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Biotope<br />

Bureau d’étude en<br />

Environnement<br />

Université de la<br />

Réunion<br />

EVALUATION QUALITATIVE DES SITES DE PONTE DES TORTUES MARINES<br />

ERETMOCHELYS IMBRICATA ET CHELONIA MYDAS SUR LES PLAGES DE PAPANI ET DE<br />

MOYA (MAYOTTE, PETITE TERRE).<br />

PARTICIPATION A LA REALISATION DU PLAN DE GESTION DE LA ZONE<br />

D’ACQUISITION DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL.<br />

Jean-Yves KERNEL<br />

Directeur d’agence<br />

« Océan Indien »<br />

Bureau d’étude Biotope<br />

Mathieu PINAULT<br />

2002-2003<br />

Sous la direction de :<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

DESS Sciences et<br />

Gestion de<br />

l’Environnement<br />

Tropical<br />

Chelonia mydas<br />

Virginie CAZES-DUVAT<br />

Maître de conférence en<br />

géographie, à la faculté de<br />

lettres et de sciences humaines<br />

de l’Université de la Réunion<br />

1


Avis au lecteur :<br />

Le présent document constitue un mémoire de stage professionnel et son<br />

contenu est sous la responsabilité exclusive de son auteur.<br />

DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical<br />

Formation co-financée par le Conseil Général de La Réunion


REMERCIEMENTS<br />

Je remercie Messieurs Frédéric MELKI et Jean-Yves KERNEL, respectivement<br />

directeur général et directeur d’agence « océan Indien » du bureau d’étude<br />

Biotope, de m’avoir accueilli au sein de leur structure.<br />

Je remercie madame Virginie CAZES-DUVAT de m’avoir encadré et fourni de<br />

précieux conseils durant toute la durée de mon stage.<br />

Je remercie tout particulièrement Mesdames Caroline GUILLAUME, Mireille<br />

QUILLARD, Messieurs Fabien BARTHELAT et ALI MARI ainsi que toute l’équipe du<br />

service environnement et forêts de la DAF de <strong>Mayotte</strong>, pour m’avoir si<br />

chaleureusement accueilli et orienté sur le territoire mahorais.<br />

Je remercie Messieurs Bernard BONNET (Université de La Réunion), David ROOS<br />

(Ifremer), Stéphane CICCIONE (CEDTM) et ALI MARI (DAF) pour leurs précieuses<br />

informations sur la biologie et la dynamique des populations de tortues marines<br />

rencontrées sur le site de Papani-Moya.<br />

Je remercie également Messieurs Bernard BONNET, Eric NAIM-GESBERT et Gilles<br />

LAJOIE pour leurs précieux conseils et la mise à disposition des locaux et du<br />

matériel informatique nécessaires à la bonne réalisation de mon stage.<br />

Je remercie enfin toute la promotion du DESS SGET avec qui j’ai partagé au<br />

cours de la réalisation de ce mémoire, les meilleurs moments comme les pires.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

2


Index des abréviations et initiales<br />

• BNOI : Brigade Nature de l’Océan Indien<br />

• CELRL: Conservatoire de l’Espace Littoral et des Rivages Lacustres<br />

• CIRAD : Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement<br />

• CNES : Centre National d’Etudes Spatiales<br />

• Convention CITES : Convention sur le commerce international des espèces menacées (Convention on<br />

International Trade of Endangered Species)<br />

• Convention CMS : Convention sur la Conservation des Espèces Migratrices<br />

• DAF : Direction de l’Agriculture et des Forêts<br />

• DESS SGET : Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées en Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical<br />

• DGPS : Differential Global Position System<br />

• DIREN : Direction Régionale de l’Environnement<br />

• ECOFAC : Conservation et utilisation rationnelle des Ecosystèmes Forestiers d’Afrique Centrale<br />

• ENSO : El Niño-Southern Oscillation<br />

• GIZC : Gestion Intégrée de la Zone Côtière<br />

• GPS : Global Position System<br />

• Ifremer : Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer<br />

• IGN : Institut Géographique National<br />

• INSEE : Institut National de la Statistique et des Études Économiques<br />

• PROTOMAC : Protection des <strong>Tortues</strong> <strong>Marines</strong> d’Afrique Centrale<br />

• Sef : Service Environnement et Forêts<br />

• SIG : Système d’information Géographique<br />

• UICN : Union Internationale pour la Conservation de la Nature.<br />

• ULM : Ultra Light Motorized<br />

• UNEP : United Nations Environment Program<br />

• UNESCO : United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization<br />

• USFWS : U.S. Fish and Wildlife Service<br />

• WIDECAST : Wider Caribbean Sea Turtle Conservation Network<br />

• WWF : World Wildlife Fund<br />

• ZEE : Zone Economique Exclusive<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

3


Avant propos<br />

Cette étude s'inscrit dans le cadre d'un stage de DESS Sciences et Gestion de<br />

l'Environnement Tropical effectué au sein du bureau d’étude Biotope, sous la<br />

direction de Jean-Yves KERNEL, directeur de production à l’agence « océan<br />

Indien » et de Virginie CAZAS-DUVAT, docteur et maître de conférences en<br />

géographie, à la faculté de lettres et de sciences humaines de l’Université de la<br />

Réunion. Le bureau d’étude Biotope, basé sur un concept nouveau alliant<br />

expertise environnementale et communication, propose divers services en<br />

matière d'environnement.<br />

Le stage s’est réalisé en deux parties : l’une bibliographique et rédactionnelle<br />

réalisée dans les locaux de la faculté des sciences de l’université de La Réunion ;<br />

l’autre sur le terrain, assistée par la Brigade <strong>Tortues</strong> du service environnement et<br />

forêts de la DAF de <strong>Mayotte</strong> (Direction de l’Agriculture et des Forêts). Ce stage,<br />

réalisé suite à la demande du bureau d’étude, fut d’une durée de quatre mois<br />

(février-mai 2003) et fut soutenu oralement devant un jury le 25 juin 2003.<br />

Le présent rapport a pour but de participer à la réalisation du plan de gestion de<br />

la zone de Papani-Moya (<strong>Mayotte</strong>, Petite-Terre), commanditée par le CELRL<br />

(Conservatoire des Espaces Littoraux et des Rivages Lacustres), propriétaire du<br />

terrain. Cette participation doit éclairer les chargés de mission du bureau d’étude<br />

sur les enjeux inhérents à la fréquentation des lieux par des populations de<br />

tortues de mer de deux espèces différentes (Eretmochelys imbricata et Chelonia<br />

mydas), puis proposer des orientations de gestion basées sur un diagnostic<br />

précis des exigences propres aux espèces rencontrées.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

4


TABLE DES MATIERES<br />

INTRODUCTION....................................................................................................................6<br />

I. DIAGNOSTIC .................................................................................................................. 7<br />

I.1. ETAT DES LIEUX :.................................................................................................. 7<br />

I.1.1. Présentation des espèces C. mydas et E. imbricata ........................................... 7<br />

I.1.2. Présentation du territoire................................................................................. 20<br />

I.2. ACTIONS MENEES SUR LE TERRAIN............................................................... 35<br />

I.2.1. Création d’un système d’information géographique du site............................ 35<br />

I.2.2. Suivi de la Brigade <strong>Tortues</strong> et analyse des relevés personnels........................ 48<br />

I.2.3. fiches d’estimation qualitative des plages, en tant que sites de ponte. ............ 53<br />

I.2.4. Bilan ................................................................................................................. 62<br />

I.3. BILAN DES ENJEUX :........................................................................................... 64<br />

I.3.1. Opportunités pour la gestion du site................................................................ 64<br />

I.3.2. Menaces............................................................................................................ 66<br />

II. PROPOSITIONS POUR LA GESTION DU SITE................................................. 68<br />

II.1. REFLEXION SUR L'EVOLUTION DES MILIEUX ............................................. 68<br />

II.2. PROGRAMMES DE GESTION ET DE PROTECTION DES ESPECES DE<br />

TORTUES DE MER MENES DANS LE MONDE............................................................ 69<br />

II.3. PRINCIPE DE GESTION PROPOSE ..................................................................... 69<br />

II.4. RAPPORT D’ENTRETIENS .................................................................................. 70<br />

II.5. PRESENTATION DES OBJECTIFS DE GESTION.............................................. 73<br />

II.5.1. A long terme ..................................................................................................... 73<br />

II.5.2. Objectifs du plan de gestion (OPG) et fiches d’action..................................... 73<br />

CONCLUSIONS.....................................................................................................................81<br />

GLOSSAIRE........................................................................................................................... 89<br />

LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX............................................................................. 90<br />

BIBLIOGRAPHIE................................................................................................................. 91<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

5


INTRODUCTION<br />

Les tortues marines, bien plus que d'autres animaux, par la solide boîte osseuse<br />

qui les protège et par leur grande longévité, paraissent douées d'une robustesse<br />

exceptionnelle. Cet a priori est cependant trompeur, car bien qu’elles aient<br />

survécu aux successives crises et glaciations de ces 110 derniers millions<br />

d’années, l’impact de l’homme sur les populations de tortues marines a de<br />

dramatiques conséquences sur leur pérennité :<br />

La chasse intensive de certaines espèces et la dégradation de leurs habitats<br />

naturels ont fortement contribué à l’affaiblissement des populations. Aujourd’hui<br />

protégés par de nombreuses conventions internationales, ces grands reptiles<br />

sont tous recensés sur la liste rouge de l’UICN comme espèces menacées ou<br />

fortement menacées d’extinction.<br />

Plusieurs populations de tortues de mer vivent et se reproduisent dans le canal<br />

du Mozambique, s’alimentant principalement sur les côtes malgaches, Est et Sud<br />

africaines, riches en herbiers de phanérogames, et se reproduisant sur les plages<br />

de nombreuses îles. Située à l’entrée Nord du canal du Mozambique, l'île de<br />

<strong>Mayotte</strong>, collectivité départementale française depuis juillet 2001, fait partie de<br />

ces territoires privilégiés, avec ses nombreuses plages de ponte et ses sites de<br />

nourrissage de deux des principales espèces de tortues marines rencontrées<br />

dans l'océan Indien : La tortue verte et la tortue imbriquée.<br />

Dans leurs conditions initiales, décrites par J. Frazier au cours des années 1970<br />

et 1980, les plages de <strong>Mayotte</strong> étaient très prisées par les tortues marines qui<br />

venaient s’y reproduire en grand nombre. La persistance du braconnage malgré<br />

une réglementation contraignante et la menace d’une surfréquentation du littoral<br />

par un tourisme balnéaire encore balbutiant tendent à faire fuir ces grands<br />

reptiles, de nature très craintive.<br />

Les multiples atouts de ces plages et leur fort potentiel de développement<br />

durable sont à l'origine de l'achat de 228 ha de la zone par le Conservatoire de<br />

l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres (CELRL). L'acquisition n'est cependant<br />

que le point de départ d'un processus original dans lequel le Conservatoire<br />

assure la responsabilité du propriétaire mais confie la gestion des terrains à<br />

d'autres partenaires. Une fois l'acquisition réalisée, le Conservatoire intervient à<br />

deux niveaux:<br />

- La réalisation des travaux de réhabilitation<br />

- L’élaboration d'un plan de gestion qui s'appuie sur un bilan écologique et fixe<br />

les objectifs à atteindre pour assurer une préservation satisfaisante du site.<br />

C'est dans ce cadre que les services du bureau d'étude BIOTOPE ont été<br />

sollicités.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

6


I. DIAGNOSTIC<br />

I.1. ETAT DES LIEUX :<br />

I.1.1. PRESENTATION DES ESPECES C. MYDAS ET E. IMBRICATA<br />

I.1.1.1. Généralités sur les tortues de mer :<br />

Apparues, il y a plus de 110 millions d’années, au crétacé inférieur (Hiryama,<br />

1998), de l’évolution d’un ancêtre commun côtier aux mœurs amphibies, les<br />

tortues marines actuelles ne séjournent au cours de leur existence que quelques<br />

jours à terre, en dehors de leur période embryonnaire, à l’occasion des différents<br />

épisodes reproducteurs qui interviennent de façon cyclique (Bonnet ; Le Gall et<br />

Lebrun, 1985). En effet, si les tortues marines sont inféodées au milieu terrestre<br />

par leur appareil respiratoire pulmonaire et leurs pontes émergées, l’évolution<br />

leur a permis de s’en affranchir lors de l’accomplissement de toutes leurs autres<br />

fonctions vitales (accouplement, alimentation, excrétion) (annexe 7).<br />

Leur corps, très hydrodynamique, est adapté morphologiquement et<br />

anatomiquement a cette vie aquatique. La forme générale de la carapace,<br />

composée de la dossière et du plastron, est cordiforme (en forme de cœur),<br />

fuselée, aplatie dorso-ventralement et un élargissement de la ceinture scapulaire<br />

avec une élongation marquée du coracoïde sert à l’attachement des muscles<br />

pectoraux bien développés, utilisés pour la nage. Les quatre membres ont évolué<br />

en palettes natatoires dont trois ou quatre doigts de la main, dépourvus<br />

d'articulation digitale, sont allongés (Fig.1). Les yeux, très grands, sont protégés<br />

par trois paupières et les glandes lacrymales sont surdéveloppées et modifiées<br />

afin d’excréter l’excès de sel des fluides corporels provenant essentiellement de<br />

l’eau de mer ingérée. le crâne, quasiment clos, possède un épaississement<br />

pariétal lui conférant une résistance mécanique accrue afin de pallier à la faible<br />

capacité rétractile de la tête et des membres dans la carapace. Dans l'eau, les<br />

membres antérieurs servent à la propulsion tandis que les membres postérieurs<br />

servent de gouvernail. Sur terre, la marche est laborieuse ; pour avancer, elles<br />

se servent des membres antérieurs comme de leviers et poussent avec les<br />

membres postérieurs.<br />

Les tortues marines sont également adaptées à la vie hyperbare. Afin de<br />

s’alimenter jusqu’à des profondeurs de 30m, leur corps peut supporter sans le<br />

moindre problème des pressions importantes de plusieurs atmosphères durant<br />

toute la durée de leurs plongées.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

7


D’un point de vue sensoriel, si leur odorat semble relativement faible, leur vision<br />

est en revanche très développée et l'ouïe est particulièrement fine. Bien qu’elles<br />

n’aient pas d'oreille externe, l’oreille interne se trouve sous une plaque auditive<br />

jouant le rôle de tympan. La grande particularité des tortues de mer réside<br />

cependant dans leur sens de l'orientation exceptionnel. En effet, ces espèces<br />

fréquentent au cours de leur vie des milieux très différents (aires de croissance<br />

et de développement, sites de nourrissage, plages de ponte), parfois distants de<br />

plusieurs milliers de kilomètres, qu’elles rejoignent cycliquement lors de grandes<br />

migrations (Bonnet ; Le Gall & Lebrun, 1985 et Lutz & Musick, 1996).<br />

Figure 1. Anatomie générale des tortues de mer<br />

Contrairement à leurs homologues terrestres, les tortues marines n'hibernent<br />

pas, même si leur activité diminue lorsque la température de l’eau chute.<br />

Sept espèces de tortues marines représentant deux familles (les Cheloniidae et<br />

les Dermochelyidae) sont les seuls membres vivants de ce que fut l’importante<br />

ramification marine diversifiée du sous ordre des Cryptodyres (Shaffer ; Meylan<br />

et McKnight, 1997. Annexe 6). Une huitième espèce, la tortue noire (Chelonia<br />

agassizii), reconnue par certains biologistes, est actuellement considérée comme<br />

appartenant à l’espèce Chelonia mydas, les données génétiques publiées à ce<br />

jour n’affirmant pas cette hypothèse (Bonhomme et al, 1987). Cinq de ces sept<br />

espèces de tortues marines sont présentes dans l’océan Indien (Hughes, 1974)<br />

mais seules Eretmochelys imbricata et Chelonia mydas se reproduisent<br />

actuellement à <strong>Mayotte</strong> et plus spécifiquement sur les plages de Papani et de<br />

Moya. La présence de la Tortue caouane Caretta caretta n’y a pas été<br />

démontrée. Le cycle de vie global, est très semblable d’une espèce à l’autre. En<br />

effet, ces especes migratrices Seules de faibles variations permettent de les<br />

différencier.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

8


I.1.1.2. Chelonia mydas<br />

Anatomie<br />

La tortue verte Chelonia mydas (Linnaeus, 1758) (Photo 9), est facilement<br />

identifiable par rapport à ses congénères par son corps massif et court, sa<br />

dossière bombée, inclinée sur la marge, de larges écailles au milieu de la face de<br />

la nageoire et une tête arrondie au museau court formant un bec denticulé à<br />

bord tranchant (Hirt, 1971 ; Grassé, 1976). Les yeux sont en forme d’amande.<br />

Les pattes, larges et bien adaptées à la nage, sont recouvertes de grandes<br />

écailles allongées, avec une griffe unique. Si sa vitesse de nage avoisine<br />

habituellement les 2 km/h, elle est capable d’accélérer sur de courtes distances<br />

jusqu’à 30 km/h.<br />

Elle tient son nom vernaculaire « Verte » de la couleur de sa graisse et de sa<br />

dossière de couleur olivâtre, brunâtre ou grise, marquée de stries plus claires. Le<br />

plastron est plat et blanchâtre et tourne au jaune chez les tortues les plus âgées<br />

(Kafuku et Ikenoue, 1992). Les pattes et la tête sont grisâtres, et parfois<br />

verdâtres chez les adultes, avec des écailles sombres bordées de lisières crèmes<br />

ou jaunes. Les nouveaux-nés présentent une carapace bleue foncée aux<br />

marginales bordées de blanc, comme les écailles des pattes. Leur plastron et le<br />

dessous de leurs pattes sont blancs tachetés de noir (Photo 11). Par la suite, les<br />

sub-adultes montrent une carapace plus colorée, brun rouge à acajou, striée de<br />

jaune. Sur la dossière et sur les pattes ; les écailles sont liserées de blanc ou de<br />

crème.<br />

L'écaillure est caractérisée par la présence d'une seule paire d'écailles<br />

préfrontales, 4 paires d'écailles post-orbitales, 4 paires costales dont les<br />

premières ne sont pas en contact avec l'écaille nucale, 11 paires de marginales<br />

(brunâtre sur la face dorsale et jaunâtre sur la face ventrale) et 4 paires<br />

d'inframarginales, toutes juxtaposées les unes par rapport aux autres (Kafuku et<br />

Ikenoue, 1992). (Fig. 2).<br />

Ses dimensions sont de 80 à 130 cm de longueur pour une moyenne de 160 kg,<br />

mais elle atteint exceptionnellement 250 kg (parfois 400 kg en captivité). Le<br />

dimorphisme sexuel est peu marqué chez les tortues vertes. Les femelles sont<br />

cependant plus grosses que les mâles et la queue du mâle se différencie de celle<br />

de la femelle à la puberté, dépassant nettement les membres postérieurs.<br />

Préhensile et à l’extrémité kératinisée (Servan, 1977). Les griffes du mâle sont<br />

également plus développées que celles des femelles.<br />

Les tortues vertes sont chassées pour leur chair, leurs œufs et leurs cartilages<br />

(ingrédient principale de la soupe de tortue) mais leurs écailles sont trop fines<br />

pour être exploitées.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

9


Répartition<br />

Figure 2. Chelonia mydas (Pritchard et Mortimer, 1999)<br />

La tortue verte a une distribution très cosmopolite et fréquente toutes les mers<br />

tempérées et chaudes (Fig. 3). Cette tortue marine est largement répandue dans<br />

les eaux dont les températures dépassent 20°. Ses sites de ponte se trouvent<br />

principalement dans les régions tropicales ou subtropicales. On peut la<br />

rencontrer au Nord jusqu’en Irlande et au Sud jusqu’en Argentine. Ses plages de<br />

ponte sont nombreuses dans le monde, et l'on peut citer le Costa Rica, la<br />

Guyane, le Surinam le Mexique, les îles Ascension, Trinité, le Cap Vert, les<br />

Bermudes, les îles Cayman, Cuba et le Brésil. Pour les territoires français,<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

10


Chelonia mydas pond en Guyane, en Guadeloupe et en Martinique, sur les îles<br />

Tromelin et Europa, à <strong>Mayotte</strong>, en Nouvelle Calédonie ainsi qu'en Polynésie. En<br />

Europe, les pontes sont plus rares et sont vues à Chypre et en Turquie. La tortue<br />

verte est la plus communément observée dans l’océan Indien, la plus étudiée<br />

mais aussi la plus chassée des tortues marines fréquentant les eaux de l’océan<br />

Indien.<br />

Figure 3. Répartition mondiale, côtière et océanique de la tortue verte<br />

(Bonin ; Devaux et Dupré, 1996)<br />

Mode de vie et cycle biologique<br />

Les très jeunes individus sont, durant la phase pélagique, essentiellement<br />

carnivores (invertébrés, œufs de poissons, etc.) puis le régime devient herbivore<br />

lors de la colonisation des zones côtières. Les tortues se nourrissent alors<br />

d’algues et de phanérogames marines. La faible valeur nutritive des aliments<br />

ingérés explique la lenteur de la croissance de l’espèce et sa maturité sexuelle<br />

tardive. En effet, celle-ci intervient après une période de 8 à 15 ans d’existence,<br />

peut être 50 ans selon certains spécialistes. En fait, cet âge de maturité sexuelle<br />

semble dépendre des conditions du milieu et en particulier de l’alimentation de<br />

l’animal. Les résultats estimés en captivité où les animaux reçoivent<br />

régulièrement une alimentation plus riche que les individus en liberté sont de ce<br />

fait biaisés (Com. Pers. Bonnet)<br />

Tous les trois à cinq ans à partir de l’age adulte, lorsque leurs réserves de<br />

graisse sont suffisantes, les individus matures entament une migration vers les<br />

aires de reproduction. Cette réserve lipidique est indispensable, les femelles ne<br />

s’alimentant pratiquement pas durant toute la durée de la période de ponte qui<br />

peut durer plusieurs mois. L’accouplement ne semble possible chez la femelle<br />

que certains jours pendant lesquels elle accepte les avances des mâles. Si elle<br />

est réceptive, elle accepte la parade d’un mâle, qui la mordille délicatement au<br />

niveau du cou et des épaules. Ensuite, le mâle s'accroche sur les bords des<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

11


marginales de la dossière de sa partenaire, grâce à ses puissantes griffes. Il<br />

replie ses pattes postérieures vers la queue de la femelle, recourbe son<br />

appendice caudal pour rapprocher son cloaque de celui de sa partenaire et y<br />

introduire son pénis dilatable. Les accouplements durent parfois jusqu’à 6 heures<br />

et ont lieu aussi bien à la surface que sur le fond, non loin des plages de ponte.<br />

Les mâles semblent profiter des moments de stress des femelles pour les<br />

contraindre à de nouveaux accouplements juste après avoir terminé leur<br />

épuisant et dangereux périple pour aller déposer leurs œufs. La présence d’un<br />

diverticule dans le cloaque des femelles permet la rétention des spermatozoïdes<br />

des différents mâles et sert de spermathèque, permettant aux femelles de<br />

conserver leurs semences toute la durée de la période de reproduction. La<br />

fécondation d’une même ponte peut alors provenir de plusieurs mâles. Une fois<br />

fécondées, les femelles s’éloignent peu de la zone de ponte, chaque montée sur<br />

la plage pouvant s’effectuer avec 10 ou 15 jours de décalage. La saisonnalité des<br />

pontes est très variables selon les régions et bien que les pics de ponte<br />

interviennent durant les mois d’été austral sur les îles de Tromelin, Europa et<br />

Juan de Nova, la saisonnalité semble inversée à <strong>Mayotte</strong> où les pontes ont lieu<br />

toute l’année, avec un pic durant les mois d’hiver austral, de juin à août (Com.<br />

Pers. Ross).<br />

Une femelle prête à pondre cherche une plage tranquille, sans lumière ni<br />

mouvement, bordée de végétation arbustive, en nageant à une quinzaine de<br />

mètres du bord, puis elle monte sur le sable, souvent de nuit à marée haute,<br />

pour atteindre le bourrelet de sable situé au-delà des plus hautes eaux appelé<br />

« berme ». Elle balaye alors puissamment la zone choisie à l’aide de ses<br />

membres antérieurs afin de creuser une première cuvette, dans laquelle la tortue<br />

disparaît, appelée cavité corporelle. Ensuite, elle creuse le nid proprement dit ou<br />

puits de ponte, avec ses membres postérieurs. Cette cavité atteint 30 à 50 cm<br />

avec une forme plus évasée vers le fond, ressemblant à une bouteille. Les oeufs<br />

y sont éjectés par 2, 3 ou 4, accompagnés d’un écoulement de mucus (Photo<br />

10). Ces œufs mesurent 45 mm de diamètre et ont une membrane souple et<br />

parcheminée. Il y a environ 100 œufs par nid, mais des pontes de 200 œufs ont<br />

été décrites. Enfin, la femelle rebouche le nid, d'abord par mouvement alternatif<br />

des pattes arrières puis par des grands jets de sable, au moyen de ses nageoires<br />

avant et elle retourne à l’eau. la ponte dure environ 30 min pour 1 h 30 d’effort<br />

terrestre, pouvant aller jusqu'à 6 heures si la tortue rencontre des obstacles<br />

comme des bois morts ou des blocs de coraux. En une saison, une femelle vient<br />

en moyenne 3 fois déposer ses œufs, à 13 jours d’intervalle et souvent presque<br />

au même endroit. Certaines pondent jusqu’à 11 fois en 5 mois sur la même<br />

plage (Bonnet ; Le Gall et Lebrun, 1985). Selon la température, l’incubation peut<br />

durer de 8 à 10 semaines. La température de différentiation sexuelle est de<br />

28,75°C (au-dessous de cette température, il y a une majorité de mâles, et audessus<br />

de femelles) (Bonin ; Devaux et Dupré, 1996). Le développement<br />

embryonnaire, stoppé lors de la ponte, reprend son activité au bout de 2 ou 3<br />

heures d’incubation. Les œufs, mous et résistants aux chocs lors de la ponte,<br />

deviennent alors extrêmement sensibles au moindre mouvement. Un simple<br />

retournement des oeufs peut endommager l’embryon en pleine croissance.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

12


Lors de l’éclosion, les nouveau-nés restent dans le nid quelques jours<br />

supplémentaires. Ils résorbent à l’intérieur de leur corps, par l’orifice ombilical ou<br />

« nombril », ce qui reste du vitellus de l’œuf (jaune). Agissant de concert, ils<br />

chassent sous eux, par leurs mouvements, le sable qui surmonte le nid et se<br />

retrouvent ainsi près de la surface. Un des juvéniles, placé au-dessus des autres,<br />

stoppe la montée quand le bout de son bec corné émerge du sable. Il ne<br />

déclenche l’émergence que lorsque les conditions du milieu sont favorables, en<br />

général en fin d’après midi ou par temps pluvieux (Bonnet ; Le Gall et Lebrun,<br />

1985). Le « nombril » des juvéniles, est très fragile à l’éclosion et le contact du<br />

sable lors de la « course à la mer » semble entrer dans son processus de<br />

cicatrisation (Dodd, 1982). Cette zone est très sensible et une température trop<br />

élevée du sable lors de l’émergence peut avoir des conséquences funestes sur la<br />

cohorte. L’essaim de nouveau-nés rampant vers la mer semble orienté par la<br />

brillance de l’horizon marin. De ce fait, l’ombre créée par la végétation d’arrièreplage<br />

accentue par contraste ce phénomène (Dodd, 1982). A leur naissance, les<br />

juvéniles possèdent une réserve énergétique suffisante pour ramper et nager<br />

environ 70 heures (Bresette et Gorham, 2001). Il est indispensable à leur survie<br />

qu’au bout de ce laps de temps ils aient atteint la haute mer, où les prédateurs<br />

sont moins nombreux et aux dimensions trop importantes pour s’intéresser à de<br />

si petites proies (Com. Pers. Ali Mari). Si les adultes ont peu de prédateurs<br />

naturels (autres que l’homme), le taux de mortalité juvénile est extrêmement<br />

élevé chez les tortues marines (peut être seulement 1 juvénile sur 1000 atteint<br />

l’âge adulte : Com. Pers. Bonnet) en raison de la forte pression de prédation,<br />

mais aussi des conditions environnementales, l’encombrement de la plage, sa<br />

granulométrie, sa température lors de l’émergence pouvant bloquer, blesser ou<br />

tuer les nouveaux nés. Les rescapés, une fois la haute mer atteinte, dérivent au<br />

gré des courants durant toute une phase de leur existence entièrement pélagique<br />

et extrêmement mal connue appelée à juste titre « lost-years », estimée de 3 à<br />

10 ans. Les jeunes tortues, sub-adultes au diamètre de 20 à 50 cm entament<br />

alors la recherche de leur site de croissance et de nourrissage sur lequel elles<br />

resteront jusqu’à leur maturité sexuelle. Cette maturité atteinte, elles<br />

entameront à leur tour la migration vers les aires de reproduction. La longévité<br />

des tortues vertes n’est pas connue avec précision mais on estime qu’elle<br />

dépasse les 80 ans (com. Pers. Bonnet). (Fig. 4).<br />

Il a été remarqué, grâce au bagage et au suivi d’individus par balise Argos, une<br />

certaine fidélité des tortues envers leurs sites de ponte et de nourrissage. Ce<br />

phénomène, appelé « Homing », est actuellement très peu expliqué. Différents<br />

facteurs entreraient en jeux lors de l’orientation des femelles et les pousseraient<br />

à retourner pondre, sur les plages où elles ont vu le jour. La période de<br />

l’émergence et de la course à la mer serait une étape décisive de la fixation de<br />

« souvenirs » sensoriels servant à l’orientation des individus devenus matures<br />

lors de leur première saison de ponte.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

13


Figure 4. Cycle biologique de la tortue verte (Bonnet ; Le Gall et Lebrun, 1985).<br />

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14


Statut juridique<br />

Il est important de distinguer le régime juridique proprement dit de Chelonia<br />

mydas, concernant les textes relatifs à la protection de l’espèce elle-même,<br />

classée en annexe des conventions relatives à la protection des espèces, du<br />

régime juridique dit périphérique, relatif à sa protection indirecte par la<br />

préservation de ses milieux de vie, la lutte contre les méthodes de pêche peu<br />

sélectives, susceptibles de lui porter atteinte ou encore la protection d’espèces<br />

entrant dans sa chaîne alimentaire (phanérogames marines).<br />

Régime juridique :<br />

Textes relatifs à la protection de l’espèce Chelonia mydas applicables à <strong>Mayotte</strong> :<br />

- Au niveau international :<br />

• Annexe I de la Convention de Washington sur le commerce international des<br />

espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES, textes<br />

adoptés le 3 mars 1973, entrés en vigueur le 1 er juillet 1975)<br />

• Annexe I et II de la Convention de Bonn sur la Conservation des espèces<br />

migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS, 1979)<br />

• Mémorandum d'accord sur la conservation et la gestion des tortues marines et<br />

de leurs habitats de l'océan Indien et de l'Asie du Sud-Est, qui est annexé à la<br />

Convention CMS et devrait être bientôt ratifié par la France;<br />

• Annexe II de la Convention de Berne relative à la conservation de la vie<br />

sauvage et du milieu naturel de l’Europe (textes adoptés le 19 septembre 1979,<br />

entrés en vigueur le 1er juin 1982). Cette convention compte aujourd’hui 45<br />

parties contractantes parmi lesquelles 39 Etats membres du Conseil de l’Europe,<br />

ainsi que la Communauté européenne, Monaco et quatre Etats africains.<br />

• Annexe IV du protocole relatif aux zones protégées ainsi qu'à la faune et à la<br />

flore menacées et en danger et de leurs habitats naturels importants dans la<br />

région de l'Afrique orientale, de la Convention de Nairobi (1985); Convention<br />

internationale de portée régionale en vigueur dans l'océan Indien<br />

• Convention sur la diversité biologique (Sommet de Rio, 1992)<br />

• La Résolution de Sodwana Bay, au cours de laquelle les pays du Sud-Ouest de<br />

l'océan Indien ont décidé de mettre en place une coopération et une stratégie<br />

commune sur la conservation des tortues marines (Natal, Afrique du Sud, 1995);<br />

• La tortue verte fait parties de la Liste Rouge de l'UICN. Chelonia mydas a été<br />

décrite en tant qu'espèce menacée d'extinction (EN: Endangered) par le Marine<br />

Turtle Specialist Group de l'UICN. Elle est également qualifiée de menacée à<br />

fortement menacée sur la liste de l’USFWS.<br />

- Au niveau national et local :<br />

• Arrêté du 7 août 2000 fixant la liste des tortues marines protégées et portant<br />

modification à l’arrêté de 1977 sur la protection des tortues avec interdiction de<br />

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15


la recherche, la capture, la détention et la consommation des tortues, de leurs<br />

oeufs et écailles.<br />

Régime juridique périphérique :<br />

Textes relatifs à la protection des milieux de vie et à la réglementation des<br />

usages pouvant porter atteinte à l’espèce Chelonia mydas :<br />

• Loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral (Loi<br />

littoral, 1986).<br />

• Loi du 30 décembre 1996 relative à l'aménagement, la protection et la mise en<br />

valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements<br />

d'Outre-mer.<br />

• Arrêté préfectoral du 20 février 1995 sur la réglementation de la pêche sousmarine<br />

• Arrêté préfectoral du 17 juin 1997, interdisant toute pêche au filet, par<br />

empoisonnement (à l’uruva) ou à l'explosif.<br />

I.1.1.3. Eretmochelys imbricata<br />

Anatomie<br />

La tortue imbriquée, Eretmochelys imbricata (Linnaeus, 1766) (Photo 8), est<br />

beaucoup moins fréquemment rencontrée et très nettement moins étudiée que<br />

Chelonia mydas. Sa forme est plus allongée, la pointe de sa carapace est<br />

marquée, le plastron est assez large et doublement caréné. Deux griffes sont<br />

visibles sur chaque patte. La tête est petite, fine, mais on distingue bien cette<br />

espèce grâce au bec corné supérieur bien crochu qui fait penser à celui d’un<br />

rapace (d’où le nom vernaculaire anglais « hawksbill » ).<br />

La dossière est brun rouge à orangé avec des marbrures foncées à noires. Elle<br />

est ornée de stries et de mouchetures jaunes, mais ces colorations s’affaiblissent<br />

avec le temps. Le plastron est blanc jaunâtre, parfois plus sombre ou taché de<br />

brun. Les pattes sont puissantes mais fines et recouvertes de grandes écailles<br />

sombres sur le dessus, soulignées de clair. Le dessous des pattes et de la queue<br />

est jaune très pâle, s’assombrissant vers les extrémités. Les nouveau-nés ont<br />

une carapace brun rouge, avec des marginales plus claires. Leur taille est de 38<br />

à 46 mm, pour un poids moyen de 15 g.<br />

Les plaques de la dossière sont imbriquées comme les tuiles d’un toit (d’où son<br />

nom vernaculaire français) mais avec l’âge, ce caractère peut s’estomper, et les<br />

vieux individus montrent une carapace lisse aux écailles juxtaposées comme les<br />

autres espèces de tortues marines, excepté la tortue luth. Ces plaques aux<br />

reflets ambrés, translucides et épaisses, furent exploitées au cours du XIX e et de<br />

la première moitié du XX e Siècle dans les entreprises de marqueterie et les<br />

bijouteries. Cette espèce a 4 paires de costales dont les premières ne touchent<br />

pas la nucale. Les marginales latérales sont très étroites, alors que les<br />

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postérieures deviennent plus grandes et forment des dentelures importantes. Les<br />

juvéniles possèdent une carène vertébrale, qui s’estompe avec l’âge. Deux paires<br />

d’écailles préfrontales marquent le dessus de la tête. La coloration en est brun<br />

rougeâtre avec des marques jaunes autour des écailles. Viennent ensuite 3<br />

paires de post-orbitales (Fig. 5).<br />

La taille de cette espèce peut atteindre 95 cm pour un poids moyen de 60 kg<br />

(avec un record en captivité de 139 kg). Les mâles sont également plus petits<br />

que les femelles avec une queue et des griffes plus développées mais leur<br />

longévité et leur âge de maturité sexuelle sont inconnus.<br />

Figure 5. Eretmochelys imbricata (Pritchard et Mortimer, 1999)<br />

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Une molécule toxique, développées par une algue unicellulaire (dinoflagellé),<br />

s’accumule périodiquement dans les tissus de la tortue imbriquée, la rendant<br />

toxique et impropre à la consommation. Cette molécule, appelée chelonitoxine<br />

est responsable de nombreux décès chaque année. Ses œuf sont consommés et<br />

régulièrement braconnés.<br />

Répartition :<br />

La tortue imbriquée est également largement répandue dans toutes les mers du<br />

globe, dans les océans Atlantique, Indien et Pacifique, mais elle présente de plus<br />

fortes affinités pour les latitudes tropicales que la tortue verte. Elle fréquente<br />

davantage les eaux côtières et les récifs coralliens (Fig. 6). Cette espèce nidifie<br />

sur les plages en région tropicale et subtropicale, les zones de ponte les plus<br />

importantes étant les Caraïbes, la mer Rouge, les Mascareignes, Madagascar,<br />

l'Afrique, le nord de l'Australie, l'Indonésie et la Malaisie. Elle pondait autrefois<br />

sporadiquement en Guyane, mais cela ne semble plus être le cas, alors qu'on la<br />

voit encore pondre en Martinique et à la Guadeloupe. Quelques spécimens<br />

d’Eretmochelys imbricata ont été vus en Méditerranée, mais cela semble assez<br />

rare, et l'espèce ne pond pas en Europe.<br />

Figure 6. Répartition mondiale, côtière et océanique de la tortue imbriquée<br />

(Bonin ; Devaux et Dupré, 1996)<br />

Mode de vie et cycle biologique :<br />

C'est une tortue omnivore qui apprécie les invertébrés, les céphalopodes, les<br />

éponges, les oursins, les crabes et également les coraux (son bec lui permet<br />

aisément de déchiqueter le corail).<br />

Le cycle biologique d’Eretmochelys imbricata, espèce également migratrice, se<br />

rapproche de celui de Chelonia mydas mais est beaucoup moins bien connu. Les<br />

accouplements ont lieu près des plages de ponte, dans des eaux peu profondes.<br />

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Très craintives, les tortues imbriquées aiment les plages isolées bordées de<br />

végétation où elles peuvent se cacher. Par contre, elles sont moins exigeantes en<br />

ce qui concerne le substrat dans lequel elles creusent. Le nid est profond de 10 à<br />

60 cm, est réalisé la nuit et souvent à marée haute. Toutefois, on voit souvent<br />

des tortues de cette espèce pondre le jour, comme aux Seychelles. Le processus<br />

de ponte est semblable à celui de Chelonia mydas, il peut y avoir trois ou quatre<br />

pontes dans la saison, espacées de 2 ou 3 semaines et parfois 45 jours, de 50 à<br />

200 œufs selon la taille de la femelle. Ces oeufs sont sphériques, blancs, à<br />

membrane parcheminée, et d'un diamètre de 35 à 44 mm (20 à 30 g). Le<br />

phénomène de « Homing » est également observé chez cette espèce très fidèle à<br />

ses sites de ponte. La durée de l'incubation varie de 8 à 10 semaines. Au<br />

Comores, bien qu’elle soit capable de grandes migrations à travers le canal du<br />

Mozambique, la tortue imbriquée semble plus sédentaire que la tortue verte<br />

(Carr et Stancyk, 1975). Bien que des migrations entre les îles de l’archipel,<br />

l’Afrique et Madagascar doivent se produire, chaque île semble posséder ses<br />

propres populations (Frazier, 1985).<br />

Statut juridique :<br />

Régime juridique<br />

L’espèce Eretmochelys imbricata est soumise au même régime juridique que<br />

Chelonia mydas. Les conventions internationales citent en effet les deux espèces<br />

dans les mêmes annexes et l’arrêté du 7 août 2000 fixant la liste des tortues<br />

marines protégées, portant modification à l’arrêté de 1977 sur la protection des<br />

tortues avec interdiction de la recherche, la capture, la détention et la<br />

consommation des tortues, de leurs oeufs et des écailles, cite également<br />

Eretmochelys imbricata parmi les espèces protégées. Les restrictions sur le<br />

commerce des écailles de l’arrêté de 1977 concernent directement la tortue<br />

imbriquée, seule espèce de tortue marine dont les écailles sont exploitées en<br />

marqueterie.<br />

Eretmochelys imbricata semble cependant plus menacée par le braconnage que<br />

Chelonia mydas. En effet, entre 1970 et 1994, une moyenne annuelle de 31<br />

tonnes de carapaces furent exportées au Japon, dont la majorité en provenance<br />

de Cuba. Les autorités cubaines ont d’ailleurs tentées tout récemment de<br />

modifier le statut de cette espèce en suggérant de l’inscrire en annexe II plutôt<br />

qu’en annexe I de la convention de Washington. Cette proposition a été rejetée<br />

en raison de l’impact désastreux d’une telle mesure sur les populations de<br />

tortues des Caraïbes. Malgré tout, le trafique de carapaces de tortues imbriquées<br />

se poursuit, Cuba et le Japon ayant eu recours à l’exemption quant au chapitre<br />

concernant cette espèce lors de la signature de la convention.<br />

Eretmochelys imbricata est recensée comme espèce gravement menacée (CR:<br />

Critically Endangered) sur la liste rouge de l’UICN. Elle figure également, selon<br />

les estimations de la WWF, parmi les 10 espèces classées les plus recherchées au<br />

monde ; cette mention peu enviable identifie les 10 espèces animale qui, malgré<br />

les mesures de protection dont elles font l’objet, demeurent menacée par le trafic<br />

illégal. Enfin, l’espèce est qualifiée de fortement menacée sur la liste de l’USFWS.<br />

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Régime juridique périphérique<br />

Les lois et arrêtés protégeant les milieux littoraux participent également à la<br />

protection d’Eretmochelys imbricata mais l’arrêté n° 481 du 4 décembre 1980<br />

relatif à l’interdiction de la pêche, vente, achat de certains coraux s’applique de<br />

manière plus spécifique à cette espèce, dont l’alimentation s’effectue<br />

principalement en milieu récifal.<br />

I.1.2. PRESENTATION DU TERRITOIRE<br />

I.1.2.1. Présentation générale de <strong>Mayotte</strong><br />

Géographie, géomorphologie et climat<br />

Figure 7. Image satellite de <strong>Mayotte</strong> (Image Spot © CNES, 1989)<br />

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Localisée à 12°45’ Sud et 45°10’ Est, l'île de <strong>Mayotte</strong> (376 km 2 ) est composée de<br />

deux îles principales, la Grande Terre (360 km 2 ), d'environ 40 km de long et 20<br />

km de large, et Petite-Terre (13 km 2 ) ainsi que de 18 îlots épars dans le lagon (2<br />

km 2 ), d'origine volcanique et/ou corallienne. Le plus haut sommet de l'île, le<br />

Bénara, culmine à 660 m.<br />

La côte (185 km) est très découpée, faite de nombreuses baies profondes<br />

séparées de caps rocheux. On dénombre 170 plages dont une trentaine sont<br />

aujourd’hui recensées comme sites de ponte des deux espèces de tortues<br />

marines rencontrées (Ciccione ; Taquet ; Roos et Barde, 2002). En 1972, Jack<br />

FRAZIER en dénombrait 127, dont une vingtaine de plages de ponte (annexe 5).<br />

Le déclin de la fréquentation des tortues est préoccupant. A l’échelle d’une<br />

génération, les mahorais ont pu constater leur raréfaction aux abords de plages<br />

autrefois réputées très fréquentées.<br />

L'île est entourée d'un complexe récifal, de type frangeant en bordure de côtes,<br />

puis d’une double barrière récifale à très large lagon, développée sur 197 km,<br />

dont 40 km de barrière submergée au nord (banc de l'Iris). Le complexe récifal<br />

s'étend sur une surface d'environ 1 500 km 2 , soit un rapport d'environ 80% de<br />

lagon pour 20% de terres émergées (Fig. 7). Depuis de nombreuses années, le<br />

lagon reste soumis à un envasement important, résultant de l’érosion des<br />

bassins-versants, qui étouffe les coraux. Les fortes périodes d’exondation, la<br />

faiblesse des échanges d’eau entre le large et le lagon, les infestations<br />

d’Acanthaster planci (étoile de mer se nourrissant de coraux), ainsi que les<br />

différents épisodes de blanchissement des coraux s’ajoutent aux dégradations<br />

d’origine humaine. La Zone Économique Exclusive (ZEE) s'étend sur 73 600 km 2<br />

et comprend le banc corallien de la Zélée.<br />

De nombreux vestiges témoignent du passé volcanique de <strong>Mayotte</strong> (Mont<br />

Choungui, Bénara, coulées, dykes, cônes). Elle est la deuxième île des Comores<br />

à s'être formée il y a environ huit millions d’années (la première île, le banc du<br />

Geyser, s'est aujourd'hui "enfoncée" pour ne laisser en place qu'un magnifique<br />

atoll). Petite-Terre semble, quant à elle, avoir émergé beaucoup plus<br />

tardivement. Les origines volcaniques bien distinctes des deux principales îles de<br />

<strong>Mayotte</strong> expliquent l’hétérogénéité des terres arables. La faible altération des<br />

couches superficielles du sol de Petite-Terre lui confère des qualités agricoles que<br />

la latérisation quasi-totale de certaines zones de Grande Terre interdit. Il est de<br />

ce fait logique d’observer une forte activité agricole, principalement vivrière, sur<br />

Petite-Terre.<br />

Le climat est tropical, chaud, humide et maritime. La température moyenne varie<br />

peu (27°C en janvier, 24°C en août). L'amplitude thermique est faible en raison<br />

de l'influence maritime (6°C en janvier, 8°C en septembre).<br />

L'île est relativement protégée du courant alizé d'est par Madagascar. En saison<br />

des pluies (décembre à avril), elle est arrosée par les courants de nord-ouest<br />

chauds et humides de mousson (Fig. 8). L'essentiel des précipitations tombe de<br />

novembre à mars. La pluviométrie est modérée, mais plus importante en Grande<br />

Terre (2 m) qu'en Petite Terre (bulletin climatique annuel de Météo France). Les<br />

cyclones sont peu fréquents (dernier recensé en 1984). Par contre, l’île n’est pas<br />

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protégée des courants chauds provenant du phénomène ENSO (El Niño-Southern<br />

Oscillation) qui ont pratiquement entièrement détruit en 1997 et 1998 certaines<br />

zones de la barrière corallienne.<br />

Figure 8. Direction de principaux vents de l'océan Indien et du Canal du Mozambique.<br />

(ZCIT = Zone de Convergence Inter-tropicale, aux précipitations très abondantes)<br />

(Atlas du SDAGE de La Réunion, 1998)<br />

Population<br />

En 1997, date du dernier recensement INSEE, la population fut estimée à<br />

131320 habitants, principalement répartis sur le littoral, soit une densité de<br />

349 hab/km 2 . Elle a aujourd’hui dépassé les 160 000 habitants dont 60% ont<br />

moins de 20 ans. 98% de la population sont de religion musulmane. Entre les<br />

deux derniers recensements, le taux d'accroissement annuel moyen était de<br />

5,7%, du fait à la fois d'une natalité élevée et d'une forte immigration en<br />

provenance des îles voisines, ce qui constitue l’une des croissances plus élevées<br />

au monde. La répartition de la population est très hétérogène avec un<br />

déséquilibre grandissant entre Mamoudzou et sa conurbation (21,5% de la<br />

population), le nord de l'île et Petite-Terre (plus des 3/4 de la population) et les<br />

zones rurales du reste de l'île. Deux langues sont parlées à <strong>Mayotte</strong> en plus du<br />

français : le shibushi et le shimaoré.<br />

Economie<br />

L'activité est essentiellement agricole (banane, manioc, ylang-ylang, vanille et<br />

élevage) et piscicole. Ces deux secteurs occupent à eux seuls 56% de la<br />

population active. Les cultures d’ylang-ylang et de vanille sont aujourd’hui en<br />

régression. L'agriculture et la pêche restent les activités principales d'une<br />

économie vivrière dont la monétarisation ne progresse que lentement. Les<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

22


tendances actuelles sont typiques d'une économie de transfert du secteur<br />

primaire vers les secteurs secondaire et surtout tertiaire. Malgré une forte<br />

augmentation du nombre d'emplois, le chômage touche 41 % de la population<br />

active (INSEE, 1997).<br />

Organisation du Territoire<br />

<strong>Mayotte</strong> est une Collectivité Territoriale (Loi n°76-1212, 24 décembre 1976),<br />

passée Collectivité Départementale depuis juillet 2001, administrée par un<br />

représentant du gouvernement, ayant rang de Préfet, et un Conseil Général. Les<br />

compétences dans le domaine marin sont réparties entre le Préfet de <strong>Mayotte</strong>,<br />

compétent sur les récifs et lagon, et le Préfet Maritime de La Réunion, compétent<br />

sur les eaux territoriales (zone des 5 miles). En revanche, le Préfet de la Réunion<br />

délègue ses compétences sur les bancs du Geyser et de la Zélée. La<br />

départementalisation française de <strong>Mayotte</strong> dans l'archipel des Comores est<br />

prévue à l'horizon 2010.<br />

I.1.2.2. Le site de Papani-Moya<br />

Figure 9. Pistes et limites du site de Papani-Moya sur Petite-Terre<br />

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Situé à l’Est de Petite-Terre, à cheval entre les communes de Labattoir et de<br />

Pamandzi, le site de Papani-Moya, d’une superficie de 228 ha, comprend les 4<br />

plages de Moya, la plage de Papani, le lac Dziani-Dzaha et la pointe de La Vigie,<br />

point culminant de Petite-Terre. Ce territoire est parcouru par deux routes<br />

secondaires (Moya et La Vigie), un sentier de GR et de nombreuses pistes non<br />

référencées, empruntées par les usagers des plages, les agriculteurs et les<br />

braconniers (Fig. 9).<br />

Le littoral de Papani-Moya est considéré par les spécialistes comme le second site<br />

de ponte des tortues marines de <strong>Mayotte</strong>, après les plages de Sazilé, dans le sud<br />

de l’île (Com. Pers. Ross ; Ali Mari). Sa position géographique, à l’Est de Petite-<br />

Terre, le place à l’extrême périphérie du grand récif corallien Nord-est de<br />

<strong>Mayotte</strong> (Fig.7). Le potentiel paysager y est très important, le tracer des plages<br />

est courbe (Photos 2 et 3), le sentier de GR parcourant la ligne de crête offre aux<br />

usagers avertis de somptueux panoramas. Le site de La Vigie domine toutes les<br />

plages de Moya et permet l’observation d’antiques pièges à poissons, dont la<br />

datation reste inconnue, creusés à même la roche de la zone d’arrière récif de<br />

Moya IV (photo 7). La petite presqu’île, comprise entre les plages de Moya I et<br />

de Moya II (Photo 5), est le lieu d’un culte, pratiqué à même le sol, sur lequel<br />

sont déposés offrandes et porte-bonheurs (Bénitiers, bouteilles de parfums,<br />

morceaux d’étoffes) (Photo 6).<br />

La zone d’acquisition du CELRL comprend la totalité du bassin versant Est de<br />

Petite-Terre, et longe les lignes de crête des principaux reliefs. Cette volonté<br />

tient au fait qu’il est difficile de gérer et de protéger efficacement un littoral sans<br />

considérer l’influence indirecte des activités pratiquées dans le bassin versant<br />

(érosion, écoulement d’effluents, ruissellements…).<br />

Géomorphologie et phénomènes microclimatiques<br />

La formation de <strong>Mayotte</strong> s'est déroulée principalement entre -4 et -8 millions<br />

d’années, alternant les éruptions effusives et explosives. Les plages de Moya et<br />

le Lac Dziani-Dziaha, cratères circulaires de petite taille, sont le résultat des<br />

dernières éruptions datant de -15000 ans. Les reliefs de Petite-Terre sont<br />

abrupts (Fig. 10). La pointe de la vigie, point culminant de Petite-Terre culmine à<br />

environ deux cent mètres d’altitude et se trouve à une distance de quelques<br />

dizaines de mètres de la plage de Moya IV, offrant une plongée vertigineuse sur<br />

l’océan. Le versant, orienté principalement Est, est parcouru par de nombreuses<br />

ravines creusant la roche et débouchant en mer. Les ruissellements sont<br />

importants lors des mois de moussons qui arrosent abondamment le territoire<br />

mais une sécheresse relative s’installe rapidement lors des mois d’hiver austral.<br />

Contrastant avec la brutalité des reliefs du site, les plages de Papani et de Moya<br />

sont courtes, en pente faible, situées au bas de falaises plus ou moins hautes et<br />

escarpées. Elles se sont accumulées sur une dalle volcanique sous-jacente peu<br />

profonde et sont formées de sable clair d’origine corallienne et à granulométrie<br />

variable. Le haut des plages est bordé de zones plus ou moins importantes de<br />

dépôts de particules fines d’origine terrigènes (Photo 23). Les coefficients de<br />

marée sont très importants, pouvant dépasser les quatre mètres. Les plages de<br />

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24


Moya III et IV, particulièrement courtes, sont totalement submergées à marée<br />

haute et ne sont accessibles que par la mer.<br />

Figure 10. Traitement en trois dimensions du site de Papani-Moya (Biotope ©, 2003)<br />

Le court récif corallien étend son front récifal à seulement 600 m des côtes et se<br />

développe à des profondeurs supérieures à 5 m, offrant un accès quasiment<br />

direct au domaine océanique (Fig. 11). Cette zone, habituellement à importante<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

25


activité bioconstructrice, a été fortement touchée par le blanchissement corallien<br />

de 1998.<br />

Figure 11. Organisation transversale d’un récif corallien (B. Robin, C. Petron, C. Rives, 1988)<br />

Placés totalement en aval des reliefs du bassin versant, les plages et à fortiori le<br />

lagon, reçoivent et accumulent tout ce qui d’une manière ou d’une autre a été<br />

arraché, érodé, déversé ou déstabilisé en amont. Le fort ruissellement des mois<br />

de mousson participe activement à ce phénomène. Les activités pratiquées sur le<br />

versant des reliefs et tout particulièrement l’activité agricole (défrichages,<br />

traitements par substances toxiques, apports excessifs de fertilisants), ont de<br />

très nettes conséquences sur la qualité de ces milieux.<br />

La proximité océanique des plages de Papani et de Moya les soumet à une dérive<br />

littorale, engendrée par les vents de Mousson en saison des pluies et les Alizés<br />

en saison sèche (Fig. 8).<br />

Lors des vents de mousson, le courant de dérive littorale, arrive sur les plages<br />

avec une orientation Sud, provoquant des bouleversements saisonniers dans le<br />

tracé des plages. D’importantes quantités de sédiments sont transportées le long<br />

de la ligne de côte, entraînant une accumulation au Sud et un déficit au centre et<br />

au Nord des plages. (Fig.12)<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

26


Figure 12. Schéma de la dérive littorale sur la plage de Moya I issue des houles de mousson<br />

Inversement, lors de l’arrivée des Alizés, en début de saison sèche, la dérive<br />

littorale prend une orientation Nord et entraîne les sédiments agrégés lors de la<br />

saison des pluies vers le centre et le Nord des plages. Ce phénomène laisse au<br />

Sud une zone de dépression ou de prélèvement sédimentaire (Fig. 13).<br />

Ce transport de sable peut occasionner la mise à nu de plaques rocheuses et le<br />

déterrement de nids et d’œufs de tortues. Le sable est généralement fin dans les<br />

zones d’accumulation, plus grossier dans les zones de dépression (phénomène de<br />

tri granulométrique très nettement observable sur les plages de Moya I et II).<br />

Cette alternance de la dérive littorale, rétablit cycliquement la répartition des<br />

sédiments sur les plages et permet une élimination des particules fines, un<br />

brassage et une aération des couches superficielles du sol.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

27


Figure 13. Schéma de la dérive littorale sur la plage de Moya I issue des houles d’alizé<br />

Les plages de Moya, très protégées par leur forme en alcôve, ne subissent pas<br />

l’action de courants violents. La houle diverge en entrant dans les baies,<br />

diffusant son énergie sur une surface maximale de plage (photo 2). Leur pente<br />

est faible, la granulométrie du sable est faible et aucune dalle de beach rock n’y<br />

est visible. La présence d’une mangrove sur Moya II dénote un envasement,<br />

typique des zones à faible hydrodynamisme (Thomassin, 1990). Seul le transport<br />

longitudinal du sable entraîné par la dérive littorale semble permettre une<br />

aération des sédiments.<br />

La plage de Papani est légèrement différente ; plus exposée aux houles que les<br />

plages de Moya, elle semble réalimentée en permanence par les effondrements<br />

successifs de la falaise calcaire qui la borde (photos 1 et 4). Le sable y est très<br />

fin et de nature légèrement différente de celui des plages de Moya. La pente est<br />

très faible et aucune dalle de beach rock n’y est non plus visible.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

28


Faune et flore<br />

Cette étude traitant de la présence de tortues de mer sur le site de Papani-Moya,<br />

seules les espèces interagissant avec elles sont traitées dans cette partie.<br />

Espèces interagissant lors de l’alimentation et du cycle de ponte des tortues :<br />

Dans le lagon. La présence de Zostera sp., phanérogames marines de petite<br />

taille très appréciées de Chelonia mydas, et d’algues Turbinaria ornata permet<br />

aux tortues vertes de s’alimenter. Les coraux madréporaires du genre Acropora,<br />

bien que dégradés par les évènements de 1998, les rares éponges et<br />

échinodermes alimentent les tortues imbriquées principalement carnivores.<br />

Sur les plages. La couverture herbacée composée d’Ipomoea pes-caprae,<br />

Cynodon dactylon et Tribulus cistoïdes stabilise la berme et peut représenter une<br />

gêne pour les tortues sortant de l’eau et cherchant à pondre. En effet, si l’impact<br />

d’Ipomoea pes-caprae est faible, Cynodon dactylon, aux longs rhizomes<br />

entrelacés semble, en certains endroit, couvrir les hauts de plage d’un filet<br />

dense, capable d’emprisonner momentanément les tortues femelles s’y<br />

aventurant. Cette couverture herbacée provoque de fréquents retours à la mer<br />

anticipés et peut gêner lors le l’émergence, la course à la mer des très jeunes<br />

tortues.<br />

La strate arbustive et arborée d’arrière-plage, composée essentiellement<br />

d’Hibiscus tiliaceus et de Thespesia populnea, fournit grâce à ses longues<br />

branches aux feuilles persistantes surplombant la berme, de précieux abris aux<br />

tortues venues pondre, à la recherche d’ombre et de tranquillité.<br />

Espèces prédatrices :<br />

Bien que le taux de prédation des espèces de tortues présentes, soit<br />

relativement modéré par rapport à celui d’autres plages de ponte telles que<br />

celles des îles Europa ou Glorieuses, il n’en est pas moins préoccupant. En effet,<br />

certaines populations de prédateurs dits « anthropophiles », rencontrés sur le<br />

site, ont tendance à augmenter au contact de humain, s’alimentant des déchets<br />

disséminés. D’autres, plus préoccupants encore, ont été artificiellement introduits<br />

sur la zone et ne s’y sont pas naturalisés, proliférant dangereusement et<br />

imposant aux populations de tortues des pertes excédentaires.<br />

Seules les espèces prédatrices indigènes ou naturalisées non anthropophiles (en<br />

blanc dans le tableau 1) ont un impact sur les populations de tortues pouvant<br />

être qualifié de « naturel ». Les autres (en gris) doivent faire l’objet d’une<br />

surveillance attentive.<br />

Le corbeau pie, bien que présent sur l’île depuis semble-t-il très longtemps<br />

(Temple, 1914), le chien, le rat noir et le chat, introduits par l’homme plus<br />

récemment, ont vu leurs populations croître de manière significative sur le site<br />

de Papani-Moya depuis la création de la décharge à ciel ouvert des Badamiers<br />

située sur la commune de Dzaoudzi-Labattoir, à l’extrême Nord de Petite-Terre,<br />

en dehors de la zone d’acquisition du CELRL, à peine à 1.5 km de la plage de<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

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Papani (Photo 32). Cette Décharge, existant depuis la création des communes de<br />

Petite-Terre à été déplacée il y a une vingtaine d’année et s’est considérablement<br />

développée au rythme de la démographie galopante de la zone. Actuellement à<br />

sa limite de charge acceptable, elle alimente de nombreuses espèces<br />

anthropophiles.<br />

Le chat sauvage, introduit sous forme domestique et retourné à l’état sauvage,<br />

de très grande taille, provoque d’importants dégâts sur les nichées d’oiseaux<br />

indigènes, mais peu sur les espèces de tortues. Il s’attaque aux juvéniles lors de<br />

leur émergence, attiré par le mouvement des petits animaux. La mortalité<br />

engendrée est de faible ampleur, quelques juvéniles suffisant à occuper le chat le<br />

temps que les autres rejoignent la mer.<br />

Le corbeau pie, passereau noir et blanc de très grande taille, diurne, grégaire, se<br />

rencontre généralement en groupes monospécifiques. Il niche très haut, souvent<br />

dans un fromager. Son impact sur les nids de tortues vertes et imbriquées n’est<br />

que modéré à important en raison de son nombre d’individus encore<br />

relativement limité. En effet, le corbeau pie est un redoutable prédateur pour de<br />

nombreuses espèces (LOUETTE, 1999). Sa technique de prédation sur les nids de<br />

tortues consiste, après avoir repéré les signes avant-coureurs d’une émergence<br />

imminente (léger effondrement du sable autour des juvéniles, serrés sous la<br />

surface du sol), à attaquer en pleine journée le juvénile le plus proche de la<br />

surface (Cf. mode de vie et cycle biologique de Chelonia mydas). Cette attaque<br />

ciblée a pour conséquence de déclencher des émergences en pleine journée,<br />

alors que le sable est brûlant, entraînant des mortalités très importantes sur les<br />

très jeunes tortues.<br />

Le rat noir, introduit par l’homme dans les cales des navires, représente l’un des<br />

problèmes d’invasion animale les plus préoccupants à <strong>Mayotte</strong>. Extrêmement<br />

anthropophiles et prolifiques, les rats noirs s’attaquent aux œufs et aux juvéniles<br />

de bon nombre d’espèces. Leur impact sur les tortues est relativement<br />

important. Ils attaquent les juvéniles lors de l’émergence, leur grande rapidité et<br />

leur grand nombre leur permettant d’en capturer un maximum. La présence<br />

humaine sur la plage de Moya I en fin d’après-midi les fait cependant fuir.<br />

Le chien domestique, espèce sélectionnée, de grande taille, est extrêmement<br />

anthropophile. Bien que beaucoup moins prolifique que le rat noir et rencontré en<br />

nombre beaucoup plus restreint (domestique ou errant), il représente la menace<br />

la plus préoccupante de la zone. En effet, son flair excellent lui permet aisément<br />

de localiser les nids et de les déterrer, provoquant la destruction totale de<br />

nichées entières. Le chien s’attaque également aux juvéniles lors de l’émergence,<br />

chacun pouvant provoquer la mort de 10 jeunes tortues. Enfin, il s’attaque<br />

occasionnellement aux adultes, leur infligeant d’importantes blessures pouvant<br />

s’infecter et gênant les femelles lors de la ponte.<br />

Stage de DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical au bureau d’étude Biotope – Février à Juin 2003<br />

30


Nom vernaculaire Espèce Milieu de vie Origine<br />

Héron cendré<br />

Grande aigrette<br />

Ardea cinerea<br />

cinerea<br />

Casmerodius<br />

albus<br />

melanorhynchos<br />

Rivage et<br />

côte<br />

Rivage et<br />

côte<br />

Corbeau pie Corvus albus Terrestre<br />

Civette Viverricula indica Terrestre<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Espèce<br />

anthropophile<br />

Stade de développement de<br />

la proie lors de la prédation<br />

Tableau 1. Liste des principaux prédateurs de tortues marines sur le site de Papani-Moya<br />

Impact sur les<br />

populations de<br />

tortues<br />

Non Juvénile Faible<br />

Non Juvénile Faible<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 31<br />

Oui<br />

Juvénile (juste avant<br />

l'émergence)<br />

Modéré à<br />

important<br />

Non Juvénile Très faible<br />

Chat sauvage Felis silvestris Terrestre Introduite Oui Juvénile Faible<br />

Chien domestique Canis familiaris Terrestre Introduite Oui<br />

Oeuf, juvénile et parfois<br />

adulte<br />

Important<br />

Rat noir Rattus rattus Terrestre Introduite Oui Juvénile et parfois oeuf Important<br />

Crabe fantôme Ocypode sp. Amphibie<br />

Grands<br />

carnassiers<br />

récifaux<br />

Marin récifal<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Indigène ou sp.<br />

naturalisée<br />

Non Oeuf (creuse le nid) Très important<br />

Non Juvénile Faible à modéré


Acteurs et usagers<br />

La Brigade Tortue, dépendant du service environnement et forêts de la DAF, est<br />

née en 2000 du remembrement du Service <strong>Tortues</strong> créé en 1994. Composée<br />

d’une équipe de techniciens, d’un responsable (Ali Mari) et d’un responsable<br />

adjoint (Mireille Quillard) celle-ci a pour but d’assurer une permanence sur les<br />

plages de Papani, Moya I et II ainsi que sur les plages de Sazilé et de Charifou<br />

(Sud de Grande Terre) afin de lutter contre le braconnage et de prévenir tout<br />

évènement exceptionnel (échouage de baleine…). Les techniciens, intervenant<br />

par équipes successives de deux personnes, relayées tous les deux jours, sont<br />

logés en haut de la petite falaise frangeant la plage de Moya I, dans une « case »<br />

de cent cinquante mètres carrés (dont une quarantaine sont habitables), qui<br />

surplombe la plage (Photos 25 et 26). Ils recueillent des données sur les tortues<br />

marines tout en sensibilisant et en informant un public toujours plus nombreux.<br />

La case est équipée en eau courante et l’électricité est fournie par l’accumulation<br />

quotidienne d’énergie solaire par un grand panneau de cellules photovoltaïques<br />

permettant une autonomie quasiment complète (congélateur, éclairage, CB).<br />

Chaque mesure, remarque ou suggestion relevée sur le terrain est notée par<br />

l’équipe présente, sur un carnet puis retranscrite sur des fiches appropriées<br />

(Annexe 1). Les techniciens sont formés pour reconnaître les deux espèces qui se<br />

reproduisent sur le site, pour les compter, les mesurer, les baguer (Photo 12) et<br />

encadrer les usages (Tableau 1. En blanc : usages légaux, en gris : usages<br />

illégaux). Cette base de données, continue depuis 1997, est stockée et classée<br />

au service environnement et forêts de la DAF, basé à Coconi sur Grande Terre.<br />

L’association « Oulanga Na Nyamba », fondée en 1998 par Ali Mari, ne comptait<br />

à sa création que 9 adhérents. Deux ans plus tard, 500 personnes soutenaient<br />

l’association aux quatre coins du monde francophone. Principalement destinée à<br />

la sensibilisation d’un public le plus vaste possible à la problématique de la<br />

protection des tortues marines dans le monde et à <strong>Mayotte</strong> (interviews<br />

radiodiffusées et télévisées d’Ali Mari), l’association comprend certains membres<br />

actifs qui parcourent régulièrement et bénévolement les plages de Papani et de<br />

Moya afin d’aider la Brigade Tortue dans sa lutte contre le braconnage. Les<br />

membres de l’association ne sont cependant pas autorisés à baguer les <strong>Tortues</strong>.<br />

Ali Mari, ayant quitté officiellement l’association en 2000, est aujourd’hui son<br />

président d’honneur.<br />

La brigade nature de l’océan Indien, rattachée à la DIREN Réunion, comprend 6<br />

gardes armés ; 2 d'entre eux viennent à <strong>Mayotte</strong> une fois tous les deux mois et<br />

dépendent, sur place, de la DAF. Dans le cadre de la protection des tortues et<br />

autres espèces marines, la brigade devrait avoir une permanence à <strong>Mayotte</strong> d’ici<br />

2004.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 32


Usagers Activités lmpact sur les populations de tortues<br />

Touristes<br />

Agriculteurs<br />

Pêcheurs<br />

Ramasseurs<br />

d'ignames<br />

Usagers du<br />

lieu de culte<br />

Braconniers<br />

Les touristes balnéaires sont les usagers majoritaires des plages. Leurs activités sont<br />

principalement :<br />

- Baignade, bronzage, pique-nique et promenade sur les plages le jour.<br />

- Voulé ou autres fêtes entre amis et recherche active de tortues pour les observer<br />

pondre le soir.<br />

Bien qu'une quarantaine d'agriculteurs seulement soient recensés à la chambre<br />

d'agriculture, à <strong>Mayotte</strong>, les petites exploitations vivrières sont florissantes sur tout le<br />

territoire. Ce type d'agriculture maraîchère, très pratiqué, couvre une zone importante<br />

du site.<br />

L’élevage de zébus, moins pratiqué, entre également dans le cadre d’une agriculture<br />

vivrière. La chair de zébu, très consommée par la population mahoraise, provient<br />

essentiellement d’imports sud-africains.<br />

Les techniques de pêche employées à <strong>Mayotte</strong> sont nombreuses, mais les seules<br />

autorisées ou tolérées et réglementées dans le lagon sont :<br />

La ligne, la chasse sous marine en apnée et la pêche à pied (poulpes et chitons).<br />

Les pêcheurs rencontrés sur le site pratiquent une pêche de subsistance. Si certains<br />

sont équipés de pirogues à balancier, la plupart pêchent à même le bord à l'aide de<br />

pics. La chasse sous-marine semble peu répandue.<br />

Certaines personnes s'aventurent dans les zones de fourrés secs naturels, où poussent<br />

les lianes d'Igname. Les ramasseurs creusent alors un gros trou, défrichant tout<br />

alentour et laissant la terre en tas.<br />

Le lieu de culte, recensé sur la presque-île située entre Moya I et II, est fréquenté<br />

sporadiquement durant la journée.<br />

Les pêcheurs au filet et à l'uruva sont peu nombreux sur le site et la récolte des œufs<br />

de tortues ainsi que la chasse des adultes pour leur chair sont quasiment éradiquées<br />

sur les plages de Moya. Par contre, la récolte des œufs et la chasse des tortues sont<br />

encore très répandues sur Papani (Annexe 10et photo 13).<br />

Le nombre important d'usagers de ce type augmente considérablement l'effet de la moindre pression sur<br />

les populations de tortues. Leur impact, souvent direct, se ressent à différents moments du cycle<br />

biologique des tortues.<br />

- De jour, le piétinement de la berme et le forage du sable par les enfants entraînent la destruction de nids<br />

avant éclosion et le compactage des couches superficielles de la berme stabilise une strate herbacée à<br />

Cynodon dactylon, très encombrante pour les tortues lors de la ponte. Le ramassage et la perturbation des<br />

juvéniles, surtout sur la plage de Moya I lors de leur course à la mer, épuise, désoriente et limite les<br />

chances de survie des nouveau-nés, aux réserves énergétiques limitées. Le dépôt sauvage de déchets<br />

organiques et autres restes de pique nique participe à la prolifération d'espèces anthropophiles prédatrices.<br />

Enfin, les chiens des usagers, non tenus en laisse, creusent et déterrent les nids.<br />

- De nuit, les bruits, lumières et mouvements des usagers des plages de Moya, aux heures de hautes eaux,<br />

gênent les femelles lors de leur montée sur les plages et provoquent des retours à la mer anticipés (sans<br />

ponte).<br />

Les agriculteurs de la zone participent au défrichage, et emploient des techniques agricoles traditionnelles<br />

entraînant l'érosion des sols (Brûlis, culture sur pente sans billon, absence de bocage…), elle-même<br />

responsable de l'envasement du lagon et des dépôts terrigènes de haut de plage.<br />

L'envasement du lagon détériore l'herbier à phanérogames dont s'alimentent les tortues vertes. Les dépôts<br />

de particules fines, d’origine terrigène, agrègent et cimentent les couches superficielles de la berme,<br />

gênant les femelles adultes lors de la ponte et les juvéniles lors de l'émergence.<br />

Le pâturage des zébus sur la berme des plages de Moya provoque par piétinement la destruction de<br />

nombreux nids. Les excréments des bovins, entraîne la dissémination de nombreuses graines d’herbacées<br />

et participent à l’eutrophisation du milieu.<br />

Les pêcheurs sous-marins blessent occasionnellement des tortues adultes ou sub-adultes, en alimentation<br />

ou au repos, mais les pêcheurs de ce type, étant peu nombreux sur la zone, l'impact de la pêche légale se<br />

ressent surtout sur les espèces fortement chassées (carnassiers, poulpes et autres mollusques…).<br />

Les tas de terre accumulés sont très rapidement emportés par les pluies et le ruissellement, participant aux<br />

problèmes d'envasement et de dépôts terrigènes « cimentant » les couches superficielles de la Berme.<br />

Bien que les offrandes concernent des espèces de mollusques surveillées telles que les coquilles de<br />

Bénitiers, Tridacna maxima, les pratiques religieuses exercées sur le site n’ont d’impact ni direct ni<br />

indirect sur les populations de tortues.<br />

L'impact de telles pratiques sur les tortues est direct lors de leur chasse et de la récolte de leurs œufs et<br />

indirect lors de l'empoisonnement des eaux de la pêche à l'uruva. Aujourd'hui, une dizaine de nouveaux<br />

cadavres sont recensés chaque mois par la DAF sur la plage de Papani (données DAF 2003) et c'est sans<br />

compter tous les restes ensevelis ou emportés par les braconniers et la marée (com. Pers. M. Quillard).<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 33


I.2. ACTIONS MENEES SUR LE TERRAIN<br />

I.2.1. CREATION D’UN SYSTEME D’INFORMATION GEOGRAPHIQUE<br />

DU SITE<br />

I.2.1.1. Objectifs<br />

La compréhension des relations intimes liant la tortue à ses sites de ponte peut<br />

être mise en évidence par la corrélation entre différentes couches du système<br />

d’information géographique identifiées et le géoréférencement des nids pondus<br />

sur les plages suivie durant la durée de la mission. Ainsi, l’impact de certains<br />

facteurs influençant la qualité des plages en tant que sites de ponte peut être<br />

illustré par une délétion de certaines entités géographiques au profit d’autres, au<br />

conditions environnementales plus propices à la ponte. Afin de pouvoir lutter<br />

contre les menaces pesant sur les sites de ponte, les milieux doivent être<br />

délimités et identifiés. Les cartes générales du site (annexe 9) illustrent la<br />

surface relative et l’emplacement des milieux identifiés tandis que les cartes des<br />

plages mettent en évidence l’impact de certains facteurs sur la qualité des sites<br />

de ponte. Les plages de Moya III et de Moya IV n’ont pas été traitées en raison<br />

de leur submersion totale à marée haute qui interdit aux tortues marines de<br />

venir y pondre. Quelques nids ont cependant été recensés sur la plage de Moya<br />

III mais ont tous été noyés lors des fortes marées.<br />

I.2.1.2. Méthodologie<br />

La partie logistique de la réalisation de la base de données à été soutenue par le<br />

service environnement et forêt de la DAF de Coconi. Ont été mis à ma disposition<br />

une série d’orthophotographies géoréférencées de la zone, prises par l’IGN en<br />

1949, 69, 89 et 96, certaines bases de données vectorielles (limites du site,<br />

lignes de niveau, limites communales, trait de côte, zone urbanisée, pistes et<br />

routes) ainsi qu’un GPS « GeoExplorer 3 » muni de sa notice. Une série de<br />

photos aériennes prises d’ULM par F. Melki, directeur du bureau d’étude Biotope,<br />

ont également été géoréférencées et mises à ma disposition. Les milieux propres<br />

à mon étude ont été identifiés sur le terrain, grâce à l’aide de F. Barthelat,<br />

botaniste de la DAF puis délimités et géoréférencés par analyse de photos<br />

aériennes calées de la zone (IGN ; F. Melki) et de relevés GPS. Les délimitations<br />

du domaine récifal ont été réalisées à l’aide de photos aériennes et de repérages<br />

visuels par triangulation. Les données concernant les nids et les cadavres de<br />

tortues marines, les sentiers non balisés, la végétation ornementale de plage et<br />

les emplacements des anciens farés ont été relevés par GPS. Le 17 avril, une<br />

forte marée de coefficient 3.7 m, a submergé tous les nids situés sous la laisse<br />

des plus hautes eaux. La localisation GPS de ces nids n’ayant pas été faite sur les<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 35


plages de Papani et de Moya II avant cette date (GPS indisponible), je n’ai pas<br />

pu géoréférencer les nids noyés sur ces deux plages. Toutes les données GPS ont<br />

reçu une correction différentielle à la DAF de Coconi. Un minimum de milieux a<br />

été retenu afin d’éviter toute confusion.<br />

I.2.1.3. Résultats<br />

Milieux identifiés<br />

- Pédologie (L. Stieltjes, 1988 ; B. Robin, C. Petron, C. Rives, 1988) :<br />

Terre arable<br />

Ce sol, brun à ocre, de nature cinéritique aux ponces trachytiques témoigne<br />

d’une activité volcanique récente. Il est relativement riche et fertile et peu<br />

latéritique. Ce substrat, naturellement meuble mais stabilisé par un couvert<br />

végétal au réseau racinaire dense, est très exposé à l’érosion lors du moindre<br />

défrichage. Constitué de particules terrigènes fines, son transport par<br />

ruissellement est responsable de l’envasement du lagon et de « l’encroûtement »<br />

des bermes.<br />

Falaise<br />

Apparaît lorsque la pente devient trop abrupte et que le ravinement ou l’érosion<br />

met la roche à nu. Ce type de sol, friable et très sensible à l’érosion, est<br />

susceptible de libérer d’importants blocs de roche. La falaise de Papani, de<br />

nature sédimentaire calcaire, diffère des falaises qui bordent les plages de Moya<br />

dont les formes circulaires rappellent les origines volcaniques.<br />

Littoral sableux<br />

Les littoraux des plages de Papani et de Moya sont couverts d’une couche<br />

sédimentaire d’origine corallienne peu épaisse, grise très claire à blanche pour<br />

les plages de Moya et blonde claire sur Papani. La granulométrie est variable,<br />

allant du sable fin au sable grossier. La longueur totale des trois plages de Moya<br />

I, II et Papani susceptibles d’accueillir les pontes des tortues marines avoisine les<br />

1200 m, dont un tiers est régulièrement submergé lors des grands coefficients<br />

de marée. La largeur de la plage, située au-delà de la laisse des plus hautes<br />

eaux, varie de 5 à 15 m.<br />

Littoral sableux enrichi d’apports terrigènes<br />

Ce milieu fait partie du littoral sableux. Il est le plus touché par les accumulations<br />

de particules fines d’origine terrigène (Photo 23). En effet, l’action de telles<br />

particules sur les hauts de plages « cimente » les grains de sable, créant une<br />

couche solide et friable de couleur grise à brune claire. Sa granulométrie est ici<br />

très faible (argile, poussières).<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 36


Littoral rocheux<br />

Les plages de Moya, situées dans d’anciens cratères de volcans, se sont<br />

accumulées sur une plaque rocheuse basaltique trachytiques sous-jacente (Photo<br />

24). Cette dalle rocheuse affleure par endroits et peut ainsi limiter l’accessibilité<br />

des plages par la mer.<br />

Zone d’arrière récif<br />

L’arrière récif (platier) comprend une zone bioconstruite et une zone<br />

sédimentaire (Fig. 11). La zone sédimentaire, de nature détritique, est couverte<br />

de sable corallien mêlé à de la vase. La zone bioconstruite est très dégradée, la<br />

plupart des coraux observés sont morts, probablement depuis le blanchissement<br />

corallien de 1998. Le marnage étant très variable et pouvant atteindre 4,20 m<br />

lors des équinoxes, la profondeur du milieu varie énormément ; pouvant être<br />

quasiment nulle à marée basse, elle atteint 4 à 6 m à marée haute.<br />

Front récifal<br />

Le front récifal est situé à la limite entre le platier récifal et la pente externe.<br />

Comme la zone de constructions organogènes du lagon, le platier récifal interne<br />

est très dégradé. Les coraux vivants ne se retrouvant qu’à partir du platier récifal<br />

externe.<br />

- Formations végétales (Thomassin, 1990 ; Com. Pers. Barthelat) :<br />

Cultures vivrières<br />

Les cultures vivrières sont constituées en grande majorité de manioc Manihot<br />

esculenta (Photo 22) et d’agroforêts (bananiers Musa sp., cocotiers Cocos<br />

nucifera, manguiers Mangifera indica, arbres à pain Artocarpus altilis et jacquiers<br />

Artocarpus heterophyllus). Des cultures d’ambrevade Cajanus cajan, aux<br />

propriétés fertilisantes, sont également rencontrées sur la falaise de Papani.<br />

Fourré sec naturel<br />

Le fourré n’est pas une forme dégradée de la forêt sèche, c’est une formation<br />

végétale de composition similaire mais de physionomie différente, caractéristique<br />

de conditions climatiques défavorables au développement d’une forêt (Photo 14).<br />

Les ligneux s’échelonnent en hauteur, buissons de un à deux mètres ou petits<br />

arbres de trois à cinq mètres. Les espèces possédant habituellement un port<br />

arboré en forêt sèche ont ici un port arbustif et sont moins fréquentes. C’est un<br />

milieu très riche en espèces indigènes. Ce type de formation qui devait couvrir<br />

originellement une partie très importante du site de Papani-Moya, n’est plus que<br />

rarement rencontré sur les pans escarpés et la presqu’île (Photo 5) de Moya. Les<br />

espèces les plus fréquentes sont Commiphora arafy (Matiembelo), Erythroxylum<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 37


spp., Scaevola sericea, Dracaena reflexa, Grewia glandulosa, Calophyllum<br />

inophyllum (Takamaka) et des espèces d’orchidées telles que Nervilia kotschyi ou<br />

Habenaria sp. Certains sites sont cependant couverts d’une petite liane parasite<br />

très envahissante : Cassytha filiformis.<br />

Fourré littoral sur roche<br />

Les fourrés littoraux sur roche colonisent le bas des falaises de Papani et de<br />

Moya (Photo 15), couvrant d’ombre les arrières-plages. Ce type de milieu a un<br />

rôle très important lors de la ponte des tortues marines qui cherchent des aires<br />

ombragées pour creuser leurs nids. Les espèces les plus rencontrées sont<br />

Hibiscus tiliaceus, Thespesia populnea et Xylocarpus sp. Quelques palmiers<br />

(Hyphaene coriacea) et baobabs (Adansonia digitata) peuvent également y être<br />

observés. Sur Papani, ces espèces sont noyées parmi d’autres espèces<br />

envahissantes côtières, telles que le cassie blanc (Leucaena leucocephala). Sur<br />

Moya I, des espèces ornementales ont été plantées pour permettre aux visiteurs<br />

de trouver des zones d’ombre durant les heures les plus chaudes de la journée.<br />

Badamiers (Terminalia Catappa), Bois-Noirs (Albizia lebbeck) et sycomores<br />

(Ficus sycomorus) bordent le sentier d’accès et couvrent partiellement la zone<br />

d’arrière-plage.<br />

Fourré à Lantana camara<br />

Les fourrés à corbeille d’or (Lantana camara), sont des fourrés secondaires,<br />

colonisés par cette espèce exotique après défrichage d’une formation végétale<br />

naturelle (Photo 18). Ces formations se rencontrent souvent sur les friches<br />

agricoles et les jachères. Lantana camara, Verbénacée arbustive originaire<br />

d’Amérique tropicale, envahie rapidement par taches les zones de Fourré naturel<br />

de buissons denses, épineux et odoriférants. Bien que fortement envahissante,<br />

son élimination reste polémique en raison de l’action stabilisatrice de ses racines<br />

sur les sols et de son efficacité dans la lutte contre l’érosion, problème<br />

d’importance sur la zone (Com. Pers. AUTFRAY).<br />

Formation littorale à Cynodon dactylon<br />

Certaines zones de l’arrière-plage sont couvertes d’une végétation herbacée, très<br />

dense constituée principalement de Cynodon dactylon (chiendent) et de touffes<br />

éparses de Tribulus cistoïdes (pagode). Cette formation, dite de « décombres »<br />

est caractéristique de milieux naturels littoraux dégradés. Ces deux espèces<br />

envahissent la partie externe de la berme (Photo 21).<br />

Formation littorale à Ipomoea pes-caprae<br />

Ipomoea pes-caprae (Patate à Durand), au caractère halophile, couvre<br />

naturellement les plages de sable oligotrophes, parfois très proche de la laisse<br />

des plus hautes eaux. Cette formation naturelle est caractéristique des milieux<br />

littoraux préservés.<br />

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Mangrove à Sonneratia alba<br />

Une petite mangrove située sur la plage de Moya II, est principalement<br />

constituée de deux espèces : Sonneratia alba et Rhizophora mucronata. Le milieu<br />

défini comme « Mangrove à Sonneratia alba » est exclusivement constitué de<br />

cette espèce (Photo 16).<br />

Mangrove à Rhizophora mucronata<br />

La partie de la mangrove ainsi définie est en fait constituée d’une association de<br />

Rhizophora mucronata (Photo 17) et de Sonneratia alba. La mangrove, très<br />

dense, ne possède que de petits arbres (1 à 3 m). Ceci est dû aux pressions<br />

conjuguées de la faible épaisseur du substrat sédimentaire et de l’affleurement<br />

du platier corallien.<br />

Herbier à phanérogames marines<br />

L’herbier à phanérogames marines rencontré au large des plages de Papani-<br />

Moya, peu dense, est principalement constitué de Zostera marina de petite taille,<br />

fortement broutée et dont la partie végétative ne dépasse pas 15 cm (Photo 19).<br />

Formation à Turbinaria ornata<br />

Cette formation est constituée principalement de l’algue Phaeophyceae<br />

Turbinaria ornata (Photo 20), susceptible de devenir envahissante si le taux de<br />

nutriments augmente dans le milieu (phénomène d’eutrophisation). Le cas s’est<br />

produit en Polynésie française où l’augmentation des nutriments par la pollution<br />

a provoqué un déséquilibre des chaînes alimentaires entraînant la suppression<br />

des herbivores et la saturation du milieu par cette algue (Stiger, 1999).<br />

Cartographie des plages de ponte<br />

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Plage de Papani<br />

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Plage Moya I<br />

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Plage de Moya I (Aménagements)<br />

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Plage de Moya II<br />

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I.2.2. SUIVI DE LA BRIGADE TORTUES ET ANALYSE DES RELEVES<br />

PERSONNELS<br />

I.2.2.1. Objectifs<br />

L’analyse des données relevés durant les trois semaines de terrain, dont la<br />

validité dans le temps fut confirmée par M. Ali Mari et Mme Mireille Quillard a<br />

permis de révéler de grandes tendances. Les relevés ont été effectués sur la<br />

base des fiches de la Brigade Tortue, auxquelles certaines modifications ont été<br />

apportées, afin de permettre la comparaison des relevés personnels avec ceux<br />

des agents et de cibler les difficultés liées à leur remplissage (ergonomie des<br />

fiches et méthodes de la Brigade <strong>Tortues</strong>). Bien que les tendances relevées<br />

puissent tendre à appuyer certaines théories, aucune affirmation concrète ne<br />

peut être déduite de cette étude. En effet, les observations relevées durant une<br />

aussi brève période ne peuvent en aucun cas mettre en évidence les<br />

phénomènes cycliques observables sur des périodes beaucoup plus longues (pics<br />

annuels de ponte et saisonnalité du site, impact des vacances scolaires sur la<br />

fréquentation touristique…). Les données furent relevées du 02/04/03 au<br />

20/04/03.<br />

I.2.2.2. Méthodologie<br />

La DAF m’a permis de loger dans la « case » de Moya I, en compagnie des<br />

agents de la Brigade Tortue, durant toute la durée de mon séjour. J’ai ainsi suivi<br />

successivement sur le terrain plusieurs équipes de techniciens qui se sont<br />

relayées durant toute la durée de mon étude.<br />

Trois types de fiches sont remplis quotidiennement par les agents (annexe 1) :<br />

- Une fiche « comptage de traces » illustre les montées et les pontes de la nuit.<br />

- Plusieurs fiches individuelles « marquage et relecture des tortues » permettent,<br />

grâce à l’installation de bagues de type Monel (Photo 12), de suivre<br />

individuellement le parcours et le développement (mensurations) des tortues se<br />

reproduisant à Papani-Moya.<br />

- Une fiche « Agenda du centre », fait état des usages du site et des actions<br />

menées pour son entretien (ramassage des poubelles…).<br />

D’autres fiches furent testées par les agents de la Brigade (« comptages de<br />

nids », « comptages visuels »…) mais elles furent abandonnées en raison de leur<br />

trop grande complexité. Ali Mari et Mireille Quillard cherchent à mettre en place<br />

une fiche de suivi de la fréquentation des plages surveillées. Un prototype de<br />

fiche a été testé récemment.<br />

A l’issue de ce travail, une réunion organisée par Ali Mari et Mireille Quillard avec<br />

toute la Brigade <strong>Tortues</strong> nous a permis de partager nos idées et observations afin<br />

d’améliorer les faiblesses relevés durant ce séjour.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 48


I.2.2.3. Résultats<br />

Comptage des traces (Cf. SIG des plages de ponte) :<br />

Si les relevés de pontes submergées, antérieurs au 17 avril, ne sont pas<br />

géoréférencés sur les plages de ponte, leur comptage est en revanche exhaustif<br />

(Tableau 3).<br />

Moya I Moya II Papani Total<br />

Nombre total de pontes 102 39 49 190<br />

Nombre total de montées 170 57 ? ?<br />

Nombre de nids submergés 33 16 12 61<br />

Nombre moyen de pontes par nuit 5 2 2 à 3 9 à 10<br />

Taux de ponte par montée 60,0% 68,4% ? ?<br />

Pourcentage de nids submergés 32,4% 41,0% 24,5% 32,1%<br />

Tableau 3. Résultats du comptage des traces sur les plages de Papani et de Moya<br />

• Le Géoréférencement des nids semble révéler une hétérogénéité, au sein<br />

même des plages, de leur qualité en tant que site de ponte.<br />

• Les montées se font généralement par cohortes de plusieurs individus qui<br />

investissent une même zone de la plage. Ce phénomène comportemental<br />

pourrait appuyer la théorie de grégarisme des espèces de tortues marines<br />

rencontrées (Com. Pers. Bonnet) ou illustrer l’influence de facteurs<br />

environnementaux sur le comportement de ponte des tortues (dérive littorale…).<br />

• Moya II, au sol de granulométrie plus grossière, semble accueillir davantage de<br />

tortues imbriquées que les autres plages (plusieurs traces observées sur cette<br />

plage, aucune sur les autres). Théorie soutenue par Ali Mari et Mireille Quillard.<br />

En effet, cette dernière espèce, moins sensible que C. mydas aux granulométries<br />

importantes du sable de leurs plages de ponte semblent apprécier les conditions<br />

environnementales du centre de Moya II qui présente un fourré littoral très<br />

préservé, couvrant largement la berme de branches et rameaux. Les deux<br />

espèces ayant naturellement tendance à s’éviter (pics de ponte inversés, plages<br />

de prédilections différentes), il est tout à fait envisageable que E. imbricata<br />

investisse Moya II en raison de sa relative délétion par C. mydas (ou<br />

inversement que C. mydas délaisse cette plage particulièrement prisée par E.<br />

imbricata).<br />

• L’entité géographique II de Moya I a accueilli relativement peu de pontes<br />

durant l’étude (beaucoup plus de pontes sur les entités I et III). Ce phénomène<br />

pourrait provenir de l’état de dégradation avancée de cette zone de plage.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 49


• Moya II, au sol de granulométrie plus grossière, semble accueillir davantage de<br />

tortues imbriquées que les autres plages Cette tendance naturelle est<br />

fréquemment observée chez des tortues de mer de grande taille dont le poids<br />

rend difficile la montée sur les plages (Deem, 2003).<br />

Marquage et relecture :<br />

Les relevés de bagage et de relecture ne sont pas significatifs sur une si petite<br />

durée. Mes relevés personnels étaient dans l’ensemble identiques à ceux notés<br />

par les agents. Peu de relectures ont été notées car les tortues ne sont marquées<br />

qu’après avoir pondu. Un délai de 10 à 15 jours est ensuite nécessaire avant que<br />

les femelles pondent à nouveau (Cf. cycle biologique de Chelonia mydas).<br />

Dénombrement des visiteurs :<br />

Le tableau 4 recense les visiteurs rencontrés (en blanc), et leurs véhicules garés<br />

sur le parking de Moya I (en gris). L’heure des marées hautes a été mentionnée<br />

ainsi que leur coefficient de marnage (annexe 3). Les tortues ne pondant que<br />

lorsque la marées est haute et que la nuit est tombée, il est important de<br />

préciser que le jour se levait vers 5 h 30 et se couchait vers 19 h, durant toute la<br />

période d’étude. La capacité maximale du parking est d’environ 30 véhicules<br />

(Photo 27) mais de nombreux visiteurs utilisent le Taxi, très peu cher à <strong>Mayotte</strong>,<br />

le vélo et le scooter pour se rendre sur les plages. Les remarques, relevées lors<br />

du recensement des informations, ont également été mentionnées dans le<br />

tableau.<br />

• Le jour, les visiteurs semblent dans l’ensemble respectueux de<br />

l’environnement, se souciant peu des actions menées par la Brigade <strong>Tortues</strong><br />

(comptages, surveillance). La nuit, les visiteurs se répartissent en deux<br />

catégories principales : les visiteurs venus observer la ponte des tortues et les<br />

organisateurs de « voulés ». Les premiers, bien que renseignés sur les heures de<br />

montées et très attentifs aux indications des gardes, ne connaissent que<br />

rarement les précautions à prendre pour ne pas déranger les tortues (de<br />

nombreux petits groupes arpentent la plage avec lampes, flash d’appareils<br />

photos…). Les seconds, beaucoup plus rares mais peu sensibles aux exigences de<br />

calme et d’obscurité des tortues (surtout les week-ends), n’hésitent pas à<br />

allumer des feux (participant également au défrichage du fourré littoral) et à<br />

jouer ou écouter de la musique.<br />

• Une sensibilité et un stress inhabituel des tortues à été remarqué un soir de<br />

pleine lune (retours à la mer avant ponte, faible nombre de montées …). Ce<br />

comportement semble lié à la grande sensibilité des tortues femelles à la lumière<br />

et aux mouvements, lors de leur montée en ponte.<br />

• La fréquentation touristique est importante sur la plage de Moya I mais<br />

relativement faible sur les deux autres (surtout Papani, très difficile d’accès). Les<br />

fréquentations se poursuivent de jour comme de nuit.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 50


Date 8 h à 12 h 12 h à 17 h 18 h à 6 h<br />

Jeudi<br />

03/05/03<br />

Samedi<br />

05/04/03<br />

Dimanche<br />

06/04/03<br />

Lundi<br />

07/04/03<br />

Mardi<br />

08/04/03<br />

Vendredi<br />

11/04/03<br />

Samedi<br />

12/04/03<br />

Dimanche<br />

13/04/03<br />

Jeudi<br />

17/04/03<br />

Vendredi<br />

18/04/03<br />

? ? 30 10 ? ?<br />

25 10 90 PP 10 3<br />

30 10 80 PP 0 0<br />

8 4 40 PP 13 4<br />

7 3 37 13 10 4<br />

8 5 40 10 3 3<br />

30 10 100 PP 25 7<br />

30 12 120 PP 3 1<br />

10 4 30 10 15 5<br />

12 5 30 15 5 2<br />

heure et coef.<br />

Marée haute<br />

11 h 14 0,4 m<br />

17 h 24 3,6 m<br />

23 h 31 0,4 m<br />

5 h 31 3,4 m<br />

11h 58<br />

18 h 11<br />

0 h 22<br />

0,5 m<br />

3,5 m<br />

0,6 m<br />

6 h 19 3,1 m<br />

12 h 21 0,6 m<br />

18 h 35 3,4 m<br />

0 h 48 0,7 m<br />

6 h 44<br />

12 h 46<br />

19 h 02<br />

1 h 18<br />

3,0 m<br />

0,8 m<br />

3,2 m<br />

0,9 m<br />

7 h 12 2,7 m<br />

13 h 13 1,0 m<br />

19 h 34 3,0 m<br />

1 h 54 1,2 m<br />

11 h 31 2,1 m<br />

17 h 25 1,7 m<br />

0 h 20 2,5 m<br />

7 h 25<br />

13 h 30<br />

19 h 31<br />

1 h 43<br />

1,4 m<br />

2,4 m<br />

1,5 m<br />

2,8 m<br />

8 h 16 1,1 m<br />

14 h 21 2,8 m<br />

20 h 25 1,1 m<br />

2 h 32 3,2 m<br />

10 h 32 0,1 m<br />

16 h 42 4,0 m<br />

22 h 58 0,1 m<br />

5 h 03 3,7 m<br />

11 h 05 0,1 m<br />

17 h 17 4,1 m<br />

23 h 35 0,1 m<br />

5 h 39 3,5 m<br />

Remarques<br />

Peu de monde en fin d'après midi.<br />

Première marée haute nocturne tardive.<br />

Le Parking est saturé, des gens viennent<br />

en vélo, en taxi ou en scooter. La marée<br />

haute intervenant tard dans la nuit (+ coef.<br />

faible), peu de personne sont venues dans<br />

le but d'observer les tortues.<br />

Très fortes pluies à partir de 19 h<br />

Tentative d'encadrement écotouristique<br />

nocturne très fructueuse autour de la ponte<br />

de <strong>Tortues</strong>. Les gens sont aimables et<br />

intéressés (8 adultes ; 5 enfants)<br />

Nécessité de rentrer à Coconi (GPS à<br />

recharger et réemprunter)<br />

Trois jeunes mahorais très aimables<br />

campent et font un voulé sur Moya I. Ils<br />

dissimulent leur feu derrière un drap et<br />

rassemblent leurs déchets<br />

Émergence à 17 h 30 sous les racines du<br />

Baobab du chemin d'accès, sur une des<br />

zones les plus dégradées de Moya I.<br />

Tentative d'encadrement écotouristique<br />

nocturne plus difficile en raison du<br />

nombre mais surtout des arrivées décalées<br />

et des occupations diverses des visiteurs.<br />

Visite nocturne de la Brigade <strong>Tortues</strong> par<br />

les responsables du CELRL. La pleine<br />

lune semble perturber les tortues qui<br />

retournent presque toutes à l'eau sans<br />

avoir pondu.<br />

deux émergences en fin d'après midi sur<br />

Moya I<br />

Très belles observations de tortues<br />

pondant au lever du jour.<br />

Tableau 4. Dénombrement des visiteurs et de leurs véhicules sur les plages de Moya I et II<br />

PP = Parking plein soit 30 véhicules<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 51


Ergonomie et pertinence des fiches de la Brigade Tortue :<br />

Points forts :<br />

• La fiche individuelle de marquage et de relecture des tortues est claire et très<br />

bien faite. Les indicateurs sont simples, précis et leur relevé par les techniciens<br />

est bien réalisé.<br />

• Le prototype de fiche de dénombrement des visiteurs dénote la prise de<br />

conscience de la DAF du problème posé par la fréquentation touristique du site.<br />

• La fiche de comptage de traces prend en compte le nombre de montées et le<br />

nombre de pontes indépendamment. Cet indicateur peut servir à mettre en<br />

évidence un dérangement des tortues lors de leur sortie de l’eau (bruits,<br />

mouvements, lumière, berme impropre à la ponte…). En effet, les tortues étant<br />

particulièrement sensibles lors de cette étape de la montée en ponte (annexe 2),<br />

le moindre évènement perturbateur peut provoquer un retour à la mer anticipé<br />

(sans avoir pondu).<br />

• L’agenda du centre permet de dresser un bilan des usages et des actions<br />

menées sur le site. Il intègre la Brigade dans un ensemble d’acteurs agissant de<br />

pair pour l’entretien, la protection et l’observation du site.<br />

Points faibles :<br />

• La fiche de comptage ne tient pas compte des entités géographiques distinctes<br />

de chaque plage.<br />

• Certains indicateurs décrits sont flous ou peu précis et bien qu’ils soient<br />

compris par les agents, ils peuvent être mal interprétés lors de leur traitement<br />

par une personne extérieure à la Brigade <strong>Tortues</strong>.<br />

• Les tranches horaires, proposées dans le prototype de fiche de dénombrement<br />

des visiteurs, ne sont pas compatibles avec l’emploi du temps des agents<br />

(annexe 4). En effet, le remplissage de cette fiche nécessite une attention<br />

permanente, afin de donner les chiffres précis de comptage des visiteurs. Aucune<br />

de ces fiches n’a été remplie par les agents durant mon séjour.<br />

• Les indicateurs choisis ne sont pas toujours très pertinents et peuvent<br />

« alourdir » inutilement les fiches dont le remplissage doit être le plus simple<br />

possible. Par exemple, le dénombrement des prédateurs et le comptage des<br />

traces d’émergences sont tout à fait approximatifs, aucune stratégie<br />

d’échantillonnage n’étant mise au point pour leur relevé. Aucune étude<br />

scientifique ne peut s’appuyer sur de telles données.<br />

• L’agenda et la fiche de comptage de traces regroupent des données qui<br />

pourraient être réparties sur les autres fiches (comptages des fréquentations,<br />

recensement des prédateurs sur les plages…). L’agenda regroupe des<br />

informations trop hétéroclites et sans rapport entre elles (prédation,<br />

fréquentations, bilan des usages et actions)<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 52


Réflexion sur les actions menées par la brigade tortues :<br />

Aspects positifs :<br />

• La permanence assurée par les agents de la Brigade a considérablement fait<br />

chuter le braconnage sur les deux principaux sites de ponte de <strong>Mayotte</strong> (Sazilé et<br />

Papani-Moya).<br />

• Certaines données archivées sont à la fois pertinentes et convenablement<br />

relevées sur le terrain par les agents (fiche individuelle de marquage et de<br />

relecture des tortues).<br />

Limites :<br />

• L’accompagnement des visiteurs désireux de découvrir les tortues en train de<br />

pondre n’est que très rarement encadré par les agents de la Brigade <strong>Tortues</strong>. En<br />

effet, le remplissage des fiches demandant une attention particulière, il leur est<br />

difficile de gérer et d’encadrer les flux de visiteurs, plus ou moins disciplinés, tout<br />

en réalisant leur travail de technicien.<br />

• De gros problèmes de logistique apparaissent lors du comptage des traces.<br />

Certaines sont comptées plusieurs fois alors que d’autres passent inaperçues. En<br />

effet, le comptage est effectué le soir, lors du passage des agents sur les plages,<br />

et le matin au réveil, afin de recenser les pontes et montées de la nuit (chaque<br />

trace comptée est barrée du pied au-dessus de la laisse des hautes eaux). Lors<br />

de la rotation des équipes, la responsabilité du comptage matinal est souvent<br />

laissée à l’équipe relève qui n’a aucune idée du nombre de traces comptées la<br />

veille, les deux équipes ne se croisant pratiquement jamais (retard systématique<br />

de l’équipe relève). Les données archivées concernant les comptages de traces<br />

risquent de ce fait de présenter, dans le meilleur des cas, certaines valeurs<br />

aberrantes.<br />

• Les données sur la plage de Papani sont très souvent absentes, la plage étant<br />

trop difficile d’accès et la Brigade Tortue n’étant pas équipée pour ce genre<br />

d’opération (barque nécessaire).<br />

I.2.3. FICHES D’ESTIMATION QUALITATIVE DES PLAGES, EN TANT<br />

QUE SITES DE PONTE.<br />

I.2.3.1. Objectif<br />

Mettre au point une fiche simple d’estimation qualitative des plages en tant que<br />

site de ponte à partir d’indicateurs simples puis les appliquer au site de Papani-<br />

Moya en utilisant les données personnelles relevées durant l’étude (SIG et fiches<br />

terrain). (Fig. 14 et 15).<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 53


I.2.3.2. Méthodologie<br />

Les données personnelles, relevées du 02/04/03 eu 20/04/03, m’ont permis de<br />

mettre au point une échelle de pondération des différents indicateurs estimés<br />

représentatifs de la qualité d’un site de ponte. Chaque plage est divisé<br />

transversalement afin d’obtenir deux ou trois entités géographiques traitées<br />

indépendamment (Cf. SIG). A chaque indicateur est attribué une note comprise<br />

entre 0 et 3 représentative de son état (0 = conditions considérées comme<br />

optimales ; 3 = dégradation maximale rendant possible durablement la ponte<br />

des tortues ; 9 = dégradation menaçant ou interdisant durablement la ponte des<br />

tortues). Toute entité géographique dont un indicateur au moins reçoit cette<br />

dernière valeur est qualifiée de « site de ponte menacée ou impropre à la<br />

ponte ». La qualités des milieux a été traitée indépendamment des nuisances<br />

anthropiques afin de mieux cibler les menaces pesant sur chaque site (cette<br />

méthode d’estimation qualitative est inspirée du travail : Cazes-Duvat ; Delmas-<br />

Ferré et Troadec, 2002).<br />

I.2.3.3. Résultats<br />

Notation et critères d’évaluation des indicateurs choisis :<br />

Etat des milieux littoraux en tant que sites de ponte<br />

Accessibilité des sites de ponte :<br />

- Accessibilité du littoral<br />

0 Aucune dalle rocheuses n'est visible à marée basse<br />

1 De petites dalles rocheuses apparaissent par endroit à marée basse mais laissent le littoral<br />

accessible à marée haute<br />

2 Le littoral rocheux apparaît rapidement à marée descendante<br />

3 Dalles rocheuses affleurent sur le littoral à marée haute<br />

Une dalle ou une mangrove interdit tout accès direct à la plage depuis la mer<br />

9<br />

- Obstacles rencontrés sur les plages<br />

0 Aucun obstacle ne gêne la montée des tortues sur la plage<br />

1 Aucun obstacle important sur la plage ne bloque la montée mais de petits débris inoffensifs<br />

peuvent être rencontrés (branches, racines…)<br />

2 Des obstacles inoffensifs gênent la montée sur la plage mais peuvent être évités (grosses<br />

branches, blocs de corail…)<br />

3 Les obstacles bien que pouvant être évités sont imposants (rocher, tronc…) ou potentiellement<br />

offensifs (sacs plastic, ficelle…)<br />

9 Les obstacles imposants ou nombreux sont très offensifs (déchets métalliques tranchants,<br />

morceaux de verre, déchets perforants)<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 54


- Pente de la plage<br />

0 Pente très faible à faible<br />

1 Pente faible à modérée<br />

2 Pente modérée légèrement concave<br />

3 Pente modérée à forte avec légère falaise d’érosion<br />

9<br />

Pente forte avec destruction avancée de la berme<br />

Etat de la Berme :<br />

- Ombrage par la végétation d’arrière-plage<br />

0 Le fourré littoral naturel domine la berme de ses branches, permettant aux tortues de venir<br />

pondre au dessous.<br />

1 Le fourré littoral est légèrement en retrait par rapport à la plage mais les tortues l'atteignent pour<br />

y pondre.<br />

2 Le fourré est clairsemé, éloigné des plages et en bordure de falaise. Les tortues pondent<br />

fréquemment en dehors de la zone d'ombre<br />

3 Le fourré est clairsemé, très éloigné de la plage, développé sur la falaise et très difficile d'accès<br />

pour les tortues<br />

9<br />

Fourré inexistant ou défriché, trop éloigné des plages et inaccessible pour les tortues<br />

- Couverture végétale herbacée<br />

0 Aucune couverture végétale n'encombre la berme<br />

1 Quelques taches d'Ipomée sont visibles mais pas de chiendent<br />

2 Quelques taches de chiendent apparaissent avec l'ipomée<br />

3 Le chiendent envahit l'ipomée et couvre en partie la berme<br />

9 Le chiendent est omniprésent, couvrant totalement la berme<br />

- Granulométrie de la plage<br />

0 Le sable est de nature totalement corallienne, de couleur blonde à gris très clair. L'albédo est<br />

maximal. Le sable filtre l'eau sans la retenir, permettant une hydratation normale des nids sans<br />

rétention d’eau.<br />

1 Le sable est clair mais quelques particules fines ternissent son éclat. L'albédo chute légèrement. Le<br />

sable filtre l'eau en la retenant peu. L'hydratation des nids est normale mais peut entraîner des<br />

pourrissement lors d'importantes précipitations.<br />

2 Le sable est mêlé à des particules fines d'origine terrigène et se teinte de gris à brun clair.<br />

Quelques grains noirs volcaniques se mêlent au sable. L'albédo chute. Le substrat retient l'eau,<br />

provoquant des pourrissements réguliers des nids.<br />

3 Le substrat est sablo-argileux et l'albédo est faible. Des grains de sables noirs sont nombreux en<br />

aval à colorer le sable de la zone intertidale. L'albédo est faible. Le substrat retient très<br />

fréquemment l'eau et cause une forte mortalité dans les nids<br />

9 Le substrat est foncé, brun à ocre, argileux. Des grains de sable noir zèbrent transversalement la<br />

zone intertidale. L'albédo est très faible. Le substrat de la berme, argileux, retient totalement l'eau<br />

des précipitations, Les cavités corporelles des tortues se remplissent d'eau stagnante, les oeufs<br />

meurent asphyxiés.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 55


Nuisances anthropiques<br />

Nuisances nocturnes, sonores et visuelles :<br />

0 Aucune nuisance nocturne<br />

1 Des nuisances sporadiques sont recensées occasionnellement (quelques fois par mois)<br />

2 Nuisances régulières mais pas systématiques (tous les week-ends)<br />

3 Nuisances fortes très fréquentes (plusieurs fois par semaine)<br />

9<br />

Nuisances fortes tous les soirs<br />

Prédation par des espèces anthropophiles :<br />

0 Aucune présence d'espèce anthropophile<br />

1 Certaines espèces peuvent être rencontrées occasionnellement (quelques unes par semaine)<br />

2 Quelques individus rencontrés par jour<br />

3 Nombreux individus rencontrés tous les jours<br />

9<br />

Nombreux individus résidents sur le site<br />

Braconnage :<br />

0 Aucun braconnage ou braconnage exceptionnel sur la plage<br />

1 Braconnage rare (quelques fois pas an)<br />

2 Braconnage modéré mais régulier (quelques tortues par mois)<br />

3 Braconnage fréquent et régulier (toutes les semaines)<br />

9<br />

Braconnage dépassant la dizaine par mois (estimé à partir des cadavres observés (Photo 13))<br />

Fiches remplies sur le terrain :<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 56


Fiche terrain Plage de Papani :<br />

Relevés effectués du 02/04/03 au 20/04/03<br />

Indicateurs<br />

Qualité des milieux littoraux<br />

I<br />

II<br />

- Longueur : 93 m<br />

- Zone d’arrière plage très courte et étroite : 0 à 8 m<br />

- Orientation de la plage : E<br />

- Littoral rocheux visible à marée haute<br />

- De gros blocs de roche gênent l’accès à la plage<br />

- Pente très faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne pratiquement nulle<br />

- Braconnage très intense<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral pratiquement absent. Très haute falaise<br />

- Couverture végétale de la berme nulle<br />

- Aucun dépôt terrigène<br />

- Nombre de nids recensés : 3<br />

- Longueur : 213 m<br />

- Zone d’arrière plage étroite : 8 à 10 m<br />

- Orientation de la plage : E<br />

- Littoral sableux<br />

- Petits obstacles naturels inoffensifs (racine, branches)<br />

- Pente très faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne pratiquement nulle<br />

- Braconnage très intense<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral présent mais très envahi par lianes exotiques.<br />

Très grandes falaise d’arrière plage<br />

- couverture végétale de la berme nulle<br />

- Dépôt terrigène faible<br />

- Nombre de nids recensés : 34<br />

I II<br />

0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

- Accessibilité des sites de ponte X X<br />

Accessibilité du littoral X X<br />

Obstacles rencontrés sur la plage X X<br />

Pente de la plage X X<br />

- Etat de la berme X X<br />

Ombrage par la végétation d’arrière plage X X<br />

Couverture végétale herbacée X X<br />

Granulométrie de la plage X X<br />

Nuisances anthropiques<br />

- Taux de braconnage X X<br />

- Nuisances nocturnes, sonores et visuelles X X<br />

- Prédation par espèces anthropophiles X X<br />

Tableau d'estimation de la qualité des plages pour la ponte des tortues marines :<br />

Secteur I II<br />

Notation 0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

Etat des milieux X X<br />

Nuisances anthropiques X X<br />

Qualité en tant que site de ponte des secteurs :


Fiche terrain Plage de Moya 1 :<br />

Indicateurs<br />

Relevés effectués du 02/04/03 au 20/04/03<br />

Qualité des milieux littoraux<br />

I II III<br />

0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

- Accessibilité des sites de ponte X X X<br />

0 1 2 3 9<br />

Accessibilité du littoral X X X<br />

Obstacles rencontrés sur la plage X X X<br />

Pente de la plage X X X<br />

- Etat de la berme X X X<br />

Ombrage par la végétation d’arrière plage X X X<br />

Couverture végétale herbacée X X X<br />

Granulométrie de la plage X X X<br />

Nuisances anthropiques<br />

- Taux de braconnage X X X<br />

- Nuisances nocturnes, sonores et visuelles X X X<br />

- Prédation par espèces anthropophiles X X X<br />

Tableau d'estimation de la qualité des plages pour la ponte des tortues marines :<br />

Secteur I II III<br />

Notation 0 1 2 3 9 0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

Etat des milieux X X X<br />

Nuisances anthropiques X X X<br />

Qualité en tant que site de ponte des secteurs :<br />

I<br />

II<br />

III<br />

- Longueur : 80 m<br />

- Zone d’arrière plage étroite à l’E (0m), large à l’W (15m)<br />

- Orientation de la plage : S<br />

- Littoral rocheux visible à marée descendante<br />

- Petits obstacles naturels inoffensifs (restes végétaux)<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne importante<br />

- Braconnage exceptionnel<br />

- Peu d’arbres ornementaux, aucun ancien faré<br />

- Fourré littoral préservé. Haute falaise d’arrière plage<br />

- Couverture végétale de la berme modérée<br />

- Dépôt terrigène modéré<br />

- 28 nids recensé, dont 12 furent noyés (17/04/03, coef. 3.7m)<br />

- Longueur : 194 m<br />

- Large zone d’arrière plage : 10 à 15 m<br />

- Orientation de la plage : E à S-E<br />

- Littoral sableux<br />

- Nombreux déchets offensifs (métal, verre)<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne très importante<br />

- Braconnage exceptionnel<br />

- Nombreux arbres ornementaux et anciens farés<br />

- Fourré littoral très défriché. Petite falaise d’arrière plage<br />

- Berme envahie par Cynodon dactylon<br />

- Dépôts terrigènes très importants<br />

- 23 nids recensés, dont 5 furent noyés (17/04/03, coef. 3.7m)<br />

- Longueur : 170 m<br />

- Zone d’arrière plage étroite : 5 à 10 m<br />

- Orientation de la plage : E<br />

- Littoral rocheux visible à marée descendante<br />

- Petits obstacles naturels inoffensifs (restes végétaux)<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne modérée<br />

- Braconnage rare<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral préservé. Haute falaise d’arrière plage<br />

- Dépôt terrigène faible<br />

- Très faible couverture végétale de la berme<br />

- 49 nids recensés dont 16 furent noyés (17/04/03, coef. 3.7m)


Fiche terrain Plage de Moya 2 :<br />

Relevés effectués du 02/04/03 au 20/04/03<br />

Indicateurs<br />

Qualité des milieux littoraux<br />

I II III<br />

0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

0 1 2 3 9<br />

- Accessibilité des sites de ponte X X X<br />

Accessibilité du littoral X X X<br />

Obstacles rencontrés sur la plage X X X<br />

Pente de la plage X X X<br />

- Etat de la berme X<br />

Ombrage par la végétation d’arrière plage X<br />

Couverture végétale herbacée X<br />

Granulométrie de la plage<br />

Absente X<br />

X<br />

Absente X<br />

Nuisances anthropiques<br />

- Taux de braconnage X X X<br />

- Nuisances nocturnes, sonores et visuelles X X X<br />

- Prédation par espèces anthropophiles X X X<br />

Tableau d'estimation de la qualité des plages pour la ponte des tortues marines :<br />

Secteur I II III<br />

Notation 0 1 2 3 9 0 1 2 3 9 0 1 2 3 9<br />

Etat des milieux X X X<br />

Nuisances anthropiques X X X<br />

Qualité en tant que site de ponte des secteurs :<br />

I<br />

II<br />

III<br />

- Longueur : 120 m<br />

- Zone d’arrière plage totalement inondée à marée haute<br />

- Orientation de la plage : E à S-E<br />

- Littoral rocheux visible à marée haute et petite mangrove<br />

- Aucun obstacle sur la plage<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne très faible<br />

- Braconnage rare<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral préservé. Falaise d’arrière plage moyenne<br />

- Couverture végétale de la berme nulle<br />

- Dépôt terrigène nul<br />

- Nombre de nid recensé : 0<br />

- Longueur : 160 m<br />

- Zone d’arrière plage étroite : 8 à 10 m<br />

- Orientation de la plage : E<br />

- Littoral sableux<br />

- Petits obstacles naturels inoffensifs (racine, branches)<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation nocturne par visiteurs faible<br />

- Braconnage rare<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral préservé. Petite falaise d’arrière plage<br />

- Couverture végétale de la berme nulle<br />

- Dépôt terrigène assez faible<br />

- Nombre de nid recensé : 22<br />

- Longueur : 120 m<br />

- Zone d’arrière plage totalement inondée à marée haute<br />

- Orientation de la plage : N-E<br />

- Littoral rocheux très visible à marée haute et mangrove<br />

- Aucun obstacle sur la plage<br />

- Pente faible<br />

- Fréquentation humaine nocturne faible<br />

- Braconnage rare<br />

- Ni arbre ornemental ni ancien faré<br />

- Fourré littoral préservé. Petite falaises d’arrière plage<br />

- Couverture végétale de la berme nulle<br />

- Dépôt terrigène nul<br />

- Nombre de nid recensé : 0


Figure 14. Cartographie de la qualité des milieux littoraux en tant que sites de ponte sur les plages de Papani, Moya I et Moya II<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 60


Figure 15. Cartographie des nuisances anthropiques rencontrées sur les plages de Papani, Moya I et Moya II<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 61


I.2.4. BILAN<br />

Moya I Moya II Papani<br />

I II III I II III I II<br />

Longueur du trait de côté (en m) 75 198 175 123 160 195 95 309<br />

Surface de la berme (en m 2 ) 734 2512 1301 125 1498 524 279 1978<br />

Nombre de nids pondus sur la berme 16 23 34 0 22 1 3 36<br />

Densité de ponte (nids/ha de berme) 218 92 261 0 147 19 108 182<br />

Qualité des milieux littoraux en tant<br />

que sites de ponte<br />

9 1 9 1 9 1 1 0<br />

Nuisances anthropiques 1 1 2 2 9 2 9 9<br />

Tableau 5. Bilan des actions menées sur le terrain<br />

Papani :<br />

La plage de Papani et ses 404 mètres de linéaire côtier susceptibles de recevoir<br />

les tortues marines, est la plus courte des trois plages traitées. En revanche, la<br />

densité de nids sur sa berme est la plus importante mesurée (173 nids/ha)<br />

(tableau 5).<br />

Ses qualités environnementales originelles, répondent parfaitement aux<br />

exigences des deux espèces de tortues marines présentes sur le site (pente très<br />

faible ; apports terrigènes et couverture herbacée de la berme faibles ; fourré<br />

littoral suffisamment proche de la ligne de côte pour que les tortues puissent<br />

venir s’y réfugier lors de la ponte ; très faible fréquentation touristique ; très<br />

bonne accessibilité de son littoral). Malheureusement, son fort taux de<br />

braconnage (plus de 10 tortues braconnées par mois) la classe parmi les plages<br />

de ponte menacées. Si cette menace ne semble pas avoir d’influence direct sur le<br />

nombre de montées, sont impact sur les effectifs de tortues adultes rencontrées<br />

dans la zone est redoutable. En effet, les braconniers semblant agir rapidement<br />

et silencieusement, ne troublent pas la montée des tortues sur les plages (d’ou le<br />

grand nombre de nids pondus par hectare de berme observé). Ces prélèvements<br />

sporadiques, aux conséquences funestes pour les individus chassés, semblent ne<br />

pas perturber le reste des populations qui continuent à pondre en ces lieux, plus<br />

calmes que les plages voisines. La tranquillité et la qualité de cette plage en tant<br />

que sites de ponte sont de ce fait des leurres, car si les tortues y pondent<br />

abondamment, elles y sont également fortement chassées, ne mettant pas en<br />

péril l’usage de la plage en tant que site de ponte mais l’ensemble des<br />

populations de tortues présentes sur le site.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 62


Moya I :<br />

Moya I est de loin la plage la plus anthropisée des trois. Son littoral de 448<br />

mètres, sa très large zone d’arrière-plage (4547 m 2 ) et son paysage magnifique<br />

lui confèrent de remarquables qualités d’accueil touristique. Si les prélèvements<br />

de tortues par les braconniers sont maintenant tout à fait exceptionnels sur la<br />

plage, la dégradation de sa partie centrale et les fortes perturbations des<br />

visiteurs indélicats semblent inciter les tortues à délaisser le site au profit de ses<br />

zones périphériques. En effet, l’étude individuelle des trois entités géographiques<br />

de la plage délimitées permet de constater une très nette hétérogénéité dans les<br />

densités de nids par hectare de berme mesurées le long de la ligne de côte. Bien<br />

que les valeurs, sur l’ensemble de la plage, restent acceptables (161 nids/ha), la<br />

densité rencontrée sur sa partie centrale est la plus faible mesurée sur le site (92<br />

nids/ha). Au contraire, celles mesurées sur ses zones périphériques sont les plus<br />

élevées (218 et 261). La partie centrale de la plage et qualifiée de « menacée »<br />

en raison de l’état de dégradation avancé de sa berme. Ses zones périphériques<br />

restent relativement préservées (Tableau 5).<br />

Moya I devait être originellement une excellente plage de ponte, voire la meilleur<br />

des trois, mais la surfréquentation touristique récente et la dégradation de la<br />

partie centrale de sa berme enchâssée dans son filet de rhizomes de Cynodon<br />

dactylon, semble décourager les tortues venues pondre. Le taux de ponte par<br />

montée, moins élevé que sur Moya II sous-entend de fréquent retours à la mer<br />

des femelles, provoqués soit par un dérangement inhabituel (lumière, bruit,<br />

mouvement) soit par de mauvaises conditions environnementales (berme trop<br />

dégradée). La carte détaillée des aménagements réalisés sur Moya I met en<br />

évidence l’impact important du piétinement de la berme. Le sentier d’accès aux<br />

anciens farés, toujours pratiqué, est totalement envahi par Cynodon dactylon qui<br />

semble épouser parfaitement ses contours. Les arbres ornementaux, plantés sur<br />

la berme, tendent à stabiliser le sédiment, limitant l’élimination naturelle des<br />

dépôts d’origine terrigènes.<br />

L’association de paramètres : érosion des sols en amont, tassement par<br />

piétinements de la berme et stabilisation du substrat par les arbres ornementaux<br />

entraîne l’accumulation et la fixation de particules fines d’origine terrigène<br />

transformant peu à peu le sable de la berme en terre arable.<br />

Moya II :<br />

Moya II, bien que la plus longue (478 m) et la moins anthropisée des trois, est<br />

très nettement la plage présentant les conditions environnementales naturelles<br />

les moins favorables au bon déroulement du cycle de ponte des tortues marines.<br />

Ses petites mangroves bloquant l’accès aux zones périphériques de la plage et sa<br />

berme totalement submergée à marée haute sur plus de la moitié de sa longueur<br />

rendent très problématiques les pontes sur une bonne partie de son littoral<br />

(Tableau 5). En revanche, cette rigueur qui semble décourager la plupart des<br />

tortues vertes semble ne pas déranger les tortues imbriquées qui profitent de ce<br />

délaissement pour prendre possession des lieux. Ne supportant pas d’être<br />

dérangées mais plus rapides et légères que leur proches cousines, les tortues<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 63


imbriquées ne rechignent pas à pondre sur des plages moins accessibles, à la<br />

granulométrie du sédiment plus grossière et au fourré littoral très bien conservé<br />

et recouvrant totalement la zone de ponte. Cette plage, aux densités de ponte<br />

relativement faibles présente de ce fait un réel intérêt dans la protection et la<br />

conservation de l’espèce la moins représentée sur le site et la plus menacée<br />

d’extinction : la tortue imbriquée Eretmochelys imbricata.<br />

I.3. BILAN DES ENJEUX :<br />

I.3.1. OPPORTUNITES POUR LA GESTION DU SITE<br />

Populations de tortues et milieux littoraux encore relativement préservés<br />

• Papani-Moya est le second site de ponte de <strong>Mayotte</strong> en importance. Le nombre<br />

de nids pondus sur le site, du 02/04/03 au 20/04/03, au-dessus de la ligne des<br />

plus hautes eaux, fut de 135 ; soit de 7.5 par nuit. En prenant une moyenne de<br />

100 œufs par nid et un taux de mortalité juvénile de 999/1000, le site a produit<br />

potentiellement durant l’étude 13 à 14 tortues qui atteindront l’âge adulte, soit<br />

une productivité de 20 tortues adultes par mois. Le pic de ponte des tortues<br />

vertes (espèces représentant 90% des fréquentations du site) survenant durant<br />

les mois de Juin à août, il est envisageable que la productivité du site atteigne<br />

alors des niveaux supérieurs. Malheureusement, cette estimation sans<br />

fondement scientifique ne tient pas compte de l’évolution possible du taux de<br />

mortalité juvénile durant les 8 à 50 années nécessaires à la transformation de<br />

l’œuf en adulte mature. De plus l’estimation de survie d’1 tortue sur 1000 est<br />

très contestée et approximative.<br />

• La partie centrale de la plage de Moya II semble répondre parfaitement aux<br />

exigences des tortues imbriquées, très peu nombreuses et gravement menacées.<br />

Cette plage permet à une population très réduite de se reproduire dans un cadre<br />

encore relativement préservé.<br />

• L’état sanitaire des tortues observées lors de leur bagage semblait tout à fait<br />

satisfaisant. A part quelques balanes Balanus sp. et blessures rares, aucune<br />

dermite ni conjonctivite n’a été constatée et la brigade tortue n’a pas du<br />

intervenir lors de retours à la mer difficiles.<br />

• Pas de cadavre de tortue échoué suite à un empoisonnement, à une asphyxie<br />

par ingestion de déchet toxique ou par noyade dans un filet observé durant<br />

l ‘étude.<br />

Cadre législatif de plus en plus contraignant<br />

• Les mesures de protection internationales et locales sont de plus en plus<br />

contraignantes concernant l’exploitation de Chelonia mydas et Eretmochelys<br />

imbricata. Même si le braconnage persiste et que les peines encourues sont très<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 64


arement appliquées en raison de l’insolvabilité des inculpés, l’arrêté du 7 août<br />

2000 démontre une volonté locale de protéger ces espèces, pour la préservation<br />

de la biodiversité mais aussi pour leur potentiel de développement écotouristique<br />

régional. Le projet d’une permanence de la Brigade Nature de l’océan Indien à<br />

<strong>Mayotte</strong> (affiliée à la DAF) prévue pour 2004 tend à appuyer cette volonté.<br />

Malheureusement, le régime juridique périphérique, non soumis aux textes<br />

internationaux, se réfère au code de l’environnement, encore très peu appliqué à<br />

<strong>Mayotte</strong>. L’application mahoraise du droit de l’environnement est aujourd’hui<br />

embryonnaire. Elle devrait se renforcer par la réforme statutaire<br />

(départementalisation française de <strong>Mayotte</strong> prévue à l'horizon 2010). En effet,<br />

étayé sur une stratégie de planification et de maîtrise foncière, l’objectif du<br />

développement durable du site peut être satisfait par l’arsenal législatif dont<br />

dispose le CELRL permettant une protection et un aménagement concerté du<br />

littoral. Il est à relever que les espaces de <strong>Mayotte</strong>, ses ressources et milieux<br />

naturels, ses sites et paysages, sa qualité de l’air, ses espèces animales et<br />

végétales, sa diversité et ses équilibres biologiques auxquels ils participent font<br />

partie du patrimoine commun de la nation. Dès l’ors, leur protection et leur<br />

gestion relève de l’intérêt général et concourent au développement durable de<br />

l’île. Sa mise en œuvre se fonde, dans le cadre des lois qui en définissent la<br />

portée, sur les principes fondamentaux du droit de l’environnement (Art L. 110-1<br />

du code de l’environnement). En l’occurrence les principes de précaution,<br />

d’action préventive, de pollueur-payeur et de participation (Com. Pers. Naim-<br />

Gesbert).<br />

• La Brigade Nature de l’océan Indien, intervenant à La Réunion et à <strong>Mayotte</strong>, est<br />

chargée de la protection de l’environnement, de la lutte contre le braconnage et<br />

du contrôle des établissements commercialisant des animaux. La Brigade a<br />

dressé 41 procès verbaux en 2002. Ces infractions sont principalement relevées<br />

dans le domaine du braconnage en milieu marin et en milieu forestier. La<br />

Brigade, intervenant à <strong>Mayotte</strong> dans le cadre de la protection des tortues et<br />

autres espèces marines, devrait installer une permanence sur l’île d’ici 2004.<br />

• Le service environnement et forêt prévoit de mettre en place le premier arrêté<br />

de Biotope sur la plage de Papani, actuellement souvent fréquentée par des<br />

braconniers (Annexe 10).<br />

Forte potentialité de développement écotouristique<br />

• Les visiteurs rencontrés sur le site présentaient une grande curiosité à l’égard<br />

des tortues marines et de la brigade. Les tentatives de suivi et d’encadrement<br />

des visiteurs nocturnes se sont révélées très fructueuses.<br />

• Le prix du billet d’avion étant très élevé entre la métropole et <strong>Mayotte</strong> (de<br />

l’ordre de 1400 Euros), le développement touristique de l’île devra passer par la<br />

valorisation maximale de ses originalités et il faudra justifier ce prix par de<br />

nouveaux services.<br />

• Une réelle prise de conscience des risques dus au braconnage semble avoir<br />

permis à des associations telles que « Oulanga na Nyamba » d’obtenir un fervent<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 65


succès auprès de la communauté mahoraise mais aussi internationale,<br />

entretenant des échanges avec la métropole et la Guyane. L’évolution<br />

progressive des mentalités et l’ouverture sur le monde permettent une approche<br />

nouvelle de la ressource tortue dont l’image de marchandise se transforme peu à<br />

peu en celle d’un vecteur de développement écotouristique durable. En effet, de<br />

nombreux emplois tels que guide touristique, animateur ou gardien, commencent<br />

à se créer sur toute l’île.<br />

faible érosion des plages<br />

• Les plages de Papani et de Moya, relativement protégées ne subissent pas de<br />

courant violent. La houle diverge en entrant dans les baies, diffusant son énergie<br />

sur une surface maximale de plage.<br />

• Protégée par les côtes du Mozambique à l’Ouest et par Madagascar à l’Est,<br />

l’archipel des Comores est très protégé des cyclones et ne reçoit<br />

qu’exceptionnellement de fortes houles. Les plages n’ont donc pas à subir<br />

d’érosion exceptionnelle.<br />

I.3.2. MENACES<br />

Populations de tortues en déclin<br />

• Les populations de tortues marines, bien qu’encore importantes, semblent<br />

décroître rapidement. Les rapports d’entretien avec des personnes résidant près<br />

du site depuis plus de vingt ans révèlent, tout au long de cette période, une très<br />

nette diminution du nombre de montées, avec leur décroissance exponentielle au<br />

cours des dix dernières années.<br />

• La dégradation du site, le marché clandestin florissant de chair et de cartilages<br />

de tortues vertes et la surfréquentation des plages sont autant de raisons<br />

rassemblées qui expliquent localement ce phénomène. La chair de tortue est<br />

vendue moins cher sur les marchés que la chair de poulet (2 Euros le kg). Ce<br />

marché clandestin est alimenté par le braconnage encore très présent sur<br />

Papani.<br />

• L’observation du phénomène de raréfaction des tortues sur les sites de ponte<br />

semble observé globalement de façon mondiale. Les populations de tortues<br />

marines, d’espèces principalement cosmopolites et côtières (sauf la tortue luth,<br />

presque exclusivement pélagique), subissent l’action de l’homme sur la plupart<br />

de leurs aires de ponte et de nourrissage. En effet, une grande majorité de la<br />

population humaine mondiale vit aujourd’hui en zone littorale, dégradant les<br />

sites et perturbant bon nombre de ces populations.<br />

Actions préventives et répressives mal appliquées<br />

• Un flou juridique dans la réglementation lié à la superposition des textes de loi<br />

et un vide juridique dans la gestion de l’espace et des aires protégées rendent<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 66


difficile l’application des textes relatifs à la conservation des espèces et des<br />

milieux. Certains arrêtés relatifs aux milieux existent à <strong>Mayotte</strong> (Réserves<br />

marines de la Passe en S, Sazilé et N’Gouja) mais aucun arrêté de Biotope n’est<br />

à ce jour en vigueur sur le territoire.<br />

• Les efforts, et surtout les moyens, pour faire respecter la réglementation<br />

existante sont insuffisants (surveillance, intervention auprès des contrevenants<br />

et suite données par le tribunal au procès-verbaux de flagrant délits). Bien<br />

qu’une permanence soit prévue pour 2004, la brigade nature de l’océan Indien<br />

n’intervient actuellement qu’une fois tous les deux mois à <strong>Mayotte</strong>.<br />

• Aujourd’hui, encore peu de guides professionnels sont disponibles en<br />

permanence pour former et initier les usagers des plages aux exigences propres<br />

à la biologie des espèces. Ali Mari, excellent communicant, n’a plus beaucoup<br />

l’occasion d’initier les visiteurs sur le terrain et l’association Oulanga na Nyamba<br />

lutte surtout contre les braconniers et ne semble pas désireuse d’encadrer les<br />

visiteurs.<br />

• Dans les conditions actuelles de faible disponibilité du personnel compétent<br />

pour la sensibilisation du public, le développement touristique pourrait tourner au<br />

drame écologique, la volonté de présenter les tortues au plus grand nombre<br />

impliquant un encadrement rigoureux.<br />

Erosion forte des terres arables<br />

• L’emploi de techniques agricoles « agressives » (cultures sur brûlis et sur sols<br />

très pentus) associé au défrichage des fourrés naturels, entraînent une forte<br />

érosion des terres arables lors des fortes précipitations des mois de mousson.<br />

Cette érosion entraîne de nombreuses particules fines sur les plages et dans le<br />

lagon, responsables du développement herbacé sur la berme et de l’envasement<br />

progressif du lagon.<br />

Pressions démographiques agricoles et foncières<br />

• L’attrait balnéaire des plages de <strong>Mayotte</strong> est assez récent et le développement<br />

des villes de Dzaoudzi-Labattoir et de Pamandzi très rapide. Les plages de Moya,<br />

encore désertes dans les années 1980, se trouvent aujourd’hui de plus en plus<br />

fréquentées et cette augmentation semble exponentielle. La présence de macros<br />

déchets sur les plages et l’arrivée d’engins à moteur type Jet Ski sont de fortes<br />

menaces pour la tranquillité et la sécurité des tortues. La fréquentation nocturne<br />

du site par des visiteurs non encadrés et non initiés aux exigences de calmes<br />

propres aux espèces de tortues de mer, risque de faire fuir les tortues vers des<br />

plages plus calmes, exposées au braconnage.<br />

• Le développement des villes de Petite-Terre exige une production agricole<br />

toujours supérieure, mitant les derniers espaces de fourré naturel, s’approchant<br />

toujours plus des falaises d’arrière-plage et participant de ce fait au<br />

recouvrement terrigène de la berme et à l’envasement du lagon.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 67


II. PROPOSITIONS POUR LA GESTION DU SITE<br />

II.1. REFLEXION SUR L'EVOLUTION DES MILIEUX<br />

Le site de Papani-Moya, connu depuis l’antiquité (pièges à poissons de Moya IV),<br />

semble avoir évolué jusqu’au dix-neuvième siècle au gré des colonisations<br />

successives, sans que la présence humaine ne menace réellement les<br />

populations de tortues marines s’y reproduisant et s’y alimentant. Depuis cent<br />

cinquante ans, le commerce intensif de leurs écailles (tortue imbriquée) et de<br />

leur chair (tortues vertes) a réduit leurs populations mondiales à des tailles<br />

dramatiquement faibles. Ces grands reptiles sont aujourd’hui protégées par de<br />

nombreuses conventions internationales, résolutions et arrêtés, qui interdisent<br />

strictement leur commerce et leur chasse. Malheureusement, ces textes de lois,<br />

souvent mal appliqués, n’ont pas été en mesure d’éradiquer les problèmes de<br />

braconnage et de nouvelles menaces telles que la poussée démographique et la<br />

surfréquentation touristique des littoraux viennent s’ajouter à la liste. En effet, la<br />

croissance démographique exponentielle et la forte immigration en provenance<br />

des îles voisines, placent le taux d’accroissement annuel moyen de la population<br />

de <strong>Mayotte</strong> parmi les plus forts du monde, entraînant une surexploitation agricole<br />

et un accroissement du rendement des terres arables à l’hectare qui participent,<br />

par défrichage, à la déstabilisation des sols. Les substances d’origine terrigène,<br />

entraînées par ruissellement, provoquent en aval le dépôt de particules fines sur<br />

les plages et dans le lagon. Le récent engouement pour le tourisme balnéaire et<br />

l’observation « sauvage » des pontes de tortues, causent une dégradation des<br />

littoraux et une perturbation des tortues lors de leurs différentes activités. Le<br />

marché clandestin de chair et de cartilages de tortues (ingrédient de la soupe de<br />

tortue) est florissant à <strong>Mayotte</strong> et une tortue chassée rapporte jusqu’à 100 Euros<br />

au braconnier dont les chances d’être condamné sont faibles en raison de<br />

l’imparfaite application des lois de protection des espèces.<br />

Plusieurs organismes se mobilisent depuis une dizaine d’années afin de lutter au<br />

mieux contre ces menaces et d’épauler la brigade nature de l’océan Indien, lors<br />

de ses rares interventions. La Brigade Tortue de la DAF, formée d’une équipe de<br />

techniciens du service environnement et forêts, et l’association Oulanga na<br />

Nyamba qui regroupe des bénévoles autour de la problématique de la protection<br />

des espèces de tortues marines, luttent activement contre le braconnage sur les<br />

plages de Moya. L’action de ces organismes est d’une grande efficacité puisque le<br />

braconnage a pratiquement disparu sur ces plages mais leurs actions dans le<br />

domaine de la sensibilisation des visiteurs restent insuffisantes.<br />

La forte poussée démographique observée est stimulée par les progrès sanitaires<br />

importants réalisés au cours de ces vingt dernières années (lutte contre le<br />

paludisme durant les années 1970 et 1980). Ce progrès sanitaire a créé un<br />

déséquilibre entre le taux de natalité et le taux de mortalité. Ce phénomène se<br />

traduisant par un taux d’accroissement naturel très élevé, appelé « transition<br />

démographique » ne devrait pas se stabiliser avant une vingtaine d’années. Le<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 68


développement touristique est typique d'une économie de transfert du secteur<br />

primaire et secondaire vers le secteur tertiaire. Cette perspective de<br />

développement démographique et économique pourrait engendrer de graves<br />

crises écologiques si les mesures de protection et de gestion nécessaires ne sont<br />

pas prises aujourd’hui.<br />

II.2. PROGRAMMES DE GESTION ET DE PROTECTION DES<br />

ESPECES DE TORTUES DE MER MENES DANS LE MONDE<br />

De manière à contribuer à la protection de ces animaux, véritables bioindicateurs<br />

à la fois du milieu marin et du littoral, de nombreux projets de<br />

conservation ont vu le jour à travers le monde : La région de la grande Caraïbe,<br />

s'est révélée particulièrement active notamment avec la mise en place d'un<br />

réseau, le WIDECAST (Wider Caribbean Sea Turtle Conservation Network) ;<br />

ECOFAC a appuyé la création en Afrique centrale d'un groupe nommé PROTOMAC<br />

(Protection des <strong>Tortues</strong> <strong>Marines</strong> d'Afrique Centrale) hébergé administrativement<br />

et techniquement par la cellule de coordination ECOFAC et le docteur Jacques<br />

Fretey, de la WWF France, mène depuis vingt ans en Guyane les campagnes<br />

Kawana. Bien d’autres pays se mobilisent pour tenter de sauvegarder ces<br />

espèces très cosmopolites (Floride, Polynésie, Asie du sud Est, Australie).<br />

A une échelle plus régionale, la résolution de Sodwana Bay de 1995 a donné<br />

naissance à des programmes d’orientation de gestion et de protection de la<br />

ressource Tortue de mer dans l’Ouest de l’océan Indien (UNEP, 1996).<br />

II.3. PRINCIPE DE GESTION PROPOSE<br />

Le principe de gestion proposé sur le site s’inspire de la GIZC ou gestion intégrée<br />

des zones côtières, décrite selon la définition citée dans le guide méthodologique<br />

UNESCO (2001). La gestion intégrée est « un processus dynamique qui réunit<br />

gouvernements et sociétés, sciences et décideurs, intérêts publics et privés en<br />

vue de la protection et du développement des systèmes et ressources (côtières).<br />

Ce processus vise à optimiser les choix à long terme privilégiant les ressources et<br />

leur usage raisonné et raisonnable ». Si une telle vision ne se décrète pas ex<br />

nihilo, c'est dans cette perspective que sont placées certaines des actions de<br />

recherche et de conservation proposées. Le site de Papani-Moya, fournissant une<br />

unité de lieu et un projets de conservation "espèces", il est envisageable de<br />

nourrir ce processus d'éléments de connaissance scientifique et d'outils de<br />

gestion et de concertation dans le but d’assurer un développement durable du<br />

site (Fig. 16).<br />

Ces développements posent bien entendu le problème de la séparation entre la<br />

recherche scientifique, neutre, objective, et l'action pour la conservation qui<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 69


implique une vision de la "nature" et amène à défendre des choix selon des<br />

critères plus flous. Cette question se pose pour tout organisme qui cherche à<br />

rétablir le lien entre la recherche et l'application de la recherche.<br />

Figure 16. Schéma illustrant les enjeux propres au développement durable<br />

(Rouxel et Rist, 2000)<br />

II.4. RAPPORT D’ENTRETIENS<br />

Le tableau 6 résume les idées de gestion, de réglementation et d’aménagement<br />

proposées par les personnes rencontrées sur le terrain. On remarque une<br />

certaine prise de conscience des usagers. Les deux principales menaces pesant<br />

sur les communautés de tortues sont fréquemment identifiées comme le<br />

braconnage et la surfréquentation du site. L’idée plus abstraite que les actions<br />

menées en amont peuvent avoir une influence sur la qualité des plages est plus<br />

difficile à comprendre et les enjeux liés aux activités agricoles sont souvent très<br />

importants (alimentation des familles). En réponse aux attentes des usagers, les<br />

acteurs proposent une formation des maraîchers aux techniques agricoles les<br />

moins érosives et un contrôle de la fréquentation du site. Afin que leurs<br />

préconisations soient appliquées, l’emploi d’animateurs écotouristiques et de<br />

formateurs aux techniques agricoles semble indispensable. La lutte contre le<br />

braconnage doit être maintenue et renforcée sur la plage de Papani, très<br />

enclavée.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 70


Préservation biodiversité<br />

Agriculteur Lutter contre le braconnage<br />

Visiteur plage diurne<br />

Visiteur plage nocturne<br />

venu observer les tortues<br />

Visiteur nocturne<br />

campant et faisant un<br />

voulé<br />

Patrice Autfray<br />

(CIRAD)<br />

Continuer la lutte contre le<br />

braconnage et équiper la<br />

Brigade Tortue de barques<br />

pour atteindre Papani et les<br />

plages de l'aéroport (plages<br />

très touchées par le<br />

braconnage mais<br />

n'appartenant pas au<br />

CELRL)<br />

Lutter contre le braconnage<br />

et réglementer les accès à la<br />

plage après une certaine<br />

heure<br />

Cacher le feu derrière un<br />

drap, éviter d'aller déranger<br />

les animaux pendant la<br />

ponte<br />

Développement agricole et<br />

lutte contre l'érosion des<br />

terres arables<br />

Proposer un aide concrète aux<br />

agriculteurs et une formation<br />

aux nouvelles techniques<br />

Lutter contre l’agriculture<br />

"sauvages", responsable du<br />

défrichage et du mitage des<br />

espaces naturels<br />

Proposer des techniques<br />

agricoles propres aux milieux<br />

tropicaux à tendance érosive.<br />

Eviter les défrichages des<br />

sentiers et fourré littoraux et<br />

reconstruire les<br />

aménagements de ceux déjà<br />

existants (escaliers, gabions)<br />

Mettre en pratique le produit<br />

des recherches du CIRAD<br />

afin de permettre un<br />

développement agricole en<br />

limitant son impact en aval<br />

(limiter les cultures sur brûlis,<br />

cultures sur billons qui<br />

peuvent diminuer de 70%<br />

l'érosion des sols…)<br />

Développement touristique<br />

Goudronner la piste de Moya<br />

et améliorer les zones de<br />

stationnement.<br />

Eviter les aménagements sur<br />

les plages qu’il faut laisser à<br />

l'état sauvage. Concentrer les<br />

visiteurs sur le centre de Moya<br />

I afin de ne pas dégrader les<br />

zones périphériques.<br />

Une nouvelle approche du<br />

tourisme est nécessaire afin de<br />

préserver le milieu dans son<br />

état originel<br />

Développement<br />

écotouristique<br />

Former la brigade tortue à<br />

cette tache qu'elle est<br />

sensée remplir<br />

Aménager la case de<br />

Moya I pour qu'elle soit<br />

plus attractive. Proposer<br />

des sorties guidées par des<br />

animateurs formés<br />

Proposer des sorties<br />

payantes guidées et<br />

encadrées.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 71<br />

Idem


Guy Bonnemaison<br />

(CELRL)<br />

Ali Mari (Brigade<br />

<strong>Tortues</strong>)<br />

Mireille Quillard<br />

(Brigade <strong>Tortues</strong><br />

Association "Oulanga na<br />

Nyamba"<br />

Installer des cordons sur<br />

les plages afin de délimiter<br />

la berme et éviter ainsi leur<br />

piétinement par les<br />

visiteurs, interdire l’accès<br />

aux plages après 23 heures<br />

et surtout, encadrer les flux<br />

de visiteurs nocturnes<br />

Installer un observatoire<br />

derrière la berme afin que<br />

les visiteurs puissent suivre<br />

les montées sans être vus.<br />

Eviter les vas et viens le<br />

long de la plage par petits<br />

groupes aux heures de<br />

ponte. Rassembler les<br />

visiteurs en un gros groupe<br />

Mettre en place des moyens<br />

efficaces pour lutter contre<br />

le braconnage sur les plages<br />

les plus touchées (Papani)<br />

Imposer la loi des 50 pas<br />

géométriques qui impose de<br />

laisser une bande de 81.2 m<br />

de terrain vierge entre le<br />

littoral et les premières<br />

cultures ou constructions.<br />

Planter une bande de<br />

végétation tampon en haut<br />

des falaises afin de limiter les<br />

écoulements.<br />

Tableau 6. Rapport des entretiens suivis sur le terrain.<br />

Remettre en place un<br />

système d'animation des<br />

plages, le soir et<br />

sensibiliser les enfants à<br />

l'école en intervenant dans<br />

les classes<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 72<br />

idem


II.5. PRESENTATION DES OBJECTIFS DE GESTION<br />

II.5.1. A LONG TERME<br />

Les objectifs du CELRL à long terme sont de préserver la biodiversité du site tout<br />

en maintenant les activités agricoles et sylvicoles et l’ouverture du site au public.<br />

La gestion intégrée du site est déléguée à un organisme compétent.<br />

Bien que propriétaire du terrain, le but du CELRL est de permettre sur son<br />

territoire, une activité humaine respectueuse de l’environnement, dont les<br />

pratiques et usages lui assurent un développement durable et la préservation de<br />

la biodiversité. Les usagers du site sont soumis au respect et au contrôle des<br />

recommandations de l’organisme gestionnaire, afin de lutter efficacement et de<br />

manière concertée contre les menaces pesant sur le site.<br />

II.5.2. OBJECTIFS DU PLAN DE GESTION (OPG) ET FICHES<br />

D’ACTION<br />

II.5.2.1. Désengorger les plages de Moya grâce à des activités<br />

alternatives<br />

Le récent engouement de la population mahoraise pour le tourisme balnéaire et<br />

l’ouverture progressive de l’île au tourisme entraînent de plus en plus de visiteurs<br />

vers les littoraux les plus accessibles de l’île. Petite-Terre étant parallèlement<br />

exposée à un problème préoccupant d’explosion démographique, il est<br />

compréhensible que les plages de Moya, situées à cheval entre les communes de<br />

Dzaoudzi-Labattoir et de Pamandzi et aux paysages magnifiques soient prises<br />

d’assaut par une population de plus en plus importante de plaisanciers. La<br />

Brigade Tortue, agissant sur les zone d’acquisition du CELRL et dont l’action est<br />

basée sur le recueillement d’informations et la lutte contre le braconnage, se<br />

trouve confrontée à une nouvelle menace, pesant sur les populations de tortues<br />

présentes : la surfréquentation du site. Afin de ne pas se trouver confronté à ce<br />

problème, il est utile d’anticiper la demande en offrant aux usagers du site des<br />

activités alternatives dans le but de désengorger les plages, très vulnérables à<br />

une forte fréquentation.<br />

• Réaménager la portion du sentier de GR mahorais traversant le site<br />

d’acquisition, de la piste de Moya au lac Dziani-Dzaha. Ce sentier, aux<br />

somptueux panoramas dominant toutes les plages de Moya et de Papani est<br />

actuellement en friche et très mal balisé. En revanche, un faré en bon état<br />

domine la plage de Moya II et permet une halte ombragée.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 73


• Regoudronner la piste menant au site de La Vigie, point culminant de Petite-<br />

Terre, dont les trous ne permettent pas le passage d’un véhicule ordinaire (Photo<br />

31). Installer une table d’orientation (indiquant les antiques pièges à poissons :<br />

photo 7) et un faré à proximité du parking déjà existant.<br />

• Aménager et sécuriser le chemin d’accès à la plage de Papani, actuellement<br />

très mal indiqué et très dangereux<br />

• Indiquer et favoriser l’accès à de nouveaux sentiers non balisés mais existants,<br />

empruntés par les usager du site et les braconniers.<br />

• Aménager une structure d’accueil, enherbée, équipée de carbets, de barbecues<br />

et de poubelles sur laquelle les visiteurs pourront passer la nuit (crochets pour<br />

les hamacs). Une arrivée d’eau fonctionnant à l’aide de jetons, déjà installée<br />

pourrait ainsi servir pour le nettoyage et l’alimentation.<br />

• Enfin, un petit lieu de culte, référencé sur la presqu’île de Moya peut également<br />

être visité, si la fréquentation ne perturbe pas sa pratique rituelle (photo 6).<br />

II.5.2.2. Employer un animateur dans le cadre du<br />

développement d’une structure écotouristique sur les plages de<br />

Moya.<br />

Si la simple permanence des techniciens de la Brigade <strong>Tortues</strong> a permis de faire<br />

chuter le taux de braconnage de manière significative sur les plages de Moya,<br />

elle a également eu pour conséquence d’attirer un nombre toujours plus<br />

important de visiteurs, désireux de découvrir ces fascinants animaux et de<br />

profiter de la présence de gardes expérimentés pour satisfaire leur curiosité. Si<br />

leur démarche est tout à fait louable, leurs pratiques et habitudes sont rarement<br />

en accord avec les besoins fondamentaux exigés par les deux espèces de tortues<br />

lors de leurs pontes (lampes, bruits, mouvements). Les agents de la Brigade,<br />

trop occupés à effectuer leurs mesures et relevés, ne peuvent pas répondre à<br />

cette attente et ne s’impliquent que très rarement dans une démarche<br />

pédagogique.<br />

• Employer au sein de la Brigade <strong>Tortues</strong> un animateur compétent à la fois sur<br />

les exigences, la biologie et la dynamique des populations de tortues de mer<br />

rencontrées à <strong>Mayotte</strong>. Il doit être capable de communiquer ses connaissances et<br />

de travailler en équipe. La connaissance du shibushi et du shimaoré est vivement<br />

souhaitée.<br />

• Réaménager la case de Moya I pour recevoir les visiteurs : La laver et la<br />

repeindre, la rendre plus vivante et attrayante, l’équipée pour recevoir des<br />

visiteurs et les former (planches, photos, photocopies, dessins, télé,<br />

magnétoscope et vidéos…), afficher une pancarte afin d’informer les visiteurs du<br />

site des nouvelles activités proposées.<br />

• Exiger une formation préalable lors de l’observation des tortues : « diplôme<br />

préparatoire à l’observation des tortues de mer », suivie à la case de la Brigade<br />

une fois par mois en un après-midi (tous les week-ends voire tous les aprèsmidis<br />

en période de vacances scolaires). Ce diplôme serait gratuit et valable sur<br />

l’ensemble des plages du CELRL à <strong>Mayotte</strong>. Le diplôme consisterait à répondre<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 74


par écrit ou à l’oral à une série de questions faciles sur les exigences<br />

écologiques, de tranquillité et les stades de vulnérabilité aux perturbations<br />

anthropiques lors de la montée en ponte (Annexe 2).<br />

• Organiser une parfaite communication entre la brigade et l’animateur qui<br />

devront travailler de paire. Accueil des visiteurs à la case par un agent de la<br />

Brigade <strong>Tortues</strong> et accompagnement par groupes successifs sur les plages par<br />

l’animateur lorsqu’une tortue pondant est signalée par radio (talkies-walkies).<br />

Sur les plages, l’animateur encadre l’observation de la tortue en train de pondre<br />

et présente les actions des agents de la Brigade <strong>Tortues</strong> et leur utilité (relevés<br />

d’infos significatives servant à mieux comprendre la dynamique des population,<br />

lutte contre le braconnage). Insister sur l’importance des T-shirts de la Brigade<br />

qui doivent être portés par tous les agents. Il est indispensable que chaque<br />

agent soit identifié très rapidement par les visiteurs qui pourraient les confondre<br />

avec des braconniers. En effet, une personne accroupie au-dessus de tortues, en<br />

train de les manipuler en pleine nuit peut porter à confusion. Suivre la formation<br />

des nouveaux agents, surtout en ce qui concerne le bagage et l’accompagnement<br />

écotouristique (en plus de l’animateur) qui nécessitent un réel apprentissage.<br />

II.5.2.3. Lutter contre l’érosion des terres arables<br />

Le site de Papani-Moya, de par sa présence sur Petite-Terre est exposé à de<br />

fortes pressions démographiques et agricoles. Heureusement préservé de toute<br />

pression foncière, il est cependant couvert dans sa quasi-totalité par des cultures<br />

agricoles vivrières, principalement de type manioc et agroforêt. L’exploitation des<br />

sols se fait de manière ancestrale et les techniques employées, ne se prêtent pas<br />

à de forts rendements sur une pente aussi importante. Le défrichage quasi-total<br />

des fourrés secs naturels qui devaient couvrir le site avant l’intervention humaine<br />

provoque la déstabilisation des sols et favorise leur érosion par ruissellement.<br />

ces substances terrigènes finissent sur les plages et dans le lagon. Afin de limiter<br />

ce phénomène et de lutter contre le recouvrement de la berme et l’envasement<br />

du lagon, des mesures sont à prendre rapidement.<br />

• Le parking actuel de Moya, très proche de la plage et très exposé aux<br />

ruissellement, se transforme quasiment en ravine lors des grandes pluies d’été.<br />

Ces intempéries entraînent de grandes quantités de terre et autres substances<br />

fines sur les plages et le lagon. Il serait intéressant de déplacer le parking de<br />

Moya plus en amont (1000 m 2 de terre battue, d’une capacité de 80 voitures<br />

avec une barrière pour interdire l’accès des véhicules à quatre roues au parking<br />

actuel), puis d’enherber, aplanir et installer 3 farés pour pique-nique diurnes (1 à<br />

gauche 2 à droite maison des gardes) (Fig. 17). L’aménagement du parking<br />

permettrait un ralentissement des ruissellements, responsables du ravinement<br />

du chemin d’accès aux plages de Moya (photos 28 ; 29 et 30). Il serait alors<br />

envisageable de reconstruire les structures détruites (escalier).<br />

• Initialement instaurée par Colbert au XVIII siècle, la loi des cinquante pas<br />

géométriques défini les usage de la zone définie comme une bande littorale, de<br />

50 pas de large comptés à partir du rivage de la mer, utilisée à l’époque à des<br />

fins militaires, dans un souci de protection des habitants. A partir du rivage de la<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 75


mer (font partie de la mer les mangroves, marais salants, et les<br />

endiguements...) a été tracée à 81,20 mètres, en amont dans les terres, une<br />

ligne fictive délimitant, de façon définitive et immuable, la limite supérieure de la<br />

zone des cinquante pas géométriques. Cette zone faisant partie du domaine<br />

public maritime de l’Etat, inaliénable et imprescriptible : aucune cession même à<br />

titre onéreux, aucune appropriation par prescription n’est possible. De ce fait,<br />

aucune exploitation agricole ne peut être envisagée sur cette zone. L’application<br />

de cette loi permettrait de libérer une bande de terrain au-dessus des falaises<br />

d’arrière-plage qui autoriserait le repiquage d’une bande de fourré sec naturel.<br />

Les qualités absorbantes de ce type de végétation permettraient de ralentir les<br />

écoulements provenant des champs en amont et de limiter les apports terrigènes<br />

néfastes aux plages comme au lagon.<br />

• De nombreuses techniques agricoles mises au point par le CIRAD sont<br />

nettement moins érosives que celle employées actuellement. Les cultures sur<br />

Billon, consistant à étager le terrain afin de limiter la pente et donc les<br />

écoulements s’avèrent très efficace sous les climats tropicaux, dont les<br />

précipitations sont irrégulières et violentes. Le bocage, qui consiste à planter des<br />

haies de buissons entre les parcelles agricoles, participe également à ralentir<br />

l’érosion. L’accompagnement à l’utilisation de ces techniques pourrait se faire par<br />

l’intermédiaire de formateurs agricoles agréés par le CIRAD.<br />

• Il est impératif d’interdire les feux et autres activités susceptibles de défricher<br />

les fourrés littoraux déjà très réduits en certains endroit (Zone II de Moya I). Son<br />

reboisement par des espèces indigènes propres à ce milieu serait même<br />

nécessaire.<br />

• Sur la partie centrale de la plage de Moya I, la stabilisation des particules<br />

terrigènes de la berme, par l’action conjuguée du ruissellement, des<br />

piétinements et des racines des arbres ornementaux, nécessite de lutter<br />

conjointement contre les trois phénomènes : Interdire l’accès à la berme, lutter<br />

contre le ruissellement grâce aux techniques décrites précédemment et arracher<br />

les arbres ornementaux et les herbiers à Cynodon dactylon enchâssant<br />

entièrement la zone d’arrière-plage. L’action de « labourage » naturel de la<br />

berme par les tortues marines devrait à terme décompacter le sédiment et<br />

permettre un rétablissement de conditions écologiques favorables à la ponte. Ce<br />

phénomène d’aération des couches superficielles de sable de la berme, entrant<br />

dans le processus de dégradation des matières organiques du sol, pourrait<br />

également avoir une action dans la limitation de l’érosion des plages. En effet, le<br />

sable retourné, très aéré, agit comme un amortisseur lors du déferlement des<br />

vagues sur le devant de la berme. L’eau s’infiltre très rapidement, n’entraînant<br />

que peu de sable lors du ressac. Ce phénomène est appelé Ecoplage (Com. Pers.<br />

Ciccione).<br />

• Dans le cadre de la lutte contre l’érosion mais également de la préservation de<br />

milieux menacés, il serait nécessaire de lutter contre le mitage agricole et le<br />

défrichage des fourrés secs naturels restants. Le survol régulier de la zone en<br />

ULM permet une très bonne vue d’ensemble du site et de référencer rapidement<br />

les nouvelles zones investies. La superficie relativement modeste du bassin<br />

versant pourrait ainsi permettre un contrôle efficace du site.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 76


II.5.2.4. Maintenir la lutte contre le Braconnage<br />

Le service <strong>Tortues</strong> de la DAF, dirigé par Ali Mari depuis une dizaine d’années, a<br />

débuté ses actions sur les plages de Sazilé et de Moya, à l’époque très touchées<br />

par le braconnage. Le fait d’assurer une permanence sur les sites de ponte<br />

semble avoir été une étape décisive dans cette lutte. Aujourd’hui, l’action semble<br />

avoir porté ses fruits puisque les nouveaux cadavres recensés sur ces plages<br />

sont devenus exceptionnels. Malheureusement, dans de nombreux cas, les<br />

braconniers délogés cherchent de nouvelles plages sans protection pour<br />

continuer leur commerce clandestin, souvent nécessaire à l’alimentation de leur<br />

famille. Ainsi, si les dossières encore rouges au plastron découpé ne jalonnent<br />

plus les plages de Moya, elles sont encore très nombreuses sur la plage voisine,<br />

beaucoup plus difficile d’accès pour les agents : la plage de Papani.<br />

• La plage de Papani, encore très touchée par le braconnage doit impérativement<br />

faire l’objet d’une surveillance quotidienne. Il serait souhaitable d’installer un<br />

observatoire en haut de sa falaise, d’où les gardes pourraient observer le site<br />

sans avoir besoin d’y descendre. La pratique du braconnage étant relativement<br />

laborieuse et nécessitant un certain temps, la surveillance régulière du site<br />

dissuaderait un certain nombre d’entre eux.<br />

• Afin de pouvoir surprendre les braconnier par la mer, la brigade tortue pourrait<br />

se faire équiper d’une barque munie d’un moteur mais utilisée à la rame. En<br />

effet, la plage de Papani, très difficile d’accès par la terre pourrait ainsi être bien<br />

mieux surveillée.<br />

II.5.2.5. Participer à la recherche sur l’écologie des espèces et<br />

au rétablissement des populations.<br />

Les plages de Moya, présentant originellement des conditions très favorables à la<br />

reproduction des deux espèces de tortues, très protégées de l’érosion par leur<br />

forme circulaire ont accueilli de nombreux programmes de recherche durant les<br />

années 1970 et 1980 (J. Frazier, 1985). Aujourd’hui suivie régulièrement par<br />

l’Ifremer de La Réunion, la Brigade Tortue s’est adaptée à cet engouement et<br />

remplie chaque jour depuis 1996 des fiches de différents types afin de fournir<br />

une base de données continue sur l’état des populations de tortues fréquentant<br />

le site. Ces fiches, archivées au service environnement et forêts, ne sont que<br />

partiellement traitées et souvent créées sans l’appuie d’un programme<br />

scientifique, rendant la nature même des relevées parfois peu pertinente et la<br />

qualité des échantillonnages approximative. La collaboration de la Brigade<br />

<strong>Tortues</strong> avec des programmes scientifiques pourrait permettre d’améliorer la<br />

pertinence des fiches de terrain et la rigueur des stratégies d’échantillonnage, ce<br />

qui rendrait à ces bases de données considérables toute leur valeur informative.<br />

• Les fiches remplies par la brigade tortue mériteraient d’être simplifiées et<br />

repensées en présence d’un scientifique, susceptibles d’exploiter les informations<br />

archivées sous forme de bases de données. En effet, les fiches doivent répondre<br />

à deux impératifs :<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 77


- La simplicité et l’ergonomie du support pour leur remplissage et l’exactitude<br />

des mesures relevées<br />

- La pertinence et l’utilité des informations recueillies pour leur traitement<br />

De nouvelles stratégies d’échantillonnage sont à mettre en place, lors des<br />

opérations de comptage des traces notamment, où certaines confusions<br />

semblent fréquemment se produire.<br />

Dans la fiche de dénombrement des visiteurs, des estimations seraient plus<br />

appropriées que des chiffres exhaustifs (système de cases à cocher : aucun<br />

visiteur □ ; moins de 10 □ ; 10 à 30 □ ; plus de 30 □) (Annexe 8)<br />

Regrouper les informations des fiches par thèmes plus spécifiques (comptages de<br />

traces et prédation, estimation du nombre de visiteurs, suivi individuel des<br />

tortues, recensement des actions)<br />

Visualiser par une carte simple, faisant apparaître les entités géographiques de<br />

chaque plage, la position des relevés de comptage de traces.<br />

• Les conditions environnementales naturelles et la dynamiques des plages du<br />

site, très favorables à la fréquentation durable de populations de tortues (faible<br />

érosion des plages, pentes faibles, fourré littoral proche de la berme et protégé<br />

par une falaise…), pourraient justifier l’implantation d’un site d’observation<br />

scientifique des tortues marines. Le suivi des pontes et l’installation d’une<br />

écloserie pourraient permettre de mieux comprendre les phénomènes encore mal<br />

compris liés aux migrations des espèces (phénomène de « Homing »). Le projet<br />

d’une écloserie, généralement proposé en dernier recours, entre dans une<br />

démarche de conservation à l’échelle régionale. Les plages alentour, du Sud-<br />

Ouest de l’océan Indien, étant dans l’ensemble beaucoup plus menacées que<br />

celles de Moya et de Papani, justifient l’utilisation optimale des capacités de<br />

« stockage » de ces plages de ponte. Lors des pics de ponte de la tortue verte,<br />

durant les mois d’hiver austral, les montées sont si nombreuses que les premiers<br />

nids sont fréquemment déterrés lors de nouvelles pontes. Le prélèvement<br />

saisonnier de ces œufs menacés permettrait d’optimiser les capacités<br />

incubatrices des plages et offrirait une alternative à la destruction massive des<br />

populations de ces deux espèces. L’installation d’écloseries est cependant très<br />

délicate en raison des textes de loi internationaux et de l’arrêté de 1977 sur la<br />

protection des tortues avec interdiction de la recherche, la capture, la détention<br />

et la consommation des tortues, de leurs oeufs et des écailles, qui interdisent le<br />

prélèvement de spécimens et d’œufs, même à des fins scientifiques. Des<br />

dérogations sont cependant envisageables mais la demande doit être justifiée et<br />

argumentée d’un projet solide de conservation (Ce fut le cas de la ferme corail<br />

de Saint-Leu de La Réunion, à l’origine construite comme ranch d’élevage des<br />

deux espèces E. imbricata et C. mydas. L'arrêté n° 1989 du 4 juillet 1983. dont<br />

l’article 1 énonçait: "la destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la<br />

destruction et la capture des tortues franches Chelonia mydas et des tortues à<br />

écailles Eretmochelys imbricata d'origine sauvage ou indéterminée" sont<br />

"interdits en tous temps", mais dont l'article 2 tolérait "le prélèvement" de<br />

tortues vertes "à des fins d'élevage en ranch" sous réserve d'une "autorisation<br />

des pouvoirs publics compétents", et admettait les "prélèvements effectués par<br />

des organismes de recherche habilités par ces mêmes pouvoirs publics", permis<br />

le prélèvement dans les îles éparses des œufs nécessaires à son fonctionnement.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 78


Cet arrêté fut annulé par le Tribunal administratif de Saint-Denis, dans son<br />

jugement du 19 février 1997).<br />

II.5.2.6. Réglementer les usages du site et contrôler les<br />

infractions.<br />

Dans l’optique du développement durable de la zone, fréquentée par un nombre<br />

croissant d’usagers (visiteurs, agriculteurs) et décroissant de tortues, certaines<br />

règles et habitudes doivent être adoptées, sur le site, afin que la cohabitation<br />

entre humains et tortues de mer soit envisageable à long terme. <strong>Mayotte</strong><br />

regroupe sur son territoire des aires de nourrissage et des sites de reproduction.<br />

Il est nécessaire de prendre en considération non seulement la protection directe<br />

des espèces de tortues mais aussi des milieux et des espèces entrant dans leur<br />

chaîne alimentaire (récif, herbiers…).<br />

• Il est important de définir une zone de baignade, limitée à une centaine de<br />

mètres du bord, au-delà de laquelle, les tortues femelles, épuisées par leurs<br />

pontes nocturnes, se reposent durant de longues heures de la journée,<br />

n’appréciant guère d’être dérangées par des plongeurs amateurs.<br />

• Afin d’éviter toute intrusion au-delà de la zone de baignade et de ne pas<br />

perturber le repos des tortues à distance, il sera nécessaire d’interdire les engins<br />

à moteur (le son se propageant beaucoup plus vite et loin dans l’eau que dans<br />

l’air) et la pêche au fusil sur le site.<br />

• L’installation d’un cordon autour de la berme, maintenu à cinquante<br />

centimètres au-dessus du sable par de petit piquets en bois discrets et distants<br />

d’environ 5 mètres, permettra de délimiter la zone de ponte et d’interdire son<br />

accès de jour comme de nuit. En effet, son piétinement endommage les nids et<br />

favorise son envahissement par Cynodon dactylon.<br />

• Chaque visiteur possédant un chien ou tout autre animal domestique doit le<br />

tenir en laisse afin qu’ils n’aille pas creuser la berme et déterrer grâce à son flair<br />

très développé les œufs en incubation.<br />

• Il est nécessaire de faire entretenir le site (vider les poubelles, nettoyer les<br />

plages, arracher Cynodon dactylon sur la berme…) en raison de la forte<br />

fréquentation des lieux et du danger que peuvent représenter certains déchets<br />

pour les usagers comme pour les tortues (déchets métalliques et bouteilles en<br />

verre). Un accord avec les villes de Pamandzi et de Dzaoudzi-Labattoir serait<br />

souhaitable afin que le relevé des poubelles soit fait régulièrement.<br />

• Afin de contrôler les accès des plages aux heures de plus grande vulnérabilité<br />

du site (marées hautes, après la tombée de la nuit), il serait nécessaire de<br />

diviser la journée en 3 périodes d’accès contrôlées (Tableau 6).<br />

Accès libre de 6 h à 19 h, accès encadré par l’animateur de 19 h à 23 h et un<br />

accès interdit à partir de 23 h jusqu’au lendemain matin.<br />

L’organisation et réglementation des accès à la plage après la tombée de la nuit<br />

permettrait d’éviter les arrivées échelonnées des visiteurs sur le site (heures de<br />

visites) et de bénéficier de bonne conditions de travail pour l’animateur<br />

susceptible d’offrir un encadrement de qualité.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 79


6h à 19 h 19 h à 23 h 23 h à 6 h<br />

Mode d'accès Libre Encadré par un animateur Interdit<br />

• Ne pas marcher ni • Suivre les consignes de • Aucun accès aux<br />

installer de serviette l'animateur<br />

plages n'est autorisé.<br />

sur la zone de berme, • Posséder le diplôme Par contre, le site<br />

délimitée par un préparatoire à l'observation d'accueil, de jeu et de<br />

cordon<br />

des tortues de mer repos avec carbet,<br />

• Ne pas nager au-delà • Se vêtir de couleurs barbecue et possibilité<br />

Recommandations de la zone de baignade discrètes<br />

• Tenir les chiens en • Ne pas accéder librement<br />

de fixer des hamacs<br />

situé en amont, proche<br />

laisse<br />

aux plages et attendre qu'un de la piste de Moya,<br />

• Ne pas chasser au animateur vienne reste ouvert. (fig. 17)<br />

fusil à harpon. • Ne pas venir pique-niquer<br />

• Ne pas utiliser sur les plages ni faire de<br />

d’engin motorisé voulé<br />

Tableau 7. Recommandations d'usage du site de Papani-Moya<br />

Figure 17. Carte des aménagements préconisés sur le site.<br />

Plage de Moya I<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 80


CONCLUSIONS<br />

Le site de Papani-Moya est le lieu de plusieurs enjeux, malheureusement<br />

difficilement compatibles. En effet, si les tortues marines C. mydas et E.<br />

imbricata semblent y avoir élu domicile depuis la nuit des temps (second site de<br />

ponte de <strong>Mayotte</strong> après les plages de Sazilé), la proximité des villes de Dzaoudzi-<br />

Labattoir et de Pamandzi, aux démographies galopantes, et surtout l’essor<br />

touristique, préconisé par un secteur tertiaire en pleine expansion à <strong>Mayotte</strong>,<br />

représentent de fortes menaces sur le milieu et les espèces rencontrées. L’action<br />

du service tortues de la DAF, menée depuis une dizaine d’années par Ali Mari a<br />

permis, grâce à la permanence d’une équipe de techniciens sur le site, de faire<br />

chuter considérablement le taux de braconnage sur les plages de Moya, autrefois<br />

très touchés par ce fléau. Aujourd’hui confrontées a de nouvelles pression, des<br />

mesures seront bientôt indispensables au bon fonctionnement du site, toujours<br />

plus fréquenté par les visiteurs (projet d’agrandissement de l’aéroport de<br />

Dzaoudzi afin de recevoir les avions gros porteurs).<br />

L’étude menée sur le terrain, bien que brève et donc peu significative, porte à<br />

croire que les limites de charge de la plage de Moya I, dans les conditions<br />

actuelles de gestion, sont proches d’être atteintes (aménagements mal adaptés,<br />

sans prise de conscience des exigences propres aux tortues marines, provoquant<br />

de profonds troubles dans leurs communautés qui désertent peu à peu le site au<br />

profit de plages exposées au braconnage). En effet, Qu’il soit direct ou indirect,<br />

l’impact humain sur les espèces de tortues présentes sur le site est considérable.<br />

Bien que protégées par de nombreuses conventions internationales, régionales et<br />

locales, les milieux de vie des tortues vertes et imbriquées à l’existence<br />

principalement côtière, se retrouvent souvent menacés par l’activité humaine<br />

dont 80% de la population mondiale vit en zone littorale. Si la cohabitation<br />

semble difficile, il est indispensable d’établir des règles et des mesures parfois<br />

restrictives afin que celle-ci soit envisageable.<br />

Une dégradation du site, encore relativement préservés, par une<br />

surfréquentation des lieux et une surexploitation agricole du bassin versant, est à<br />

envisager si aucune mesure n’est prise rapidement. Il est impératif de prendre<br />

conscience, avant qu’il ne soit trop tard, que ces menaces sont à anticiper au<br />

même titre qu’il est nécessaire de continuer la lutte contre le braconnage.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 81


Planche n°1<br />

Photo 1. Plage de Papani<br />

Photo 2. Plage de Moya II<br />

Photo 3. Plage de Moya I<br />

Photo 4. Falaise d’arrière plage sur la plage de<br />

Papani<br />

Photo 5. Presqu’île de Moya<br />

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Planche n°2<br />

Photo 6. Site cultuel de la presqu’île de Moya<br />

Photo 7. Antiques pièges à poissons creusés dans la dalle rocheuse de la plage de Moya<br />

IV<br />

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Planche n°3<br />

Photo 8. Eretmochelys imbricata Photo 9. Chelonia mydas dans sa cavité corporelle<br />

Photo 10. Nid et œufs de Chelonia mydas Photo 11. Chelonia mydas juvénile<br />

Photo 13. Chelonia mydas braconnée sur Papani<br />

Photo 12. Bague Monel sur la nageoire de C. mydas<br />

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Planche n°4<br />

Photo 14. Fourré sec naturel sur la presqu’île de Moya Photo 15. Fourré littoral de Moya II<br />

Photo 16. Mangrove à Sonneratia alba de Moya II<br />

Photo 18. Fourré à Lantana camara au dessus de Papani<br />

Photo 17. Mangrove à Rhizophora mucronata de<br />

Moya II<br />

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Planche n°5<br />

Photo 19. Herbier à phanérogames marines de Moya<br />

II Photo 20. Turbinaria ornata<br />

Photo 21. Milieu à Cynodon dactylon et<br />

Photo 22. Culture de manioc sur la rupture de<br />

Ipomoea pes-caprae sur Moya I<br />

pente de la falaise de Papani.<br />

Photo 23. Sable de Moya I fortement enrichi en<br />

Photo 24. Littoral rocheux de Moya II<br />

dépôts terrigènes<br />

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Planche n°6<br />

Photo 25. Case de la Brigade Tortue au dessus de Moya I Photo 26. Intérieur de la case<br />

Photo 27. Parking de Moya Photo 28. Escalier d’accès à le plage de Moya I érodé<br />

Photo 29. Sentier d’accès effondré par l’érosion Photo 30. Second escalier du sentier d’accès à la<br />

plage de Moya I, également érodé.<br />

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Planche n°7<br />

Photo 31. Ornières dans la route de la Vigie.<br />

Photo 32. Décharge brute, à ciel ouvert, des Badamiers.<br />

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GLOSSAIRE<br />

• Agroforêt : Principe d’agriculture liant l’exploitation sylvicole, fruitière et fourragère.<br />

• Albédo : Fraction du flux total de particules incidentes renvoyé par réflexion diffuse à la surface de séparation de deux<br />

milieux<br />

• Arrêtés de Biotope : arrêtés préfectoraux de protection d’habitats, destinés à la préservation des milieux fréquentés par<br />

certaines espèces protégées.<br />

• Bague de type Monel : Bagues en acier inoxydable marqué d’un numéro d’identification, implantée dans la nageoire<br />

antérieure des femelles en ponte.<br />

• Berme : Bourrelet de plage plus ou moins proéminent situé entre la laisse des plus hautes eaux et le fourré littoral<br />

d’arrière-plage.<br />

• Cavité corporelle : Premier trou creusé par la tortue femelle lors de la montée en ponte. Ce trou peu atteindre une<br />

cinquantaine de centimètres de profondeur et permettre à la tortue de disparaître entièrement.<br />

• Ecotourisme : Principe de développement touristique basé sur le respect des milieux et l’exploitation responsable des<br />

ressources environnementales.<br />

• Ectotherme : Température interne dépendant de la température ambiante<br />

• Ergonomie : Etude et recherche de l’amélioration des conditions de travail et des relations entre l’homme et son outil.<br />

• Espèce anthropophile : Espèce dont le développement des populations est favorisé par la présence humaine.<br />

• Latérisation : Principe d’oxydation des principaux minéraux du sol, sous l’effet de la chaleur et de l’humidité. La latérite<br />

est de couleur rouge, riche en alumine et en oxyde de fer.<br />

• Monophylétique : groupe dérivé d’un ancêtre commun (qui n’a pas donné d’autres descendants vivants)<br />

• Necton : Partie de la faune marine capable de nager activement et maître de ses déplacement (contraire de plancton)<br />

• Plancton : Partie de la faune et de la flore marine incapable de nager activement. Ses déplacements sont liés aux courants<br />

marins.<br />

• Poïkilotherme : Se dit des animaux dont le sang a une température variable (poissons, reptiles, etc…)<br />

• Puits de ponte : Second trou creusé par la femelle lors de la ponte. Etroit et à la forme de bouteille, il reçoit les œufs<br />

avant d’être rebouché.<br />

• Spermathèque : Diverticule du cloaque de la femelle susceptible de conserver la semence des mâles durant un temps plus<br />

ou moins long.<br />

• Thermorégulation : Mécanisme régulateur par lequel la température interne du corps des animaux se maintient constante.<br />

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LISTE DES FIGURES ET TABLEAUX<br />

Tableaux<br />

Liste des principaux prédateurs de tortues marines sur le site de Papani-Moya.................................................. 31<br />

Liste des usagers du site de Papani-Moya............................................................................................................ 34<br />

Résultats du comptage des traces sur les plages de Papani et de Moya............................................................... 49<br />

Dénombrement des visiteurs et de leurs véhicules sur les plages de Moya I et II.................................................51<br />

Bilan des actions menées sur le terrain ................................................................................................................ 62<br />

Rapport des entretiens suivis sur le terrain. ......................................................................................................... 72<br />

Recommandations d'usage du site de Papani-Moya............................................................................................. 80<br />

Table de figures<br />

Anatomie générale des tortues de mer .................................................................................................................... 8<br />

Chelonia mydas (Pritchard et Mortimer, 1999).................................................................................................... 10<br />

Répartition mondiale, côtière et océanique de la tortue verte (Bonin ; Devaux et Dupré, 1996)......................... 11<br />

Cycle biologique de la tortue verte (Bonnet ; Le Gall et Lebrun, 1985). ................................................................... 14<br />

Eretmochelys imbricata (Pritchard et Mortimer, 1999) ....................................................................................... 17<br />

Répartition mondiale, côtière et océanique de la tortue imbriquée (Bonin ; Devaux et Dupré, 1996)................. 18<br />

Image satellite de <strong>Mayotte</strong> (Image Spot © CNES, 1989)...................................................................................... 20<br />

Direction de principaux vents de l'Océan Indien et du Canal du Mozambique. (Atlas du SDAGE de La Réunion,<br />

1998) ..................................................................................................................................................................... 22<br />

Pistes et limites du site de Papani-Moya sur Petite-Terre.................................................................................... 23<br />

Traitement en trois dimensions du site de Papani-Moya (Biotope ©, 2003) ........................................................ 25<br />

Organisation transversale d’un récif corallien (B. Robin, C. Petron, C. Rives, 1988)......................................... 26<br />

Schéma de la dérive littorale sur la plage de Moya I issue des houles de mousson ............................................. 27<br />

Schéma de la dérive littorale sur la plage de Moya I issue des houles d’alizé ..................................................... 28<br />

Cartographie de la qualité des milieux littoraux en tant que sites de ponte sur les plages de Papani, Moya I et<br />

Moya II.................................................................................................................................................................. 60<br />

Cartographie des nuisances anthropiques rencontrées sur les plages de Papani, Moya I et Moya II ................. 61<br />

Schéma illustrant les enjeux propres au développement durable (Rouxel et Rist, 2000)...................................... 70<br />

Carte des aménagements préconisés sur le site. ................................................................................................... 80<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 90


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• Hughes C.R. 1974. The sea turtle of South-Est Africa. II – The biology of the Tongaland Loggerheads<br />

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• Ikenoue H. & Kafuku T. (Eds.). 1992. MODERN METHODS OF AQUACULTURE IN JAPAN, 2nd<br />

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• Image Spot © CNES. 1989. Couverture photographique aérienne verticale.<br />

• Louette M. 1999. La faune terrestre de <strong>Mayotte</strong>. Musée royal de l’Afrique Centrale. Annales Sc.<br />

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• Meylan A.B. & Meylan P.A. 1999. Introduction to the evolution, life history, and biology of sea<br />

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• Photos aériennes des campagnes IGN 1949, 69, 89 et 97 de la zone Est de Petite-Terre<br />

• Pritchard P.C.H. & Mortimer J.A. 1999. Taxonomy, external morphology, and species identification.<br />

Pages 21-38 in Eckert K.L., Bjorndal K.A., Abreu-Gobois F.A. & Donnelly M. (eds.) Research and<br />

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Publication n°4. 235 pages. Pennsylvanie, USA.<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 91


• Robin B., Petron C., Rives C. 1988. Coraux du Monde, Delachaux et Niestlé, Suisse<br />

• Rouxel F. & Rist D. 2000. Le développement durable – Approche méthodologique dans les<br />

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• Shaffer H. B., Meylan P. & McKnight M.L. 1997. Tests of turtle phylogeny: molecular,<br />

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• Stieltjes L. 1988. Carte géologique de la France. <strong>Mayotte</strong> (archipel de Comores. Echelle : 1/50 000.<br />

Notice explicative. Collectivité territoriale de <strong>Mayotte</strong>. Bureau de Recherche Géologique et Minière. 67p<br />

• Temple R.C. 1914. the travels of Peter Mundy in Europe and Asia 1908-1667. Vol. 2. Travel in Asia.<br />

1628-1634. London, Hakluyt Society.<br />

• Thomassin B.A. 1990. Les Mangroves a <strong>Mayotte</strong> (île haute du Canal du Mozambique, S.W. de l’océan<br />

Indien). Directeur de recherche au CNRS, Centre d’Océanologie deMarseille (Observatoire de l’Institut<br />

National des Sciences de l’Unuivers de CNRS), Station marine d’Endoume. Pour le compte de la<br />

Direction de l’Equipement à <strong>Mayotte</strong>, Service de l’Aménagement.<br />

• UNESCO. 2001. Des outils et de Hommes pour une gestion intégrée des zones côtières. Guide<br />

méthodologique. Volume II. UNESCO. 63 p. Paris. France.<br />

Sites Internet :<br />

http://www.colszoo.org/animalareas/shores/gturtle.html (Données relative aux tortues marines)<br />

http://www.environnement.gouv.fr/ifrecor/domtom/myrespf.htm (arrêtés préfectoraux en vigueur à <strong>Mayotte</strong>)<br />

http://www.legifrance.com/ (site du service public de la diffusion du droit)<br />

http://www.cites.org/eng/resources/species.html (site officiel de la convention de Washington)<br />

http://www.wcmc.org.uk/cms/ (site officiel de la convention de Bonn)<br />

http://www.mnhn.fr/expo/GGE/tortue/ (site du muséum d’histoire naturel / UICN, conservation des tortues marines)<br />

http://www.insee.fr/fr/recherche/rechercher.asp (Données INSEE sur <strong>Mayotte</strong>)<br />

http://www.embl-heidelberg.de/~uetz/db-info/ExtinctReptiles.html (Classification des reptiles)<br />

http://wwwedu.ge.ch/co/renard/coursfacbio/TORTUES/fichestortue/indextortues.htm (classification des tortues)<br />

http://www.ecofac.org/<strong>Tortues</strong>/Index.htm (programmes ECOFAC)<br />

http://www.meteo.fr/meteonet/boutique/per.htm (bulletin climatique de <strong>Mayotte</strong>. Météo France)<br />

http://www.meteo.fr/meteonet/meteo/pcv/outremer/mayotte/domtom2.htm#haut<br />

http://www.environnement.gouv.fr/ifrecor/domtom/lespres.htm (données sur les techniques de pêche employées à <strong>Mayotte</strong>)<br />

Communications personnelles et personnes ressources :<br />

Bernard Bonnet : Maître de conférence à l’Université de la Réunion, laboratoire d’Ecophysiologie<br />

Stéphane Ciccione : Directeur du CEDTM (St-Leu, La Réunion)<br />

David Roos : Technicien halieute à l’Ifremer (Le Port, La Réunion)<br />

Eric Naim-Gesbert : Maître de conférence à l’Université de la Réunion, Faculté de droit.<br />

Ali Mari : Responsable de la Brigade <strong>Tortues</strong> du service environnement et forêts de la DAF de Coconi.<br />

Mireille Quillard : Responsable adjointe de la Brigade Tortue<br />

Fabien Barthelat : Botaniste du service environnement et forêts de la DAF de Coconi<br />

Olivier Soumille : Bureau d’étude ESPACE<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 92


Crédit photographique :<br />

Photos 7, 19, 31, 32 : Bureau d’étude ESPACE<br />

Photo 8 : Adriatic marine turtle program<br />

Photo 20 : Georgia Lezinsky<br />

Les autres photos sont de M. Pinault<br />

Mathieu PINAULT DESS Sciences et Gestion de l’Environnement Tropical – Bureau d’étude BIOTOPE - 93


RESUME<br />

Evaluation qualitative des sites de ponte des tortues marines Eretmochelys imbricata<br />

et Chelonia mydas sur les plages de Papani et de Moya (<strong>Mayotte</strong>, Petite Terre)<br />

Les tortues marines sont parmi les espèces animales les plus menacées au monde.<br />

Parmi les sept espèces reconnues, six sont recensées sur la liste rouge de l’UICN et<br />

cinq sont définies comme menacées ou gravement menacées d’extinction. De<br />

nombreuses conventions internationales interdisent leur chasse et leur commerce.<br />

Au niveau de l’Archipel des Comores, deux espèces de tortues marines, la tortue<br />

verte (Chelonia mydas) essentiellement et la tortue imbriquée (Eretmochelys<br />

imbricata) dans une moindre mesure, fréquentent régulièrement les îles Mohéli et de<br />

<strong>Mayotte</strong> pour y pondre.<br />

La brigade Tortue du service environnement et Forêt de la DAF est chargée de<br />

surveiller les deux sites principaux de ponte de <strong>Mayotte</strong> : Salizé, dans le Sud de<br />

Grande Terre et Papani-Moya, à l’Est de Petite Terre. Ce dernier site, récemment<br />

acquis par le CELRL, présente de nombreux atouts et opportunités de<br />

développement durable malheureusement mitigés par de fortes pressions pesant sur<br />

des populations de tortues marines. En effet, si l’action de la Brigade <strong>Tortues</strong> a<br />

permis une réduction quasi totale du taux de braconnage sur les plages de Moya, ce<br />

même taux est encore très élevé sur la plage de Papani. De plus, l’érosion du bassin<br />

versant, accentué par l’emploi de techniques agricoles agressives, est responsable<br />

de l’envasement du lagon et de la dégradation qualitative des sites de ponte. Enfin,<br />

l’explosion démographique des vingt dernières années et l’arrivée d’un tourisme<br />

balnéaire encore balbutiant représente des nouvelles menaces à anticiper.<br />

A ce niveau, le rôle pédagogique des associations de protection de l’environnement,<br />

l’assistance des maraîchers dans leur reconversion, et une structure réglementaire<br />

stricte et contrôlée apparaissent incontournables. En effet, outre l’intérêt de préserver<br />

la biodiversité, si les mesures préventives peuvent constituer un relais privilégié dans<br />

la vulgarisation des connaissances acquises et leur application aux conditions de<br />

terrain, certaines habitudes doivent être prises par les usagers afin que la<br />

fréquentation humaine actuelle ne nuise pas à l’attractivité future du site.<br />

Mots clés : <strong>Tortues</strong> de mer, sites de ponte, conservation, braconnage, érosion,<br />

surfréquentation, écotourisme, Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC),<br />

développement durable.

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