3 KORPES Handicap mental - EESP

La mystique s’envole et l’éthique de l’aumône poursuit un
chemin difficile et tourmenté.
L’agrandissement des villes, les misères qu’entraînent les
guerres, les disettes et les épidémies, provoquent de véritables
cortèges d’indigents, composés de vagabonds, de chômeurs,
de truands, accompagnés de malades en tous genres: épileptiques,
fous ou idiots, invalides. Cette situation nouvelle implique,
d’après FOUCAULT, “...que l’assistance aux pauvres
prenne un sens nouveau” 32 . C’est la distinction entre le “pauvre
valide” et le “pauvre malade” qui permettra de le définir.
Jusque-là regardée comme instrument de salut, nécessaire
au bon fonctionnement de la communauté (le riche était sanctifié
par le pauvre), l’aumône devient suspecte d’accroître le
vice au lieu de soulager la misère. Cette contradiction est le
point de départ de la remise en cause du principe d’assistance,
de charité, qui avait fonctionné jusque-là sans trop de discussion
(même si pour Charlemagne déjà la mendicité était un mal
et l’aumône un abus lorsqu’elles devenaient moyen d’existence)
33 . Tout cela pour expliquer que des impératifs de police
(contrôle des mouvements de population) et des impératifs
d’ordre moral, seront à l’origine de l’enfermement qui surviendra
dès le XVIe siècle, et dans lequel seront entraînés les
handicapés et les aliénés, au milieu d’autres marginaux.
Sur le plan des idées, l’imprimerie permet la diffusion des
découvertes et, dès la fin du XVIe siècle, apparaît la coutume
des thèses écrites, dont la première fut imprimée en 1559. Si les
idées semblent faire une place plus grande à l’analyse objective,
les questions auxquelles s’intéressent les médecins nous
apparaissent aujourd’hui puériles. C’est du moins le qualifi-
32. FOUCAULT, M., op. cit., p. 432.
33. MARTIN, J. B., La fin des mauvais pauvres, De l’assistance à
l’assurance, Champ-Vallon, Paris, 1982, p. 16.
30