4 - Conseil Général de l'Hérault
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« J’adore Paris,<br />
j’adore la culture française,<br />
mais quelque part, je sais<br />
que je ne suis pas chez moi. Mes<br />
origines me le rappellent »<br />
Souad Massi<br />
Vous chantez en quatre langues et<br />
empruntez <strong>de</strong> nombreux styles<br />
musicaux (chaâbi, rock, country, fado,<br />
musique arabo-andalouse). Vous<br />
<strong>de</strong>vez être la bête noire <strong>de</strong>s disquaires !<br />
Non, je ne pense pas ! Vous savez, j’ai<br />
grandi dans un pays au carrefour <strong>de</strong>s<br />
cultures européenne, orientale et africaine,<br />
alors je traduis ça dans ma musique.<br />
Je suis une artiste libre et je ne veux pas<br />
m’enfermer dans un style. Je ne pense<br />
pas que ça perturbe les gens.<br />
Au début <strong>de</strong>s années 2000, on<br />
vous a qualifié <strong>de</strong> porte-parole<br />
<strong>de</strong> la jeunesse algérienne.<br />
Etiez-vous d’accord avec ça ?<br />
Non, je ne me considérais pas comme ça.<br />
Quand on est artiste, on est exposé et on<br />
<strong>de</strong>vient malgré soi un symbole. Je ne<br />
peux pas empêcher les gens <strong>de</strong> dire ce<br />
qu’ils veulent, même si je dois bien<br />
l’avouer ça m’a fait plaisir !<br />
L’INVITÉE<br />
Souad<br />
Massi<br />
Après l’Australie, la chanteuse d’origine algérienne pose son étui<br />
<strong>de</strong> guitare à Montpellier. Elle répond à l’invitation d’Arabesques et<br />
d'Habib Dechraoui où elle présente « Chœurs <strong>de</strong> Cordoue », avec<br />
une danseuse et quatre musiciens, dont le génial Eric Fernan<strong>de</strong>z.<br />
Aujourd’hui, vous sentez-vous une<br />
porte-parole ? Et si oui, <strong>de</strong> qui ?<br />
Je ne cherche pas à l’être. Quand je rencontre<br />
<strong>de</strong>s gens qui me disent « Je suis<br />
passé par une pério<strong>de</strong> diff icile et vous<br />
m’avez accompagné », c’est ma plus belle<br />
récompense, ça me touche énormément<br />
et je suis fière <strong>de</strong> ça.<br />
Vous avez dit que l’exil vous avait<br />
beaucoup porté à écrire sur la nostalgie.<br />
Vous sentez-vous encore en<br />
exil, aujourd’hui ?<br />
Aujourd’hui, je vis à Paris et je vais être<br />
franche : je me sens bien en France. J’adore<br />
Paris, j’adore la culture française, l’architecture…<br />
Mais quelque part, je sais que<br />
je ne suis pas chez moi. Mes origines me<br />
le rappellent, certaines personnes me le<br />
font bien sentir aussi, par un regard ou<br />
<strong>de</strong>s paroles. Ça existe toujours mais bon,<br />
j’arrive à dépasser ça.<br />
Vous êtes invitée à Arabesques, le festival<br />
<strong>de</strong>s arts du mon<strong>de</strong> arabe. C’est<br />
important, dans ces temps <strong>de</strong> repli, <strong>de</strong><br />
méfiance <strong>de</strong> l’autre, <strong>de</strong> lui partager sa<br />
culture ?<br />
Oui, c’est une richesse et ça rapproche. Je<br />
vais vous donner un exemple : dans mon<br />
immeuble, il y a eu un cambriolage, commis<br />
par <strong>de</strong>s hommes en uniforme <strong>de</strong> travailleurs,<br />
en plein jour. Comme personne<br />
ne se parle, personne ne savait si le voisin<br />
était bien là ou pas. Et personne n’a bougé.<br />
On <strong>de</strong>vient tous étrangers, on a peur<br />
<strong>de</strong> l’autre, on se parle pas. C’est le mo<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> vie qui nous éloigne les uns <strong>de</strong>s<br />
autres.<br />
Dans cette édition 2013 d’Arabesques,<br />
les Chibanis sont à l’honneur. Ça vous<br />
inspire quoi ?<br />
Aaah, les anciens… J’ai beaucoup <strong>de</strong> respect<br />
pour eux, ils représentent les racines,<br />
la source, l’Histoire. Surtout ceux qui sont<br />
venus avant nous en France. Ils ont eu la<br />
vie dure. J’en sais quelque chose : mon<br />
grand-père est venu à 17 ans bosser dans<br />
le bâtiment, il a eu beaucoup <strong>de</strong> galères, il<br />
a beaucoup souff ert.<br />
À quoi doit s’attendre le public<br />
héraultais ?<br />
Je vais venir avec Chœur <strong>de</strong> Cordoue,<br />
un spectacle jamais joué à Montpellier.<br />
On va raconter l’histoire <strong>de</strong> Cordoue,<br />
avec <strong>de</strong> la danse et <strong>de</strong> la musique andalouse.<br />
Et sans me vanter, je pense qu’ils<br />
vont aimer ! (rires)<br />
Mai 2013 — 27