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prix encre d'asie 2012 - Lycée français de Singapour

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56<br />

L’Esprit dans les voiles<br />

Le soleil venait <strong>de</strong> se coucher. Immobile à la proue <strong>de</strong> son navire, le jeune<br />

garçon contemplait une <strong>de</strong>rnière fois les lueurs du port <strong>de</strong> Makassar. Il avait<br />

l’intime conviction que ce voyage allait définitivement changer sa vie. Ce que<br />

je ne savais pas c’est que la mienne allait changer aussi.<br />

Je suis allée le voir pour lui dire qu’il <strong>de</strong>vait aller sur l’autre bateau. Il ne<br />

voulait pas y aller, parce que l’esprit <strong>de</strong> ses parents qui venaient juste <strong>de</strong> mourir<br />

se noyait dans son cœur. Ses yeux bleu foncé commençaient à perdre leur<br />

couleur, ses beaux cheveux blonds couvraient sa figure. Il a pris ma main et on<br />

s’est dirigé vers l’autre bateau.<br />

La nuit venue nous nous sommes installés autour d’une lampe à huile. Il y<br />

avait le jeune garçon, l’homme <strong>de</strong> ménage, le cuisinier et moi. On se racontait<br />

<strong>de</strong>s histoires, <strong>de</strong>s flammes volaient dans les airs. Une musique imaginaire<br />

commençait à jouer dans ma tête et les flammèches faisaient une petite danse.<br />

Après avoir mangé, on s’est couché. J’ai posé ma tête sur du bois et j’ai regardé<br />

le ciel, il ressemblait à une soupe aux étoiles. C’était comme si je pouvais mettre<br />

une cuillère et mélanger les astres.<br />

Je pouvais voir ma mère et je savais qu’elle était à la maison en train <strong>de</strong> penser<br />

à moi. Je me sentais seule. Je savais que je n’allais plus la revoir, mais je n’ai<br />

même pas eu envie <strong>de</strong> penser à la manière dont le garçon se sentait. Je savais<br />

que ma mère était là, mais le garçon, lui il n’avait personne.<br />

La tristesse emplissait mon cœur, je me sentais fatiguée, alors j’ai laissé mes<br />

paupières tomber et vagabon<strong>de</strong>r mes pensées. Je ne savais pas où j’allais, le<br />

garçon non plus.<br />

Le len<strong>de</strong>main, je suis allée à la cabine du capitaine pour lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r où nous<br />

allions exactement.<br />

Je l’ai vu couché dans une flaque <strong>de</strong> sang. J’étais choquée, j’avais l’impression<br />

que mes pieds étaient <strong>de</strong>s racines plantées dans le sol et je ne pouvais plus<br />

marcher, mon souffle s’était évaporé <strong>de</strong> mon corps.<br />

Mon cœur s’était arrêté car j’entendais <strong>de</strong>s pas. J’ai cru que c’était le tueur.<br />

Le son <strong>de</strong> ses pas s’est arrêté quand il s’est rapproché <strong>de</strong> moi. Je me suis<br />

retournée très lentement pour voir qui était le tueur… C’était le majordome.<br />

Heureusement que c’était lui, il <strong>de</strong>vait être là pour se débarrasser du corps.

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