LA GRANDE HISTOIRE 36 —Mai 2013
« Quand l’orchestre s’arrête <strong>de</strong> jouer, que les heures sonnent au clocher, plantée entre mes <strong>de</strong>ux marronniers, le sommeil n’est toujours pas arrivé. » lentement mijotée, et cette inoubliable mousse au chocolat ! Autant <strong>de</strong> repas mémorables. Suivis toujours d’une sieste indispensable. En fin d’après-midi, dans la perspective <strong>de</strong> l’arrivée très attendue du troupeau à Montpeyroux, <strong>de</strong>s pompons colorés sont attachés sur la tête <strong>de</strong> quelques bêtes, une tradition ancienne propre à la transhumance. La foule a commencé à se rassembler pour accompagner le troupeau sur quelques kilomètres, et assister à son arrivée dans le village. Chaque année c’est en musique et animations qu’est accueilli ce grand moment. « Ici transitaient autrefois près d’une cinquantaine <strong>de</strong> troupeaux », me confie Pierre. Quittant les villages <strong>de</strong>s plaines, tous passaient là pour rejoindre les fraîcheurs cévenoles. Aujourd’hui la population <strong>de</strong> Montpeyroux se mobilise pour fêter l’étape <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier et unique troupeau. Une vraie cavalca<strong>de</strong> Mais il faut avant cela traverser le pont suspendu sur l’Hérault. Ce n’est pas une mince aff aire. Ne pouvant supporter le poids <strong>de</strong> tout le troupeau en un seul bloc, Il faut faire passer les bêtes par petits groupes. Moment <strong>de</strong> panique, elles partent en tous sens, chacune voulant à tout prix rejoindre ses congénères. Dans un joyeux désordre, une vraie cavalca<strong>de</strong>, elles franchissent cahin-caha le fragile pont sous les yeux ravis <strong>de</strong>s spectateurs. Arrivée au village au milieu <strong>de</strong>s flonflons. Une vaste prairie mitoyenne est mise à disposition, les sanitaires du sta<strong>de</strong> nous sont ouverts. Délice d’une douche fraîche, puis grand banquet festif avec orchestre, que chacun peut venir partager. La nuit est courte, j’ai posé mon hamac entre <strong>de</strong>ux marronniers à l’écart <strong>de</strong> la place. Les Viganais, Pierre et Bruno, habitués et mieux organisés, ont un couchage plus confortable dans leur voiture. Thierry, comme toujours, va dormir près <strong>de</strong> ses brebis. Le soir, pendant que tous sont à la fête, iI les a passées en revue, s’assurant que tout va bien et prodiguant quelques soins. Quand l’orchestre s’arrête <strong>de</strong> jouer, que les heures sonnent au clocher, plantée entre mes <strong>de</strong>ux marronniers, le sommeil n’est toujours pas arrivé. 5 h déjà. Je n’ai pas fermé l’œil. Mon hamac est déglingué, <strong>de</strong>s enfants ayant joué avec avant que je n’essaie <strong>de</strong> me coucher. Qu’à cela ne tienne. Des portières <strong>de</strong> voiture claquent. Bruits <strong>de</strong> voix étouff és. Me voilà vite levée. Un peu d’eau jetée au visage, un thé avalé à la Jean-Paul Salasse, Directeur <strong>de</strong>s Ecologistes <strong>de</strong> l’Euzière « La transhumance à pied, ce n’est pas du folklore ! C’est un vrai travail. » « Le pastoralisme est précieux pour l’environnement, il permet le maintien <strong>de</strong>s milieux ouverts et la préservation <strong>de</strong> la biodiversité. Il a aussi un rôle important dans la prévention <strong>de</strong>s incendies. Pour les transhumances, la montée en estive en camions étant onéreuse, les bergers poursuivent les pratiques d’antan, mais les troupeaux sont moins nombreux et moins importants. Aujourd’hui, ils empruntent les petites routes, car les drailles d’autrefois, faute d’être entretenues, ont pratiquement disparu. La transhumance nécessite un gros travail préparatoire, notamment d’autorisations <strong>de</strong> passage auprès <strong>de</strong>s mairies et préfectures. » Lexique Patou Chien <strong>de</strong>s Pyrénées. Élément clé <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>s troupeaux contre les attaques <strong>de</strong> prédateurs. Draille Chemin <strong>de</strong> transhumance tracé naturellement par les troupeaux. Migou Fumier récupéré dans les bergeries. Un revenu d’appoint pour le berger. Mai 2013 — 37