Tripoli, encore et toujours... - L'Orient-Le Jour
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4 Liban samedi 19 janvier 2013<br />
Éclairage<br />
<strong>Le</strong>s déplacés syriens,<br />
un dossier qui s’installe<br />
dans la durée<br />
Scarl<strong>et</strong>t HADDAD<br />
La crise syrienne aura bientôt<br />
deux ans <strong>et</strong> rien n’indique que<br />
le président Bachar el-Assad<br />
est sur le départ, en dépit des<br />
rumeurs sur l’imminence de sa<br />
chute, diffusées par les médias.<br />
Au contraire. Ce qui a filtré des<br />
dernières négociations entre<br />
l’émissaire onusien Lakhdar<br />
Brahimi <strong>et</strong> les représentants<br />
de la Russie <strong>et</strong> des États-Unis<br />
montre qu’elles butent justement<br />
sur le sort de Bachar<br />
el-Assad. Plus même, selon<br />
les informations publiées dans<br />
la presse <strong>et</strong> jamais démenties,<br />
Brahimi aurait voulu obtenir<br />
d’Assad ou de ceux qui l’appuient<br />
un engagement ferme<br />
sur le fait qu’il ne présentera pas<br />
sa candidature à la présidentielle<br />
de 2014. L’information<br />
paraît énorme car elle signifie<br />
deux choses : non seulement<br />
qu’il serait acquis que le président<br />
syrien sera <strong>encore</strong> en place<br />
en 2014, alors qu’on ne cesse<br />
dans les médias d’annoncer sa<br />
défaite, <strong>et</strong>, d’autre part, qu’il<br />
restera suffisamment fort <strong>et</strong> populaire<br />
au printemps 2014 pour<br />
inquiéter d’autres candidats<br />
probables, alors que les déclarations<br />
occidentales le présentent<br />
comme ayant perdu la quasitotalité<br />
du soutien de son peuple.<br />
Une personnalité libanaise<br />
qui suit de près le dossier syrien<br />
révèle à c<strong>et</strong> égard que les Russes<br />
<strong>et</strong> les Américains ont commencé<br />
à discuter sérieusement<br />
de l’issue de la crise syrienne.<br />
Ce qui constitue un élément<br />
positif pour la suite des événements,<br />
puisque ce n’est plus<br />
un secr<strong>et</strong> pour personne que<br />
la crise syrienne est devenue<br />
un enjeu international <strong>et</strong> un<br />
suj<strong>et</strong> de tiraillements entre les<br />
États-Unis <strong>et</strong> leurs alliés, d’une<br />
part, <strong>et</strong> les Russes <strong>et</strong> leurs alliés,<br />
d’autre part.<br />
Certes, cela ne signifie nullement<br />
qu’un accord est conclu,<br />
mais seulement que les négociations<br />
commencent à être sérieuses.<br />
De plus, les déclarations<br />
répétées du ministre russe des<br />
AE montrent aussi que le président<br />
syrien reste une carte maîtresse.<br />
Ce qui porte à croire qu’il<br />
<strong>Le</strong> ministre de l’Intérieur<br />
Marwan Charbel a reçu hier<br />
à son bureau l’ambassadeur<br />
de France Patrice Paoli.<br />
L’entr<strong>et</strong>ien a porté sur le cas<br />
du militant Georges Ibrahim<br />
Abdallah <strong>et</strong> ses r<strong>et</strong>ombées<br />
sur la scène libanaise <strong>et</strong> sur<br />
n’est pas sur le point de partir,<br />
que son armée reste solide ainsi<br />
que l’appareil de l’État. Ce qui<br />
est en soi une victoire, estime<br />
la personnalité libanaise, face à<br />
l’énormité des moyens mis à la<br />
disposition de ses opposants. Au<br />
point que les États-Unis <strong>et</strong> leurs<br />
alliés commenceraient à revoir<br />
leurs positions. Ils ont en eff<strong>et</strong><br />
appuyé autant qu’ils le pouvaient<br />
l’opposition, dans sa diversité,<br />
mais près de deux ans après le<br />
déclenchement des troubles,<br />
celle-ci n’est pas <strong>encore</strong> en mesure<br />
de marquer une victoire<br />
déterminante, de nature à renverser<br />
le rapport de force. Plus<br />
grave même, l’opposition n’est<br />
<strong>toujours</strong> pas unie. De plus, les<br />
groupes efficaces sur le terrain<br />
sont essentiellement des islamistes<br />
fanatiques <strong>et</strong> sont en train<br />
de faire perdre à l’opposition sa<br />
crédibilité <strong>et</strong> l’appui populaire<br />
dont elle bénéficiait au départ.<br />
D’ailleurs, dans les régions<br />
qu’elle contrôle (notamment au<br />
nord du pays, à la frontière avec<br />
la Turquie), elle n’a pas réussi à<br />
rassurer la population qui fuit<br />
en général non seulement les<br />
zones de combat, mais aussi les<br />
secteurs sous contrôle des islamistes<br />
fanatiques. Sauf imprévu,<br />
<strong>et</strong> surtout s’il n’y a pas une intervention<br />
militaire étrangère, la<br />
situation devrait donc rester telle<br />
quelle, avec malheureusement<br />
<strong>toujours</strong> plus de sang versé,<br />
jusqu’à ce qu’un accord international<br />
soit conclu.<br />
Si c<strong>et</strong>te approche peut paraître<br />
cynique pour les Syriens,<br />
elle est aussi difficile à avaler<br />
pour les Libanais, dont les deux<br />
grands camps rivaux ont misé<br />
sur les développements en Syrie<br />
pour adopter des positions<br />
politiques internes. La personnalité<br />
qui suit de près le dossier<br />
syrien précise à c<strong>et</strong> égard que<br />
désormais, les deux camps songeraient<br />
sérieusement à trouver<br />
un compromis sur la loi électorale,<br />
puisque, selon toute probabilité,<br />
le statu quo continuera<br />
à régner en Syrie en juin prochain.<br />
Ce compromis devrait<br />
reposer sur l’équation suivante :<br />
la loi future devrait être suffisamment<br />
souple pour ne pas<br />
garantir la victoire d’un camp<br />
les intérêts français au Liban.<br />
<strong>Le</strong> ministre de l’Intérieur<br />
a rassuré l’ambassadeur<br />
de France sur ce plan en lui<br />
affirmant que toutes les mesures<br />
ont été prises pour protéger<br />
les intérêts français <strong>et</strong><br />
les centres culturels ouverts<br />
sur l’autre. C’est la fameuse<br />
notion du « flou positif ». De<br />
même, au fur <strong>et</strong> à mesure que<br />
le régime montre qu’il est là<br />
pour rester, le dossier syrien va<br />
commencer à devenir secondaire<br />
dans la bataille électorale<br />
au profit d’un r<strong>et</strong>our à la polémique<br />
sur les armes, doublée<br />
de l’ouverture du procès des<br />
assassins du Premier ministre<br />
Rafic Hariri en mars. Mais le<br />
plus terrible, estime c<strong>et</strong>te personnalité,<br />
est que le dossier des<br />
déplacés syriens au Liban n’est<br />
pas près d’être clos. Au contraire,<br />
il risque de devenir de plus<br />
en plus pesant, que l’instabilité<br />
se prolonge ou non. En eff<strong>et</strong>,<br />
même si un accord est conclu<br />
(qui reposera forcément sur<br />
un compromis politique), cela<br />
ne signifie pas que tous les déplacés<br />
syriens vont rentrer chez<br />
eux. Certes, il devrait y avoir<br />
forcément une sorte d’amnistie<br />
générale, mais ceux qui ont trop<br />
de sang sur les mains <strong>et</strong> leurs<br />
familles ne pourront pas rentrer<br />
en Syrie, tout comme une<br />
partie des Palestiniens du camp<br />
de Yarmouk. La Turquie, l’Irak<br />
<strong>et</strong> la Jordanie n’en voudront<br />
pas non plus <strong>et</strong> ils n’auront<br />
d’autre abri que le Liban, pays<br />
accueillant s’il en est. D’ailleurs,<br />
dès à présent, la Turquie a fixé<br />
un plafond pour le nombre des<br />
déplacés syriens chez elle, l’Irak<br />
refuse de les accueillir <strong>et</strong> la Jordanie<br />
les cantonne dans une<br />
région éloignée à la frontière<br />
avec la Syrie où ils sont soumis<br />
à une surveillance stricte. Seul<br />
le Liban peine, pour différentes<br />
raisons – certaines politiques <strong>et</strong><br />
confessionnelles, d’autres administratives<br />
–, à les contrôler<br />
<strong>et</strong> à m<strong>et</strong>tre des limites à son<br />
hospitalité. Ce qui n’est pas du<br />
meilleur augure pour l’avenir.<br />
Que la crise syrienne se prolonge<br />
ou non, qu’une des deux parties<br />
au conflit gagne ou non, le<br />
Liban aura son lot de déplacés<br />
qu’il devra gérer. L’expérience<br />
palestinienne n’est pourtant<br />
pas encourageante <strong>et</strong> même si,<br />
pour l’instant, la situation interne<br />
reste sous contrôle <strong>et</strong> une<br />
déstabilisation généralisée n’est<br />
pas envisagée, le Liban demeure<br />
sur la sell<strong>et</strong>te...<br />
Réfugiés syriens au Liban :<br />
Joumblatt annonce une aide russe<br />
<strong>Le</strong> chef du Parti socialiste<br />
progressiste (PSP), Walid<br />
Joumblatt, a affirmé hier que<br />
la Russie avait promis son<br />
aide pour résoudre la crise<br />
des réfugiés syriens au Liban.<br />
« Moscou contribuera financièrement<br />
<strong>et</strong> politiquement à<br />
résoudre la crise des réfugiés<br />
syriens au Liban », a déclaré<br />
M. Joumblatt à l’issue d’un<br />
entr<strong>et</strong>ien à Moscou avec le<br />
chef de la diplomatie russe<br />
Sergei Lavrov. « Il n’y a pas<br />
d’alternative au dialogue au<br />
Liban, a-t-il en outre affirmé.<br />
<strong>Le</strong> dialogue national est le seul<br />
moyen de perm<strong>et</strong>tre au pays<br />
de dépasser la crise. Personne<br />
ne peut annuler l’autre au Liban<br />
», a-t-il <strong>encore</strong> dit.<br />
Au même moment, le comité<br />
des déplacés palestiniens<br />
des camps de Syrie s’est réuni<br />
dans les locaux du Front démocratique<br />
de libération de<br />
la Palestine à Beddaoui, en<br />
présence du responsable du<br />
FDLP du camp, Atef Khalil.<br />
La réunion a porté sur la situation<br />
humanitaire des familles<br />
réfugiées au Liban <strong>et</strong> sur « l’assistance<br />
insuffisante » apportée<br />
par l’Unrwa à ces familles,<br />
comme l’a indiqué le communiqué.<br />
<strong>Le</strong> comité a appelé la<br />
communauté internationale à<br />
« réagir rapidement pour lever<br />
le blocus contre les camps de<br />
réfugiés palestiniens en Syrie »<br />
<strong>et</strong> à « préserver les Palestiniens<br />
de Syrie d’un conflit qui pourrait<br />
les entraîner, malgré eux,<br />
dans la bataille ». Ces familles<br />
L’ambassadeur de Russie conférant avec le ministre Mansour.<br />
Photo Dalati <strong>et</strong> Nohra<br />
organisent un sit-in lundi prochain,<br />
à 10 heures, devant le<br />
siège de l’Unrwa au camp de<br />
Beddaoui.<br />
Sur le plan du conflit syrien,<br />
l’ambassadeur de Russie,<br />
Alexander Zassypkine, a indiqué<br />
que « la Russie poursuit<br />
ses efforts dans le sens d’un<br />
compromis politique » en Syrie.<br />
Reçu hier par le ministre<br />
des Affaires étrangères, Adnane<br />
Mansour, l’ambassadeur<br />
a ajouté que son pays œuvre<br />
prioritairement, avec les différentes<br />
parties syriennes,<br />
« à faire cesser la violence ».<br />
« Nous envisageons aussi de<br />
lancer le dialogue entre les<br />
autorités <strong>et</strong> l’opposition au<br />
suj<strong>et</strong> de la mise en place d’un<br />
comité de transition, sur ses<br />
composantes <strong>et</strong> ses pouvoirs »,<br />
a-t-il ajouté.<br />
<strong>Le</strong> ministre Mansour a annoncé<br />
de son côté l’arrivée au<br />
Liban d’une délégation du<br />
secrétariat général de la Ligue<br />
arabe, le samedi 26 janvier,<br />
en provenance de Jordanie.<br />
C<strong>et</strong>te délégation s’informera<br />
de la situation <strong>et</strong> des besoins<br />
des réfugiés syriens au Liban.<br />
À l’issue de sa visite libanaise,<br />
c<strong>et</strong>te délégation présentera un<br />
rapport à la conférence internationale<br />
des pays donateurs,<br />
au Koweït.<br />
Par ailleurs, huit combattants<br />
du camp de réfugiés palestiniens<br />
de Aïn el-Héloué,<br />
au Liban-Sud, ont été tués<br />
en Syrie alors qu’ils combattaient<br />
aux côtés des rebelles<br />
contre l’armée du régime de<br />
Bachar el-Assad, a rapporté<br />
le quotidien al-Akhbar dans<br />
son édition d’hier. Selon le<br />
quotidien libanais, l’annonce<br />
de leur mort a été faite récemment<br />
dans le plus grand camp<br />
du Liban, à Saïda.<br />
Charbel à Paoli : Prêts à protéger<br />
les intérêts français<br />
sur l’ensemble du territoire<br />
libanais. L’entr<strong>et</strong>ien a aussi<br />
porté sur des dossiers de coopération<br />
entre la France <strong>et</strong> le<br />
Liban ainsi que sur les prochaines<br />
élections législatives<br />
<strong>et</strong> leur organisation dans la<br />
plus grande transparence.<br />
La couverture médiatique de la<br />
justice internationale : une arme<br />
à double tranchant<br />
Jeanine JALKH<br />
Des intervenants de calibre,<br />
une tribune conviviale, une<br />
dynamique d’échange atypique<br />
<strong>et</strong> un débat qui, pour<br />
une fois, est sorti des sentiers<br />
battus pour aborder en toute<br />
honnêt<strong>et</strong>é intellectuelle un<br />
suj<strong>et</strong> on ne peut plus tabou,<br />
qui divise <strong>et</strong> suscite des passions<br />
de toutes sortes.<br />
C’est ainsi que l’on peut<br />
résumer le séminaire sur la<br />
couverture médiatique du<br />
Tribunal spécial pour le Liban,<br />
organisé hier par le<br />
centre Skeyes (Samir Kassir<br />
Eyes) pour la presse <strong>et</strong> avec la<br />
presse, dont plusieurs de ses<br />
membres libanais ont toutefois<br />
brillé par leur absence, à<br />
quelques exceptions près.<br />
Il faut dire qu’il y avait matière<br />
à discussion lors de c<strong>et</strong>te<br />
rencontre, dont une grande<br />
partie de débats a été provoquée<br />
par la réaction à la publication<br />
par le quotidien al-<br />
Akhbar d’une liste de témoins<br />
devant comparaître devant le<br />
TSL lors du procès. Un article<br />
qui n’a pas manqué de susciter<br />
un échange houleux au sein de<br />
l’audience ainsi que de la part<br />
de certains experts internationaux<br />
figurant sur le panel.<br />
<strong>Le</strong> mufti du Nord, Malek Chaar, œuvre<br />
pour l’entente <strong>et</strong> l’unité « par la religion »<br />
Interview Menacé dans sa sécurité, le mufti de <strong>Tripoli</strong> est en séjour forcé en France.<br />
PARIS, d’Élie MASBOUNGI<br />
À Paris où il s’est rendu pour<br />
raisons de sécurité, sur les<br />
conseils de plus d’un responsable<br />
libanais, le mufti du Liban-Nord,<br />
cheikh Malek al-<br />
Chaar, profite de son séjour<br />
prolongé en France pour tenir<br />
des réunions <strong>et</strong> entreprendre<br />
des contacts aussi bien en<br />
France que dans des pays voisins.<br />
L’objectif est de développer<br />
ses vues sur la situation au<br />
Liban <strong>et</strong> la manière de contenir<br />
la vague d’extrémisme qui<br />
déferle sur le pays.<br />
« Il s’agit d’agir en ayant<br />
recours à l’islam <strong>et</strong> aux préceptes<br />
du Coran, <strong>et</strong> non pas<br />
de modérer un islamisme mal<br />
pratiqué », explique d’emblée<br />
le mufti Chaar, vers<strong>et</strong>s du<br />
Coran à l’appui.<br />
Deux heures d’entr<strong>et</strong>ien<br />
exclusif avec L’Orient-<strong>Le</strong> <strong>Jour</strong><br />
nous ont permis de découvrir<br />
non seulement un homme<br />
d’une grande sagesse, mais un<br />
dirigeant déterminé à réunir<br />
toutes les communautés libanaises<br />
par leurs religions respectives<br />
qui prônent l’unité,<br />
l’entente, l’intégration au sein<br />
d’une grande famille. Concevoir<br />
l’allégeance à la patrie par<br />
la religion <strong>et</strong> non par des reniements<br />
ou des concessions<br />
mutuelles qui ne sont pas la<br />
Certes, l’idée de départ était<br />
de lancer le débat sur les relations<br />
qu’entr<strong>et</strong>iennent les<br />
organismes juridiques internationaux<br />
avec les médias <strong>et</strong><br />
vice versa, comme le précise<br />
Skeyes, <strong>et</strong> les moyens de les<br />
améliorer dans un objectif<br />
constructif <strong>et</strong> efficace pour les<br />
deux parties. <strong>Le</strong> choix du suj<strong>et</strong><br />
<strong>et</strong> du timing est justifié en<br />
grande partie par l’approche<br />
du début du procès du TSL,<br />
prévu, en principe, au mois de<br />
mars. Il s’impose également<br />
à l’heure où les révolutions<br />
arabes annoncent la chute de<br />
grands dictateurs de la région,<br />
dont plusieurs pourraient être<br />
traduits devant des cours internationales<br />
pour les crimes<br />
dont ils sont accusés, précise<br />
Gisèle Khoury, présidente de<br />
la Fondation Samir Kassir,<br />
qui rappelle à l’occasion la relation<br />
intrinsèque entre justice<br />
<strong>et</strong> liberté d’expression.<br />
C’est toutefois le député<br />
Marwan Hamadé qui engage<br />
le débat, en critiquant violemment<br />
le quotidien al-Akhbar<br />
pour avoir révélé des données<br />
relatives à l’identité de 17 témoins<br />
devant comparaître<br />
devant le TSL. Pointant du<br />
doigt le risque que constituent<br />
de telles informations pour la<br />
meilleure solution dans le cas<br />
de notre pays. Mieux comprendre<br />
sa religion sans porter<br />
atteinte à sa foi <strong>et</strong> trouver<br />
dans chacune d’elles ce qui<br />
unit <strong>et</strong> mène au bonheur de<br />
l’homme. L’islam <strong>et</strong> tous ses<br />
préceptes visent à unir par le<br />
dialogue <strong>et</strong> la connaissance<br />
profonde des principes religieux<br />
<strong>et</strong> non à des divisions <strong>et</strong><br />
querelles absurdes.<br />
« La religion perm<strong>et</strong> à<br />
l’homme de réfléchir <strong>et</strong> d’agir<br />
pour faire le présent <strong>et</strong> l’avenir<br />
», poursuit le chef religieux<br />
sunnite qui affirme que l’antagonisme<br />
actuel entre sunnites<br />
<strong>et</strong> chiites n’est pas le résultat<br />
de contradictions, mais de<br />
courants politiques liant des<br />
Libanais à des puissances régionales<br />
qui les instrumentalisent.<br />
Il pointe du doigt<br />
l’Iran qui a aidé à la création<br />
au Liban de groupes armés à<br />
ses ordres.<br />
Une solution ou des<br />
orientations pour<br />
l’avenir ?<br />
<strong>Le</strong> mufti Chaar plaide pour<br />
« un courant prônant une tolérance<br />
absolue <strong>et</strong> une réelle<br />
acceptation de l’autre, avec la<br />
participation d’hommes sincères<br />
<strong>et</strong> de bonne volonté qui<br />
placent l’allégeance à la patrie<br />
au-dessus de toute autre<br />
vie des personnes citées, le<br />
député a dénoncé à travers ces<br />
« fuites » une tentative ostentatoire<br />
« d’intimidation » du<br />
TSL.<br />
Un avis que partagera le<br />
porte-parole du TSL, Marten<br />
Youssef, qui lance à son tour<br />
un cri du cœur, affirmant que<br />
c<strong>et</strong>te « brèche majeure des<br />
principes éthiques » du métier<br />
du journaliste « l’a exaspéré<br />
sur un plan professionnel mais<br />
aussi personnel ».<br />
« C’est ce que j’appellerai<br />
du journalisme irresponsable<br />
», s’offusque le porte-parole,<br />
rappelant que le sens de<br />
la responsabilité au niveau de<br />
la presse devrait prendre le<br />
dessus sur la liberté d’expression.<br />
« Pourquoi m<strong>et</strong>tre en péril<br />
la vie des gens de c<strong>et</strong>te manière,<br />
pour marquer un simple<br />
point de vue ? La vie humaine<br />
est-elle aussi insignifiante »,<br />
s’écrie <strong>encore</strong> le porte-parole.<br />
Se gardant de se prononcer<br />
sur les mesures que le TSL<br />
entend prendre pour traiter<br />
ce problème, M. Youssef a<br />
rappelé que l’information publiée<br />
pourrait être « vraie ou<br />
fausse », soulignant que toutes<br />
les fuites ne méritent pas<br />
<strong>toujours</strong> ce qualificatif.<br />
considération ». « Une telle<br />
orientation suppose au préalable<br />
une acceptation de la fraternité<br />
humaine, souligne-t-il.<br />
<strong>Le</strong> Coran, notamment, insiste<br />
sur le fait que les hommes ont<br />
été créés par communautés <strong>et</strong><br />
groupes pour vivre ensemble<br />
<strong>et</strong> prospérer. Par conséquent,<br />
Il faut qu’il n’y ait aucun différend<br />
de nature religieuse,<br />
régionale ou politique. »<br />
La méconnaissaance<br />
de l’autre<br />
Comment créer au Liban<br />
un courant rassembleur <strong>et</strong><br />
modéré qui placerait le pays<br />
à l’abri des graves dissensions<br />
actuelles <strong>et</strong> éviterait le pire à<br />
un moment où la région est<br />
en ébullition ?<br />
« Il faudrait des dirigeants<br />
sincères qui placent l’intérêt<br />
supérieur de la nation au-dessus<br />
de leurs intérêts particuliers<br />
<strong>et</strong> des mesquineries, des<br />
hommes capables de mener<br />
leur entourage sur la bonne<br />
voie avec une information<br />
constante <strong>et</strong> réelle sur les<br />
autres groupements <strong>et</strong> composantes<br />
du peuple libanais »,<br />
souligne le mufti de <strong>Tripoli</strong>.<br />
Cheikh Malek Chaar estime<br />
que toutes les barrières<br />
entre les familles spirituelles<br />
libanaises sont causées par une<br />
méconnaissance de l’autre, un<br />
Premier « mariage civil » au Liban,<br />
conformément à la Constitution<br />
« Par notre consentement<br />
<strong>et</strong> sans aucune contrainte,<br />
égaux devant la loi, conformément<br />
au préambule de la<br />
Constitution <strong>et</strong> son attachement<br />
à la Déclaration universelle<br />
des droits de l’homme,<br />
notamment l’article 16,<br />
nous déclarons que l’homme<br />
a accepté la femme comme<br />
épouse <strong>et</strong> que la femme a<br />
accepté l’homme comme<br />
époux... »<br />
C’est par ces termes, figurant<br />
dans leur contrat<br />
de mariage, que Khouloud<br />
Succariyeh <strong>et</strong> Nidal Darwiche<br />
ont scellé leur union<br />
civile. À l’instar de tous les<br />
couples qui optent pour le<br />
mariage civil, Khouloud <strong>et</strong><br />
Nidal auraient dû se rendre<br />
à Chypre. <strong>Le</strong>s circonstances<br />
en ont voulu autrement.<br />
Khouloud Succariyeh a en<br />
fait rencontré une militante<br />
pour les droits de l’homme<br />
qui lui a proposé d’organiser<br />
son mariage civil au Liban<br />
afin que celui-ci soit le coup<br />
d’envoi de telles unions dans<br />
le pays.<br />
« J’assistais à une confé-<br />
rence sur la photographie,<br />
raconte la jeune femme au<br />
site d’information en ligne<br />
Now <strong>Le</strong>banon. En attendant<br />
Nidal, j’ai été attirée<br />
par une affiche qui prône le<br />
mariage civil <strong>et</strong> sur laquelle<br />
on pouvait lire “Familiarisons-nous<br />
avec le mariage<br />
civil <strong>et</strong> la laïcité avant qu’ils<br />
nous entraînent au confessionnalisme”.<br />
»<br />
Khouloud Succariyeh<br />
confie qu’une militante s’est<br />
alors dirigée vers elle, lui expliquant<br />
que « la laïcité n’est<br />
pas contre la religion ». « Je<br />
lui ai répondu que j’étais<br />
consciente de cela <strong>et</strong> le fait<br />
que je sois voilée ne signifie<br />
pas que j’étais opposée<br />
à la laïcité, poursuit Khouloud<br />
Succariyeh. Pour le lui<br />
prouver, je lui ai annoncé<br />
que mon fiancé <strong>et</strong> moi préparions<br />
nos papiers pour<br />
aller à Chypre où nous devrions<br />
avoir un mariage civil.<br />
Elle m’a alors fait part de la<br />
tentative de la société civile<br />
d’organiser le premier “mariage<br />
civil” au Liban. J’en ai<br />
discuté avec Nidal <strong>et</strong> finale-<br />
ment nous avons décidé de<br />
nous marier au Liban. Nous<br />
avons annoncé la nouvelle à<br />
la militante <strong>et</strong> lui avons demandé<br />
de garder ce mariage<br />
confidentiel de peur que nos<br />
parents ne refusent l’idée.<br />
Nous avons alors rencontré<br />
Talal Husseini, qui est à<br />
l’origine du proj<strong>et</strong>. »<br />
Lorsque ce dernier s’est<br />
assuré que le couple était<br />
prêt à franchir le pas, les préparatifs<br />
de la cérémonie ont<br />
commencé. Entre-temps,<br />
Khouloud Succariyeh est<br />
parvenu à un accord avec ses<br />
parents. Elle a ainsi accepté<br />
d’avoir un mariage religieux<br />
de pure forme sans toutefois<br />
l’inscrire au tribunal chérié.<br />
Plusieurs procédures légales<br />
ont été entreprises pour<br />
perm<strong>et</strong>tre l’organisation du<br />
« mariage civil » au Liban,<br />
comme le fait, à titre d’exemple,<br />
de « rayer la mention de<br />
la communauté ».<br />
Ayant franchi tous les<br />
obstacles, Khouloud Succariyeh<br />
<strong>et</strong> Nidal Darwiche ont<br />
finalement scellé leur union<br />
le 10 novembre 2012. Ils<br />
« Mais quel que soit le cas<br />
de figure, le mal envers ces<br />
personnes désormais exposées<br />
est déjà fait », a-t-il dit.<br />
<strong>Le</strong> débat s’est ensuite poursuivi<br />
sur les règles de procédures<br />
en vigueur sanctionnant<br />
« l’outrage au tribunal », qui<br />
a son équivalent en termes<br />
de « menaces contre les témoins<br />
» ( passible de 5 ans de<br />
prison), précise le porte-parole<br />
de la Cour pénale internationale<br />
avant que sa collègue,<br />
Nerma Jelacic, du TPIY,<br />
ne rappelle qu’il y a eu plus d’<br />
« une vingtaine de fuites durant<br />
l’exercice du mandat de<br />
ce tribunal ».<br />
Un long débat s’ensuivra<br />
sur les mesures que compte ou<br />
doit prendre le TSL dans ce<br />
cas précis, afin de prévenir de<br />
futures fuites ou autres abus.<br />
C’est à c<strong>et</strong>te occasion<br />
d’ailleurs que plusieurs participants<br />
– des journalistes<br />
de France-Culture, de la<br />
BBC, d’al-Arabiya, ainsi que<br />
le porte-parole de la Cour<br />
pénale internationale <strong>et</strong> du<br />
TPIY – répéteront à l’envi<br />
que la justice internationale<br />
est « loin d’être parfaite »,<br />
qu’elle a <strong>encore</strong> ses failles <strong>et</strong><br />
faiblesses, mais qu’elle reste<br />
tout de même une percée<br />
manque d’information <strong>et</strong> de<br />
communication. « <strong>Le</strong> Coran,<br />
explique-t-il, montre la voie<br />
de l’unité par la connaissance<br />
des enseignements des religions<br />
<strong>et</strong> en particulier ceux de<br />
l’islam. Ce sont les préceptes<br />
de l’islam qui me poussent<br />
à surmonter les obstacles <strong>et</strong><br />
divergences entre les hommes<br />
», a <strong>encore</strong> dit le mufti<br />
qui estime que la régression<br />
des valeurs de tolérance dans<br />
le pays est causée par ceux<br />
qui sont aux commandes <strong>et</strong><br />
qui accordent la priorité à la<br />
sauvegarde de leurs intérêts au<br />
lieu de chercher <strong>et</strong> de trouver<br />
dans les préceptes religieux ce<br />
qui unit.<br />
<strong>Le</strong> r<strong>et</strong>our au Liban ?<br />
Interrogé sur son r<strong>et</strong>our au<br />
Liban, le mufti Chaar reste<br />
évasif <strong>et</strong> revient sur les conditions<br />
de son départ précipité,<br />
alors qu’il assistait au mariage<br />
de sa fille. Il exprime sa hâte<br />
de rentrer dès que les services<br />
de sécurité le lui conseilleront.<br />
Il souligne dans ce cadre que<br />
les présidents Nabih Berry <strong>et</strong><br />
Nagib Mikati lui ont proposé,<br />
le premier de résider à Aïn el-<br />
Tiné <strong>et</strong> le second de r<strong>et</strong>ourner<br />
chez lui à <strong>Tripoli</strong> avec des<br />
postes de contrôle autour de<br />
son domicile où il devrait rester<br />
en permanence.<br />
forment le premier couple<br />
à avoir eu un « mariage civil<br />
» au Liban. <strong>Le</strong> contrat de<br />
mariage est aujourd’hui aux<br />
mains de l’autorité consultative<br />
au ministère de l’Intérieur<br />
dans l’attente de le<br />
proclamer officiellement.<br />
majeure en matière de justice<br />
<strong>et</strong> un antidote certain contre<br />
l’impunité dans le monde.<br />
<strong>Le</strong>s participants le diront<br />
différemment, <strong>et</strong> à tour de<br />
rôle : le champ de la justice<br />
internationale reste, à ce<br />
stade, embryonnaire <strong>et</strong> est<br />
appelé à se développer pour<br />
mieux s’affirmer. Il n’en reste<br />
pas moins que les résultats<br />
recueillis à ce jour auprès des<br />
cours pénales internationales,<br />
qu’elles soient mixtes,<br />
ad hoc ou hybrides, sont<br />
historiques à plus d’un point<br />
de vue, <strong>et</strong> ce, en dépit des<br />
failles rencontrées en cours<br />
de route.<br />
Partageant leurs expériences<br />
respectives en matière de<br />
couverture des procès internationaux,<br />
les journalistes<br />
présents ont évoqué à tour<br />
de rôle les obstacles rencontrés<br />
en cours de route,<br />
notamment, celui de faire<br />
véhiculer le message à une<br />
audience profondément divisée<br />
sur la question de la<br />
justice internationale (le<br />
Liban <strong>et</strong> l’ex-Yougoslavie<br />
sont des cas d’école) ou la<br />
difficulté de traiter <strong>et</strong> de<br />
simplifier une matière qui<br />
peut être parfois complexe <strong>et</strong><br />
hautement technique.<br />
Sur les rives de la Seine, il<br />
reçoit toute la journée des appels<br />
téléphoniques des membres<br />
de sa famille <strong>et</strong> de ses<br />
amis. Des Libanais de France<br />
de toutes les confessions veulent<br />
mieux le connaître <strong>et</strong> le<br />
considèrent comme l’homme<br />
du dialogue <strong>et</strong> de la paix, un<br />
rempart contre les intégrismes<br />
<strong>et</strong> les extrémismes.<br />
À partir de Paris, il rayonne<br />
dans les régions <strong>et</strong> les pays<br />
voisins pour expliquer l’islam<br />
réel, inviter les responsables<br />
civils <strong>et</strong> religieux à approfondir<br />
leurs connaissances<br />
de c<strong>et</strong>te religion <strong>et</strong> aider les<br />
étrangers à connaître l’islam<br />
ouvert, tolérant <strong>et</strong> pacifique.<br />
Dissipant ainsi les idées reçues<br />
qui montrent un islam<br />
agressif <strong>et</strong> perturbateur.<br />
Khouloud Succariyeh <strong>et</strong> Nidal Darwiche signant leur contrat de<br />
« mariage civil » au Liban, le 10 novembre 2012.<br />
Photo tirée du site Now <strong>Le</strong>banon<br />
Talal Husseini a expliqué<br />
que ce « mariage » a été scellé<br />
conformément à la décision<br />
60 L.R. de 1936. C<strong>et</strong>te<br />
décision qui remonte au<br />
mandat français organise les<br />
communautés, les reconnaît<br />
<strong>et</strong> leur accorde des droits.