um, et miseros libera mors vocet.<br />
ASCLÉPIADE SPOND!ÏQUE. - Il Y a un autre asclépia<strong>de</strong><br />
qui prend un spondée au <strong>de</strong>rnier pied". Il en sera pal'lr<br />
au chapitre du vers Ch01"iambique, système auquel 011<br />
rattache aussi l'asclépia<strong>de</strong> proprement dit.<br />
1 Voy. ci-<strong>de</strong>ssus, p. 214.<br />
2 plusieurs grammairiens y voient un pentamètre abrégé d'une syllabe.<br />
Diomè<strong>de</strong> (p. 508) compare le jJl'emier vers d'Horace à ce pentamètre :<br />
Mœcenas atavis edite re1lJ.igi-J-bu •.<br />
3 Cc nombre a été noté par les anciens' Cf. Mar. Victor. p. 2.51 ; CU'J.<br />
Bass. p. 2663) •<br />
.( Bien entrndu, cela tient à nntre mauvaise prononciatiun.<br />
IS Voy. ci-<strong>de</strong>ssus (p. 261 ) un alcalque .pondGrqut.<br />
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270 VERS ET STROPHE SAPHIQUES.<br />
même quelquefois entre eux les vers saphiques, et l'élision<br />
a lieu <strong>de</strong> l'un à l'autre:<br />
Dissi<strong>de</strong>ns plcbi, numero beatorum<br />
Eximit virtus ...<br />
lIIugiunt vacCal, tibi tallit hinnitum<br />
Apta quadrigis equa ...<br />
Plorat, et vires animurnque moresque<br />
Aureos educit in astra.<br />
Si l'on reconnaît que ces petits vers s'unissent par<br />
la prononciation, on ne s'étonnera pas <strong>de</strong> voir à la fin<br />
<strong>de</strong> fun d'eux un monosyllabe qui par le sens appartient<br />
au vers suivant:<br />
Septimi, Ga<strong>de</strong>s aditure mecum , et<br />
cantabrum indoctum juga ferre nostra, et<br />
Blirbaras Syrtes ...<br />
Prene natali proprio, quOd ex hac<br />
Luce, lIIœcenas meus, etc.<br />
Plena miraris , positusq\le carbo ,w<br />
Cespite vivo.<br />
3" Remarque. Une fois dans Horace la césure allonge<br />
une syllabe brève:<br />
Angulus ridët, ubi non Hymetto<br />
lIIella <strong>de</strong>ceduot.<br />
4' Remarque. Le saphique a onze syllabes, comme<br />
l'alcaïque, et le rapport entre ces <strong>de</strong>ux mètres n'a pas<br />
échappé aux grammairiens 1. En reportant au commencement<br />
du saphique sa <strong>de</strong>rnière syllabe, on a un<br />
alcaïque:<br />
Sapho Cardines; audis minùs et minùs jam. H .<br />
..4 le. lam cardincs audis rninùs el minùs.<br />
1 cr. Mar. Viel . p. 2616 ; Alil. Fort. p. 2701.<br />
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VERS PllALÉCIEN.<br />
L'ïambe pour premier pied n'est pas rare dans<br />
Catulle:<br />
,<br />
Adèste, hen<strong>de</strong>casyllabi , quot eslis ...<br />
Amicos medicosque convocate ...<br />
Mens esse aliquid putare nugas.<br />
Dans une · seule pièce, le même poëte admet le<br />
spondée comme substitution au dactyle du second<br />
lieu:<br />
Oramiis , si fortè non moleslum est.<br />
Demontres ubi sint lure tenebrre :<br />
Te in Campo qU!lsivimus minore.<br />
Le vers plwlécien a souvent été employé par les<br />
Latins. Il convient aux sujets légers, gracieux, et à<br />
l'épigramme. On le voit dans plusieurs Silves <strong>de</strong> Stace,<br />
et dans Pru<strong>de</strong>nce, Sidoine, Boëce, l\Iartianus Capella.<br />
Remarque. On ne peut douter du charme que le<br />
nombre <strong>de</strong> onze syllabes avait pour l'oreille <strong>de</strong>s Romains<br />
i. Le vers héroique <strong>de</strong>s Italiens est également<br />
hendécasyllabe. Puisqu'en italien, comme en latin, la<br />
<strong>de</strong>rnière syllabe n'est pas accentuée, ces différents<br />
vers ont <strong>de</strong> l'analogie avec notre vers <strong>de</strong> dix syllabes<br />
à rime féminine:<br />
J'ai vu l'impie adoré sur la terre.<br />
L'e muet qui termine ce vers forme une onzième<br />
syllabe, que l'on entend à peine: la terre a exactement<br />
la quantité du mot minore, qu'on voit dans le<br />
<strong>de</strong>rnier exemple.<br />
t ,,"OU5 avons déjà vu l'alcarque tit le ,aphiq,,', qui on! le même nombr e<br />
<strong>de</strong> syllabes.<br />
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282 CHAPI nu; li: XXll .<br />
On trouve ce mètre employé dans plusieurs chœurs<br />
<strong>de</strong> Sénèque. Il le mêle à différents autres vers, particulièrement<br />
à <strong>de</strong>s saphiques. Il use <strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong><br />
libertés, et ne conserve fidèlement le trochée qu'au<br />
quatrième lieu. Ex. ;<br />
Fregit iosultaos, duxitque ad ortus ...<br />
Non maria asperis insana Coris .. .<br />
Te duce, concïdit toti<strong>de</strong>m diebus .. .<br />
Extimuit maous, iosucta carpi...<br />
IIlotum barbaricis -equitum catcrvis ...<br />
Sidus Arcadium, geminumque Plaustrum.<br />
Remarque. Le vers saphique 1 est un trochaïque <strong>de</strong><br />
cinq pieds:<br />
Jam sa-I-tis ter-l-ris nivis 1 atque 1 dirœ.<br />
TRIlIlÈTRE HYPERCATALECTIQI;E. - C'est un trochaique<br />
<strong>de</strong> six pieds et <strong>de</strong>mi. Marius Viclorinus 2 :<br />
Nunc J1H-vëm l'l-I-tëmüs, 1 iitque ô-I-rëmüs 1 supplï-l-ces.<br />
On voit les suivants dans un chœur <strong>de</strong> Sénèque:<br />
Vidimus patriam ruentem nocte fuoeslâ ...<br />
Vidimus simulata dona molis immeosœ.<br />
TROCHAïQUE SEPTÉNAIRE. - Le trochaïque septénaiTe<br />
(septenarius) , ou tétramètre catalectique, a sept pieds<br />
et <strong>de</strong>mi 8. Lorsqu'il est rigoureux, il prend le trochée ou<br />
le tribraqueaux lieux impairs; les lieux pairs admettent<br />
t Ci-<strong>de</strong>ssus, p. 265.<br />
2 Pag. 2528. Cf. Ser •. p. 1819; Aug. <strong>de</strong> Ar"$;c. IV, 6.<br />
3 Cf. Seru. p. 1819:.T. Mn"r. p. 243\ ; Mar. Viel. p. 2530; Ali/. Fort.<br />
p. 2693 ; Aug. <strong>de</strong> MUSIC. IV, ij; Y. 7.<br />
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284<br />
CBAl'ITRE XXXIT.<br />
sieurs livres <strong>de</strong> ses Satires. En voici quelques fragments:<br />
Bunc la-l-borem 1 sùmas, llau<strong>de</strong>m \1 qui ti-I-bi ne fru-I<br />
[-elum fe-I-rat.<br />
MÜDïf'îci cornes que amicis 1 noslris vi<strong>de</strong>amur virL<br />
Prospiciendum ergo in senectâ: 1 nunc est adolescentia.<br />
QuM si paulisper caplare, nIque 1 observnre hrec volueris.<br />
Beaucoup <strong>de</strong> sentences qui nous ont été conservées<br />
<strong>de</strong>s mimes <strong>de</strong> Publius Syrus sont dans ce mètre:<br />
Improbè Ncptunum accusaI, qui iterurn naufrngium facit.<br />
Benevoli conjunelio anirni maxima est cognal,jo.<br />
coutumeliam Dec fortis ferl , nec ingenuus facHo<br />
On le retrouve encore dans <strong>de</strong> nombreux fragments<br />
<strong>de</strong> l'ancien théâtre. En voici un <strong>de</strong> Pacuvius :<br />
Interea , propè jam occi<strong>de</strong>nte sole, inborrescit mare;<br />
Tenëbrœ cODdul}!iranlur, Doctisque et nimbûm OCCœrat nigror ;<br />
Flamma inter nubes coruseat, cœlum tonitru contremit;<br />
Grando rnilta imbri largiOuo subito prœcipitans cadit;<br />
Undique omnes venti erumpuDt, sœvi exsistunt turbines,<br />
Fervet aJstu pelagus.<br />
Plaute et Térence emploient le trochaïque septénaire<br />
presque aussi souvent que l'iambique trimètre.<br />
Voici un exemple <strong>de</strong> Plaute:<br />
Et miser sum et forlunnlus, si vos vera dicitis :<br />
Eo miser sum quia malè illi Ceci. si goalus meu·st.<br />
Beu heu 1 eur ego plus minusque fcci quam<strong>de</strong> 1 œquum fuil!<br />
Quod malè feci , crucior : modô si in-l-feclum lieri possiet!<br />
Nous lisons dans Térence:<br />
NOD oporluit relictas : portant quid rcrum y Bei mihi !<br />
1 La leçon ordinaire eSlqudrn. Mais voyez Festus , v. Quamdt.<br />
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VERS TROCHAÏQUE. 285<br />
Aurum, vcslem : et vcspcrascit, et non noverunt viam.<br />
Factum a nobis stuItè est. Abïdum tu, Dromo, ilIis obviàm.<br />
1 re Remarque. Le repos après le quatrième pied est<br />
presque toujours conservé 1. Nous avons signalé dans<br />
le <strong>de</strong>rnier vers <strong>de</strong> Plaute un cas assez fréquent : on<br />
peut mettre dans le premier hémistiche la première<br />
partie d'un mot composé:<br />
Ad caput amnis, quod <strong>de</strong> cœl0 ex-I-oritur suh solio lovis. P.<br />
Heu! qui rem ipsam posset intel-l-Iigcre, et 1hesnurum 1uum. P.<br />
Reddam le, ex ferâ, fame man-I-suetem • : me specta modô. P.<br />
Tu mihï cognata dudum in-I-1er memoratus nomina. Aus.<br />
Le repos <strong>de</strong> l'hémistiche manque dans un petit<br />
nombre d'exemples. J'ai ohservé qu'alors le second<br />
hémistiche commence toujours par une syllabe accentuée:<br />
Istrec ego ml semper habui re-l-tati tegumentum meœ. P.<br />
Adolescentihuicgeneresummo, a-I-mico atque requalimeo. P.<br />
Noli succensere, quM ego i-l-ratus ei feci malè. P.<br />
Nam qui hero ex sentenliâ ser-I-vire servus postulat. P.<br />
vi<strong>de</strong>o exire neminem ; ma-I-tronam nullam; in redibus. T.<br />
vestimentis frigus atque hor-I-rorem exaclurum pu lat. LUClL.<br />
Decipil virinos; quod mo-I-lendum conduxit, comest. POMPON.<br />
o flexanima a1que omnium re-l-giDa rerum oratio! PAC.<br />
Si uuquam quisquam vidit quem cata-l-pulLa aut ballista ice<br />
[rit. C,t:CIL.<br />
2' Remarque. Pour scan<strong>de</strong>r ce mètre dans les Cotniques,<br />
il faudra avoir égard à toutes les licences que<br />
nous avons notées à propos <strong>de</strong> l'iambique trimètre 3.<br />
---------------------------------------------t<br />
I.e. vers Où il manque doivent être tenus pour suspecl.!
VERS DA.CTYLIQUES. 305<br />
Phalisque. Il a trois dactyles et un iambe ou un pyrrhique<br />
1.<br />
Septimius Sérénus en avait fait usage 2 :<br />
Quandll fla-\-gëllli Iï-\-gas , ïtli \ jügâ ,<br />
Yitis et ulmus uti simul eant :<br />
Nam lIisi sint paribus frutieibus,<br />
Umbra neeat teneras amineas.<br />
On le trouve égal ement dans Boëce S :<br />
Qui sel'ere ingenuum volet agrum,<br />
Liberct arva priùs fruticibus ,<br />
Falce rubos filicernque rcsecet.<br />
TÉTRAlIIÈTRE CATALECTIQUE. - Il est composé <strong>de</strong> trois<br />
dactyles plus une syllabe. C'est la césure hephthémimère<br />
du vers hexamètre 4. On cite 5 les vers suivants<br />
<strong>de</strong> Seplimius Sérénus :<br />
Ïnql1ït li-\-rnïcüs a-I-gër dllmï-I-no :<br />
Si bene mi facias, memini. .•<br />
pinea brachia quum trepidant.<br />
Audio ranticulum zephyri.<br />
Ausone a fait quelques vers dans ce mètre; Pruùence<br />
l'a employé plusieurs fois.<br />
TÉTRAMtTRE flYPEltCATALECTIQUE. - On peut considérer<br />
COIllffie un tétmmètre hypercatalectique un vers<br />
Ifui a quatre pieds, plus une syllabe longue au milieu,<br />
1 Voyez, sur ce ycrs, Sen ius , p. J82 4; T. Maur. p . 2421; Mar. Viel.<br />
p. 2580.<br />
2 .Jpud T. M'l-u r . CL Mar. Vic l . 1. ciL.; Aug. d. MUl ie. IV, 30.<br />
;; Con . al. 1ll , J •<br />
.4 Jf,l r. V,el. p. 21:i 8.<br />
li 1'tr. Maur. eL Mar. lïd. 1. ·:iL.<br />
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338 CHANTRE nux.<br />
Jam veris comites, quœ mare LemperanL ,<br />
IIlJpcllunL animœ Iinlea Thraciœ;<br />
Jam nec praIa rigent, nec fluvii strepunt<br />
IIibernâ nhc turgidi '. H.<br />
3° ANAl'ESTIQUES dimètre et manomètre:<br />
Felix Priamus, dicimus omnes :<br />
Secum exce<strong>de</strong>ns sua regna tuiiL;<br />
Nunc Elysii nemoris LuLis<br />
Errat in umbris, inLcrque pius<br />
Felix animas Reclora quœrit.<br />
Felix Priam us ! felix quisquis<br />
Bello moriens omnia sccum<br />
Consumpla vi<strong>de</strong>L ! SEN.<br />
Le système qui précè<strong>de</strong> le manomètre a .plus ou<br />
moins <strong>de</strong> vers.<br />
Ausone S a composé une strophe <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux anapest1ques<br />
d'Ïmètres suivis d'un monomètre:<br />
Tu quoque in revum, Crispe, futurum<br />
MœsLÏ venies commemoratus<br />
Alunere Lhreni.<br />
4° Deux ou trois GLYCONIQUES trochaïques suivis d'un<br />
1'1UAPÉEN:<br />
Tu cursu, <strong>de</strong>a, menslruo<br />
MeLiens iter annuum ,<br />
Rustica agricolre bonis lecta frugibus expIes. CAT.<br />
Sit suo similis paLri<br />
Manlio, et facilè insciis<br />
NoscileLur ab omnibus,<br />
Et pudicitiam sure maLris ind1ceL ore. ID.<br />
t Neuf o<strong>de</strong>s d'lIoracc présenleDl cette strophe.<br />
li Prof. 21.<br />
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DE L'ACCENT. 353<br />
abréviations <strong>de</strong> illieee, istwee: Ils ont l'accent <strong>de</strong><br />
leur primitif: mie, illaée, illune, istie, etc.<br />
6° L'accent déplacé par l'enclitique reste sur la<br />
même syllabe, quand l'apocope fait disparaître la<br />
voyelle finale: vidén', audin', etc. Ainsi dans Virgile:<br />
Pyl'rhîn' connubia servas? Tant6n' me erimine dign1lm<br />
Duxisti? Et dans, Horace: Nem6n' oleum fert<br />
DeiUS?<br />
7° Quand le génitif <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième déclinaison<br />
en 'ius est contracté en i, au lieu <strong>de</strong> ii, l'accent<br />
se comporte comme si cette contraction n'avait pas eu<br />
Ji eu: Valerius, Valérii etValéri; tugurium, tugul'ii<br />
et tugul·i.<br />
8° Les parfaits <strong>de</strong> la quatrième conjugaison qui<br />
présentent une synérèse après la syncope conservent<br />
l'accent sur la syllabe accentuée dans le primitif: audivit,<br />
audit; munîvit, munît; petîvit, petit; obivit,<br />
obU 1.<br />
V. MOTS COMPOSÉS.<br />
Les mots composés suivent d'ordinairè les règles<br />
générales <strong>de</strong> l'accent. Ainsi l'on dit: e6ncavus, trilnsfuga,<br />
homielda, inlero, participa, signifer, fidicen,<br />
tibicen, agricola, terrigena, Publipar, Publipores,<br />
amnipotens, ildmodum , affatim, etc.<br />
Ces règles souffrent cependant quelques exceptions.<br />
1° Les adverbes composés <strong>de</strong> in<strong>de</strong> précédé d'une<br />
t cene différence d'accent faisait distinguer à l'ureille l'un et l'autre<br />
teJilps .<br />
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368 NOTES.<br />
l'AGE 68.<br />
ELLIPSE. - "voici quelques exemples d'ellipses plus<br />
fortes, qu'il faut remarquer, mais que nous ne pouyons<br />
pas imiter:<br />
Deiphobe Glauci (fllia). v .<br />
.!Eneas hale <strong>de</strong> Danais victoribus arma (vovit). v.<br />
Un<strong>de</strong> tibi frontem libertatemque parentis (sumis )? J.<br />
Tune duos unâ salvissima vipera cœnà (occidisti)? J.<br />
Sed mibi lam faciles un<strong>de</strong> meosque <strong>de</strong>os (sperem) ? O.<br />
QUo ml, inquit, mutam speciem, si vineor sOllo (<strong>de</strong><strong>de</strong>runt)? Pu.<br />
Quid te, flave Cydon, quid le per colla refusis<br />
Intactum, Crenœe, comis (dicam ) ? ST.<br />
Ergo nunc Dama sodalis<br />
Nusquam est! Un<strong>de</strong> mihi lam for lem lamque fi<strong>de</strong>lem 1 ? B.<br />
l'AGE 69.<br />
PLÉONASME. - L'ancienne langue <strong>latine</strong> employait<br />
beaucoup <strong>de</strong> pléonasmes qui peu à peu sont tombés en<br />
désuétu<strong>de</strong>. On trouve encore dans les vieux poëles:<br />
nusquam gentium ou terrarum, ubi gentium; e re<br />
!liane loci, in<strong>de</strong> loci, interea loci, posti<strong>de</strong>a loci,<br />
adhuc locorum ! ; post <strong>de</strong>in<strong>de</strong>, post in<strong>de</strong>; qu,ippe etenim,<br />
ergo igitur, ast autem.<br />
Le pléonasme <strong>de</strong> rerum est assez fréquent:<br />
omnia transformat sese in miracula rerum. \'".<br />
Quid agis, duleissime rerum? B.<br />
Quelquefois les poëtes mettent ait ou inquit , après<br />
avoir déjà annoncé un discours par une périphrase :<br />
1 Sous-enten<strong>de</strong>z petam ou parabo.<br />
!l Horace a dit : quo locon .. ", .<br />
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370 ::'fOTES.<br />
conçoit l'assimilation <strong>de</strong> œquare lacrimis labores, avec<br />
œquare lacrimas laboribus. Pareillement prœtexere<br />
funera sacris, c'est «couvrir les apprêts <strong>de</strong> mort d'une<br />
apparence <strong>de</strong> sacrifice. » Nous disons: l'espoir brille<br />
sur son jront, et son front brille d'espérance.<br />
On lit souvent qu'il ya une hypallage dans ce vers:<br />
Ibant obscuri solâ sub Docte per umbram. v.<br />
c'est-à-dire obscurâ soli. Servius permet, mais n'exige<br />
pas cette explication. Il vaut mieux, selon nous, expliquoc<br />
rigoureusement: « Ils allaient invisibles dans<br />
la nuit solitaire. l)<br />
At si virgineum snffu<strong>de</strong>rit ore ruborem. V.<br />
« Mais si elle répand sur son visage un mo<strong>de</strong>ste incarnat.<br />
" Suffun<strong>de</strong>re ora rubore, est une expression<br />
corrélative.<br />
Solane perpetuâ mœrens carpére juventâ 1 v.<br />
Assurément on s'éloignerait beaucoup du sens si<br />
l'on traduisait par, ton éternelle jeunesse. Mais perpetuus<br />
gar<strong>de</strong> ici son premier sens, le sens qu'il a par<br />
excellence au physique, celui <strong>de</strong> continuus. C'est<br />
donc : ta jeunesse entière, tu te mineras sans cesse,<br />
pendant toute ta jeunesse. II n'est pas besoin d'expliquer<br />
perpetud par perpetua.<br />
Vina, bonus quœ <strong>de</strong>ffiJ.e cadis onerà.rat A.cesles .•.<br />
Dividit. ".<br />
Ce n'est pas là une hypallage, pour quibus cados<br />
onerdrat; mais onerare admet en latin une double<br />
construction, <strong>de</strong> même qu'en français nous disons:<br />
charger <strong>de</strong> vin un navire, et charger du vin sur un<br />
navire<br />
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NOTES. 371<br />
En ramenant cette sorte d' hypallage 1 à la signification<br />
littérale, on débarrasse la poésie <strong>latine</strong> d'un <strong>de</strong><br />
ses plus étranges priviléges.<br />
PAGE 82 (1).<br />
VERS HYPERMÈTRES. - Voici tous les exemples dans<br />
lesquels Virgile a mis à la fin <strong>de</strong> l'hypermètre d'autres<br />
mots que ve ou q'!-'e :<br />
Aut dulcis musti vulcano <strong>de</strong>coquit humorem><br />
Et foliis undam, etc. (G. I, 295.)<br />
Jamque, iter emensi, torres ae tecta Latinorum<br />
Ardun cernebnnt. (.d!:. VII, 160.)<br />
Et spumas miscent argenti, Yiyaque sulphura,<br />
Idreasque pices. (G. Ill, 449.)<br />
Inseritur yero ex fetu nucis arbutus horrida ,<br />
Et steriles platani, etc. (G. II, 69. )<br />
Prreferimus manibus vittas ae verba precantia,<br />
Et petieresibi, etc. (.,ft. vn, 237.)<br />
Ces <strong>de</strong>rniers vers ont fait avancer à quelques critiques<br />
qu'il y avait <strong>de</strong>s vers dactyliques> comme <strong>de</strong>s<br />
vers spondaïques. Mais il est évi<strong>de</strong>nt que ces exemples<br />
ne diffèrent pas <strong>de</strong> ceux qui offrent que ou ve;<br />
car on ne trouve jamais ce dactyle que lorsque le vers<br />
suivant commence par une voyelle, ou qu'il peut y<br />
avoir une synérèse '.<br />
On a vu dans quelques mètres lyriques d'Horace 3<br />
l'élision avoir lieu d'un vers à l'autre, comme dans les<br />
exemples qui précè<strong>de</strong>nt.<br />
t Ce mot est très-vague, et n différents sens dans les grammairiens.<br />
2 Voy. p. 307. cr. Mar. Victor. p. 1969.<br />
S Ci-<strong>de</strong>ssus, p. 259, 269, 270,301.<br />
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376<br />
NOTES.<br />
terra <strong>de</strong> tero 1. Plusieurs inscriptions <strong>de</strong> la république<br />
confirment la remarque <strong>de</strong> Varron; mais ce n'est pas<br />
aux origines d'une langue qu'on va chercher les<br />
règles <strong>de</strong> son orthographe.<br />
Dans la question qui nous occupe, l'autorité <strong>de</strong>s<br />
manuscrits (j'excepte toujours les pius anciens) est<br />
presque sans valeul' ; car s'ils suppriment la <strong>de</strong>uxième<br />
consonne dans relligio, reppulit, etc., ils le font<br />
d'après un système généml, que les philologues<br />
qui l'adoptent en un cas se gar<strong>de</strong>nt bien <strong>de</strong> suivre<br />
dans les autres. Rien <strong>de</strong> plus fréquent que d'y trouver<br />
intervalum, atulit, afuit, tranquilus, male, belus,<br />
Catulus, etc., pour intervallum, attulit, affuit,<br />
tmnquillus, malle, bellus, C atullus, etc. , et cepenùant<br />
ces fautes d'orthographe n'opt pas encore trouvé<br />
<strong>de</strong> défenseurs.<br />
Que résultera-t-il <strong>de</strong> cette discussion, où je crois<br />
avoir établi une doctrine inattaquable? c'est que l'on<br />
continuera à écrire reliquias, religione, reperit, dans<br />
le cas <strong>de</strong> l'épenthèse; que les éditeurs seront tout<br />
glorieux d'employer cette orthographe sàvante, et<br />
auront une triste idée <strong>de</strong> celui qui doublera la consonne,<br />
ce que bien <strong>de</strong>s gens regar<strong>de</strong>nt comme un<br />
procédé d'invention mo<strong>de</strong>rne pour allonger une brève.<br />
PAGE 84.<br />
FINALE JlR:ÈVE SUIVIE DE DEUX CONSONNES. - Jusqu'ici<br />
j'ai cru <strong>de</strong>voir établir, dans une longue note, la né-<br />
t Terra dicta ab .ea, '" ..fU" •• cribit, guod teritur; ilaqlle tera ;71<br />
AIIgurum librÎs .cr.p/a cum r uno (DI L . L. V, 21).<br />
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NOTES. 381<br />
Eâ<strong>de</strong>m 1'atione, quurn jam efferebant, ut nos hodie<br />
yam, pro lubitu dissolvebant : nunc ïam.<br />
Notre langue offre <strong>de</strong>s analogies. Nous rusons oui,<br />
d'unè seule syllabe, et le participe ouï en a <strong>de</strong>ux.<br />
Riel', que les poëtes font aujourd'hui <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux syllabes,<br />
pouvait n'en avoir qu'une, même encore sous<br />
Louis XIV. Il pri-e-ra était primi tivement <strong>de</strong> trois syllabes:<br />
les premiers poëtes qui ont dit, en <strong>de</strong>ux syllabes,<br />
il prie-ra, ont fait une synérèse, et aujourd'hui<br />
la diérèse n'est plus permise. An-cien est disyllabe;<br />
autrefois ce mot était trisyllabe: an-ci-en. Nous écrivons<br />
éperon; on trouve dans nos vieux poëles épron,<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux syllabes. Avec n'a que <strong>de</strong>ux syllabes; mais<br />
que l'on traîne un peu sur la <strong>de</strong>rnière, et l'on dira<br />
avec Boileau :<br />
Tous les jours Je me couche avecque le soleil.<br />
C'était là une ancienne licence, dont Racine s'est<br />
abstenu, et qui a péri avec Boileau.<br />
PAGE 90.<br />
HEHMÈTRES D'HORACE. - Horace a dit (Epis!. Il,<br />
2,65) :<br />
Prreter celera, me Romrene poemala censes<br />
Scribere posse, inter tot curas totque Jabores ?<br />
Port-Royal .fait sur le premier <strong>de</strong> ces vers une remarque<br />
fort judicieuse: " Horace, voulant marquer<br />
la peine qu'il avait à s'appli.quer à faire <strong>de</strong>s vers parmi<br />
le tracas <strong>de</strong> la ville, l'a fait par ce vers sans césure,<br />
qui n'a presque pas la forme d'un vers. "<br />
Si l'on veut poursuivre cette idée, on trouvera<br />
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382 NOTES.<br />
qu'Horace, auteur d'un goût si parfait, a souvent<br />
donné une leçon par l'absence même <strong>de</strong>s qualités<br />
qu'il jugeait nécessaires à la poésie soutenue. Ainsi il<br />
recomman<strong>de</strong> au poëte qui médite un grand ouvrage,<br />
<strong>de</strong> ne pas imiter la négligence du style épistolaire. Il<br />
lui trace son travail :<br />
Reci<strong>de</strong>rel omne quod ultra<br />
PerCeclum traherelur , et in versu Caciendo<br />
S31pe caput scaberet, vivos el ro<strong>de</strong>ret ungues.<br />
S31pe stilum vertas, iterum qum digna legi sint<br />
Scripturus. (Sat. l, 10, 69. )<br />
Nous voyons ici le précepte el l'exemple: in vet·su<br />
faciendo, quœ digna legi sint, voilà <strong>de</strong>s vers qui ne<br />
sont pas faits; sœpe stilum vertas montre que le style<br />
<strong>de</strong> l'auteur n'a pas été assez retourné.<br />
Dans le passage suivant (Art. Poet. 263 ) , Horace<br />
met à l'épreuve le jugement du lecteur, prêt à se<br />
moquer <strong>de</strong> lui s'il n'est pas frappé du manque <strong>de</strong> ca<strong>de</strong>nce:<br />
Non quivis vi<strong>de</strong>t immodulata poemala ju<strong>de</strong>x.<br />
Ailleurs il critique Lucilius , et il rend la satire plus<br />
piquante en versifiant suivant la manière négligée <strong>de</strong><br />
ce poëte:<br />
QU31rere num illius, num rernm dura negàrit<br />
versiculos natura magis factos , et euntes<br />
]\Iolliùs ac si quis, etc. (Sat. l, 10, 57. )<br />
Mais quand Horace ne parle plus en moraliste,<br />
quand il rencontre une idée poétique qui exige uu<br />
ton élevé et une facture sévère, il ne le cè<strong>de</strong> dans<br />
l'exécution à aUCun autre poëte. Témoin ce passage<br />
<strong>de</strong> l'Art Poétique (v. 15);<br />
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NOTES.<br />
Purpureus, lalè qui splen<strong>de</strong>at, unus et alter<br />
Assuilur pannus, quum lucus et ara Dianre,<br />
Et properantis aqure per amœnos ambitus agros,<br />
Et Oumen Rhenum aul pluvios <strong>de</strong>scribitur arcus.<br />
383<br />
Il décrit en quelques vers (Sat. l , 5, 73) un commencement<br />
d'incendie, et aussitôt son style se colore:<br />
Nam vaga per veterem dilapso flamma culin am<br />
Vulcano, summum properabal lambere tectum.<br />
Con vivas avidos cœnam servosque limentes<br />
Tum rapere , atque omnes reslinguere velle vi<strong>de</strong>res.<br />
Ailleurs (Sat. Il , 1 , 12) il se dit incapable <strong>de</strong> célébrer<br />
les hauts faits d'Auguste, et il s'en défend dans<br />
<strong>de</strong>s vers dignes <strong>de</strong> l'épopée:<br />
.cupidum, pater optime, viras<br />
Deficiunt : neque enim quivis horrentia pilis<br />
Agmina , nec fractâ pereuntes cuspi<strong>de</strong> Gallos,<br />
Aul labentis eqoo <strong>de</strong>scribat vulnera Parthi.<br />
Nous allons voir, dans quelques vers, la pompe du<br />
style héroïque et la simplicité <strong>de</strong> la satire rapprochées<br />
avec un goût exquis (Epist. II, 1 , 248) :<br />
Nec magis expressi villtus per ahenea signa,<br />
Qoàm per vatis opus, mores auimique virorom<br />
Clarorum apparent. Nec sermones ego maUem<br />
Repentes per humum, quàm res componere gestas .<br />
Tcrrarumque situs et Oumina dicere, et arees<br />
Montibus impositas, et barbara regna, tuisque<br />
Auspiciis totom confecta duella per orbem,<br />
Claustraque costo<strong>de</strong>m pacis cohibentia lanum ,<br />
Et formidatam Parthis te principe Romam.<br />
Enfin, nous renverrons, pOur la noblesse et la ca<strong>de</strong>nce<br />
du vers, aux hexamètres <strong>de</strong>s Épo<strong>de</strong>s, nous<br />
bornant à en transcrire un seul fragment (16,43, sq.).<br />
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386 :l'OTES.<br />
Il faut négliger celle <strong>de</strong>rnière césure, qui n'était<br />
qu'un acci<strong>de</strong>nt particulier à la poésie pastorale l , et<br />
ne dispensait pas d'une autre césure. Le vers grec<br />
avait le choix entre les trois premières césures. Or il<br />
n'en est qu'une, la césure penthérnimère, qui suffise<br />
par elle-même au vers latin.<br />
1 0 Césure pentMmimère ou sémiquinaire :<br />
Contieuere omnes, 1 intentique ora tcnehant. v.<br />
Elle est également harmonieuse en latin comme<br />
en grec: c'est la césure pal' excellence. On me dispense<br />
d'insister sur ce point.<br />
2 0 La césure hepMMmimère, ou sémisepténaire,<br />
est assez fréquente en grec:<br />
0;;"'. O"oi OVT! TW à:ll"" Err.i ... (Hom. Il. 1,299. )<br />
ÀTp
390 NOTES.<br />
conticuere orones, intentique 6ra tenéhant,<br />
In<strong>de</strong> toro pater .!Eneas sic 6rsus ab 11110. V.<br />
Nous qui prononçons alto comme marteau, nous ne<br />
faisons pas attention au respect <strong>de</strong>s poëtes pour les<br />
syllabes jortes qui doivent commencer les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers<br />
pieds. Comme ces syllabes sont longues, et<br />
qu'elles sont en même temps accentuées, la fin <strong>de</strong>s<br />
vers est marquée pour l'oreille d'une manière bien<br />
sensible. \<br />
On voit tout <strong>de</strong> suite pourquoi les césures au cinquiéme<br />
et au sixième pieds sont défendues. Le vers<br />
suivant;<br />
Augescunt alim gentes, àlim minuunlur. Lr ..<br />
manque d'harmonie, parce que \e cinquième pied ne<br />
commence point par une syllabe accentuée. Cependant<br />
le commencement <strong>de</strong> ce pied est un temps fort<br />
sous le rapport <strong>de</strong> la quantité: il faut donc, ou renoncer<br />
à ce temps fort J que la ca<strong>de</strong>nce exige) ou faire<br />
ressortir une syllabe non accentuée) une véritable<br />
muette.<br />
Un défaut analogue se trouve dans les vers suivants;<br />
Et nova fictaque nuper , habebunt verha {i<strong>de</strong>m , si<br />
Grreco fonte cadant. n.<br />
Il faut prononcer fi<strong>de</strong>m, et cependant le temps fort<br />
est sur <strong>de</strong>rn.<br />
Nec semel hoc fecil, nec, si retraclus erit, jam<br />
Fiel homo. H.<br />
La syllabe rit, muette sous le rapport <strong>de</strong> l'accent,<br />
convient mal pour le temps frappé du sixième pied.<br />
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NOTES.<br />
391<br />
Pour rendre ce défaut plus sensible, j'avais, dans<br />
les précé<strong>de</strong>ntes éditions, comparé le vers hexamètre à<br />
notre alexandrin, et montré le jeu <strong>de</strong>s accents ùans<br />
celui-ci. Depuis lors, j'ai développé plus au 10ng cette<br />
doctrine dans mOR Traité <strong>de</strong> Versification française<br />
(p. 145 et suiv.), et j'ai été assez heureux pour<br />
qu'ellc obtînt l'approbation générale. Je renvoie au<br />
chapitre précité ceux qui désireraient la connaître.<br />
PAGE 164.<br />
CACOPHONIE. - A propos <strong>de</strong> IJorica castra, l'abbé<br />
DesfoDtaines cite avec éloge plusieurs exemples analogues.<br />
Le P. La Cercla, bien avant lui, avait ,'anté<br />
l'élégance <strong>de</strong> ce rapprochement (leporis et venustatis<br />
plena). Dirigeant donc mes observations <strong>de</strong> ce côté.<br />
j'ai recueilli <strong>de</strong>s faits; mais bient6t le nombre en est<br />
<strong>de</strong>venu si considérable, qu'il a fallu m'arrête!'. J'ai<br />
fait plus: j'ai cherché <strong>de</strong>s exemples où le plus simple<br />
déplacement dans la construction aurait fai.t é,·iler<br />
cette consonnance. J'ajouterai quelques citations aux:<br />
précé<strong>de</strong>ntes:<br />
Acbaica castra - fama malnm - date tcla - Oceano nOI -<br />
Ilamma manu - ipsn salis - glancâ canenlia - stirpe pe<strong>de</strong>s - te<br />
teneo - siliquà quassanle - adverso sole - Iliaci cineres _ rere<br />
reni<strong>de</strong>nti - curvà valle- si syrtibus - falsi Simoentis _ parere<br />
recusa - iJli limina - ascensu supero - triplici circumdaln -<br />
cmcâ caligine - mittêre reliclâ - <strong>de</strong>nte tenaci _ si sinè pace tutt<br />
- aure reliquit - vi "ictus - prima manu _ arma manu - lectissima<br />
matrum - clamore relinqui - tela LalinoruDl - Turne<br />
neras - veDiendi discere - tempora ramis _ incubat aIra - ce<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>o - non ulla laborum - teque qucrelis _ ad si<strong>de</strong>ra raptim -<br />
ego te terras - te teD<strong>de</strong>re contrà. v.<br />
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NOTES. 397<br />
longues, sont aussi admis à la fin du vers hexamètre:<br />
Glaucô, et Panlipère, cllnOo lIIelicertœ. V.<br />
Ismarus, aul Rhodopë, aul extremi Garamantes. Y.<br />
!lus, el Assaracus, raplusque Jovi Ganyme<strong>de</strong>s. o.<br />
L'analogie sera encore plus frappante, si l'on observe<br />
que dans ce cas le cinquième pied offre assez<br />
souvent une élision omise ou une césure allongée:<br />
Ulla moram fecere, neque Aonië Aganippe. V.<br />
Amphion Dircœus in Aclœii Aracynlho.<br />
Ille lalus niveum molli fultiis hyacintho.<br />
A>tas Lncinam justosque paU hymenœos.<br />
Grains homo, infectos Iinquens profugûs hymenœos.<br />
Evolal infclix , et femineii ululatu.<br />
Suslinet, et Turni natœque callit hymenœos. ID .<br />
Arsit et OEni<strong>de</strong>s in Mamaliâ A/alan/à. O.<br />
Ut Tegeœus aper, cupressiferii Erymantho.<br />
Ille Noto Zephyroque et Silhoniii A.qui/oni.<br />
Tympanaque, et plausus, et Baccheï ululatus.<br />
Cumque Phereliadë, et Hyanteô Jolao. O.<br />
lam veniel virgo, jam dicelür hymenœus. eAT.<br />
Cum facibus spirisque el Tarlareo ululatu. V. FL.<br />
Gorgonis hic proies in Pieriii HeUcone. GERM.<br />
Ces licences, nous le répétons, dérivent toutes <strong>de</strong><br />
l'imitation <strong>de</strong>s Grecs.<br />
PAGE 208.<br />
VERS PENTA.MÈTRE. - L'étymologie du mot pentamètre<br />
indique que ce vers est composé <strong>de</strong> cinq pieds.<br />
On dit alors que le troisième est un spondée, et les<br />
<strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers <strong>de</strong>s anapestes.<br />
Quintilien reconnaît que le pentamètre a un spondée<br />
au troisième lieu i mais il fait observer en même<br />
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NOTES.<br />
399<br />
Cc vers n'est point usilé dans la tragédie. Euripi<strong>de</strong><br />
seul en a introduit quelques-uns dans son Andromaque.<br />
Ovi<strong>de</strong> indique que c'est une chose nouvelle<br />
pour la tragédie <strong>de</strong> s'exprimer en vers pentamètres,<br />
lorsqu'il fait dire à l'Élégie, s'adressant à la Muse tragique:<br />
Irnparibus tamen es numeris dignata rnoveri :<br />
ln me pugnâsti versibus usa meis.<br />
Le vers pentamètre ne s'emploie pas seul; et la raison<br />
en esl simple: coupé eo <strong>de</strong>ux parties égales, et<br />
reproduisant toujours son indispensable césure, il eût<br />
üffert une gran<strong>de</strong> monotonie. Il ne faut voir qu'un<br />
court et ingénieux badinage dans ces vers, attribués<br />
à Virgile:<br />
Sic vos non vobis nidificatis, aves.<br />
Sic vos non vobis vellera fertis, oves.<br />
Sic vos non vobis mellificatis, apes.<br />
Sic YOS non vobis ferUs aratra, boves.<br />
Dans une pièce d'Ausone, où il a rapporté, en<br />
mètres différents, les sentences <strong>de</strong>s sept Sages <strong>de</strong> la<br />
Grèce, le <strong>de</strong>rnier paragraphe est en vers pentamètres:<br />
Turpe quid ausurus. te sine teste lime.<br />
Vila perit; morlis gloria non moritur.<br />
Quid factul'us eris, dicere sustuleris.<br />
Crux el, si meluas, vincere quod nequeas.<br />
Quum verè objurgas , sic, inimice. juvas;<br />
Quum falso laudas, tune, cl amice. noces.<br />
Nil nirnium. Satis est: nc sit et hoc nirniurn.<br />
Je citerai encore six vers faits contre l'empereur<br />
COlllmo<strong>de</strong> i :<br />
t ;Ipud Lampr. (;Inlon. Diadum. 7).<br />
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400 NOl'ES.<br />
commodus Hcrculeum nomen habcre cupit;<br />
Anloninorum non pulal esse bonum :<br />
Eipers huma ni juris el imperii ,<br />
Sperans quin etiarn cJal'iùs esse <strong>de</strong>um ,<br />
Quàm si sil princeps sanguinis cgl'egii.<br />
Non erit iste <strong>de</strong>us, nec lamen uUus homo.<br />
On peut voir ùans Martianus Capella (p. 307) une<br />
pièce <strong>de</strong> 28 vers pentamètres, SUl' Orphée, Arion et<br />
Amphion.<br />
l'AGE 214.<br />
PENT.urÈTRES LÉONINS. - Dans la première èditjofi<br />
<strong>de</strong> cet ouvrage, je conseillais, avec POl't-Royal, d'éviter<br />
les pentamètres léonins> comme celui-ci:<br />
Qurerebant Ilavos per nemus omne favos. O.<br />
Cependant il m'est venu une réflexioh : Pourquoi,<br />
me suis-je dit, le poële n'a-t-il pas mis:<br />
Flavos qurerebant per nemus omne ravos.<br />
Ne pourrait-il pas se faire qu'il y eût qu elque charme<br />
dans cette consonnance même? J'ai reconnu, par une<br />
infinité <strong>de</strong> passages, qu'il en était ainsi. On en Jugera<br />
sans doute <strong>de</strong> même quand j'aurai cité quelques exemples<br />
où un simple déplacement <strong>de</strong> mols eût pu faü'e<br />
éviter le vers léonin:<br />
posset servitium mile lenere Luum. P"oP<br />
Neplunus fratri par in amore Jovi.<br />
Neu subeant labris pocula nigra suis,<br />
Nam sine le noslrurn non valet ingeniurn.<br />
posses in tanto vivcre Ilagitio?<br />
Non est ingenii cymba gravanda tui .<br />
Mollia sunt parvis praIa terenda rotis ,<br />
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NOTES. 409<br />
Hermann (p. 472) approuve ceLte division; Braunhard<br />
et Orelli la reproduisent dans leur édition<br />
d'Horace, et ils renvoient à la dissertation du philologue<br />
anglais, que Gaisford insère dans son édition<br />
d'Héphest!on (p. 254). L'opinion <strong>de</strong> Bentley semble<br />
donc faire loi aujourd'hui parmi les savants.<br />
On peut cependant élever contre ce système plusieurs<br />
objections qui me paraissent <strong>de</strong> quelque poids.<br />
1° Et d'abord aucun grammairien latin ne nous apprend<br />
qu'Horace ait composé <strong>de</strong>s ioniques dimètres.<br />
Puisqu'ils lui empruntent <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux autres<br />
ioniques, il eût été assez naturel qu'ils le citassent<br />
aussi pour le dimètre.<br />
2° Ensuite ce système néglige d'une manière trop<br />
hardie le témoignage <strong>de</strong>s anciens, qui disent, dans<br />
une foule <strong>de</strong> passages, que l'o<strong>de</strong> d'Horace contient<br />
<strong>de</strong>s trimèt1'es, et plus <strong>de</strong> trimèt1'es que <strong>de</strong> tétramètres.<br />
3° Une grave autorité a échappé à Bentley , laquelle<br />
vient confirmer encore le mètl'e qu'il a <strong>de</strong>stitué. Je<br />
veux parler <strong>de</strong> cette élégante épigramme intitulée<br />
Pasiphae, dans laquelle un grammairien ancien il<br />
réuni tous les mètres d'Horace. Cette omission a d'autant<br />
plus lieu <strong>de</strong> surprendre, que Bentley lui-même a<br />
inséré cetle pièce dans son édition d'Horace. On y<br />
trouve, comme modèle <strong>de</strong> l'ionique mineU1', précisément<br />
le trimètre:<br />
Et amoris pudibundi malesuadis.<br />
4° Attachant une gran<strong>de</strong> importance à cc que l'idée<br />
fût distribuée naturellement, je d.ésirais, à la fin <strong>de</strong><br />
III première sll'Ophe : rnet1œntes patruœ verbera fin-<br />
18<br />
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410 NOTES.<br />
guœ> au lieu <strong>de</strong> placer metuentes à la fin du vers<br />
précé<strong>de</strong>nt, comme le fait Bentley. Pareillement à la<br />
troisième strophe:<br />
Eques ipso melior nellerophonte,<br />
N eque pugno nequc segoi pe<strong>de</strong> vic tus.<br />
Je trouvris plus <strong>de</strong> symétrie dans cet arrangement<br />
que dans l'aùdition <strong>de</strong> neque pugno au premier <strong>de</strong> ces<br />
<strong>de</strong>ux vers. Ce qui n'était cbez moi qu'un soupçon<br />
s'est changé en certitu<strong>de</strong>, quand j'ai découvert <strong>de</strong>ux<br />
passages omis par Bentley , et qui mellaraissent trancher<br />
la question. Censorin donne <strong>de</strong>ux rojs (p. 2726<br />
et 2728) un exemple <strong>de</strong> l'ionique mineur; et au lieu<br />
<strong>de</strong> citer le premier vers <strong>de</strong> l'o<strong>de</strong> d'Horace, comme<br />
font les autres gmrnmairiens , il cite le troisième:<br />
Meluentis patroz verbera lingue.<br />
Donc la strophe finit par un trimètt·e.<br />
La manière que je propose me semble lever toutes<br />
les difficultés. Elle maintient le tétramètre au commencement,<br />
ce que lIarius Victorinus indique dans<br />
trois passages j elle concilie, en les admettant à la fois,<br />
les opinions <strong>de</strong>s grammairiens, et cela sans tomber<br />
dans l'inconvénient <strong>de</strong> couper <strong>de</strong>s mots.<br />
rm.<br />
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