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"..;.<br />
PREMIERE PARTIE<br />
EL HADJ OMAR ET L'EPOPEE PEULE
INTRODUCTION<br />
L'epopee d'E! Hadj Omar, malgre son ampleur et sa vitalite, a tres peu attire les<br />
efforts des chercheurs qui, depuis I'epoque coloniale, ont neglige l'expression litteraire du jihiid<br />
au profit de sa realite historique 1 Henri Gaden constitue cependant la seule exception 2 Cet<br />
officier colonial, promu par la suite gouverneur et dont I'un des titres de gloire fut d'avoir<br />
assiste ilIa capture de Samory3, publia une version de l'epopee d'EI Hadj Omar, celle de la cour<br />
de Segou sous le regne d'Ahmadou. 11 s'agit de la transcription et de la traduction annotees d'un<br />
manuscrit omarien OU un disciple de la premiere heure, Mohammadou Aliou Tyam, chante le<br />
jihiid de son Cheikh, il travers la biographie poetique de celui-ci. Par la suite, d'autres<br />
recreations sont venues s'ajouter aLa Qacida en pOll/ar. Cependant, I'epopee d'EI Hadj Omar<br />
reste, apres tout, dans un isolement relatif qui la maintient dans la routine des griots et dans la<br />
tradition manuscrite des lettres.<br />
Or, ]'action d'EI Hadj Omar, pour avoir entre autre chose, profondement modific<br />
I'aire du jihiid et dctourne le cours de son histoire jusqu'illa conquete coloniale, lui valut d'etre<br />
au centre d'une vaste litterature, et en paniculier d'une epopee vivante, aux multiples versions,<br />
ou l'oralite interfere sans cesse avec I'ecriture. Impressionne par une oeuvre aussi riche, nous<br />
avons compris tres tot tout l'interet que revetait son etude. L'interet se transfonna, du reste,<br />
rapidement en vocation. lssu d'un milieu toucouleur profondement omarien, ayant acquis sous<br />
la ferule d'un pere marabout l'essentiel de la formation cOl'anique, la tiiche nous apparut<br />
progressivement sous le visage d'une necessite.<br />
Aussi, pour etudier l'epopee d'EI Hadj Omar, avons-nous tout d'abord fait une<br />
collecte systematique des principales versions orales et manuscrites conservees dans Les<br />
2<br />
3<br />
Deux etudes recentes meritcnt d'etre signalecs a ce suje!<br />
Robinson (D.), La guerre sainte d'AI-Hajj Umar. Le Soudan accidental au<br />
milieu du XIXe siec/e, Paris, 1988.<br />
Ly Tall (M.), Le mouvement 'omarien et ses relations avec la colonie du<br />
Senegal (1796-1862), These dc DoetS'rat d'Era!, Universite C.A.D, Dabr, 1988.<br />
Gaden (H.), La vie d'EI Hadj Om7lT, Qacida en poular de Mohammadou Aliou<br />
Tya m, in "Travaux et Mcmoires de l'lnstitut d'Ethnologie" (X XI).<br />
Transcription,Traduction, nOLes eL glossaire, Paris, 1935.<br />
Person (Y.), Samory. Urie Revolution Dyula, Memoire de l'lFAN, nO 80,1968, 3<br />
tomes.<br />
2
Professeur Claude BLUM, notre Directeur de These. It fait partie des maitres dont on n'oublie<br />
pas la le'ton.<br />
epopees de notre culture.<br />
Tous ont contribue it la sauvegarde et it la restitution d'une des plus belles
CHAPITRE I<br />
INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
/
./<br />
CHAPITRE 1- INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 7<br />
Genre le plus noble de la litterature des Peuls ou Fulbe, l'epopee ou "daarol"<br />
y apparalt comme une longue narration des hauts faits d'un heros, propose et reconnu par le<br />
groupe comme modeJe pour avoir veclI de fayon paroxystique le "pulaagu" ou l'ideal peu!. A<br />
ce titre, elle dramatise la somme de valeurs attendues de chacun et de tous, ici fondees sur le<br />
sens de l'honneur, de la dignite et sunout de la fiene. c'est pourquoi la geste occupe une<br />
place de choix au sein des productions litteraires peules.<br />
A - INVENTAIRE ENUMERATIF DES EPOPEES PEULES<br />
L'examen de la litterature pulaar en general, des epopees en paniculier, permet<br />
de distinguer I'existence d'un certain nombre de formes qui peuvent se classer en deux<br />
grandes categories: les formes traditionnelles et les formes islamiques. En effet, au<br />
lendemain de son adhesion al'lslam, la societe peule fut veritablement envahie par la culture<br />
du livre. 11 se crea de la sone une ligne de dernarcation claire entre le religieux et le profane.<br />
fayon eloquente et originale.<br />
L'epopee peule n'echappa point it la regIe et, mieux, elle l'illusrra meme de<br />
1- LES EPOPEES PEULES TRADITIONNELLES<br />
A l'instar des epopees classiques, les gestes peules se definissent d'abord<br />
comme des genres essentiellement oraux. Elles illusrrent ainsi point par point le constat de<br />
Daniel Madelenat : "Voix vive, parole efficace, liee i1l'action - mythos designant le verbe<br />
sacre, et logos le discours logique - d'ascendance divine, l'epos, absolu, soustrait iI la<br />
contingence evanescente de la communication quotidienne, nomme les choses et fonde l'etre<br />
par le langage"l. L'epopee se structure ainsi autour d'une trilogie organique que constituent<br />
l'artisan du verbe, le recit et le public. Ces trois instances, loin de se superposer,<br />
entretiennent des relations dynamiques. Elles delimitent aussi les parties de cette etude, qui se<br />
propose d'explorer le vaste champ des epopees peules.<br />
JO) LES ARTISANS DU VERIlE<br />
En milieu peul traditionnel, I'epopee est l'apanage des gens de caste, que<br />
l'ethnologie designait sous le vocable trop generdl de gIiOI. Le maltre de l'epopee renvoie en<br />
Madclenat (D.), L'epopee,'Paris, 1986, p. 19.
CHAPITRE 1- INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION I I<br />
L'ensemble ocneftcie de la double connivence du temps et de l'espace ;<br />
l'epopee se declame en general la nuit et sur invitation d'un mece:ne, ou al'occasion des fetes<br />
familiales ou religieuses. Le public contribue alors, par ses dons, ses acclamations, ou<br />
diverses fonnes de participation, al'elaboration de l'oeuvre. Ce phenomene est logique dans<br />
une societe qui se cteftnit, avant tout, par son caractere profonctement communautaire. 11 est<br />
naturel, par consequent, que l'epopee, genre majeur de lalitterature orale peu!e, soit creee<br />
collectivement et savouree collectivement.<br />
Cet aperyu du statut social, de la fonnation et de l'an des artisans du verbe en<br />
milieu peul, designe les "maabuve" et "wammbaave" comme de veritables professionnels de<br />
la parole, du chant et de la musique. nse cree ainsi des liens indefectibles entre le griot et son<br />
oeuvre, au point que l'un finit par s'idemifier aI'autre et reciproquement.<br />
2°) LE RECIT<br />
La narration epique integre en elle trois instances liees; l'intertexte des cycles<br />
epiques, le triptyque heroique et la devise. Ces trois composantes, qui evoluent adivers<br />
niveaux du texte, font de la geste une sorte de recit eclate, i\ la fois un et multiple. Une<br />
analyse de ces instances donnera une vue precise de leurs imbrications reciproques.<br />
a) Les cycles epiques peuls<br />
Les epopees peules traditionnelles s'ordonnent autour de trois cycles tres<br />
solidaires ; le cycle de la lance, celui de la vache et celui de la fenm1e. La narration epique se<br />
plait a !es superposer ou meme i\ les confondre, surtout lorsqu'elle peint des scenes<br />
heroi:ques et emouvantes. Ces cycles se structurent autour des venus qui donnent un sens i\<br />
la vie du Peul, dont ils constituent un abrege ethique.<br />
aJ) Le cycle de la lance<br />
11 regroupe un ensemble d'epopees qui chantent le courage, les vertus<br />
guerrieres, le sens de l'hcJnneur. Ces gestes destinees i\ former moralement le Peul<br />
dHinissent I'ideal de vie qui doit etre le sien. A cet egard, l'epopee de Samba Gueladio<br />
Diegui1 illustre parfaitement notre propos. Samba, heros de la geste de meme nom, prince<br />
peul du Fouta-Toroau XVilleme siecle, brava, des sa plus tendre jeunesse, le sort, la societe /<br />
des hommes et I'univers des genies. 11 incarna I'esprit du "pulaagu" (ideal peulj et i'ethique<br />
Equilbcc (F.V.), La tegende de Samba Guelddio Diegui, prince du Fouta,<br />
Dakar, 1975.
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 1 5<br />
Les versions bambaras donnent une autre vision des rapports ayant existe<br />
entre Ham-Bodedio et Da Monzon. Elle mettent en relief l'insolence de Ham, et situent le<br />
conflit au moment Oll le royaume bambara de Segou traversait une crise grave. Da Monzon,<br />
excede par la popularite grandissante d'un de ses generaux, finit par l'exiler. Son depart<br />
priva Segou d'une force capitale. C'est alors que survint un different entre Segou et le<br />
Kounm.<br />
Ham-Bodedio, conscient de la faiblesse potentielle de Segou, razzia les<br />
troupeaux de Da Monzon et les dirigea vers le Kouniiri. Tene supplia son pere de se<br />
reconcilier avec Bakari Dian, le heros segovien exile par Da, pour chiirier les Peuls. Bakari,<br />
touche par Da Monzon, accepta l'offre de paix, puis defia les Peuls, conduits par Ham<br />
Bodedio, et ramena les troupeaux voles.<br />
Un autre aspect du regne de Ham-Bodedio passionne les griots : celui qui<br />
concerne l'origine du "Salgalare", sa devise musicale. Une nuit, Hama-Le-Rouge entend<br />
jouer mysterieusement, dans le vestibule de sa demeure, une musique. Il convoque tous les<br />
musiciens de son royaume et leur demande, sous peine de mort, de retrouver la melodie qu'il<br />
a entendue. Quatre vingt-dix neuf musiciens ecllouerent dans leur quete ; seul Ko Birai"ma<br />
Ko, aide d'un genie, trouva l'instrument, le "hoddu" (luth) et l'air (Sai"galare) 1 Le roi<br />
combla le gIiot de cadeaux et en fit son chantre.<br />
Les versions toueouleurs retiennent aussi de Ham-Bodedio et de son fils<br />
Gueliidio, des figures de redresseurs de ton. Dans la version de Gilbert Vieillard 2 ,<br />
Fatoumata demande aHam-Bodedio de venger l'honneur de sa mere bafoue par Sii, le roi<br />
bambara. Elle stimu!e la fiene de son interlocuteur en ces termes :<br />
"Celui qui m'a outragee a dit qu'il n'y avait pas dans le pays de Peul capable<br />
de me venger. Moi, done, je suis venue vers toi ; si tu peux, venge-moi ! Si tu<br />
ne peux pas, j'irai trouver Siliimaka Yero-Hero - Dande: Celui-lil ne boit que<br />
du lait ; ee n'est pas comme toi un buveur de biere de mil et je sais bien que<br />
les ivrognes aehetent !eur eourage,,3<br />
Touche au plus profond de son amour propre, Ham-BCldedio obeissant au·<br />
sens se l'honneur, alia combattre Sii et le vainquit.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
Scydou (C.), op. eil., pp. 69-81.<br />
Vieillard (G.), op. cil.. pp. 143 et 59.<br />
Id., p. 143.<br />
/
CI-IAPITRE I - INYENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 16<br />
Dans la version recllcillie par le Pere Gerard Meyer 1 , la mere de Falimel Sire<br />
Riidaanc, malgre la desapprobation de sa fille, alia vendre du lait au marche de la ville de<br />
Saa. Le chien dll roi vint Ix>ire le lait de la fenlIm, peule. Celle-ei le frappa de son bracelet all<br />
11Iiliell du
Cl IAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSJFI<strong>CA</strong>TION 1 8<br />
Apres une rude journee de gardiennage de boeufs, Gueladyo revil1t chez lui et<br />
fut surpris de lrouver sa dellleure vide, I1 se lan
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
marabout ;<br />
" Le prince I-Iammadi dil: "un IcI ! " II dit " : oui ! "<br />
II dit : "donne un gris-gris it mon fils et ason captif,<br />
le le donnerai loutes les richesses que Dieu le fera desirer."<br />
L'autre dit : " le connais bien un gris-gris.<br />
le ne I'ai jamais donne aquclqu'un car il n'est pas facile it obtenir.<br />
II dit ; " it quoi ressemble -t-il ?<br />
L'autre lui dil : il se fabrique avcc un python.<br />
le ne sais pas s'ils peuvenl allraper un python" I.<br />
Apres avoir deploye un courage inoui", les enfants capturerent le serpent.<br />
Nantis dc I'argent de leur quete, Siliimaka et Poulloru se rendirent aupres du<br />
"Silaamaka tenait la tete,<br />
Poulloru tcnaitla queue.<br />
Le marabout tailla la tige;<br />
on approcha I'encrier,<br />
Le marabout ecrivil tOll!,<br />
IIleur dit ; ce gris-gris est telllline.<br />
II dit : prince I-Iammadi ! Lc princc I-Iammadi lui dit : oui !<br />
II dit : voici tout cc que tu voulais<br />
La tete a ete couverte de versets pour Silaamaka, il s'en est ceilll;<br />
La queue a ete couverte de versets pour Poulloru, il s'en est ceint ;<br />
Lorsqu'ils seront au cocur de la bataille, tu cntendras le python siffler sur le<br />
dos de Silaamaka ; quand le serpelll aura siffle, Oll que soit Poulloorou, la<br />
quem, se tordra sur son dos"2<br />
C'est ceue initiation aux scienccs eSOleriques qui assoit Ics bases de I'autorile<br />
dcs deux heros. Dc la sone, le mervcilleux se pare un peu des alours du vraisemblable, en<br />
mCllant a cote du heros principal Siliimaka, un double epiquc ; Poulloru qui, malgre ses<br />
ljuaJites rcste un captif. C'est pourquoi la tete du python revient de droit it Siliimaka, qui I'a<br />
capture rlu reste, alms que Poullori se contenle de la queue.<br />
Le demier point dc la structure du mythe heroi'que demcure l'apotheose du<br />
herus: I'epopee transfonne le personnage principal en dieu pour I'installer dans I'etemite.<br />
2<br />
Mcycr (G.), 01'. cil., pp. 11-12, vv. 189 -197.<br />
Id, p. 18 vv. 320 -333.<br />
22
CHAPITRE I-INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
1J3) L 'arme till !zeros<br />
Apres le dcstrier, I'arme constitue le compagnon priviIegie du heras de<br />
I'cpopee peule Lraditionnelle. A I'instar du heros et du cheval, die pone un nom symbolique :<br />
I'anne de Siliimaka s'appdail "Grande Plaie", celle de Samba GueIadiegui "Buse Larway".<br />
Alars que cdle de Silamaka recucillie par G. Meyer etair: "katabaw qui ne laisse pas intact un<br />
vivanl"("kawbaw lunndaa guroowoo"). Ainsi I'epieu ou la lance resLenl-ils les annes<br />
miraculeuses du heros, meme si cenaines versions, comme celle de Samba Guelfidiegui,<br />
donnenl aJeur heros des fusils. 11 eSl aremarquer que "Buse Larway", le fusil de Samba, eSl<br />
d'origine magique; ace litre, iI n'a pas besoin d'elre recharge.<br />
D'une maniere gellerale, le tripLyquc heroi"que, en liant le heros, I'arme el le<br />
cheva!, cree un tableau lreS expressif cle l'aClion heroi"que cl, clu coup, il se prcsenLe comme<br />
un fragment tres vivall!. Une logomachie opposant Silamaka Ardo du Macina a un mabo<br />
clan ne une idee cle la profonde unite qui lie Ies clemcllls dutriptyque heroi"que. Se presenranl<br />
ason nouveau maltre, I'anisan clu verbe declara :<br />
2<br />
" J'ai elllenclu dire<br />
qu'une conlroverse iI oppose les gens duranttrois ans :<br />
on pretendait qu'il y avait cinq cavaliers I<br />
capables de vaincre cinq cents cavaliers.<br />
Qui sonl-ils clone, Silamaka?" 2<br />
Son amour-proprc pique au plus haUl point, le Pcul sursaula :<br />
"Celui qui fa dit qu'ils etaienl cinq chevaliers,<br />
Celui-liJ t'a menti :<br />
11 n'y a que trois personnes."<br />
11 dit : " Oui clonc,<br />
Souleymana 'I"<br />
il oil:" Moi,<br />
el Pepite - d'or, man cheval,<br />
el Malefique, ma lance.<br />
M.S. parlc de quatre cavaliers : " Siliimaka Ardo rils de Hammadi Dikko,<br />
Hambodedio lIammadi fils de Yelle Dikko, Djenne Yerc de Djellllc et Hamma<br />
Alaseyni Giikoy". Qualld aux rcnseignements rccueillis par Gilbert<br />
Vieillard, ils dcsignelll : " Duroowel Baall Guuje c Silaamaka ILcro-Daande<br />
kanyum e Ham-Bodcejo Paate kanyum e lIamma Alscyni GaakIlY."<br />
Qui est le cinquicme ici CVO'lUC 'I Est-cc Boubou Ardo, le frere de Ardo<br />
Ngourori 'I Note 2 de I'auteur, p. 117.<br />
Seydou (C.), al'. cil.<br />
24
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>nON<br />
Si je vois cinq cents cavaliers,<br />
11 eux tous, ils sont, pour moi, aussi faciles que le sommeil d'un borgne l !<br />
Il oubliait ses compagnons !<br />
MemePou1l6ri, ill'oubliait !,,2<br />
Plus loin, la narration se souvient de Pou1l6ri :<br />
" Pu1l6ri no jogii labbo no wi'ee yaaja-wudde'al<br />
Silaamaka no jogii labbo no wi'ee Bona Golle'al<br />
00 no jogii puccu no wiee obbere-kaQ Qe<br />
00 no jogii puccu no wi'ee Bona yuooaade."<br />
"Pou1l6ri avait une lance denommee "Plaie-Beante",<br />
Siliimaka avait une lance denommee "Malefique".<br />
L'autre avail un cheval denomme " Grelot d'or".<br />
L'autre avait un cheval denomme "Piaffement nefaste"3<br />
Cependant, aussi interessant qu'il soit en lui-meme, le triptyque, hero'ique,<br />
pour s'epanouir, necessite le concours d'un certain souffle epique. Le griot a reussi 11<br />
l'enfemler dans une formule symbolique.<br />
c) La devise<br />
Le heros peut se definit par sa devise ou "noddol", 11 la fois lTIusicale ou<br />
parlee. Le "bammbaaqo" et le "maabo suudu Pmtte" qui le suit sont charges de la lui reciter<br />
ou de la jouer 11 tout moment. Ces deux artisans du verbe, quoique voisins, accusent<br />
cependant de legeres differences. Rapportant les propos de son informateur, Christiane<br />
Seydou ecrit:<br />
2<br />
3<br />
" La difference fondamentale existant enrre le maabo et le gawlo semble done,<br />
d'apres Tinguidji, se situer surtout au niveau du destinataire : le maabo<br />
"Un borgne n'ayanl qu'un oeil, son sommeil doil "tre deux fois plus facile<br />
que Sclui d'un homme qui a deux yeux" (note I de I'a\:,-Icur), p 119.<br />
Seydou (C.), op. cit , p. I] 7.<br />
Id., 207.<br />
Bona-Yllbbaade : "Piaffement nCfaSle", moL a mol<br />
mechammenl". Ailleurs, cc eheval est appelc Bone-Yllbbaade<br />
(note de I'aulcur, page 207, note 3).<br />
25<br />
qUI pleune<br />
:"Crin-Fou" ,
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 27<br />
signe lotal directement saisi par l'intelligence el le coeur et, la suite des notes,<br />
une sone de definition essentielle de la personne qu'elle represenle dans sa<br />
realite ideale et sublimee en un concemre de ses venus essentielles" I.<br />
Les multiples rappons que l'epopee entretient avec le heros et avec la societe,<br />
les liens existant entre la musique et la parole epique 2 sont mis en lumiere par la devise, qui<br />
du reste cultive l'art de la concision et de la sobriete. Les artisans du verbe ont fini ainsi par<br />
faire cOlncider le heros avec sa devise; mieux, ils ont reussi aenfermer parole et musiqlie<br />
dans une unite signifiante que la devise de Poullori illustre parfaitement:<br />
" Kodda oolel Busee<br />
10 Iloaeeje koyd'e ekebbeeje,<br />
Pullo 00 koy laawina hannde."<br />
" Benjamin de oolel Buse<br />
Epineux el epines sous les pieds !<br />
Le Peul s'esl mis en colere aujourd'hui !,,3<br />
Cet appet (noddol) a pour finalite d'irriter le heros, puisque I'image de<br />
l'epineux et des epines veutle forcer as'emporter. On note, au passage, une similitude avec<br />
b devise de Guelfidio, commen
CHAPITRE I - INVENTAlRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 29<br />
Cette longue devise mobilise ici toutes les constantes du genre qu'il convient<br />
de caracteriser iI partir de cet exemple precis. Le narrateur recite d'abord la genealogie de<br />
Gueladio pour lui rappeler ses illustres devanciers, le rattachant de la sorte iI une tradition<br />
chevaleresque. C'est une maniere d'evocation et d'invocation I, qui embrasse la dimension<br />
physique de l'homme, puis la transcende au profit de son moi profond.<br />
Mais, malgre cene continuire historique que represente la genealogie, Gueliidio<br />
opere une rupture en se singularisant : contrairement al'usage commun "il se tresse avec<br />
trois tresses de chaque cote". Ceia s'explique par la suite. "Il a les dents ecartees, il a Ies<br />
doigts ecartes". Ainsi, aanatomie originale, comportements extraordinaires. C'est pourquoi<br />
il est compare aun redoutable rapace "Kiikiiriwol kaakariiwol kaakowal", animal choisi a<br />
cause de la valeur expressive des mots qui forment son nom. Les all iterations creent une<br />
sorte d'hamlonie imitative qui met en relief la peur que le nom du heros a lui seul inspire il<br />
son entourage. Cet homme n'a pas son pareil, et des lors il attrape les affaires des hommes,<br />
designation euphemistique des parties sexuelles masculines " kaake worve", alors qu'il est<br />
interdit de regarder Ies siennes. L'opposition entre "artrape" et "regarde" suggere assez la<br />
force et le courage de Gueliiclio.<br />
Le griot, apres avoir defini le heros par rapport it la societe, passe par la suire it<br />
sa definition propre. Il note qu'il incarne un personnage tres offensif "Il s'appelle grande<br />
daba, grande houe porte il l'epaule, elle brisc I'epaule. Trainee, elle tranche les tendons<br />
d'Achille." Ce preux hors pair se revele ainsi une sorte d'etre fatal, car il repand le mal a<br />
profusion et dans tOlaes Ies directions.<br />
Une autre metaphore vient renforcer la precedente: celle de I'elephant. Puisee<br />
dans le stock des cliches et formules qui peuplent la tradition litteraire negro-africaine en<br />
general, oil l'homme de qualite se voit compare aux animaux virils : belier, taureau, lion,<br />
elephant, ceae metaphore insiste sur la force, la bravoure et le caractere indomptable du<br />
heros. Il est surhumain, puisque "l'elephant" qui le symbolise a un mors qui echappe meme<br />
au forgeron, pourtant tres verse dans la magie, en meme temps que mairre du fer:<br />
"C'est un mors d'elephant,<br />
Un forgeron ne peut pas le fabriquer,<br />
Des pinces ne peuvent pas le tenir,<br />
Une encIume ne peut pas le porter."<br />
Aussi Gue[ildio reduit"ll it I'impuissance toute personne qui tente de se j/<br />
- ..<br />
mesurer a lui, d'otl l'emploi anaphorique du verbe "pouvoir". Notons, par aiIleurs, que la<br />
Oriaulc (O.C.) et Seydou (C.), La devise evocation el invocation _de la<br />
personne. Langage et cultures ajricaincs, Paris,1978.
CHAPITRE 1- INVENTAlRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 3 1<br />
la partie, le public fonne generalement un cercle it l'interieur duquel, ou it un point particulier<br />
duquel, l'artiste evolue. En fin psychologue, celui-ci va utiliser judicieusement le temps et<br />
l'espace. Se produisant generalement le soir, il ecourtera la seance des qu'il sentira I'effet de<br />
la fatigue ou du sommeil sur les spectateurs. De meme, s'il se produit dans la maison d'un<br />
riche personnage, il ne manquera pas de comparer l'aisance des heros de jadis i\ la sienne, ou<br />
de le comparer i\ Siliimaka, Samba Gueliidieguiou Gueliidio.<br />
Le griot va aussi tenir compte du gout du public et des susceptibilites<br />
potentielles. Ainsi, pour les epopees opposant Peuls et Bambaras, l'artiste fera-t-il attention<br />
aux recits de bataille afin de montrer que seule la chance ou Dieu d6cident de la victoire, etant<br />
entendu que les heros se valent. De la sone, la victoire peule n'affectera en rien les<br />
Bambaras. Par exemple, Siliimaka triomphe de Sii, mais reste sa victime.. La performance<br />
epouse, par ce biais, le gout du jour et evite de perturber l'ordre social: point essentiel de la<br />
morale griotique.<br />
En exaltant les vainqueurs et en menageant les vaincus, le griot obtient des<br />
dons des deux camps. Faut-ille rappeler aussi, ces dons constituent des sortes de moteur de<br />
la narration, dont ils accelerent ou ralentissent le cours. En effet, l'indifference du public<br />
pousse generalement le narrateur it brosser certains passages ou it les resumer; par exemple,<br />
au lieu de citer les variantes de certains fragments de Siliill1aka, il mentionne la plus connue<br />
seulement.<br />
La reception de l'epopee implique un certain dynamisme, d'ol' les differentes<br />
reactions du public: applaudissements, apostrophes, questions, dons. En declamant<br />
Gueladyo et Gorossigui, les auditeurs fremissent ii l'idee d'une bataille entre le jcune peul et<br />
le mari de la belle femme, mais surtout la ceremonie de l'autel provoque joie chez les<br />
temeraires et indignation chez les vertueux. Cette serie de relations cree une certaine<br />
connivence entre le griot et son public au point que ce dernier fonctionne comme un co<br />
au teuT.<br />
Ces quelques considerations mettent en evidence le role du public dans la<br />
perfonnance epique, puisqu'il en fournit les conditions de realisations, en accordant une<br />
attention soutenue au narrateur, puis en participant diversement ii la realisation de l'oeuvre.<br />
C'est ainsi que les "Seooe" ou guerriers toucouleurs, it la declamation de la geste de Samba<br />
Guetiidiegui,se ctepartissent de tout ce qu'ils portent et poussent souvent des cris<br />
extraordinaires. Le "Lagya" ou I'air de Samba transfonne la seance en arene de lutte entre<br />
"Seooe" !<br />
D'une manihe gel1erale, le public apparait comme un temle extreme de la<br />
trilogie qui le lie it l'artiste. l'oeuvre resulte alors du concours du public et du griat, car sans<br />
public, il ne saurait y avoir de performance. L'analyse des epopees et fragments doit tenir<br />
compte de cette realite : le public poularophone se sentant l'heritier. de Siliimaka Ardo,
CHAPITRE I - INVENTA1RE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
IQ) PERMANENCE DU MODELE EPIQUE TRADITIONNEL<br />
Nous avons montre plus haut que les epopees peules traditionneIles se<br />
caracterisent par trois instances: les artisans du verbe, le recit et le public. L'epopee d'EI<br />
Hadj Omar ne fait pas exception, elIe reserve meme aux dites instances une place de choix.<br />
a) Les artisans du verbe<br />
La geste d'Omar, al'instar des epopees peules, constitue le regal et le gagne<br />
pain des artisans du verbe : "maabuoe", "awluoe", "wammbaaoe" . Aussi j'EI Hadj Omar<br />
compte-t-il ses specialistes dans les grandes familIes griotiques vivant sur les rives du<br />
Senegal et du Niger. On peut citer parmi les plus connues la famille Ndiaye de Weenodi<br />
(Depanement de Matam), Abdoul Ata Seck (Departemenr de Podor), Sidi Mbothiel de Pete<br />
Bowe (Ferlo), Thithie Drame (Nioro du Sahel), Djeli Ahmed Sakho (Diomboukhou).<br />
b) Le recit<br />
L'examen de la trame narrative de I'epopee peule classique met en avant trois<br />
trilogies organiques remarquables : les cycles epiques, le triptyque herOlque et la devise, qui<br />
se retrouvent aussi dans la geste d'Omar.<br />
bl) Les cycles ep/ques<br />
lis comprennent generalement les cycles de la lance, de la vache et de la<br />
femme. La geste d'Omar ne les ignore pas, meme si elle leur confere une autre signification.<br />
a) La lance - Le cycle de la lance figure en bonne place dans la poetisation du jihiid de<br />
Cheikh Omar. De la sone, la lance fut illustree par des preux qui la manierent a bon escient :<br />
le courage de Ardo Aliou Ndiereby devant Karounka, selon la version de Thithie Drame1<br />
rappelle celui de Siliimaka devant Sii 2 , le roi Bambara. Le statut social d'Alpha Oumar<br />
Thierno Bayla Wane rappelle Ham-Bodedio 3 Peul a Segou et l3ambara au Kouniiri 4 De<br />
I<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Consulter le corpus de nOlre these de Doctoral de 1l1cme cycle, op. cit.<br />
J J'<br />
Meyer (G.), op. cit.<br />
Ham-BodCdio, prince peul du Koullary, parlait le bambara chez lui et le peul<br />
a Scgou, capitale du royallme bambara. Ce polyglotte fait penscr a la vaslc<br />
science doublce de courage d' Alpha Ollmar.<br />
Seydou (C.), op. cit.<br />
33
cHApITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
172) Le triptyque heroi"que ; le heros, le cheval, l'arme<br />
Un triplyquc thematiquc scclle de maniere organique le destin du heros, de<br />
son cheval el de son amle dans Ics epopees peulcs tradilionnclles, Le phenomenc prclld<br />
d'autres proportions clans I'epopee omaricnne Oll merveilleux hlllnaill et merveilleux clivill<br />
s'cntfemelent a tout instant.<br />
a) Le hems. - L' hero'isme, clans ses manifeslations diverses, suscite des chants a. sa<br />
dimension. Tout d'abord El Hadj Omar, le heros principal, est peint sous les traits d'un elrc<br />
extraordinaire superieur aux hommes, tres proche des dieux pa'iens. Capable de sc<br />
metamorphoseI', il envoie la mort a distance. C'est egalement un faiseur cle miracles, grkc<br />
auxquels il sauve d'une situation critique ou plonge son cnncmi dans une situation<br />
desesperee.<br />
A cel Omar unique en son genre, I'cpopee ajoute deux lllllres Oumar : Alpha<br />
Oumar Thierno Bayla et Alpha Oumar lllierno Molle, generaux dc l'armee du jihfld. La<br />
tradition rapporte qu'apres la dcraite de Mani-Mani, Cheikh Omar declara apropos d'Oumar<br />
Bayla: "le viens de perdre ma main droite, ma main gauche m'est peu utilc." Une telle<br />
declaration dit assez, par delil I'aspect metaphorique, I'importance de I'illustre homonymc,<br />
bicn qu'Alpha Oumar lllierno Mollc rilt aussi un preux hors pair.<br />
En gros, le heros dujihiid se trouve etre I'armee du jihiid : 13oto1 Sawa Hiiko,<br />
Koly Mody Sy, Anlo Aliou Ncliercby, Hammfll Kouro Wane, Lamba BOkar. Thiam... tous<br />
ccs vliilltIJlIS guerriers ont suscilc chacun un fragment epiquc trcs vivallt, et I'ensemble forme<br />
unc geste de I'hero'isme tradilionncl 1\ bicn cles egards. Les toucouleurs rappellent les<br />
prouesses d'Alpha Oumar Thierno Bayla, certes comme celles d'un saint: mais ils les<br />
expliquent surtoUI par sa fidClite ill'hero'isme peul ante-islmnique.<br />
{J) Le cheval. - FidCle compagnon du heros peul, le cheval apparail clans les epopees<br />
traditionnelles comme un precieux auxiliaire de son maitre. Les soldals du jihiicl, pour<br />
accomplir Ieur mission, enfourcherent des chevaux au souvenir imperissable. Ces deslriers<br />
participaient ala guerre, et expliquaienl. dans bien des cas, la victoire ou la clerailc de Ieur<br />
cavalier. Entraine el bien nourri, le cheval, doue en plus de pouvoir magique. I:lvorisail, :1<br />
coup sur, une percee signiricalive clans les ligncs cnncmics, suivie en general cI'un rC.(Qur<br />
triomphal. C'est sans doute la raison qui explique que, sentanl la situation desesperce. El<br />
Haclj Omar. arin d'echapper au siege de I-1amclallahi, clepecha son neveu Tidjiini pour<br />
chercher des renforts aupres de Ses I\lHis chefs pellls ct dogons : " La legende raconle qu'il<br />
reussit 1\ franchir les lignes ennemies, sans elre rcconnu, avee six compagnons, Cl mOlllc sur<br />
un chevalljue le Chcikh lui avail donnc en lui rccommandant de se fier alui Cl de le Itlisser<br />
36
CHAPlTRE [ - INVENTAlRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 37<br />
aller ou il voudrait sans le diriger aucunement. Ce cheval, tadal nasru, " nasru ( le secours) it<br />
la tache blanche au poitrail", le conduisit it ceux qui eraient predestines it lui donner les<br />
secours qu'il cherchait : Ella Kossodyo, de Doukombo, ['Amirou De, ['Amirou Bore et<br />
Bokar AIgiili, des Finobe, chez les Peuls. Le recit legendaire ne serait pas ici it sa place" I. En<br />
tout cas, de nombreuses versions epiques vantent les merites des chevaux et le secours des<br />
armes.<br />
rJ L'arme.- Elle est avec le dewier, l'agent qui contribue dans une large mesure a la victoire<br />
du heros. La geste du jihiid en fait un adjuvant du heros, personnage principal situe au centre<br />
du mythe hero'ique, qu'il delimite de surcroit dans le temps et dans l'espace. Les recits<br />
omariens se plaisent a opposer, des lors, les coups de fusil des jihiidistes 'lUX charges de la<br />
cavalerie peule annee de lances. Relatant un accrochage entre l'armee peule et I'annee du<br />
jihiid aux environs du Sansanding, La Qacida ell poular devoile Ies armes de chaque camp.:<br />
"Les genoux furent mis a terre, les doigts furent accroches aux detentes [des<br />
fusils] ;<br />
La poudre crepitait, on cmt qu'elle ne se tairait pas.<br />
Tu n'entendais que: mon taureau ! mon cheval, laisse ma lance 2 !<br />
Lit Allah detruisit les hypocrites qui ne s'amenderont pas"3<br />
Mais l'arme la plus redoutable fut manifestement, au-dela des fusils, "les<br />
boucs du gouverneur", "ces canons, provenant du NDyoum, village du Feria du Boundou<br />
(oo.) avaient ete remis au Cheikh pendant son sejour a Boule-Bane en mai 1858. Dans un<br />
rapport Cornu, commandant le poste de Bakel, rend compte de ce qu'en fevrier 1858, il a ete<br />
amene a aller, avec deux obusiers et quelques canonniers, renforcer l'armee de Boubakar<br />
Saada qui assiegeait NDyoum sans succes, et relate comment, le 16 fevrier, une sortie des<br />
defenseurs ayant mis en fuite l'armee de notre allie, il a dO, pour ne pas se faire enlever,<br />
suivre le mouvement en abandonnant ses deux obusiers dont le tir avait casse les roues"4<br />
Surnommes " les boucs du gouvemeur" par les toucouleurs , "ill'annee du Cheikh Omar,<br />
ces obusiers, qui ont puissamment contribue il ses victoires, etaient sous les ordres<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Gaden (H.), op. cir., p. 195.<br />
" Chacun rcvendique l'ennemi qu'il visnt de tucr, afin de s'en appropricr<br />
les dcpouilles : " man taureau",. c'esl-a-dire " man guerrier". "man cheval"<br />
s'entend aussi du cavalier, dam celui qui vient de le tuer veul Ies armes, Ies<br />
vetements et la monture". (Note du lraducteur, vv. 972, p. 167).<br />
. Gaden (H.), op. cir., p. 167.<br />
Id., p. 143.
ciiAPITRE I - INVENTAlRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 38<br />
d'un Bakiri de Tiabo l , pres de Bakel, qui avail vecu vingt ans it Saint-Louis et y avait acquis<br />
des connaissances que le Cheikh sut mettre it profit. C'est che? cet homme. Samba Ndiaye.<br />
que Mage logea pendant son sejour a Segou"2. La Qacida ell pOII/ar se souvient de ccla Cl<br />
chante:<br />
"I. Les canons furent tires, ils furent inquiets alors, au point qu'ils<br />
chancelerent.<br />
2. Aussit6t s'elancerent les hommes bien portants, et braves. Dyabal fut<br />
disperse<br />
3. Les griots du Segou, la furent descendus de ces chevaux de race; des<br />
boeufs gras et des petites servantes grasses furent enlevees"3<br />
Ces derniers vers resument la presence et la solidarite du triptyque Ihematiqnc<br />
- la lance, la vache, la femme, et du triptyque heroi'que - le hems. l'arme et le cheval. ComlllC.<br />
dans l'epopee classique, les deux triptyques s'enchevctrent, s'eclairent et expliquent le:;<br />
prouesses du heros. Puissants moleurs de I'action, ils fonctionnent comme des referents<br />
mythiques implicites qui orientent le cours de la narration epique. Pareils a des motifs<br />
ornementaux,. ils aureolent la vie du preux, el lrouvent un autre rcpondant. sur le plan<br />
musical, dans le chant que sa vie et son oeuvre ont arrache a l'art des professionnels<br />
b3) La devise<br />
Dans le domaine peul, l'hero'isme ne devient effectif qu'a la condilion d'avoir<br />
produit une devise musicale et parlee. L'explication de cette exigence se trouve dans les<br />
structures qui definissent le mode (]'existence et de diffusion des oeuvres orales. Aussi, en<br />
vaillant heros de la "pulaagu", Cheikh Omar a-t-il sa devise ou "noddol". Celle-ci se<br />
structure ainsi : breve genealogie. suivie d'un court resume de ses conquctes, enfin un snrvo[<br />
rapide de ses qualites intellectuelles et morales, l'ensemble elalll accompagne en sourdine par<br />
le martelement de son air musical, "Tara". A ce propos, Sidi Mb6thiel cite 1IIle devise<br />
d'Omar accompagnee a la guitare monocorde ou "molo":<br />
2<br />
3<br />
l. " Tmodo, mefiez vous de lui,<br />
NOlls pcnsollS que Gadcn rut induil en crrcur par un de scs inrorlllalcur:-:<br />
qui. ignorant le nom de ramillc de la pcrsonnc cOllccrncc. le dcl'orIllc cl.<br />
I'ajolltanl a son prcnOlll, en fail deux pcrsonncs. La rcalilc est pillS simple<br />
il s'agil de Samba Ndiaye lhlhily.<br />
Gaden (11.). nl'. cit.. p. 144.<br />
Id.• p. 143.
CHAPITRE 1- lNVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
9. So wonaa Jinne walla chaycPaane 1 jaQngaani cPum<br />
heyye 1100re ndee yaltaani.<br />
10.0 JaQngee seeremDe capancPe nay<br />
11. KamDe fow De ndutti tee makko eDe naamnoomo<br />
ganndal, 0 wonti ceerno maDDe.<br />
12. 0 woni e aduno 00 capancPe jeecPicPi hitaande<br />
hade makko majjude Dagammbere<br />
13. Bernde ndee mettaani,,2<br />
1." C'est lui qu'on nomme le marabout des marabouts, le saint des saints<br />
2. Quand il se fiiche Dieu I'aide ,quand il se bat Dieu le favorise 3<br />
3. Son nom est: "ai·n", "nllnl", "di"4<br />
4 "Mn" equivaut asoixame-dix<br />
5 "Mim" signifie quarame<br />
6 "Ri!" symbolise deux cents.<br />
7 11 a eludie deux cents disciplines<br />
8 Aucune d'elle ne ressemble a['autre<br />
9 Exceples Ies djnns eL les demons, nul n'a appris cela sans que cela ne<br />
deborde sa tete.<br />
10. 11 a etudie aupn':s de quarante marabouts.<br />
11 Tous revinrent pres de Iui, Iui demandant au savoir, iI redevinr leur maio·e.<br />
1211 est reste dans ce monde soixanle dix ans, avant qu'il ne disparaisse a<br />
Deguemocre<br />
1311 n'a eprouve nul chagrin"5.<br />
La declamation de la devise du heros par le griot omarien campe, de fa
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 43<br />
dans la deuxieme panie de son envolee. Enfin la lroisieme panie (v4 av 13) developpe la<br />
panie precedente (v3) de fa
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 44<br />
pedagogique, enfin la perpetuation d'une coullnne qui liait le griOl au noble. Dans tous les<br />
cas, une franche collaboration existe entre griot et marabout.<br />
En somme, I'anisan du verbe de l'epopee onlarienne se revele un aniste<br />
complet, dontle talent resulte d'une synLhese dynamique entre l'oralile et l'ecriLure. En fin<br />
psychologue, le griOl a su se readapLer, et adapter son art, pour se mellre au service du<br />
maraoout, le nouveau mairre du jour.<br />
a2) Le ma/Ire de la plume de repopee du jihdd<br />
La maitrise de la plume revient en general acenaines families dites families<br />
maraboutiques. Mais cette regie connait de nombreuses exceptions faisant que toute person ne<br />
desireuse de s'insrruire finit par mairriser la lecture et la graphie arabes. 11 convient cependant<br />
de distinguer les marabouts des clercs et des scribes. En gros, le marabout possede une<br />
culture islamique correcLe, mais il ne maitrise pas toujours I'arabe. Dans ce cas, il Pellt<br />
recourir a un alphabet adapLe : Ies caracteres arabes augmenLes de quelques signes<br />
diacriliques pour transcrire le poular. Une teIle graphie donne des manuscriLs peuls appeles<br />
"fulfulde". Par contre, le clerc maitrise le Coran et possede quelques rudiments de I'arabe,<br />
mais il se signale sunout par sa parfaite calligraphie. Enfin, le scribe designe une sorte<br />
d'erudit, double d'un excellent calligraphe. C'est pourquoi le scribe, en recopiant un<br />
mannscrit, "jOUle a la fin 'luelques fonnules ou quelques informations complementaires,<br />
tandis que le copiste se contente de recopier tout bonnement le manuscrit qui lui est confie.<br />
La vie et l'oeuvre d'EI Hadji Omar constituerent une belle aubaine pour Ies<br />
m"itres de la plume. La proximile des griots les poussa a composer avec l'oralite, pour<br />
immortaliser Cheikh Omar et les combattants de la foi. Des oeuvres diverses et variees virent<br />
le jour dans toules les localites du Saint - Empire. A ce propos, la source la plus ancienne de<br />
l'epopee omarienne ecrile semble eLre la version rapportee par Charles Reichadt l , un<br />
Illissionnaire anglican d'origine allenHlnde qui travaillait sur la langue peule. 11 s'agit d'un<br />
Lexte fulfulde transcrit en arabe, retranscrit, inlroduiL a Freetown vers 1860 par un clerc<br />
Yorouba musulnwn. Composec a Dinguiraye vers 1840- 1853, la chronique donne des<br />
infonnations precieuses sur El Hadj Omar et sur ses talibes; en meme temps, elle relate Ies<br />
premieres baLaiIles. Oeuvre d'un talibe plus zeIe lju'infonne, la version rapponee par<br />
Reichadt contient un certain nombre d'erreurs, surtout la relation de la lutle contre le royaume<br />
bambara de Segou, Oll, du reste, s'arrele le livre.<br />
Reichadt (C.), "Hal" Saihu AI-H"jj om"n] F"Liyu kedewiyu bi seibi" in<br />
Grammar of the fu/de language, New-BrompLon, 1873.
CI-lAPITRE 1- INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 4 8<br />
I'0Llr ecrire unc cpopec peule Cll I'hollllellr dc Cheikh Omar. Le pari fut gagne : !es exigences<br />
de Ut Qacida et du peul etam respectees:<br />
"Mido yell a domam, baddo, dokko mo habatah.<br />
mo rokki fuf all di fa maya rollkalah.<br />
Mido dt"a, dulde e allnabido mohanullada,<br />
pennindo godal ala, gurdo mo mayatah."<br />
"le loue mon Maitre, I'unique, le munificent qui ne se lasse pas.<br />
Tout homme a qui il a dOlllle sait que, jusqu'a ce qu'il meure, illle manquera<br />
de rien.<br />
J'appelle les graces el le salut d'Allah, sur le Prophete Mohammed, qui a<br />
rendu evidente I'existence d'Allah, le vivant qui ne mOurra pas" 1.<br />
L'elaboralion de celle epopee met aussi en evidence unc collaboration elltre<br />
oralite et ecriture. En effet, avallt de fixer son poeme en "fulfulde", Tyam donnait des<br />
lectures publiques des fragments qu'il venait de composer, des critiques diverses emanant<br />
des griots et des marabouls amCliorerellt sensiblement ses premieres epreuves. A cet egard,<br />
la Qacida ell pOlllar constitue un temoignage formeI de I'inlluence mUlllelle qui a existe entre<br />
artisans du verbe et maitres de la plume.<br />
II cOllvient d'ajouter, aux griols etmarabouts, Ies avcugles appcles "Salli" ou<br />
"almadda", specialises dans la memorisation des textes de la litterature islamique poular et<br />
dans !eur recitation publique. lis constituent dc puissants agents de diffusion de I'epopee<br />
d'E! Hadj Omaf. Leur art force I'admiration surtout a cause de I'extraordinaire capacite de<br />
lem memoire : la recitation des 1200 vers de la Qacida ell pOlllar ne represente pour eux<br />
qu'UIl amusement allodin.<br />
La revue des specialistes de I'epopee d'EI Hadj Omar met en evidence une<br />
cooperation dynamique entre griols et marabouts, entre I'oralite ell'ecriture. Le griot sut tres<br />
tOI se readapter aux nouvelles exigences de son temps. Sans casser sa guitare, il crea de<br />
nOllveaux airs inspires
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 52<br />
C'estlln soki! eomme i\ mi-halltellr (k son point elllminant, line lune qui ne<br />
s'obscurcit pas,<br />
comme par lInc nllit de pleinc 11Ine avec un clair de lune sans melange.<br />
C'est line gloire, une elevation, ou encore une panlhere au milieu d'ennemis.<br />
C'est un secours rapide, C'eSI un f1ellve profond qui ne noie pas.<br />
C'estllne tres grande chose lInique dans tous nos pays de ['oues!.<br />
C'est k miel de la creation, son aliment vital qui ne s'allerera pas en<br />
vieillissanl" I.<br />
Des comparaisons expressives, reprises par une serie ele mClaphores, font iCi<br />
de Cheikh Omar k doubk champion du triptyqlle initiatique el elu cycle de la foi.<br />
En gros, ks auleurs des mannscrits omariens n'om pas compose Wle deviSe<br />
pour le Cheikh, tOllt all pills l'alJllclklll - ils "Bahral ilm" (ocean de science); par conlre, ils k<br />
chanleru en termes cmouvants ou le langage f1euri - intlllence ele la lillerature arabe <br />
s'ajouwnl i\ un rylhme puissant - heritage negro-africain -, donnent 11 ['ensemble un cffet<br />
sublime. Des lors, la musique fuse au fit ele la lecture, entralnant une gesticlllation<br />
individuelle ou collective.<br />
c) Le puhlic<br />
lIjolle lIn rok capital dans les manuscrits omariens Oll son action se fail sentir<br />
en amonl el en aval de kur elaboration. Ainsi, les critiques des auditeurs furent-elles<br />
determinanles dans la redaction definitive de La Qacida ell pOLl/ar. En OUlre, tenu de bien<br />
presenler son oeuvre, ['aulellr d'un nHlnuscrit doit soigner son ecriture d'abord, car la<br />
calligraphie est un miroir qui rellele I'fime du copiste. 11 doit aussi soigner les themes pour ne<br />
pas choqller lIn groupe, et k slyle, pour meriter k regard des erudits.<br />
Une fois admis, k manuscrit circuk et il est tres vite memorise par les<br />
marabouls, c1ercs et aveugks qui vonl le reciter dans des cours marabollliques, sllr<br />
I'esplanade des mosqllees Oll au cours des veillees pieuses, dans ['enceinte des maisons.<br />
Loin d'elre passive, la reception de CeS productions, bien qlle recueillie, donne lieu i\ une<br />
recllc participation de la conllnun,uile.Le public se croit alors en plcine guerre saiilte et iln'est<br />
pas rare de noter de nombreuses conversions i\ [,Islam el ala Tidjanyya, ou aux deux, apres<br />
[!lIe seance rellssie. Naguere encore, Abdolll Ata Seck, lors d'une soiree a Sailll-Louis,<br />
pOllssa deux cents personnes i\ s'affilier i\ la Tidjanyya, seduites qn'e1ks furent par Ies dons<br />
d'Omar et I'ampleur de sonjihftd. En fait, I'ecrivain conscienl de la force que represente son<br />
Gaden (H.), 01'. Cil, vv. 22 a 25.
CHAPITRE I - INYENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 53<br />
cent, s'erIlollre ,le toute les garallllcs, pour alleindre le double but 11 lui impose par le<br />
Illallllscrilolllaricn ; islallliser ct plaire.<br />
Au tCrllle de cet invenwire des epopees peules, on eonstate que l'epopee du<br />
jihild se si tuc, par rapport 11 I'epopee pcule u'aditionnelle, au earrefour de la continuile et de la<br />
rupturc. Prolongement nature! de I'epopee peule, la geste d'Omar la renouvelle, en lui<br />
apportantl'lslam etl'eerilurc. Considerec sous eet angle, elle ajoutc 11 la trilogie cyclique ct<br />
au Iriptyque heroi'que, le triptyque cultuel et la lrilogie initiatique, 11 travers la symhese de<br />
l'oralite el de l'ecriturc, confiee au mode d'cxpression et de diffusion du modele classique.<br />
En definitive, l'epopee d'EI Hadj Omar apparalt eomme unc vaste geste pcule qui conjuglle<br />
l'an et la foi, I'oralite et I'ecriturc. A ce titrc, die PCllt favoriscr des eomparaisons pellinentes<br />
aux plans formel, thelllatique et ideologiquc, avec I'epopee pcule traditionnclle.<br />
B - CLASSIFI<strong>CA</strong>TION: nECITS DE BASE ET VAnIANTES<br />
L'inventaire enumeratif des epopees peules met en lumiere une matiere<br />
abondante qu'il convient d'ordonner. Dans ce sens, trois unites se degagent assez nellemelH :<br />
le tronc commnn, les branches etles variantes al'interieur de chaque branehe.<br />
I - LE TRONC COMMUN<br />
Malgre !cur variete et Icur divers;te, les epopees peules se reduisent 11 quelques<br />
dements invariants: themes recurrents personnages, Iieux, noyau narratif de base du reeit<br />
)<br />
fOllllant une sone de matrice genetique.<br />
Genre de la lillerature qui exallC Ics valeurs d'un groupe 11 travers les hauts<br />
I'aits d'un heros historiqlle propose conlllle lllodele, l'epopee se structure autour d'un noyau<br />
Ilarralif de base. Le reeit de la vie du heros fournit alars 11 l'imagination populaire, une<br />
Illaliere qu'cllc elllbdlit en Illi annexalll les aUlres valeurs de la communaule. Des lors se<br />
.kgage, it travers les diverses versions et varianles, un noyau de base que les techniques<br />
lIarratives, lllcmorisecs par l'aniste, embellissent indiffcremment dans le temps et dans<br />
I'espace.<br />
Silaalllaka et El I-Iadj Omar nous perllletrent ici d'clayer nos assertions; deux<br />
Illodeles des epopees pcule et islamique (cl' tableau recapilulatif du noyau narratif de base).
CHAPITRE 1- INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
2°) LES I'ERSONNA
CIIAPITRE I-INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION<br />
de Samba Gueladjegui I sacralise a la fois Samba et Bil Bassi: le heros en sort vainqueur el,<br />
il partir de lil, il est compare iJ uu solei! qui domine la nature. I3il Bassi aussi devienl un<br />
espaee sacre, un lieu de pelerinage qui allire eneore des foules. Silaamaka Ardo meurt, de<br />
.SOIl eOle, sous "le pelit caY!cedrat ,,2 qu'il avail plame selon certaines versions, alors que<br />
d'auLIes affinnenl que ce fut sous k piquet de son cheval3 Dans IOUS les cas, il moufllt dans<br />
la concession de son pere, espace qui I'avail vu naitre. De meme, pour venger la mere de<br />
Douee-ELIeirue, I-Iam-Bodcdio quille Goundaka pour Sa. L:l, il eXlennine la ville et ramene le<br />
roi, Amirou Sa, puis la remel acelle qu'il avait humiliee..<br />
L'epopee d'EI Hadj Omar possede aussi ses lieux symboliques. Avantlout<br />
Omar naquit dans un village beni: Halwar qui comptait un marabout dans chaque maison. Le<br />
Foula-Toro, pays d'Omar, venait d'inslaurer l'Almamyat ou theocratie, el par consequent<br />
avait decrete un jihad tous azimuths contre les paYens et Jeurs allies. Des Jors, la naissance<br />
d'Omar changea la physionomie de son village en suscitantun cours d'eau, dclivranl par la<br />
meme occasion !cs habitants de la corvee d'eau qui etait kur lol. Cheikh Omar, iJ la le le de<br />
I'armee du jihad, disparaitra soixante-dix-ans plus lard, dans ks falaises de Bandiagara, dans<br />
la grotte de Deguembcre 4 Entre "Njaajalol", le marigot de Halwar el la grolle de<br />
Deguembere, l'epopee du jihad cite plus d'une centaine de lieux merveilleux : tomes ks<br />
grolles situees en Senegambie sonl preleeS aOmar. La gesle n'oublie pas les Lieux Saints de<br />
l'lslam auxquels s'ajoulent, nalurellement, !cs champs de bataille : Kolomina, Karega,<br />
Woytela, Thio, Tyayawal. La forte empreinte mystique qui marque le jihad, renforcee par k<br />
merveilleux, ue pouvait qu'inspirer au griOl un espace extraordinaire, iJ la dimension de la<br />
delllesure d'Ornar et de ses jihadistes enturbanncs.<br />
Le temps aussi accuse des caracteres epiques : mythique et symbolique. Ainsi,<br />
pour comballre l'amJee de Sa, Silamaka se levc-t-il aI'aube, pour eviler le desagrement de la<br />
surprise sans doule, mais surtout parce que le matin porte chance. Par contre, Poull6ri rentre<br />
au crepuscule dn voyage que Silfirnaka l'envoya faire et iJ l'issue dnquel il apprit la funeste<br />
nouvelle de la mort de son ami. Les deux moments choisis - aube, crepuscule - designant,<br />
dans la pensee negro-africaine, avec le zenith, des moments extremement dangereux, parce<br />
qu'instants favoris des genies et des esprits.<br />
L'epopee d'EI Hadj Omar illustre cwe conception du lemps, puisqu'elle<br />
commence par un temps mythique et se lertnine dans l'etemile ou elle installe SOn heros dans<br />
une saine apolheose. En d'autres tennes, " l'oiseau qui volligeait " entre ciel et terre, devenu<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Equilbec (F.V.), op. cit.<br />
SeydoLJ (C.), op cit., p. 135.<br />
I d., p. 233.<br />
Nous avons visitc aussi bien Ndiiidiatol que Dcguembcrc. Jusqu'il cc jour,<br />
ccs licux. atLirCIlL une [oule de pc1crills Illusullllans au de simplcs tourisles.<br />
59
CHAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 62<br />
"Eh! dis donc !<br />
Eh ! Poull6ri, tourne-toi, reviens, reste !<br />
Quand bien mcme iln'cxistcrait plus de vaches des Peuls n'iraiell! pas gardcr<br />
les hycnes. lis feraient n'importc quel aulrc travail!<br />
Si bellc que puisse elrc une servc, si je lui prends la jambe, ce sera pour y<br />
rneltre des chaincs ou unc corde !<br />
La bcaule d'une servc ne mc la fera pas epouser pour aulam !<br />
Je nc vois rneme pas la beaute d'une servc.<br />
II faut que lu comprennes que si j'ai amcne une serve ici, c'esl pour loi.<br />
Poull6ri, tu as vu comme elle cst bcllc ; mais tu sais que je I'ai prise pour<br />
femmc, pour moi-mcme : toi vivant, coucherai-je avec unc serve" 1 '?<br />
C'esl au momcll! Oll, dc rctour du voyagc cffectuc sous I'injonclion de son<br />
ami, et aprcs avoir lue le Pcul sosie dc Silamaka - faux fabrique de loute piecc pour tempercr<br />
son ardeur -, que Poulli'lri rappclle il sa conscience mcurtrie, ces douloureux instants, les<br />
trois fameuses occasions:<br />
lieu de trois.<br />
. - " 11 epousa unc servc, il fit commc il convenail Cl la mit dam sa case"2 et lui<br />
dil :<br />
"Tu sais bien, Poull6ri, que je n'epouserai pas une scrvc devam loi !<br />
C'est pour toi quc jc fcrai cc mariagc"3<br />
- Comme les deux comperes mangeaicll! de la bouillie, le Peul dcmanda<br />
auparavanl aPoullori d'appOl1cr dc I'eau, car cetle tache revient ill'esclave.<br />
- Surpris par I'orage, Poul16ri voulut chausser lcs chaussures de Silamaka,<br />
celui-ci le lui inlcrdit : "Poul16ri IU sais bicn que tes pieds n'cntreront pas dans<br />
mcs chaussures"4.<br />
En adt.lilionnanl ccs dcux series dc variantes, on obticnl qualre occasions au<br />
L'epopee du jihad connail aussi certain nombre de variantes ill'inlericur dcs<br />
branches. La guelTc sainte s'elanl traduite par I'cxislencc de vainqueurs et de vaincus, il est<br />
normal que chaque camp suscite des versions, creanl ainsi dcux gcstcs parallclcs aux<br />
multiples variantcs.<br />
I<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Scydoll (C.), op. Cil.,pp. 159-161.<br />
Id., p. 259.<br />
Id., P 261.<br />
Id., p. 261.
CIIAPITRE I - INVENTAIRE ET CLASSIFI<strong>CA</strong>TION 64<br />
En gros, la position des variantes par rapport 11 la narratiun epique, !cur sens et<br />
!curs implications, signalent une oeuvre originale. La geste s'enrichit ainsi des differences<br />
qu'elle suscite. Les variantes diversifient alors le recit, en lui ouvrant de multiples<br />
possibilites. Au terme de I'analyse, on note que la classification de la matiere epiquc fournie<br />
par ks liLteratures peule et omarienne fait apparaitre une meme themati'lue, distribuee<br />
diffen;mment : par excmplc I'actant verbal dans I'epopee du jihiid est souvent sujet Oll<br />
complement dans les versions lraditionnelles. La lance, la vache, la femme changent<br />
automatiquement de Slatllt en passant de "I'ariswcratie de la lance et de la houlelte" 1 11<br />
''!'arislocralie du livre"2 Une telle concordance thematique a engendre une scrie d'invariants<br />
anx schemas narratifs divers.<br />
Au terme de ce chapitre consacre aux rappurts que l'epopee d'EI Hadj Omar<br />
elllrelienL avec I'epopee peule, il se degage les poillls saillants suivallls :<br />
- Veritable epopee peule, la gesle d'Omar en illustre les principales constantes : trilogie<br />
cycJique, triptyque heroYque.<br />
- Epopee originale, e11e depasse l'epopec pai"enne en s'islamisant, et par ce fait recupere Ies<br />
valeurs profanes positives pour les reinterpretcr en fonction de la nouvelle foi. La gesle qui<br />
en resulte efface I'ideologie peule pai"enne et la rem place par une conscience reIigieuse<br />
musulmane.<br />
- Situee au canefour de l'oralite et de I'ecrilure, la formation coranique des griots, nes dans<br />
la theocratie, I'cmcrgence dll Coran, la force de I'ideologie islamique suscitent l'ecriture dans<br />
lInc societc essenliellell1cn[ orale. Dcsonnais, ecrit et oral marchent la main dans la main: la<br />
graphic amlx transcril le poular, le marabOUI pCllnet au griOl de declamer la poesie religieuse<br />
et dc I'accotllpagner 11 la guitarc.<br />
- Epopee aux multiples versions, la geste d'Omar est cependant reductible 11 quelques<br />
invariants recurrents.<br />
I<br />
2<br />
Ces expressions sont de Amadou Hampat': Ba.<br />
Id.
CHAPITRE 11<br />
LA FORMATION DE L'EPOPEE D'EL HAD] OMAR
CIli\I'ITRE 11 - LA FORMATION DE L'EI'OI'EE 67<br />
Le genre le pins anciennement connu est associe it I'activite des chasscurs. Ce<br />
">Ill des chants qui ponent le nom de "kerunde" ou "keroocPe". L'etymologie de ces mOls<br />
pose encore probleme. Nous n'avons rencontre aucun temoin capable de news donner le sens<br />
dc I'objet designe par le mot "keronde". Par conlre, son synonyme "kerood'e" vient du verbc<br />
"hcrele", qui signific cn ponlar caquetcr. Ce verbe s'emploie pom designer le caquellcmenl<br />
des poules ct des pinlades en pkine conception. On sait, par ailkurs, que ks grandes ballucs<br />
concernaient surtout ks pillladcs. 11 CSI possible de conclurc qne l'objct de la chasse a foumi<br />
le nom du genrc poetiquc. Le demier probleme que posc le mot "keroocPe" est d'ordre<br />
fonnel. En efret "keroocPe" est la forme plurielle de "herde", or c'est lilun eas u'es irreglliier,<br />
car sous celle forme verbale, le plurid se marque par le snffixe ".ie" ; des lors on devait avoir<br />
tlkerooje" et non "keroocre"<br />
Mais qui pomra resoudre la question puisque le genre il presque disparu ?<br />
Naguere eneore, KekouIa, le maitre incollleste des "kerood'e" declamait son riche repenoire<br />
pour ses coneitoyens, habiIants des environs de Kaedi, dans la vallee du Senegal. 11 viem de<br />
s'eteindre emponant avec lui son art et sa science. Le "kerooePe" n'a pas pour aUlalll echappe<br />
ilIa memoire de I'honllne de la tradition:<br />
"Bismillai' arahmani 1<br />
Gid'o alia mo rokkimi nguru gool<br />
GicPo alia mo rokkimi ngunl gool yoo<br />
Ko tirdumi mbaggd wenndoogo,<br />
mbaggel mbamu jaawle 1',2<br />
La transcription etant quelque peu defectueuse par cndroits, nous j'avons<br />
reprise, tandis que nous repnxlllisons en emier la traduction.<br />
"Au 110m de Dieu, le Clement, le Misericordicux<br />
Qui me donnera une peau de veau<br />
Qui, oh ! qui me donnera une peau de veau<br />
Alin que je confectionne le petit lam-lam des aurores,<br />
La force de J'idcologic ct de la doctrine islamitllJcs pOllsscnl Ics artislCS cl<br />
ks artisans lIlI vcr-be :1 rcilllcrprclcr Icur art en [unction des eXIgences<br />
llotlvcllcs. Ici le premier vcrs till kc r(j() de rcprcnd le premier vcrscI de la<br />
premiere Souralc UU COrl1fl illlillllc "AI-F5.liha" DU "L'uuvralllc"," La<br />
L i III i n a i re" .<br />
2 Gucye (T.Y.), A.I·/JeuS de la lil/erall/re pVlIlar, Nnllackcholl, 19X3.
C1IAI'ITRI:: 11 - LA FORMATION DE L'EPOI'EE<br />
!e plOlillam-lam dlOS foules de pinladlOs 1.",,1.<br />
Ce prelude invariabllO, sone de salul it la fOrel, etait recile par tuut chasslOur,<br />
puis venaienl J'aulres composilions sur dlOs themlOS varies, mais generalement axes sur les<br />
qualites J'un bon chasslOur et sur la naturlO du gibier it aballrlO. Des incantations, connues des<br />
SlOlJlS inities, Jevaienl clore la panie, car la brousse representlO un univlOrs clos, Oll le chasslOur<br />
reste soumis aux genies et aux fauves ; pour elOhapper it !eur emprise, il doit s'armer en<br />
consequence, Les "keroocPe" resument anistiquement l'univers Je la chasse.<br />
Un aulre genre SlO signa!e par son anciennele; celui des guerriers ou seGGe; le<br />
Gumbalaa ou kunlimpaaji ; cette denonlination JlOS chants Je guerre lem vilOnt Ju Foula<br />
Central, alors que Ies aulres regions Ju pays les appdlenl "jimcPi peya Y'iiY'am" ou " chants<br />
dlO sang", sans Joute parce qu'on les Jeclamait au son de tam-Iams royaux "baucPi alamari"<br />
ou tarn-lams Ju satigui, appdes aussi " baucPl peya Y'iiY'am" ou "tam-tan,s de sang",<br />
Le "gumbalaa" est un poeme epique qui exalte les haULs faits Jes anciens<br />
heros ; bravoure, courage, endurance, slokisme. Sa Jeclamalion POUSSlO le "cecPcro" il se<br />
mesurer it ses illustres devanciers par la generosite ou par un acte de bravome. 11 est reyu<br />
que, durant Ies deux guerres mondiales, les Franyais mirent it profit la fierte Jes "seGGe"<br />
enroles, en favorisant Jans Ies troupes la Jeclamation des "kontimpaaji",<br />
11 existe Je nos jours, fort heureusement, des interpretes eminellls du<br />
"Gumbalaa"qui se produisent il longueur de journee sur les ondes de I'ORTS et de<br />
l'ORTM2; Samba Diop, Amadou Koly Sail. Mais, le grand maitre dll "Konlimpaaji" fut<br />
Alxloul Kanny, iln'a laisse aucun enregistremenl. En revanche, son Jisciple Samba Mai'ram,<br />
dOll[ la voix lroublait les coeurs et faisait banre le sang, a legue it la pOSlerite un fragment de<br />
"Gumbalaa" relatif it I'epopee Je Samba Guel5Jiegui 3;<br />
I<br />
2<br />
"A nanii .. , ananaani golle dono Gdaajeegi ?<br />
Samba e saysaynde<br />
Samba taan kinnji<br />
Samba kinnji<br />
Samba tan, sewi tan<br />
Umlllu latoma<br />
Be kirndi e beeli coowi<br />
Gucyc (T.Y.), op.ci/.<br />
ORTS = orfice de Radindiffllsinll Television du Sencgal.<br />
ORTM = office de RadiodilTusioll Television de Mauriuwic.<br />
L'cpopcc de Samba Gueliidicgui ou la geste des scooe est a la fnis un genre<br />
spcc.ifiquc ct CO III III 1I11 , p\lisqul:. l'hcroYslllc qu'c1k chantc lrallsccnde !cs<br />
grollpcs sociuux.<br />
68
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
Be mbaali e Mannayel...<br />
loom kowi joy, booli joy<br />
/'<br />
'Mo baaraadi sappo e jeegom<br />
Alaa heen fof ngu 0 danda'Uli nalaande<br />
Nande kelle mbiri, mbirtii naange e hoore<br />
Bulli Gafh" oulel yooi namaande, ko nalawma ejelliis !" 1<br />
Fragment epique difficile 11 rraduire 11 cause des allusions et des jeux de mots,<br />
mais qui donne 11 peu pres ceci :<br />
"As-tu entendu... N'as tu pas entendu [pader] des haUlS faits de I'heritier de<br />
Gueliidiegui?<br />
Samba et Saysaynde<br />
Samba, le petit-fiIs de Killdji<br />
Guelildio Kindji<br />
Samba seul, Sewi seul<br />
Oumou Latoma<br />
l1s partirent de Beli Thi6wi un apres-midi<br />
Us passerent la nuit 11 Mannilycl<br />
L'homme aux seize montures<br />
Chacune a connu un fait d'annes avec lui 2<br />
Le jour ou des applaudissements noums crepiterent<br />
Au puits de Gafo ". Bulel paya sa delle [de sang!.<br />
Ce fut le jour de Djems !"<br />
Le poete multiplie ici inventions personnelles et anachronismes ; par exemple :<br />
"Saysaynde" n'est choisi que pour ses sonorites, tandis que "Kindji" donne pour un ancetre<br />
de Samba, ne figure dans aucune de ses genealogies, le reste du fragment reste conforme aux<br />
donnees generalement admises : Sewi, d'abord griot de Gueliidiegui, pere de Samba,<br />
devient, 11 la mort de ce demier, le Mentor du prince peul ; Oumou Latoma designe le cheval<br />
de Samba. La juxtaposition des localites - Beli Thi6wi, Mannflyel, Gafo, Bulel, Djellis <br />
apporte 11 l'histoire la dimension spatiale qu'elle implique ; en meme temps qu'elle ressuscite,<br />
aux yeux des spectateurs, les chevauchees et l'univers des randonnees epiques. Art tres<br />
vivant, le "gumbala" continue encore de faire les dclices des "Seooe", destinataires premiers<br />
1<br />
2<br />
Voir notre bandotheque.<br />
Mal a. 1I10l: il n'y a "\Ieune, sails laquelle, il n'esl passe de jour [memorable].<br />
69
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 70<br />
de ces epopees, mais non exclusifs, puisque le genre transcende leur formation specifiqlle<br />
pour embrasser tout le monde peu!.<br />
A leur tour, les Maabuoe ou tisserands ant elabore un genre appele "dillere",<br />
Il s'agit d'une poesie sabre comme le "keroocre", meme si eIle conlla,t un autre destin, Ell<br />
effet, le "dillere" a pu etre recueilli, puisqu'il existe des anistes talcnIueux, tel Oumar G:lfo.<br />
l'homme ala belle voix, qui le declame sails cesse. Ell outre. le Fouta compIait de nombreux<br />
specialistes du "dillere". Un disciple de ces anciens ma'Ires, Samba Abdou\ Guisse dit 13i1ba<br />
Dioulde de Dabbe, pres de Mbi1gne, alljollrd'hlli installe a Nouakchott, donne ici un extrait<br />
de I'an du poete tisserand :<br />
"Semme e ndelu Cecne<br />
Genogol e Camalle<br />
Dencc enguraal i<br />
Kodde1 Dikko Demba!<br />
Semme Selli Laana<br />
'RoQki Gawyoowo<br />
Gawyoowo dananooma<br />
kono maayde cracaani !<br />
Alia yoo mi yii koddel dikko Dcmba<br />
Seydi wuurde Demba Duguma<br />
Ma Demme Maamo Ali to Semme ! "<br />
"Semme aux dunes de sable<br />
Guclche aux rugissemenIs Demba<br />
Oh ! Koddel l Dicko Demba<br />
Semme n'avait eu personlle ponr la naviguer<br />
on !rouva un ban capiIaine 2<br />
Mais la mort ne le laissa pas Idirigerl !<br />
Oh Allah! Qui reverra 3 Koddel Dicko Demba Seydi Wourde Demba<br />
Dougouma<br />
Ma Demme Mame Ali de Semme,"<br />
L'exlrait se propose d'immortaliser un ma'lre tisseralld appele Koddel Dicko<br />
Demba, Celui-ci s'etait attire la jalousie de ses qllatre co1Jeglles, qu'il avail batllls<br />
I<br />
2<br />
3<br />
K oddcl est UIl diminutir de kodda qui sigllific demier lie. cade\.<br />
Mol a mol: on trouva quclqu'un pour dirigcr.<br />
MOl" mol: I\llah ! qllc je revois Koddel Dikko Demba,
CIIAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 71<br />
puhliquement au COllrs d'un concours de tissage. Ayanl realise, it Iui seul, l'exploil<br />
cousiswnl it lisser plus de pagnes que ses qualre concurrents, dans le meme lemps ; ceux-ci,<br />
se scnlan\ humilies, conjuguerelll leurs connaissances occultes et "liquiderent" ainsi<br />
physiquemenl leur rival. Les "maabuoe" deciderent, des Iors, de composer un chant en son<br />
honneur. Genre sobre, avons-nOllS dit, le "dillere" se definil par une economie de moyens<br />
d'otl I'emploi d'une sylllaxe de la juxlaposition, d'images, le lout etanl confie it la voix el it la<br />
musique, instances superieures. Disons, enfin, qu'on assisle aujourd'hui it un lransfert des<br />
genres specifiques, allanl d'un sous-groupe it l'aulre. Cest ainsi que le "dillere" se voit<br />
dispuler aux "maabuoe" par Ies autres castes.<br />
Les "subaloe" ou pecheurs onl aussi cree un genre Ires populaire chez Ies<br />
Toucouleurs ; le "pekaan", une des formes les plus anciennes de la Iillerature plllaar. 11 est<br />
inCOllleSLable que le plus fidele interprele du genre demellre GuelHiye Ali Fall. Ne aux bords<br />
du fleuve, aux confins des royaumes aquatiques el de I'univers humain, le "pekaan" subit<br />
tres tot I'influence de l'lslam qui tempera son elan pa·ien. Guellilye, ne, vers 1898, it Aram,<br />
dans le Departement de Podor, mourut en 1971 it la suite d'une epidemie de cholera, apres<br />
avoir donne au genre ses Iellres de noblesse. Son talent, admire des foules, fon,:aille respect:<br />
"On jugerail que cet homme est sorti tout droit du fleuve, tarll il en connaitla<br />
topographie et le relief inlernes ; de Saint-Louis it BakeI, pas un pouce du lit<br />
du Senegal qui ne soil denommc, decrit el "chante" quand il a ete le theatre<br />
d'un drame" I.<br />
Son repertoire contiel\l un certain nombre de compositions don! Ies plus<br />
populaires demeurent : l'avenlure tragi-comique de Balla Diere!, le wolof qui ne savail pas<br />
nager; la Iegende elegiaque de Segou Bali ; la legende de Birome MOdy Kome ; le drame de<br />
Ngaari dans la mare; I'avenlure d'un ami tlu POele le long de la Faleme.<br />
varie de Guellilye Ali Fall :<br />
L'exlrait de Segou Bali que nous cilons donne une idee du repertoire riche et<br />
"Seegubali, Seegllbali yoo ee woy Samba I<br />
Efle Ielli Ieyla jamma<br />
Samba Dam; jU!Jngo mum fawe kumba<br />
Mbure 1 yoo Kumba werlii ladde.<br />
Gueye (T Y.), op. Cif., P 37.<br />
2 Mbure, synonyme de Koumba, nom de la dcuxieme fille ell milieu peul, le<br />
garC(on correspondanl est Samba. Cc rang confcrc a ccux qui le portcnl
CHAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 72<br />
SeegubaJi ! Seegubali !<br />
o Dami koycfe rnakko 0 fawi e Kumba<br />
Mbure yoo Kumba werlii ladde.<br />
o wii : " remme, ko cfum woni remme ?"<br />
o wii : " cfum kay a hoyniikam,<br />
Nananooma kaa baawcfo e maayo<br />
Debbo cubballo fof na yicfi ardee gaIlemaa,<br />
Kono a Damii kam,<br />
A wacfii lan yoo ned'cfo heptu banndum,<br />
yimDe nani njalami.<br />
Mbele mbacfanaami gosi mo cubballo meed'aani<br />
Wad'aneede d'oo"<br />
o wii : " Seegubali yoo 1"<br />
Samba wiimo: " mi woondee woondoore mami wamne teemedere ngaari."<br />
o wii nlO : " Mi yid'aa"<br />
o wii : "0 wii mami warane geloocfi sappo"<br />
o wii 1110 : 11 Mi yicfaa"<br />
o wii mo : " Mami claw ja
.' ....<br />
Cl JAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 76<br />
dans d'autres genres comme le "fanta,(, le "leele"."Mais ces "diarale" eux-memes ont pour<br />
themes essentiels soit la description d'une belle femme "noble aux traits purs et aux yeux<br />
blancs comme le lait, "nerveuses et fines" et aux pattes souples comme les lianes de grevia".<br />
11 est regrettable que le pur "fan'tang" de l'ere exclusivement agro.pastorale ait disparu<br />
presqu'entierement" 1. De la sorte, le "fanta!]" se veut une propriete poetique peule,<br />
indissociablement liee a une ethnie.<br />
Les groupes sociaux ont inspire aussi d'autres genres aux membres de leur<br />
corporation, on peut citer le "Yelaa", chant de femmes "sebbe" ou guerrieres, entonne au<br />
cours des veillees d'armes. Ces amazones cherchaient it piquer la fiene masculine. Le genre<br />
fut confisque par les griotes et il passa par la meme occasion des "sef)be" aux mains<br />
sanglantes aux "awlube" aux voix d'or.<br />
A Jeur tour les personnes de condition servile ont cultive une fomle : le<br />
"Naale", presque disparu aujourd'hui grace aux efforts conjugues de ['Islam, et de la<br />
colonisation qui aboutit a J'emancipation des anciens captifs.<br />
Ce panorama des genres traditionnels, loin d'etre exhaustif, donne cependam<br />
une idee de ces formes litteraires, les extraits cites degagent les caracteres essentiels des<br />
genres des groupes sociaux aussi bien en ce qui conceme le fond que la forme. Mais la<br />
grande originalite demeure ici la co-existence de ces genres avec d'autres qui transcendent les<br />
clivages sociaux. Ce phenomenes s'explique sans doute, entre autres, par le caractere ouvert<br />
de la litterature pulaar.<br />
2°) LES GENRES COMMlJNS<br />
lis comprennelH la poesie sous ses diverses formes, les recits mythiques et<br />
initiatiques, les epopees, enfm Ies genres mineurs (conte, proverbe, devinette, jeu de mots).<br />
a) La Jloesie.<br />
Fonne tres populaire, la poesie se dit en pou\ar "gimol" ou "jimol" (chant) ; le<br />
poele est appele "gimoowo" OLl "jimoowo" (chanteur). Chant et chanleur designent ici poesie<br />
et poete et realisent J'ideal poetique verlainien "de la /llusique avant [ouce chose", e'est-a-dire<br />
LIne voix, des sonorites agreables au coeur et it I'esprit. Cette conception de la poesie a<br />
favorise des formes tres diverses : allant des creations pastorales aux compositions poliliques<br />
et domesliques.<br />
Gucyc (T.Y.), op. cit., p. 60.
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 77<br />
En ce sens, l'une des formes poeliques peules Ies plus anciennes semble clre<br />
le "jaargol" (pluriel "jaargi") : long poeme consacre aux bergers, aux piiturages et aux<br />
troupeaux, compose et chante par Ies bergers. A premiere vue, il apparait camme I'equivalenl<br />
de l'eglogue ou de la bucolique, mais le "jaargol" s'en distingue puisqu'il chanlG<br />
generalement la trilogie fonnee du berger, du mouton et du piiturage. C'est ainsi qu'un<br />
specialiste du "jaargoI" declare:<br />
"Kono ked'ee ketlee seed'a jibi Pennda<br />
fila lni layana ITlOn haala nalawna.<br />
Ka wonaa binndol d'ereeji<br />
Ka wonaa deftere guraana" I.<br />
"Mais ecoulez, ecoutez un peu Djibi Penda<br />
le vous dirai des mats aussi clairs que le jour 2<br />
Des !motsl qui ne proviennent pas de l'ecriture des pages 3<br />
Qui ne proviennenl pas non plus de la vuIgate Coranique"4.<br />
Les "jaargi" n'ont pas une forme fixe; des Iors le poele varie les stances en<br />
Ieur donnant la longueur qu'il veut. Inlerroge sur sa technique de composition, notre poete<br />
affirme :"c'est en cheminant seuI, dans la brousse, derriere mes moutons, que mat a mot,<br />
selon Jeur parente phonetique, je compose mes jaargi". Son statut d'illetlre et d'autres<br />
enquetes complementaires, aupres d'autres bergers, fondent son assertion.<br />
Une autre fomle poctique, eultivee generalement par les femmes, fait pendant<br />
au "jaargol" c'est le "mallol" (pluriel, malli). 11 s'agil d'un poeme de longueur variable,<br />
mains structure que le "jaargoI". Le mat "mallol" vient du verbe "mallude" qui signifie<br />
medire, dire du mal de quelqu'un atravers des allusions. La lhemalique du "mallol" coneerne<br />
la critique sociale, la satire des moeurs, tandis que son style comprend de longues<br />
descriptions, des comparaisons outrees et generalement grossieres. Manies par les griots, les<br />
"malli" deviennent une amle redoutable, et le noble ("dimo") qui Ies a mal reyus lombe sous<br />
leurs foudres. De mcme l'epouse qui mallrise le genre reduit sa eo-epouse a l'impuissance :<br />
car, comme le definissait un griol, le mallol "lu sais que c'est loi, je sais que c'esl loi.<br />
l'assistance sait que e'est toi, si tu te plains je !lie tout." En realite le "Illallol" decril.<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Djiby Penda Ba (28 aIlS), berger. professionnel du j{wr/iol domicili" "<br />
Gourcl Famina, petit village de Gavinanc, Nioro du Sallel, Mali.<br />
Mol. a mat: de la parole du jour.<br />
Le pocmc se dcrinil commc une ocuvrc clrangcrc a (oute influence ccrilc,<br />
11 s'agil d'ul1c pocsic csscnticllcmcnl proranc, non islamiquc.
CIIAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
compare, mais rduse de nommer la personne visee ; ainsi, celle-ci, faule de preuves, doil<br />
sOllffrir sans parler. 11 en est ainsi de ce personnage designe par Maydi Mamadou :<br />
I. " Maydi Mamadu dawi tawtani<br />
2. 0 tikki 0 ylllbili<br />
3.0 jippi 0 salmini, seef yalli I mo haa 0 woyi<br />
4. 0 wii omo hOOla 0 buvviima haa vuuli<br />
5. yum makko Jooroy conndi dekka yulnde suyi<br />
6. oon jamma s02 fijoyaani soko yinnnbe3 be kuli<br />
7.0 jooePiima noon haa weeli tawi melle ePee cuyi<br />
8. 0 ePaaniima noon haa booyi dckka naangenge wuli<br />
9. Nde gamoomi salmindemo tawi kaC]ko ne 0 huwii.<br />
]o. baamakko wi Aamadam wnyi<br />
] J. mbi mi guycPo kala yo femmbe sunna mo Hammadaa"4<br />
I." Maydi Mamadon pani le matin laux champsl ne lrouva rien la manger] a<br />
son tonr.<br />
2. 11 se ff\cha et bouda.<br />
3. II revint, salua le chef qui I'inslllta tant qu'i] se mil apleurer<br />
4. il voulut rentrer chez lui, se cogna conlre la pone el saigna.<br />
5. Sa mere mit son cous-cous sur le feu, mais la passoire etailmal posee.<br />
6. Celle nuit il n'alla pas jouer, ce qui alanna 10111 le monde.<br />
7. 11 resta aillsi jusqll'au malin, sa coIere lOmba.<br />
8. 11 dormit pendant longtemps, qlland il se leva le solei! dardait ses rayons.<br />
9. Aussi, 'Iuand je suis revenu lui dire bonjour, il avait "chie"<br />
10. Son per" lui dit: "Amadou mon rils, tu dais te raser".<br />
11. A quoi, j'ai repondu "que celui qui a des cheveux, llongs] se rase selon<br />
les preceples d'Amada"5<br />
Les deux derniers vers, en se referant aux preceples du Prophete Mohammed,<br />
ratwchent le "mallol", forme profane, aux autres formes de la lillerature islamique. Sans<br />
I<br />
2<br />
:><br />
4<br />
5<br />
VarianlC de : Jl.Jtti.<br />
Variante de: o.<br />
Variante: yil1loe au lieu de: yimmoe.<br />
Falimata War, mellagere (34alls). Nioro du Sahcl (Mali).<br />
11 y a la IIl1e earaCierislique de I'exces du zele
CIIAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 80<br />
on se merie toujours d'eux car on ne sait jamais de quel cote peuvent venir<br />
Icurs "coups bas" I.<br />
L'un des buts poursuivis par le mbooku reste "I'agencement savant des mots<br />
cn fonction des jeux phoniques 2 :<br />
"Kippo hippitil noo ngu" ( c'est kippo qui a inaugure le genre)<br />
"To Buuba Fiiji fiji mbooku" (BofJba Fidji a chante le mbOkou)<br />
"Fiji fijdi e Daadaru" (Fidji a chante en compagnie de Dfidiirou).<br />
Ces caracteristiques rappellent cclles des poemes pastoraux3 dissemines le<br />
long des roules de migrations peules, qui les ont menes des rives du Nil aux bords de<br />
l'Atlanlique, en passant par le Sahara. La poesie peu!e lraditionnelle en s'exprimalll atravers<br />
Ies "jaargi", "malli" "mergi", cn privelegialllles "jammooje n'a i" reprcnd, aun autre niveau<br />
le triptyque cyclique des epopees tradilionnelles : la lance, la vache, la femme.<br />
Un autre genre s'est impose a la Iiuerature pulaar : le "Ieele". Silue au<br />
carrefour des genres lraditionnels et de formes islamiques, le "leele" pose de serieux<br />
problemes de classemenl. La declamation de longs passages de la poesie arabe ante<br />
islamique, dans la cadre de chants d'evocation nostalgique en poular, rend difficile<br />
I'elablissement d'une laxinomie derinitive, et fait plulot penser a I'exislence d'une forme<br />
mixle. Cepcndantla genese etl'evolution du "leele" mililenl en faveur d'un genre puremenl<br />
10ucouleUf.<br />
Ne au Foula-Toro vcrs la fin du XYllleme siecle, mais propage par un poele,<br />
Sidi Cherif, vel's les annees 1920, le "leele" se veut un genre commun a10us les "haal pulaar<br />
en" contraircmenl aux genres specifiques. Deux theories s'opposent pour dormer le sens<br />
etymologique du mot "!eele". La premiere se fondant sur la simililude existant entre "leila" (la<br />
2<br />
3<br />
OUlllarou Dalil (A.), an. cil.,p. 4.<br />
Nous devons les exclllples suivarlls 11 Abdoulaye Ournarou Dalil, op. cit.<br />
Pour une clude plus dctaillce de la poesie peule, nous renvoyons le lecleur<br />
aux dassiques peuls el 11 quel,!ues publications rccenles dOI\\ :<br />
Egllchi. (P.K.), "Beeda : a Ful()e Mbooku poem", ill Africa. I, Senri<br />
Elhnolngical studies 1, Osaka, 1918, p 55-88.<br />
Erllllann.(V.), Booku, dlle Iillerilrisch-lIlusikalische Gallullg lier Ful!>e lies<br />
Dialllare (Nvrli-Kalllerull). Berlin. 1979.<br />
Labalul. (R). , Challls lie vie cl lie beaule peuis recueillis chez lies peu/s<br />
Ilolllades du Nord-Callleroull, Paris, 1974.<br />
Seydou, (C), "Les jalllmoojc na'i, pocmcs pastoraux des peuls du Mali", ill<br />
Bullelin des ElUdes africailles lie /'lNALCO. vol I, nO I, Paris, 1981, p 133<br />
142; et vol 1, nO 2, 1981, p. 123-134.<br />
Scydou (C), "Jcux de sons, de mOIS el d'espril : un IIlcrgol du poelc malien<br />
Njiido Kawdo", ill 8ull. des Ell/des afr. de l'lNALCO, 11,4, 1982, P 131-142.
CIIAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 8 I<br />
nuil, en arabe) et "leele", conclut que "leele" provient u'une ueformation ue "leib", u'autam<br />
plus que le genre implique ue longues citations ues oeuvres ues poelcs ame-islamiqlles l<br />
(lmrul Glw"iss, Anlar Ben Chaddau, enlre autres), uont la lhemaliqlle concemait la nuil, le<br />
vin, l'amollr. La ueuxieme lheorie soutienl que le "lee!e" eSlun genre essenlicllemenl pulaar,<br />
issu uu "Sawga", musique ue guitare servaul u'accompagnemenl a la declamalion dc<br />
cenaines epopees Cl legenues. Ces ueux lheories conliennenl chacune une pan ue verile.<br />
En realile, tous Ies specialisles uu "leele", Ies Senegalais, Sidi Cherif de<br />
Thilogne, Samba Diop de Kanel, Abuoulaye Thienel de Bokki, Alllauou Koli Sail ue<br />
Tiguere, ainsi que Ieurs homologues mauritaniens Dcmba Debya ue Kaedi ... - emaillelll Ieurs<br />
chanls d'extrails en arabe souvenl deformes, puis evoquenl en poular le charme qui lie ueux<br />
etres el la beaule ue la nuil. Youssouf Gueye nOle a cc propos : "Pour nous, le lele, c'esl<br />
d'abord el surlout le chant ues elllts u'ame. Cesl I'evocation de souvenirs; souvenir u'un<br />
elre aime, du pays natal; souvenir aussi d'ev€nements paniculieremenl heurcux...Ces!<br />
I'expression de la uoswlgie quanu Ies lOUrnlCtllS de I'exil (volontaire ou non) scrrenlle coeur<br />
Cl que I'appel UU pays se fail laucinant et obseuam. Ces! probablemenl ce qui donne celle<br />
lonalite Iyrique remarquable it tous les challls ue lele"<br />
Le "leele" se SlrllClllre autour de deux panies : nne forme invariable,<br />
qu'attestelll par consequent toules les performances du genre, Cl une autre variable ou<br />
s'exercent l'esprit u'improvisalion Cl la crealivile Ull pobe. L'invariant que voici revielll uans<br />
presque lOutes les declamations uu "leek":<br />
"Miijo am koy tlurii e lobbo yaay mum gOOtO<br />
Finndinee fiya mooso, hayliloo jawe nuilla<br />
Mo sappo uobbe, mo joy me!Jkellee ji,<br />
Mo kootone lonullbe"<br />
"Ma pensee va vers la belle, la mere ue I'unique<br />
Celle donI le reveil s'eclaire ue sourire, et qui sonne ses bra(;e!els<br />
Aux uix boucles u'oreille, de cinq mlnqals 2<br />
Aux boucles d'oreilles uoublees"<br />
La panic variable pennel ,Ill poete de donner librc cours a son lyrisme<br />
personnel. Cesl acejeu que se livre Abtloulaye Thierlel Fall, en evoquanl son village nalal :<br />
Bokki.<br />
1 Encyclopedie de l'Is/am, Lcydc, 1912.<br />
2 Mcsurc d'or 1:t1 arabc, correspolldanl a quclqucs grammes.
CIIAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
profonde.nelll rural, la "noblesse d'epee" qui s'est lentement diluee dans la masse dont die<br />
ne se distingue plus souvelll que par le souvenir de son origine pastorale et sa morgue,<br />
comme la "noblesse de leltres" qui s'est rapidement assuree une place de choix grace a un<br />
solide support politico-economique (en procedant ade brulales et avalllageuses refonnes<br />
agraires: 1778, 1795, 1816, ecL ..) n'ont jamais reussi aeclipser tout a fait la vieille et<br />
traditionnelle "noblesse terrienne" d'avant l'ere des "Satiguis"l.<br />
A cette structure originale du "leele" qui permet au poete de repeter une<br />
tradition (invariant), d'innover (improvisation), s'ajoutent les "jaraale", motifs poc5tiques au<br />
souffle puissant et a l'elevation stylistique relllarquable. Ce SOIll ces tableaux qui evoquelll<br />
les lieux dits dans le "leele". Du reste, nous avons rencontre les "jaraale" dans les genres<br />
specifiques et nous faisions remarquer que ces breves compositions, en transcendanl les<br />
genres, reactualiselll l'unite des formes.<br />
11 convient aussi de s'altarder sur la declamation de longs passages de la<br />
poesie arabe ante-islamique precedant la composition en pulaar. Ne avec la theocratie du<br />
Fuula-Toro, le leele devait perpetuer les genres specifiques sans IOmber dans la profanation.<br />
Les exigences de la theocratie pousserent les poetes acreer des oeuvres reconcilialll lemes et<br />
illeltres, marabouts et hommes du peuple. Cela explique la tolerance de celte sorte de<br />
composition mixte, Olt l'arabe, defonne par un accent defectueux, voisine avec des envolees<br />
Iyriques toucouleurs de hatlte tenue.<br />
Ainsi, ne en pleine theocratie, le leele apparut comllle un genre<br />
"democratique" qui prit tres vite en charge les preoccupations de toutes les couches de la<br />
societe. De nos jours, Samba Diop, Amadou Koli Sa1l 2 , Abdoulaye Thiend Fall, constituent<br />
les tenors du leele, Illais contrairement aux peres fondateurs que sont Sidi Cherif, Demba<br />
Debya, les artistes contelllporains selllblent river leur art ades considerations plus lucratives<br />
qu'eslhetiques, engenuranl une sone de deperisselllent du genre, mine aussi par la<br />
concurrence des formes modernes. Cependant, la litterature pulaar possede d'autres genres<br />
dynallliques qu'elle a conties a la memoire et qu'e11e ne u'ansmet que par initiation.<br />
Dans ee sens les "janti" ou recits mythiques et initiatiques (au sing. jantol)<br />
uccupenl une bonne place au sein des productions peules, d'autalll plus que, pour le Peul,<br />
l'univers pose a l'holllme une s6ie d'enigmes, et cache son vrai sens derriere une serie de<br />
vuiles et de mysteres que l'initiation seule permet de decouvrir. Des lors un code<br />
extrememenl riche fut elabore par les grands maitres, et lransmis par une methode<br />
2<br />
Gueye (T. Y.),. op. cir., p. 48.<br />
Amauou Koli Sail fut un uisciple ue mon perc qui I'initia au Coran. Cc fait<br />
molllre le earaetere "totalitaire" uc l'iueologie iSlamiquc qui soumet tout ii<br />
sa loi, elant donne que l'Islam est "din" :religion, et "dawla": cLat.<br />
83
CHAPITRE [] - LA FORMATION DE L'EPOPEE 86<br />
Pour comprendre les "junniri", il convient de s'initier aleurs codes; des codes<br />
en liste ouverte. Ce langage secret prod:de par defoffilation du langage ordinaire tel que le<br />
montrent les exemples que nous avons envisages. Le genre continue d'etre cultive de nos<br />
jours au Fouta-Ojallon. C'est ce qu'attestent ces exemples recueillis aTimbo l aupres d'un<br />
informateur:<br />
"Hande Kadi Sukaabhe bhen arii" (forme ordinaire)<br />
(Aujourd'hui encore les jeunes gens sont venus)<br />
"Kande Kadi akaabhe bhen surri"<br />
"Kande diha akaabhe bhen surri" (formes inversees)<br />
Les procedes de codage sont tres varies et le locuteur peut intercaler, apres<br />
chaque syllabe, un terme choisi par le groupe auquel il appartient, c'est la suffixation<br />
parasitaire. Soit le terme "Kuma" choisi par un groupe de jellnes :<br />
"Sukaabhe bhen arii" (forme ordinaire)<br />
(les jeunes gens sont venus)<br />
Sera dit par le locuteur<br />
"Kumasu kumakaa kumabhe kumabhen kuma'aa kumarii kuma." (forme<br />
codee ou esoterique).<br />
Certains poularisants ont assimile les "junniti" a!'argot en se fondant sur les<br />
inversions initiales et desinentielles. n nous semble hiitif de conclure aune identification des<br />
deux genres, !'argot n'obeissant pas au mecanisme de creation des langages artificiels que<br />
sont les "junniti". Meme s'il deforme la langue courante, l'argot s'appuie sur un code etabli,<br />
a la difference des "junniti" qui se definissent comme, a la fois, des inversions, des<br />
renversements, des langages secrets ou esoteriques.<br />
O'une maniere generale, le cadre socio-contextuel qui engendre les "junniti",<br />
leurs procedes de creation, leurs fonctions, mettent en relief des dialectes sociaux voisins des<br />
argots, mais tres specifiques.<br />
b) Les "tinndi" ou "talli" (Ies contes) ; les "cifti" (devinettes); les "puri"<br />
(proverbes). Genre universel s'il en fut, les contes se retrouvent sous tous les deux. Partout<br />
.les memes, mais sous une forme differente, les contes developpent, atravers une culture et<br />
une civilisation qui leur donnent leur couleur locale, une leyon de morale universelle. La<br />
Mission de recherche en Guince du 18 Mars au 7 Avril 1988.
CHAPITRE IT - LA FORMATION DE L'EPOPEE 87<br />
litterature poular ne fait pas exception 11 la regie. les "tinndi" signifient "paroles du soir" ; une<br />
coutume voulant qu'on conte la nuit, la transgression de cette regIe pouvant entrainer un<br />
/' /'<br />
malheur.<br />
A la difference de l'epopee reservee a des specialistes, les contes ne sont<br />
l'apanage de personne et peuvent etre dits par n'importe qui, bien que les femmes se les<br />
approprient progressivements. Le Pere Meyer, auteur de plusieurs recueils de contes et d'un<br />
recueil de contes toucouleurs inedits l l'a note: "Au cours d'une veillee, la parole circule et<br />
celui qui veut conter prend la parole; il n'est pas rare cependant qu'un conteur ou qu'une<br />
conteuse, plus doue, fasse l'unanimite et soit sollicite pour parler le plus longlemps possible.<br />
Il semble que ce soit surtout les meres qui disenr des comes pour leurs enfants"2<br />
La thematique des conres peuls, toume aUlour de l'hol1ll1le, de la societe et des<br />
liens les unissant. Ainsi la vie et ses aleas, le danger, le malheur, la dCmesure - sont<br />
dramatises dans des scenes tres vivantes. De mel1le le triomphe du bien sur le mal revient<br />
dans de tres nombreux conres. La critique de la force brutale, du pouvoir arbitraire,la magie,<br />
la jalousie ou la passivite absolue alimentent une veine assez puissante : " Toute une<br />
humanite se joue et se represenre dans le conre : la jalousie des co-epouses, les tensions a<br />
l'interieur des familles et au sein de la societe, la menace du d€sordre, mais aussi la<br />
fraternite, le courage dans l'epreuve, la victoire du faible sur le fort, de la ruse sur la brutalite<br />
et, plus profondemenr, de l'etre sur le paraitre3<br />
Sur le plan structurel, le conte se presente comme une sorte de dissertation<br />
bien menee : un recit precede et suivi d'une formule. En effet, le recitant commence toujours<br />
par "wonko wonnoo d'oo" (quelque chose etait ici) et acheve son conte par "diwa d'oo daka<br />
d'aa" (saute d'ici, s'accroche la-bas). Ces formules stereotypees font du conre une parole<br />
transmise et a transl1lettre, qui des lors saute d'ici, s'accroche la-bas. Cet enonce met en<br />
evidence le caractere profondement communautaire du genre, qui n'appanienr a personne en<br />
propre, mais a la chaine de transmission appelee a l'enrichir. En outre, la plupart des conres<br />
ont une partie chantce qui alterne avec le recit, ce qui leur donne I'allure d'une chante-fable,<br />
et dans certains cas, le conteur exige un choeur car la question initiale :"won ko wonno d'oo"<br />
doit rencontrer la reponse d'un membre de l'assisrance "Ena wona, wonataa ko tinndol" (ce<br />
sera, ce ne sera pas, c'est un conte)4. Cet echange de propos libere le conreur, car il sait a<br />
present pouvoir compter sur la complicite d'un public. Cet echange de propos, plus<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Meyer (G.), Paroles du soir. contes toucouleurs du Senegal orienwl,<br />
Goudiry, Avril, 1979.<br />
I d., p. 11 (Introduction).<br />
Id., p. Ill.<br />
CClle traduction littcralc signifie : "vrai OU faux. C'CSl un conte". Ainsi<br />
I'univers du COllIe epouse tout le champ du possible.
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
Reponse "les pieux d'une concession"<br />
4. " Un petit homme aux cris multiples" Reponse"le fusil"<br />
5. "Un petit homme aux nombreux habits" Reponse "I'epi".<br />
A cote de la devinette qui instruit et plait, le "jaanis" ou jeu de mots passionne<br />
aussi Ies participants aux veiJlees familiales; il se caracterise par une pauvrete thematique<br />
s'opposant 11 une extreme richesse formelle. Le "jaanis" traduit 11 ce titre, la capacite<br />
d'invention et la libre improvisation par association de rythmes et sonorites. Soit cette<br />
composition de Alxloulaye Diack :<br />
"Aset, Alet, Altine, Talata, Taltalol, jaas, ndakeeso, saara kay, saJlasalkaa,<br />
woy Samba teJlo e puccu am" I.<br />
"Samedi, Dimanche, Lundi, Mardi... intraduisible = jeu de mots...<br />
oh Samba descends de mon cheval."<br />
Autre genre, la chanson ou "njimri". FOffile de la litterature orale, la chanson,<br />
du fait qu'elle exprime toute I'importance de I'oralite, occupe une place de choix dans I'art de<br />
la parole. Parfaitement elaboree et meticuleusement agencee, "njimri" qui signifie chanson,<br />
poesie, est glosee par "paroles belles au coeur et 11 I'esprit". La litterature peule fourmille de<br />
chansons composees et declamees au gre des evenements qui jalonnent le cours de la vie de<br />
I'homme. Leur inventaire et leur analyse exhaustive necessitent une elUde speciale. Nous<br />
nous contentons ici de citer les "njimri"<br />
(au singulier "jimol" ou"gimol") les plus caracteristiques :<br />
-Ies "mergi" (au sing" ou "mergol")<br />
-Ies "malli" (au sing "mallol")<br />
- les "jimd'i moorol" ou chants de tressage<br />
- les "jimd'i tuppo" ou chants de tatouage<br />
- les"jimd'i sottoooe" ou chants de pileuses de mil<br />
- la JlO6sie esoterique<br />
- Ies chants des inities<br />
- la poesie de circonstance composee 11 partir du fait divers le plus banal (par exemple au<br />
cours d'une conversation ou lors d'une ceremonie familiale).<br />
Au vu'de ces cas, il apparait que la chanson ou poesie impregne la vie du Peu!<br />
et confere 11 sa litterature une teinte Iyrique que le parler des Peuls du Fouta-Djallon met<br />
Recueil de tradition orale, Nouakcholl, Juin, 1984, p. 50.<br />
92
CHAPITRE IT - LA FORMAnON DE L'EPOPEE 97<br />
"Mo walla ardinaa galle, so feewii balle Kan e bolle, 0 yamirii oesngu d'een<br />
golle, dan ee yaakaare tilIaahi" I.<br />
"Celui qui jouit du privilege d'etre chef de famille, s'il ordonne actes et<br />
paroles [meritoires], recommande cene voie a sa progenimre, aura de l'espoir<br />
pres d'Allah".<br />
Apres Allah et son Prophete, les compositeurs chantent aussi Cheikh Ahmed<br />
Tidjane, le fondateur de la confrerie tidjane, et son disciple Cheikh El Hadj Omar Tall,<br />
propagateur de cette voie par un jihad celebre. Le succes de la confrerie explique en partie la<br />
composition d'odes a la gloire des Cheikhs mais, surtout, l'attachement du talibe au Chelkh<br />
semble le motif decisif. Au Fouta-Toro "Cheikh Ahmed Tidjane, est la troisieme figure de la<br />
religion. Cheikh Oumar Tall en est la quatrieme. Leur chapelet est dans toutes les poches.<br />
Leurs noms sont sur toutes les Jevres. Leur amour est dans tous les coeurs. Ici le croyant<br />
n'est totalement credible que s'il est "tidianyanke 2 :<br />
"kUlbunaa yaa sayku taanum nulaad'o men<br />
waliyaafle fof njood'aama oure maa e dokke maa !<br />
walaw laabi fof nguddama ilIa d'arika maa !<br />
Mi yanta e oeen aaleeoe daraniioe wirdu maa !<br />
Noddooe AlIa oe ina njaaraAama daa."<br />
"Oh notre Pole, oh Cheikh (Tidiane), Petit-fils de notre Prophete 3<br />
Tous les SaintS admirent tes dons et ton charisme.<br />
Puissent toutes les voies etres fermees, exceptee ta voie<br />
Afin que je puisse me joindre aux ficteles pratiquant ton "wird"4<br />
Ceux-la qui invoquent Allah et louent [le Prophete] Mohammed."<br />
Cheikh Tidjane est confondu ici dans une meme louange avec le Prophete,<br />
son aYeul. Le poeme, par dela l'apologie, rattache la confrerie a l'orthodoxie, conformement<br />
a l'enseignement du Cheikh Ahmed At-Tidjiine .<br />
Ensuite El Hadj Omar semble avoir inspire les "beytoooe" toucouleurs au<br />
moins pour deux raisons : pour avoir ete en meme temps un digne fils du Fouta-Toro et un<br />
/ /<br />
--'-----'---<br />
I<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Id.<br />
Gueye (T.Y.), op. Gir., p. 95.<br />
Le Cheikh Ahmed Tidjiine est un descendant du Prophete.<br />
Le "wird" ctesigne des prieres specifiques il une confrerie.
CHAPITRE II - LA FORMATlON DE L'EPOPEE 98<br />
propagateur zele de la Tidjanyya. Aussi, le plus celebre "beytol" ala gloire de Cheikh Omar<br />
fut-il compose par son disciple Mohammadou Aiou Tyam. 11 s'agit d'une biographie<br />
hagiographique au titre symbolique : La vie dEI Had} Omar Qacida en poular I, qui relate le<br />
jihad omarien. C'est aussi une epopee contenue dans un poeme de pres de 1200 verso A<br />
l'instar de Mohammadou Aliou Tyam, un autre disciple du Cheikh, originaire de la vallee du<br />
Fleuve, precisement aThioubalelle dans le Lao, Hammat Samba Ly2, composa un fragment<br />
epique d'assez belle facture :<br />
"WaliyaafJe alIa ardinaa kay ko kodda Adama<br />
sayku so jolaama dawa Halwaar 0 nalla to Makkataa<br />
so hiiri 0 himda 0 waaltoya Maadinataa<br />
Tawa koycPe mum muusaani yaadu 0 rampataa."<br />
" Les Saints ont pour guide le Demier-ne d'Adama.<br />
Si Cheikh [Omar] le veut, il quitte Halwiir le matin et passe la journee a la<br />
Mecque.<br />
Le soir, il se met en route pour passer la nuit aMedine.<br />
Alors que ses pieds ne sont pas fatigues, il ne se fatigue point de marcher"<br />
La Mecque etant distante de centaines de kilometres de Medine ne peut etre<br />
reliee, a pieds, plusieurs fois par jour que par un etre extraordinaire. C'est I'aspect<br />
miraculeux d'Omar qui a surtout frappe l'imagination des poetes. Ainsi les "beyti"<br />
apparaissent-ils comme un complement naturel du proselytisme maraboutique ; ace titre, ils<br />
ont popularise les points essentiels de la doctrine islamique et confrerique. Us ont egalement<br />
voulu combler le vide laisse par certains genres profanes, en prenant en charge tOUle la satire<br />
sociale. Cette litterature islamique, puisant dans les ressources de l'ecriture et de romlite,<br />
s'est constituee comme une ecole tres vivante:<br />
1<br />
2<br />
Gaden (H.), op. cit.<br />
Tene Youssouf Gueye. dans "son uuvrage cIle en referenee, p. 98 et<br />
suivanles, eommel une erreur en allribuam la paternite de cc poeme a· Ali<br />
Hammadi Ali. Du reSle, nous avons deja lranscrit, lraduit, an note et analyse<br />
ce fragment epique cf DIENG (S.), These de Doctorat de IIIeme cycle, pp. 383<br />
a 432. La meprise de Gueye provient d'une confusion entre aUleur et<br />
interprete.
CHAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
"Elle soutient la resistance desesperee que les milieux culturels traditionnels<br />
opposent dans les vi lies et meme dans les campagnes al'aetion corrosive de la<br />
societe de consommation er ses aspects negatifs" 1<br />
Les "beyti", par leur anciennete et par leur dynamisme, traduisent ala fois la<br />
grande capacite d'adaptalion de l'lslam el le caractere inventif des marabouts et des<br />
musulmans peuls.<br />
2°) LES "GUIRIS" ET LES COMPOSITIONS DES" ALMU'B'BE NGAY"<br />
Ces deux genres de la litterature islamique pulaar, bien que voisins, sont<br />
cependant distincts. Cultives par des disciples en fin de cursus, "guiris" et chants des<br />
"almu66e ngay" ont connu une evolution tres differente. Les "guiris" designent des<br />
compositions collectives d'etudiants celebrant les louanges de leurs meilleurs maitres. Ces<br />
poemes etaient declames la veille du depart definitif des eleves, lors de la remise des<br />
dipl6mes "Ijaza" aux impetrants. Ils etaient
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 10 I<br />
XYIIeme siecle, et surtout la condition de la population: insecurite, epidemies, crises. Sur ce<br />
plan, le Fettachi permet d'apprecier le contexte socio-politique qui a precede et permis<br />
['emergence du royaume bambara de Segou et de ['empire peul du Macina. On ne dira jamais<br />
assez ['apport immense de ces deux chroniques et les services inestimables qu'elles rendirent<br />
aux premiers redacteurs de I'histoire de l'Afrique.<br />
Le pays toucouleur compte aussi ses chroniques dont la plus celebre demeure<br />
celle de Sire Abbas Soh. En se fondant sur deux manuscrits du XYIIIeme siecle, ce clerc<br />
toucouleur redigea les chroniques du Fouta Senegalais l qui pernlettront ala population du<br />
Fouta de renouer avec ses origines surtout mythiques, Soh ecrit par exemple que:<br />
ainsi que leurs souverains.<br />
"Le premier prince qui regna sur le FGta du Toro comme roi remarquable et<br />
connu s'appelait Dya Ukka ou Dya Ogo, originaire d'une localite du nord de<br />
la Syrie appelee Ukka"2<br />
Puis suivent les principaux Peuls qui habiterent la valIee du fleuve Senegal<br />
Mais Cheikh Moussa Kamara demeure l'un de plus grands chroniqueurs du<br />
Fouta-Toro et son ZuhGr AI-Basatin3 (les fleurs des jardins) apparait, ace titre, comme un<br />
chef-d'oeuvre. Dans cet ouvrage, l'auteur indique que les dimensions du Fouta s'etendaient<br />
de la vallee du fleuve aux confins de l'Adrar et du Tagant. Ce vaste terriloire, peuple de<br />
Sereres et de Soninkes, fut, avanl, habite par des rois mythiques : Dyii Ogo, Manna... Le<br />
livre fourmille aussi d'autres renseignemenls historiques.<br />
Outre ces grands chroniqueurs, la vallee du fleuve Senegal regorge de<br />
manuscrits divers allant de I'epopee ades traites d'histoires, mais surtoUl se definissant<br />
comme des chroniques. Ces ecrits se fondent essentiellement sur la tradition orale, surtout<br />
sur les histoires de famille, car chaque groupe social, chaque famille garde jalousement son<br />
passe. Des lars la valeur scientifique de ces ecrits ne peut resulter que de leur critique interne<br />
et externe.<br />
4°) LE "KHUTBA " OU SERMON<br />
II ne s'agit pas a propremenl parler d'un genre, mais plut6t de forme fixe.<br />
Pour ramener le fidele sur la voie droite, les marabouts, appliquant la tradition prophetique,<br />
2<br />
3<br />
Soh (S.A.), Chroniques du Fowa Senega/ais, Traduction M. Delafosse, Paris,<br />
1913.<br />
Id, P 15.<br />
Voir Fonds Cheikh Moussa Kamara, IFAN, Dcpartcment d'lslamologie.
CHAPlTRE Il - LA FORMATION DE L'EPOPEE 102<br />
furent obliges d'ajouter aux sennons du Prophete d'autres compositions plus adaptees it leur<br />
epoque et it leur milieu. Il faut ajouter que ces innovations se rencontrent aupres des<br />
marabouts erudits, la grosse majorite preferant reciter les sermons du Prophete ou des<br />
Cheikhs andalous et persans, sans rappon immediat avec les preoccupations du moment. Au<br />
Fouta-Toro, on peut citer le "khutba" de Nguidjilone celebre pour sa consistance, et pour sa<br />
haute portee theologique. Christiane Seydou, citant ceux du Nigeria, analyse ainsi leur<br />
fonne:<br />
"Mais c'est incontestablement dans les prones que se rejoignent pour se<br />
combiner le plus heureusement, le symbolisme acactemique de la poesie<br />
mystique et l'imagerie populaire traditionnelle qui lui redonne vigueur et sens ;<br />
richesse de I'imagination artistique et deferlement du verbe poetique<br />
s'epanchent it profusion pour brosser tel tableau des Damnes dans la<br />
Gehenne, telle fresque du Paradis bienheureux. La Koutouba (koutba) de<br />
Sokoto et de Say en est un exemple fameux. Compose, al'origine en peul, ce<br />
prone du vendredi est encore plus connu par la traduction en arabe qui en a ete<br />
faite; il est encore regulierement recite al'office religieux du vendredi dans les<br />
mosquees du nord Nigeria et a Say, au Niger. Ecrit par Dan Fodio, il fut<br />
repris et remanie par Mohammed Bello, puis anouveau enrichi par Moodibbo<br />
Say celebre pour son art du takmis" I.<br />
Le "Khutba" permit aux lettres peuls de toucher une large part de la<br />
population: les sennons gagnerent 1es ignorams et les hesitants, tout en consolidant la foi<br />
des fideles.<br />
Au total, les fonnes islamiques de la Iitterature pulaar mettent en evidence le<br />
statut bi-culturel des clercs peuls tributaires des cultures peule et arabe. Leurs oeuvres font<br />
observer un passage continuel de l'oralite vers l'ecriture et vice versa. En conjuguam<br />
deliberement ces deux cultures, ils traduisent leur universalisme et leur liberte, habitues<br />
qu'ils sont a courir derriere la vache le long de vastes teITes herbeuses ou deseniques.<br />
L'usage de la plume transforma !'Islam "progressivement en religion populaire et en force<br />
nationale et politique"2. Et les theocraties surem en tirer pani.<br />
2<br />
Seydou (C.)," Panorama de la lillcrature peule", in Bulletin de I'IFAN, T.<br />
XXXV, Ser. S, nOI, 1973, p. 187. pp. 176-218.<br />
Sow (A. I.), "Notes sur les procedes poeliques dans la litterature des Peuls du<br />
Fouta Djallon" ,in Cahiers d'erudes africaines, n° 19, vol.. V, Paris, 1965, p.<br />
370.
CHAPITRE IT - LA FORMATION DE L'EPOPEE<br />
104<br />
Une autre etoile monte aujourd'hui au firmament de la litterature pulaar :<br />
Baaba Maal et son ensemble "daande leiiol", la voix du peuple. II s'agit d'un orchestre<br />
moderne qui utilise les instruments de musique occidentaux et fait de vaste tournees a<br />
l'etranger. Baaba Mal s'est specialise dans le "Yelaa" qu'il hisse en ce moment au rang de la<br />
musique moderne. Mais l'apologie melee au sentimentalisme vicient profondement les<br />
formes neuves, malgre l'exploitation de themes modernes par Baaba Mal comme le racisme,<br />
l'apanheid, l'immigration actuelle.<br />
6°) L'EPOPEE OV "DAAROL "<br />
Heritiere des formes modemes et de fornles pre-existantes de la Iitterature<br />
pulaar, l'epopee participe du renouveau et de la continuite. Declamee a I'apogee des<br />
differents genres, elle apparait comme le genre des nobles et comme le genre noble. Des lors,<br />
les gestes islamiques, en recuperant celles qui les ont precedees, se situent a un niveau<br />
superieur: l'epopee d'EI Hadj Omar s'efforce d'illustrer cela, puisqu'elle met en pleine<br />
lumiere J'intertextualite des epopees peules ainsi que les apports islamiques.<br />
Des lors, les affirmations de Christiane Seydou tendant apresenter l'epopee<br />
comme un genre que les Peuls auraient emprunte aleurs voisins, se revelent discutables : "Le<br />
genre epique tel qu'il se presente atravers ces textes, ne semble pas faire panie du patrimoine<br />
culturel traditionnel des Peuls pasteurs nomades tandis que, pour les Peuls sedentaires, il<br />
constitue l'une des bases les plus fecondes et les plus populaires de la litterature orale" 1. II<br />
resulte donc d'un emprunt :<br />
I<br />
2<br />
"Ces quelques points que nous venons de rappeler apparaissent comme autant<br />
d'indices tendant aprouver que l'epopee serait, chez les Peuls, le resultat d'un<br />
emprunt culturel"2.<br />
Mais la question gene, en realite, la grande specialiste du monde peul :<br />
"Mais si, au contraire, l'emprunt est non pas une excroissance culturelle,<br />
mais la reponse a une aspiration, qui vient combler une absence ressentie<br />
comme telle ou qui sert de revelateur aune realite existante et qui n'attendait<br />
plus, pour trouver une formulation explicitee, que le slJrgissement d'un<br />
./' schema organisateur, alors, on est plutot tente de/voir en cette espece de<br />
Seydou (Cl, Ham-Bodedio, p. 35.<br />
Id., p. 36.
CHAPITRE IT - LA FORMATION DE L'EPOPEE 105<br />
coYncidence "du hasard et de la necessite" I'une des manifestations les plus<br />
sures de l'authenticite culturelle" 1.<br />
Les arguments avances ne sont pas convaincants. Un inventaire des genres de<br />
la linerature pulaar revele que l'epopee appartient aussi en propre aux Peuls. Il n'est pas<br />
impossible que ceux-ci l'aient cultivee depuis les regions nilotiques. Des enquetes effectuees<br />
le long des pistes migratoires diront un jour ce qu'il en est. Mais d'ici la I'examen des<br />
epopees peules, du double point de vue interne et externe, leur comparaison avec les formes<br />
pre-existantes revele leur caractere eminemment autochtone.<br />
D'une maniere generale l'epopee 2 apparait comme un puissant miroir oil<br />
l'artiste reflete la societe, en meme temps qu'il y exerce avec bonheur son talent. Au terme de<br />
cene typologie des genres de la liuerature pulaar, on constate que ceue vaste production<br />
fourmille de genres et de formes qui, bien que voisines, accusent des nuances. Les vues de<br />
Paul Zumthor s'appliquent ici :<br />
"Une forme n'est qu'exceptionneJlement stable et fixe; eUe comporte une<br />
mobilite, provenant d'une energie qui lui est propre : a la limite et<br />
paradoxalement, forme egale force"3<br />
Il precise plus loin:<br />
" La forme n'est pas un scheme, qu'elle n"'obeit" it aucune regIe, car elle est<br />
regie, sans cesse recree, rythme "pur".<br />
Le terme genre est aussi ainsi glose : "certes, le tenne genre n'est pas sans<br />
danger. De toutes parts on met aujourd'hui en question le contenu : charge de valeurs<br />
conventionnelles propres a la culture occidentale "classique", il se prete mal a<br />
l'universalisation"4 Il ajoute :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
" Les genres n'ont finalement d'identite que dans leur contexte culturel ; les<br />
traits qu'y discerne l'analyse ne deviennent pertinents que par lui : rapport<br />
dialectique, que manifeste, le plus souvent, le vocabulaire usite dans le milieu<br />
>.// ,///<br />
Seydou (C.), Ham-Bodedio, p. 37.<br />
Voir a cc sujet la rccente synthcse assez remarquable de Daniel Madelenal,<br />
op. cir..<br />
Zumthor (P.). op. Cil.. , p.79.<br />
Id., p.47.
CHAPITRE 1I - LA FORMATlON DE L'EPOPEE<br />
caracterise, ces sources pennettent enfin d'apprecier son action politique, meme si dans<br />
l'esprit du jihad religion et politique s'interpellent. Eu egard acela, le rappel de cenaines<br />
donnees s'impose.<br />
107<br />
Ne a Halwiir)village situe a quelques dizaines de kilometres en amont de<br />
Pador, vers 1794, d'une famille maraboutique, Omar se fit remarquer des son jeune age par<br />
des dons exceptionnels. 11 faut signaler cependant que cene date de naissance, comme lOutes<br />
les autres dates significatives de sa vie, reste controversee. F. Dumont I la situe entre 1794 et<br />
1797 "I'Anonyme de Fez"2 n'en parle pas, de meme que la Qacida en pOlllar 3 de<br />
Mohammadou Aliou Tyam, le biographe panegyriste d'Omar, alors que Delafosse 4 et Mage5<br />
avancent 1797. Mohammed AI-Hilfiz 6 du Caire, ainsi que Delavignette 7 retiennent 1797.<br />
L'Encydopedie de l'Islam8 stipule 1794 - 1795.<br />
Mais en confrontant tradition orale et documents, on parvient adetenniner la<br />
date approximative de sa naissance : la tradition orale donne unanimement soixante- dix ans a<br />
Omar. Or si la date de naissance pose probleme, celle de sa mon semble connue :<br />
" La date de la mon du Cheikh est confirmee par les chroniques de Nema : " la<br />
meme annee (1280) , mourut Al Hadj Ornar, sur l'ordre de Sidia Ben Harnma<br />
Lamine, apres un long blocus"9<br />
Des lors, la date de naissance remonte aux environs de 1794, compte tenu du<br />
decalage existant entre les mois solaires et les mois lunaires.<br />
Une autre indication renforce cette conviction: la tradition orale fait co'incider<br />
la naissance d'Omar avec la bataille de Bongoye lO opposant l'Almamy du FOllla, Abdel<br />
Kader Kane, au Damel du Cayor Amary Ngone Ndela, en 1210 de l'hegire, soit 1794. Notre<br />
chroniqueur, Niilgane II precise que l'armee de I'Almamy sur la route du Cayor passa par<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
8<br />
9<br />
1 0<br />
1 I<br />
Dumont (F.), L'Allli-sullall ou AI-Hajj Omar Tal du POUla combattafll de la<br />
foi, Dakar-Abidjan,1974, pp 4-5.<br />
Salenc (1.), op. cit.<br />
Gaden (H.), op. cil.<br />
Delafosse (M), Haul Sellegal ,Niger, Tome I, Paris, 1952.<br />
Mage (E), Voyage dalls le Soudall occidelltal, Paris, 1868.<br />
AI Hafiz, Texle arabe, non Iraduit.<br />
Deiavignette, "Faidherbe", ill Colollies el Empires, Paris, 1947.<br />
L'Ellcyclopedie de "Uslam, Paris, 1934. ./<br />
Gaden (H); op. cit., (1280 de I'Hcgire = 1864).<br />
Verdat (M), "La bataille de Bongoye", ill Bullelill de I'EllseigllemcllI ell<br />
Afrique, , nO IS, 1952.<br />
Voir Dieng (S.), Vile approche de I'epopee omarielllle d'apres la chrollique<br />
dEI Hadj Mamadou Abdolll Niagalle, Mcmoirc de Maltrise, Dakar, 1978.
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 108<br />
Halwar et, trouvant qu'Omar n'avait pas encore rec;:u le nom de bapteme l , l'Almamy Abdoul<br />
Kader excusa son pere : le dispensantde grossir les rangs de l'armee du jihad.<br />
Ain'sfOmar naquit-il dans une famille de dix enfants dont il"fut le dernier-ne,<br />
d'ou son surnom de "Kodda Adama Ayse". (le dernier ne d'Adama Ayse). Ses parents<br />
appartenaient a la noblesse du livre2. Son pere, Thierno Saidou Tall, etait un modeste<br />
marabout, sa mere Sokhna Ad'ama Tall devait son titre de Sokhna ( la purifiee ) asa grande<br />
vertu, faite de sou mission aux parents et d'obeissance au mari. Les parents d'Omar ont<br />
suscite une vaste litterature historico- legendaire : Thierno SeYdou maitrisait parfaitement le<br />
Coran tanclis que Adama symbolisait la purete corporelle et morale.<br />
C'est au sein d'une telle famille, empreinte d'une grande ferveur, qu'Omar<br />
passa une jeunesse studieuse, revelant des dispositions extraordinaires pour les travaux de<br />
I'esprit. A I'age de huit ans, il memorisa le Coran, se rendit par la suite aupres des savants<br />
maures aOualata, au Tagant. On signale encore son passage aBogue, puis aI'Universite de<br />
Pire, au Cayor. 11 y aurait paracheve ses connaissances en theologie et en litterature.<br />
Toujours assoiffe de savoir, il continue sa quete en se rendant au Fouta-Djallon, centre<br />
international du mysticisme (Achrar, pro nonce lassrar par les non arabophones) al'epoque.<br />
C'est la qu'il rec;:ut sa premiere initiation ala voie Tidjanyya, des mains d'un Cheikh nomme<br />
Abdal Karim Naguel, pres de Timbo.<br />
Salenc 3 dans sa vie d'EI Hadj Omar cite cette filiation que Cheikh Omar aussi<br />
mentionne dans son Chef-d'oeuvre, Ar-Rimah 4 (Les lances). Mais l'itineraire d'Omar en<br />
quete de savoir theologique, litteraire et mystique est discute, Omar Jah 5 et F. Dumont 6<br />
presentent le parcours differemment. Jah soutient qu'apres I'etude du Coran dans son village<br />
natal, il se renclit aBogue pres de Thierno Umline Sakho, puis en Mauritanie:<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
" He studied under such of famous scholars as Cherno AI-Amin B. Abdallah,<br />
a pupil in Mauritania"7<br />
II n'avait pas encore une semaine.<br />
La noblesse DU I'aristocratie du livre dCsigne le groupe social des Torod'b e<br />
(au singuIier Toroodo). Le mOl Toroodo signifie : les gens instruits. En 1776,<br />
le pani maraboutique loucouleur, sous Thierno Souleymane Bal, decleneha<br />
une Revolution qui mil fin au rcgne des Peuls pai'ens. Elle implantC1. a la<br />
place l'almamyat DU theocratic.<br />
Salenc (1), op. eit.<br />
Tall (El 0.), Les Rimah (Texte arabe), ehapiJre 28 p. 180.<br />
Jah (0.), "Relationship between the Sokoto Jihad and Jihad of AI-Hajj Umar:<br />
A new assesment", the Sokoto seminar, 6-10 th, January, 1975.<br />
Dumont (F.), op.eit., p. 8.<br />
Jah (0.), art. eiL.
C1IAPITRE " - LA FORMATION DE L'EPOPEE I 13<br />
Les uns venanl pour s'instruire, aupr!:s de celui qui a
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE I I 4<br />
marabouts, ,qui avaicnt mis l'Almamy en garcle contre le Pelcrin, le mirent en garcle COIllre le<br />
port c1'un bonnet hlanc lors c1e la pricre c1e la Tabasky, par un qllelconque talibe c1u myaurllc :<br />
ce qui placerait le ,.ollta SOilS le joug c1'EI I-Iadj Omar. De nouveall, I'Almamy prj[ se><br />
dispositions, et envoya des missions clans les provinces de son royaume, pour intcnlire<br />
fomlellement le port du bonnet blanc le jour dc la fete.<br />
Ces anecdotes ou recits legendaircs, relates par lcs chroniqueurs, lJ1Olltrcn[<br />
que la popularite d'EI Hadj pOIIssa son hote a prendre ombrage de lui. 11 cOllstata amcrClJ1cn[<br />
que l'allegrcsse gcnerale, suscitee par la venlle du marahout, etail prcjlldiciable a son trone.<br />
Cest alors qu'il decida d'exiler le prcstigieux Pclerin a Djegunko, village du Kolcn, situc a<br />
deux jours c1e marche de Timbo, relevant actuellement de I'arrondissenlcnt de Kalinko,<br />
depanement de Dinglliraye (Djegunko se trouve a gO km environ de Dinguiraye)<br />
Deux raisons, au moins expliqucnt le choix de celte localite :<br />
I) Hameau ordinaire, Djegunko asscz distanl de Timho, penneltait d'isoler le Cheikh dont la<br />
presence aTimbo devenail genanle pour l'Almamy.<br />
2) Village limitrophc du Foula ct dll Diallonkadougou, Djegunko sen c1e bouclier au FOllla.<br />
lout en exposanlle Cheikh aux vellcilcs expansionnisles des rois Diallonkcs.<br />
Vne fois informe, Cheikh Omar accepta la proposition de l'Almamy, qui<br />
ordonna aux neuf provinces de eonstituer une delegalion pOllr l'accoll1pagner. En oulre, il<br />
adressa une leltre a Modi Alirnou Bolaro afin de lui facililcr le passage sur son lerritoire, mais<br />
aussi de l'accompagncr jusqu'a la sonie de sa capilale. Cest, tlu reste, ce que fit aussi<br />
I'Almamy Oumar pour donner l'exemple.<br />
Dcs son arrivee 11 Djegunko, Cheikh Omar s'activa a conslruire une mosquce<br />
el it fonder une zaou'ia, ecole religieuse oil les travaux de l'espril alternaicnt avcc les exercices<br />
martiaux. En peu de temps, Djcgunko devillt l'UIIC des plus imponallles zaou'ia lidjfine de<br />
I'Afrique de l'Ouest, et il semble que le Cheikh y acheva la rcclaclion de son Chef d'ocuvre<br />
Le Kitdlm Rimdh I, glosc marginale c111 Cbef-d'oellvre de Cheikh Sicl Ahmad AI-Tidjfine,<br />
fondatellr de la confrerie Tidjfini : Jall'uhir-III-Maul1i (La Perle dcs sens) qui contienl<br />
l'essenticl de la doctrine de la confrcric.<br />
EII-Jadj Omardefillit clans Le Livre des Lances sa philosophie religicusc; en<br />
meme temps il met la Tidjanyya a la ponce de la masse, affll1nantque c'est la meilleurc voic<br />
pour aceeder i\ une connaissance approfondie de Diell, mais non I'unique. 11 convicnt de<br />
signaler qu'une des callses du succ!:s du jihJd omarien futla democratisalioll c1e la conrrcric :<br />
Cheikh Omar offranlle wird inclistinctell1enl, sans consideration dc sexe. d'Jge 011 de Slatut<br />
social.<br />
Tall (0.), Riml1lzu Iziz/)u Rahim a /a l1uhur Izizlm Rajilll (Les lances des gells<br />
Idu pani] de la Miscrieorde sur le' gorges des gell' dll parli I de Satall lel<br />
Maudil. (Tcxle arahe non Haduit).
C11i\I'ITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE \ I 7<br />
Walandama, Mini, llollka, Kebali, KOllbi et Yiro. Ces rivieres arrosent des plaines tres<br />
fcnil
CHAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE I I g<br />
faces les plus exposees, pour les doubles, en menageant entre les deux, un<br />
chemin de rondc protege de 40 it 60 metres de !argeur" I.<br />
Cheikh Omar rcsta dans cc cadre sDI' de 1849 i\ 1851. Au bout du dix<br />
huitieme mois, Yimba Sakho, jaloux de la popularite de son hote, mais craignanl surtout les<br />
aflnes it feu dont disposait le marabout, acquises grace it 1'01' 'lue ses talibes extrayaient des<br />
placers aurilhes voisins, envoya son griOl Djeli Moussa Diabate demander au Cheikh<br />
I'impossible. An contact des jih:idistes, Djdi se convenit. La guerre devenait inevitable.<br />
A p,mir de ee moment la vie d'E! Hadj decrivll deux courbcs:<br />
1) Quinze annees de meditations, de confroutation, de preparation activc, allant de 1834 i\<br />
1849, venaienl de prcndre fin.<br />
2) Quinze atltres annees de guerre sainte au jihad s'ouvraient allanl de 1849 i\ 1864.<br />
III - LE JIHAD<br />
La genese du jih:id d'EI Hadj Omar Ic rattachc aux mouvemen[s similaires qui<br />
I'onl precede: Sokoto, Fouta-Djallon, Macina, Foula-Toro cntre mitres. A I'instar de ses<br />
illustres devanciers, Omar prepara serieusement son jil1:id en multipliant lettrcs, discours,<br />
sermons, messages, largesses et priercs. 11 reussit it lever IIIlC aflllee qu'il forma d'abord it<br />
Djegunko, puis it Dinguiraye.<br />
Au vu dc ses realisation, la jalousie suscita IlIle grande revolte dans la<br />
Diallonkadougou, ct Yimha Sakho trouva un pretexte pour attaquer le Inarabout. 11 depecha<br />
son confident, le griot du trone Djeli Moussa Diabate, pour une mission quasiment<br />
impossible consistant it poser it Cheikh Omar des conditions inm;ceptables:<br />
I) Remettre au rai, imperativemellt, I'ensemble des fusils.<br />
2) Lui donner une de scs filles en mariage.<br />
3) Lui ceder son cheval blanc, Mbolou.<br />
Ayanl jauge le rapport de forces Djeli prtrera embrasser I'lslam, refusant de<br />
relourner pres de son maitre. L'epopec raconte it sa nwnicre l'attrail irresistible exerce sur<br />
Djeli qui le poussa it embrasser la cause d'Omar el du jih:id.<br />
En apprenant le ralliemelll de Djdi au camp omarien, Yimba envoya un autre<br />
messager pour reclamer le neophyte. Apres audition e1u message, le conseil des jih:idisles<br />
BOllchez (Lielllenant). "lIiSlori'lne de Dinguiraye", i" B"lIee;" cl" Com;et! de<br />
rAjr;""e jra",;a;se, n07, l'Jt3.
CHAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 125<br />
ells un Iraite de commerce et d'alliance. Etaient concernes les chefs du Delllbaya, Logo,<br />
Niatiaga, I3ambouck, Gadiaga. les Franr,:ais negocieeem aussi avec !es Chefs du Kamera et<br />
dll Guidilllakha. Un traite fut conclu le 6 octobre 1855, assuram aux Fmnr,:ais la libre<br />
navigation sur le fleuve depuis Bakel jusqu'a Medine.<br />
La confederation du Khasso plar,:a ainsi Medine et ses VOlStns sous la<br />
protection de la France. Mais un phenomene nouveau allait bouleverser celle alliance<br />
franr,:aise sur le I-1aut-Fleuve : le jihiid d'EI Hadj Omar. Depuis sa victoire sur le<br />
Diallonkadougou, !e jihiid omarien volait de victoire en victoire. De 1850 il 1854, El Hadj<br />
Omar ruina la vieille royaute des Massassis du Kaarta dont la capitale ewit Nioro. Le jihiid<br />
changea de direction et progressa vel's I'ouest, vel's le Khasso Dembaya. 11 ne rencontra<br />
aucune resistance entre 1854 et 1855 1 au Khasso, celui-ci il la difference des royaullles<br />
Massassis, n'ewit pas animisle 2 Le Khasso eraitmusullllan praliquant la Qadryya : Hawa<br />
Demba s'etant affilie it Cheikh Sidya, celui-ci lui ordonna de baptiser sa capitale Medine, sur<br />
le mode mohallledien. Cest pourquoi, ill'arrivee d'EI Hadj Omar, tous le chefs du Khasso<br />
lui firent leur soumission. La tradition orale khassonke mconte qu'EI Hadj remellait aux<br />
soumis des gourdes et des chapelets, d'ou l'expression : la "politiCIue des petites gourdes."<br />
A Medine Kinti Samballa, deuxieme rai du pays, traita avec I'illustre pelerin.<br />
Ilmourut en 1854, et fut remplace par son frere Dioukha Samballa, qui maintint le Khasso<br />
sous le joug omarien.1l p1ar,:a du reste un contingent lllilitaire, charge de l'aider dans ses<br />
conquetes, sous I'ordre de son freee Khartoum Sambalhl. Mais une serie de causes se<br />
conjuguerent et envenimerent les relations entre le Dembaya et Cheikh Omar. Elles se<br />
resument en une cause psychologique, une cause politique et une raison economique.<br />
Selon des versions diverses, lllais concordantes, Kinti Samballa et son freee<br />
Dioukha Salllballa ne s'entendaient pas depuis !eur plus tendre enfance, leur differend<br />
remontant il leur naissance. Dioukha et Kinti, fils de deux coepouses de Hawa Delllba,<br />
naCIuirent le meme jour. La naissance de Dioukha preceda celle de Kinli de CIuelques instants.<br />
Apres I'accouchement, la mere de Dioukha Samballa envoya un griot annoncer au roi la<br />
nouvelle. Trouvant le souverain en train de manger, le griot se gena et attendit la fin du<br />
repas. Au mbne moment, arriva un forgeron qui annonr,:a la naissance de Kinti Samballa. Le<br />
griot ajouta : "J'etais venu pour une commission selllblable, mais comme vous preniez votre<br />
reras je n'ai pas voulu vous deranger. Dioukha a accouche d'un garr,:on un peu avant Kimi",<br />
"T.ult pis, repliqua le roi, c'est I'accouchement de Kinti qui m'a ete annonce le premier. Son<br />
2<br />
Surct-Canale (1.), AJrique Noire occidenlale Cl cenlrale - Geographic <br />
Civtlisalion - Hislo;re, Pari>, 1961.<br />
Mcdine pona le nom de la ville du Prophcte Mohammed sur ordrc de<br />
Chcikh Sidya Baba El Kcbir, Cheikh mallre "qadiri".
CHAPITRE 11- LA FORMATION DE L'EPOPEE 126<br />
fils est I'alne el devra me succeder" 1. Ceta marqua Dioukha Samballa qui n'accepta jamais le<br />
droit d'alnesse de Kinli Samballa, pour qui il n'eul point d'egard. Ainsi, des qu'il monla sur<br />
Ic Irone, il chercha arompre les relations avec El Hadj Omar, conlraclees par son frere Kinti<br />
Sall1balla.<br />
De leur eOle, Ies Franr,:ais ne pouvaienl pas tolercr l'edification de I'empirc du<br />
jihfid qui, aplus ou moins longue echeance, Ieur interdirail les portes du Soudan. lis etaient<br />
aussi choques par le pillage repele des tmilants wolofs, eutre Bakel et Medine, opere par<br />
l'annee toucouleure qui manifeslait ainsi son hOslilile aux Franr,:ais.<br />
D'autre part, les royaumes voisins de Medine ne cessaient, d'insliguer El<br />
Hadj Omar contre le Dembaya, leur rival, ainsi que ses allies franr,:ais. Et le jihfid, qui rhait<br />
de fonder un puissant Empire musulman au Soudan Occidental, voyail mal I'occupation de<br />
Medine par les Franr,:ais. En outre,la situalion politique el economique de celle ville sllscitait<br />
Ies eonvoitises de plus d'un jihiidiste.<br />
Face aux exigences de plus en pIllS insupportables d'E] Hadj Omar, selon Ies<br />
versions du Khasso, - le wird tidjiine etail obligatoirement adople apres l'islamisation, il<br />
fallait en outre pourvoir en vivres les troupes du jihfid, - Dioukha Samballa se revolta. Les<br />
infoffilateurs soutiennent, unanimement, que la goutte d'eau qui fit deborder le vase demeure<br />
la conduite inconsideree d'un disciple de Cheikh Oll1ar qui, envoye par son maltre reclamer<br />
des vivres au souverain du Khasso, reveilla eclui-ci de maniere incorreele. Dioukha Samballa<br />
remit aux emissaires FOlllanke la gourde et le chapelet, symboles de la soumission de son<br />
frere Kinti Samballa. POllr marquer la rupture totale, il alia trouver Cheikh Omar pour lui<br />
signifier de vivc voix son independance, puis il envoya un de ses freres, Makhossa<br />
Samballa, reclamcr le retrait dll contingent Khassonke de I'armee du jihfid. Mais ceux-ci<br />
refuserent de partir. Le roi du Khasso convoqua alors le conseil et "excommunia"<br />
pllbliquemelll, du Dembaya, Ies princes Khassonke du camp oll1arien il la ttte desquels se<br />
Irouvait Khartoum Samballa 2 O'un commun accord, les notables deciderent que ni<br />
Khartoum Samballa, ni scs descendants uc pouvaicnt pn'tendre au trone du Khasso dont ils<br />
etaient indignes, puisquc coupables de trahison.<br />
De son cote, Khartoum Samballa dell1anda alars a Cheikh Omar de le<br />
rehabiliter, mEine au prix d'une guerre COlllrc sa patrie. Aussi les Malinkes du Logo, ceux du<br />
Balllbouck el Ies Diakile du Niatiaga, voyant dans le differend opposant le Dembaya a El<br />
Hadi Omilr le Illoyen de poner un coup fatal aMedine, jouerent le role de catalyseur principal<br />
du siege de la vi lie. Le jihfid refusa de ceder aux revendications du Prince Khassonke,<br />
I<br />
2<br />
Tradition n,eueillie a Medine, Avril, 19H8.<br />
Jusqu'a ee jour, I'unile de la famille royak ue s'esl pas relablie.
CHAPITRE 11- LA FORMATION DE L'EPOPEE 129<br />
protection offerte aAli Da Monzon, ajoutces aux rivalites ethniques et eonfrcriques, donnenl<br />
Ics origines lointaines et praches du connit.<br />
Vne fois maltre de Segou, Cheikh Omar envoya des clllissaircs aHarlldallahi,<br />
capitale de I'Empire peul, pour recIamer Ali, le roi fuyard, Puis une correspondance fut<br />
echangee entre le Cheikh et le Souverain, F. Dumont et Mohammed AI-Hiifiz onttraduit et<br />
commente ces Icttres, En tout ctat de cause, les arguties juridiques se fondaient moins sur<br />
une interpretation du Coran ou de la charia que sur des rivalilcs elhniques, L'examen du style<br />
et de la forme de cette littcrature cpistolaire met en evidence une nette supcrioritc de Cheikh<br />
Omar, plus age et plus erudit que son rival Ahmadou Ahmadou, Citons en quelques<br />
exemples:<br />
l'Emir peu! :<br />
Hadj Omar remit une lettre a Thierno Ha'imouthe, une lettre scellee pour<br />
Toi, Ahmadou Ahmadou,. tes dispositions envers mOl sont<br />
manifestement hostiles jusqu'a I'agression et cela est clair comme brille ala<br />
vue la flamme d'un feu allullle sur une montagne, Tu as envoyc, en elTet,<br />
contre moi, dans le Bakhounou, Abdoulaye Bori Am'Sala avec une annee que<br />
'Dieu seul dctruisit, I'empechant ainsi de rcussir sa mission" I,<br />
La rcponse du prince peul fut prompte, apportce par son oncle Ba-Lobbo et<br />
Nouhoun. Cheikh Omar etait toujours 11 Sansanding. En voici la teneur :<br />
2<br />
"le te donne a choisir entre te soulllettre a moi, comme c'est pour loi<br />
I'obligation la plus etroite, et retourner au pays d'otl tu es venu. Je t'accorde<br />
un delai de trois jours pour faire la soumission ou bien plier tes bagages,<br />
sceller tes chevaux au poil ras 2 , et tenir prets tes llleilleurs guerriers, car<br />
j'enverrai contre toi des gens ages de 20 a 25 ans. Car c'est des individus de<br />
la sorte que le Prophete (le salut cternel de Dieu soit sur Illi) a dit: ''Tuez-les''.<br />
A cet ultimatum, Cheikh Omar repondit :<br />
Sissoko (M,), "Chroniques sur El Hadj Om"r et Cheikh Tidialli", ill [JULlClill<br />
de /,Education africaine (Bulletin de l'Enseignemenl en A,O.F.). N° 96 el 97,<br />
Jany-Sept., 1937, p 132.<br />
Les cheyaux les plus solide el les plus rapides (nole du traducteur),
CHAPITRE 11 - LA FORMATION DE L'EPOPEE 130<br />
"Tu es devenu un infidele 1, puisque tu as calomnie le Prophete (sur lui le salut<br />
eternel dc Dieu). Cclui-ci, au conrraire, considere comme permis de tc<br />
comballre et que ton sang soit repandu ii flot ainsi que celui de tous ceux qui<br />
sont avec toi, et cela, acause de la calomnie que tu viens de commettre. En<br />
effet, dans son ldiilulla DOlldjillll, I'auteur arabe ecrit :<br />
"Quiconque nie l'evidence est devenu un infidele et se joue de lui<br />
Ineme.<br />
Quiconque affinlle comme penllises les choses interdites est devenu<br />
un infidele, car l'interdiction en est fomlelle et notoire"2.<br />
Ces propos trahissent, dans un developpemelll lineaire d'une tramc<br />
evenementielle, les traits psychologiques des deux protagonistes. A cette logomachie succeda<br />
tres rapidement le dialogue des armes.<br />
Le 7 Mai 1862 eut lieu la bataille de Porman qui fut fatale aux lanciers<br />
maciniens, obliges de ballre en retraite sous les coups de la fusillade de I'armee omarienne.<br />
La bataille reprit le 10 Mai aTyfiyawal, bois situe dans la plaine d'inondation du Bani. Au<br />
matin du IO Mai, cn effel, le Macina inveslil les jihfidistes. La bataille fut sanglante et il y eut<br />
de nombreux morts de part et d'autre. L'annee du Cheikh epuisa ses reserves de poudre. Le<br />
Macina ewit a un doigt de la victoire, mais au lieu de donner l'assaut final, il S'llITeta. Aucun<br />
historien n'a encore reussi aexpliquer serieusement cette pause:<br />
"Jamais Ahmadou Ahmadou ne sut aquel point il avait frole la victoire dans<br />
la nuit du 10 au 11 Mai 1862... EIl-ladj Omar employa activement le repit que<br />
Dieu lui accordail. 11 rnil iI profit cctte pause inesperee pour faire reposer les<br />
hommes et couler des balles de fer" 3.<br />
Le combat ne reprit que le 14 Mai au soir, Cheikh Omar harangua les taJiocs et<br />
rcmporta une victoire fulgurante : le lendemain, l'arrnee du jihild devint maitresse du pays.<br />
Ahmadou Ahmadou., blesse, fut evacue dans la precipitation par les siens. Le convoi fut<br />
rattrape ii Kabara, l'Emir fut decapite et enseveli ii Male! Nasso, pres de Mopti, selon une<br />
source tres populaire.<br />
2<br />
3<br />
Le lermc qui rcndraiL le micux 1
CHAPITRE II - LA FORMATION DE L'EPOPEE 132<br />
En Ma; 1863, Alpha Oumar Thierno Bayla tomba a Miini-Mani, victime de<br />
l'incliscipline des [alibes l . Cette mort du general de l'annee du jihiid, de I'homme des<br />
missions delicates et difficiles, constitua une perte cruelle. D'autant plus cruelle qu'Alpha<br />
Ousmane, le suivant d'Alpha Oumar, succomba le 7 Juin 1863 ala bawille de Segue.<br />
Alors les paladins, pactisant avec les Kounta de Tombouctou, a qui ils<br />
promirent le pouvoir, assiegerent Cheikh Omar a Hamdallahi pendant pres de neuf mois.<br />
Celui-ci fit sortir son neveu Tidjiini pour chercher une armee de secours, mais elle arriva uup<br />
tard.<br />
A I'epoque, les communications etaient coupees entre Hallldallahi et Segou.<br />
L'historiographie coloniale 2 reproche a Ahmadou, le EIs alne du Cheikh, son refus de voler<br />
au secours de son pere pounant assiege. Cette appreciation provient d'une llIeconnaissance<br />
de la pensee po!itique de Cheikh Omar. Ahmadou, en restant aSegou, ne faisait qu'obeir a<br />
une injonction de son pere, relevant d'un souci de realisme politique : se menager une issue<br />
en cas de defaite.<br />
Malgre tout, Cheikh Omar mit fin au siege, miraculeusement. 1I quitta<br />
Hamdallahi la nuit du Samedi 6 au dimanche 7 Fevrier 1864; ala tete de la poignee de fideles<br />
attaches au jihiid. lis mirent cinq joms pour atteindre les falaises de l3andiagara:<br />
I<br />
2<br />
"Epuises par les privations, les Toucouleurs ne pouvaient marcher vite.<br />
lIs furent, dit la tradition, rattrapes a Nonnono (Niongono du Repertoire) et il<br />
se ret'ugierent dans la montagne. On se baltit, dit-on, la nuit du lundi au<br />
mardi, le mardi, et encore la nui[ du mardi au mercredi. Les Toucouleurs<br />
avaient I'avantage du feu et de la position; l'ennemi, qui les sentait perdus, ne<br />
devait pas mettre grande vigueur dans son attaque ; il semble qu'il y ait eu une<br />
accalmie le mercrcdi. Dans la nuit, le Cheikh, qui cherchait cenainement a<br />
s'approcher de Doukombo, reussit a atleindre Deguembere au petit jour et<br />
gnmpa dans la montagne avec sa troupe. lis y furent cernes et se defendirent<br />
encore toute la journee et une panie de la nuit. Le vendredi matin, les<br />
Toucouleurs, sau!' les Eis de Cheikh et quelques fideles, descendirent de la<br />
Illontagnes et allerent se rendre. Sur l'ordre du Cheikh dit la legende, parce<br />
qu'ils n'en pouvaient plus, dit une autre version. L'un d'entre eux,<br />
Mahrnadou ISllIai'la Samba Sire de GuiraY, alia dire iJ. Sidia que le Cheikh<br />
annonvait I'arrivee de secours pour le lendemain, et Sidia decida de brusquer<br />
le denouement. 11 fit apponer dans ht montagne du bois et des broussailles et y<br />
Gadcn (H), 01'. cit, vv 1091-1110, p. 190.<br />
Magc (E.), op.cit.
DEUXIEME PARTIE<br />
L'EPOPEE D'EL HAD] OMAR<br />
ANALYSE LITTERAIRE
136<br />
A la fois forme de 'n5cil multiple, vision du monde et chant de beaule, l'epopee<br />
eSI un genre majeur de la litleralure orale, reconnaissable au caractere multidimensionnel des<br />
l'ragments qui sont parvenus jusqu'a nous. Neanmoins, sa manifestation la plus eclatante prend<br />
la fonne d'un art du langage ou la parole peut se pareI' de tous ses ornements. Dans !eurs<br />
definitions du genre, !es critiques n'oublient jamais d'associer ces divers aspects, comme le fait<br />
Philippe Sellier :<br />
"Les recits dans lesqucls s'est exprime le desir d'heroi'sme, d'arrachement a la<br />
banalite de la vie, de superiorite sur le reste du monde, de realisation eclatante de soi,<br />
d'elevation a une condition quasi divine, forment un genre litteraire reconnaissable entre tous :<br />
l'epopee" 1.<br />
ConfirmalH regulierement ces presupposes theoriques, l'epopee d'EI Hadj Omar<br />
pn5seme, en outre, ]'avantage de s'inscrire a la rencontre de I'oralile et de l'enilUre, ce qui ne<br />
fait qu'accroltre son interel eSlllelique et hermeneulique. Les textes de notre corpus, issus<br />
d'auteurs differents, portant par consequelll la marque de styles divers)offrelll de belles<br />
possibilites d'approche theorique. Additionnes, ils embrassent loute la vie du Cheikh. Katidou<br />
Bii a retenu la periode qui va de la naissance d'EI Hadj Omar jusqu'a l'episode des joutes<br />
oraloires du Caire. Sidi Mb6thiel chante le jihiid de Dinguiraye a Hamdallahi. Quam au demier<br />
fragment de 1'
CHAPITRE I<br />
LA GESTE D'EL HADJ OMAR, EXALTATION D'UN HEROS
CHAPITRE I - EXALTATION I)'UN HEROS 140<br />
fragmem de la gesle du jihfid utilise t-il tous les effcts possibles pour arriver acelle tin:<br />
naissance dans une famille benie, aune epoque particuliere, dans un cadrc extraordinaire.<br />
De rneme, en choisissant a Ornar des parents aussi vertueux que Thierno<br />
SaYdou et Sokhna Adama, la geste legitime la caniere future du heros et designe sa valeur<br />
personnelle. Mais I'epopee attire surtout I'allention de I'auditeur sur la saintcle et<br />
j'honorabilite d'Omar pour refuter, a priori, les argumems futurs des vaincus contestant lcs<br />
fondements de son jihfid. La construction du premier fragment de la geste est, par<br />
consequent, celle qui a demande le plus de soin, d'autant plus que le genre est consomme<br />
dans une societe de type feodal, oll I'homme se mesure au poids de ses origines.<br />
Des lars, la gestc fait naltre Omar au scin d'une famille peu commune; dirigee<br />
par Thierno SaYdou Tall, un expert du Caran dont I'epouse Adama Ayse fut surnommee<br />
"Sokhna" (la purifiee) a cause dc ses immenses qualites. En ce sens, la version de Halwar<br />
presente Thierno Sai'dou Tall comme un marabout Torodo, maltre inconleste de la<br />
modulation du Coran. Elle soutientmeme qu'il cuItivait son champ, en recilantla vulgate, du<br />
lever au coucher du solei!, ne s'arretant que pour prier. Il retournait alars chez lui, le fusil en<br />
bandouIiere pour lui permettre d'abattre, al'occasion, que/que gibier.<br />
C'est au cours de I'une de ces journees champetres que survint un evenement,<br />
garde jalousement par la memoire collective toucouleur. A la suite d'une journee de dur<br />
labeur, les parents du futur Omar, surpris en chemin par le crepuscule, s'arreterent pour faire<br />
la priere du soir. A ce moment, un fauve - un chacal d'apres plusieurs versions - s'empara de<br />
leur enfant! en train de jouer acote de sa mere. L'animal se saisit de I'enfant, le devora, et<br />
dispamt dans la brousse. A la fin de la priere, Thiemo SaYdou s'adressa a son epouse:<br />
" -Sokhna Adama, pourquoi n'as-tu pas interrompu ta priere pour sauver<br />
I'enfant 'I<br />
- Commcnt le fcrai-je ? Toi qui suis un seul maltre, tu ne I'as pas fail, a<br />
fortiori moi qui en suis deux 2 ! Comment oserai-je le faire ?<br />
- Que Dieu te benisse ainsi que toute ta progeniture. Qu'il t'accorde un fils<br />
meilleur que celui que tu viens de perdre 3 dit llliemo Sai"dou".<br />
En glorifiam la mere de Cheikh Omar, Kalidou Ba celebre aussi I'harmonic du<br />
couple it travers un jeu d'antitheses evocatrices :<br />
2<br />
3<br />
Frcre immccliat d'Omar. Ce fait n'est pas conforme 11 la rcalilc hislOrique.<br />
Dicu Cl le mari.<br />
Communication paniculicrc, rccucillic auprcs de feu Thicfno Alassanc<br />
Gueye de Halwiir.
CIIAPITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 149<br />
vcrsiuns, de mcmc quc cdles de Gaden l ct de Dumont 2 , allestenl unanimementla vicloire<br />
d'EI I-1adj Omar sur ks docteurs arabcs du Cairc. En outre, elks portent tOlltes la marque<br />
d'une tradition ecrite, cclle vraisemblablement cunsignee dans ks Contes des mi//e et wze<br />
Ill/its 3, slIrtout pour cc qui est dc la technique du recit, mais aussi de I'ideologie qu'elle<br />
vchicllle.<br />
Aussi pensons-nous qlle ks vcrsions de I'etape du Caire s'inspirelll de<br />
Tawaddud 4 , dont unc traduction commentec due ilia perspicacitc de Mme Guerresch reste<br />
remarquable. En presentant le recit, elle ecrit : "Le recit de Tawaddud s'etendant sur plus de<br />
vingt-cinq nu its, de la IlIoitie de la 428eme nuit au tout debut de la 4S4eme nuit, peul se<br />
resumer en quelques lignes. Un riche marchand a enfin dans sa vieillcsse un fils, auqud il<br />
legue une grande fortune. Prodigue, le jeune homme est bientot reduit ala misere et acceple la<br />
proposition que lui fait par amour une jeune "djaria" lservantel, le seu! bien qlli lui soit reste :<br />
la vendre au calife Hariln-Ar-Rashid. Soumise aun ill!errogatoire serre sur ses connaissances,<br />
Tawaddud est interrogee successivement par dellx jllriscunsultes, un lecleur du Coran, un<br />
medecin, un astrolugllc, un philusophe et le cdebre theologien mll' tazilite An - Nazzan. Elk<br />
confond tous les doctcllrs et savalllS, gagne aux echecs Cl au tric-trac, et se mOlllre musicienne<br />
consommee. Le calife IlIi permet de relourner aupres de son maitre qu'il admel au nombrc de<br />
ses convives ordinaires"S.<br />
Si on rcmplace Tawaddud par Omar, la servante par I'erudit prestigieux, on oblient<br />
cxactcmenlle meme n!cil. 11 faul ajouler qu'Omar ne s'adonne pas au jeu mais "empecha le feu<br />
de IJriller pendant trois jours" selon le poeme rime de Hammat Samba Ly. Les cairores<br />
resterent trois jours sans cuire des aliments et deciderent finalement de faire d'Omar (eur<br />
lmame. 11 fut aussi le convive des digni\aires cl souverains de la ville.<br />
On pcut comparer ainsi des episodes de Tawaddl/d a des fragments de I'epopee<br />
savante ou populaire. Le resultat est edifiant : I'epopee savante cite les memes versets, pose les<br />
mcmes questions Cl appone les merlles reponses. Prenons un exemple, panni tant d'alltres,<br />
pour nous en convaincre, ilnous eSI fOllrni par la 437eme nuit :<br />
I<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
-"AS-lu lu le !ivre de Diell Tres Haut" lui demanda-t-il, "connais-tu bien ses<br />
versets, scs abrogeants et ses abroges, ses positifs et ses negatifs, ses douleux,<br />
GOlden (H.), up. cil.<br />
DUnIont (F.), up. cit.<br />
Les Mille et Vile Nuits, contes arabes traduits par Galland,Paris, 1949.<br />
(Nouvelle edition revue Cl corrigec par Gaston Picard).<br />
Gcrrcsch (C). art .. cit.<br />
Id., p. 58.
CIIAPITRE 1- EXALTATION I)'UN HERDS<br />
Seykou lui diL: " Sidjilin Sadjalin Kanyoumka."<br />
Alors ils surem que c'ctaitla langue des genies.<br />
11 avaiL dit : qu'esL-ce qui est le plus difficile, vivre DU avoir de quoi vivre'!<br />
Seykou avait rcpondu ; si qudqu'un est vivant, il aura de quoi vivre"1.<br />
152<br />
Aussi Iesjoutes oratoires du Caire occupent-elles une place centrale dans l'epopee<br />
dujihad, sunout intervenant Lout juste apres l'clevation d'Omar par Mohamed El Ghd!i au titre<br />
de khalife de la Tidjanyya, sur ordre de Cheikh AllIned Tidjane et du Prophele Mohammed.<br />
Mais la valeur intdlecluelle de Cheikh Omar donnera sa pleine nH:sure dans ses<br />
ecrits 2 traitant de sujets divers dans un sLyle chatic, parfois henncLique. Les talents d'Omar ont<br />
embrasse le droit, la thcologie, la lillcrature, la mystique. 11 est gcncralement admis que ce<br />
polygraphe, au talem silr, a legue it la posl
CI1APITRE I - EXALTATION D'UN I·IEROS 153<br />
'ladj tenta de rcconcilier les antagonistes, en composaot sa celebre ode, qui I'etonnait encore<br />
une fois achevee :<br />
"le n'ai ecrit aucun vel'S Ide ce poeme!. assis, mais I'ai tout entia eompose en<br />
marchanL le n'ai consulte aucun ouvrage au moment de sa composition, et, par<br />
Dieu, je ne cesse de m'etonner de celte oeuvre qui n'existe que par la grace du<br />
Bienfaiteuf. Celui qui y dece!e des lacunes voudra bien accepter Ies excuses de<br />
]'auteur" I.<br />
Le poeme s'ouvre sur un prcambule en prosc oil l'auteur loue Dieu el son<br />
Prophete, suivi de la genese du poeme. Une introduction en prose le suit, ponctuee de hadiths<br />
et d'anecdotes expliquant I'injonction theologique "AmI' bil rna'ruf wal nahy an al-munkar"<br />
(pratiqueI' le bien et interdire de comrnettre le mall. Vient alors un long poeme de 197 vel's de<br />
metre "rajazj 01' Cheikh Omar s'dTorce de demontrer la necessite de la concorde et de la paix,<br />
tOlll en vanlant la libene.<br />
Il est regrettable que le "conquerant toucouleur" ait pris le pas, dans I'irnagerie<br />
populaire, sur I'humaniste et le philanthrope qui point id. Certains vel's mcrilent d'etre cites:<br />
2<br />
:l<br />
4<br />
5<br />
- " Car ,letruire ce monde el la Ka'aha est moins grave que de tuer un croyant<br />
uniquenlcnt; donc crains.<br />
L'iime de cclui qu'on tue volontairement, dira le jour du jugement dernier: "0<br />
Maitre des deux ct de la ten-e,<br />
Ton servileur malfaisant attenta ama vie, tire assurcmenl pour moi vengeance<br />
de lui"2.<br />
- "Louange ii Celui qui a conclamne la dissension el a instaure la conciliation et<br />
I'amilie" 3.<br />
- "Comment ne dcvrait-il pas air!lt:r celui que le Crealeur des crealures, son<br />
Maitre, nomme SOil frere"4.<br />
-"le proclame que ce n'esl que clans la paix [qu'on peutl preserver la religion, la<br />
dignite humaine, et aussi I'ideal de gcnerosilC"S.<br />
Gucrrcsch (C), "Ta!fkira al-'Cafifjn ou un aspecl pacifiquc peu connu de la<br />
vie d'AI lliijj 'Umar : imroduction historique, edition critiquc du texte<br />
"rabe, et traduction "nnotee", in BIII/erin de I'/FAN, Taille 39, Ser B, n04,<br />
oelObre 1977, p. 903.<br />
Id., p. 913., vv. 42-44.<br />
Ibid., p. 921., vv. 124.<br />
Ibid. p. 923., v. 155.<br />
Ibid, p. 927., v. lH2.
C1IAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 155<br />
L'epopec explil)ue aussi la prise de Karega par le fail qu'Omar etait autorise afaire<br />
le jihfid, puisqu'en cc domaine l'aUlhenlicile seulc garanlitle succes. Karega resisla, malgre Ics<br />
mlllliples assaulS de la colonne de l'aIll1':e omarienne, dirigec par Alpha Omar Thicrno Bayla.<br />
Se sentant un peu perdu, le general se resolut il provOl)uer son Cheikh :<br />
" Sache que Karega a refuse Ide se rendrel . Or, c'est toi qui avais dit que tu es<br />
autorise afaire le jihfid" 1.<br />
Ces propos susciterent I'effet desire; la colere du Cheikh, qui se traduisit par la<br />
mobilisation de son genie.<br />
" le le jure par Allah que je ferai savoir a Alpha que je suis aUlorise la faire le<br />
jihfid]...<br />
le jure que j'ai une autorisalion aUlhentique de conduire le jihfid"2.<br />
C'est en prononcrant certaines oraisons a I'approche de Karega que Cheikh Omar<br />
reussit, sans coup ferir, il pulveriser la forteresse de la ville et a faire ecrouler les maisons.<br />
L'epopee brosse discrelementla deraile et I'humilialion des habilalllS :<br />
"'I'll prenais celui-ci el tll l'allaehais"3<br />
Mais la conduile du jihfid necessile allssi d'aulres prealables :<br />
" Le peuple contre lequel eSI dirige le jihfid doit etre invite 11 embrasser l'islam;<br />
En cas de reflls, iI a le choix entre deux alternatives: ou bien se sournellre 11 la<br />
domination muslllmane en devenant "dhilllIllS" et payer la "djizya" ou bien<br />
combatlfe"4.<br />
Celle clause est bien allestee par la narration epique du jihfid omarien, qui en fait,<br />
du reSle, la condilion sille qlla IIOf! de I'invasion de lout pays par le Cheikh :<br />
2<br />
3<br />
4<br />
" JI lraversa le Ileuve au niveau de Djfikalel.<br />
Djfili Mamadou le pa'len ;<br />
Mbolhicl. (S.), vv. 477-478.<br />
Id., vv. 514-516.<br />
Ibid.. v.5W.<br />
Encyclopedie de !'Is/am.op.cil., p.1073.<br />
,.
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN I-IEROS<br />
11 le sermonna , mais celui-ci refusa, ille tua.<br />
Soungourou Ba Bodian, le paYen ;<br />
Ille sermonna, celui-ci refusa, il le tua.<br />
Bodian Ba Soungourou, le paYen ;<br />
Ille sennonna, celui-ci refusa, il le tua" I.<br />
156<br />
Il y a Ut une enumeration de rois lues pour avoir refuse d'obtemperer aux sennons<br />
du Cheikh. Cela se traduit, sur le plan semantique, par l'opposition de "sermonna" et de<br />
"paTen" ; la solution se trouvanl dans le verbe tuer, place a la rime pour repondre aux noms des<br />
souverains, places it I'ouverture des verso 11 ne s'agit pas d'un affrontement brutal d'interets,<br />
mais plut6t d'une guerre de religion, menee en toute legitimite.<br />
C'est dans ce cadre que se situent anssi les deux dernieres batailles du jihad<br />
Segou et Thiayawal. Pour les versions de I'epopee ornarienne, tout comme pour l'histoire, du<br />
reste, les causes de ces affrontemenls se trouvent dans le statut du roi de Segou, Ali Da<br />
Monzon; paYen pour Cheikh Omar, musulman tie.:le pour Ahrnadou Ahmadou. Harnmiit Samba<br />
note it ce propos :<br />
" Cheikh ecrivit une lettre qu'il confia it quelqu'un afin qu'il la lui [Alunadou<br />
Ahmadou] remette.<br />
]I dit : "Ahmadou, Cheikh Omar en personne le salue.<br />
Il a chasse la-bas un paYen qui a passe la nuit chez toi. Convertis-le ou alars<br />
remets - le lui afin qu'ille convertisse pour te le renvoyer.<br />
S'il refuse, qu'il I'egorge afin de refarmer la religion d'Ahmadou." Ahmadou<br />
Ahmadou dit:" le ne convel1is pas, ilne le convel1it pas"2<br />
Le combat devint alars inevitable. 11 se termina par la victoire, non point du<br />
Cheikh, mais de la religion; d'apres le Mujiihid :<br />
" J'ai lue celui qui a donne refuge et celui qui a demande refuge. Tous les<br />
deux, 6 Ahmadou.<br />
Moi Cheikh si seulementje tue un pai'en, alars, mon Clleur est satisfait"3.<br />
Enfin, le jihiid a aussi ses merites : "Un musulman qui rneurt en combattant "Jans<br />
la voie d'Allah" (IT sabil Allah) esl un martyr (Shahld) ; il est assure d'aller au Paradis ct d'y<br />
1<br />
2<br />
3<br />
Mb61hicl (S.), Corpus, vv. 87-91.<br />
Ly. (11. S.), Corpus, vV. 48 - 53.<br />
Id., vv.116-117.
C1IAPITRE 1- EXALTATION D'UN I-IEROS 157<br />
avoir des privileges panictlliers, Dans les premieres generations de l'lslam, pareille mort etait<br />
cotlsidcree comme le veritable cotlronnement d'une vie pieuse" I,<br />
La Qllcida ell pOII/ar Iilit ccho aces privileges:<br />
"Bicllvenue J Omar et ason groupc,<br />
jusqu'au paradis 1'llIioutl, en haut ; vous ne serez pas en bas,"<br />
L'Elu lilera ; le rideau est dcploye,<br />
glissons-now; par dessous, Ies pones sont ouvertes,<br />
L'Elu dira : "Entra, VOtlS el Ies compagnons,<br />
jtlsqu'au paradis I'lllioun ; le maIhem, vous ne le reverrez pas,"<br />
Cwe vii le animce, aux vaSles places, dont lie sol] est sans detritus, aux etages<br />
blanchis, aux rues qui ne sont pas ctroites,<br />
Des lits Cl des cOtlssins parftlmcs, Id'utl parftlml qui ne se dissipe pas, et des<br />
vetcments moclletlx donl les variCtCs ne se ressemblelll pas,<br />
Des lam-tams petits ct grands, des gllitares et dcs crincrins, des violons er des<br />
tambours, joucnl to us elne se taisetlt pas,<br />
De granues ecuelles noires, d'une seule couleur, bien dccorees,<br />
des calebasses 11 manche long et amanche court pour puiser un hreuvage qui ne<br />
tari t pas,<br />
Et des mets doux Cl des omhres frafchcs sans elle froides,<br />
IIn'ya pas de solci!, mcme Ies corps tie sentent pas la lassitude" 2.<br />
De lellcs promesses etaient propices 11 arracher I'adhesion du sedelllaire le plus<br />
irreductible ou rlu nomade le plus mobile, L'autrc forme de jihfld dit "Jihfldu nafs", ou guerre<br />
conrre ses propres peches, fur aussi praliquee par Cheikh Omar :<br />
2<br />
"Lorsqu'il eut acheve dix-huit ans,<br />
i\ eeigllit ses reins, il se prepara au combat cOlllre I'ame, qui n'est pas une aide,<br />
Ihlis etlous ses compagnons et ee monde,<br />
etlcs aeeotltumanees de lieu, etles eamarades qui ne Ivousl quittelll pas,<br />
tout eela, il le rejeta, il Ien I sonit pour se diriger vers Allah seul<br />
et cet Envoyc pour la Vcrite et de toules les lois ;<br />
Ies prescriptions divines et celles fomlees Stir l'exemple d'Ahmadou furent Ipar lui I<br />
conllues .. 3.<br />
Ellcyclol'cdie de I'lslam, ". p. 1073,<br />
Gaden (H,), Gp cil., VV, 1170-1178,<br />
GOlden (11), op cit., VV. 26-29, p.5,
CIMPITRE 1- EXALTATJON D'UN HEROS 160<br />
"Alpha, il l'envoya vers le Fouta, pour rechercher une armee d'Allah, un<br />
groupe envoye Ipar Allah I. actif et qui ne conunettra pas d'injustice.<br />
Si bien qu'il entra au Damga, jusqu'au routa, se dirigeanr vers notre Toro.<br />
Repondit a son appel un groupe envoye Ipar Allahl, actif et qui n'est pas<br />
paresseux.<br />
II se procura MBolou de Bokar Yero MOdi,l1e chcvalj que vous connaissez" I.<br />
Le contingent fut ramene par "celui au teint noir et brillant" auprcs de son<br />
Cheikh a Dinguiraye. MBolou suscita les convoitises du Yimba, qui le trouvait indigne d'un<br />
maraboul. L'armee du jihild, provoquce par Yimba, riposta et remporLa sa premiere victoire.<br />
Comme lors de la premiere mission, si tot de retour a Dinguiraye, Cheikh Omar envoya Alpha<br />
au Fouta-Toro pour lever une annee de jihildistes:<br />
"Le Cheikll envoya qualre Talibes vers notre routa, ceux-la ldel ses enfants<br />
(du routa), choisis, des hommes fennes qui ne faibliront pas.<br />
Le premier,Alunadou Boubou, dit aussi Eliman<br />
Donnay, de belle lOurnure, brillant qui ne sera pas sombre,<br />
Est son second, Moh:unll1adou, fils de notre Tyerno<br />
Lamin Sako, soutien de la religion, qui ne faiblira pas.<br />
Et un Talibe choisi, qui obeit asan Cheikh,<br />
le fils de Tyerno Ba"'a, qui aime la religion et qui ne lui sera pas hostile.<br />
Et un Talibe illuslre, un brave qui est sans peur,<br />
Alpha Abbas, qui a ceinr ses reins et ne sera pas fatigue"2<br />
Le retour de ce carre de preux it Dinguiraye, a la tete d'une fone colonne,<br />
pennit aujihad de soumettre le Menien et le Bamoouck. Mais la conquete du Kaana necessila<br />
de nouveau le recours aux services de Alpha Omar :<br />
"Le Cheikh envoya quatre Talibes dans noire routa ;<br />
Ceux-lit, de ses enfants (du Fouta) choisis ; dcs bons qui ne deviendront pas<br />
tnauvals:<br />
he ! Tyemo Ahmadou Ali, savant qui ne se trompe pas;<br />
le fils de Tyerno Ba'ila, soulien de la religion qui ne faiblira pas, et Tyerno<br />
Khalidou, ruse, loyal dans son seflnent de fidclite, et Tycrno 130ubakar<br />
FaYfayo, aux pouvoirs sans fins; "<br />
1 Gadcn (11.), 01' cit, vv. 159-161, p. 29.<br />
2 Id., VV. 221-225, pp. 38-39.
CI-fAPITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 165<br />
jusqu'a ce jour a un hote nomme "Tidjani" d'etre rer;u duns cerluins villuges muciniens. Lu<br />
Iladition orale est fonnelle :<br />
"Tidjani rassemblu imllledimernent son m-mee et panit pour Deguembere. 11 y<br />
urrivu CQmme Sidia faisaitlu priere du soir, l'urtuquu aussitot et le ballit. Tout<br />
a la dispute du Inatin, Bulobbo n'intervient pas. Tidjani poursuivit Sidia, le<br />
defit de nouveuu le Iendemuin a Goundaku et dinu de son chumeau, dit lu<br />
legende. Sidia s'enfuit a pied. Tidjani revim it Deguembert: ; Bulobbo s'y<br />
trouvuit, la monwgne brulait encore. 11 ballit Bulobbo et le chussa jusqu'uu<br />
f1euve. Bulobbo s'enfuit en pirogue. Tidjiini s'inswllu it Futollla et y fit un<br />
grund tus (t!.
CI-IAP[TRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 166<br />
Dieu facilira la vicloire de Tidjani en semanl la division dans le coeur des<br />
coalises, Peuls Cl Maun:s. Profitanl de leurs dissensions, le neveu du Cheikh vainquil ks<br />
uns apres ks aUlres. Bekkai", sur k poinl d'elre caplure, disparul myslbieusemem, mais son<br />
chameau " fut pris, el les Musulmans en firem leur repas du soir. Tous ceux d'enlre ees<br />
derniers qui en mangerem un mon:eau si petil fijl-i!, se virem confier par la suile k<br />
commandemem d'une province ou loul au moins d'un village" I.<br />
Pour I'epopee du jihad, ii Tidjani Alpha Amadou, resre allachee I'image d'un<br />
heroi"sme viril, d'un pouvoir intransigeanl, dG sunout au merile personnel. Mais le miracle de<br />
Tidjani demeure la disproportion entre son jeune age el ses hauls fails: entre en scene ii<br />
vingl-qualre ans, au kndemain de la disparition de son oncle ii Deguembere, il hllla vingt<br />
quatre autres annees avarll sa mort. Une vie aussi breve)chargee de lam d'acles de bravoure)<br />
n'a pas echappe aux griols el aux chroniqucurs qui, en composant la version de Bandiagara,<br />
aulre version de cour, ont fail de Tidjani le successeur legitimc de Cheikh Omar.<br />
L'epopee d'Omar cile aussi Ousmane Samba Diewo, un "diawando" de<br />
Halwiir, disciple lres eloquenl d'EI Hadj Omar qui devim un agenllres aClif du jihiid . C'esl<br />
ce 'Talibe illlelligem qui ne se lrouble pas" qui apprit au Foula la venue d'EI Hadji Omar et le<br />
contenu de sa guerre saillle :<br />
"11 (le Talibe) arriva, il dil : " Ellladj Omar El Monada vous salue d'un salul<br />
parfume dom lie parfumj ne se dissipera pas. 11 a ele pour nous en pelerinage<br />
jusqu'a la Mecque, il a fuilles IOurs Iprescrils de lu Ka'baj, il a rendu visite uu<br />
Prophele ii Daibalah.<br />
Allah lui a donne de grands dons qui n'om pas de limile, c'esllui (le Cheikh)<br />
qui Ics considerc comme dignes de vous, c'es! pour cela qu'it a ere ramene."<br />
lis lui repondirent :" Louange, bienvenue ii nOire pelerin, "ahliin wa sahlan",<br />
grand [Jeuve qui ne s'assechera pas"2<br />
On remarque les qualiles diplomariques dc I'agenl avise : k pekrinage aux<br />
Lieux Saims, cinquii:Jne pilier de l'Islam, eSt ici recupere ii des fins polilico-religieuses. line<br />
s'agit plus d'une devotion prestigieuse pour Omar. Souvenons-nous qu'a I'epoque, le<br />
pelerinage se faisail en grande panie apied et qu'il y avail peu de "Hadj". Aussi OusmaIie<br />
Samba Diewo pn:parail-ille jihiid, en enracinamla deslinee d'Omar dans t'histoirc immediate<br />
du Foula. 11 reussir bien sa propagande puisque des partisans porteurs de cadeaux aftluerelll<br />
vers Halwiir, avam de poursuivre en direclion de Djegunko.<br />
I<br />
2<br />
Sissokho (M.), an. cit., p. 143.<br />
Gadcn (11.), 01' cic., vv.136-139, p. 25.
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 167<br />
Un autre disciple de Cheikh Omar a des egards : " Le nomme Abdoullahi<br />
Haoussa que la religion a empeche de rester dans son pays natal, a cause du paradis"l Cet<br />
1I0111111e originaire de Sokoto se nommait Abdoullahi Sei:dou Fodiya Dem, de la meme<br />
ramille qu'Ousmane Fodiya Dem, bien que ne descendant pas du meme "Fodiya", titre<br />
decerne a un erudit en haoussa, equivalant a Thierno en poular. Sa presence dans le jihiid<br />
internationalise le mouvemem omarien, el donne au recit du poete epique plus de couleur<br />
locale.<br />
Ces compagnons, auxquels s'ajoulent des cemaines d'autres, forment une<br />
sone de sentinelle qui veilla sur le jihiid dans les domaines intellecruel et spiriruel. Le jihiid<br />
cite Thierno Seydou, maltre d'ecole des enfants de Cheikh Omar, mais sunout Ahmadou<br />
AlmalllY Alassane, elllissaire du Cheikh a Hamdallahi dont le savoir et l'eloquenee<br />
fascinerent les en,dits maciniens :<br />
"Ceux -la s'en reloufllerent, il (le Cheikh) lIlil avee eux ces envoyes<br />
qui ont la baraka, Khalidou, un hOlllme de bien, imelligelll qui ne se trouble<br />
pas, et Mohammadou, rils de Tyerno Alhassan Baro;<br />
C'est un savant qui eomprend, a la langue eourageuse qui ne begaie pas.<br />
Nous alliimes avec eux jusqu'a Hamdou. Lorsqn'on fut arrive, aussitot les<br />
pays furent eOnvOl.lueS,Se rassemblerent, la preuve fUl alors donnee.<br />
Louange a Mohalllmadou Alhassan, ton Talibe,lo Cheikhl.<br />
C'en est un it qui on a rendu t6noignage au Macina, ceci n'est pas rien.<br />
Des versets Idu Coranl et des traditions furent cites et compris ;<br />
Les promesses I de recompense dans I'autre nwnde J et les menaces Ide<br />
chatiment]' les recits historiques, Lout eela fut eomllleme devant lui<br />
(Ahmadou) jusqu'a ee qu'il eonnih le travail qu'il travaillait jusqu'a ee qu'il<br />
eut verse des lamles abondantes en reeonnaissam ce qui ne sera jamais bon<br />
[dans sa conduilel"2.<br />
11 est interessam de comparer celle relation de la mission du savant rapponee<br />
iei par l'epopee savante, avee eelle de I'epopee populaire :<br />
I<br />
2<br />
"11 dit oui, qui d'autre 'I"<br />
AhmadolJ Allllamy Alassane se leva.<br />
11 se mit a reciter le Coran, celle parole d'Allah.<br />
Gadcn (H.), 01' cir.., v. 428, p. 72.<br />
Id., vv. 1000-1005, pp. 172.173.
CIIAPITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS<br />
Rccilal1l et lradllisant.<br />
Avant qu'il ne finisse de lire<br />
les lannes d'Ahmadou Ahmadou<br />
s'elaient Ilouees ason Inenton.<br />
A la lin de la lecture, il d&:lam :<br />
"Voila ce qu'on m'avait envoye :<br />
Cheikh Omar te dit qu'il a chasse un paren<br />
qui a trouve refuge pres de toi.<br />
Convenis le palen DU alors<br />
envoie le lui afin qu'ille convertisse et qu'il te le renvoie"l<br />
168<br />
Alors que la relation de La Qacida s'apparente au recit d'un "tiirikh", celle de<br />
I'epopee populaire s'inscrit au coeur de I'oralite. 11 est a noter que le Talibe remplit bien la<br />
fonction que lui assigne son Cheikh : seduire par le savoir Ics oulemas du Macina. On se<br />
mppelle qu'EI Hadj Omar avail renvoye le premier pOrleur du message de I'Emir peul<br />
pllisqu'il twit incapable d'en dechiffrer la teneuf. Pour le Cheikh, un messager doil etre un<br />
erudit pour convaincre. Cest sans doute ce qui explique le choix des jihildistes<br />
accompagnateurs du Cheikh. En tout cas, le geste lui allfibue des compagnons capables de le<br />
seconder merveilleusement.<br />
11 - L'HEROISME PAIEN<br />
Nous avons essaye de demontrer dans la premiere partie de notre lhese que<br />
I'epopee du jihiid s'inscrit au coeur de I'intenexte des epopees peules. La distribution des<br />
personnages, Jeur fonction el leur implication dans I'action confinne cene realile. Les<br />
jihiidistes se sont conlportes, dans une large mesure, plus comme des peuls que comme des<br />
llIusulmans. L'entreprise qui les sollicitait necessitail la manifestation d'une bravoure<br />
cxceptionnelle, que l'origine sociale de cerlains, ainsi que la mentalite de l'epoque<br />
favorisaient 'Implement. En vantam I'herolsme palen, I'epopee d'Omar signale qu'au milieu<br />
des combattants de la foi figuraient des preux, des descendants de families regnantes, de<br />
sinlples individus 'lUX merites personnels.<br />
Koly Mody Sy, fib d'un Almamy du Boundou, constitue un type paniculierement<br />
reprcsenratif de I'hero'isme palen. Tout au long du jihiid, il adopta un componement<br />
irreprodlllble. Mais son prestige et sa gloire aneignirent leur apogee a Thiiiyawal. Bien que<br />
I'ordre tTit de combanre a pied, Ibra B6kar Thierno Molle, un aristocrate toucouleur, et Kolly<br />
Mbo\hiel (5.), vv. 1089-1100.
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 169<br />
Mody refuserent d'obeir et resterent it cheval. Selon Mage "le choc eut lieu, violent, irresistible.<br />
L'infanterie du Macina fut culbutee, plus de la moitie de la cavalerie prit la fuite" I Pour<br />
magnifier la desobeissance des deux valeureux combattants plus attaches 11 l'hero'isme qu'au<br />
respect des ordres du jihiid, La Qacida en poular, forme un vers manele par la triple repetition<br />
de l'indefini "on", comme pour exclure les preux de l'action peu glorieuse qu'elle narre: "Alors<br />
on descendit de cheval, on se mit it dire le dzikr, on fila"2. On se doute bien que les<br />
"recalcitrants" 11 cheval n'eurent pas le temps de se livrer au "dzikr"- priere.<br />
La version de Sidi Mb6thiel qui tire son originalite de son parti pris<br />
anachronique, fait de Koly Mody un emissaire du Cheikh au Macina pour mieux dramatiser les<br />
vertus guerrieres du prince, maitre de I'equitation et du fusil :<br />
"Koly Mody Sy se leva droit.<br />
II dit : "Apportez-moi mon cheval", le destrier fut apporte et fut attache tres<br />
solidement.<br />
ndit : "Donnez-moi trois fusils"3<br />
Le prince du Boundou, tel un magicien, reussit ainsi 11 seduire le Macina :<br />
"ll plat;:a I'un des fusils devant Ahmadou Ahmadou,<br />
I'autre, ille plat;a au sol, plus loin,<br />
Le demier, ill'emporta alors qu'il faisait galoper son cheval"4<br />
Alors que ses coups de fusil tonnaient de part et d'autre, en plein galop, "Koly<br />
Mody Sy se leva droit comme une tige de mil"S. Le Macina ne put s'empecher d'admirer une<br />
adresse qui confinait it la prestidigitation:<br />
demonstration de tir :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
"...Oh' queUe adresse iJ cheval!<br />
Un homme debout sur un cheval, semblable 11 une tige de mil recoltee"6.<br />
Puis, le prince fit aux lanciers du Macina, peu habitue au fusil, une<br />
Mage .(E.), op cit..<br />
Gadcn (H.), op cit.. , v 1048;p. 18!.<br />
Mb6thicl (S.), vv. 1169-1171.<br />
Id., vv.1173-1175.<br />
Ibid., v. 1180.<br />
Ibid., vv. 1181-1182.
(:IIAI'ITRE I - EXALTATION I)'UN IIEROS 17 I<br />
11 allachail, emprisonnail, humiliail Iqui il voulaill.<br />
Tu sais, par consequent, que celui qui a abandonne la royaule pour te suivre ;<br />
ceIlIi-lil t'a suivi loyakmenl par Allah<br />
PlIisqll'il n'y a rien de plus deliciellx que le pouvoir" I.<br />
Donc Koly Mody etaillln inlcrloclllcur valable pour le Macina si imbll de son<br />
aristocralie. Son cOl1lponement fIll allssi conSlalllmenl royal.<br />
Usalll LOlIjours d'anachronismes, la version de Sidi Mb61hiel, pour mettre en<br />
gros plan l'hero'isme des Illusulmans pills zeles pour !e combat physique que pour le combal<br />
spiritllel, envoie aussi en ambassade au Macina Bowl Sawa Hako, Peul donI la noblesse n'a<br />
d'egale que la richesse. A l'injonclion du Cheikh :<br />
"le cherche quelqu'un qui va pour Illourir , qui ne va pas pour vivre ; capable<br />
de faire de la parade physique:<br />
Jeler son fusil en l'air, le reprendre avanl qu'il ne lombe aterre"2<br />
L
CHAPITRE I - EXALTAnON D'UN HEROS 172<br />
On sait qu'en milieu peul traditionnel, le droit ala parole est proportionnel aux tetes de boeufs<br />
possedees. C'est ainsi que lorsque quelqu'un se hasarde a prendre la parole en public, une voix<br />
s'eleve toujours pour deminder; "qui est celui qui parle ?" Et I'autre repond :"C'esrArdo un tel,<br />
proprietaire de tant de troupeaux de bovins, d'ovins, de capIins;" lci, la valeur se mesure a<br />
l'action dont la vache constitue un des resultats. En ce sens, Botal Sawa Hiiko s'affirma au<br />
Macina comme un homme d'action peu pone ala faconde:<br />
"Moi, je suis un Peul, je ne parle pas beaucoup"l, declare-t-il, avant de se<br />
reveler un genie du fusil:<br />
"Et conune il s'est projete en avant et en arnere<br />
Le fusil ne tomba pas, lui aussi ne tombant pas.<br />
11 pIit le fusil violemment, puis donna un coup a terre.<br />
Le coup panit sans blesser une seule personne"2<br />
L'assistance litteralement eblouie s'exclame :<br />
"Dieu a donne a Omar le Torodo, des specialistes du fusil. Que le Toucouleur<br />
maltIise le fusil ! "<br />
Elle a du mal a imaginer d'autres preux plus valeureux que Botal :<br />
"Les specialistes du fusil ne sont pas venus, les specialistes du fusil s'etant mis<br />
en colhe hier ont jete leur fusil,<br />
et depuis lors, les fusils ne sont pas encore descendus.<br />
lis sont au sixieme ciel"3.<br />
L'anachronisme rencontre le merveilleux "au sixieme ciel" pour mieux stimuler<br />
les gens du Macina, mais aussi pour chamler le recepteur present de la narration epique.<br />
L'epopee du jihiid reserve aussi une place speciale dans la narration herolque a Hammat Kouro<br />
Wane, un Wane de Kanel tout comme Alpha Oumar Thierno Bayla, le general de l'amlee du<br />
jihad. Ayant assassine un "trairant", il alia rejoindre El Hadj Omar pour echapper aux poursuites<br />
de l'autorite coloniale. A la tete d'un groupe de ralibes, enfreignant l'ordre du Cheikh, Hammiit<br />
Kouro attaqua le poste de Medine le 20 Aviii 1857. La temeIite du chef lui valut ces vers :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
Mbolhicl (S), v. 1140.<br />
Id., v.1151-1154.<br />
Ibid., v. 1160-1163.
C11!\I'ITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 173<br />
"U\ l'annee s'eloigna ; resterent I'elu Mahammadou HamIllat, Idit] Hade-Wade,<br />
un talibe qlli n'a pas peur, et son groupe, des hOIllmes fideles, loyallx dans<br />
I'engagement de fidelite all Cheikh. lis dirent :<br />
" Notre mailre (Allah) I'a deCendu nous ne nous retirons pas;<br />
et allssi le I'rophele et nos Cheikhs, 10US ceux-lii I'om dCfendu.<br />
Comment s'enfuirait-on,llorsquel vers celles aux [grandsl yeux on se<br />
dirige'I" I.<br />
Ce brave que les Annales Senegalaises2 qllalifient "d'homme le plus dangereux<br />
du Fouta" (1'.111) mOuntl au combal . " Les Talibes I'avaienl surno,nme Hadewada "celui qui<br />
fait ce qu'on lui defend". C'etail donc, pour ses chefs, line mauvaise ti:te, un indiscipline el,<br />
pour I'ennemi, un brave que rien n'arretait. Et c'esl SUI"lout ii sa bravoure qu'il devait son<br />
surnonl"3.<br />
La geste peule Inentionne aussi le nom de Ardo Aliou Ndiereby, Pelll de Guede<br />
(Toro), tue a Miini-Mani. C'esl lui qui eut raison de Karounka Diawara, qlli lint tete au jihiid<br />
pendant pres de sept annees. L'epopee brosse ainsi les fails;<br />
"Le Cheikh compta une colonne le mw·di, il la remit aun Talibe, Ardo Alioll, qui<br />
se dirigea vas celui qui ne se convertira pas.<br />
lis se haterent dans leur nwrche, le mercredi, jusqu'au jendi;<br />
Karounka fut alleint, alors sa tele fut tranchee d'lIn selll coup"4.<br />
Ce flit le jendi, le 31 Mai 1860, moins d'lIne semaine apres I'wTivee de Cheikh<br />
Omar ii Niemina. Les traditions divergent ii propos du lieu d'execlltion de Karollnka : alars que<br />
Ies Traditions du Soudan OccidelllalS souliennent qlle c'est ii Sana, pres de Wonela, d'autres<br />
traditions situent I'action aTOllgouni, pluspres de Niemina.<br />
La version de Thithie Drame 6 presente la victoire d'Ardo Aliou con 11 ne le n:sultat<br />
d'lIn espionnage double de synchretisme religieux. Sur I'ordre de Cheikh Oma,:>1e ['eul se<br />
dCgnisa en berger et alia ravir le secret de I'invincibilile de Karounka 11 sa femme Sirakhonte)<br />
donI il avail [ue le pere avant de la reduire aI'etitt de servante. Ardo dit ii I'infortunee:<br />
•1<br />
:1<br />
(,<br />
Gaden (11.), 01' cil., nOle vv. 605-60?<br />
Annales Senegalaises de 1854-1885, Paris, J885.<br />
Gadcn (11.), Of! cil., note du vcrs 60S, p. 102 .<br />
Id., vv. 820-821, pp. 141-142.<br />
Traditions his!oriqucs cl tegolduires lilt Soudall Occidental, Trj)d.<br />
DclaCossc,Colllite d'Afri,!lIe Cran,aise, 19t3.<br />
Vnir noIre these de Doctoral de IIIe cycle, Dakar, 1984.
CHAPITRE 1 - EXALTATION D'UN HEROS 174<br />
" Mais Karounka est tres tCllI"<br />
Sirakhonte lui dil :<br />
" Karounka n'est pas tetu, settlemem vous n'avez pas encore decouvert ses<br />
astllces.<br />
Karounka possede une femme djinn appelee N'FENE Diarra, C'est elle qui a<br />
donne un gris-gris protecteur ii Karounka<br />
ElIe n'a qu'un sein.<br />
EIIe lui a remis sept cure-dents...<br />
On les coupe vers dix-sep\ heures, ils ont la longueur de sa main, ils doivent<br />
passer la nuit aupres de lui: le matin 'Ipres le reveil, il doit se curer les dents<br />
jusqll'ii ce qu'ils aiem la dimension de son auriculaire.<br />
Tout honllne qu'il combat, ille vaincra.<br />
Mais s'il n'acheve pas lies sept cure-dents!. toute personne qu'il combattra le<br />
vaincra" J.<br />
Alors, Ardo confectionna une balle magique et la remit ii Lamba Bokar Thiam<br />
qUI, aux termes de I'operation synchretique, devait etre le bourreau et la victime de<br />
Karounka. L'issue du combat fut fatale aux deux braves:<br />
"Lamba tomba de I'autre cote<br />
Karounka tomba de ce cOle-ci"2<br />
Le griot de Karounka, Di:1woy Salllfi, se tenant entre les deux cadavres,<br />
entonna un hymne ii la gloire de son seigneur:<br />
"On ne peut elre plus brave!<br />
Tuer I'homme qui vous a tue, tu es le premier ii avoir fail eela.<br />
Diawara ! Meme si tu meurs, IU n'appones plus desormais la home dans I'au<br />
de!ii"3.<br />
Pour vaincre un te! preux, il fallut decouvrir ses astuces puis les dejouer. On<br />
ne lIlanquera pas de rapprocher le nom de I'epouse surnaturelle de Karounka, NFENE<br />
DIARRA, de celui porte par les princes du royaume bambara de Segou. L'epopee semble<br />
suggerer, il sa maniere, la collusion de fait liam Karounka il Ali Diarra de Segou. La victoire<br />
2<br />
3<br />
Dieng (5.), Thcse de Illcm" eye"', Dakar, 19S4, VV. 127S-12S4, p. 253.<br />
Id., vv. 1321-1322, p. 261.<br />
Ibid., VV. 1324-1325, p. 261.
CIIAPITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 175<br />
dujihau, resultant uu eom;ours de I'enselllble ues eomballants de la foi, est plus imputable au<br />
groupe qu'a la seule person ne u'Aruo Aliou, bien qu'il soitun preux intraitable.<br />
L'heroisme ignore royalemenl les clivages elhniques et Ies stralifieations<br />
soeiales. 11 ne eonnalt que la valeuf. Sous ee rapport, la geste uu jihau reserve une place<br />
spcciale a Kouroubatou ou Batou DembCle, sofa (esclave) de Cheikh Ornar, ancien caplif ue<br />
YiunfCle Thiema, le roi massassi . A Thiayawal, la lulle emre le Foula el le Macina fUI<br />
precedee uu eOlllbat symbolique ues esclaves u'EI Hauj Olllar et u' Ahmauou Ahmadou, qui<br />
se solda aussi par un match nul plein de signes premonitoires. Chaque chef oruonna ases<br />
hommes d'elllerrer son esclave. Ce fUlle debut ues hOSlilileS. La Qacida en pOlllar n'a pas<br />
oubfie I'un des meilleurs sofas uu Cheikh :<br />
"Sofas faites LOUS vos efforts, vous serez fennes jusqu'a aller ficher en terre<br />
Kouroubalou Dembele, le brave qui n'a pas peur,<br />
Celui qui uit loujours le dzikr, le veridique dans Ison! amollf du Cheikh et qui<br />
ne Ilui I sera pas hostile,<br />
Celui a qui on a renuu teulOignage dans 10US les combats, el ceci n'esl pas<br />
rien"]<br />
terre") par ses pairs.<br />
esclaves, Balou et Yerngha:<br />
I<br />
2<br />
Celle injonclion de Cheikh Omar fUI executee et Balou fut enlerre ("fiche en<br />
Sidi Mb6thiel uecrit avee beaucoup ue piltoresque le combat des ueux<br />
"Yerngha se dirigea vers Batou, Balou se dirigea vers Yerngha.<br />
Le preux el son homologue se viren!.<br />
Yerngha se tilll sur !cs etriers, lres allenlif<br />
Yerngha, l'reil vir, le uoigt pres ue la gacllt:lIe.<br />
Alms Yerngha uecrocha sa lleche.<br />
Batou Delllbele chercha la gacheLle, son coup retelllit.<br />
La lance de Yerngha arriva et se posa au milieu de latele de Biitou.<br />
Le coup de fusil de Batou alteignil Yemgha.<br />
Les deux preux lomberem a la renverse, 1'un a la suite de l'auu·e"2.<br />
Gaden (11.). 01' cif.. , vv. 1033-1034, p. 178.<br />
Mbothiel (S.), vv. 1564-1572.
CIIAI'ITRE I - EXALTATION D'UN HEROS<br />
"Djali Mamadou, le pai"en<br />
11 le sermonna, mais celui-ci refusa, ille lUa.<br />
Moriba Safcrc, le pal'en ;<br />
II le scrmonna, celui-ci refusa, ille tua.<br />
Soungourou B5 Bodian, le pal'en ;<br />
11 le sermonna, celui-ci refusa, il le tua.<br />
11 pril Diara 11 Kougnak.iri, il y construisit une grande mosquce.<br />
1I tua Gharanguc Diara it YeIimanc,<br />
Guel5dio Dessc 11 Diongoye,<br />
M5moudou Desse 11 Kolomina,<br />
Mbandiougou Diara du Guimbanna,<br />
M5mady Kandia it Nioro,<br />
Barb 11 Madina Alaheri" I.<br />
177<br />
La magie du verbe pOllsse le griol 11 varier le ton et le rythme de ses versets. A<br />
un dcbut halelant oil le deuxieme vers revient maneler la victoire, succede une fin plus<br />
brutale cenes, mais aussi plus sobre et plus disnele : le verset se reduit alors a une<br />
juxtaposition du souverain 11 sa localitc avec ellipse du verbe principal. De meme, pour<br />
chanler le regne d'Ahmadou Ahmadou, jcune prince qui prefcra 11 I'austerite des fondateurs<br />
de la Dina, Ies dclices qu'offre le pouvoir royal, Sidi Mb6thiel essaie d'imiter la Illllsique des<br />
griols du Macina. Sa rcussite est admirable :<br />
"kikka kaa waaja, kaJwna waaja,<br />
ki kka keke waaja, keke neeri waaja,<br />
kikka keke, kikka kaka,<br />
kikka kaalu, keke waaja,,2<br />
Ces sons, depourvus de SCIlS precis reproduisent une mclopee au son du<br />
"naanooru", guitare simple dont on joue it I'aide d'un archei, tres prisee des Peuls nomades.<br />
En ontre, I'an de Farba se caractcrise par un gOlU tres prononcc de J'exagcration. 11 puise, 11<br />
eel cffet, ,es metaphores dans le stock du merveillellx des religions tradilionnelles. Au<br />
i\4acina, d'apres la version de Sidi Mb6thiel, il donna libre l:Ours asa famaisie,pour smisfaire<br />
:;'llIS doule une des exigences de sa caste: valoriser son maitre avec exces.<br />
2<br />
Mbolhiel (S.). vv. XX-99 (La Devise).<br />
Id., v. 1412.
CHAPITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 179<br />
L'astuce consiste a panir de premisses justes pour extrapoler et aboutir a dcs<br />
conclusions pour le moins discutables. En realite, bien que le jihad comptat d'authcnliqucs<br />
specialistes du Coran, la tradition ne semble avoir relenu que les noms d'Alpha AlulladolJ.<br />
frere aine du Cheikh, et Ahmadou Almamy Alassane. La demonstration militaire dc 13otol<br />
Sawa HfLko aussi inspira a Farba Ics remarqucs suivantes :<br />
"Les specialistes du fusil ne sont pas venus.<br />
Les spccialistes du fusil, s'etantmis en colere hier, Olll jete leur fusi!.<br />
Et depuis lors, les fusils ne sont pas encore descendus.<br />
lis sont au sixieme cie!.<br />
Ceux-Ia ne sout pas encore venus.<br />
lis atlcndent le jour du combat" I.<br />
Des fusils cn I'air, cn allente d'un combat contrc des lanccs, dc quoi inquH'ln<br />
les lancicrs maciniens. Ayant allcint son but, Farba lanc;.a a scs amis interloques : "OCCUl'l'I.<br />
vous de cc qui vous concerne, Farha s'occupe de ses affaires"2.<br />
C'cst alors que Koly Mody Sy du 13oundou enlre cn scenc a la suite de ses<br />
prestigieux devanciers. 11 rcussit a eblonir le Macina selon l'epopee toucouleur ; malgre lOut,<br />
le griot de Cheikh Omar ajouta une pincce de sel au plat si delicicux :<br />
"Les specialiSles de l'equitalion ne sont pas venus.<br />
Les specialistes du fusil aussi ne sont pas venus.<br />
Puisquc certains preux resles aupres du cadet d'Adallla Ayse,<br />
Quand ils se fiichenl, ils jettent le fusil en l'air;<br />
Et alors qu'ils font galoper le cheval,<br />
lis entrent par son anus,<br />
Et ressonenl par sa gueule.<br />
La, ils rencontrent le fusil, le tirent,<br />
Puis regagnent la selIe posee au-dessus du cheval"3<br />
Les Toucouleurs, ne pouvant se retenir, s'expriment par une litole: " Farba.<br />
ceci est tres fort!" En fait, la recherche de l'effet pousse le griot a jouer de taus les regislrcs :<br />
I<br />
2<br />
3<br />
Mbiilhicl (S.), vv. 1160-1165.<br />
Id., v. 1167.<br />
Ibid.. vv. 1215-1256.
CHI\PITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS 183<br />
I'crsollllages rlOstt: I'oppositioll entre !es pieux lOt Ies tunores. Mais lOe qui lOaracterise<br />
paniculierernelll noIre epopee dcmellrc le Iriompl1e solaire dll divill Sllr la bassesse de la<br />
lIl
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 186<br />
Woltala echappa au sche.na. "Symbole du militarisme imperial de Segou", el!c resista<br />
pendant cinq jours aux assauts des jihiidistes et leur fit meme subir un echec cuisant :<br />
"Quand apparalt le Cheikh Ornar anne de lance,<br />
Monte sur un coursier au galop Culgurant<br />
Qui dechire les rangs Bamanan du trait d'acier<br />
Faisant couler les scves de vie des corps vides.<br />
Le Cheikh est done dans la melee et conduit<br />
Les guerriers mystiques au courage ranime<br />
Par le severe exemple d'Omar le Fout:lIlke" I.<br />
En realite, la bataille de Woi"tala est, avec celIe de Thiayiiwal, les rares<br />
occasions qui unirent les trois traits qui Connent la psychologie d'Omar, telIe qu'elle est fixee<br />
par la tradition. Dans les vers precedents, on observe le tableau altendrissant du Chef qui<br />
preche par l'exelllple pour obtenir aussitot l'adhesion de son annee 1\ sa cause. Aussi WoH"la<br />
bascula t-elle au bout du cinquicme jour c1e combat malgre le courage et la detennination c1e<br />
Tata, fils alne de Bina Ali c1e Segou, it la tete c1'une Corte annee:<br />
Segou :<br />
"Tata et douze mille cavaliers<br />
Tata et vingt quatre mille gueniers<br />
Tous couches 11 Wonala, limons c1e l'histoire"2<br />
Le savant mystique prencl alors le pas sur le guerrier pour briser!cs icloles de<br />
"Le vainqueur de Woi"tala met piecl dans le palais d'Ali<br />
Il ecrase la chambre des grands fetiches Bamanans :<br />
"Makongoba ! Nangoloko ! Kontoro ! Bine Djougou !"<br />
Cns et lamentations pousses en pays Ball1anan"3.<br />
Delruire le pantheon bambara et jouir c1'une impunite totale con Cera au Cheikh<br />
Omar un statut qnasi divin en milieu segovien. Les recits de ce Cragment, en chantant le heros<br />
victorieux 1\ la tele de ses preux, insistent sur I'unite c1es traits du Cheikh qui en font un vrai<br />
Chef:<br />
I<br />
2<br />
3<br />
Diarassouba (C), op cil.,p. 35.<br />
Id.,p.31.<br />
Ibid.. p. 39.
C/IAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS<br />
, ,<br />
"11 est maitre de Dinguiraye, de Nioro, de Koniakary<br />
11 est maitre du Bal1lbouck, du Bclcdougou, du Fmlla<br />
11 est maitre de Merkoya, de Wo"ilala, de Sansanding<br />
II est mailre du Kaana ! 11 est l1laitre de Scgou-S ikoro" I.<br />
I 87<br />
L'anaphore "11 est maitre de", par dela I'insistance sClllantique, traduit<br />
I'ampleur des conqueles de I'ardent jih5diste, bcncriciant du concours de son annce.<br />
II convient cependant de s'attardcr sur le bris des idoles scgoviennes 11 cause<br />
de son intcret dralllatique. Selon la version dc Sidi Mbolhiel, I'amlce du jih5d trouva aSegou<br />
"des choses extraordinaires" ainsi que des ido!es :<br />
"lis onl trouve 11 Segou une lige de mil bien droite dans un tas d'ordures;<br />
Le las d'ordures brGlait, mais la tige reslait toujours fraiche.<br />
La tige ponait un epi,<br />
Un epi de millet.<br />
Le feu ne s'eleignait pas,<br />
La tige ne sechait pas,<br />
L'epi ne sechait pas.<br />
Tu sais qu'ils ont trouve 11 Segou une poule couvant ses oeufs,<br />
La poule ne mourail pas,<br />
Les oeufs ne se cIecomposaient pas<br />
Tu sais qu'ils ont Irouve aSegou une calebasse<br />
Con tenant du Iait<br />
Le lait ne se caillait pas,<br />
Le lait aussi ne se cIecol1lposait pas" 2<br />
Une variante de ce recit se trouve dans le recit de Thithie Dral1le. A la<br />
difference de la narration de Sidi Mb6thiel qui donne la parole aux jihildisles pour presenter<br />
les merveilles de Segou, la version du Nioro fait circuler la parole emre le 1H1ITateur - le grim<br />
Drame - elles anciens de Segou :<br />
I<br />
2<br />
"11 Yavail la du rnil qui avait pousse, bien droit.<br />
Pendant cent soixante ans, neuf mois et six jours,<br />
II ne ponait pas d'epi, il ne scchait pas,<br />
Diamssouba (C.), op cit.,<br />
Mb61hicl (S.). VV. 624-636.
dlAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS J 88<br />
On ne I'arrosail pas, il elait rout noir,<br />
11 y avail la du lail rrais, bicn au rcpos, qui ne se caillait pas,<br />
Pendant cent soixante ans, neur mois ct six jours,<br />
11 y avait la une pouIe qui couvait Ides oeufsJ,<br />
Pendant cent soixanlc ans neuf mois el six jours,<br />
Sans que les oeufs eclosenl. Elle ne se levait pas.<br />
1I y avail la un singc bien recroqucville, dont la bouche ne cessail de relllucr.<br />
line se taisait pas oh ! oh.<br />
"Puisque tous les prodigcs sonl la, le pouvoir loucouleur ne s'installera pas<br />
. ." 1<br />
\Cl .<br />
En cOlllparant les deux verSIOns, on releve un noyau narrarif de basc<br />
s'articulant autour dc trois "selll,lI1lcmes" : "I'epi de mil", le "Iail caille", la "poulc aux oeurs<br />
frais". La version de Drame ajoutc le singe babillard et la duree de I'elllpire dc Segou. Cc,<br />
merveilles necessilcnt pour elre dClruites I'opposition d'une force superiellre 11 ccllc dcs<br />
lalibcs.·Les causes de I'aneantissement de I'occuhisme segovien, bien quc les deux versions<br />
elevent le Cheikh au-desslls de ses vaillanls gllerriers, divisent cependant les dell x<br />
narraleurs. D'apres la version de Sidi Moolhiel :<br />
"Le phenomene elonna le FOllla.<br />
lis direnl : "nous devons en infonller le Cheikh" 2.<br />
Arme d'un sabre bien lranchant, Cheikh Olllar en donna un coup<br />
respeclivement a la tige, a la calebasse de lait, a la pouJe et a ses oeufs. COlllme tous Ies<br />
refoflllateurs, Omar sait qu'un ordre nouveau ne peut nailrc que sur les ruines de I'ancien.<br />
Un vieux segovien solidement attachc le lui fit relllarquer allssi :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
"11 dil : " cette poule si tu ne I'avais pas luce,<br />
Un fils serait sous I'aulorite de ses parenls,<br />
Une fcmme serail sous I'autorile de son man,<br />
Mais puisque tu as toul delTuit,<br />
Done toUI cela eSI dorenavalll gikhe"3<br />
Dicng (S.), Thesc dc lIleme cyclc, Dakar, 1984, pp. 289-291.<br />
Id.. p. 29 L.<br />
Mb61hicl (S.), vv. 715-719.
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 189<br />
Cette justification mythique de l'ordre ancien est, aux yeux d'Omar, enlachee<br />
de superstitions. C'est pourquoi le combattant anime par l'onhodoxie islamique du Dieu<br />
unique repond au vieillard :<br />
des coups de sabre:<br />
l1lystiques :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
"Tout ce que tu as avance la est vrai,<br />
Mais c'est lie aux fetiches!<br />
Or, Oumar n'aime pas les fetiches 1" I.<br />
Dans le recit de Drame, le pouvoir mystique du Cheikh le dispensa de dOlmer<br />
"Cheikh Omar etail a Sansanding, a la tomoce de la nuit,<br />
Le Cadet d'Adama Ayse detruisit tous ces objets magiques"2.<br />
11 les detruisit a distance, mettant en action un de ses lI11menses dons<br />
"Quand illes toucha, les idoles sacrees Makongoba<br />
et Nankoloto crierent ct direnl :<br />
"Le pouvoir peul est venu! le pouvoir peul est venu! le pouvoir peul est<br />
C'est la que les traditionalisles toucouleurs disent que:<br />
"Cheikh Omar s'est metamorphose en lion et a plante ses pattes sur la poilTine<br />
de Ali."<br />
Segou nie ce fait.<br />
Segou dit que, en pleine nuit, les idoles crierent en disant<br />
"Le pouvoir peul est venu."<br />
Les anciens de Segou se precipiterent vers le biitiment,<br />
lis trouverent lies idolesl toutes en repos : le lait frais elait devenu caille, le<br />
singe avait cesse de parler, le mil avait un epi, la poule avait des pOlIssins.<br />
11 (Bina Ali) dit : "Votre argument vienl d'etre ruine par Cheikh Omar. vcnez<br />
voir"3.<br />
Mbolhiel (S.), vv. 733-735.<br />
Dram" cr.), corpus these, p. 291.<br />
Id., p. 293.
CHAPITRE I - EXALTATION I)'UN HEROS 191<br />
I'imagination des griots, elevent Cheikh Omar en le montrant victorieux dans la confrontation<br />
qni oppose son mysticisme a I'occultisme segovien, La dramatisation de ce fait divers<br />
associee aI'action du Cheikh creent une atmosphere profondement epique, resultat d'un art<br />
paniculierement elabore.<br />
Outre I'episode du bris des idolcs qui met El Hadj Omar au premier plan,<br />
I'ambassade omarienne au Macina constitue le moment qui retlete le mieux les rappons entre<br />
jihtldistes. En effet, au fort du jihtld, Cheikh Omar, qni redoute line condamnalion de<br />
I'histoire, envoie des emissaires au Macina pour lenter de lrouver avec I'Emir peulun modus<br />
vivendi afin d'empecher une guerre pOUIO-lOucouleur. Le choix des emissaires, leur SlHtut et<br />
I'execution de leur mission constiluent un des sommets de I'intensile dramalique, qui<br />
parcourt, par ailIeurs, l'epopee du jihfid de bout en bout. Pour exalter la valeur guerriere des<br />
jihtldisles, Sidi Mbolhiel, faisalll fi de la rea lite hislOrique, puise des noms dans la liste des<br />
valeureux jihtldistcs I et Ies met en scene, dans de counes compositions epico-Iyriques,<br />
vestiges des fragments des recits heroi"ques profanes. Pour echapper au tribunal de I'histoire,<br />
Cheikh Omar envoie au Macina, seIon la version de Sidi Mbolhiel, des specialistes relevant<br />
de discipline variees. Alpha Oumar Thierno l3ayla doil avant tOUI porter une lettre speciale a<br />
Ahmadou Ahmadou de la part de Cheikh Omar :<br />
"Oh! Fouta, oh fils du Foula !<br />
le recherche ici un prcux hors pair<br />
Pour I'envoyer aupres de Ahmadou Ahmadou,<br />
Qu'il parte pour mourir, qu'il ne parte pas pour vivre"2<br />
Se sentant vise, Alpha "se Ieva brusquement" et dit : "I-1omonyrne... si tu<br />
rediges une leme pour I'au-dela el que tu me voies, tu as qui envoyer.<br />
Ecrb mon nom, demilin malin je vcrrai Ahmadou Ahmadou"3<br />
L'epopee ne saurait jointlre au Cheikh des hommes depourvus de valeur.<br />
Cesl pourquoi le nom du generill de I'annee fUI ecrit deux fois, puisqu'une autre mission<br />
pcrilIcuse illtendait un emissaire. Cheikh Omar formule ainsi son appel d'offre, d'apres Sidi<br />
MbothieJ:<br />
2<br />
3<br />
"0 Fonta ! 0 rils tlu Fouta !<br />
le cherche qui envoyer,<br />
Voir eo annexe la liSle des qllatre-vinlg dix premIers compagnons d'EI Hadj<br />
Omar.<br />
Mb6thiel (S.), vv. 798-801.<br />
I d., vv. 806-808.
CIIAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS<br />
I'appd du Cheikh :<br />
moment avant de dire:<br />
Demain mal in, en verile<br />
Je verrai Ahmadou Ahmadou" I.<br />
Le dernier candidat se deroba alors que tout le lllonde savait qui etait vise par<br />
"Je cherche quelqu'un qui sail bien parler,<br />
Qui sait dire des choses agreables.<br />
Pour qu'il suive ces fils du Fouw, volontaires,<br />
CandidaLs 11 la mort pour demain matin,<br />
Que I'oraLeur Ies cxalte,<br />
car, meme si un homme doit mourir, il est bon de le flatter.<br />
Qui (Jeut executer une lelle Lache ?<br />
Qui accepLe de les exalLer el d'affronler egalernent la mort ?,,2<br />
194<br />
Em·aye par I'idee de la mort, Farba Gouwa, le griot d'EI Hadj, se till un bon<br />
"Dans cc cas, ton fils surpasse Iou I le Foula en science.<br />
Envnie Ion Ills Ahmadou.<br />
De IOU I le FouLa, lOn fils eSI plus savant,<br />
car il est saint, fils de saint.<br />
1I conna;l Lout ce qui est ecrit.<br />
1I conna;t tOUI ce qui n'est pas ecrit.<br />
Si tu cherches reellement quelqu'un, envoie-Ie.<br />
C'esllui qui peuttransmellre un te! message"3.<br />
Decidelllent, certains jihadisLes ewienl durs 11 moudre ! Mais Cheikh Omar,<br />
qui conna;L 11 fond la psychologie des griols, finiL par recourir 11 un expedient cl:lssique, pour<br />
dClenniner Farba 11 faire coucher son nom sur la lisLe des emissaires :<br />
I<br />
2<br />
3<br />
"0 Foula ! {) enfants du POUIa !<br />
le cherche quelqu'un qui sait bien parler,<br />
Qui saiL ee qu'il dit,<br />
Mbolhicl (S.), vv. Bn-BB I.<br />
Id., vv.903-9LO.<br />
Ibid., vv.912-919.
CHAPITRE I - EXALTATION D'UN HEROS 195<br />
Qu'il slIive ces enfalHs du Foula, volontaires ;<br />
Demain qu'il Ies ex,llle afin que les poils de leur corps se levenl, meme si un<br />
homme doit mourir que ces poils se levent.<br />
Je vais lui donner une mesure d'or" I.<br />
L'appiil du gain poussa Farba a commellre l'erreur d'accepler, puisl]ue c'est<br />
aiusi qu'il interpreta son geste aupres de son fils, apres son monologue interieur:<br />
"Quand la nuit s'epaissil,<br />
Farba Sawa Gouwa dil :<br />
"Tu as commis la une erreur grave,<br />
Car s'inscrire pour une meSlln: d'or<br />
Devanl elre herilee par son fils, si I'on meUrl.<br />
Cela n'aura servi de rien.<br />
Demain, je ret"userai de partir"2.<br />
Son fils lui rappela que le refus est impossible au moins pour deux raisons : le<br />
slatut de griot implique tine certaine noblesse, ensuite tout ce qU'ecrit le Cheikh est<br />
indfac,:able. Pris enlre deux feux, Farba accepta de partir au Macina. Le recit de Sidi<br />
Mh(llhiel met alors en actes les declarations des emissaires, au grand etonnemenl des<br />
maciniens, rendus plus perplexes par les exageralions du griot qui, apres chaque exploit,<br />
disait au roi :<br />
"Peul regan.!e-moi par ici ...<br />
Ceux-ci sont des enfallls.<br />
Tu sais que pour une commission, ce son( les enfants qu'on envoie.<br />
On n'envoie pas Ies grandes personnes"3<br />
Qu'il nous suffise pour lraduire la delemlination des emissaires, d'ecourer le<br />
grinl, en ce soir memorable Oll il dec!ama la devise de son Cheikh au Macina, une devise<br />
cffroyab\c:<br />
''Torodo, mefiez-vous de lui.<br />
Dernier ne d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba Ali Moutar.<br />
Mbolhicl (5.), vv. 922-928.<br />
2 Id., vv. 934-040.<br />
:J Ibid., vv. 1077-1081.
CIIi\PITRE 1- EXALTATION D'UN HEROS<br />
En rcalilc, mcClcz-vous de lui.<br />
Elranger le matin, chef du village ii midi, Jrname I'apres-midi.<br />
En rcalile, mefiez-vous de lui.<br />
Le Riche, le Savanl,le Bien eduque, le Pourvu.<br />
Noble fits de nobles, en realile l1lefiez-vous de lui.<br />
C'esl lui qui a etudic el qu'on a surnonlllle Alpha Ol1lar.<br />
11 a faill'exegese du Coran el on I'a surnonlllle Alpha Ornar.<br />
11 a fait Ies circuils du pelerinage el visite le Mausolee.<br />
Ne savez-vous pas que c'es! le Cheikh qui a detruit Goufade ?<br />
C'esr le Torodo qui a detruil Ghegne et I'a communique aGhegneba.<br />
C'est le Torodo qui a detruit Farabanna.<br />
Le Cheikh a traverse le gue de Difikalelle.<br />
En realile, lllefiez-vous du Riche, du Savant.<br />
En realile mefiez-vous de lui" J.<br />
196<br />
Le martelemelll du "ndeenee" (mCtiez-vous) prcxJuisit I'efkt desire, Ahmadou<br />
Ahmadou exprima I'impression generale des paroles du griot : "Que tes paroles sont<br />
deJicieuses,"2 Entendons bien: terribles, puisqu'a Jeur suite le Macina se concerta pour<br />
adopler une position face aces jihfidistes qui vivelll dans I'intimite de la mort, convaincus<br />
'1u"'il est des mons productives, fecondes, qui couplent I'echec biologique avcc une viCloire<br />
Stir un autre regislre" 3.<br />
Mais le Macina a aussi impressionne les el1lissaires; malgre leur prouesse et<br />
des leur arrivee, Alpha Ournar le Chef de la delegation en informa Cheikh Omar, qui entra<br />
alars dans une vive colere :<br />
"Ah bon, Alpha Oumar Thierno 13ayla !<br />
C'estlOi qui clis que le Macinien est puissant.<br />
Par Allah, Fouta,je vOnS ferai savoir que c'est Allah qui est puissalll"4<br />
D'une maniere genera le, I'implicalion dalls I'acrion des personnages de<br />
i'epopee omaricnne lllel ell relief des relations reciproques dotH la dramatisation contribue a<br />
I'illleret du recit. S'inspirant de I'histoire, les griots, et ici Sidi Mbothiel en paI1iculier, font<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Mb6thiel (5.), vv. 1293-1311.<br />
Id., v. 1315.<br />
Madelcnat (D.), op cif.. p. 44.<br />
Mbiithiel (5.), VV. 1372-1374.<br />
,.
CHAPlTRE n<br />
TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE D'EL HADJ OMAR
CHAPITRE 11- TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE<br />
ils dircnt : "Maraboul,<br />
Oumar, le fils de Thierno Seydou, n'a pas recite ce qu'on lui a ecrit,<br />
Jusqu'a present le voici qui dort !" I.<br />
202<br />
La (!enonciation des elevcs est bien inutile, Omar ne erudit pouvant se<br />
pCrlllellre de donnir aux heures d'elllde. La corvee de bois aussi mct en relicf I'imbrication<br />
dcs temps historiquc ctmythiquc dans la vie d'Omar. Cepcndant, malgre les variations que<br />
fait observer le temps narratif, creant ainsi des instants equivoques sur I'axe chronologique,<br />
le n5cit se recentre sur le tcmps historique plus propice a revocation de la duree. C'esl ainsi<br />
qu'il note pour le deJai des etudes: "11 resta la-bas trois ans"2. Dun5e symbolique, les "Irais<br />
ans" representent I'oecultation heroYque plut6t qu'une reference precise, equivalant<br />
ordinairement au double ou au triple du temps de reference. Mais bien que situe en plein<br />
temps historique, ce delai accuse aussi un caractere mythique ]Juisqu'il fait rcssortir I'aspect<br />
extraordinaire de I'eleve surdoue. Intrigue par son disciple, le marabout le ramena chez lui :<br />
"Seykou resw la-bas jusqu'a I'hivernage", c'est-a-dire trois mois en gros : le leHlps de se<br />
reve!cr aux si ens. 11 se rendi! par la suite a Pire, Oll il marqua lui-meme le temps a sa maniere:<br />
"Un beau jour arriva ;<br />
Sa mere etail eu train de mellre du mil dans le mortier a Halwfir, cl Ini, il avail<br />
ouvert son livre ct lisait 1\ Pire Sagnakh6r ; dcs chevres sc leverent Cl se<br />
dirigerel\t vcrs le 1l1onier de sa Illerc;<br />
Dieu 111 voir cda a Seykou,a Pire Sagnakh6r;<br />
11 prit unc tige de mil, alors qu'il etait 1\ Pire Sagnakh6r;<br />
11 chassa les chevres ;<br />
Cdles-ci prirent la fuite et s'en retournerent"3<br />
l3ien que situe historiquement, le lemps des miracles est entoun5 d'une<br />
certaine equivocile, signifiee par des notations telles que "un jour... un beau jour" qui<br />
rendent difficilement reperables !cs evenements dans une suite chronologique ordonnee. 11<br />
,'agit en fait d'une duree consubswntielle au heros : " a la fois insituable dans le temps<br />
abSlfait, mesure extcrne du devenir, el inconcevable en dehors d'un temps concretement et<br />
interieurement vecu"4<br />
2<br />
:\<br />
4<br />
Bil (K.), vv. 251-254.<br />
Id., v. 281.<br />
Vcrsion incdilc de Halwilr.<br />
Zumlhor (1'.), 01'. cit., p. 240.
CHAPITRE 11- TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE 2U3<br />
De Pirc, universite cayorienne, Omar sc dirigea vcrs l'est. 11 arriva au SokolP<br />
et carnrne a l'ire "Seykou sejourna la-bas qucllJucs jours" I, le tcmps d'assimiler loule, les<br />
sciences enscignecs avant de se separcr de san hllte, Mohammcd Bello, pour rcpon
CIIi\PITRE 1I - TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE 204<br />
C'esl sous celle ere llc la devolion COnlllllll\e qu'inLervient la conversion de<br />
Djeli Moussa e&ffondrement de la puissance Diallonke :<br />
"La poudre gronda sans interruplion ;<br />
Le debuL de la soiree passa, c'elail bientoL le crepuscule,<br />
lis ab,merenL completemenL la ville,<br />
lis conperenL la teLe de Fadjimba,<br />
lis s'emparerent de ses hommes et des hOl1lmes de Tamba 130ukari :<br />
A taus on leur miL une corde" I.<br />
Le temps du jihiid introduiL une rupLure profonde entre jihiidisLes CL non<br />
musulmans, comparable it celle qui separe les musulmans des Imiens. En retletalll celte<br />
realiLe, I'arl des griots inaugure un temps dans la relaLion de I'inslant heroYque. La devise de<br />
Cheikh est it eeL egard exemplaire: "ELranger le maLin, chef de village it midi"2<br />
Dans I'epopee d'EI Hadj Omar, le u'aitemelll dll temps est mis au selvice de la<br />
tOllte puissance dll Cheikh et de ses talibes. Le griOl use en ce sens de la possibilile qu'il a de<br />
dilaterou de comprimer le temps namlliL Cest ainsi que la bataille de Karega implique une<br />
dilalaLion temporelle, pour meltre en gms plan les consequences de la deLerrnination de<br />
Cheikh Omar : "Mais voici que trois jours sonl passes el Karega n'est pas prise"3 Aussi<br />
,'allut-il "trois jours" de relraite spirituelle pOllr mobiliser une anllee de djinns capables<br />
d'anCalllir Karega .La compression temporelle exalte I'heroisme des eomlJaltants en les<br />
faisant voler de vietoire en viClOire:<br />
"POIlf Diongoye cc fut un JOUf,<br />
Pour Ko!omina cc fut un jour,<br />
Pour Guimbanlla cc rul UIl jour,<br />
POUf Nioro cc fUL un jOllf,,4<br />
Le rylhme haletanL de ees vers, martde par les anaphores "pour" eL "ce fut un<br />
jour", marque eJoquemment I'irruption d'une autre epoque, e1airement perc;ue par un vieux<br />
segovien subilement reduit it I'etat de vulgaire prisonnier:<br />
3<br />
4<br />
"11 arrive!"a demain aux gt:lJs de ta race ...<br />
M!Jcllhid (5.), vv. 41 H-423.<br />
Id., v. 1296.<br />
I bid., v. 596.<br />
Ibid .. vv. 592-595.
CHAPITRE 11 - TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE 208<br />
I<br />
2<br />
La Syrie.<br />
Chef peul.<br />
Hadj OmarTall?<br />
-"Que savez-vous de I'origine de Halwar, le village natal d'EI<br />
- L'origine de Halwar, d'apres ce que nous avons enlendu, ce<br />
que 1l0S ancetres Ollt diffuse, remome a Cham l . Ses habitants SOllt donc<br />
vellus de Cham, ils Ollt mis un temps considerable avanl d'arriver. lls<br />
s'inslallaient quelljue pan, emigraient puis repanaient. Ainsi firent-ils juslju'a<br />
leur arrivee a l'Ouest. lis descendirent par le Walo Barack, ils continuerent<br />
jusqu'1\ un endroit appeJe Halwar Maayel. lis y trouverent un homme appele<br />
Diomf0 2 Toro de patronyme Sail. Ce chef avait eu des demeles aGuede, ala<br />
suite de ljuoi il emigra vers cet elldroit. A leur arrivee, c'est celui-ci lju'ils<br />
trouverent lil. lis lui signifierellt !eur volonte de co!wbiter avec lui. Il dit aSOil<br />
jeune caplif, ou 1\ son petit serviteur, de leur montrer l'elldroil oll etait enterree<br />
sa captive Halwiir Tacko. Le mot Halwar designe la captive du Diomfo. lls<br />
arriverent au lieu indique, le trouverent aleur convenance, puis y habiterenl.<br />
Mais avant d'y habiter, les Tall s'y etaient installes trois ans<br />
auparavant. Quand ils vinrent, puisque des liens multiples existaient entre eux;<br />
matrimoniaux, rdigicux, sociaux, ils constituerent un seul village malgre leur<br />
grand nombre, car les Tall avaient !eur village apan, Djom Lobboudou avail<br />
son village a part,!es Thiam avaient !eur village apan et d'autres encore, le!<br />
Ardo Haga, tous ceux-ci avaient lem village a part. Tous ces villages fment<br />
n5unis et la famille Thiam fut desigllee Elimane Halwar, c'est-1\-dire le Chef<br />
du village. lls tisserellt entre eux des liens de parente et vecurent ainsi en<br />
communaute juslju'au moment Oll Thierno Souleymane Bal decida de faire la<br />
guerre sainte aux Peuls pa'lens ou Denyankoobe. Les habitants de Halwiir<br />
rt5pondirent a son appel, mais un peu tard parce qu'ils arriverent quelque<br />
temps apres sa mort. C'est Almamy Abdoul Qiidir Kane qui Ies rel(lIl. Les<br />
Halwariens lui soumirellt le probleme de l'habital. Illeur dit de choisir le sile<br />
qui !em convenait. lis vinrent jusqu'a l'actuel emplacement de Halwiir qui<br />
s'appdait alors Raw, ils direm que c'est la qu'ils voulaienl. L'almamy<br />
demanda a qui apparlenail ce lieu. I1s repondirent lju'il relevait de la propriete<br />
de Ardo Edi et de Djom Gamiidji. C'etair un point de jonction de deux<br />
proprietes.
CHAPITRE 11- TEMPS ET ESPACE DANS L'EPOPEE 209 J<br />
Abcloul Qfielir delimitn une tres large superfieie dans Ies e1eux<br />
proprietes et la leur c1onna. L'etendue comportait e1es marigots, des terres<br />
inonelees, e1es terres fertiles. Cest ainsi que sont venus les gens de lIalwfir.<br />
" - Et le nom Thiam d'ou vient-il ?"<br />
- Je vous ai e1it qu'ils sont venus e1e Chfim. lis n'avaient pas dc<br />
patronyme, mais en cours de route les gens les e1esignaient sous I'appellatiun<br />
de "ehaam naabe" (ceux de Chfim). Celte dCsignation subit de profolldes<br />
modifications pour e1evenir Thinlll.<br />
qu'ils sont venus de la-bas.<br />
- A leur arrivee que! Brack du Walo trouverent-ils sur le tr6ne ?<br />
- Non, je ne connais pas cc Brack, tout ce que je sais c'est<br />
- Quanel arriverent-ils a Halwfir et quel itineraire suivirent-ils ?<br />
- le ne sais pas,<br />
- Connaissez-vous leurs parents restes en Syrie ?<br />
- NOIl, je ne sais p,tS" 1.<br />
De I-Ialwfir, Omar se e1irigea, d'apres les recits e1e notre corpus, vel'S Pire<br />
Sagnakh6r, Sokoto, la Mecque, Meeline, Jerusalem. Ce trajet symbolique, e1irige c1'Ouest ell<br />
Est, plnce Omar sur la voie e1e la e10uble quete du savoir et de la spiritualite. Le retour le<br />
conlirme puisqu'il le fait passeI' par Missira ou il triomphe face aux e10cteurs ele la celebres<br />
ville. L'espace juxtapose alors des embOches ; neuves, cours e1'eau, oceans, plaines, monts,<br />
deserts, que le Cheikh franchit loujours allegremenl.<br />
Un autre espace s'ouvre : I'aire dujih5e1. De Dinguiraye, plaine elefrichee par<br />
le Cheikh aiele de ses ta!ibes, encerclee entre eles roches, a la grolte de Deguembere, ell<br />
passant par Tamba, Nioro, Karega, Segou, Hamelallahi, I'espace reflete toujours le pouvoir<br />
de Cheikh Omar. A la fin e1e son poeme, Hnllllnfil Samba se pennet aussi eI'inviter ses<br />
auditeurs, a la suite des jih5distes e1e se retrouver au borel elu neuve "Kawsarn", qui coule au<br />
paraelis. Mais c'est la un autre lieu, un autre espace<br />
D. LA DYNAMIQIJE SPATIALE.<br />
Loin ele figurer comme uu element e1u elecor. sorte e1e cou!eur locale, I'espace<br />
de I'epopee d'EI Hadj Omar fonctionue comme une clef de signification. Le passage cOl1tinu<br />
de I'espace mythique it I'espace physique recupere le temps a eles fins epiques. PrcllolIs<br />
I'exemple ele I'espnce mythique de Halwfir d'apres le recit cite plus hau\. Les Halwfiricl1s<br />
er I'origine de Halw5r. 13.0. 075. 057. Archives eullurelles du Senegal. 14<br />
Novcmbrc, 1975, (Enquctc crrcctucc n NdioUIJl, I)cpartC1llCll( de Podor).
I<br />
Lieux<br />
I Kalidou Ba : De la naissance aux joutes<br />
oratoires<br />
1. Halwar<br />
Naissance d'Omar<br />
Le nouveau-ne refuse de teter<br />
Seykou devient le soleil de Torobes<br />
Apparition de la saintete d'Ornar<br />
Ornar chez le marabout<br />
Ornar chez lui<br />
2. Pire Sagnakhor<br />
3. Vers l'Est :<br />
Sokoto<br />
4. La MecQue. Medine. Ba'iti! Mugaddass (Jerusalem)<br />
5. Missira ( le Caire): -la priere<br />
Chapitrc I : le temps et I'espace dans I'epopee d'El Hadj Omar.<br />
Tableau recapitulatif<br />
Indications de temps Temps ecoule<br />
"Dans !a nu it du Jeudi au Vendredi<br />
"Le temps passa jusqu'au coucher du solei!"<br />
" A panir de ce jour"<br />
"C'elait alors pendant !'hivernage"<br />
"Un jour, .. un jour... un jour... "<br />
"Seykou resta la-bas jusqu'a la fin de l'hivemage<br />
"Un beau jour arriva... "<br />
"Seykou sejourna !a-bas quelques jours.<br />
"Seykau sejourna !a-bas quelques jours<br />
"Le temps du pelerinage arriva... "<br />
"Dieu veut que je dirige ici votre priere pendant<br />
trois jaurs"<br />
une nUll<br />
une journee<br />
une journee<br />
un mann<br />
trois ans<br />
trois mOlS<br />
quelques jours<br />
quelques jours<br />
trois ans<br />
trOlS Jours<br />
10<br />
L0
CHAPrrUE III<br />
LE SCHEMA NARUATIF
CHAPITRE 1lI- LE SCHEMA NARRATIF 218<br />
apparaissent aussi comme une double migration: d'abord pour repondre a I'appel d'Allah,<br />
ensuite pour combattre les rois pai'ens qui ref,lsent d'embrasser l'lslam.<br />
Or ce mode de selection est caracteristique de I'epopee arabe, en particulier de<br />
celle des Beni-Hilal l . Composee de trois entites fonnant la tribu hilalienne, le corpus de cette<br />
geste se structure ainsi :<br />
-"As-Sira" ou la genealogie de la tribu et sa disparition dans le temps et dans l'espace.<br />
-"Ar-Rihla" ou la migration des Beni-Hilal dans le Nadj.<br />
-"At-Taghriba" ou le depart vers le Maghreb. C'est aussi le recit des luttes entre les Hilal et<br />
les royaumes jalonnant leur passage entre Nadj et l'lfriqiya.<br />
Comme pour les phases de l'epopee d'Omar, la trilogie hilalienne ne se<br />
retrouve, en general, que partiellement chez un seul et meme auteur :<br />
" Les deux demiers cycles sont les plus connus panni les transmetteurs de<br />
I'epopee hilalienne. Toutefois, le sujet principal, en tout cas celui qui est reste<br />
dans la memoire populaire collective, maghrebine en particulier, et arabe en<br />
general, semble etre " la migration alaquelle la tribu a ete forcee"; farcee par<br />
un fleau naturel, la secheresse, et par consequent la famine, mais aussi le refus<br />
des pouvoirs avoisinants d'accorder aux Hilalle droit de "consommer", eux et<br />
leur betail, le produit de la terre"2<br />
Des lars, une question se pose; l'epopee arabe a-t-elle influence l'epopee<br />
peule islarnisee ? Il est difficile de decider, malgre la maitrise de l'arabe de certains griots et<br />
lettres omariens.<br />
On peut cependant fonnuler deux hypotheses en guise de reponse.<br />
La comparaison des versions epiques arabes faisant de l'epopee hilalienne la<br />
plus ancienne geste arabe, il est pennis de penser que le modele a pu inspirer les lettres du<br />
jihiid omarien, auteurs de versions. Mais on peut aussi estimer que les jihiidistes, mus par<br />
une oeuvre hautement religieuse, pouvaient parfaitement ignorer la litterature arabe profane.<br />
En composant leur recit, il est possible qu'ils aient donne libre cours aleur imagination.<br />
La question merite surtout qu'on s'y attarde a cause des rapports, presentes<br />
generalemem comme conflictuels, entre l'epopee et !'Islam dont Etiemble se fait l'echo dans<br />
l'article "epopee" de I'EncycloplEdia Universalis ; "L'ideologie religieuse de I'Islam n'a<br />
---------/<br />
2<br />
"Sirat Beni Hilal",<br />
date des environs<br />
Egypte.<br />
epopee arabe la<br />
du Xle siccle,<br />
/<br />
mieux connue et la seule lransmise. Ellc<br />
les Beni Hilal etant alors inSlalles en<br />
Ayoub (A), "L'epopee du Maghreb : unite et diversitC", in' Noire librairie,<br />
n° 83. Avril - Juin, 1986. p.62.
CHAPITRE ill - LE SCHEMA NARRAl1F 219<br />
marque que superficiellement l'elaboration de l'epopee "(Peter Boratax, et Louis Bazin) ;<br />
comme si la transcendance d'Allah et l'interdiction de l'imaginer, de le representer sous<br />
forme humaine ou animale, leur avait coupe le souffle epique. A quoi s'ajoute que, tout<br />
musulman etant qualifie pour diriger it la mosquee la priere du vendredi (sic) le "clerge" n'a<br />
pas en Islam le pouvoir qui fut le sien dans I'lnde, it Rome, dans le boudhisme ou le<br />
christianisme. du coup, point de Gesta Dei per Ambos!<br />
Encore faudrait-il nuancer : Lucienne Saada a publie, grace it l'Institut national<br />
d'archeologie d'art, le texte arabe et la traduction franyaise de la Geste des Banu Hilal, texte<br />
tres important quant ii la theorie generale du genre epique" I.<br />
La realite est toute autre 2 car, malgre l'obstacle religieux, l'expansion arabe<br />
genera de longs recits qui firent les delices d'une reception populaire. Ci tons, outre la geste<br />
des Beni ou Banou Hilale, l'Emir Sei'f, et surtout le Roman d'Antar. Cette derniere oeuvre,<br />
composee it partir de poemes lyriques (VIeme-XIIeme siecles) diffusa la geste d'Antar, fiis<br />
d'une esclave abyssine, qui dut faire preuve d'une bravoure exceptionnelle pour meriter la<br />
main de sa cousine Abba.<br />
D'une maniere generale " la plupart des auteurs modernes repugnent it utiliser<br />
l'historiographie arabe, conjointement a l'historiographie latine"3 pour reconstituer par<br />
exemple I'expedition espagnole de Charlemagne qu'elle eclaire cependant. Or,"les textes<br />
arabes qui nous sont parvenus, sur l'expedition de Charles en Espagne, parlent de cet<br />
evenement en deux occasions distinctes. La premiere a pour motif la remise aCharles du<br />
prisonnier Thalaba, general d'Abderrahman de Cordoue; on trouve ce recit dans l'Akhbar<br />
Madjmua exIeme siecle), et autres. La deuxieme occasion ou les Arabes font allusion it la<br />
venue de Charles en Espagne est le recit de la capture, par le rai franc, d'Ibn AI-Arabl, et de<br />
la liberation de ce dernier par ses fits. On ne retrouve ce recit que dans un passage place par<br />
Ibn AI-Athir avanl la notice consacree aThalaba"4.<br />
I<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Qu'est-ce quijustifie alors le rejet des sources arabes?<br />
"On dirait que l'autorite des Annales royales n'admet pas aisement de voir<br />
modifier par des textes rivaux son recit consacre par les siecles"S.<br />
ENCYCLOPIEDIA UNIVERSAL/S, Corpus 7, Paris, 1984, p.72.<br />
.Voir .Yassine (M.) Le .genre epique dans la litterature arabe jusqu'ii la fin<br />
du premier siecle de l'hegire, UniversitJ:. de Lyon Ill, Doctorat de lllemc<br />
eycle, 1980. ./<br />
Pidal (R.M.), La chanson de Roland et la tradition epique des Francs, Paris,<br />
1960, p. 183.<br />
Id.. p. 185.<br />
Ibid., p. 185.
diAplTRE III - LE SCHEMA NARRATIF 220<br />
Influence cl'un modele ou penl1anence de slruclmes reslent des hypotheses<br />
plausibles, alors que demeure eenaine la IranslllIJnance des schCJl1as narratifs all double plan<br />
diachronique et syncbroniqne. En Olllre, Ies phases de l'epOI)ee dlljihfJd,l1elleIJt en e.vilknc"<br />
les rappons dynamil]ues existant entre les structures narratives Cl Ies mecanisnles de ia<br />
creation epique. Notre corpus illuslre ce constat puisl]u'au dclit de la base de la narr:llion, il \'<br />
a la libre crealion de chaque artiste. En cc sens, la version de Kalidou BfJ ressembIe it 1111<br />
eonte de I'enfance d'Omar et de ses debuts, celle de Sidi Mbi'Jlhicl ;lune vaste symphonie On<br />
it une ehante-fable, avee ses alternances de panies nanees et chante.es, enrin celle de Ly. pillS<br />
elaboree, rappelle une sorte de pocme tres Iravaille, Sillle au eandollr de la priere Cl de ia<br />
chranil]ue.<br />
Mais pour mieux eerner la matrice genetique de I'epopee d'EI Hadj Omar, il<br />
nous semble plus indique de comparer le poeme de Ly aLa Qacida ell pOl/lar : deux epope.es<br />
hautement elaborees :<br />
Structure du poeme de 1'!ammfJt Samba Ly:<br />
Vers 1-3. Naissance d'Omar aI-1alwfJr.<br />
Vers 4-10. LejihfJd ou guerre sainle.<br />
Vers 11-25. Le pClerinage: visite de la Mecque, de M6dine. du Caire.<br />
Vel's 26-121. Le jihfJd : lulte conli'e Ali, rai de Segou et Ahmadou Ahmadou, emir du<br />
Macina.<br />
Vel's 122-126. Disparition de Cheikh Omar it Deguembere.<br />
Vel's 127-145. Diseours OlIlre-lombe de Cheikh Omar, cmis au slyle direct. 11 y rappelle ses<br />
dons et son election par Allah.<br />
Vel's 146-149. L'auleur fail I'apologic de son Cheikh.<br />
Vel's 150-154. L'auteur se presenle.<br />
Vel's 155-164. Doxologie ajoutee par Demba San qui, en faisant I'apologie de Cheikh Omar,<br />
cbauehe le cycle omarien compose de son epopee, de eelles de ses enfants et des valeureux<br />
jihadistes.<br />
Vel's 165-169. Priere de pardon pour !cs croyants et soulwil de IJOire dans I'eau cle<br />
"Kawsara", fleuvc ell! paraclis.<br />
Ycrs 17(). Fin du poeme<br />
Structure de La Qacida en p(JII!ar :<br />
Avan! le pelerinage. Vel's 1-30.<br />
Vel's 1-14. Prologue: le poCte chante Dieu, son Prophcte, les Cheikhs.<br />
Vel's 15-30. La formalion d'Omar; de I'adolesce'nce a l'fJge de 30 ans.<br />
Le pelerinage. Vel's 31--146.<br />
Vel's 31-45. Le pelerinage aller : de HalwfJr ala Mecque.<br />
Vel's 46-73. Le pelerinage: rites et rillleI.
CHAPITRE III - LE SCHEMA NARRATIF<br />
11 - LES L1EUX D'ACTION<br />
225<br />
Soigncusell1cnt selcctionnes par la narralion epique ponr Icur t;arac{l\p:'.<br />
symholique, Ies licux dc l'epopec du jihad, loin d'Elrc indiffercnts, p,lrticipcnl aClivclll'"'' et<br />
l'epiphanie heroi'qne, Dcs tcrrcs ;Ilolldecs par la crne du tlenve Senegal dc Halw,1r. it la "r,HI','<br />
dc Deguemocre an cocur des falaises dc Bandiagara, cn passant par les trajcts du savnir ct Ics<br />
parcours du peJerinagc, l'espacc dc l'epnpec oll1ariennc rJelimile Ull immense ellsemhle, it la<br />
l1lesure de la demesure dc snn heros. UIl survol de cet espace visite par Cheikh Omar condnit<br />
des rivcs du Senegal it eelles du Tigre et dc l'Euphratc.<br />
El Hadj Omar naquit it Halwar, en plein Cneur du Toro, dans une case<br />
devenue depuis un lieu de pclerinage et de recueillement. L'interference du mYlhe de<br />
fondation du villagc et des presages de I'epopee d'Omar pousse les griots it illl trailClllClll<br />
parliculicrement elahore du premier cadre de vie du heros. Db lors, Halw
CIIAPITRE III - LE SCHEMA NARRATrF 227<br />
Ce n'esl pas un hasard si loutes Ies versions de I'epopce d'EI Hadj Omar lonl<br />
co','lIcidcr la naissance de l3amu avec le Ramadan. Cc mois bcni place sous son aUlorilc, en<br />
Islam, Ies personnes qui I'observenl regulierclllcnl. It eSl aussi reyu que pendanl celte<br />
periode Satan eSl redus el que Ies pones de I'enfer reSlenl fcrmces. Le Ramadan acquicn des<br />
lors un relief particulicr puisqu'il singularise la (lestince d'Omar, cnlourc de benedictions. Le<br />
Illoment choisi place la c,uTiere dll hems sous le signe de la ferveur rdigicuse.<br />
Mais si ce lemps symholiqlle engendre line epopee glorieuse, c'est SUflOll[ 11<br />
cause de la "Balaille c1c l3ongoye" qui semble I'impliquer.<br />
Dans IOUS Ies cas, au signc de la rervellr repond le signe du jihficl el l'epopee,<br />
qui resout IOUS Ies pmblemes, prefere coordonner Ramadan et jihfid, pour mieux eclairer la<br />
double voie qui sollicile Omar. Par un jeu de reflets, la fin de I'epopec d'Omar, scion la<br />
version de Niagane, montre un jihfidisle en plein Ramadan qui entre clans la gmlte de<br />
Deguemocre. L'on ne pCUl s'empccher de reiever la similitude des tableaux inaugural el final.<br />
L'histoire s'est-elle repetee ou a-t-on reinterprete la naissance en fonction (le la disparilion ?<br />
La premiere hypolhese nous semble plus plausible bien qu'il SOil difficile de deeider<br />
objeCliyemen1.<br />
Mais le temps du pelerinage aussi a passionne Ies griots el Ictlres de la gesle<br />
du jihad. Alors quc le depafl ctle relour du Cheikh posent des problemcS de dawlion precise<br />
aux hisloriens, les special iSles de I'epopee s'accordent pour en faire le telllps c1es miracles<br />
par excellence. Tmis momcnts reviennent invariablemenl au lil dcs reCilS : I'enlrevue avec El<br />
Cihfdi, la visite en Syrie etlesjoules maloires du Caire.<br />
Mohammed El Ghfili, Kh:i1ik (le la Tidjanyya en Oricnt confera, au Mausolee<br />
du Prophi:le, le litre de Khalife de la Tlcljanyya 11 Chcikh Olllar sur ordre dc Al-Tidjfini et dll<br />
Prophele. Ce telllps el ce liell Suscilenl de longs devcloppcmellls d'autant pillS qll'ils<br />
aniclllent la Tidjilnyya (Illyslicisllle) it la Charia (theologie, elllencllle ici au sens<br />
d'onhodoxie) d'une pan, el qu'ils rallachenl, c1'autre part, le jihfid olllarien au jihficl c1u<br />
PrOphele.<br />
La visile de la Syrie clenclle pouvoir c1u Cheikh dans I'espace el, bien que les<br />
fails soienl reels, !em reeuperalion mylhiClue reSIC tSvidenle. En effet, les griots se plaisant i,<br />
situcr I'origine des Thjfim de Halwiir aChfim 1 , il fut aisc de lrouvcr des liens enlre le voyage<br />
du Cheikh et le nonl c1e ses parents.. Du point de vue oe I'CSlhetique epique, la durec du<br />
.icjollr d'Ol1lar en Syrie, Oulre qu'elle lraduilla pmlonde iniliation du heros, met en evidence<br />
i'illlcraction de I'epopee cl dll mylhe.<br />
L'autrc visage c1u lClllPS invariant c1es versions de I'epopee 011 jih:1c1 s'incarne<br />
atravel's les JOUles oralOires c1u Caire, opposanl les "Ulelllas" c1e la celebre Universitc AI-<br />
L'cuphonic "Thiam"!"Cldm" rnilitc en Icur favcur
CHAPITRE ill - LE SCHEMA NARRATIF 235<br />
L'oralite, c'est aussi les omements du langage ou elements paralinguistiques<br />
comrne la mimique, la musique. Ecoutons ace propos une des creations de Sidi MbOthiel,<br />
destinees sans doute avant tout achatouiller l'oreille:<br />
"kikka kaa waaja, kaaniiia waaja<br />
kikka keke waaja, keke neeri waaja<br />
kikka keke, kikka kaka<br />
kikka kaalu, keke waaja."<br />
Le griat donne ici l'illusion d'un univers feerique pour captiver l'attention de<br />
l'auditoire. C'est sans doute ce qui detemlina les lettres apuiser dans cet art, en s'ouvrant<br />
ainsi aI'influence de l'oralite : La Qacida en poular et le poeme de Ly sont, ace sujet, des<br />
exemples vivants d'oralisation de fonnes ecrites. Inversement, des traces de culture ecrite se<br />
retrouvent en grand nombre chez des griats comme Kalidou Ba, Sidi MbOthiel, Abdoul Ala.<br />
Un pont relie griotS et marabouts de I'epopee omarienne, dont l'an corse le<br />
schema narratif d'appons specifiques pour donner la grande epopee du jihad. Mus par le<br />
sentiment de susciter des adhesions massives a leur cause, ils puisent dans les formes<br />
traditionnelles les ressourees capables de vehiculer le message islamique. Cette fusion<br />
formelle est paniculierement adaptee ala dynamique socio-historique, et paniculierement au<br />
modele theocratique.<br />
Ainsi, au lieu de s'opposer, I'oralite et I'ecriture se completent. " Au ras des<br />
faits et dans le fil de I'histoire, ces tennes apparaissent comme les extremes d'une serie<br />
continue. Des traits qui les opposent, queIques uns, eenes, sont incompatibles, sinon<br />
contraires (ainsi le recours a la vue dans un cas, a I'OUle dans I'autre); mais la plupart ne<br />
sont que de degres, la difference consistant, de maniere tres variable, en un plus ou en un<br />
moins (ainsi en ce qui conceme les limites spatio-temporelIes du message)" 1<br />
realite.<br />
Les manuscrits et les versions epiques du jihad omarien confonent cette<br />
Du point de vue de la diffusion de l'epopee omarienne, les manuscrits et les<br />
productions orales vivent une situation originale. L'epopee orale, ayant la memoire pour<br />
mode d'existence, trouve dans la voix une transmission qui luipennet de subsumer l'espace.<br />
De nos jours, les mass medias contribuent aussi puissamment ala diffusion<br />
des formes orales. C'est, du reste, en se fondant sur ee critere que Raman Menendez Pidal<br />
definissait comrne "poeskpopulaire" des compositions de date recente, repandues dans un<br />
public assez large pendant une periode plus ou moins breve au cours de laquelIe leur forme<br />
Zumlhof (P.), op. C;I., p. 35.
CHAPITRE ill - LE SCHEMA NARRATIF 237<br />
scribe, sous la forme de breves notations marginales ou infrapaginales, apres transcription<br />
minutieuse de l'original. Ainsi, assure d'une large diffusion grace a la longue chaine de co<br />
auteurs acquise au fil des ans, le manuscrit omarien peut alors souvent presenter des couches<br />
differentes resultant de remaniements inevitables :<br />
"Les remaniements conserves se revelent comme soumis a deux tendances<br />
opposees. La principale, celle de I'amplification inventive, ajoute de<br />
nouveaux episodes et des incidents qui accroissent l'interet du recit. La<br />
secondaire, celle de I'abreviation expositive. condense I'exposition des<br />
themes deja connus..."I.<br />
Le double mouvement s'observe aussi dans les manuscrits et dans les recits<br />
oraux omariens domines par la compilation des premiers auteurs et la collaboration entre<br />
auteurs et compositeurs. Il convient de preciser aussi que le mode de composition et de<br />
diffusion des poemes et des manuscrits omariens limite leur portee. Cependant, malgre<br />
l'originalite de ses modes d'existence et de sa diffusion, l'epopee d'EI Hadj Omar ne fait que<br />
s'inscrire dans une tradition devenue classique. Un eminent specialiste des chansons de geste<br />
resume excellemment ces questions essentielles :<br />
" Que toute la litterature narrative ecrite en vers au XIleme et au XIIIeme<br />
siecle ait ete composee en vue d'une diffusion orale par le chant, par la<br />
recitation mimee ou par la lecture expressive, c'est chose parfois oubliee mais<br />
pourtant bien connue, et il va de soi que cette litterature doit ason mode de<br />
diffusion cenains de ses caracteres particuliers"2.<br />
Dans la geste d'Omar aussi, le travail des griats et des lettres rappelle<br />
curieusement celui des jongleurs et des trouveres, la seule difference etant que l'epopee<br />
islamisee s'est greffee a une tradition orale vivante, alors que dans les chansons de geste<br />
l'anteriorite de l'oralite par rapport 11 l'ecrit divise encore [es specialistes.<br />
En definitive, en diffusant Ies versions orales et les manuscrits de la geste<br />
d'Omar ala suite des formes de la litterature pulaar, le long des pistes migratoires et aux<br />
quatre coins de Ieurs theocraties, les Peuls ouvrent majestueusement leur genre majeur sur<br />
I'exterieur. C'est ce dont prend parfaitement conscience le lettre toucouleur Thierno<br />
Alhassane Diaw de Wodobere, plus connu sous le sobriquet de Thierno Boy:<br />
2<br />
Pidal (R. M.), La chanson de geste et la tradition ipique des Francs, 2eme<br />
edit. Paris, 1960,p. 82.<br />
Delbouille (M.), "Allocution" in Actes du Colloque de Liege, 1957,p.17.
CHAPITRE IV<br />
LA GESTE D'EL HAOJ OMAR COMME REPRESENTATION DU<br />
MONDE
CHAPITRE N - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 243<br />
parfois de confirmer Homere et ses homerides. L'epopee d'EI Hadj Omar, par contre,<br />
suscitee par le jihiid, fut ecrite et composee oralement au moment des evenements rapportes,<br />
./<br />
c'est-a-dire au moment meme des faits. Or, cans cette societe de tradition orale ou la graphie<br />
arabe ne fit son irruption qu'avec les jihiidistes, du moins ce fut le cas dans bien des<br />
contrees, l'epopee lient aussi lieu d'histoire.<br />
Cependant les historiens africanistes prererent s'appuyer sur la materialite des<br />
faits du jihiid, ce qui implique un traitement de la realite different de la vision epique. Il se<br />
cree alors des ecarts entre la description historique de la situation du Soudan Occidental a<br />
l'epoque du jihiid et la representation du monde qu'en donnent les versions epiques. La<br />
confrontation de ces deux approches d'une meme realite eclaire la representation du monde<br />
que vehicule la geste peule islamisee.<br />
1- LE SOUDAN OCCIDENTAL A LA VElLLE DU JIHAD OMARlEN D'APRES LES<br />
HISTORIENS<br />
Le jihfid omarien eut pour cadre d'operation un vaste ensemble allant de la<br />
Haute Senegambie a la boucle du Niger, et des montagnes du Fouta-Djallon au desert du<br />
Hodh. Gigantesque mouvement, le jihiid imprima une marque singuliere pendant pres d'un<br />
demi-siecle sur ce monde, qu'il pla
CHAPTIRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTAnON DU MONDE 247<br />
exterieur, l'Islam se dilua et se transfonna en Islam local, Islam noir, ou se laissa absorber<br />
par la religion traditionnelle et rejoignit l'animisme seculaire.<br />
Telle se presentait la situation intellectuelle et religieuse au Soudan Occidental<br />
dans la seconde moitie du XIXeme siecle, a la veilIe du jihiid omarien. II y eut cependant au<br />
debut du XVIIIeme siecle et jusqu'a la premiere moitie du XIXeme siecle une certaine<br />
renaissance; des etats qui n'avaient pas joue jusqu'alors un grand role dans I'histoire<br />
s'affmnerent.<br />
Les etats peuls ; Fouta-Djallon, Fouta-Toro, Macina, Sokoto, furent secoues<br />
du XVIIeme au XIXeme siecle par une vague de revolutions theocratiques qui amena le<br />
developpement d'une vie intellectuelle et religieuse florissante 1. Celle-ci, d'essence<br />
islamique se manifesta avant tout a travers des monuments; mosquees, palais, et par des<br />
oeuvres ecrites, poesie, litterature, chronique. L'enseignement qui vehiculait cetle culture se<br />
pratiquait a l'ombre des mosquees. Aussi chaque mosquee avait-elle sa ou ses ecoles avec<br />
son ou ses maitres de renom, ce que traduit I'appellation mosquee-ecole.<br />
L'enseignement comprenait trois niveaux ; le premier, celui des debutants,<br />
"Karanden" en "fulfulde", concernait l'apprentissage de la lecture et de l'ecriture ; le<br />
deuxieme niveau, destine aux eleves qui avaient maitrise le Coran, "almubbe", etait reserve it<br />
la grammaire ; enfin le troisieme niveau s'adressait aux etudiants, "taalibaabe", devenus<br />
adultes pour leur ouvrir les portes du savoir ill'aide de la rhetorique, de la theologie, de la<br />
logique, du droit, de l'astrologie, de l'astronomie, de I'histoire, de la geographie, de la<br />
pharmacopee. Cet enseignement s'adressait it toute personne qui en manifestait le desir. En<br />
fait n'en beneficiaient que les enfants des cites, ceux de hauts dignitaires, de riches<br />
commerqants, qui pouvaient seuls disposer du temps assez long que reclamaient les etudes.<br />
Malgre tout, les enfants du peuple avaient droit it la culture minimale necessaire it la<br />
connaissance des bases de l'Islam. Les eleves doues poursuivaient les etudes et devenaient<br />
enseignants, metier difficile, ingrat, peu remunere. L'absence de document sur le statut de<br />
ces enseignants ne nous permet pas d'etre plus precis, mais I'observation aujourd'hui de<br />
certains centres d'enseignement islamique traditionnel 2 peut donner une idee de la situation it<br />
l'epoque.<br />
Les maitres ne recevaient aucune forme de retribution; ni de l'etat, ni de la<br />
ville. Les eleves et leurs parents en comblaient cependant certains de cadeaux somptueux.<br />
Quelques rares professeurs, parmi les plus grands, recevaient des dons des souverains ou<br />
2<br />
Suret /anale (1.), "Essai<br />
Mgemonies peule" XVII" <br />
1969, pp. 5-29.<br />
Ould Mohamed<br />
[,introduction de<br />
Rabat, Universite<br />
sur la signification socialyel historique des<br />
XIX" siecle", in Recherches africaines, nOI,<br />
Adellahy (M. A.), L'enseignement traditionnel et<br />
I'lslam en Mauritanie, Memoire de fin d'etudes, ENS,<br />
Mohamcd V.)1980-1981.
O-lAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE<br />
a) La conquete<br />
249<br />
Inscrit en pleine mutation, le jihild omarien se situe a la croisee de la rupture et<br />
de la continuite. II ne doir son originalite qu'a son ampleur et ason intensite. En effet, le<br />
mouvement du jihiid apparait, a bien des egards, comme une tradition bien ancree en<br />
Senegambie : jihiid des Almoravides au Xleme siecle, des Sharr Bubba au XYIIeme siec1e,<br />
des Torodbe au XYIIIeme siecle, et plus recemment, vers 1835, jihiid du marabout<br />
toucouleur Mohamadou Omar dans le Moyen Senegal. L'action d'Omar Tall sera cependant<br />
sans commune mesure avec celles qui ront precectee.<br />
L'histoire du jihiid omarien au Soudan occidental commence en fait<br />
immediatement apres le retour du pelerin. On retient generalement que, de 1849 a 1852,<br />
Cheikh Omar alors installe a Dinguiraye s'occupa a preparer le vaste mouvement qui allait<br />
bouleverser l'ordre existant au Soudan. En 1852, un incident ropposant ason hote, le roi de<br />
Tamba, donna le signal du jihiid qui devait mener Omar et ses jihiidistes des rives du Senegal<br />
aux rives du Niger, ne s'arretant que dans les falaises dogons de Bandiagara.<br />
Sitot dec1enche, le jihild connut un succes prodigieux 1 : apres six mois de<br />
siege, le puissant royaume de Tamba s'ecroula suivi par son voisin, le Menien d3ns le Nord<br />
Boure, qui est une region aurifere. La possession des mines du Haut-Niger procura alors ii<br />
Cheikh Omar les moyens de s'approvisionner en armes et en munitions. Par la suite,<br />
galvanises par leur foi et leurs victoires, les "muj3hidin" conquirent en six mois le Bambouck<br />
riche en or. 11s soumirent par la suite [es royaumes de Souloun, des deux Diabe, du<br />
Bambougou, avec pour capitale Koundian, en sornme toutes les principautes situees dans le<br />
Bassin du Bafing. L'armee des combattants de la foi se tourna par la suite vers rOuest et<br />
s'empara de Tambaoura, dont la capitale, Dialafara, est egalement riche en or, des tatas du<br />
Niagala dont Khokhadion et Sirimanna. Fixant sa residence ii Dialafara, Cheikh Omar<br />
conquit ainsi tout le Bambouck, Farabanna comprise, malgre sa place fone qui avait la<br />
reputation d'etre inexpugnable:<br />
"Ainsi, a la fin de 1854, le jihiid omarien etait devenu la principale force<br />
politique et inilitaire sur la rive gauche du Senegal'. Omar etait mS1tre des<br />
mines d'or du -Boure et du Bambouck. 11 avait une armee nornbreuse,<br />
redoutable et sa reputation de saintete, d'invincibilite lui procura des allies: le<br />
Boundou, dechire par la guerre civile, se ra1Jia tout entier au jihiid et lui donna<br />
Reichadt (C.), op. cit.<br />
/ /
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 251<br />
Maltre de la Haute-Vallee du fleuve, qui elait alors convoitee par la politique<br />
frant;:aise l , Cheikh Omar ne pouvait eviter une confrontation avec Faidherbe qui, de son<br />
cote, avait mis un embargo sur le commerce des armes et des munitions. Encourage par<br />
Mamadou Hammat Kouro Wane, un des jihftdistes les plus opposes aux Frant;:ais, et par le<br />
prince Khartoum Samballa, en conflit avec son frere, chef du Khasso, Omar decreta la<br />
confiscation des marchandises frant;:aises entre Bake! et Medine, mettant ainsi fin a sa<br />
politique de louvoiement. L'escalade atleignit son somrnet en Avril 1857, lorsque l'armee du<br />
jihiid assiegca le fort de Medine, defendu par Paul Holle. Malgre la determination des<br />
Talibes, le siege s'acheva sur un echec cuisant. Le Cheikh en tira la let;:on qu'il ne fallait plus<br />
s'opposer aux Frant;:ais, lesquels de Ieur cote se fixerent des objectifs qui ne visaient pas<br />
Cheikh Omar.<br />
En 1857, El Hadj Omar traversa le Bambouck en pleine rebellion, remonta le<br />
Boundou et rentra au Fouta Oll il precha son deuxieme Fergo ou emigration. Associant la<br />
persuasion et la maniere forte, il leva une arrnee considerable estimee aplusieurs milliers de<br />
personnes et l'amena en 1859 aNioro. Maitre du Kaana, le jihiid disposait al'epoque d'un<br />
vaste empire dans la savane soudano-saheliennc s'etendant de Dinguiraye au Kingui et du<br />
Boundou au Beledougou. Fort de la masse d'immigrants installes a Nioro, le Cheikh decida<br />
de continuer la guerre sainte al'est, vers le pays bambara de Segou. En 1859, l'arrnee du<br />
jihiid s'ebranla en direction du Beledougou, pays d'animistes bambaras decides. Malgre ses<br />
petits obusiers, la grande famine qui ravageait 1es pays soudano-saheliens ralentit la marche<br />
de I'armee et c'cst avec peine qu'elle atteignit Merkoya, la capitale du pays. Segou devenait<br />
alors l'etape inevitable. Empire lc plus puissant du Soudan grace a son organisation<br />
politique, militaire et ases ressources economiques, Segou symbolisait aussi le paroxysme<br />
de I'animisme soudanais. Sa conquete revenait ajouir du Soudan utile. De son cote, le<br />
puissant empire bambara prit aussi au serieux la menace toucouleur et installa son armee a<br />
Woi'tela, porte de l'empire. Cheikh Omar reorganisa son armee et lui procura vivres et repos<br />
sur les rives du Niger. 11 attaqua Woi'tela le 5 Septembre 1860, mais ses canons ne purent<br />
empecher que son armec fUt repoussee par les "tondjons". Par trois fois, les Toucouleurs<br />
furent repousses et le desespoir comrnent;:a agagner certains d'entre eux. Le Cheikh dut alors<br />
recourir aune action psychologique :<br />
" Exhortant I'armee des combattants de la foi par un de ces discours de feu, il<br />
prit son chapelet et s'avant;:a Jui-meme contre le tata de Woi'tela. L'exemple<br />
Mage ( E.), Voyage dans le Soudan occidental, Paris, . 1868.<br />
Gouilly ( A.), L'lslam en Afrique occidemale, Paris, 1952.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 252<br />
electrisa ses taJibes qui s'elancerent contre les Bambaras, les refoulerent<br />
jusqu'au tata apres avoir recupere les canons aux afmts rompus" 1.<br />
Repares par Samba Ndiaye, les canons permirent, le 9 Septembre 1860, de<br />
donner le demier assaut ala puissance de Segou. Victorieux, le jihiid dominait alars la vallee<br />
du Niger. Cheikh Omar prefera cependant s'installer a Sansanding, grande metropole en aval<br />
de Segou. Ce fait posa de serieux problemes al'Empire peul du Macina : le confJit ne tarda<br />
pas a se reveler, opposant des Feuls islamises entre eux pour des motifs essentiellement<br />
politiques.<br />
L'installation du jihiid omanen a Sansanding, dans la vallee du Niger, ala<br />
limite du Macina, poussa Ahmadou III et Sicli Ahmed El Bekkai: Kounta de Tombouctou a se<br />
coaliser contre Cheikh Omar. Le conflit se transforma assez vite en guerre politique, ravivee<br />
par des rivalites ethniques et confreriques. Ainsi, alors qu'EI Hadj Omar se presentait en<br />
champion d'un jihfid orthodoxe, le Macina considerait la conquete des pays bambaras par les<br />
Toucouleurs comme une ingerence dans sa sphere d'infJuence, mena
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 253<br />
d'Omar. Quoi qu'il en soit, ]'annee toucouleur attaqua les lanciers maciniens qUI la<br />
repousserent. Manquant alars de munitions, les jihiidiste firent le siege des Peuls, esperant<br />
ainsi les extenniner. Les Toucouleurs en profiterent pour reprendre force: les forgerons<br />
coulerent des balles et reparerent les fusils. A la reprise des hostilites, l'armee du jihiid tailia<br />
de nouveau en pieces I'annee peule. Blesse, Ahmadou Ahmadou fut emporte par les siens.<br />
Its furent rejoints par Alpha Oumar qui decapita le troisieme roi du Macina. Ali aussi fut<br />
capture sur la route de Hamdallahi, puis, publiquement confondu comme idolfirre, il fut 11 son<br />
tour decapite.<br />
Cheikh Omar s'installa 11 Hamdallahi, au palais royal Oll tout le monde<br />
macinicn, 11 la suite des princes Bii-Lobbo et Abdou Salam, vint se soumettre. 11 devenait<br />
ainsi le maitre de I'Occident soudanais et vivait I'apogee du mouvement declenche en 1852,<br />
sur les contreforts du Fouta-Djallon. Mais cette situation ne dura qu'un an. Les Peuls, deyus<br />
apres l'intronisation en 1863 d'Ahmadou comme titulaire du commandement du Macina, se<br />
revolterent et s'allierent 11 Bekkai'. Les coalises defirent 11 Mani-Mani la principale colonne de<br />
I'armee omarienne tuant son chef Alpha Oumar Thierno Bayla. La meme annee 1863, 11<br />
quelques jours d'intervalle, Alpha Ousmane, un autre general, perit 11 Segue ii la tete d'une<br />
autre colonne. A partir du mois de Juin, Cheikh Omar fut assiege 11 Hamdallahi 1. A Segou<br />
aussi, une revohe eclata 11 la faveur du siege de Hamdallahi. Les relations etant coupees entre<br />
les deux armees, Ahmadou ne put voler au secours de son pere.<br />
Neanmoins El Hadj Omar reussit ii faire sortir Tidjiini, en vue de chercher une<br />
armee pour delivrer la ville. Mais avant son retour, le Cheikh sonit de HamdaJlahi, suivi des<br />
jihiidistes pour se diriger vers les falaises de Bandiagara. Poursuivis par les assaillants, les<br />
Toucouleurs essuyerent un echec cuisant. Cheikh Omar disparut alars dans la grotte de<br />
Deguembere, sans qu'on le revit jamais 2 Cette fin suscita de nombreuses hypotheses, des<br />
plus prosaYques aux plus mystiques. Fin enigmatique, 11 la demesure du personnage.<br />
b) L'oeuvre<br />
L'ampleur du jihiid omarien, la complexite de la figure de Cheikh Omar<br />
entrainent des appreciations diverses de son oeuvre, souvenlcontradictoires, en fonction des<br />
interets du moment ou du statut de celui qui emet le jugement. De fayon generale, les<br />
historiens retiennent deux figures d'EI Hadj Omar : le religieux et le politique.<br />
Les historiens africains considerent Cheikh Omar comme le prototype du<br />
nationaliste, intransigeant : "AI Hadj Omar, lettre, auteur d'une..6euvre imposante (dont le<br />
I<br />
2<br />
Magc (E.), op. cit.<br />
Wane (Y.), "Dc Halwar ii Degembere au I'itincraire islamiquc de Shaykh<br />
Umar Tall", in Bulletin de ['/FAN. seric B, T. XXXI, n02, 1969, pp.445-45I.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU M01'mE 254<br />
Rimah Hizb al Rahim ), par son experience du monde et son envergure exceptionnelle, la<br />
vision tres moderne qu'il a de son epoque, il est peut-etre ici, en depit de son echec dans sa<br />
tentative d'unification du Soudan nigerien, l'homme d'Etat le plus lucide du XIXeme<br />
siecJe" 1.<br />
De son cote, Sekene Mody Cissokho est aussi fascine par Omar le biitisseur,<br />
bien que le destructeur d'empires le gene:<br />
"A ussi mit-il en place les bases d'un Etat nouveau qu'il n'eut<br />
malheureusement pas le temps de consolider. Il detmisit les structures<br />
politiques dans les grands Etats vaincus, vida de leur comenu celIes des petits<br />
royaumes"2.<br />
Cette opinion est battue en breche par Yves Saint-Martin qui ne voit dans<br />
l'attitude de Cheikh Omar et de son fils qu'une "volonte de paix,,3 Pour cet historien, le<br />
Cheikh et son fils furent pacifistes et respectueux des traites conclus avec la France.<br />
Faidherbe, au contraire, s'evertua aexagerer leur hostilite ades fins de promotion militaire.<br />
Amar Samb rejeta, au nom du nationalisme africain et de la reception objective des faits, les<br />
assertions de Saint-Martin 4<br />
La critique anti-nationaliste culmine cependant sous la plume de Frcelich, qui<br />
pense que faire des heros africains des champions de l'independance constitue un dangereux<br />
anachronisme. lIs ne furem que de simples conquerams :<br />
"Pretendre le contraire est une contre-verite et une flagornerie al'egard des<br />
jeunes nations qui n'om pas besoin de fausser l'hislOire pour se trouver des<br />
ancetres prestigieux"5<br />
Une autre controverse surgit quand on examine l'oeuvre religieuse de Cheikh<br />
Omar. Elle s'est traduite incomestablement par une expansion de ITslam et de la confrerie<br />
Tidjanyya. Aussi de nombreuses mosquees anestent-elIes encore de l'action d'Omar au<br />
Soudan occidental, et c'est aussi par milliers que se comptent ses disciples. C'est pourquoi<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Diagne (P.), Pouvoir poUtique traditlonnel en Afrique Noire, Paris, 1967,<br />
pp. 168-169.<br />
Cissokho (S M) op. cit. , p. 25.<br />
Saint-Martin (Y.), "La volonte de paix d'EI Hadj Omar et d'Ahmadou dans<br />
leurs relations avec la France", in Bulletin de l'IFAN, Serie B, nO 3, 1968.<br />
Samb (A.), "Sur El Hadj Omar (il propos d'un article d'Yves Saint-Martin)",<br />
in Bulletin de l'IFAN, Serie B, n° 3, 1968, pp. 803-805.<br />
Froelich (J.c.), Les Musu/mans d'Afrique Noire, Paris, ,1962, p. 69.<br />
,//
CHAP1TRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 257<br />
"J'ai demande it Thiemo Seydou Ousmane de detruire sa mosquee, cela ne<br />
veut pas dire qu'il a tort. Il a obtempere it mon ordre, cela ne veut pas dire non<br />
plus qu'il a peur. Si vous savr;;, 6 FoutaI, par combien de grandes<br />
mosquees nouvelles sera payee la disparition de la petite mosquee de Thiemo<br />
Seydou Ousmane et sur quels vastes tenitoires ces mosquees seront<br />
construites, vous seriez. moins enthousiastes. le vous le dis par la grace de<br />
Dieu Etemel ; cet enfant que Thiemo Seydou Ousmane tient par la main,<br />
construira alui tout seul plus de mosquees que tous les chefs du Fouta et du<br />
Boundou reunis n'en ont jarnais construit." Ce disant l'Almamy caressa la<br />
grosse tete du jeune Oumar Seydou. L'enfant se laissa faire sans cligner des<br />
yeux qu'il avait clairs et expressifs"2.<br />
Cette citation condense la vision politique que I'epopee omarienne donne du<br />
Fouta, a partir d'un drame opposant les Halwariens a un des leilrs. Le recit met en vedette<br />
trois figures: I'Almamy, Thierno Seydou et son fils Oumar. Il montre que le pouvoir de<br />
I'Almamy, bien que reel, souffre de quelques contestations3 : Thiemo Seydou n'a pas peur<br />
de lui, il obtempere it son ordre par simple discipline. Ce pouvoir se reduit, du reste, a<br />
arbitrer les conflits intemes. Par contre, sur le plan religieux, l'Almamy jouil de quelque<br />
consideration: appeJe a arbitrer un conflit religieux, il en profite pour manifester ses dons de<br />
voyance. La citation ne retient de la carriere politique d'Omar que sa dimension religieuse :<br />
au lieu d'annoncer le futur fondateur d'empires, le souverain annonce le batisseur de<br />
mosquees.<br />
Quant a Thiemo Seydou, il symbolise le musulman orthodoxe, hardi et<br />
independant. Un tel pere explique l'intransigeance de son illustre fils, dont la tenacite ne<br />
s'accommoda pas d'une foi tiede. Beneficiaire du drame, Oumar est presente sous les traits<br />
d'un etre extraordinaire ala grosse tete et aux yeux clairs et expressifs qui ne clignent pas. 11<br />
ne saurait alars etre etonnant que le destin lui reserve une carriere plus prestigieuse que celle<br />
des Almamys.<br />
Par contre, La Vie d'El Had} Omar. Qacida en poular reflete les luttes<br />
politiques qui secouerent I'Almamyat aux prises avec le jihad omarien ainsi qu'avec les<br />
Fran"ais. Le poeme presente avant tout Cheikh Omar comme le maitre inconteste du Fouta :<br />
2<br />
3<br />
C'esl-a-dire : 6 gens dll FOllla, le pays eSl pris ici pour scs habitanrs (noLe<br />
des aUleurs).<br />
Ba (A. Hampale) cL Daget (1), op. cit., 233.<br />
Wane (Y.), art,. cit.
CHAPlTRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MOl\DE 258<br />
" Le jour oll le Fouta eut appris le retour de notre Cheikh, les electeurs du<br />
souverain et le souverain furent troubles, tout 11 fait troubles.<br />
lis traverserent le fleuve et l'on se rendit a Dyoke pour y etre enfennes au pied<br />
des rochers jusqu'au jour ou, le Cheikh ayant passe, ils reviendraient" I.<br />
A ce titre, il reussit 11 enr61er cenains grands du Fouta dans l'armee du jihad,<br />
mais d'autres refuserent de quitter la terre de leurs a'ieux :<br />
"Le Cheikh roit les maitres du Fouta en tete de I'emigration.<br />
Ils se soumirent, empaqueterent, chargerent [leurs affaires], I'Est fut [Ieur<br />
point de direction.]<br />
Eliman, celui de Rindyao ; Mohammadou, celui d'OeJedyi, le fils<br />
de Mahmoudou Ali, ce qu'ils ont dit, le Fouta, certes, ne l'enfreint pas.<br />
Et Tyerno Salihou, fIls de Sire Harouna.<br />
Ce sont des gens qui se sont fait remarquer au sud du fleuve, des noms qui ne<br />
sont pas sans reputation.<br />
Et Tyemo Boubakar MoIle, le Cheikh, notre saint.<br />
Eux tous, quand ils sont reunis, le respect grandit au point de n'etre pas petit.<br />
Depuis le Fouta jusqu'a Nyoro, partout oll ils s'arreterent, ce furent des gens<br />
honores, ce ne fut qu'une fete jusqu'a ce qu'on filt arrive.<br />
Ceux qui etaient restes, resterent tatonnant 11 la recherche de commandements.<br />
Nomme Tyemo Fondou aun commandement qui n'achevera [rien] " 2.<br />
Opposition significative, qui fut historiquement attestee, entre I'aristocratie<br />
pro-omarienne et I'autre, farouchement hostile 11 toute idee d'immigration, cependant assez<br />
roinoritaire et obligee de se cacher ou d'operer en cachette. Ace sujet, commentant ces vers<br />
dans une note detaiIlee, Gaden ecrit :<br />
1<br />
2<br />
"Ceci est une allusion aux difficuItes que le Cheikh rencontra au Fouta<br />
Central. La population ne desirait pas quitter son pays. L'approche du Cheikh<br />
avait suffi a faire deposer l'Almamy Mohamadou Biran, Chef des<br />
"Wanwanbe" du Lao, en qui on eraignait de ne pas trouver un protecreur car il<br />
venair, sur la demande du Cheikh, de faire construirc le barrage de Garli.<br />
Mais la crainte du Cheikh etait teIle qu'aucun candidar ne s'etair presente. Tant./'<br />
Gaden (H), op. cir, vv. 701-702, p. 119.<br />
Id., vv. 671-676. pp. 114-115.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 260<br />
exprimee par Koly Mody Sy, repondant a Cheikh Omar qui cherchait un preux pour la<br />
mission de bons offices toucouleur au Macina :<br />
"Quand tu vins au Boundou,<br />
Tu trouvas que mon pere etait un rai.<br />
II enchainait, il emprisonnait<br />
Tu sais, celui qui a aba'ndonne le pouvoir pour te suivre,<br />
C'est celui-Ia qui te suit par Allah.<br />
En fait, il n'y a rien de plus delicieux que le pouvoir" I.<br />
II est permis de penser qu'en plus du motif religieux invoque ici, d'autres<br />
facteurs determinerent le prince Boundounke a quitter la theocratie de ses ancetres.<br />
Le Fouta-Djallon, pays d'accueil du Cheikh et berceau du jihild, n'apparait<br />
qu'a travers les divers incidents qui eclaterent entre El Hadj Omar et Almamy Oumar 2 . De<br />
meme, le pouvoir Dyallonke ne transparait que derriere Yimba Sakho, que Sidi MbOthiel<br />
confond avec Tamba Boukary, plus puissant et premier hote de Cheikh Omar. Soucieuse de<br />
valoriser la puissance, l'epopee n'hesite pas a abriter sous le meme toit des personnes<br />
d'epoque differente. Ainsi procede la version de Sidi Mbothiel. Sans doute aussi la<br />
substitution du pouvoir fort de Tamba au pouvoir chancelant de Yimba obeit-elle a une<br />
volonte de magnifier la victoire des jihildistes, d'autant plus qu'il s'agissait de la premiere<br />
bataille. Le royaume de Bandiougou, le Menien, traverse par le jihild comme un eclair, n'a<br />
droit qu'a la mention de la tete de son roi coupee.<br />
Au Kaana aussi, l'epopee omarienne ne se livre pas, a proprement parler, a<br />
une peinture politique, tout au plus suggere-t-elle la colere des freres du souverain Milmady<br />
Kandia, les sarcasmes des femmes griotes, les recriminations de Karounka Diawara, tous lui<br />
reprochant d'avoir livre son pays au jihild sans coup ferir. Cet episode, atteste par la version<br />
de Nioro, apparal't dans la relation de tous les griots : Sidi Mbothiel, Thithie Drame, Demba<br />
Hamme, entre autres.<br />
Le Kingui, par contre, pays de Karounka Diawara, specialiste de la guerilla et<br />
de la contre-guerilla, suscite de longs developpements3:<br />
I<br />
2<br />
3<br />
"Alors les mechants furent disperses, le Cheikh mit pied it terre, la nuit vint,<br />
Mb6lhicl (S.). vv. 874-879.<br />
Voir la premiere panic du present travail : le point de depart hislorique.<br />
Voir la version dc Thithie Drame dans notre these de Doctoral de Illemc<br />
cycle.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 262<br />
"Quant 11 Ali et Ahmadou Ahmadou, ils furent alors perplexes sur les partis la<br />
prendre],<br />
envoyerent en vue d'un accord aupres de l'elephanl qui n'echoue pas [dans<br />
ses en tre prises].<br />
Le Segou leva ses guerriers, le Macina leva les siens ;<br />
ils se rassemblerent, ils allerent etablir leurs camps pour la guerre [contre] le<br />
Pole qui [est tel que J quiconque l'aura provoque ne se rejouira pas.<br />
Ahmadou envoya jusqu'au Mediateur qui ne commet pas d'injustice :<br />
"Qu'i! s'en retourne 11 Nyoro, au pays de Kingui, sanS tarder.<br />
Si ce!a ne se fait pas, je le bousculerai avec des chevaux de race jusque dans<br />
l'ouest du Nyoro; c'est tout de suite sans tarder."<br />
Le Cheikh dit : "le suis un esclave, je suis seulement aux ecoutes de la parole<br />
d'AlIah et de son Representant, pour continuer [ma marcher I.<br />
L'epopee toucouleur oppose nettement l'impetuosite du jeune roi ala sagesse<br />
du vieux jihiidiste, representants tous les deux de pouvoirs politiques differents. En plus de<br />
sa politique hypocrite, l'Emir dll Macina est allssi accuse de meconnaitre ou de passer outre<br />
les textes tMologiques classiques :<br />
"Ahmadou, sache que tu as fait ces actions illicites pour t'etre mis avec le<br />
grand paganisme qui ne se convertira pas.<br />
Si tu nies, regarde ce verset que notre maitre a enseigne dans la Sourate<br />
"Nisa" afin de le connaitre et de la comprendre. Et ce qll'a enseigne le Cheikh<br />
Khalil dans le livre appele "Lawwal", tu le sauras aussi et le noteras bien pour<br />
le retenir.<br />
Et ce qu'a enseigne l'auteur du "Lakdariyu" dans son interdiction de [toute]<br />
mauvaise intention envers un mllsulman son frere, tu le sauras" 2.<br />
Des lors, la victoire du jihiid omarien, contre la coalition de Segou et du<br />
Macina, traduit le triomphe du pOllVOir islamlque sur la paganisme aiM au machiavelisme. La<br />
decheance s'installe alors pour toujours dans le camp des vaincus :<br />
1<br />
2<br />
"He! sachez que votre envie et votre haine<br />
Gaden (H.), op. Gir., vv. 893-897, p.154.<br />
Id., vv. 902-905, p. 156.
CHAPITREIV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 264<br />
pour ne pas se faire enlever, d'abandonner ses deux obusiers dont les roues avaient ete<br />
cassees. Ces obusiers rendront d'enorrnes services au jihad omarien. Sous les ordres de<br />
Samba Ndiaye Bathily1, ils contribueront puissamment au succes de Cheikh Omar.<br />
Malgre tout, l'epopee du jihad evoque aussi la bataille de Medine qui se solda<br />
par un echec, pour la recuperer sur le plan religieux ou celui-ci s'explique par un decret<br />
divin:<br />
"La certains dirent : "Dirigez-vous sur Medine."<br />
Il dit "Non, ceux-Ia ont la tete dure, dit le Cheikh, he ! vous ne vaincrez pas.<br />
Ce qui est leur guerre, c'est de leur saisir toutes les routes, afin que personne<br />
n'arrive jusqu'a eux pour qu'ils fassent du commerce".<br />
Il se trouva qu'Allah avait decide que, pour certains, un terrne etait mis a leurs<br />
delais.<br />
L'annee se mit en route, arriva au village; on attaqua, on echoua"2.<br />
A la difference des versions de Niagane, Drame, Sidi MbOthiel, La Qacida en<br />
poular mentionne la defaite de Medine, mais s'empresse de ]'attribuer aux Talibes<br />
indisciplines, avant de l'expliquer par une decision d'Allah. Cela lave Cheikh Omar de tout<br />
soupvon. En fait, son epopee le presente comme un anti-sultan, preoccupe surtout par la<br />
religion. Son pouvoir)d'inspiration divineletoume finalement a Dieu, qui I'accueille a<br />
"TIlioun", supreme paradis, en ces terrnes:<br />
"Mon Elu, soyez les bienvenus,<br />
Entrez dans mes bienfaits ; vous y resterez toujours, cela n'aura pas de fin"3.<br />
2°) VIE ECONOMIQUE ET SOCIALE<br />
Ambitionnant de refleter la realite hero"ique, I'univers epique peint aussi le<br />
cadre de vie ou s'exprime cene bravoure exceptionnelle. Les diverses representations<br />
2<br />
3<br />
Victime de ses informateurs, sans nul doute, Gaden deforme ce nom en<br />
Jlakiri de Tiabo. 11 s'agit de Samba Ndiaye Bat.!lily, soninke, originaire de<br />
Tyabou, pr"s de Bake!. Il avait vecu vingt ans ii Saint-Louis et y avait acquis<br />
de solides connaissanccs en ma
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 265<br />
economique et sociale de I'epopee dessinent les contours d'un monde riche et peuple Oll<br />
dominent l'agriculture, l'elevage et une abondante main-d'oeuvre servile l .<br />
D'apres les versions dll jihiid omarien, le Fouta-Toro reste le pays de<br />
l'agricuiture, car ne pas abandonner des terres inondees par la crne dll fleuve fut le principal<br />
motif invoque par ceux qui refushent de suivre Cheikh Omar. Mais le Fouta-Toro est aussi<br />
un pays d'eleveurs et Botol Sawa Hiiko, le Peul, le rappelle a son Cheikh la veille de<br />
l'ambassade toucouleur au Macina :<br />
"... La nuit que tu passas chez moi au Fouta,<br />
Tu m'as trouve avec quatre epouses peules,<br />
Chacune d'entre elles etait plus belle que l'autre ;<br />
Et recevait chaque fois plusieurs ecuelles de lait dans sa case"2.<br />
Pays de piiturages, de vaches laitihes et de femmes peules altieres, le Fouta<br />
Toro de l'epopee omarienne est I'expression la plus pure de la pulaagu ante-islarnique. En<br />
somme, le cadre et les hommes se placent sous l'ethique traditionnelle. Cependant, malgre<br />
tout, le pays toucouleur demeure moins riche que les pays de I'est. En ce sens, le pays de<br />
Nioro combla les jihiidistes du Cheikh :<br />
I<br />
2<br />
3<br />
"Alfa Oumar, il l'envoya dans le Sountya : qu'il s'y promene partout pour<br />
prendre ies troupeaux et les enfants des Chefs entierement,<br />
et pour le partage des nombreuses femmes des Chefs qui ne se convertiront<br />
pas"3.<br />
Au Kingui aussi la situation est avantageuse :<br />
"Au bout d'un peu de temps, il (le Cheikh) dit que le butin revienne afm d'etre<br />
distribue, pour que chacun ait son droit et soit satisfait.<br />
De nombreux biens furent ramenes, tout fut tennine, sauf qu'il resta les gens<br />
du Dyawara, [qui] refushent, dirent qu'i1s ne remettraient pas [leur butinJ<br />
La le butin fut distribue. Ceux de faible atlachement [au CheikhJ s'en<br />
retoumerent,<br />
MbOthiel (S.), vv. 848 - 850.<br />
Voir aussi Surcl-Canale (1.), Afrique Noire<br />
Civilisation, Hisloire", Paris, 1961.<br />
Gaden (H), op. de.. vv 365-366, p. 62.<br />
volume I, "Geographie,
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE<br />
Les fideles choisirent d'etre avec I'Emir qui ne nuit pas" I.<br />
266<br />
Le partage du butin constitue ici le motif de la revolte de Karounka Diawara.<br />
Les versions divergent cependant sur l'explication du motif. Les versions du Kingui<br />
soutiennent que la rebellion eut pour cause le fait que Karounka et les siens s'estimerent leses<br />
dans le partage du butin ; ils avaient re
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 268<br />
Celui qui dit toujours le "dzikr", le veridique dans [son] amour du Cheikh et<br />
qui ne [Iui] sera pas hostile,<br />
Celui a qui on a rendu temoignage dans tous les combats, et ceci n'est pas<br />
rien"l<br />
A travers la relation du jihiid omarien, se profile un monde bigarre, domine<br />
par une economie de type feodal: les captifs defilent en meme temps que les animaux<br />
domestiques et les produits agricoles. Par contre, la structuration sociale, bien que<br />
hierarchisee, semble priviIegier I'ethique et le religieux, d'ou la juxtaposition dans un meme<br />
chant de Cheikh El Hadj Omar, et Kouroubatou Dembele, a cote des libertes de Farba<br />
Gouwa, le griot du Cheikh. Les necessites du jihiid, liees aux mutations sociales de<br />
I'epoque, semblent expliquer, dans une large mesure, de teIles audaces.<br />
3°) VIE RELIGIEUSE<br />
"Din et Dawla", religion et etat, l'Islam ignore I'opposition entre religion et<br />
pOlitique. La "'Umma" ou communaute islamique se definit comme un tout organise.<br />
L'epopee du jihiid s'inscrit dans cette perspective et annexe tous les autres plans ala religion.<br />
Quoi de plus legitime, puisque l'action de Cheikh Omar s'exprime dans le cadre du jihiid,<br />
prescription divine, mise en pratique par le Prophete de I'Tslam. Aussi, les versions de<br />
l'epopee d'Omar s'efforcent-eIles de faire de leur heros le champion de I'onhodoxie par<br />
opposition aux tenants de l'animisme, aux mauvais musulmans et aux hypocrites.<br />
D'abord, le Fouta-Toro se singularise a ce propos comme une vieille terre<br />
d'Islam, mais ou le reliichement des moeurs affectait dangereusement la pratique religieuse<br />
orthodoxe. A ce propos, la version, de Sidi Mbothiel 2 cite I'episode ou Elimiine Rindaw<br />
ayant denonce les fondements du jihiid omarien acause du jeune iige d'Omar, et du fait qu'il<br />
etait envoGte par des djinns - se voit a son tour accuse par Omar, ainsi que le Fouta tout<br />
entier, d'etre un mauvais musulman. El Hadj, pour demontrer son assertion, se propose de<br />
citer quatorze faits, mais apartir du quatrieme, I'assistance le prie, par patriotisme, de ne pas<br />
deshonorer son pays natal. Auparavant, I'intransigeant jihiidiste avait critique les ceremonies<br />
famiIiales ruineuses et iIlicites, le libertinage des jeunes gens des deux sexes, la crise de<br />
I'autorite parentale, la pratique laxiste de la "Zakiit" ou dime.<br />
Du DyaIlonkadougou aSegou domine I'animisme que combat le jihiid. Ainsi,<br />
selon la version de Dinguiraye;'le DyaIlonka devait sa puissance a une force militalre<br />
1<br />
2<br />
Gadcn (H), op. cit., v 1033-1034, p. 178.<br />
Version non transcrile, er noIre bandothcquc.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU j',10NDE 269<br />
incontestable, appuyee sur une grosse idole en pierre que l'on peut encore voir. La IUlte<br />
contre le DyaIIonkadougou et le Menien I est ainsi relalee par Mohamadou Aliou Tyam :<br />
"Le jour ou le Cheikh eut appris que Yimba s'etait revolte jusqu'a [passer] au,<br />
Menyen, elait arrive chez Bandyougou, qu'il en avait dispose sans tarder,<br />
aussitot le Cheikh envoya chez Bandyougou : "Rends-moi<br />
ces gens echappes de chez moi, he ! negateur du Roi qui ne te convertiras<br />
pas,"<br />
Bandiougou dit : "Non! He toi,Marabout !<br />
Toi en personne, je cherche a t'avoir, Qu'as-lU a dire ?"<br />
Aussitotle mechant rassembla ses gens, jusqu'a ce que ce fut epais et dit:<br />
Qu'ils partent, qu'ils aillent tomber sur le groupe du Cheikh qui ne commet<br />
pas d'injustice "2,<br />
Une meme fin sanglante reunit Yimba et Bandyougou, Puis le jihad se dirigea<br />
vers le Bambouck, le Khasso et le Kaarta, Dans cetle derniere localite, bien que la<br />
conversion de Mamady Kandia, le souverain du pays, s'effectuat sans dommage, l'epopee<br />
du jihiid releve un fond animiste tenace, Le passage du pays des Diawara de Karounka<br />
suscite une hemistiche formelie :<br />
"Ce pays de Kingui, qui est d'une race dont le paganisme ne se convertira<br />
pas"3,<br />
Segou demeure le "pays celebre du paganisme"4, mais aussi un pays tres<br />
riche puisque, d'apres la version de Thithie Drame, au cours de sa fuite, Ali "emporta avec<br />
lui des cauris, il emporta avec lui beaucoup d'or"5, Ce fait est aussi alteste, par la marabout<br />
senegalais, Cheikh Moussa Kamara6,<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
Plus infamante s'avere I'accusation d'hypocrisie portee contre le Macina :<br />
"He! gens du Macina, vous vous lamentez jusqu'a hurler; malheur a vous !<br />
Pleurez ces longs pleurs qui n'ont pas de limite,<br />
Voir le reci\ de Sidi Mb61hieL<br />
GadsP (R), op. cit, , vv, 230-233, p, 40,<br />
Id,';v, 491, p, 83,<br />
Ibid" v, 946, p, 163,<br />
DIENG (S,), These de Doctoral de lIIeme cycle, Tome I, p, 293,<br />
Ndiaye (M,), "Histoire de Segou par Cheikh Moussa Kamara",<br />
I'IFAN, Tome XXX, SeT. B" nO 3, Juillcl 1978, pp, 458-488"<br />
in Bulletin de
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 27 J<br />
" Ahmadou envoya au Macina pour que les haches viennent<br />
afin qu'une haie soit faite autour d'eux, si bien qu'ils ne sonent plus.<br />
Regarde leur sottise, on dirait que c'est adu betail qu'its ont affaire.<br />
lis ne savent pas que le Mediateur qu'Allah a mis comme guide ne faiblira<br />
pas.<br />
C'est un grand Pole, un saint qui connait toutes les branches de la science de<br />
la verite et de la Loi et les comprend,<br />
Qui a traverse des marigots et des etangs, des rivieres et des fleuves; qui,<br />
parvenu a cette "hadra "(aupres de Mohammed el Ghii.li), y a bu et a ete<br />
desaltere ;<br />
Qui a herite d'Ahmadou (le Prophete) sa Sounna au complet,<br />
Qui a suivi le livre et, lorsqu'ill'a consulte, ne s'egare pas" I.<br />
Fidele aux constantes qui la definissent, l'epopee joue sur des oppositions<br />
significatives, en evacuant le politique au profll du religieux, pour fa ire de son heros<br />
l'heritier authentique de la "Sounna" du Prophete de l'lslam. Aussi soumet-elle<br />
l'economique et le social au jihiid qu'elle exalte : Cheikh Omar ne traverse les riches pays tres<br />
peuples que pour repandre l'Islam ou reformer une religion devenue laxiste. Une telle<br />
optique implique une representation du theatre du jihiid omarien plus religieuse que<br />
physique.<br />
Inspires par une telle axiomatique religieuse, griots et ciercs omariens, en<br />
opposant l'orthodoxie ala gangue heterodoxe ou animiste, parent leur representation du jihiid<br />
omarien d'images reluisantes, convaincus qu'une oeuvre religieuse est avant tom une belle<br />
oeuvre. Iis scu]ptent alors un univers plus tributaire de la theologie et de la mystique que de<br />
l'histoire, Allah se servant de Cheikh Omar pour sublimer sa propre gloire.<br />
ill - L'EPOPEE ET L'HlSTOIRE<br />
Bien que l'epopee apparaisse comme un lieu d'histoire dans les societes de<br />
tradition orale, en gem:ral, et dans l'epopee d'EI Hadj Omar en paniculier, si l'on compare<br />
'. les theses des historiens aux representations epiques ponant sur les memes sujets, force est<br />
de reconnaitre que nous sommes en presence de deux genres divergents dans leur objet et<br />
dans leur methode:<br />
Gaden CH.), op cit. VV. 1036-1040, p. 179.<br />
/
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 272<br />
"La conscience de ces ecarts interdit de considerer l'epopee comme fidele ala<br />
lettre ou al'esprit de l'evenement, mais aussi comme pure fiction: elle est fille<br />
d'une mentalite ou l'histoire, enquete precise sur l'enchainement et la causalite<br />
des faits d'importance collective, n'a pas sa place (meme si elle existe<br />
marginalement, aux mains de specia!istes comme les pretres ou les moines).<br />
Les deux spheres mentales n'obeissent pas aux memes criteres de validite :<br />
dans l'epopee, un principe general de finalite, mouvement fatal ou<br />
providentiel, bouscule la causalite, pietine le tissu rationnel ou l'historien tente<br />
d'enserrer le devenir humain" I.<br />
Pour mieux saisir cette difference, iI importe de comparer ici les traitements<br />
epique et historique du jihiid omarien.<br />
1 0 ) LE TRAITEMENT EPIQUE DU JIHAD OMARIEN<br />
Mue par le souci constant d'exalter les valeurs du groupe, l'epopee apparait<br />
avant tout comme une lecture particuliere de l'histoire. Le genre constituam une relecture<br />
libre des faits.<br />
A ce titre "l'histoire fournit au poete eplque un cadre narratif malleable,<br />
important moins par les informations qu'il comporte que par l'emotion qu'it va provoquer.<br />
Une merne action, d'un poeme itl'autre, d'une version it l'autre, peut etre rapportee it un<br />
heros different, ou l'inverse ; des personnages d'epoques differentes, reunis sous un meme<br />
toit"2.<br />
L'epopee d'E! Hadj Omar ne deroge pas it cette regIe. Aussi entretient-elle<br />
avec la realite des rapport complexes, allant de la compIementarite it l'opposition. C'esl ainsi<br />
qu'elle emprunte itl'histoire des themes, des personnages, en un mOl une reference credible,<br />
que l'an epique, par un mecanisme de retroaction, transforme en version epique. En ce sens,<br />
l'epopee du jihiid reflete fidelement les contradictions du vaste mouvemenl omarien, qu'elle<br />
resout cependant aisement en les transcendant au moyen de la guerre sainte. On y suit, par<br />
consequent, les grandes lignes du systeme politique, economique,social et culturel de l'aire<br />
du jihiid, ce qui renforce, du reste, la fonction historique de l'epopee, generalement admise :<br />
1<br />
2<br />
"Or, la tradition orale est de loin la source historique la plus intime, la plus<br />
-.succulente, la mieux nourrie de la seve d'authenticite. "Labouche du vieillard<br />
Madelenat (D.), op. cir., pp 87-88.<br />
ZUffithor (P.), op. cir., p. Ill.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 274<br />
repose que sur la Bataille de Medine I, l'epopee du jihiid I'occulte tout bonnement : la<br />
premiere s'en sert pour temir I'image de marque du jihiid ; la seconde evite d'en parler, car<br />
on ne donne pas de le.,:on avec une defaite. De nos jours, les versions epiques les plus<br />
conformes ala realite evoquent discretement "l'affaire de Medine", cependant en prenant soin<br />
de degager Cheikh Omar de toute responsabilite dans le revers subi par les "tetes dures" de<br />
son armee. Mais l'emploi le plus peninent de I'anachronisme ne se rencontre dans notre<br />
corpus que chez Sidi MbOthiel. Soucieux de glorifier tous les valeureux jihiidistes et fidele a<br />
I'ethique peule, notre griot, contrairement ala logique de la guerre sainte 2 , envoie tous les<br />
aristocrates de la lance et de la vache, en meme temps que ceux du Livre, en ambassade au<br />
Macina. Il confond ainsi dans le meme eloge B6tol Sawa Hiiko le Peul, Koli Mody Sy le<br />
prince, Ahmadou Almamy Alhassane I'erudit, Alpha Oumar Thiemo Bayla qui allie a la<br />
naissance, I'erudition et la vaillance.<br />
D'autres anachronismes emaillent le recit de Sidi, traduisant sunout son<br />
ignorance des principes islamiques ; par exemple quand il affirme que les jihiidistes mons sur<br />
le champ de bataille furent Javes et enterres. Or ces soldats de l'Islam sont dispenses du bain<br />
monuaire et enterres avec leurs habits de combat, qu'Allah changera au paradis en vetements<br />
inconnus des humains. Nous pensons aussi que I'emploi repete de la synecdoque "6<br />
Fouta!", pour "6 enfants du Fouta!" reIeve du meme registre ; le griot confond les preux et<br />
leur pays pour ne pas oublier, dans sa gloriole, un seul jihiidiste.<br />
En outre, le traitement epique des faits historiques du jihiid omarien, presque<br />
totalement oppose acelui du Ro/and, permet malgre tout des comparaisons saisissantes ;<br />
1<br />
2<br />
3<br />
"Au printemps de l'annee 778, Charlemagne fit une expedition militaire en<br />
Espagne pour aider un chef militaire, Yaqzan Ibn AI Arabi, gouverneur de<br />
BarceIone, en revolte contre l'emir de Cordoue, Abderrahman. Deux armees<br />
passerent les Pyrenees, I'une a I'est, J'autre a I'ouest, pour se rejoindre a<br />
Saragosse. Charles, qui commandait celle de I'ouest, prit Pampelune, mais ne<br />
put s'emparer de Saragosse, tenu par Al Husayn. Bient6t, inquiete par une<br />
revolte des Saxons, il repartit pour la France en emmenant Al Arabi<br />
prisonnier. Celui-ci fut delivre, grace aun coup de main, en Navarre. Le 15<br />
Aout 778, au passage des Pyrenees, I'arriere-garde de l'armee de<br />
Charlemagne fut exterminee par des Basques ou des Gascons"3.<br />
Voir le point de depart historique et Mage, op. cir.<br />
Pour El Hadj Omar, un cmissaire doil pouvoir lire le message dont il est<br />
porteur.<br />
Moignet (G.), La chanson de Roland, Paris, 1970. p. 3.
, ./<br />
CHAPITRE IV - LA GESTE'COI\1lvlE REPRESENTATION DU MONDE 275<br />
Perirent alors Hroland, (Roland) "Comle de la Marche de Brelagne", et<br />
plusieurs de ses compagnons, dans ce coup de main hardi qui demeura impuni, d'apres La<br />
Vira Karali d'Eginhard (830), done bien poslerieure a 778. Jl semble que la mention de<br />
Roland constitue une addition tardive au texte primitif du chroniqueur. A ce titre, certains<br />
postulent que celte addition resulte d'un emprunt a une legende de Roland, alors solidement<br />
etabIie.<br />
En effet, aucun fait ne permet de soutenir que la defaite de Roncevaux ait ete<br />
un evenement de premiere importance dans le regne de Charlemagne. A ce propos, !talo<br />
SiciIiano fait remarquer l que I'historicite du poeme se reduit a quelques noms et au souvenir<br />
d'un desastre. Malgre tout, une obscure batailIe perdue par les troupes de Charlemagne, dans<br />
une etroite vallee des Pyrenees, inspira a un trouvere un vaste poeme qui se repandit dans<br />
toute l'Europe.<br />
Apres trois siecles de silence, Roland devient le neveu de Charlemagne et I'un<br />
des douze pairs de France, ses compagnons des barons chretiens. Parmi eux se detachent<br />
Olivier, I'ami dont la soeur, la belle Aude, est fiancee a Roland, et I'Archeveque Turpin, le<br />
prelat guerrier 2 . Le jeune Charles devient le vieil empereur "a la barbe fleurie", qui a deux<br />
cents ans. L'expedition militaire se transforme en une croisade qui dure depuis sept ans.<br />
L'embuscade des montagnards basques devient I'attaque de quatre cent mille cavaliers<br />
Sarrasins. Les Francs ne sont, en outre, vaincus que par la trahison de Ganelon et la<br />
demesure de Roland. Des lors, la mort du courageux Roland apparait comme un affront fait a<br />
la France que I'empereur s'empresse de laver en chiitiant Ies Sarrasins et en punissant<br />
Ganelon.<br />
D'une maniere generale, contrairement a I'epopee du jihiid, le traitement<br />
epique des faits historiques du Ra/and revele un profond ecart entre le poeme et son fond<br />
historique. Madelenat a raison d'affirmer ace sujet :<br />
1<br />
2<br />
3<br />
"Quand on envisage separement la narrativisation (qui touche Ies modalites<br />
d'enonciation), et I'emergence de I'action et des themes heroiques, on saisit<br />
dans la conjonction de ces deux evolutions la veritable discontinuite sur fond<br />
de tres longues continuites"3.<br />
Siciliano (I.), Les oT/glnes des ehansons de geste, Paris, 1951, p. 50.<br />
Faral (E.), "A propos de la Chanson de Roland. Gcnese el signification du<br />
personnage de Turpin", in Aetes du eolloque de Liege. 1959 p. 272.<br />
Madelenal (D.), op. eil.. p. 112.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 276<br />
2°) LE TRAITEMENT H1STORIQUE DES VERSIONS DE L'EPOPEE D' OMAR.<br />
II est generalement rec,:u que l'histoire puise dans I'invention epique des<br />
procedes de dramatisation et de developpement. En ce sens, au XlJeme siecle, les romans de<br />
Brut et de Rou formerent les annales legendaires et hero"iques des souverains bretons et<br />
normands.<br />
L'histoire de l'Afrique se constitua aussi en recourant, pour une large part,<br />
aux traditions legendaires et epiques. II en est de meme de l'histoire du jihiid omarien qui ne<br />
saurait ecarter le fond epique et mythique qui la genere. En revanche. l'historien, definissant<br />
sa discipline comme une science qui vise une explication rationnelle du passe, ambitionne,<br />
grace it I'application d'une methode scientifique, de retrouver l'axe des evenements afin de<br />
reconstruire les faits. A cet egard. l'historien fait peu cas des mythes, des miracles et du<br />
merveilleux, si presents dans la narration epique du jihiid omarien. Separant religion et<br />
politique, il retient le fait ideologique plus conforme it son champ d'analyse. Des lors, les<br />
succes du jihiid trouvent leur explication dans le contexte socio-politique de l'epoque sous<br />
l'action d'un grand homme.<br />
L'analyse historique I discerne aussi dans l'epopee un genre litteraire et un<br />
discours ideologique. Elle considere que les mythes et legendes participent d'une volonte de<br />
domination mentale. Aussi recuse-t-eUe le passage de Cheikh Omar it l'Universite de Pire<br />
ainsi que l'articulation du jihiid de Miiba Diakhou Ba sur le jihad omarien. Symbole du jihad<br />
victorieux, Omar apparait alors cornme un mythe ambulant, recupere par les omariens pour<br />
legitimer leurs desirs. Dans tous les cas, l'idee de leader federateur foumit au mythe une<br />
heureuse fonune, sunout durant la periode coloniale.<br />
Lieu d'histoire, l'epopee d'EI Hadj Omar reste la source la plus credible pour<br />
approcher correctement ce phenomene. Or. I'historiographie africaine la modifie it plusieurs<br />
reprises. Considerons ici les deux cas les plus typiques ; la conquete omarienne du royaume<br />
bambara de Segou et le refus d'Ahmadou de voler au secours de son pere ; le premier acte est<br />
interprete comme une vengeance, le second comme une ingratitude. Par contre, la realite<br />
semble toute autre.<br />
De retour de la Mecqtie, Cheikh Omar passa par Segou ou il fut emprisonne<br />
par le roi Tiefolo. Mais, "apres trois jours de conversation, Tiefolo fut entierement subjugue<br />
par le verbe et par l'aspect physique d'El Hadj Omar. Il se convenit al'Islam et voulut rendre<br />
sa conversion publique. El Hadj Omar le lui deconseilla. Il lui dit :" Si les anciens<br />
apprenaient ton abandon de l'animisme, ils't'assassineraient aussit6t. Cache ta conversion et ,,/<br />
Naus pcnsons lel sunout aux historicns marxistes ou malcrialistcs.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 279<br />
resulte une double vision d'un meme fait. La prise en compte de ces deux points n'a pas, en<br />
general, passionne les critiques, malgre l'existence d'un corpus considerable a ce sujet.<br />
L'etude d'un point de vue a largement prevalu par consequent. L'epopee d'EI Hadj Omar<br />
permet, fort heureusement, de jeter les bases de l'etude relative ala vision des vainqueurs et<br />
a la vision des vaincus dans le cadre de la geste peuJe traditionnelle islamisee. Mais,<br />
auparavant, le detour des chansons de geste s'impose.<br />
1- LES CHANSONS DE GESTE: LES CROISADES VUES PAR LES FRANCS ET PAR<br />
LESARABES<br />
Au lendemain de l'Emigration (Hegire) du Prophete Mohammed de la Mecque<br />
vers Medine, !'Islam entra dans une phase conquerante qui le porta assez vite ason apogee.<br />
A la mort du Prophete, ses generaux (les Khalifes) poursuivirent son action. C'est ainsi<br />
qu'en 809, quand mourut le Khalife Haroun al-Rachid, la nouvelle religion etait tres<br />
florissante. L'occupation arabe de Jerusalem revolta la chretiente, et en 1096, Pierre<br />
l'Ermite, ala tete d'une forte armee franque, conduisit la premiere croisade. Elle fut malgre<br />
tout ecrasee par Kilij Arslan, Sultan de Nicee.<br />
11 se developpa, des Jars, une litterature feconde alimentee par les<br />
observations des deux camps: Francs et Arabes, en d'autres termes croises et musulmans.<br />
Les chansons de geste et les chroniques arabes en temoignent.<br />
1°) LES CROISADES VUES PAR LES FRANCS<br />
Pour nous limiter a notre sujet, nous avons volontairement circonscrit nos<br />
sources aux chansons de geste, et particulierement aLa Chanson de Roland qui en constime<br />
un modele acheve. Inspirees par les interets de la foi chretienne, les croisades furent<br />
encouragees par l'Eglise qui, en plus des secours ordinaires, assura aux armees la presence<br />
d'eveques et de pretres pour precher l'abnegation, confesser et absoudre au besoin. Telle<br />
devait etre al'origine la fonction de l'archeveque Turpin1, le pretre-guerrier du Roland. A la<br />
vue des hordes pai"ennes, il s'anime et s'exprime 2 sous les accents des sermons d'Urbain<br />
n 3 . Puis, equipe comrne un chevalier, lance en main, monte sur un destrier, Turpin brandit<br />
Almace, son epee, et fait des Sarrasins un horrible massacre.<br />
2<br />
3<br />
Faral (E.), "A propos de la Chanson de Roland. Gcncsc et signification du<br />
personnage de Turpin". in ACles du CoUoque de Liege... p. 272.<br />
Moignet (G.), op. cil. , P 46 (Laissc LXXXIX, vv 1127 - 1136).<br />
11 prccha a CIcrmont la premiere croisade. Voir aussi Mathicu (XVI. 24-25).
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 280<br />
Ainsi. au tenne d'une etude fine et penetrante, Edmond Faral a montre que le<br />
personnage de Turpin, le prelat guerrier, fortifie l'idee que La Chanson de Roland se voulait<br />
une oeuvre militante, con,
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTAnON DU MOi'mE 283<br />
El Hadj Omar inspira alors aux maitres de la parole et de la plume de belles<br />
oeuvres ou il se voyait peint sous les traits d'un excellent imitateur du Prophete :<br />
"Celui qui a ete le meilleur dira : "Louange a Omar le Foutanke et a ce groupe,<br />
a lui qui a ete brillant et ne sera pas obscur.<br />
Ce groupe est celui dont s'est glorifie au-dessus de tous les nombreux<br />
groupes,<br />
Comme de compagnons choisis, les meilleurs sans limite" I<br />
Le dernier vers explique l'allongement progressif de la liste des premiers<br />
compagnons d'EI Hadj Omar 2 : chaque Toucouleur, chaque Omarien souhaite faire partie<br />
des "compagnons choisis, les meilleurs sans limite". Des lors les griots, faisant vibrer la<br />
corde sensible de leurs auditeurs ou obeissant a leurs interets, etablissent des listes ouvertes<br />
pretes a accueillir tout ressortissant de l'aire du jihiid qui fut sympathique au Cheikh.<br />
C'est sans doute cette idee qui determina Sidi Mbothiel a envoyer BOlDI Sawa<br />
Hiiko, Koly Mody Sy et Farba Gouwa, en mission au Macina au mepris de toute<br />
vraisemblance. Pour l'artiste, le benefice de l'exaltation du "pulaagu" est de loin superieur a<br />
l'inconvenient de l'irregularite. Le personnage du griat Farba Gouwa semble, du reste,<br />
remplir cette fonction car il est plus attentif a la tradition et it ses interets personnels qu'a la<br />
cause du jihad.<br />
Il convient d'ajouter que les succes du jihiid accentuerent ce type de recit<br />
anachronique : I'heroYsme paYen prenantle pas sur le mouvement religieux. C'est aussi cette<br />
orientation qui fonde les deux agents mythiques du jihiid omarien : un serpent souterrain et<br />
un oiseau qui volait continuellement. En meuant en gros plan ces attributs, les griots faisaient<br />
marcher le mouvement omarien, peut-etre inconsciemment, sur les traces de Thiiimaba3, le<br />
serpent mythique des Peuls. Tirant a10rs toutes les consequences d'une telle analogie, les<br />
griats expliquerent l'echec des jihiidistes devantle Fort de Medine en 1857 parce que ceux-ci<br />
avaient emprunte I'orientation Est-Ouest, orientation inverse au trace faste suivi par<br />
Thiiimaba. De meme, ils triompherent devant les rois bambaras et peuls, quelques annees<br />
plus tard, lorsqu'ils suivirentle trace Ouest-Est. Cette image d'un chef vivant dans l'intimite<br />
d'un serpent et d'un oiseau, exalte sans doute un pouvoir sans limite, mais doit<br />
manifestement plus aux cosmogonies negro-africaines qu'a la stricte orthodoxie islamique.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
Gaden (H.), op. eir. • vv 145, p. 26.<br />
Voir en annexe la listc des quatrc-vingt dix premicrs compagnons d'EI Hadj<br />
Omar.<br />
Serpent mythique peul. Voir a ce sujet F. de Zeltner, Comes du Sbu!gal er du<br />
Niger. Paris. 1912; A. Hampate Bii et G. DieterJen. Koumen. Paris. 1961.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTA110N DU MONDE 287<br />
La version de HamdaIlahi rencherit en disant qu'EI Hadj Omar visita en Orient<br />
les pays turc et kurde afin d'y acquerir des sciences mystique et esoterique, pour etre partout<br />
victorieux, et en particulier pour dominer le Soudan occidental. La preuve est foumie par le<br />
fait qu'en quittant Sokoto pour le Macina, El Hadj Omar, trouvant Gueladio au petit<br />
KouniiryI, lui promit de lui restituer son royaume, alors annexe par la Dina du Macina. Par<br />
la suite, quand il conquit HamdaIlahi, il envoya immediatement un emissaire en direction de<br />
Gueladio pour le prier de reprendre le commandement du grand Kouniiri.<br />
Un tel homme politique, devore d'ambition, envahit plus d'une fois, et sans<br />
raison, des principautes islamisees comme l'Empire peul du Macina. Les traditions<br />
recueillies par Bocar Cisse constituent, it ce propos, une accusation accablante :<br />
"La legende dit que El Hadj Omar, en construisant le tata qui entoure la<br />
concession de Cheikhou Ahmadou, jeta dans un puits les tetes de Ahmadou<br />
Ahmadou et de Bina Ali, plus sept cents jeunes garc;ons, nouvellement sevres,<br />
tous fils de grands marabouts. II a aussi emmure vivants six marabouts dont<br />
on m'a donne quatre noms: il s'agit de Abdourahmane Bii de Siire Seynou,<br />
de Miilick Al Hadj de Diiri, de Ahmadou Hamadoun Peredio de Kounari, et de<br />
Ismai'la Hama Sidiki Barry de Tomoura. Ces marabouts furent emmures<br />
vivants dans les angles du tata, exactement comme le roi de Segou emmura<br />
auparavant soixante sofas dans les murs de Segou, ainsi que soixante jeunes<br />
filles"2.<br />
El Hadj Omar est accuse aussi d'avoir, dans la meme foutee, reduit la veuve<br />
de Cheikhou Ahmadou, fondateur de la "Dina" du Macina, en une vulgaire servante. En<br />
effet, apres la prise de Hammdallahi, Omar vendit aux encheres la vieille Adja, mais<br />
personne ne voulut l'acheter, alors El Hadj sortit sept cent cauris qu'il distribua aux gens,<br />
prix de la femme noble aI'epoque. Un chef aussi cruel ne peut s'appuyer que sur une horde<br />
d'aventuriers indisciplines, en somme des mercenaires ala solde d'un tyran.<br />
La version du Khasso declare i\ ce propos, dans ses diverses relations, que<br />
c'est la conduite inconsideree d'un talibe mal eleve qui precipita la dissidence de Dioukha<br />
Samballa : aIors que le roi du Khasso faisait la sieste dans son appartement prive, un talibe<br />
forc;a la garde et penetra dans sa chambre. Pour le reveiller, le jihiidiste tira fort son gros<br />
orteil. Dioukha Samballa se reveilla brusquement et cria : "Est-ce un homme ou un diable ? "<br />
2<br />
/<br />
Chasse du Kounary par la Dina, Gueladio fonda un royaume et lui donna,<br />
par nostalgic, le nom de peti L Kounary.<br />
Cisse (B,), informaLions recueillies aupres du maraboul de Djengo, Bamako,<br />
le 26 septembre 1985.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTAnON DU MONDE 288<br />
A quoi le talibe repondit : "Je suis un homme, je suis envoye par Cheikh Omar, et toi, tu<br />
dors encore it l'heure de la priere ? Le marabout te demande de la poudre" 1.<br />
Malgre les conseils de sagesse de Cheikh Omar, le rai du Khasso lui jeta le<br />
chapelet et le bonnet qui les liaient. Cene image des jihadistes est conservee dans toute l'aire<br />
du jihad. Ahmadou Harnpate Ba a, de son cote, note sept cas de desobeissance2 des soldats<br />
omariens, qui causerent aussi la perte du mouvement.<br />
Des la Bataille de Medine (1857), El Hadj Omar cessa de controler son armee<br />
affamee de butins ; elle lui desobeira sept fois :<br />
- Bien que Cheikh Omar tolerat les Blancs, it cause de la superiorite de leur<br />
armement, l'attaque de Medine fut faite contre sa volonte.<br />
Cheikh.<br />
- A Mene-Mene (Niora), les soldats modifierent le plan d'attaque de leur<br />
- Cheikh Omar interdit it son armee, en raute pour Segou, de debarquer sur la<br />
rive draite. Par contre, it Sansanding, le debarquement eut lieu contrairement au vceu du<br />
marabout.<br />
- Alpha Oumar dit aux soldats qui l'accompagnaient it Mani-Mani de passer it<br />
l'aller par la zone inondee et au retour par la zone exonctee. Le detachement fit le contraire,<br />
entralnant la mort du general de l'arnlee omarienne.<br />
- Au fort du siege de Hamdallahi, les soldats obligerent El Hadj Omar it sortir<br />
coGte que eaGte, alors qu'il avait envoye Tidjani et Pate Poullo 3 chercher une armee de<br />
secours.<br />
- A la sortie de la grone de Deguembere, Cheikh Omar fut desobei; il declara<br />
alors: "Si vous desobeissez une autre fois, vous detruirez tout, car Dieu a eree en sixjours."<br />
- Enfin, El Hadj Omar fut trahi par un soldat qui divulga son plan it ses<br />
ennemis maciniens et IOmbouctiens.<br />
Ces jihadistes indisciplines furent aussi au service d'une vaste campagne de<br />
domination politique, et d'exploitation economique, sources de vives tensions sociales. En<br />
fait, pour les peuples vaincus, le jihad omarien fut surtout inspire par une cause economique.<br />
"EI Hadj Ornar, en revenant de la Mecque, a traverse le pays de Segou, a traverse le Macina,<br />
a vu la richesse de ces pays, d'immenses champs bieri cultives, des vaches grasses. Il a vu<br />
que ces pays etaient civilises, puis s'est dit qu'il fallait !esconquerir."<br />
2<br />
3<br />
/ Recueillie a Bamako aupres de Garan Kouyate SV Bocar Cisse; a Kayes aupres<br />
de Almamy Oiallo et Oury Demba Oiallo, enfin a Medine aupres de Abdoul<br />
Wahab Sarr.<br />
Communication particuliere, seance d'emretien, Oakar, le 31 Aout 1981.<br />
Pate Poullo est le grand pere maternel de Amadou Hampate Ba. C'etai! le<br />
gardien des vaches d'El Hadj Omar.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATlON DU MONDE 289<br />
A l'inverse, d'apres Ies vaincus, son pays connaissait une rare indigence. En<br />
tout cas, tous les marabouts qui ont ecrit sur la situation des pays vaincus, les presentent<br />
comme un veritable El Dorado. L'un d'eux note que:<br />
"Une fois a Sansanding, El Hadj Omar, apres s'etre repose, convoque<br />
Boubou Cisse, le chef de la vi lIe, lui demandant d'appeler tous les notables<br />
afin d'apporter de quoi habiller son arrnee. Boubou Cisse lui demanda s'il y<br />
avait une annee autre que celle qui se trouvait dans la ville. El Hadj Omar<br />
repondit que non. Alors le chef dit : "Ce n'est pas la peine que je convoque<br />
mes notables, si je ne suis pas capable d'habilIer ces hommes la moi seul" I.<br />
Et il habilla sur le champ toute l'annee ; chacun eut trois vetements : un<br />
boubou, une chemise et un pantalon. Rivalisant d'ardeur avec le chef de la vilIe, l'hote d'El<br />
Hadj donna aussi a chaque soldat de I'armee, alars estimee a plus de trois cent mille<br />
hommes, une femme accompagnee d'une servante 2,<br />
Mais c'est le Macina qui accuse surtOUl Omar et ses jihiidistes d'etre mus par<br />
des considerations economiques. Une fois mallrc de Hamdallahi, d'apres la vision interne de<br />
l'Empire peul, El Hadj Omar fit venir un Peul qui possedait un troupeau si immense qu'il<br />
etait incapable de le denombrer. Le marabout lui demanda par trois fois le nombre d'animaux<br />
qui composait son troupeau ; le Peul refusa par trois fois de repondre. 1I finit enfin, devallt<br />
l'insistance de l'assistance, par dire:<br />
"Aaah ! 1'ai compris ! Bon, ditcs au marabout que je lui donne sept cents<br />
taureaux pour sa viande, cinq .cents vaches laitieres alIaitant chacune une<br />
genisse pour son lair. Le reste, il n'a pas besoin de savoir"3.<br />
Ainsi les vastes champs bien cultives, les immenses troupeaux de boeufs et de<br />
vaches laitieres du Macina, l'or et les captifs de Segou, les diverses richesses du sol et du<br />
sous-sol de l'aire du jihiid habitee par des gens civilises semblent, d'apres les vaincus, avoir,<br />
plus que tout autre motif, inspire a Omar son jihiid. L'appiit du gain fut si manifeste qu'il<br />
continue encore de diviser les princes du Khasso. Khartoum SambalIa, pour avoir suivi El<br />
1<br />
2<br />
3<br />
/<br />
Cisse (B.), communication paniculiere, Bamako, le 26 SCpl. 1985.<br />
Pour unc comparaison utile, voir noire chapitrc sur la situation du Soudan<br />
Occidcntal a la vcillc du jihad omaricn.<br />
Cisse (B.), communication paniculierc. Bamako, Ic 26 scpl. 1985.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 291<br />
"Le personnage d'EI Hadj Omar est double: religieux et politique. Sur le plan<br />
religieux, c'est un marabout tres savant qui a pour missiorr de casser les<br />
idoles. Il est absolument intransigeant sur ce point. Il n'y a pas de dialogue<br />
possible, alars qu'il existait une entente tacite entre Cheikhou Ahmadou et les<br />
Bambaras fetichistes. El Hadj Omar, par contre, ne plaisante pas en religion,<br />
il ne badine pas. Tout ce qui va it l'enconrre de la religion, il l'ecrase sans<br />
pitie. Sur le plan politique, il apparait comme un natiorraliste au Senegal, oll il<br />
eut 11 lutter contre la colonisation; et comme un conquerant au Soudan, oll SOtt<br />
jihiid se transforma en entreprise coloniale" 1.<br />
A cette figure enigmatique, le Macina oppose celles plus consequentes de<br />
Sekou Ahmadou, fondateur de la Dlna, et de son petit-fils Ahmadou Ahmadou. Les griots<br />
maciniens ne composerent-ils pas un hymne evocateur pour perenniser la gloire d'Ahmadou<br />
Ahmadou?<br />
"Roi, fils de roi, petit-fils de roi.<br />
Imame, fils d'Imame, petit-fils d'lmame.<br />
Erudit, fils d'erudit, petit-fils d'erudit"2<br />
Par contre, Sekou Ahmadou laissa au Macina I'image d'un austere<br />
reformateur qui stipula, entre autres lois, celle-ci :<br />
cenains constats s'imposent :<br />
"Sira fati hampe! rewoe fati ngime!" 3.<br />
(Le tabac ne le chiquez pas! que les femmes ne chantent pas!)<br />
Au terme de notre observation du regard croise applique au jihad omarien,<br />
- L'epopee apparait comme un genre profonctement icteologique, oll<br />
cependant une entihe Iibene revient aux protagonistes, alars que, dans la realite ou sur les<br />
champs de bataille, la libene est confisquee par un groupe. Cette relativite explique la<br />
reecriture libre de l'histoire qui la caracterise et affecte aussi sa forme.<br />
I<br />
2<br />
3<br />
Cissc (B.), communication particulicre, Bamako, le 26 sep!. 1985.<br />
Id.<br />
Version orale du Macina.
CHAPITRE IV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 292<br />
- Champ particulierement fecond, I'epopee foumit aussi une matiere<br />
aux theses les plus controversees. Des lors, chaque groupe elabore son systeme de valeurs<br />
qu'il soumet 11 l'empire de l'epos.<br />
- Receptacle de fomles narratives variees, l'esthetique epique se veut<br />
un cadre original oil des talents divers s'investissent, favorisant du meme coup une<br />
confrontation d'idees, facteur de saine emulation. Mais, surtout, la grande originalite de<br />
l'epopee reside dans la confrontation de traditions omles et manuscrites des vainqueurs et des<br />
vaincus. Un traitement particulierement interessant de la matiere epique se degage aussi de<br />
\eurs auteurs.<br />
En effet, alors que les marabouts des deux camps s'opposent en tout, au<br />
niveau des idees et de leur traitement surtout, les griots divergent sur \e plan des idees, mais<br />
s'accordent par I'art. Par exemple, les marabouts omariens vantent Omar, ses talibes, son<br />
jihiid, mais denigrent les pays vaincus, en denon
CHAPITRE TV - LA GESTE COMME REPRESENTATION DU MONDE 293<br />
Nos epopees, issues de societes de tradition orale, Oll la fidelite it des modeles<br />
est toujours en vigueur, confirment l'esthetique de la reception. C'est pourquoi, aussi,<br />
l'epopee d'EI Hadj Omar, en suscitant, it l'oppose de la vision des vainqueurs, la vision des<br />
vaincus, se revele une reuvre majeure, meme si, par ailleurs, elle elOuffe toujours les<br />
versions qui sont hostiles it l'image de marque de son hems.
CONCLUSION<br />
294 A<br />
CEuvrc candour: tdle apparalr dans une premiere approche la gesre d'El<br />
Bdj umar. En elle se reneontrent l'antique culture orale des Peuls et la culture eerite<br />
apponee par l'lslam conqllcranl. A la cuilure peule, elle doit ses modes memes<br />
d'existence et d'daboration. Elle s'inscrit profondement dans la trilogle des cycles de<br />
I'cpopet' peule traditionnelle : cycle de la lance, Oll est exaltc I'heroi'sme elhnique ;<br />
cycle de la vache ou chant des IUu!as ; cycle de la femme qui valorise Ics caprices de<br />
la bien-aimee. Trilogie de genre constamment saturee par la rrilogie actantidle<br />
dominante formee par le heros, SOI1 destrier et SOI1 arme. Le tout etant gcnere par la<br />
trilogie des prodllcteurs dll teXll: epique : le recit de transmission, l'''auteur'' qui<br />
l'actualise etlc public.<br />
Mais la gesre d'Omar est cgalement une epopce du jihiid, aspect il pell pr"s<br />
seul retenu par la critique jusqu'alors. All lexte gCl1erique precedent, la tradition<br />
culturelle vehiculee par !'Islam ajoute It' cycle du Livre qui se formalise amour de trois<br />
themes, CellX de la fo!, dt' la voie et de la loi, et mobilise Commc support nurratif les<br />
trois formes dO!1]inallles de la Jiuerawre arabe classique : la "Sira", recit lineairc<br />
blographique,le plus sOllvent U
294 B<br />
Cl'S superpositions, Cl'S associations, Cl'S rencontres de wates narratives,<br />
ideologiques, fom1elles et esthetiques venues d'horizon divers font de la geste d'Omar<br />
le champ d'un sourd et vaste cont1it, decisif pour la culture peule. En ce texte<br />
magnifique, l'epopee peule tradition ne lie est soumise a une fom1idable tentative<br />
d'absorption et de reduction par une culture islamique sure de sa verite. On voit ainsi,<br />
dans cette reuvre, !cs constituants essentiels du genre et notamment les actants<br />
principaux, les representations du temps et de l'espace, les schell1as narTatifs, la vision<br />
du 1l10nde etre soumis au service d'une islamisation, d'une arabisation de la tradition<br />
epique peule. Le heros peul se coll1porte alms en neophyte et revendique avec trop de<br />
ferveur sa nouvclle foi. Le temps et l'espace de la geste se dilatent atlssi vers une<br />
direction unique, Medine et la Mecque. Le trajet narratif de l'antique cycle de la lance<br />
se confond bientot avec le derou1ement de la guerre sainte.<br />
Or, etonnant paradoxe, I'une des richesses de cette reuvre vrent<br />
precisell1ent de cc que l'entreprise eclroue en panie. EIIe echoue non parce que la<br />
culture peule "pOlllarise" a son tour la culture arabo-islamique. Ce type d'explication<br />
tradionnelle n'est pas peninent : le combat emit trop inegal. C'est all creur de la culture<br />
peule que s'insralle la culture arabo-islamique et l'on ne sache pas que la culture peule<br />
ait marque la culture arabo-islamique ailleurs qu'en pays peul. Non, l'enneprise<br />
echoue parce qu'uP espace de parole se cree dans la culture peule, qui 'la devenir le<br />
lieu de refuge ou cette culture peule, qui va devenir le lieu de refuge ou celte culture<br />
r<br />
S'C3t conservee, lieu beni oir nous POUVOllS lire la douloureuse et vivifiante memoire<br />
de notre passe. Cl' lieu est forme de Cl' que nous avons appele "l'epopee inverse",<br />
traces dispersees d'un texte epars ou les vaincus disent leur propre epopee.<br />
Le combat epique se trouve alars transfere la ou se gagnent toutes les<br />
guerres : sur le terrain de la culture. L'epopee inverse est le lieu de conservation de la<br />
permanence de la culture peule, de sa vision du monde, des richesses d'un passe qui<br />
est la source meme de SOI1 identite jusqu'a ce jour.
294 C<br />
Alors la geste d'Omar, vision des vainqueurs et vision des vaincus, prend<br />
une nouvelle dimension, qui cesse d'etre conflictuelle. Elle devient le lieu d'un<br />
"depassemenl " permanent de la tradition et celui d'une prise de conscience de sa<br />
specifieile, sous l'impulsion du jihiid. Elle dcvienl la chiisse de l'
TROISIEME PARTIE<br />
L'EPOPEE D'EL HADJ OMAR<br />
EDITION DE TEXTE (BILINGUE : PULAAR / FRAN<strong>CA</strong>IS)
PRESENTATION<br />
1- Les auteurs<br />
PRESENTATION<br />
296<br />
Nous devons al'amabilite de Sidi MbOthiel, Kalidou Ba et Demba Sarr les<br />
textes qui constituent notre corpus. La discretion des auteurs, resultant sans doute de la<br />
pudeur qui interdit al'homme de la tradition de se devoiler publiquement, surtout devant<br />
celui que 1'0n ne connait pas, nous a prive d'informations precises les concernant.<br />
Neanmoins, Sidi MbOthiel1, griot musicien tres prestigieux en milieu peul traditionnel,<br />
accuse une forte personnalite. Ne aFete Bowe, en plein Ferlo, ce sexagenaire s'affmna tres<br />
vite al'aide de son "naanooru", guitare monocorde, comme un sp6cialiste de l'epopee peule<br />
traditionnelle. Son art lui valut d'etre invite par les riches bergers peuls et par les travailleurs<br />
immigres. Ces soirees au Ferlo ou au Djoloff ainsi qu'en France lui ont permis d'acquerir un<br />
grand troupeau de breufs, d'autant plus qu'il a su tres vite islamiser son repertoire profane.<br />
Moins populaire que Sidi, Kalidou Ba2 est un jeune artiste qui a herite d'une<br />
tradition griotique qu'il essaie de prolonger.<br />
Quant aDemba Sarr, aveugle, il s'est specialise dans la litterature islamique<br />
poular, principalement dans les "beyti". 11 se produit, sous la conduite de son fils, tous les<br />
Vendredis ala grande mosquee de la Medina de Dakar, ou il d6clame, entre autres chants, le<br />
fragment du jihad omarien compose par Hammat Samba Ly, un jihadiste de la premiere<br />
heure. Demba vit aGuediawaye, dans la banlieue dakaroise, au milieu de ses deux epouses<br />
et de ses enfants.<br />
2. Les textes.<br />
Recueillis au magnetophone, les textes de notre corpus furent transcrits,<br />
traduits et annotes non sans difficultes.<br />
En effet, alors que nous penchions pour une transcription phonetique, les<br />
linguistes poularophones, soucieux de fixer la langue sur le plan scientifique, nous<br />
conseillaient pIutot une transcription phonologique. C'est ainsi que notre transcription fut<br />
revue et corrigee par Monsieur Mamadou Ndiaye, linguiste au Departement de Linguistique<br />
de la Faculte des Lettres de Dakar. Nous ne saurions assez lui exprimer notre profonde<br />
1<br />
2<br />
Infonnateur aussi de Gerard Meyer, op. cit., et de Mamadou L. Ngai"de, op.cit.<br />
Infonnateur de G. Meyer, op.. cit.
PRESENTAnON<br />
Pour la chuintante "ch" qui n'existe pas en poular, nous avons adopte S<br />
De meme la q note l'implosive g.<br />
299<br />
Dne transcription plus juste commande cependant une transcription phonologique en<br />
lieu et place d'une transcription phonetique. A ce sujet, nous ne saurions assez remercier<br />
Monsieur Mamadou NDiaye qui, non seulement a lu et annote tout notre corpus, mais nous<br />
a communique les informations que nous reproduisons.<br />
De l'orthographe et de la separation des mots.<br />
a) L'occlusive glottale.<br />
Elle est notee en position interne et fmale.<br />
exx : eel<br />
el<br />
babe<br />
koe<br />
b) Les prenasales velaires<br />
eelnude =parler ahaute voix<br />
elnude =hesiter<br />
=barhes<br />
=tetes<br />
On l'ecrit / Og / et non / ng /. Cela pour la distinguer de la suite<br />
n + g.<br />
exx : kongol (Kon-gol)<br />
konool (kon-ogol)<br />
kooool (koO-Ogol)<br />
= le fait de piller<br />
= qui a pille (participe accorde<br />
avec un nom de classe Ogol)<br />
= parole.<br />
Devant k on notera 0 lorsque c'est la nasale velaire qui est reaIisee.<br />
exx: kaoko, daOki, saokaade rookude<br />
et n lorsque c'est la nasale alv60laire.<br />
exx : haako njonko, lekki njanki
PRESENTAnON<br />
exx: 00 d'oo, 00 too, Ogol too.<br />
H- Les adjectijs possessijs.<br />
301<br />
a) Les suffIxes possessifs specifiques acertains tennes de parente ne sont pas separes<br />
du nom. Ces suffIxes soot :<br />
2eme personne du singulier<br />
3eme personne du singulier<br />
1ere " "plurie1<br />
2eme<br />
3eme<br />
"<br />
"<br />
"<br />
"<br />
- 0 - njaate<br />
- iiko- urn -taaniiko / mawnum<br />
- en - minen, esen.<br />
" - on - mawnen<br />
- iioe - giyiioe<br />
b) - am, possesseur de la lere personne du singulier, n'est pas separe du nom.<br />
exx : gallam, laawolam, oi0oelam.<br />
c) Tous les autres elements exprimant la possession sont separes du nom.<br />
eex : Wutte ma, debbo makko<br />
1- L'adjectijinterrogatij<br />
L'element interrogatif est separe du nom.<br />
en : hol galle ? holleggal?<br />
J- Les pronoms personnels<br />
a) Les pronoms personnels sujets<br />
- place avant le verbe, le pronom personnel sujet est separe de celui-ei.<br />
exx : 0 arii, ad'a ara.<br />
- place apres le verbe, le pronom sujet est soude au radical s'il est al'initiale vocalique, mais<br />
il est rattache au verbe par un trait d'union s'il est al'initiale consonantique.
PRESENTATION 302<br />
en : naamaa, tu manges<br />
njahen, partons<br />
tottu-mi, je donnai<br />
loot-cflaa, tu lavas.<br />
b) Les pronoms complements<br />
Sauf - am et - e qui sont soudes au radical du verbe, tous les pronoms personnels sont<br />
separes du verbe.<br />
en: 0 yii kam, tottarn<br />
Les pronoms personnels sont toujours separes de la preposition, al'exception de am, qui<br />
n'est separe que des prepositions monosyllabiques ala finale vocalique (type C.V.).<br />
en : 0 arii to am<br />
mais<br />
o arri yeeso makko<br />
o arii yeesam<br />
o arii caggalam<br />
Quant ala traduction, elle nous a repose les problemes lies au passage d'une langue a<br />
une autre, aiguises ici par le passage de l'oral al'ecrit. 11 s'agit d'une operation difficile,<br />
parfois deroutante, car l'oralite vit alors que l'ecrit fige. Neanmoins, nous avons suivi le<br />
texte pulaar d'aussi pres que possible, et devant le caractere souvent elliptique de<br />
l'expression de la pensee, nous avons, pour plus de clarte, introduit des mots sans<br />
equivalent dans le texte, mis entre crochets. Quand la clarte du recit exige une autre toumure,<br />
nous avons mis le mot amot en note. Malgre tout, passer d'un registre al'autre donne le<br />
sentiment d'exiler le texte originel. Aussi, notre corpus, depouille de ses omements extra<br />
textuels et de la vision du monde qui l'inspire, est-ille temoignage d'une certaine trahison.<br />
Mais, en verite, d'une amicale trahison, puisqu'elle permet al'oral de survivre, temperee par<br />
des notes explicatives.<br />
Ainsi la combinaison de la transcription, de la traduction et des annotations du corpus<br />
restitue l'epopee vivante du jihad omarien, par le concours de trois voix males, autorisees a<br />
dire l'epopee en milieu peul. Malgre l'absence du suppon musical de Sidi MbOthiel et de la<br />
chaleur des voix de Kalidou Ba, et de Demba Sarr, nous souhaitons au lecteur un delicieux
PRESENTATION 303<br />
parcours epique. n ne nous reste plus qu'a laisser couler ces "paroles donnees" par des<br />
hommes issus de la tradition, ou "donner la parole" revet encore un sens.
EDITION DE TEXTE BILINGUE POULAR I FRAN<strong>CA</strong>IS
CORPUS
306<br />
NODDOL AL HAJJI UMAR DAANDE SIIDI MBOOCEL<br />
GOO : GILA JIBINEEDE UMAR HALWAAR HAA BATU MISIRA<br />
DAANDE KAALIDU BAH<br />
t[)1t[)1 : JIHAADI GILA DINGIRAAY HAA HAMDALLAHI<br />
DAANDE SIIDI MBOOCEL<br />
TATI: WATTAN JIHAADI GILA HAMDALLAHI HAA DEGEMMBERE<br />
BAAR HAMMAAT SAMBA Llli DAANDE DEMBA SAAR
ne?· "-.....<br />
LA DEVISE OU " NODDOL" D'EL HADJ OMAR PAR SIDI MBOTHIEL<br />
307<br />
CORPUS I DE LA NAISSANCE D'OMAR A HALWAR AUX JOUTES<br />
ORATOIRES DU <strong>CA</strong>IRE<br />
PAR KALIDOU BA<br />
CORPUS 11: LE JIHAD : DE DINGUIRAYE AHAMDALLAHI<br />
PAR SIDI MBOTHIEL<br />
CORPUS III LA DERNIERE PHASE DU JIHAD DE HAMDALLAHI A<br />
DEGUEMBERE<br />
PAR HAMMAT SAMBA LY, DECLAMEE PAR DEMBA<br />
SARR.
LA DEVISE<br />
1.<br />
2.<br />
3.<br />
4.<br />
5.<br />
6.<br />
7.<br />
8.<br />
9.<br />
10.<br />
11.<br />
12.<br />
13.<br />
14.<br />
15.<br />
16.<br />
17.<br />
18.<br />
19.<br />
20.<br />
21.<br />
22.<br />
23.<br />
24.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
LA DEVISE D'EL HADJ OMAR PAR SIDI MBOTHIEL<br />
309<br />
Noble fus de noblesI<br />
Qui a porte sur ses epaules la priere mystique de " Hizbul Bahri "<br />
11 a commence a reciter le " Arahmanou " ,<br />
Qui commence par ces mots : 6 toi Allah, c'est toi Allah Roi de la<br />
Verite evidente2.<br />
En recitant cette priere, cent anges se prosternent en face de lui<br />
Tu sais qu'Allah ne donne rien, mais il prete tout.<br />
Tout ce que tu possedes, tu le perdras.<br />
Par Allah le possible deviendra impossible.<br />
Si la generosite empechait de mourir,<br />
Si le courage empechait de mourir,<br />
Si le savoir empechait de mourir,<br />
Cheikh Omar Tidjane.. .3.<br />
Quel fut le lieu de la premiere bataille du Cheikh ?<br />
Elle eut lieu en un endroit appele Dinguiraye.<br />
Au moment de la bataille, a combien se chiffraient les disciples?<br />
Trois cent trois disciples.<br />
QUi fut son premier protagoniste ?<br />
Le nomme Tamba Boukart4,<br />
Le Riche, le Savant<br />
11 a combattu vingt et un pays.<br />
Noble fils de nobles.<br />
En ce qUi me concerne, je peux affirmer qu'il a livre cent trente et<br />
une batailles5<br />
Le Riche, le Savant, le Bien eduque !<br />
Cheikh Omar a frequente quarante marabouts.<br />
11 ecrit et se lave, on ecrit pour lui et il se lave6.<br />
Il s'agit d'EI Hadj Omar Tall.<br />
Le decoupage des versets obeit au souffle du griot.<br />
L'epopee refuse au heros le fait de mourir, d'oll la suspension du verso<br />
Anachronique, Cheikh Omar fut oppose plut6t a Yimba Sakho.<br />
Mot a mot : d'apres mon savoir, il a livre...<br />
Il s'agit de la pratique du aye ou eau benite. Le marabout ecrit cenains<br />
versets du Coran ou cenains signes mystiques sur une planchette qu'il lave<br />
ensuite. L'eau recueillie est un liquide magique qui produit des effets<br />
immediats, quand on s'en lave le corps.<br />
I
310<br />
25.<br />
26.<br />
27.<br />
28.<br />
29.<br />
30.<br />
31.<br />
32.<br />
33.<br />
34.<br />
35.<br />
36.<br />
37.<br />
38.<br />
39.<br />
40.<br />
Oya Ceerno ko capand'e njoyo wii<br />
IlAkaramayni ibnu akaramayni"<br />
Anndi Tammbaa Bukari nde oe kaoata<br />
wonnoo yo Alia hokku en barke<br />
Kala ko aldaa e barke feewaan i<br />
Anndi mi wii ma ko be teemedere tato almuooe<br />
E almuooe tato.<br />
Hol ko Tammbaa Bukari neli ?<br />
Ujunnaaje jeegom keefeero<br />
IDoon noon oe tawi Sayku Dinngiraay<br />
mbad'i wuro ngoo "ferme serkel" 1<br />
Ned'd'o e ned'd'o, fetel e fetel<br />
IDoon noon Sayku Umar<br />
Lemii-d'aa tawi ko jamaanu<br />
Lemii-d'aa tawi ko jamaanu<br />
o wi'i : EEE ! Fuuta !<br />
Be mbi'i<br />
mo : Taal<br />
41. 0 wi'i : on njii 00 jamaan u ?<br />
42. Be mbPi mo : min nji1i<br />
43. 0 wii: woto kulee 00 jamaanu<br />
44. Alia na jogii jamaanu ko ouri 00 jamaanu<br />
45. Jooni noom mbodo ni naata e golle<br />
46. woto n gado-d'ee fellude oe.<br />
47. So oe ngadiima fellude on<br />
48. Ked'o d'on, ko kaal mi kala ngolliron noon<br />
49. Doon noon 0 hucciti fUd'naange<br />
50. Bajo ena nodda, Alia (na) nootoo<br />
51. Farba Sawa Guwaa na tiimi e makko<br />
52. Na wiya mo : "a karamayni ibnu akaramayni"<br />
53. Teddud'o oii teddud'ol<br />
54. Aan Janngi, wiyaa Ceerno Umar<br />
55. Facciri, wiyaa Tapsiiru Umar<br />
1 Vers traduit en pauIar. Le vers precedent est dit en arabe.<br />
NODDOL
LA DEVISE 311<br />
25.<br />
26.<br />
27.<br />
28.<br />
29.<br />
30.<br />
31.<br />
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1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
L'autre marabout1 soutient qu'U a frequente cinquante marabouts.<br />
Noble ills de nobles.<br />
Tu sais qu'avant de se battre contre Tamba Boukari...2.<br />
En verite. implorons Allah afm qu'il nous octroie la "baraka"3<br />
Tout ce qui est depourvu de " baraka" ne vaut rien.<br />
Tu sais que le Cheikh ne possedait que trois cent trois disciples.<br />
Mais a combien s'elevait l'efIectif que Tamba' Boukari depecha?<br />
A six mille paiens.<br />
Us trouverent le Cheikh a Dinguiraye.<br />
Us assiegerent la ville.<br />
Un homme a cote d'un homme, un fusU a cote d'un fusil.<br />
Alors Cheikh Omar<br />
Jeta un coup d'reU par ci et vit une foule ;<br />
Jeta un coup d'reU par la. en vit une autre<br />
U dit: Fouta<br />
Ils4 repondirent : Tall.<br />
U dit : avez-vous vu cette foule?<br />
Us dirent : nous l'avons vue.<br />
U dit : ne craignez pas cette foule,<br />
Allah possede une foule plus nombreuse qu'elle.<br />
A present, je vais faire une retraite spirituelle.<br />
N'attaquez pas en premier lieu.<br />
S'lls vous attaquent en premier lieu,<br />
Attendez et agissez selon mes consells.<br />
Puis U se dirigea vers 1'Est.<br />
Us appelaient. Allah repondait.<br />
Farba Sawa Gouwa5 etait a ses cotes.<br />
11 disait : noble ills de nobles !<br />
Noble fils de nobles !<br />
Le Savant. le Riche. le Bien eduque.<br />
crest toi qUi as etudie et qu'on a surnomme Thierno Oumar<br />
QUi as fait l'exegese du Coran et qu'on a surnomme Tafsirou Oumar<br />
Un autre specialiste de l'epopee d'Omar qui mentionne une variante.<br />
Rupture au niveau de la narration. Le debut est toujours difficile !<br />
Grace divine.<br />
Metonymie : les habitants (ils) pour le Fouta (le pays).<br />
Griot d'EI Hadj Omar.
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Nekki Safaa e Marwa J<br />
Tikka Alia tikka<br />
Haoee Alia jinnga<br />
Aan wiyetee woobo woobo<br />
Woobo wuro, wottoo Jom saare<br />
wiyaa AI Hajji Umar<br />
Nalla jom wuro, hiira almaami jamaa<br />
Tan ham oeya tukki fiyannde muucfum1en 1ee<br />
Be nani fiyannde muucfum'en "gar ! gar !"<br />
Haa timmi piyancfe jeecficfi.<br />
Doon noon Alia tellini e makko Tabiibu<br />
o wPi : Joomiraacfo Jom baawcfe 00 wii maa<br />
Ko fiaagi-cfaa cfum koo 0 rokkiima<br />
o wPi : mbicfo fiaagii Joomirado Jom baawcfe 00<br />
Voo konu Tammbaa Bukari 00 fof cfaano,<br />
Ko cfaaniicfo weli haode<br />
Doon noon, 0 wii : Joomiraacfo 00 hokkiima<br />
Doon noon kaOko Sayku Umar 0 haftii, on ndaari Fuuta<br />
o wi'i : EE Fuuta<br />
Be mbPi mo : Taal !<br />
o wi'j : naonga nee kam cfii bamcfi, Alia tagii ballal<br />
Hol ko 0 wacfi e maooe nde De cfaanii ?<br />
uVaa kaafi, yaa eel<br />
Anta ludhi J wa gadahaa<br />
Wo kullu Jabbin, wa Jabalun<br />
Vaa kalka yaa iil"<br />
o tuuti e maooe, De cfaan ii,<br />
Haa baonge De cfaaninoo 00 mooY'i J<br />
De tinaani,<br />
Fuuta tawi De cfoon, duppi De haa De laaoi.<br />
Ko cfoo 0 fUcfcforii<br />
o fawi heen ko biyeteecfo Faajimmba<br />
NODDOL<br />
Muud'um se voit id allonge en muud'umen ee par un artifice poetique<br />
dont use frequemment Sidi Mbothiel.
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Ko ePoo De mbiyata 0 bonnii Tamba 0 bonni Faajimmba<br />
o bonni Janngirde J<br />
1)00 0 hel i nene.<br />
o feccitii oeenaaba<br />
o firtii Farabanna<br />
o lummbiri e Jaakalel<br />
Jaali Maamudu ko keefeero<br />
o waajii ePum mennam salii J<br />
Moribaa Saafere ko keefeero<br />
o waajii ePum salii J 0 wari<br />
ePum<br />
Sunngurubaa Boojan ko keefeero<br />
o waajii ePum saJii J 0 wari ePum<br />
Boojan Baasunguru ko keefeero<br />
o waajii ePum salii J 0 wari ePum<br />
o heDti Jara Kunakaari J<br />
o nippi ePoon jumaa<br />
o wari oaaroe Jara Elimaan<br />
Gelaajo Deysi Joongoy<br />
Maamudu Deyse ko Kolomina<br />
Banjugu Jara ko Gimmbanna<br />
Maamadi Kanjaa ko Nooro<br />
Barka ko Madiina Alaheeri<br />
1)oon won i naami niiri Barka<br />
yettaani Barka<br />
Jaa maalin J jaa elmin J jaa ladabin<br />
llAkaramayni ibnu akaramayni ll<br />
Anndi mbiePo haalan moo seeePa<br />
Winnda 100to J<br />
Nodda Alia nootoo<br />
K oePo suba ka J<br />
winndanee looto<br />
Jom wuro naange e hoore<br />
0 wari ePum<br />
NODOOL
LA DEVISE 315<br />
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5<br />
C'est pourquoi les griots disent il a detruit1 Tamba, il a detruit<br />
Fadjimba.<br />
11 detruisit Djanguirde,<br />
Il cassa Ghegne,<br />
n ecrasa Ghegnaba,<br />
n aneantit Farabanna,<br />
Il traversa le fleuve au niveau de Djakalel.<br />
DjaIi Mamadou, le paien ; ille sermonna, mais celui-ci refusa, il le<br />
tua<br />
Moriba Safere, le paien ;il le sermonna, celui-ci refusa, il le tua.<br />
Soungourou Ba Bodian, le paien ; ille sermonna, celui-ci refusa, il<br />
le tua.<br />
Bodian Ba Soungourou2 le paien; ille sennonna, celui-ci refusa, il<br />
le tua.<br />
Il prit Diara a Kougnakari,<br />
11 y construisit une grande mosquee,<br />
n tua Gharangui Diara a Yelimane,<br />
Gueladio Desse a Diongoye,<br />
Mamoudou Desse a Kolomina,<br />
MBandjougou Diara du Guimbanna,<br />
Mamady Kandia a Nior03,<br />
Barka a Madina Alaheri.<br />
C'est la ou 1'0n dit : "avoir mange la bouillie de Barka sans<br />
remercier Barka"4. Puis l'armee se dirigea vers le Kingui.<br />
Le Riche, le Savant, le Bien eduque.<br />
Noble iUs de Nobles.<br />
Sache Ue t'apprends] quelque peu5.<br />
Il ecrit et se lave, on ecrit pour lui et il se lave.<br />
Il appelle Allah et celui-ci repond.<br />
Etranger le matin,<br />
Chef de village a midi,<br />
Mot a mot : il cassa en deux parties egales.<br />
Jeu de mot resultant de l'inversion des prenoms de ces princes. Les memes<br />
noms circulaient a l'interieur du clan ou de la tribu.<br />
Detail non confonne a la verite historique : Kandia ne fut pas tue.<br />
Expression devenue proverbiale. Barka fut tue alors qu'il celebrait les<br />
noces nuptiales de sa fiIle. Les plats destines aux invites furent servis<br />
plutot aux combattants de la foi qui mangerent le repas de Barka sans le<br />
remercier.<br />
Syntaxe peule.
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120 .<br />
Almaami Sallifanaa<br />
Diwataa na 1I00De,<br />
dogattaa naagotooDe<br />
IDoo 0 tukki Karuoka Jaawara Mene-Mene<br />
Aali Woyteela Duri doole<br />
Hol ko Aali yaa kori ?<br />
Aali na wondi e allaaji mum tekke cPii<br />
Ko Jalaoeeji Doli<br />
MawcPo alia makko 0 wiyata cPum ko ka okoba<br />
Oya omo wiya cPumenna nookoba<br />
Oya omo wiya dumenna Jookeeba<br />
GocPcPo 00 na n i wiyee kelle<br />
Oya ina wiyee Kellen Teke...<br />
Haa nalawmaaji Hamdallahi !<br />
NODDOL
318<br />
DAAROL SAYKU UMAR<br />
CORPUS I<br />
GILA JIBINEEDEMO HALWAAR HAA BATU MAKKO MISIRA, DAANDE<br />
KAALIDU BAH<br />
1. Holi gadiicPo yiyde kabaaru Seyku Umar ?<br />
2. MbiyeteecPo Elimaan Dimar :<br />
3. GumcPo gite mo wumaan i bernde.<br />
4. Jamma fof ko Alia addi,<br />
5. Omo immoo e Dimar,<br />
6. Yaha, 0 juuroyoo rawda<br />
7. 0 arta, 0 waalta e Dimar.<br />
8. Yahi haa wacPi sda Alia gooto,<br />
9. Omo immii e Dimar,<br />
10 . Omo yaha juuroyaade rawda ;<br />
11. 0 fotti cPoon e ruhu ene weeya hakkunde leydi e asamaan,.<br />
12. 0 wPi: iskey! ndaw ruhu juuroytoocPo rawda gila feenaani!<br />
13. Hol to njogor daa jeyeede ?<br />
14. 0 wj1i : leydi ene wi1ee Fuuta Tooro.<br />
15. 0 wii hol jogoroe jibinde ma malaaoe<br />
16. 0 wPj : baaba am ene wi'ee Ceerno Seydu<br />
17. Neene am ene wi'ee Adama Ayse.<br />
18. 0 wi'i : holi waqtu njogor-cPaa feeride ?<br />
19. 0 wi'i : riande alkamisa ene jofi aljuma,<br />
20. l\Iande heen lewru koorka ene tijjaa ;<br />
21. Ko riande heen peeriat-mi e Halwaar.<br />
22. 0 winndii cPum e oataake.<br />
23. 0 neldii Ceerno Seydu.<br />
24. 0 wPj : acPa jogori daride oicPcPo<br />
25. tOum ne, riande 0 jogori feeride<br />
Ene rialli alkamisa, ene jofi aljuma<br />
26. l\Iande heen lewru koorka ene tijjaa.
320 CORPUS I<br />
27. Joo
322 CORPUS I<br />
57. Ko nedldlo danii fof yo yettu Alla J yetta yumma mum<br />
58. Kono so yumma immiima suyre galle J<br />
59. Baaba immiima damal galle J<br />
60. Yumma roondiima baaba J lioii<br />
61. Baaba roondiima yumma J lioii<br />
62. Sippiro dariima J eraali e luukaali ndariima :<br />
63. So oicfldlo jibinaama e cflum alaa ko waawanta hoore muudlum.<br />
64. I{)oon noon, hankadin noon J tooroooe natti ndaarde naange;<br />
65. 'Be mbadlti ndaarde Seyku Umar ;<br />
66. So ne mbadlii jeddi naange muti<br />
67. 'Be ngitta nelaado J yaha galle Ceerno Seydu J<br />
68. Mbi'a: yeewanaa en tiggu neene Adama 00 so ko muyn i<br />
69. 0 yettoo J 0 wi'i : neene Adama J tiggu 00 muyn i ?<br />
70. 0 wi'i : wallaahi J tiggu 00 muyn ii !<br />
71. 0 wi'a : toyee koorka J tiggu muyn ii<br />
72. - ndeen montoruuji keewaani !<br />
73. Joodliima haa Seyku entaama ;<br />
74. Omo yahra e duuoi makko nayi.<br />
75. Hol to 0 fUdlcflotoo feeninde walliyaagol ?<br />
76. Ndunngu toni J ngatamaore ari J lorbiima.<br />
77. Honno wakki Alfoo Aamadu<br />
78. Tijoan jibini Lahambu.<br />
79. 'Be pin i J oe ndawri aawre.<br />
80. 0 wPi : dede, njehen gese men awre !<br />
81. 0 wi'i : alaa, Umar, a waawaa yahde J gese men ene wocfldli,<br />
Kolongal meedlen ene wodlcfli,<br />
82. 0 wPi : olao J deede J njohden tan<br />
83. 'Be pokkiti, ne njahi.<br />
84. Yahi haa oe njettiimo.<br />
85. Alfa ene jabba,<br />
86. A Imuune nee ene ngaawa.
CORPUS I 325<br />
87. Seykou prit une gourde pour semerI;<br />
88. Alfa dit : he, Oumar, mon petit frere, tu ne peux pas semer !<br />
89. 11 dit : non, j'essaye seulement !<br />
90. Quand U arrivait a un trou, i1 mettait une graine ;<br />
91. Arrive au trou suivant, il ne mettait pas de graine, i1 continuait.<br />
92. Les eleves etaient fort mecontents :<br />
93. lIs dirent : Alfa f Celui-ci dit : oui f<br />
94. L'un deux dit : Oumar ne seme pas, il nous gate le champ:<br />
95. Quand il arrive a un trou, il met une graine,<br />
96. Quand il arrive au trou suivant, il ne met pas de graine, il continue.<br />
97. Alfa dit : Oumar, mon petit frere, ne seme pas de cette maniere !<br />
98. Si tu semes ainsi, nous n'aurons pas beaucoup de mil.<br />
99. 11 repondit : he, grand frere, j'ai compris.<br />
100. Alfa continua a creuser les poquets :<br />
101. Oumar continua a semer,<br />
102. Oumar n'arreta pas de semer a sa maniere :<br />
103. Les eleves protesterent vivement :<br />
104. Ils dirent : Alfa ! Oumar n'a pas arrete de semer !<br />
105. Alors Alfa ramassa une baguette,<br />
106. n chasse Seykou comme on chasse son petit frere.<br />
107. 11 Yavait la-bas un fleuve plein d'eau<br />
108. D'une rive a l'autre ;<br />
109. Seykou traversa le fleuve en courant,<br />
110. On aurait dit qu'il marchait sur la terre ferme,<br />
Ill. 11 partit et rejoignit l'autre rive du fleuve.<br />
112. Alfa se tenait sur la rive opposee ;<br />
113. 11 mit sa main devant sa bouche2<br />
114. Et dit : sachez que mon petit frere Oumar m'a fait une surprise!<br />
115. 11 designa alors un eleve,<br />
116. 11lui dit : va, dis au Pere qu'il vienne ici tout de suite,<br />
117. Oumar m'a fait une enorme surprise dans les champs.<br />
118. L'eleve partit, arriva et dit : Thiemo Seydou f<br />
119. Celui-ci dit : oui f<br />
120. 11 dit : Alfa veut que tu viennes tout de suite,<br />
2<br />
Les graines destinees aux semailles sont conservees dans une grande<br />
gourde.<br />
Signe d'etonnement et de surprise.
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Uma r holli cflum kaawcfle moolanaacfle moole to gese to.<br />
o wi'i : hol ko Umar holli toon hannde ?<br />
o wPi : miin kay mi waawaa haalde, ko ma ngaraa<br />
Ceerno Seydu jawliima tuggordu,<br />
Hunuko koo ene yemoo, jabbe ene caama,<br />
Haa 0 yetti A Ifaa.<br />
o wPi Alfaa! Alfaa wi1i mo : naam !<br />
o wi'i : hol ko noddir daa mi to gese gaay ?<br />
o wPi : noddir ma mi ko Umar ene holli mi kaawcfle<br />
Umar ene aawatnoo cfloo aawre bonnde ;<br />
Mi wi'i micflo fi'a cflum noon,<br />
Dogi, feccitii ngoo maayo,<br />
Nene daroyii to e fonngo maayo<br />
o wi'i mo : ya aan Umar am !<br />
Umar wi'i mo : naam !<br />
o wi'i : or, hay gooto fi' ataa ma<br />
Umar feccitii maayo, ene jayloo :;<br />
Omo wayi no jaylotoocflo e leydi n ii.<br />
Woyoo kokke Alia e baawcfle mum!<br />
Haa 0 yettii, 0 maDDi e Ceerno Seydu<br />
o wi'i mo : Umar am, hol ko renndin ma e Alfa ?<br />
o wi'i : micflo awatnoo ocfloo aawre ;<br />
Boa ba, A Ifa an ndaa ko aawre ndee fi ri ;<br />
M i in m icflo annd i k0 m bacfla t-m i k0 ;<br />
o wi'i micflo aawa aawre mbacflat mi ndee.<br />
o wi'i kam, mi feccitii ngoo maayo.<br />
o wPi : Umar am, woto yaaw, feeFdnde yaawi<br />
Kono taw ko n ii ngaawrataa, en keewataa gawri<br />
Ngaraa e ngoo cfloo wullo, ngaawaa,<br />
Ngaraa e ngoo cfloo wullo, calo cflaa aawde, Den naa.<br />
o wi'i : so a yi'i mi wacflii noon, won ko sabii cflum<br />
o wi'i : hol ko sabii aawre ?<br />
CBe ngara, De njiima e wullo ngo aawaaka.<br />
o wi'i : acfla anndi ko hacfli mi aawde ngoo cfloo wullo ?<br />
CORPUS I
CORPUS I 327<br />
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1<br />
Oumar lui a fait une enorme surprise dans les champs.<br />
11 dit : qU'est-ce que Oumar lui a montre la-bas ?<br />
11 dit : moi, je ne peux pas le dire, il faut que tu viennes.<br />
Thiemo Seydou se mit en route, appuye sur son baton,<br />
Sa bouche murmurait desprieres, i1 egrenait son chapelet1<br />
11 arriva chez Alfa :<br />
Illui dit : Alfa t Celui-ci dit : oui t<br />
11 dit : pourquoi m'as-tu appele dans les champs ici ?<br />
11 dit : je t'ai appele car Oumar m'a fait une surprise:<br />
Oumar avait mal seme ici,<br />
Je voulais le frapper,<br />
11 prit alors la fuite et traversa le fleuve,<br />
Le voila qUi se tient sur l'autre rive !<br />
Le pere l'appela : he toi, mon Oumar !<br />
Oumar dit : oui t<br />
11 dit : viens, personne ne te frappera !<br />
Oumar traversa le fleuve en marchant,<br />
On aurait dit quelqu'un qui marchait sur la terre.<br />
- Les dons de Dieu Tout-Puissant! -<br />
En arrivant, il embrassa Thiemo Seydou :<br />
Celui-ci lui dit: mon Oumar, qu'est-ce qUi t'a brouille avec Alia?<br />
11 dit : j'etais en train de semer ici,<br />
Pere, Alfa ignorait ce que signifiait ma maniere de semer,<br />
Quant a moi, je savais ce que je faisais :<br />
11 disait que je semais mal :<br />
11 m'a chasse, fai alors traverse le fleuve.<br />
Le Pere dit : mon Oumar, ne sois pas si rapide a te faire connaitre :<br />
Cependant, si tu semes de cette maniere, nous n'aurons pas<br />
beaucoup de mil :<br />
Tu arrives a un trou, tu mets une graine,<br />
Tu arrives au trou suivant, tu ne mets pas de graine, tu continues !<br />
Oumar dit : sifai seme ainsi, c'est qu'il y a une raison a cela !<br />
11 dit : que signifie cette maniere de semer ?<br />
Ils se pencherent au-dessus d'un trou OU il n'y avait pas de graine.<br />
11 dit : sais-tu ce qUi m'a empeche de semer dans ce trou ?<br />
Chapelet : les musulmans recitent des prieres diverses en egrenant un<br />
chapelet ; le nombre des grains de ce chapelet est variable selon les<br />
confreries (Qadiriyya, Tidjanyya...).
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184.<br />
CORPUS I<br />
o wi'i : alaa J<br />
o wi'i : haePi<br />
wallaahi J Umar am J mi annda<br />
mi aawde ngoo ePoo wullo<br />
So ko aawaama J waePi gawjal ;<br />
BaaePi ngaratJ piisoo ngal J jibintaa<br />
Mi aawantaa waandu J baaba !<br />
tHe ngara J De njiima e wullo ngo aawaaka.<br />
o wi'i aePa anndi ko haePi mi aawde ngoo ePoo wullo ?<br />
o wi'i : alaa J wallaahi J Umar am mi annda<br />
J<br />
o wi'i : ngoo ePoo wullo so aawaama J waePii gawja IJ Nagge aratJ hela gawjal ngal J ngal jibintaa<br />
Mi aawantaa nagge J baaba !<br />
tHe ngara J De njiima e wullo ngo aawaaka.<br />
o wi'i aePa anndi ko haePi mi aawde ngoo ePoo wullo ?<br />
o wi'i : wallaahi J Umar am J mi anndaa.<br />
o wi'i : ngoo ePoo wulloJ so aawaama J waePii gawri J<br />
Gawri mum sonaama J renndii e gawri J<br />
Ndiin gawri gasataa J yaltinaaka sadak maayePo.<br />
o wi'i tiiePnO J Umar am J accir noom !<br />
o wi'i : A Ifaa ! 0 wjlj mo : naam !<br />
o wi'i : arJ reeno Umar !<br />
o wi'i : 00 Umar 00 ePoo mo jiiePaa J kaOko Duri kam doole J<br />
ma doole.<br />
A Ifaa wi'i : miin kay mi harmin i wi'ide miePo fi'a moo<br />
o nanngi e junngo makko ;<br />
o wi'i : eP'um noon J hannde a naatoyat janngude.<br />
o nawi mo to ceernaajo.<br />
o yettii J wi'i : Ceerno jannginan am Diy am !<br />
o wi'j : Ceerno Seydu DiePePo mo waawaa limoore holePo<br />
Janngirta ?<br />
our<br />
o wi'i<br />
o wi'i<br />
o wi'i<br />
CeernoJ puePepo ePen mi yeewa<br />
Umar Ceerno Seydu Taal J aePa waawi limoore ?<br />
Ceerno J puePepo ePen J mi yeewa.
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o wi'i wii go'o !<br />
o wi'i<br />
o wi'i<br />
go'o<br />
wii ePiePi<br />
o ndaari CeernO J 0 moosi<br />
o wi'i : hade ma wiyde yo mi wii ePiePi J<br />
o wi'i : miin kay mi anndaa ko go'o firi<br />
So wonaa taw ko e Iimoore.<br />
o wi'i : ko golo firi : Alia wiima ko gooto<br />
o jibinaani J<br />
0 jibinaaka ;<br />
o minaani J 0 minaaka.<br />
Allahu ko illala wahidu<br />
o wi'i : wii ePiePi<br />
o wi'i ePiePi.<br />
o wi1i wii tati<br />
o wi'i : haalan am ko ePiePi firi !<br />
o wi'i ! miin kay mi anndaa ko ePiePi firi<br />
CORPUS I<br />
haalanam ko go'o Flri!<br />
So wanaa ko e limoore.<br />
o wi'i : ePiePi fi ri :<br />
o wi'i ma 0 tagaani gootel J 0 tagi tan ko ePiePi<br />
o tagi maayePo e kurka.<br />
o waePi cuka lel e mawePo<br />
o tagi aljanna e jeynge.<br />
o waePi aduna e laakara.<br />
o waePi dando e baasePo.<br />
o waePi danePo e baasePo<br />
o wi'i ko ePum ePoo ePiePi firi.<br />
o wi'i wii tati ! 0 wi'i tati.<br />
o wi'i wii nayi !<br />
o wi'i haalan am ko tati firi taw!<br />
o wi'i so wonaa ko e Iimoore mi an ndaa.<br />
o wi'i nde 0 waePi aljanna e jeynge J<br />
o waePi aduna e laakara J<br />
o waePi leydi e asamaan<br />
o wi'i : kaOko lIillalahu wahidu ll 0 yanti heen J wonti tati.<br />
Ko ePum ePoo geePe tati ePee pi ri.<br />
o wi'i wii nayi ! 0 wi'i : nayi.<br />
o wi'i wii joyi !
CORPUS I 331<br />
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1<br />
n dit : dis un !<br />
n dit : un I<br />
11 dit : dis deux I<br />
11 regarda le marabout, il sourit,<br />
11 dit : avant de me faire dire deux, dis-mol ce que un signifie.<br />
L'autre dit : je ne sais pas ce que un signifie,<br />
5100n que c'est un chiffre.<br />
5eykou dit : un signifie que Dieu est l'Unique :<br />
11 n'a pas engendre, n n'a pas ete engendre,<br />
11 n'a pas de petit frere, Il n'est pas le petit frere de quelqu'un.<br />
Dieu est le seul Dieu, l'Unique1.<br />
Le marabout dit : dis deux I<br />
Il dit : deux !<br />
Il dit : dis trois I<br />
Il dit : dis-moi ce que deux signifie.<br />
Il dit : j'ignore ce que deux signifie<br />
5100n que c'est un chiffre.<br />
Il dit : voici ce que deux signifie :<br />
Dieu n'a pas cree les choses une par une mais deux par deux:<br />
Il a fait la mort et le petit enfant,<br />
11 a fait l'enfant et le vieillard,<br />
Il a fait le paradis et l'enfer,<br />
Il a fait le monde et l'au-dehi,<br />
11 a fait le Blanc et le Noir,<br />
Il a fait le riche et le pauvre<br />
Voila ce que deux signifie.<br />
11 dit : dis trois ! n dit : trois I<br />
Il lui dit : dis quatre !<br />
Illui dit : dis-moi d'abord ce que trois signifie !<br />
Il dit : sinon que c'est un chifIre, je ne sais pas.<br />
Il dit : quand Dieu a fait le paradis et l'enfer,<br />
qu'll a fait le monde et l'au-dela,<br />
qu'll a fait le ciel et la terre<br />
Lut-meme, Dieu seul et unique, s'y est ajoute, cela fait trois I<br />
C'est cela que trois signifie.<br />
n dit : dis quatre ! n dit : quatre !<br />
Il dit : dis cinq<br />
Dieu est I'Unique : c'est le principe de la fai musulman:J l'unicite de Dieu.
332<br />
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o wi'i haalan am ko nayi Plrl.<br />
o wi'i so wanaa ko e limoore mi anndaa.<br />
o wi'i nayi pi ri ,<br />
Alia wi' ina tagi ko damuePe nayi<br />
FuePnaange e hiirnaange e rewo e worgo<br />
Ko ePum ePoo woni nayi.<br />
o wi'i wii joyi ! 0 wi'i joyi<br />
o wi'i wii jeegoom.<br />
o wi'i haalan am ko jeegom plrl.<br />
o wi'i so wonaa taw ko e limoore mi anndaa.<br />
o wi'i joyi piri : nde 0 waePi fuePnaange e hiirnaange.<br />
Alia tagi rewo e worgo,<br />
o tagi asamaan, 0 jiimi heen ;<br />
Ko ePum ePoo won i ePee ePoo geePe joyi.<br />
o wi'i : wi jeegoom !<br />
o wi'i : Ceerno, a oennii limoore<br />
Limoore kay haaePi ko e joyi.<br />
Ko go'o won i jeegoom,<br />
Ko ePiePi ngon i jeeePiePi,<br />
Ko tati ngon i jeetati,<br />
Ko nayi ngoni jeenayi,<br />
Joyi e sappo nan ndi, Ceerno<br />
Ceerno sukki junngo e hunuko<br />
o wi'i hee Ceerno Seydu ! 0 wi'i mo : naam<br />
o wi'i : ko njiyePaa heen fof, mi yi'i sappo<br />
o wi'i : ko njiyePaa heen fof, mi yi'j sappo<br />
Vo tooou to juuePe maa ePoo Ceerno !<br />
CORPUS I<br />
So Seyku winndanaama, 0 afloo alluwal makko, 0 ePaanoo.
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2<br />
3<br />
11 lui dit : dis-moi ce que quatre signifie !<br />
11 dit : sinon que c'est un chiffre, je ne sais pas.<br />
11 dit : volci ce que quatre signifie :<br />
Dieu a fait les quatre points cardinaux :<br />
L'est et l'ouest, le nord et le sud,<br />
Cela fait quatre.<br />
11 dit : dis cinq ! 11 dit : cinq !<br />
n dit : dis six !<br />
n dit :avant de passer cl six, dis-moi d'abord ce que cinq signifie !<br />
11 dit : sinon que c'est un chiffre, je ne sais pas.<br />
11 dit : cinq veut dire : lorsque Dieu a fait l'est et l'ouest,<br />
Qu'll a fait le nord et le sud,<br />
n a cree le ciel et l'a pose dessus,<br />
C'est cela qUi fait cinq.<br />
n dit : dis six !<br />
n dit : Marabout, tu as fini de compter :<br />
C'est cl cinq que le compte s'arrete :<br />
Six c'est un,<br />
Sept c'est deux,<br />
Huit c'est trois<br />
Neuf c'est quatre,<br />
Cinq et dix se ressemblent, marabout1!<br />
Le marabout mU sa main sur sa bouche2<br />
n dit : he Thierno Seydou ! Celui-ci dit : oui !<br />
11 dit : ramene ton fils, II m'a depasse en savoir !<br />
11 lui dit : de tout ce que tu vois, j'ai vu dix fois plus,<br />
Mais qu'll commence cl etudier chez toi, marabout !<br />
Quand on avait ecrit pour Seykou, il se couchait sur sa planchette3<br />
et dormait;<br />
Cinq et dix se ressemblent : en ce sens que dix est le double de cinq. Toute<br />
l'argumentation de Seykou repose sur le fait que les chiffres de six a neuf<br />
sont, en poular, des composes des chiffres de un a quatre, ainsi :<br />
un go'o ; Jeegoom<br />
deux cficfi; Jeecficfi:<br />
trois tati ; Jeetati :<br />
quatre nayi ; Jeenayi<br />
cinq joy;<br />
En signe d'etonnement.<br />
A l'ecole coranique une planchette<br />
l'ecriture.<br />
six<br />
sept<br />
huit<br />
neuf<br />
en bois est le support de la lecture et de
• I<br />
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Almuuoe oee ngona e dursitaade.<br />
So oe ngayni, oe ndogana Ceerno,<br />
!Be mbi'a : Ceerno !<br />
Umar Ceerno Seydu de, gila win ndanaa, dursitaaki,<br />
Haa jooni omo ne craanii.<br />
a wi'i : Umar ! Umar wi'j : naam !<br />
a wi'i : ar, addu alluwal maa, oado !<br />
a addi alluwal makko, 0 oadii Ceerno<br />
a janngaa haa laaoa ;<br />
a faeeira haa laaoa.<br />
a wPi : wallahi, Taal, kamoe ngoni nganndaa,<br />
Kono aan ouri oe waawde.<br />
So 0 yahdi e maooe teenoyde,<br />
So oe njettiima, eoe teena ;<br />
a weddoto tekkere makko les lekki, 0 leloo.<br />
So yahi haa oe teenii, oe kebbinii,<br />
a fiila tekkere makko e hoore, 0 refta e maooe.<br />
CORPUS I<br />
So oe njettiima, oe pukka bahe maooe, oe ndogona Ceerno,<br />
!Be mbi ' a : Ceerno, Umar Ceerno Seydu de hannde teenaani.<br />
Ceerno immoo, wPa : aan de, Umar, hannde oe mbi1i a tenaani.<br />
a wPj Ceerno ko oe ndenndin, en kono mi teeni.<br />
a wi'i : onon teenoynoooe oee no pot cron ?<br />
a wi'i : minen de ko min jeegoomo min ngonnoo,<br />
KaOko wacrti min jeecricPo.<br />
a wi'i : cPum kay joon i joon i laaoa ;<br />
anon jom bahe jeegoom en oee gooto fof yo hoeeu wahre mum,<br />
da roro heen jom ba he jeegoom en oee gooto fof<br />
Hoeci wahre mum, darodii heen,<br />
Haa oe eoynii waare jeecPibiire ene lelii e leydi.<br />
Umar hoynii Ceerno<br />
a wi'i : naamno cPaa oee almuuoe mo teeni ndee wahre ?<br />
Almuuoe oee naji boncPe.
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o won i croon d uuoi tati.<br />
o wacrti naamnaade Ceerno ko faamaan i<br />
Non ngi e jun ngo makkoJ nawtan i Ceerno Seydu.<br />
o wi'i mo : hee Ceerno Seydu ! 0 wi'i mo : naam<br />
o wPi : ndaaJ ko njoginoo mi mi hokkii oiyaJ<br />
Yo Alia wacr heen barke !<br />
Ceerno hokkaama hujja mumJ hooti.<br />
Seyku ruumtii toon haa ndunngu silti.<br />
o waynii yumma makko e baaba makkoJ<br />
o wi'i omo jaogoya penisanakuuru ;<br />
o nani ganndo ene Penisanakuuru.<br />
Yumma makko wi'i : Umar amJ yo<br />
Alia reene !<br />
Baaba makko wi1i mo : Umar amJ yo Alia reene<br />
Tooroodo fawndiri defte e alluujeJ<br />
Haa 0 yahi J haa 0 yettii Ceerno Firo.<br />
o salmini Ceerno oOJ oon salmitii moo<br />
o wi'i mi arii ndaartude ganndal.<br />
o wPi : a arii ndaartude ganndal.<br />
a a ri e maayo mawngo :<br />
299. Taw ko satalla ngadduno craa J<br />
30 0 . yoogaa haa heewa J ngaeeaa maayo ene ila<br />
30 1. Taw ko faandu ngaddu craa J<br />
30 2. yoogaa haa heewa J ngaeea maayo ene ila.<br />
30 3. Seyku wi'i : ko crum ndaartat mi !<br />
30 4. Tooroodo 00 ene dursitoo croon<br />
30 5. Haa wacri sahaa Alia gooto :<br />
30 6. Yumma makko ene loowi gawri HalwaarJ<br />
30 7. KaOko omo hippiti kaamiilu makkOJ omo jannga<br />
30 8. Be1i ngimmiimaJ njaaoani wowru yumma makko<br />
309. Alia holli crum Seyku Penisanakuru ;<br />
310. 0 hoeci toon gawyal. omo Penisariakuuru:<br />
311. 0 wPa : ebe goree tek !<br />
CORPUS I<br />
Periisanakuuru;<br />
haa CSalliima.
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1<br />
2<br />
3<br />
n resta la-bas trois ans.<br />
11 se mit a demander au marabout ce que ce dernier ne comprenait<br />
pas;<br />
Celui-ci le prit par la main et le ramena chez Thiemo Seydou :<br />
I1lui dit : he Thiemo Seydou ! Celui-ci dit : oui !<br />
I1lui dit : j'ai donne a ton fils ce que je possedais,<br />
Que Dieu benisse cela !<br />
On donna au marabout son du, celui-ci rentra chez luL<br />
Seykou resta hi-bas ( chez lul ) jusqu'a la fin de l'hivemage :<br />
Puis il fit ses adieux a son pere et a sa mere.<br />
nvoulait aller etudier a PenyisanyakourouI:<br />
11 avait entendu qU'il y avait un savant a Penyisanyakourou.<br />
Sa mere IUi dit : mon Oumar. que Dieu te garde !<br />
Son pere lui dlt : mon Oumar, que Dieu te garde !<br />
Le Torodo lia ensemble planchettes et livres :<br />
11 partit : il arriva chez Thiemo Firo2:<br />
11 salua ce demier, celui-ci le salua a son tour;<br />
11 dit : je suis venu chercher le savoir !<br />
L'autre lui dit : tu es venu a un grand fleuve3 :<br />
Si c'est une bouilloire que tu as apportee,<br />
Tu peux puiser et la remplir, le fleuve continuera a couler.<br />
Si c'est une gourde que tu as apportee.<br />
Tu peux pulser et la remplir, le fleuve continuera a couler.<br />
Seykou dit : c'est cela que je cherche.<br />
Le Torodo lisait la-bas le Coran.<br />
Un beau jour arriva ;<br />
Sa mere etait en train de mettre du mil dans le mortier a Halwar.<br />
Et IUI. 11 avait ouvert son livre et lisait a Penyisanyakourou ;<br />
Des chevres se leverent et se dirigerent vers le mortier de sa<br />
mere;<br />
Dieu fit voir cela a Seykou. a penyisanyakourou.<br />
11 prit une tige de milt alors qu'il etait a Penyisanyakourou ;<br />
n chassa les chevres ;<br />
Penyisanyakourou : deformation de Pire Saniakhor. ville situee non loin de<br />
Tivaouane dans la Region de Thies. Le griot toucouleur prononce mal le<br />
nom de la ville, qui donna son nom it la celebre universite du Cayor.<br />
Il convient d'entendre plutot Thierno Fire 00 (le marabout de Pire).<br />
Grand fleuve : la connaissance est comparee it un fleuve dont personne ne<br />
peut venir a bout. La metaphore aquatique est tres suggestive ici.
, I<br />
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tHeli crii ndoga, nduttoo.<br />
Ceerno 00 ndaari mo haa huunde juuti,<br />
Wi'i : he Umar Ceerno Seydu Tool, crum de wocrcri<br />
Vo a dursito Penisanakuuru,<br />
Vo a soggu be'i Halwaar,<br />
Tool, crum woddi<br />
Umar woni croon balcre.<br />
o gayn i gan ndal Ceerno.<br />
Alia hoddiri ko Ceerno joginoo e gan ndal,<br />
Totti walliyu baadallayi, 0 gayni.<br />
o nanngi e junngo makko,<br />
o nawti mo Halwaar.<br />
o ruumi toon haa ndunngu silti.<br />
o waynii yumma makko e baaba makko<br />
o wi'i omo yicri yeewoyde ganndal fucrnaange<br />
Ko croon nanataa oeytoooe ene njima.<br />
Gila nande Seyku immii Fuuta<br />
Haa addan ma jooni fof ko fucrnaange 0 woni.<br />
o lummbi maaje,<br />
o tayi coo Ii.<br />
tHe 0 noddunoo ngari.<br />
t[)oon noon haokadi, Ceerno fof mo Seyku ari,<br />
o gayna ganndal mum, ooenna,<br />
Seyku oenn i<br />
tHe cifanii mo Ceerno gooto,<br />
Ene wi'ee Usumaan Fode Bello<br />
o yahi, 0 yettii galle Ceerno Usumaan.<br />
o salmini crum, salmitii moo<br />
o wi'i 0 ari ndaartude ganndal.<br />
o wi'i : bismilla makko Fuutanke<br />
Jamma fof mo Alia oddi,<br />
Usumaan ne ene ummoo Sokoto, yaha, juuroyoo rawda,<br />
Arto, waalta e Sokoto.<br />
CORPUS I
CORPUS I 339<br />
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1<br />
2<br />
3<br />
Celles-ci prirent la fUite et s'en retoumerent.<br />
Le marabout le regarda longuement :<br />
11 dit : he Oumar, fus de Thiemo Seydou Tall, c'est loin !<br />
Ure le Coran a Penyisanyakourou<br />
Et chasser les chevres a Halwar,<br />
Tall, c'est bien loin 1<br />
Oumar resta la-bas quelques jours :<br />
n en ftnit avec le savoir du marabout :<br />
Dieu voulut que tout ce que le marabout savait,<br />
11 le transmit au saint, qUi finit ainsi son savoir.<br />
11 le prit par la main,<br />
n le ramena a Halwar.<br />
Seykou resta la-basjusqu'a la fm de l'hivemage :<br />
n fit ses adieux a son pere et a sa mere,<br />
11 voulait aller chercher le savoir du cote de l'est.<br />
On entend la-bas des gens qUi chantent le Coran.<br />
Depuis le jour Oll Seykou avait quitte le Fouta,<br />
C'est toujours vers l'est qu'il partait :<br />
n traversait des fleuves,<br />
11 traversait des rivieres :<br />
Ceux qu'll avait appeles venaient.<br />
Tous les marabouts chez qUi Seykou allait,<br />
Voyaient leur savoir tari au bout de quelques joursl .<br />
Seykou continua sa route.<br />
Un jour on le renseigna sur un marabout<br />
QUi se nommait Ousmane Fode Bell02.<br />
11 se mit enrode, II arriva a la maison du marabout Ousmane.<br />
11 le salua, ce demier le salua a son tour :<br />
Illui dit qu'il etait venu chercher le savoir.<br />
L'autre lui dit : bienvenue a toi. homme du Fouta 1<br />
Chaque nuit que Dieu faisait,<br />
Ousmane quittait Sokoto et allait prier sur un parterre fleuri3,<br />
Puis il revenait passer la nuit a Sokoto.<br />
Seykou depassait rapidement en savoir ses propres maitres.<br />
Ousmane Fode Bello : descendant des Peuls qui avaient emigre de l'Ouest<br />
vers l'Est, Ousmane naquit a Gobir, au nord du pays haoussa, vers<br />
1755.Vers 1804, it precha la guerre sainte.Lettre, it composa des ouvrages<br />
en Arabe.<br />
Sokoto : ville fondee en 1809 par Mohamed Bello fils d'Ousmane Dan Fodio.
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CORPUS I<br />
Seyku Umar, so hiirtiima e Sokoto.<br />
Yaha, juuroyoo rawda,<br />
Arta, waalta e Sokoto<br />
Seyku Umar ene arta rawda,<br />
Usumaan ene yaha rawda.<br />
Usumaan ene yaha rawda<br />
Haa oe potti d'oon e ruhu ene weeya hakkunde leydi e asamaan.<br />
Seyku nan ngi e juud'e ruhu he,<br />
o wPi : hol to njeya d'aa<br />
o wPj : miin Seyku, alaa to njeya mi,<br />
Ko mi ruhu hakkunde leydi e asaman.<br />
tDoon noon Usumaan ndaari e leydi,<br />
o wPj : yo Alia hokku am jibinde 00 d'oo ruhu jahoowo gila<br />
Feenaani!<br />
Seyku Umar jood'ii e leydi, wPi : yo Alia hokku am jibinde 00<br />
doe ruhu jahoowo rawda gila feenaani !<br />
Be ngarti, oe naati kalwa.<br />
Eoe nodda allaahu wahidu.<br />
Alia tellini tabibu Usumaan<br />
o wi'i : oid'd'o mo naagoto d'aa 00,<br />
Joomiraad'o joom baawcfe yamiri,<br />
Almuudo tarbaniid'o ma 00, naagunde mum adii yettaade<br />
Joomiraad'o.<br />
o hokki d'um oid'd'o 00 ;<br />
Kono aan Usumaan 0 hokkii ma yumma bid'd'o 00.<br />
Usumaan inni Alia mani Joomiraad'o.<br />
Jood'iima haa Alia weeti.<br />
o wi'i hee Umar Ceerno Seydu ! 0 wPi naam<br />
o wi1i : aan de ndeke Umar, a famd'aan i.<br />
o wPi : oid'd'o mo naagotonod'en 00,<br />
Joomiraad'o joom baawd'e wPi ko miin jeyi yumma oid'd'o 00<br />
Kono ko aa n jeyi oid'd'o 00.<br />
o wi'i : Usumaan, ko ndandaa koo de ena heewi kono ko am ne<br />
ko ndandaa koo famd'aani.<br />
o r)oddi neene saatura.
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1<br />
o wi'i : Alia wacflan ma neene saatur am.<br />
Seyku joocfliima cfloon balcfle.<br />
Hijjoore yon i.<br />
o wayniima Usumaan.<br />
o wi'i omo yicfli juuroyaade rawda.<br />
Seyku ene soomi laabi tati ;<br />
Omo wangoyoo Makka e Madiina<br />
1Q00n ne ko laawol bacflcflingol.<br />
Omo yaha to Bayta MUjadatti 1 :<br />
Omo naagoyoo fiyannde diine ;<br />
Tooroodo 00 ene fella diine Alia<br />
1Q00n ne kadi ko laawool bacflcflingol.<br />
Omo yaha to Hammadu Mojaali :<br />
Omo naagoyoo wirdu tijjaan ;<br />
1Q00n ne kadi ko laawol bacflcflingol.<br />
1Q00n noon 0 fini J<br />
0 dawi.<br />
CORPUS I<br />
Alia addi mo haa Misira.<br />
o hoyn i jumaa Misira 00;<br />
o tawi cfloon aoe mbinndi kala ko necflcflo addi cfloon e ganndal<br />
Maa taw cfloon dacflcflo cflum.<br />
o wi'i : ilia miin Umar Fuutanke.<br />
o wi'i : ndeene J Alia yicflaa basotoocflo J ilia miin Umar<br />
Fuutanke;<br />
Miin mi ardi cfloo e ganndal<br />
Mi accani dacflcflo mi caggal am.<br />
Mi tawaani cfloo ne kay dacflcflo mi.<br />
o naati jammaa to ;<br />
o tawi eoe kaooiri J eoe njuula ;<br />
o darii e yeeso maooe ;<br />
o wi'i : Alia ene yamiri yo mi juulnu on cfloo balcfle tati.<br />
"Baytil Muqaddasi" : Jerusalem. Le griot, ignorant royalement l'arabe,<br />
articule ainsi la ville sainte commune aux religions revelees, qu'Omar eut<br />
le privilege de visiter.
CORPUS I 343<br />
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3<br />
4<br />
11 dit : c'est Dieu qui te donne "mere" Satoura.<br />
Seykou sejourna la-bas quelques jours.<br />
Le temps du Pelerinage arriva :<br />
n fit ses adieux a Ousmane :<br />
11 voulait aller prier sur un parterre fleuri.<br />
Seykou entreprit trois chemins!:<br />
11 parcourut la distance entre la Mecque et Madina2 :<br />
C'est une bonne route!<br />
11 alIa chez Bayta Moudjatati (Jerusalem),<br />
11 demanda le droit de faire la guerre sainte3.<br />
Le Torodo doit faire la guerre sainte,<br />
C'est une bonne route!<br />
11 alIa chez Hamadou Modiali (Mouhamadoul GhaIi),<br />
11 demanda le wird des Tidianes 4 :<br />
Cela aussi c'est un bon chemin.<br />
Un matin, il se reveilla et se mit en route :<br />
Dieu l'amena jusqu'a Missira :<br />
11 vU la mosquee de Missira :<br />
11 y trouva cette inscription: "quel que soit le savoir que quelqu'un<br />
apporte ici,<br />
11 trouvera lci quelqu'un qUi le depasse".<br />
11 dit : si ce n'est moi Oumar du Fouta.<br />
Dieu n'aime pas les vantards, sauf moi Oumar le Foutanke :<br />
Je suis venu lci avec le savoir,<br />
Je n'ai pas laisse derriere moi quelqu'un qUi me depasse.<br />
J e ne trouverai pas lci quelqu'un qUi me depasse !<br />
11 rentra dans la mosquee :<br />
n les (les savants) trouva en train de se tourner vers l'Est pour<br />
prier;<br />
11 se mit devant eux :<br />
11 dit : Dieu veut que je dirige ici votre priere pendant trois jours .<br />
C'est durant son sejour aux Lieux Saints que Seykou accomplit les rites du<br />
pelerinage, rel;ut le droit de mener la guerre sainte et fut instruit par des<br />
maitres celebres.<br />
Madina : se situe au nord de la Mecque. Cette ville fait partie du circuit du<br />
peIerin.<br />
La guerre sainte, le jihad est un devoir pour tout musulman, cf notes.<br />
Le "wird" des Tidianes: le "wird" est un formulaire de prieres specifique a<br />
chaque confrerie.
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BoePeejo ene yawii oaleejo<br />
CBe ndaari mo, oe njali,<br />
CBe mbi'i : ko jammaa 00 diidaa ko<br />
CBaleejo naataani ePoo, juuli saka juulni min.<br />
A haaytii juulde ePoo saka njuulnaa min.<br />
CBe ndiiwi Seyku Umar, yalti.<br />
Tooroodo naagii Alia, jaoi :<br />
BalePe tati jeyngol huooataa e Misira,<br />
CBinngel muynaani yumma mum,<br />
CBotu muynaani baali.<br />
Bortu muynaani baali<br />
f()oon Misiranaaoe kuli no feewi.<br />
CBe njahi, oe naagii Seyku,<br />
Ari juulni oe darePe tati,<br />
Naagii, rokkaa.<br />
f()oon eoe njogii ePoon ganndo gooto<br />
Ene wPee Hammadu Musul Diine.<br />
CORPUS I<br />
CBe mbii: annde Hammadu Musul Diine, min ndanii ePoo ko min<br />
cikkaano;<br />
So oaleejo ardii epoo, hollu maa ganndal ngal,<br />
A waawaa jaabaade ePum ;<br />
Hay boePeejo min meeePaa sikkude ene ara epoo,<br />
Hollu maa ganndal ngal, a waawaa jaabaade ePum saka oaleejo !<br />
o wi'i : a yi'i 00 epoo oaleejoo mo njiy ePon<br />
Omo heewi marta ba,<br />
Kono miePo naagii on :<br />
Han nde mbaePen batu ;<br />
Maa mi haalan oaleejo 00 ko nanataa,<br />
Sabu ko omo nana pulaar, ilia ePum hawsakoore,<br />
Ilia ePum jermakkoore, ilia ePum wambarakoore<br />
Kono maa mi haalan mo simoore wootere :
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461.<br />
Ende winndii to lugga J<br />
Kono kaalatmi ko cflemngal jinne.<br />
So Daleejo haalanaama cflemngal jinne J<br />
tOoon noon De mbacfli batu.<br />
tBe nelani Seyku Umar.<br />
Seyku yettii J<br />
joocfliima.<br />
jaabotaako.<br />
Haamadu Musul Diine wi'i mo ii Umar Fuutan ke<br />
naam!<br />
o wi'i : so necflcflo yi'i gan ndo no mum n ii J<br />
Ene fota dana ko naamnii cflum.<br />
Seyku Umar wi'i : ndaw ko goonga !<br />
o naamnii cfloon noogas e joyi naamnal.<br />
Seyku ene jaaboo moo<br />
o wi'i : micflo naamnoo moo cfloo naamnal gootal<br />
Haala ka wonaa pulaar<br />
Haala ka wonaa jermaare J<br />
Haala ka wonaa hawsakoore,<br />
Haala ka wonaa wambarakoore.<br />
o wi'i : so Umar non i J jaabooJ So 0 nanaan i J deY'Y'at.<br />
o ndaari Seyku J Seyku ndaari moo<br />
o wi'i : IIkaburu baguru kaburuba II!<br />
Seyku wii mo : "sijjilin sajjalin kanumka II!<br />
tOoon noon De nganndi ko haala jinneeji.<br />
o wi'i mo : wuurde e ko wuuree hol ko Duri tiicflde ?<br />
Seyku wi'i : so necflcflo wuuri tan danat ko wuurdi.<br />
Awwa ko cfloo haacfli<br />
IIAkaramayni ibnu akaramayni ll<br />
!<br />
CORPUS I<br />
o wi'i mo:
CORPUS I 347<br />
435. Qui se trouve dans le livre de "Louga"1 :<br />
436. J e lui parlerai la langue des genies2 ;<br />
437. Quand on parle cl un Noir la langue des genies. il ne repond pas.<br />
438. Alors. ils firent la reunion;<br />
439. Ils appelerent Seykou Oumar ;<br />
440. Seykou arriva et s'assit.<br />
441. Hamadou Mousoul Dine lui dit: Oumar du Fouta! Celui-ei dit: oui!<br />
442. Il dit : si quelqu'un reneontre un savant.<br />
443. Il doit l'interroger.<br />
444. Seykou Oumar lID dit : e'est bien vrai !<br />
445. Il lui posa vingt einq questions ;<br />
446. Seykou donna la reponse ;<br />
447. Il dit : maintenant. je vais te poser une question:<br />
448. Ce ne sera pas en poular,<br />
449. Ce ne sera pas en zerma,<br />
450. Ce ne sera pas en haoussa.<br />
451. Ce ne sera pas en bambara ;<br />
452. Si Oumar eomprend. il repondra.<br />
453. S'il ne eomprend pas, il se taira.<br />
454.<br />
455.<br />
Il regarda Seykou, Seykou le regarda ;<br />
ndit: "kabourou bogourou kabourouba"!<br />
456. Seykou lui dit : "sidjilin sadjalin kanyoumka".<br />
457. Alors ils surent que e'etait la langue des genies.<br />
458. Il avait dit: "qu'est-ee qui est le plus diffieile, vivre ou avoir de quoi<br />
vivre ?"<br />
459. Seykou avait repondu : "si quelqu'un est vivant. il aura de quoi<br />
vivre."<br />
460. C'est iei que eela prend fin.<br />
461. Noble. f1J.s de nobles I<br />
1<br />
2<br />
"Louga": signifie grammaire.<br />
La langue des genies : la connaissance de cette langue prouve<br />
l'intelligence penetrante de Seykou Oumar, elle souligne, par dela cette<br />
perspicacite de Seykou. son caractere exceptionnel. L'epopee place son<br />
heros au-dessus des hommes. puisqu'il communique avec les genies.
348<br />
CORPUS 11<br />
DAAROL SAYKU UMAR : GILA DINGIRAAY HAA HAMDALLAAHI,<br />
DAANDE SIIDI MBOOCEL<br />
1. Anndi Seyku Umar eggi e Fuuta, 0 doni almufifie e Fuuta.<br />
2. 0 yettiima, fie nippoyi Dingiraayi.<br />
3. 0 naagoyiima Tammbaa Bukari.<br />
4. Tammbaa Bukari wPi so taw efie njofia lempol.<br />
5. 0 wi'i efie njofia lempo.<br />
6. Tammbaa wi'i so kocPee cPoon !.<br />
7. tOoon noon fie njehi, fie coppoyi lengeewi ki<br />
8. CBe pertiimma waande ndee De ndiidi cPoon jumaa.<br />
9. tOoon wi'aa Dingiraayi.<br />
10 . Ko cPoon taalibaaDe nooti Seyku<br />
11. No De nootortonoo Allaji Mammadu Saydu to Maadina Gunaas<br />
nii.<br />
12. So Seyku yi'ii fetel, sooda.<br />
13. So ko 0 yPii silaama, 0 sooda.<br />
14. So ko 0 yi'ii conndi, 0 sooda.<br />
15. Yo Alia suur en bone naafigi !<br />
16. Anndi yimfie jeegoom nena e aduna<br />
17. So heen toto njicPdii ma, yicP De ;<br />
18. So De nganii ma ne kay, yicP fie.<br />
19. So heen toto ngani ma, an fie ;<br />
20 . So fie njicPii ma ne kay, an De !<br />
21. Ko fieen yimfie jeegoom ngon i :<br />
22. ...Tin naacPo mao, so yicPi ma, yicP cPum<br />
23. So 0 anii ma ne kay yicP cPum ;<br />
24. Ko fiicPcPo ndaartata barke jinnaacPo<br />
25. Kono jinnaacPo ndaartaani barke fiicPcPo.<br />
Poularisation du fram;ais impot.
CORPUS IT<br />
l.<br />
2.<br />
3.<br />
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B.<br />
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lB.<br />
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1<br />
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4<br />
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6<br />
LE JIHAD D'EL HADJ OMAR DE DINGUIRAYE<br />
A HAMDALLAHI<br />
SEYKOU OUMAR ET TAMBA BOUKARI<br />
La premiere bataille du jihad<br />
349<br />
Seykou Oumar emigra du Fouta Oll il avalt fait des disciples1;<br />
En arrtvant. ils allerent dresser leur campement a Dinguiraye2 ;<br />
11 avait demande la permission aTamba Boukari;<br />
Tamba Boukari lui avait demande s'ils acceptaient de payer l'imp6t;<br />
n avait dit qU'ils paieraient l'imp6t.<br />
Tamba dit : habitez ici !<br />
Alors ils partirent. ils couperent un "lengeewi"3.<br />
Us casserent une termitiere et construisirent une mosquee.<br />
Cet endroit s 'appelait Dinguiraye.<br />
C'est bi-bas que les disciples se soumettaient a Seykou.<br />
Comme ils se soumettent aujourd'hui a AI Hadji Mamadou Saydou<br />
de Medina Gonass4 .<br />
Quand Seykou voyait un fusil. ill'achetait ;<br />
S 'il voyait une epee. il l'achetait.<br />
S'il voyait de la poudre. ill'achetait.<br />
Que Dieu nous protege des menees de l'hypocrite5 !<br />
Dans le monde. il y a six personnes :<br />
Les trois premieres. si eUes t'aiment. aime-Ies.<br />
Si elles te haissent. aime-les!<br />
Les trois autres. si eUes te haissent. hais-Ies.<br />
Si elles t'aiment. hats-les!<br />
Voici queUes sont ces six personnes :<br />
Ton parent: s'il t'aime. aime-Ie.<br />
S'il te hait. aime-Ie.<br />
C'est l'enfant qui cherche la benediction de son parent.<br />
Mais le parent ne cherche pas la benediction de l'enfant6 .<br />
Disciple : la plupart des jihadistes etaient originaires du Fouta-Toro.<br />
Dinguiraye : ville situee en Republique de Guinee (Conakry) peuplee de<br />
Malinkes, Peuls et Toucouleurs.<br />
Lengeewi : 11 s'agit de I'Afzelia africana.<br />
Madina Gonass : ville situee dans la region de Casamance.<br />
Hypocrite : le terme poular nafigi vient de l'arabe it d6signe un d6lateur.<br />
Benediction : 11 s'agit de la "baraka" ; rien n'est plus grave que d'avoir ete<br />
maudit par ses parents, tandis que leur benediction apporte le bonheur.
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Ceerno maa, so yiePii ma, yieP ePum ;<br />
So 0 ani ma ne kay yieP mo :<br />
Ko almuudo ndaartata barke Ceerno<br />
Kono Ceerno ndaartata barke almuudo.<br />
So laamePo leydi yiePii ma, yieP ePum ;<br />
So ko 0 ani ma ne kay yieP mo ;<br />
Ko hoore maa ndaartataa, laamePo ouri miskiino doole.<br />
CSee ePoo tato so heen gooto yiePii ma, yieP ePum ;<br />
So 0 ani ma ne kay yieP ePum!<br />
Holi tato yoePoooe ma nganaa oe,<br />
So oe nganii ma ne kay nganaa oe ?<br />
So nafiigi yiePii ma, an ePum,<br />
So 0 ani ma ne kay an moo<br />
o ren ndi n maa e besngu maa, 0 wa Iloy ma et tefooje.<br />
So gUjjo yiePePi ma, an ePum ;.<br />
So 0 ani ma ne kay an ePum.<br />
CORPUS II<br />
WUjja jawdi maa, wallu maa yiilaade tawa ko kanum jogii.<br />
So sukuna yiePii ma, an ePum ;<br />
So 0 anii ma ne kay an moo<br />
Nannga oPa, wallu maa e wileeoe.<br />
CSee ePoo jeegoom nena e aduna.<br />
Yo Alia suur en bone nafiigi !<br />
Nafiigi 0 haftii, yahi to Tammbaa Bukari<br />
o wPi mo: Tammbaa !<br />
Tambaa wPi mo : naam<br />
o wPi : aan de, a hoddii ePoo e Ceerno<br />
Miin de mi anndaa jikku 00 ePoo Ceerno<br />
o jagaaki jikku seernaaoe.<br />
Tamoaa wPi : ko waePi noon ?<br />
o wPi : 00 Ceerno mo njij ePaa so yi'j fetel, 0 soodat<br />
00 Ceerno mo njiy-ePaa, so yPi conndi, 0 soodat ;<br />
00 Ceerno mo njiy-ePaa, so yi'i silaama, 0 soodat.<br />
Ceerno coodoowo fetelaaji e silaamaaji e kure conndi,<br />
00 ePoo Ceerno won ko woni anniya mum ko wonaa turaade<br />
ene juula.
CORPUS IT 351<br />
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1<br />
2<br />
Ton marabout : s'il t'aime, aime-Ie,<br />
S'il te hait, aime-Ie,<br />
C'est le disciple qui cherche la benediction du marabout,<br />
Mais le marabout ne cherche pas la benediction du disciple.<br />
Le roi du pays: s'il t'aime, aime-Ie,<br />
S'H te hait, aime-Ie,<br />
C'est ton bien que tu recherches, un roi est plus fort qu'un pauvre.<br />
De ces trois, s'il y'en a un qUi t'aime, aime-Ie,<br />
S'il te hait, aime-Ie!<br />
QueUes sont les trois que tu dois hair meme si elles t'aiment,<br />
Que tu dois hair si elles te haissent ?<br />
L'hypocrite : s'il t'aime, hais-Ie,<br />
S'll te hait, hais-Ie!<br />
11 te brouille avec la famille et va t'aider pour la reconciliation!<br />
Le voleur : s'H t'aime, hais-1e,<br />
S'il te hait, hais-Ie !<br />
11 vole tes biens et t'aide a chercher alors qu'il les detient.<br />
Le sorcier1 s'll t'aime, hais-1e,<br />
S'il te hait, hais-Ie!<br />
11 prend ton enfant et te conduit chez les devins2 !<br />
Voila les six personnes qUi sont dans le monde.<br />
Que Dieu nous protege du malheur de l'hyprocrite !<br />
Un hypocrite se leva et alIa chez Tamba Boukari,<br />
11 lui dit : Tamba !<br />
Tamba lui dit : oui !<br />
11 dit : toi, tu habites ici avec un marabout,<br />
MOi, je ne connais pas le caractere de ce marabout,<br />
11 n'a pas le caractere des marabouts.<br />
Tamba lui dit : que fait-il donc ?<br />
11 dit: ce marabout, quand il voit un fusil, ill'achete,<br />
Ce marabout, quand il voit de la poudre, ill'achete ;<br />
Ce marabout, quand il voit une epee, ill'achete.<br />
Un marabout qUi achete des fusils, des epees et des balles,<br />
De la poudre. a d'autres intentions que de s'incliner pour faire la<br />
priere !<br />
Sorcier : les sukuiia [sukuiiaaDe, pluriel] sont des hommes qui ont un<br />
pouvoir malfaisant ; ils agissent surtout pendant la nuit ; ils peuvent "boire<br />
le sang" de leurs victimes.<br />
Devins : contre-sorcier qu'on va consulter.
3 5 2 CORPUS 11<br />
60 . Tambaa Bukari nelani kodda Adama Ayse Elimaan Sire<br />
Sammba<br />
61. Demmba Aali Muttaar Seydi Buubu Muusa ;<br />
62. 0 wPi mo : Ceerno !<br />
63. Seyku wPi : naam !<br />
64. 0 wi'i : mi nani a
CORPUS IT 353<br />
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4<br />
Tamba Boukari appela Kodda Adama Ayse Elimane Cire Samba<br />
Demba All Moutar Seydi Buudu Muusa1,<br />
11 lui dit : Marabout !<br />
Seykou dit : oui !<br />
11 dit : fai appris que tu achetes des fusils, des balles et de la<br />
poudre.<br />
Or si quelqu'un craint Dieu, U n'a peur de personne.<br />
Seykou lui dit : c'est vrai2 !<br />
11 dit : que je ne revoie plus cela, que je n'entende plus cela !<br />
Seykou dit : entendu, puisque tu le dis.<br />
Je vais laisser cela car c'est tai le roi !<br />
Seykou revint et cessa d'acheter des fusUs et des balles<br />
Jusqu'a ce que Tamba Boukari l'efit oublie.<br />
Seykou reprit les achats.<br />
Un jour, le Torodo compta ses fusUs,<br />
11 trouva trois cent trois fusUs ;<br />
Les disciples etaient au nombre de trois cent trois.<br />
11 se mit a rire et dit : vraiment Dieu est l'Unique,<br />
C'est cela que Dieu a decide !<br />
Dans peu de temps, la poudre va gronder sans interruption3 .<br />
Un jour, Us avaient fait la priere du soir, puis celle de la nuit ;<br />
Ils avaient recite la "Salatul fatiha" jusqu'a la 004,<br />
Ils avaient fait ensuite la priere de la nuit.<br />
Alors Seykou se leva et dit : maintenant, rentrons a la maison !<br />
Les fils des pieuses femmes du Fouta, les disciples, dirent :<br />
Seykou!<br />
Seykou dit : oui !<br />
Ils dirent : Marabout, toi tu peux rentrer chez toi<br />
Mais nous avons quelques chose a dire a Alfa Oumar Thierno Bayla.<br />
Or c'est lui qUi etait le plus proche de Seykou.<br />
Ils appelerent Alfa et s'eloignerent avec lui ;<br />
Ils lui dirent : Alfa !<br />
Alfa dit : oui !<br />
Ils dirent : quand nous avions quitte le Fouta pour venir ici,<br />
C'est la genealogie abregee de Cheikh Omar.<br />
C'est vrai : pour approuver quelqu'un, on utilise l'expression arabe<br />
"wallahi !" [par Allah].<br />
Sans interruption : litteralement sans se taire [deY'Y'a ani] .<br />
"Salatil fatiya "["Salatul fatiha"] : Il s'agit d'une partie du "wird" tidjane.
3 54 CORPUS II<br />
92. Mbiy ePon ko yo en ngar, eePen pelloya diine.<br />
93. EePen ngollira ePum laaoal e diine<br />
94. EePen njoodii ePoon eePen ndema, eePen ngolla jawdi men,<br />
95. EePen ndokka Tammbaa Bukari 00 keefero, kuePaaePo Alia,<br />
96. Ene naamra ko harmi ;<br />
97. Minen kay ePum welaani min, so Alia.<br />
98. A Ifaa Umar Ceerno Baylaa wi'i : miin ne kay ePum welaan i<br />
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mi.<br />
'Be mbi'i : ePum noon yah, haalanoy Ceerno<br />
tOum natti hey-de e amen hankadin.<br />
tOoon noon Alfaa yettiima ;<br />
o wi'i mo : Umar Fuutan ke !<br />
Seyku wi'i mo : naam !<br />
o wi'i : nganndaa koy won ko DioDe soqnaaoe oee neli mi e<br />
ma.<br />
Seyku wi'j : holi ePum ?<br />
o wi'j sukaaoe fuutankooe oee mbi'i kanum en<br />
Fuuta,<br />
itti ePum en<br />
Addi ePum, en gaa, mbiy ePaa<br />
MaayePo kala naata aljanna<br />
ko eePen pella diine Alia<br />
Kono eePen ePoo njooePi i, eePen ngolla jawdi men,<br />
EePen ngollira ePum laaoal e diine,<br />
EePen ndokka 00 keefero, oiy keefero ene naamra ko harmi<br />
Almuuoe pirliima Seyku.<br />
Seyku wi'i ; ko mbiy don, Fuuta ?<br />
'Be moi'i : ko Alfaa yettin ma koo ko minen kaali.<br />
o wi'i : oePon nganndi ko woni e salanaade laamePo ?<br />
'Be mbi'i miePen mbakkilii.<br />
o wPi : jooni jooni hesniioe keewa.<br />
'Be mbi'i : miePen cuusi.<br />
o wi'i oe : woni e salanaade laamePo<br />
Joon i alyatimaaoe caroo yurmin iioe,<br />
'Baaoiraaoe mumem keddoo boloe.<br />
'Be mbPi : miePen cuusi.
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CORPUS II<br />
o wPi : jooni jooni waqtu yonta, ndonken no njuuldu den<br />
Tawa con ndi ene duka, deyyaan i.<br />
CBe mbPi : tawi ala naa min heen bakkaat, miePen cuusi.<br />
o wi'i : ko noon mbii don<br />
CBe mbPi : ko noon min mbPi.<br />
o wPj : awwa, ePum noon caloePen<br />
JooePii haa janngo heen, oe njuuli subaka<br />
CBe mbirdi salatul fatiha, wirdu teddungal 00<br />
Tammbaa Bukari waePi nelaaoe :<br />
So on njahii, mbi'anon mi Allaji Umar<br />
Yo lempo wuro makko renndu jooni jooni, ngaddanon mi.<br />
tOum noon watulaaoe naati galle Seyku Umar.<br />
'Be mbPi : Ceerno !<br />
Ceerno wi'i : naam !<br />
'Be mbPi : ko min nelaaoe Tammbaa bukari ;<br />
Tammbaa Bukari wi'i ma yo lempo wuro ma reendu hannde<br />
hannde,<br />
Min ngadda jooni tawa daraaki.<br />
Seyku wPi : ene moyyi !<br />
o wi'i : Alfaa !<br />
A Ifaa wi'i : naam<br />
o wPj : noddan am taalibaaoe<br />
'Biooe saqnaaoe naddaama<br />
o wPi : yeewee oee ePoo aroe ePoo de ko lempo ngarani,<br />
Hol ko mbiy don heen ?<br />
Bajo en mbPi : minen hannde, so min ndaFlii ko amin ndokka<br />
00 kuePePaaePo lempo,<br />
Min koltinat besnguuji amen, min naammina ePum en<br />
Seyku wi'i : on nani ?<br />
Nelaaoe moi'i : min nani.<br />
o wi'i : so on njahii mbPon Tammbaa :<br />
Miin Umar ne, so mi heoti hannde ko miePo hokka Tammbaa<br />
tempo
CORPUS IT 357<br />
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Il dit : tout de suite le temps arrivera oil nous ne pourrons plus<br />
Prier parce que la poudre grondera sans interruption.<br />
lIs dirent : si ce n'est pas un peche pour nous, nous avons de<br />
l'audace!<br />
Il dit : c'est ainsi que vous dites ?<br />
Ils dirent : c'est ainsi que nous disons.<br />
Il dit : bon, alors revoltons-nous !<br />
Le lendemain arriva, Us firent la priere du matin,<br />
Ils reciterent la "Saalatul fatiha", la priere d'honneur1.<br />
Tamba Boukari envoya des gens :<br />
Quand vous partirez, dites-moi aAI Hadji Oumar<br />
Qu'on rassemble l'imp6t de son village tout de suite pour que vous<br />
me l'ameniez.<br />
AIors les courtisans2 rentrerent dans la maison de Seykou Oumar ;<br />
Ils dirent : Marabout !<br />
Le marabout dit : oui !<br />
Ils dirent : nous sommes des envoyes de Tamba Boukart ;<br />
Tamba Boukari te dit de rassembler aUjourd'hui l'imp6t de ton<br />
village;<br />
Nous l'emporterons tout de suite avant que la lune ne se leve.<br />
Seykou dit : c'est bien !<br />
Il dit : Alfa !<br />
Alfa dit : oui !<br />
Il dit : appelle-moi les disciples !<br />
On appela les flls des pieuses femmes.<br />
Il dit : regardez, ceux qUi sont arrives ici sont venus pour l'imp6t,<br />
Qu'en dites-vous ?<br />
Ils dirent : si nous avons aUjourd'hui de quoi payer l'imp6t a ce<br />
maudit,<br />
Nous en habillerons nos familles, nous les en nourrirons.<br />
seykou dit : avez-vous entendu ?<br />
Les envoyes dirent : nous avons entendu.<br />
Il dit : quand vous partirez, dites a Tamba :<br />
Mol, Oumar, si j'ai aUjourd'hui de quoi donner l'imp6t,<br />
C'est la priere principale qui compose le "wird" tidjane. voir v 80.<br />
Counisans : le batula [watulaaf3e, pluriel] Ce sont les hommes qui vivem<br />
dans l'entourage des chefs. dom its sont les emissaires et les conseillers.
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CORPUS II<br />
Mi holtinat besngu am, mi nammina
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1<br />
J'habillerai ma famille et la nourrirai.<br />
Les envoyes rentrerent sans l'imp6t.<br />
Lorsqu'ils arriverent, Tamba dit : vous avez apporte l'imp6t ?<br />
Ils dirent : Tamba, demande-nous comment nous sommes revenus !<br />
11 dit : comment etes-vous revenus ?<br />
Ils dirent : le marabout et ses disciples ont dit :<br />
S'ils ont de quoi donner l'imp6t, ils nourriront leurs familIes et les<br />
habilleront.<br />
Meme le marabout a dit : s'il a de quoi donner l'imp6t,<br />
Il nourrira sa famille et l'habillera.<br />
Tamba Boukari se mit a tire en hochant la tete,<br />
Il dit : pitie, le marabout pense qu'U est fort maintenant ;<br />
Il ne me connait pas, si je prends une armee dans un de mes<br />
villages,<br />
Cela fera deux fois plus d'hommes que son armee.<br />
Il avait un griot du nom de Jeli Moussa1;<br />
11 dit : J eli Moussa !<br />
Jeli Moussa dit : oui !<br />
Il dit : viens, accompagne ces envoyes,<br />
Dis au marabout : s 'Us veulent habiter pres de mon village,<br />
Pour s 'incliner, se prosterner et prier,<br />
Pour tallIer des bois et les remplir d'ecritures noires,<br />
Pour lire en disant que c'est la parole de Dieu,<br />
Qu'ils te donnent l'imp6t !<br />
Sinon, j'incendie leur village tout de suite.<br />
Jeli Moussa monta sur son cheval et accompagna les envoyes.<br />
Dieu montra cela a Seykou Oumar a Dinguiraye ;<br />
11 dit : he les gens du Fouta !<br />
Ils dirent : oui !<br />
11 dit : le jour ou Dieu l'Unique nous donnera de faire la guerre<br />
sainte,<br />
Ce jour-la, 11 nous donnera un griot du nom de Jeli Moussa ;<br />
le jour ou Jell Moussa fera partie de notre religion,<br />
Quel que soit celui que nous attaquerons et combattrons, nous<br />
serons les vainqueurs.<br />
J'ai appris que Jeli est tres proche du roi ;<br />
Voila que Jeli qUitte le village de Tamba Boukari,<br />
Jeli est le nom malinke du griot, dom l'equivalent poular est gawlo.
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1<br />
Ene ora nanngude en lempo.<br />
'Biooe saqnaaoe gooto fof yo naatu suudu mum<br />
Yumma makko noon wPetee ko moan i,<br />
Baaba makko wi'etee ko maani,<br />
Ocflon nganndi hatumeere Ihasaaba"1 nanngam,<br />
CORPUS II<br />
Njollon heen innde makko e innde yumma makko e baaba<br />
makko,<br />
Gooto juula darcfle cflicfli, wirda jabe sappo e cflicfli ;<br />
i\laago-cflen illalahu wahidu haa Alia yantina Jeli Muusa en<br />
konu men.<br />
Haa pellen diine yonti !<br />
'Biooe soqnaaoe naati cuucfleele<br />
Allluuje oadiima, defte kippitaama, dahaaji yettaama<br />
Aoe mbinnda, eoe njolla<br />
Seyku hucciti fUcflnannge, 0 juuli darcfle cflicfli,<br />
o wi rd ii ja be sa ppo e cflicfli ;<br />
o noddi Alia nootii ;<br />
Alia tellini e makko tabiibu ;<br />
Tabiibu 0 wPi : Joomiraacflo joom baawcfle wi'i ma ko riaagi<br />
cflaa koo<br />
o rokkii ma.<br />
o wi1i : micflo riaagii yo Alia yantin Jeli Musa e kon u men<br />
Hee,<br />
A min pella diine yonti.<br />
o wPi : Joomiraacflo 00 wPi yamirii ma.<br />
o wi'i : hee talibaaoe !<br />
'Be moPi mo Too I<br />
o wi'i : cflo kaacflnocfloon fof , so on njicflii ngaccon cfloon<br />
Mo fenataa wi'i ko riaagi-cflen 0 rokki.<br />
t[)oon noon kaOko Jeli 0 naati e galle Seyku Umar 00 ;<br />
Gite makko e gite Seyku Kawri ;<br />
Moo yeccitii fof 0 tawa tiinde mum ouri jalbude e tiinde<br />
gocflcflo 00 ;<br />
o ndaari oe haa huunde juuti.<br />
o wPi Ceerno, mate ko aan won i Ceerno oo?<br />
Mot arabe.
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CORPUS 11<br />
Seyku wi'i : eoe mbi a mi noon<br />
o wPi : so tawi ko Alia de J Ceerno aan e almuuoe ma koy<br />
ocflon njoocfli !<br />
o wPi Jeli yoodde ko tekkere Alia.<br />
o wPi mo : Ceerno !<br />
Seyku Uma wPi mo : naam !<br />
o wPi mo : keefero mo juulataa yicfle cflum juulde ene moyyi?<br />
o wPi : Jeli Muusa J gicflgol ko tekkere Alia kono welaani<br />
joyyinta.<br />
o wi'i mo: Ceerno !<br />
Seyku wPi mo : naam<br />
o wPi : so necflcflo woni cfloo ene sulmoo ndiyam cflam J<br />
Culmoto cflon waqtu fof cflam J<br />
Ene turoo J ene tukkitoo J ene jogii ko njogicflon<br />
Ene toyya jabe J<br />
ene wi'a ene wirda J<br />
Ene yoocflira no njoocflir cflon nii ?<br />
o wPi mo : wallahi J Jeli J kala mo rewi Alia.<br />
Hay so moyyaani !Jari J<br />
o wi'i : Ceerno !<br />
tiinde makko jalbat.<br />
Seyku wi'i : naam !<br />
o wi'i acfla anndi ko addi mi ?<br />
o wi'i : alaa J mi anndaa J Jeli J maa kaalanaa mi.<br />
o wi'i : ko Tammbaa Bukari wi'i yo on ndokku am lempo<br />
Kono mbi'ee on ndokkaani J<br />
Njicflcflo jawdi yo gollu !<br />
I{)um ne ko raooidi e haala kO J<br />
Seyku wPi : eey !<br />
Mi natti yicflde Tammbaa Bukari J<br />
Ceerno<br />
Miin koy kam ko ko onon tan njicfl mi<br />
I{)um ne ko cfloo keddotoo mi.<br />
o wi'i mo hee Jeli !<br />
Jeli wPi : naam !<br />
o wi'j mo : laawol kay ene moyya ender laawol J<br />
Kono J Jeli Muusa J maa laawol timminee ;<br />
Yah J timminoy laawol tawi ko Alia yamiri yo a artan J a arat.<br />
Tan Jeli ruttii wPi : nelaaoe J ngaree J njahen !
CORPUS 11 363<br />
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Seykou dit : c'est ainsi qu'ils m'appellent.<br />
11 dit : par Dieu. Marabout. toi et tes disciples vous etes beaux !<br />
11 dit : Jell Moussa. la beaute est un chiffon de Dieu1.<br />
Illui dit : Marabout !<br />
Seykou Oumar lui dit : oui !<br />
n dit : est-ce b1en s1 un paien qui ne prie pas aime un musulman ?<br />
11 lui dit : Jell Moussa. l'amour est un chiffon de Dieu mais il n'est<br />
pas agreable a poser2.<br />
Illui dit : Marabout !<br />
Seykou lui dit : oui !<br />
11 dit : si quelqu'un est ici. qu'il se purifie le visage.<br />
Chaque fOis que vous vous purifiez le visage.<br />
S'il s'incllne. se prosteme. s'il possede ce que vous possedez,<br />
S'il egrene le chapelet pour reciter le wird.<br />
Est-ce qu'il sera beau comme vous ete beaux?<br />
11 dit : par Dieu, Jeli. celui qui suit Dieu.<br />
Meme s'il n'est pas beau. son front sera brillant.<br />
11 dit : Marabout !<br />
Seykou dit : oui !<br />
11 dit : tu sais ce qui m'a amene?<br />
11 dit : non. Jell. je ne sais pas, il faut que tu me le dises.<br />
11 dit : c'est Tamba Boukari qui dit que vous me donniez l'imp6t.<br />
Mais dites que vous ne le donnez pas :<br />
Que celui qui veut des biens travaille !<br />
Voila qui est vite dit. Marabout.<br />
Seykou dit : d'accord !<br />
J'ai cesse d'etre l'ami de Tamba Boukari,<br />
Ce n'est que vous que j'aime,<br />
J e vais donc rester ici.<br />
Illui dit : he Jeli !<br />
Jell dit : oui !<br />
Illui dit : un chemin est meilleur qu'un autre,<br />
Mais. Jeli Moussa, fais ton devoir3 .<br />
Pars. fais ton devoir. si Dieu veut que tu reviennes, tu reviendras.<br />
Alors Jell s'en retouma, il dit : envoyes. venez. rentrons ;<br />
La beaute est une valeur passagere et futile : elle est le "chiffon" de Dieu.<br />
11 n'est pas agreable a poser : la fidelite dans l'amitie est une chose difficile.<br />
Fais ton devoir : litteralement que la route soit terminee.
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Tammbaa Bukari hoddotaako :<br />
'Bee cfloo ene ngari e ma ko sincaneeDe<br />
ENe ngoyaa kole mum en<br />
Ko De pUcflcflii dande fot, mbi'aa acfla heDta<br />
00
CORPUS IT 365<br />
250. On ne peut pas habiter avec Tamba Boukari.<br />
251. Ces demiers sont venus fonder un village,<br />
252. Us se fatiguent pour eux-memes,<br />
253. Tout ce qu'lls commencent cl gagner, ille leur prend<br />
254. Un tel roi n'est pas pret d'avoir des gens.<br />
255. Alors les envoyes suivirent Jell Moussa. Jeli alla au lOin.<br />
256. Us arrivaient alors en pleine brousse.<br />
257. Jeli descendit de son cheval,<br />
258. n prit son epee, il l'accrocha cl la selle du cheval,<br />
259. n prit son habit, II l'accrocha cl la selle du cheval,<br />
260. n dit aux envoyes : quand vous partirez, dites cl Tamba Boukari :<br />
261. 11 ne m'a pas engendre, il n'est pas mon grand frere,<br />
262. Je n'etais que son ami, j'habitais dans sa maison.<br />
263. Qu'il me haIsse, je le hais !<br />
264. Maintenant, je suis l'ami du marabout,<br />
265. Je sais que la verite est du cote du marabout,<br />
266. Je vais retoumer chez le marabout.<br />
267. Jell Moussa se mit cl courir,<br />
268. 11 arriva et se mit cl genoux devant SeykouQuna-.<br />
269. 11 dit : oui !<br />
270. 11 dit : hier tu te nommais Jell Moussa ?<br />
271. 11 dit : oui !<br />
272. 11 dit : aUjourd'hui tu te nommeras Jell le chanceux ;<br />
273. Comme tu t'es mis cl genoux, tu t'es converti.<br />
274. Celui qui ne ment pas m'a fait savoir tout de suite<br />
275. Que ta maison a ete appretee dans le paradis.<br />
276. Alors ils raserent totalement la tete de Jell,<br />
277. Ils lui donnerent un habit blanc et une coiffure blanche,<br />
278. Ils lui remirent un chapelet "tidiane".<br />
279. Illui dit : Jell !<br />
280. Jell dit : oui !<br />
281. 11 lui dit : Jeli, prends la corde de DieuI,<br />
282. Elle ne se coupera pas entre tes mains.<br />
283. Alors Jell s'installa.<br />
284. Les envoyes rentrerent sans emporter l'impot, sans emporter Jell ;<br />
1 Prends la corde de Dieu remets-toi entre les mains de Dieu.
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CORPUS 11<br />
Vettaade oe taw Tammbaa Bukari wPi oe onon, on ngaddi<br />
lempo ?<br />
'Be mbi'i mo : Tammbaa, woppu yawre<br />
Hade maa naamnaade min lempo,<br />
A naamnotaako taw no min ngartiri ?<br />
o wPi : hol no ngartirePon ?<br />
'Be mbPi : min keoaani lempo,<br />
tOum ne Jeli murtii :<br />
A yPi puccu 0 waePePinoo nen i !<br />
o wPi 0 yiePaa ma, ko Ceerno 00 yiePi, ene toon heddii.<br />
Tammbaa Bukari laawi fitiina moolanaaePo moole ;<br />
o wPi : ko jooni noon Ceerno 00 meemii mi, bone yoni<br />
Ceerno wi'i hokkataa kam lempo,<br />
Nan ngi neeno am ouratn ooePo mi neenoe ka la,<br />
Ene wPa ene heddoroo ePum ;<br />
00 ePoo, 0 waawaa fandinde ePum ;<br />
Jooni jooni mi holla Ceerno ko njogii mi ko.<br />
Tan 0 itti nelaa ePo gooto ;<br />
o wPi : miePo yiePaa duppude wuro Ceerno ngoo<br />
Kono mi yiePaa duppude wuro Ceerno tawa Jeli ene toon:<br />
So a nani woto joorngal sumor keccol tawat ePi ndarodaaki.<br />
tOoon noon 0 wPi nelaaePo 00 : so a yahi, mbi'aa Ceerno:<br />
Mi yaafiima len po makko kono yo 0 rokkit on Jeli Muusa,<br />
Ngaddanon mi, yo 0 anndu Jeli Muusa ko neeno am mo<br />
korsin mi,<br />
o jeyaa ePum ka ako !<br />
Lempo wuro makko, so 0 yiePii, yoo moftu<br />
NelaaePo ari, ene dadii haa tiiePi,<br />
o yettii, 0 wPi : Ceerno !<br />
Seyku Umar wPi mo : naam !<br />
o wi'i : Tammbaa Bukari wi'i ma yaafiima lempo wuro maa<br />
Kono yo a anndu neeno 00 ko neeno muuePum,<br />
Vo a rokkit ePum Jeli Muusa ;<br />
Hay so a yooaan i lempo, woto Jel i heddo gaa !<br />
Seyku wPi : Jeli !
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Jeli wi'i : naam !<br />
o wi'j mo : Jeli, ar, nooto, banda en ngaranii maa.<br />
o wi'i mo ; Ceerno !<br />
Ceerno wi'i : naam !<br />
o wi'i : ko nafiigiiji Doli nji'ataa ePoo ;<br />
CBee ePoo, hay Hawwa e Adama min njiy-ePaa,<br />
CBee ePoo, hay huunde min njiydaani.<br />
1)um ne Ceerno.<br />
Ceerno wi'i : naam<br />
o wi'i : maa taw de gidgol haePtaa haalde goonga ?<br />
o wi'i mo : alaa, so yimDe njiePindiri yo kaaldu goonga,<br />
Kam waePi battande.<br />
o wi'i aePa yiePi mi, miePo yiePmaa.<br />
o wi'i : goonga !<br />
o wPi mo : kono a yi'i keefero mo miiji-ePaa-haDde 00<br />
Ko kuePaaePo Alia, ka Oko DU r maa doole !<br />
A yi'i wuro ngo 0 hoePi ngoo ?<br />
o wPi mo : eey !<br />
o wi'i : hitaande fof omo duhna heen teemedere solimaa,<br />
1)um ko hitaande fof njiy-ePaa e leydi makko ndii fof,<br />
Ka Oko DU r maa doole !<br />
1)oon noon Seyku Umar moosi ;<br />
o wi'i mo : Jeli !<br />
CORPUS IT<br />
Jeli wi'i : naam !<br />
o wi'i mo : Jeli, doole ko Alia Jogii, hay gooto alaa doole,<br />
Jogii doole ko Alia.<br />
o wi'i : nelaaDe, on nan i ?<br />
CBe mbi'j : min nan i !<br />
o wPi : so on njahii, mbi'on Tammbaa Bukari hanki Jeli ko<br />
Jeli Tammbaa<br />
Wonnoo, ko yo anndu Jeli wontii Jeli Umar Fuutanke !<br />
Mbi'on Tammbaa miePo nanngiri Jeli koyngal am iiaamal<br />
Haa Tammbaa taya ngal,
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Jell dit : oui !<br />
Il dit : Jell, viens, reponds, tes parents sont venus te voir.<br />
11 lui dit : Marabout t<br />
Seykou dit : oui !<br />
Il dit : ce sont des hypocrites purs que tu vois ici !<br />
Avec ceux-ci nous n'avons meme pas en commun Adam et Eve1<br />
Avec ceux-ci nous n'avons rien de commun,<br />
Donc, Marabout.<br />
Le marabout dit : oui !<br />
n dit : est-ce que l'amitie empeche de dire la verite ?<br />
Illui dit : non, si des gens s'aiment, qu'ils se disent la verite,<br />
C'est cela qui les rapprochera.<br />
Il dit : tu m'aimes et moi je t'aime.<br />
n lui dit : c'est vrai !<br />
n lui dit : mais le paien contre lequel tu veux combattre.<br />
C'est un maudit de Dieu, il est plus fort que toL<br />
As-tu vu le village qu'il habite ?<br />
Il dit : oui !<br />
U dit : chaque annee, il y fait circoncire une centaine d'enfants2 .<br />
C'est cela qu'on voit tous les ans dans son pays,<br />
C'est IUi qUi est plus fort que toi !<br />
Alors Seykou Oumar se mit cl sourire,<br />
Illui dit : Jeli !<br />
Jell dit : oui !<br />
11 lui dit : Jeli, c'est Dieu qui possede la force, nul n'est fort,<br />
C'est Dieu qui possede la force!<br />
U dit : envoye, vous avez entendu ?<br />
Us dirent : nous avons entendu !<br />
Il dit : quand vous partirez, dites cl Tamba Boukari que hier Jeli<br />
etait Jell de Tamba,<br />
Mais qu'il sache que Jell est devenu Jell de Oumar du Fouta !<br />
Dites cl Tamba : je prends Jeli avec mon pied droit<br />
Jusqu'cl ce que Tamba le coupe;<br />
Adam et Eve : pour la tradition coranique, Adam et Eve sont les premiers<br />
etres humains ; Jeli est tres meprisant en recusant tout lien avec les<br />
envoyes de Tamba Boukari, ils ne descendent pas d'Adam et Eve. premier<br />
couple edenique.<br />
S'il y a une centaine d'enfants a circoncire. c'est un signe que la<br />
population est nombreuse. et la tradition insiste sur la puissance du<br />
royaume du Dialonkadougou avec force.
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CORPUS II<br />
Mi nanngira mo junngo am naamo haa Tammbaa taya ngO J<br />
Mi nanngiro mo junngo am nano haa Tammbaa taya ngO J<br />
Mi jaggira Jeli koyngal am nanal haa Tammbaa taya ngal J<br />
Mi hippoo e Jeli Muusa haa Tammbaa waefla mi gone efliePi J<br />
Ndeen Jeli fucrcPoo heoaade.<br />
Nelaaoe kooti.<br />
I[)oon noon Seyku Umar wi'i : taalibaaoe !<br />
tBe mbPi mo : naam !<br />
o wPi : pawndiree defte e alluuje J<br />
Cin ndon heen dahaaji J<br />
Ngittee kaalaaji e ko'e J<br />
Na n ngon e daacPe fetelaaj i.<br />
kaooon haa tiiePa<br />
kaoDon e dadorcre haa tiicra J<br />
Jooni jooni konu yana e men haa pellen diine yonti.<br />
tBiooe soqnaaoe ndadiima J<br />
Kaalaaji ndadaama,<br />
SIIaamaaje mbelnaama J<br />
Fetelaaji loowaama.<br />
Seykou da roo waajo haa huunde juuta.<br />
Seyku joocroo ;<br />
Taalibaaoe kaftoO J<br />
ngona e innude Alia<br />
Ya Alla J ya Allahu J woto mi daeP hannde ndee croo fiyannde J<br />
Mbele micro yi1a galle am janngo laakara !<br />
Eoe e kaan haala J<br />
nelaaoe kooti.<br />
KaOko Tammbaa Bukari 0 wPj De : no woori ?<br />
tBe mbi'i : min keoaani J crum ne miePen kaalam ma<br />
Tammbaa.<br />
o wi'i naam<br />
o wi'i : Ceerno 00 de fawi tan ko hare.<br />
I[)oon noon Tammbaa Bukari jali haa yoori jallecre<br />
o wPi : maa mi an ndin Ceerno 0 alaa doole :<br />
Hannde mi duppa Dingiraayi J mi haooa taalibaaoe J
CORPUS IT 371<br />
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1<br />
Je le prends avec ma main droite jusqu'a ce que Tamba la coupe.<br />
Je le prends avec ma main gauche jusqu'a ce que Tamba la coupe.<br />
Je prends Jeli avec mon pied gauche jusqu'a ce que Tamba le<br />
coupe,<br />
Je m'etends sur Jeli Moussa jusqu'a ce que Tamba me divise en<br />
deux morceaux,<br />
Alors Jeli commencera a etre prisl .<br />
Les envoyes s'en retoumerent.<br />
Alors Seykou Oumar dit : disciples !<br />
Ils lui dirent : oui<br />
11 dit : mettez livres et planchettes les uns sur les autres.<br />
Suspendez-y les encriers. attachez-Ies solidement,<br />
Enlevez les turbans de vos tetes, attachez-Ies a votre taille.<br />
Prenez les fusils.<br />
Tout de suite une troupe va nous attaquer pour la guerre sainte.<br />
Les fUs des pieuses femmes se ceignirent.<br />
On se ceignit avec les turbans.<br />
On affl1ta les epees.<br />
On chargea les fusils.<br />
Seykou se tint debout et fit une longue exhortation.<br />
Seykou s'assit,<br />
Les disciples se leverent et se mirent a supplier Dieu :<br />
o Dieu, que je n'echappe pas aUjourd'hui de cette bataille<br />
Pour que demain je voie ma maison dans l'au-dela !<br />
Ils etaient en train de prier ainsi quand les envoyes rentrerent<br />
chez eux.<br />
Tamba Boukari leur dit : comment cela s'est-il passe?<br />
Ils dirent : nous n'avons rien eu. et puis. Tamba, nous te disons...<br />
11 dit : oui.<br />
Ils dirent : le marabout a declare la guerre !<br />
Alors Tamba Boukari eclata de rire.<br />
11 dit : je vais faire savoir ace marabout qu'il n'est pas fort.<br />
AUjourd'hui, je vais incendier Dinguiraye. je vais attacher les<br />
disciples,<br />
Jeli et Seykou sont desonnais inseparables. l'un ne pourra pas etre pris<br />
sans l'autre. lis fonnent une sorte de heros epique et son double. La suite<br />
du jihad pennit a cette dualite organique de donner la pleine mesure de ses<br />
capacites ; et la langue de Jeli completa bien les dons mystiques d'Omar.
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CORPUS II<br />
Mi nannga Jeli e Ceerno 0, mi adda oe d'oo wuro am d'oo.<br />
o wi'i : on nganndanaa kam no konu Ceerno 00 foti ?<br />
Heen gooto wi'i : miin kay wonno mid'o anndi toon,<br />
Mid'o an ndi no oe poti.<br />
o wi'i : hol no almuuoe oee poti ?<br />
o wi'i : kaako e almuuoe oee, so Jeli alaa heen,<br />
Ko teemedde tato e yimoe tato.<br />
Tan Tammbaa Bukari Jali ;<br />
o wiJi : oee kay njonaan i hay koyngal kon u<br />
Taoalleji makko d'i ndilli.<br />
Leydi makko ndi renndi.<br />
o wi'i leydi makko ndii mid'o soklii e mood'on ujunaaje<br />
jeegoom sagata,<br />
Sagata mo suufnaan i waa re,<br />
Meed'aan i resde abada, saka miijoo oesngu mum.<br />
Bajo en kaooi dimand'i, ndarii baaae.<br />
o wiJi : so on njahi wuro CeernoJ nduppon wuro ngoo,<br />
Mbaron almuuoe oee.<br />
Nan ngon Jel i e CeernOJ ngaddadon miJ<br />
Mi wad'a oe ko Alia haaj i.<br />
Colla mod'i bugeejeJ<br />
Joorngal helaama, keccal pusaamaJ<br />
Towngal sooraama J daooal oilaama.<br />
Ndee oe ngari DingiraayiJ oe mbad'i ngo "ferme serkel"<br />
Ned'd'o e ned'd'OJ<br />
Fetel e fetel J<br />
Junngo e junngo.<br />
!Be pirli Dingiraayi haa woni gori jeegom.<br />
Seyku Umar ndaari gaaJ tawi ko jamaanuJ<br />
o ndaari gaaJ 0 tawi ko jamaanu.<br />
o wi'i oe : hee Fuuta !<br />
!Be moi'i mo : Taa I<br />
o wi'i oe : woto kulee koy 00 d'oo jamaanu<br />
Nganndee koy Alia ene mari jamaanu ouri heewde.<br />
Omo wondi e Basi Demmbele,<br />
Omo wondi e Saykolor,
CORPUS IT 373<br />
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414.<br />
1<br />
J e vais prendre Jell et le marabout pour les amener ici dans mon<br />
village.<br />
11 dit : savez-vous a combien sont les hommes du marabout ?<br />
L'un d'eux dit : moi, je connais les gens de la-bas,<br />
Je connais leur nombre.<br />
11 dit : a combien sont les disciples ?<br />
11 dit : les disciples et lui, sans compter Jell,<br />
Sont au nombre de trois cent trois personnes.<br />
Alors Tamba se mit a rire :<br />
11 dit : ils ne constituent meme pas un bataillon !<br />
Ses tambours resonnerent.<br />
Son pays se rassembla.<br />
11 dit aux gens : j'ai besoin parmi vous de six mUle jeunes gens,<br />
Des jeunes gens dont la barbe n'est pas encore sortie,<br />
Qui n'ont jamais ete maries et qUi ne pensent pas a leur famille.<br />
Les gaillards harnacherent leurs chevaux et se mirent de cote.<br />
Il dit : quand vous partirez au village du marabout,<br />
Mettez-y le feu, tuez les disciples :<br />
Prenez Jell et le marabout, amenez-Ies moi,<br />
Je leur ferai ce que Dieu permettra.<br />
Un nuage de poussiere avala les arbres.<br />
Le bois sec fut casse, le bois vert fut ecrase,<br />
Le bois long, on y passa dessous, le bois court fut ecarte.<br />
Lorsqu'ils arriverent a Dinguiraye, Us formerent un cercle autour<br />
de la ville :<br />
Un homme a cote d'un homme,<br />
Un fusil a cote d'un fusil,<br />
Une main a cote d'une main.<br />
Ils entourerent Dinguiraye de six cercles.<br />
Seykou Oumar les regarda, il vit que c'etait une foule d'un cote,<br />
Il regarda de l'autre cote, il vit encore une foule.<br />
Il dit : he, les hommes du Fouta !<br />
Ils lui dirent : Tall !<br />
n leur dit : n'ayez pas peur de cette foule !<br />
Sachez que Dieu a garde une foule plus nombreuse.<br />
Il etait avec Basi DembeleI,<br />
Il etait avec Saykolor,<br />
Basi Demb616 : un des fideles partisans de Seykou [esclave].
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1<br />
2<br />
3<br />
Omo wondi e Basibasi.<br />
Fuuta leeriol fofof yahri baynge ;<br />
'Be mbaePi wuro ngoo ferme serkel.<br />
Conndi dukki, deY'Y'Oani ;<br />
Allasara 0 yawti, futuro ene manki seeePa<br />
'Be mbonni wuro bonannde bonnde ;<br />
'Be kirsi Faajimba,<br />
'Be nanngi yimoe muunePum e yimoe Tammbaa Bukari<br />
'Been fof bajo en mbaePaama boggi.<br />
Kaalaaji pirliima kodda Adama Ayse<br />
tOoon oe mbPata : 0 bonni Tammbaa, 0 bonni Faajimba.<br />
Kon u nguu Den ni, oe kawrie<br />
Pullo gooto ina wiyee Faalel Bolaaro<br />
Hol to koyePe kon u ePee kawri ?<br />
De kawri ko to wiyetee kamakinndi 1 .<br />
Conndi duki haakunde maooe.<br />
Haa maayoe e oarmuoe keewi.<br />
Doon noon Sayku Umar immini konu.<br />
Alfaa Umar riiwi konu Faalel Bolaaro.<br />
Haa to wiyetee kasakeeri Baakuna.<br />
Be pin i, oe ndawti ka reega.<br />
o winndi e sayku Umar oataake :<br />
Vo a anndu konu ngu ngaddu noo-mi kareega nguu fow<br />
fewti i.<br />
Keewoe cahodinii kareega heoaaka.<br />
tOum ne yo a anndu sayku Umar konu nguu<br />
So tawi; kam ka reega ...<br />
o wii : Ne konu nguu tawi moo kareega<br />
Hol ePo ngu iwru moo ?<br />
o wii : 0 iwri 2 mi ko Menemene,ko karunka<br />
Jaawara neldi m0 3<br />
o wii mo : hol no mbaddu-ePaa e konu kee ?<br />
Deformation de Kamakindi.<br />
Variante de ngu.<br />
Variante de neU.<br />
CORPUS 11
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11 etait avec Basibasi.<br />
Chaque lignage du Fouta alla de son cote ;<br />
Us entourerent la ville d'un cercle.<br />
La poudre gronda sans interruption:<br />
Le debut de la soiree passa, c'etait bientot le crepuscule,<br />
Ils abimerent completement la ville 1.<br />
Ils couperent la tete a Fadjimba2,<br />
Us s'emparerent de ses hommes et des hommes de Tamba<br />
Boukari;<br />
A tous on leur mit une corde.<br />
Les tetes enturbannees entourerent Kodda Adama Ayse3 .<br />
C'est alors qu'ils dirent : il a detruit Tamba, il a detruit Fadjimba.<br />
L'armee continua, elle rencontra<br />
Un Peul appele FaIel Bolaro.<br />
OU se rencontrerent les jambes de l'armee4 ?<br />
Elles se rencontrerent a un endroit nomme Kamakindi,<br />
La poudre gronda sans cesse5 entre eux;<br />
Jusqu'a ce qu'elle fit de nombreux morts et blesses.<br />
Alors, le Cheikh depecha une armee.<br />
Alpha Oumar repoussa l'armee de FaIel Bolaro<br />
Jusqu'au lieu nomme Kassakeri Bakouna6<br />
Au reveil, ils retournerent a Karega.<br />
n ecrivit une lettre en direction de Cheikh Oumar.<br />
Sache que toute l'armee que j'avais emmenee a Karega est defaite.<br />
11 y a un grand nombre de Martyrs, mais Karega reste inexpugnable.<br />
Et puis, sache Cheikh Oumar<br />
Que si l'armee me trouve a Karega...<br />
11 dit: quand l'armee te trouva a Karega<br />
D'ou venait-elle ?<br />
n dit: elle provenait de Mene-Mene.<br />
C'est Karounka Diawara qui l'avait envoyee.<br />
11 dit : comment t'es-tu comporte face a l'armee ?<br />
Le texte poular est le suivant : "De mbonni wuro bonan de bonde " (ils ont<br />
detruit la ville d'une destruction destructrice).<br />
Fadjimba : roi Malinke, sans doute Yimba-Sakho.<br />
Les tetes enturbannees : litteralement les "turbans", synecdoque.<br />
L'arrnee reproduisait l'anatomie de l'homme : tete, tronc, membres.<br />
Mot a mot : la poudre vociftra.<br />
Kasakeri dans le Bakounou.
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o wPi : Min kawri ko to wiyetee kamakinndi<br />
o wi'i : hol no mbaddu ePaa e maooe ?<br />
CORPUS II<br />
Alfaa wii mo : mi riwii oe haa to wiyetee kasakeeri Baakuna.<br />
Mi warii 1 e maooe teemedere e capanePe njeetato oiy Pullo<br />
Sayku heooitii wii oe :<br />
'Bee dee kasbii 2 haa to yeeso Alia.<br />
Ko ePum waePi haa hannde aePa yiya wolaaroe<br />
NeePePo na jogii ujunere nagge J<br />
l\Jaamataa I
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4<br />
Il dit : nous nous sommes rencontres a Kamakindi<br />
11 dit : comment t'es-tu comporte contre eux ?<br />
Alpha lui dit : je les ai repousses jusqu'a Kasakeri Bakouna<br />
J'en ai tue cent quatre vingt Peuls.<br />
Cheikh leur dit alors :<br />
Ceux-ci sont bienheureuxjusque devant Dieu,<br />
C'est pourquoi jusqu'a ce jour, tu vois chez les Wolarbe 1<br />
Un propriet.aire de mille vaches qui refuse de manger<br />
Du lait frais, preferant les feuilles de baobabs2 .<br />
Cheikh Oumar envoya a Alpha Oumar Thierno Bayla une "jambe<br />
d'armee",<br />
Gardant par devers lui le reste de son armee.<br />
Au reveil, Us se dirigerent vers Karega.<br />
Des empoignades les opposerent avec les gens de Karega,<br />
Jusqu'a ce qu'il y eut de nombreux morts et blesses.<br />
Avant midi, Karega detIuisit completement l'armee d'Alpha Oumar.<br />
Il y eut de nombreux martyrs, mais Karega ne fut pas pris.<br />
Alors, Alpha Oumar Thierno Bayla ecrivit une autre lettre,<br />
IlIa fit accompagner d'un signe evident.<br />
Il dit au Cheikh Omar: si tu te rappelles un signe ;<br />
Quand tu qUittas ton village,<br />
Dieu t'envoya vers moi afin qu'on combatte pour la religion,<br />
Moi aussi Dieu m'envoya a partir de Kanel<br />
Que je me rende aupres de toi,<br />
Tu es autorise a faire la guerre sainte3<br />
Que l'on mene la guerre sainte.<br />
Nous nous rencontrames, nous nous serrames la main4.<br />
Tu dis que tout ce que tu possedais dans cette vie nous appartenait.<br />
Sache que maintenant Cheikh Oumar,<br />
Wolarbe : sous-groupe Peul.<br />
Ce mythe etiologique traduit le mepris des sedentaires pour le Peul, qui<br />
prefere mourir de faim, plutot que de vendre ou de tuer la vache, sa fidele<br />
compagne.<br />
Mot a mot : on t'a donne le coup de fusH de la religion.<br />
Mot a mot : nous nous donnames mutuellement la main.
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CORPUS II<br />
KocPo subaka J jom wuro naange e hoore J almaami Sallifanaa.<br />
Ko aan wiyetee woobo woobo J<br />
Wooboo wuro J<br />
Nalla jom wuro J<br />
Ee toorodoO J<br />
moo?<br />
Haa Fuuta kala an nda J<br />
wottoo jom saare J<br />
CBiooe soknaaoe fow tin ii.<br />
hiira almaami jamaa.<br />
hol ko woni 00 oataake ko no suurkina yeeso<br />
Doon noon 0 hucciti e Farba J 0 wii : Farba !<br />
Farba wii mbo : naam<br />
o wi1i : laaoii kam huunde kala ko tooroodo won i<br />
Toroooe cikkitoo cPum tan.<br />
o wi'i : Miin tooroooe fow cikkitoo mi J<br />
Hay Alfaa Umar sikkitoo<br />
No A Ifaa Umar anndirii mi jamma e nalawma<br />
Ko suucPi e ko ko weeji<br />
Haa hannde Alfao no wiyo tawi ko mi dokkaacPo.<br />
Walloay mo mi anndin A/fao honnde,<br />
Hotton ko e dow mum ngon mi<br />
Wollooy ko dokke loooe ngondu-mi.<br />
o wi'i : Fuuto !<br />
CBe mbiy mo : Tool<br />
o wi'i : koooee pucci honnde ko koreego nolloy ten.<br />
No lowmo ko reego<br />
Voo noon oe koooi ndimoongu mokko nguu<br />
o wi1i: goree Fuuto !<br />
Be mbiy mo : Noom<br />
o wi'i : koooitee puccu am nguu.<br />
Hon nde mbicPo fin n ii J
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Huunde kala han nde ko wacfli woOki<br />
Han nde mi heyataa e muucflum.<br />
tDoon noon ne kanni ndimaangu nguu.<br />
Tooroodo 00 naati nder suudu.<br />
Ko nande muucflum tan ne meecfli yiydeJ<br />
Sayku na yaha wolde na wacflta J<br />
Comci mum makkaokooji cflii.<br />
Bajo wacflti jallaaba ittunoo Makka 00.<br />
Bajo fiilii kaala 0 ittunoo Makka kaa.<br />
o jaggi e tuggurdu nduuJ<br />
l\Iaamo ngoo weelnii kurus oOJ<br />
o wii De : Fuuta hono woniri ?<br />
CORPUS 11<br />
Be mbii : jooni dee min ngaynii<br />
o wi'i De : joon i dee J awwaa han nde kOYJ ko sacflti ko Ka reega<br />
na Iloyten.<br />
Toorood 0 00 inn i A IIa .<br />
Pucci na ndoga no doole mumen potnOOJ<br />
Ene cooynoo SaykuJ<br />
Pucci na ndOOki heptaade cflum.<br />
Wonne yeeso nee e wonne caggal nee kala ena nana Harnaango<br />
becce ngoo.<br />
Doon noon Farba sawa Guwaa turii e leydi :<br />
Tooroodoo 1 ngari jumaa ejamaa.<br />
Kono hannde a yigii ko tiicfli J<br />
Jaa maalin J jaa elmin J Jaa ladabin J<br />
Jaati jumaalinJ lIa karamayni ibni akaramayni"2 .<br />
Wallaay3 so a finnii Fuuta kala tinatJ<br />
Wallaay so a finnii Bammbara kola tinatJ<br />
Alia dey anndi ko noddataa kooJ<br />
Kono ko noddataa koo na heewi doole.<br />
yeewa tan kodda Aadama Ayse<br />
Allongement poetique du mot Toroodo.<br />
Intrusion de termes arabes.<br />
Formule pour jurer en theologie islamique "wallaahi!"
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Tout ce qui est anime<br />
AUjourd'hui ne peut pas me contenir.<br />
Sur ces entrefaites. Us attacherent le destrier.<br />
Le Torodo entra dans la chambre.<br />
C'est ce jour qu'ils virent pour la premiere fOiSt<br />
Le Cheikh allant en guerre. habille<br />
De sa tenue de Pelerin.<br />
Alors il mit la "Djellaba" acquise cl la Mecque.<br />
Alors U mit le bonnet acquis cl la Mecque.<br />
Il s'appuya sur la canne.<br />
La main droite tenant le chapelet.<br />
Illeur dit : alors Fouta Oll en est-on? Que faire ?<br />
Us dirent : cl present nous avons fini.<br />
Il leur dit : aUjourd'hui quel que soit l'enjeu, c'est cl Karega que<br />
nous passerons la journee.<br />
Le Torodo appela Allah.<br />
Les chevaux galopaient de toute leur force.<br />
Us apercevaient le Cheikh.<br />
Mais les chevaux etaient incapables de le rejoindre.<br />
Les cavaliers qUi etaient devant. comme ceux qUi etaient derriere.<br />
entendaient tous le bruit produit par sa poitrine.<br />
C'est cl ce moment que Farba Sawa Gouwa se baissa cl terre :<br />
Torodo. champion de la mosquee et de la grande mosquee1.<br />
Mais aUjourd'hui tu as vu quelque chose d'extraordinaire.<br />
Le Riche. le Savant. le Bien-eleve.<br />
Le Patron des riches. Noble. fils de nobles.<br />
Par Allah. quand tu te faches. tout le Fouta le ressent2 .<br />
Par Allah, quand tu te faches, tous les Bambaras le ressentent.<br />
Allah seul sait ce que tu appelles3,<br />
Mais ce que tu appelles est tres pUissant.<br />
Vois-tu Dernier-ne d'Adama Ayse<br />
Mot a mot : breuf de la mosquee et de la grande mosquee.<br />
Dans la tradition peule. le breuf symbolise la force physique. l'image<br />
suggere ici les grandes qualites intellectuelles du Cheikh : la direction du<br />
culte dans les mosquees, et en particulier celle de la grande priere du<br />
Vendredi demande des qualites, donc le champion en la matiere est<br />
extraordinaire.<br />
Le Fouta : metonymie employe ici pour signifier les gens du Fouta ; il faut<br />
noter qu'a la place de la figure correspondante, attendue au vers suivant,<br />
le poete prefere employer les Bambaras.<br />
Cheikh Omar doit reciter des prieres afin d'obtenir un secours mystique.
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Elimoon sire Sommbo Demmbo Aoli Muttoor<br />
Seydi Buubu NjonuJ<br />
Ad'o huroo hurooongo mboroodi<br />
Ad'o ndooro ndoorki moloyko !<br />
Ad'o duurtoo duurtoongo jinne !<br />
Eee Jooto jumoolin J 1I0 koromoyniJ ibnu okoromoyni ll<br />
•<br />
Allo dee onndi ko noddotooJ<br />
Kono ko noddotoo honnde no heewi semmbe ;<br />
Minen fow min njenenoomo no heewi semmbe<br />
Soyku foondi koreego.<br />
Soyku felloon iJ ko 0 ordunoo fel/oon i.<br />
Jin neeji ngo rd iJ toto ko reego Jooroyii e leyd i.<br />
Fuuto huliJ Bommboro huli.<br />
Bommborooke ( ...discours en bomboro)l<br />
No n ngoo oon koooooJ<br />
Gilo oe njiy toto koo yon iJtoto koo e heewde dooleJ<br />
Be njiyooni ko liooto koo J<br />
Ko d'oo Bommbo ro Nooro hul i.<br />
Doon 0 yoooi e Alfoo Umor Ceerno Boyloo.<br />
Alfoo JoliJ Soyku Umor moosi turii<br />
Alfoo wii mo : Eee Tokoro<br />
Soyku wiyi mo : Noom<br />
o wiy mo : oon dee hon nde yeeso moo ngoo loooon i.<br />
o wii mo : Tokoro yeeso om ngoo woowotoo looode<br />
Sobi 0 girjimoomo mi 2 J d'um ne mbod'o fosn i moo.<br />
Kooni tokoro occu girjoode miJ<br />
So 0 woppooni girjoode miJ<br />
Te mbid'o fosn i mooJ<br />
Mi wod'ot ko dod'i juud'e mooJ dod'i juud'e omJ<br />
Hoo honnde tokoro od'o e sikkitoode mi<br />
So towii ko mi dokkood'oJ moo ko mi puuntood'o<br />
Le griot fait ici parler le Bambara dans sa langue .<br />
Variante de girbaade, il y a une altemance ici de b/j.<br />
CORPUS 11
CORPUS IT 385<br />
555. Elimane Cire Samba Demba Ali Moutar<br />
556. Seydi Boubou Ndiagnou.<br />
557. Tu rugis comme un lionI•<br />
558. Tu regardes comme un ange.<br />
559. Tu t'etires comme un djinn.<br />
560. 0 Patron des riches. Noble fils de nobles.<br />
561. Allah seul sait ce que tu appelles.<br />
562. Mais ce que tu appelles aujourd'hui est plein de force.<br />
563. Nous tous. nous sommes persuades que c'est tres pUissant.<br />
564. Le Cheikh. a l'approche de Karega.<br />
565. Sans coup fem - ni Iui ni ses compagnons -<br />
566. Les djinns en avant. la forteresse de Karega s'ecroula.<br />
567. Le Fouta eut peur. les Bambaras eurent peur.<br />
568. Les Bambaras dirent...<br />
569. Tu prenais celui-la et tu l'attachais.<br />
570. Des qu'lls virent que la forteresse etait en train de crouler. malgre<br />
sa solidite.<br />
571. Alors qu'lls ne voyaient pas la cause de l'ecroulement,<br />
572. Les Bambaras de Nioro eurent peur2 .<br />
573. Alors. II se dirigea vers Alpha Oumar Thierno Bayla.<br />
574. Alpha Oumar rit. Cheikh Oumar sourit.<br />
575. Alpha lui dit : oh ! Homonyme.<br />
576. Cheikh Iui dit : oui.<br />
577. n Iui dit : aUjourd'hui. ton visage n'est pas serein3.<br />
578. n Iui dit : Homonyme. mon visage ne peut pas etre serein.<br />
579. Puisque tu m'as provoque. en plus je te considere comme un pair.<br />
580. Homonyme. cesse de me provoquer publiquement.<br />
581. Si tu ne cesses pas de me provoquer en public.<br />
582. Alors que je te considere comme un pair.<br />
583. Je ferai ce qUi te depasse. ce qUi me depasse4.<br />
584. Jusqu'a present. Homonyme, tu doutes de moi ?<br />
585. Est-ce que je suis ou non autorise a faire le jihad ?<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Mot a mOl : tu rugis comme un rugissement de lion.<br />
Le griol est imprecis : les habitants de Nioro sont appelles les Massassi.<br />
Mot a mot : ton visage n'est pas propre.<br />
Mot a mol : je ferai ce qui se situe au- deJa de tes mains. au-deJa de mes<br />
mains.
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1<br />
2<br />
Alfaa Umar wiyi mo : Seydi Taal ;<br />
So a yii mi girji maamaJ<br />
Saka e finnii minen kala min pooftat.<br />
Dee cfloo balcfle J Bammbara bonni Fuuta<br />
Heewoe ca hodin i J ka reega heoaa ka.<br />
Anndi Madina Alaheeri ko nalawma gooto.<br />
Joongoy ko nalawma gooto.<br />
Kolomina ko nalawma gooto.<br />
Gimmbanna ko nalawna gooto oe mbonni cflum.<br />
Nooro mawngo ko nalawma gooto oe mbonni cflum.<br />
Kono ba Icfle tati ka reega jaggaa ka.<br />
Wacflde nde girjino maa-mi hannde Fuuta fooftii 1 .<br />
Doon noon Karuoka Jaawara dogii yaaoani Segu.<br />
o wii : EE Aali Woyteela<br />
Ali wii mbo :Naam<br />
o wii : Ceerno naatii Nooro<br />
Bonn ii Nooro<br />
Laamoe nooro Kala mbaraama J<br />
Mi dogii<br />
Mi arii<br />
Mi arii moolaade ma.<br />
Doon noon Ali Woyteela wiyi mo :"Bisimilla".<br />
o wiyi mo : Aan kamJ Ceerno mo mbiy cflaa oOJ ko 0<br />
Pullo walla ko 0 bambaraoke ?<br />
o wiyi : wallaahi 00 dee ko 0 pullo<br />
o wiyi : kooni ndaw ko haawniiJ<br />
Mbele won cflo<br />
Pullo woniJ<br />
ena waawi bonnude laamoe bonnande<br />
bonndeJ hono ndee bonannde nde mbiy-cflaa ndee.<br />
o wiyi : Wallahi 2<br />
o wiyi mo :Bisimilla<br />
CORPUS Il<br />
Long intermede rnusicale apres ce verso<br />
Forrnule rnusulrnane pour confirrner un serment, curieusernent pretee<br />
ici a Karounka. un roi paten.
CORPUS IT 387<br />
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5<br />
6<br />
Alpha Oumar lui dit : Tall,<br />
Si tu vois que je t'ai provoque publiquement,<br />
C'est pour t'exciter afm de nous delivrer.<br />
Ces jours-ci les Bambaras ont fatigue le Fouta5.<br />
Nombreux sont les martyrs, mais Karega resiste encore.<br />
Tu sais que la conquete de Madina Alaheri dura un jour6 ;<br />
Pour Diongoye, ce fut un jour;<br />
Pour Kolomina, ce fut un jour;<br />
Guimbanna fut detruit en un jour;<br />
Pour Nioro, ce fut un jour.<br />
Mais voici que trois jours sont passes et Karega n'est toujours pas<br />
prise.<br />
C'est pourquoi je t'ai provoque publiquement, et le Fouta connait la<br />
paix a present.<br />
C'est a ce moment que Karounka Diawara s'enfuit, en direction de<br />
Segou.<br />
n dit : oh, Ali Woytela.<br />
All lui dit : oui.<br />
n dit : un marabout est entre a Nioro,<br />
n a detruit Nioro,<br />
Tous les souverains de Nioro ont ete executes,<br />
J'ai fui,<br />
Je suis venu.<br />
Je suis venu me refugier aupres de toL<br />
Alors All Woytela lui dit : sois le bienvenu.<br />
11 lui dit : mais toi, le marabout en question, est un Peul ou un<br />
Bambara?<br />
11 dit : par Allah, celui-ci est un Peul.<br />
n dit : quel prodige !<br />
Un Peul capable de detruire completement des royautes,<br />
Telle cette destruction dont tu viens de faire cas.<br />
11 dit : par Allah!<br />
n lUi dit : sois le bienvenu.<br />
Metonymie : le Fouta pour les habitants du Fouta.<br />
Le griot juxtapose ici les conquetes et leur duree.
388<br />
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640 .<br />
DimaaePi ePii njaaoan i wuro karuoka Jaawara Mene Mene<br />
'Be tawi karuoka dogii J dogdii e wurO J yoooiima Con ndi.<br />
DimaaePi ePii njaaoani Segu<br />
Suba haa no na lawma maooe e Segu<br />
Coondi duki hakkunde maooe e Segu<br />
Balde ePiePi Segu heoaaki J Segu jaggaaka<br />
"'ande tataoere ndee oe mbonni Segu oonnande bonnde<br />
Karuoka Jaawara waraa J<br />
Aali Woyteela dogi naati e ladde.<br />
An ndi oe tawi e Segu kawn iiePe ePe hono muuePum a loa<br />
'Be tawi e Segu gawyal nendiko J<br />
doorumaa ru.<br />
Doorumaaru nduu na huoDa J<br />
Gawyal ngal na waePi sammeere J<br />
Sammeere ndee ko mbasoore<br />
Jeynge ngee nifataa J<br />
Gawyal ngal yoorataa J<br />
Sammeere ndee yoorataa<br />
angal darii ender<br />
gawyal taw; ko keccal<br />
CORPUS II<br />
An ndi De tawi e Segu gertogal na hippii e boofooePe muuePum<br />
Gertogal ngal maayataa J<br />
BoofooePe ePee nolataa<br />
An ndi De tawi e Segu fedan nde waePnde noororol J<br />
Kosam ePam ePaanotaako haa haara J<br />
Kosam ePam ne kadi nolataa.<br />
"'ande oe mbon n i Segu bonan nde bon nde J<br />
Taalibaaoe njii gawY'al na darii e doorumaaru J<br />
doorumaaru na huoDa Jaynge J<br />
Fuuta kala noddondiri :<br />
Ngaree njiyee ko hawnii J<br />
tawi gawyal ko keccal.
CORPUS IT 389<br />
615. Les chevaux se dirigerent vers le village de Karounka cl Mene<br />
Mene.<br />
616. Us trouverent que Karounka a fUi, emportant avec IUi le village,<br />
s'etant approvisionne en poudre.<br />
617. Les chevaux se dirigerent vers Segou.<br />
618. Saintete [d'Allah 1]1 leur joumee cl Segou.<br />
619. La poudre gronda entre eux et Segou2.<br />
620. Deux jours Segou ne s'offrit pas, ne fut pas prise.<br />
621. Le troisieme jour, Us detruisirent Segou entierement.<br />
622. Karounka Diawara fut execute, Ali Woytela s'enfuit et disparut dans<br />
la brousse.<br />
623. Tu sais qu'Us ont trouve cl Segou des choses extraordinaires :<br />
624. Us ont trouve cl Segou une tige de mil, bien droite dans un tas<br />
d'ordures ;<br />
625. Le tas d'ordures bnilait, mais la tige restait toujours fraiche.<br />
626. La tige portait un epi,<br />
627. Un epi de millet.<br />
628. Le feu ne s'eteignait pas,<br />
629. La tige ne sechait pas,<br />
630. L'epi ne sechait pas.<br />
631. Tu sais qu'ils ont trouve cl Segou une poule couvant ses oeufs,<br />
632. La poule ne mourait pas,<br />
633. Les oeufs ne se decomposaient pas.<br />
634. Tu sais qu'Us ont trouve cl Segou une calebasse contenant du lait qUi<br />
se caillait.<br />
635. Le lait ne se caillait pas assez,<br />
636. Le lait aussi ne se decomposait pas3,<br />
637. Quand les talibes virent une tige de mU verte4 au milieu d'un feu,<br />
638. Et qu'elle ne se consumait pas.<br />
639. Tout le Fouta s'ecria:<br />
640. Venez voir un prodige !<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Formule employee pour traduire l'emotion, la douleur: "Subhanallah"<br />
(Qu'Allah soit sanctifie)<br />
Mot a mot : la poudre bavarda, disputa entre eux et Segou.<br />
Mot a mot : le lait ne dormait pas assez.<br />
Mot a mot : une tige de mil frafche.
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Ko haawaani Alia e Nelaacro mum<br />
Ngaree njiyee gawyal keccal tan no darii ender jaynge<br />
Fuuta l kala renndi croon.<br />
A yiyat tan nde Fuutaoke jawloo silaama,wiyaa<br />
Ngal de kay I pocr" 2 yicra soppude crum<br />
Wiya gawyal ngal Silaama "cas"<br />
Gawyal ngal deokoyoo haftoo dartoo cro wonnoo.<br />
Haokadi crum haawi Fuuta,<br />
Be mbii Joon idee crum croo kam na fati holleede Sayku.<br />
Bammbaraokeyel na croon, nayewel, na<br />
haooaa haa tiidi<br />
Bajo na ndaara De na jala.<br />
Fuuta oke wii Silaama caseet<br />
o ndaara crum en 0 faloo.<br />
o wiya : a tekee 3 ,<br />
Wa lIaay ko njicr craa koo de a waawaa.<br />
Tan oon wiya silaama kaa IFar"4 ,<br />
Gawyal ngal deokoyoo<br />
Haftoo seooo<br />
Haa crum yettii Sayku Umar Tijjaan i,<br />
Jaa maalin, jaa elmin, Jaa ladabin.<br />
Tan Sayku haftii darii,<br />
Na Jogii tuggordu<br />
nduu,<br />
Na weeln ii kurus 00<br />
Sayku : yii gawyal na daree darii ender jaynge<br />
Jaynge ngee na huooa<br />
Gawyal ngal yooraan i<br />
So a soppi ngal tan,<br />
Ngal yanoya ngal haftoo,<br />
Ngal Se 000.<br />
CORPUS 11<br />
Metonymie : Fuuta pour Fuutaakoot'Je.<br />
Onomatopee.<br />
Le vieillard s'exprlme ici en bambara, griot polyglotte. Le vers suivant<br />
traduit son mot.<br />
Onomatopee.
CORPUS II 391<br />
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3<br />
Mals qui n'etonne pas Allah et son Prophete.<br />
Venez voir une tige verte bien droite au milieu du feu.<br />
Tout le Fouta1 se rassembla a cet endroit.<br />
Un habitant du Fouta prenait2 son sabre.<br />
Alors et essayalt de l'abattre.<br />
Il jetalt son sabre en direction de la tige ;<br />
Celle-ci tombait, puis se relevait et se redressait.<br />
Le phenomene etonna le Fouta.<br />
Ils3 dirent : nous devons en informer le Cheikh.<br />
Un certain Bambara etait present. il etalt vieux. solidement attache<br />
[par les vainqueurs].<br />
Le bonhomme les regardait en riant.<br />
Des qu'un habitant du Fouta s'emparalt d'un sabre.<br />
n le regardait, puis detoumait son regard.<br />
n disait : tu ne le peux pas.<br />
Je le jure par Allah que tu ne peux pas realiser ton desir.<br />
Mats celui-ci lant;ait son sabre.<br />
La tige se jetait a terre.<br />
Puis se relevait et se repostait a sa souche.<br />
Alors la nouvelle arriva a Cheikh Omar le Tidjane.<br />
Le Riche. l'Erudit, le Bien eduque.<br />
Alors le Cheikh se leva droit.<br />
S'appuya sur son baton de pelerin,<br />
Tenant son chapelet en main.<br />
Le Cheikh dit : qu'avez-vous vu ?<br />
lIs dirent : nollS avons vu une tige. se tenant au milieu du feu;<br />
Le feu bnilalt mals la tige ne s'assechalt point.<br />
Si tu l'abats.<br />
Elle tombe, se releve,<br />
Puis se ressoude a sa souche.<br />
Le griot emploie indifferemment le Fouta pour designer le pays. ses<br />
habitants et ses quelques ressortissants.<br />
On note ici une sorte de rupture due au fait que le griot reprend la<br />
narration. pour indiquer, a la troisieme personne du singulier. les<br />
peripeties des Toucouleurs devant la puissance magique de Segou.<br />
Le griot passe de l'image a l'idee. ou alors du contenant au contenu.
392<br />
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1<br />
Sayku yettii : ndaw ko haawn ii,<br />
ko haawaan i alia.<br />
njahen kolloyee kam<br />
Jaa maalin J Jaa elmin J Jaa ladabin.<br />
Haa 0 tawi gawY'al ngal na darii J<br />
o wii : coppee ngal<br />
mi ndaara.<br />
Tan gooto giddi wii gawY'al ngal Silaama "cas"<br />
GawY'al ngal giddi saamoyi leydi J<br />
Sayku wii : on njiyii
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2<br />
CORPUS 11<br />
o wii mo : aePa anndi dee ko m baeP ePaa ePoo koo a bonnii<br />
Sayku wii mo : hol ko wadi mbii ePaa mi bonnii ?<br />
o wii no nganndu moo mi ngon ePaa Ceerno mawePo nii<br />
o wii : eey<br />
o wii : ko pirtu-ePaa ePoo koo kam aePa<br />
Anndi ePum doon bonnataano diine.<br />
Sayku wii : hol ko pirtu mi ?<br />
o wii : AePa felliti J aePa yananaa J ngal ePoo gawyal so a<br />
soppaano ePum<br />
o wii mbo 1 eey<br />
o wii : ka la 10rliiePo e Ja 10 mum wuurat haa maaya<br />
ndaardoyaani banndi mum gawri.<br />
Kala jabbuePo ngesa mum<br />
FamePi fow J<br />
dariat heen ko wuuri ePum,<br />
So a tayaano gawyal ngal.<br />
Sayku wii : Ko a kuePaaePo dey, kono a haalii goonga.<br />
o wii : kala demePo gawri muuePum<br />
WaePat heen kosam noli muuePum,<br />
Naama haa haara.<br />
Sayku wii mo : Ko a kuePaaePo kono a haalii goonga.<br />
o wii : Ngal ePoo gertogal so a waraano ePum tawatno<br />
BiePePo no haaePi e les jinnaaePo muuePum<br />
Debbo no haadi e les gorko muuePum<br />
Kono haade a bon n i i ePum<br />
t[)um ePoo fof bonii haokadi.<br />
Nganndu mi moo aroye 2 leriol maaePa janngo demoowo<br />
o rema haa 0 maaya 0 rooka daride ko 0 riaami<br />
Mao aroy e leriol moo jan ngo neePePo rema haa heewa gawri.<br />
Hooka daride kosam ko Iiyorii<br />
o wii mo : Mao or e cakkitte leriol meeePen janngo<br />
o wii mo eey<br />
o wii mo : A yiytat jinnaaePo nodda Diy mum tan haa ara J<br />
o wiya mo miin mi wondaaka ko koala too koo.<br />
Le griot emploie wiimbo ou wiimo. deux variantes dialectales identiques<br />
du poular.<br />
Aroye est une forme contractee de aroy e : la voyelle est assimilee par le<br />
radical.
CORPUS IT 395<br />
698. Illui dit: tu sais bien que tu as mal fait en agissant ainsi.<br />
699. Le Cheikh IUi dit : pourquoi dis-tu que j'ai mal agi ?<br />
700. I1 dit : comme je te connais grand Marabout,<br />
701. 11 dit : oui<br />
702. 11 dit : ce que tu as detruit ainsi,<br />
703. Tu sals bien que cela ne detruit pas la religion.<br />
704. Le Cheikh lui dit : qu'est-ce que j'ai detruit ?<br />
705. I1 dit : tu sais bien, et tu en es convaincu, cette tige si tu ne l'avais<br />
pas abattue...<br />
706. 11 dit : oui<br />
707. I1 dit :...tout cultivateur vivrait aisement sans aller demander des<br />
graines a son parent.<br />
708. QUiconque seme son champ, queUe que soit sa petitesse, en<br />
retirerait de quoi vivre,<br />
709. Si tu n'avais pas coupe la tige.<br />
710. Le Cheikh dit: tu es reellement maudit, mais tu as dit vrai.<br />
711. 11 dit : qUiconque cultive du mil,<br />
712. Y mettra du lait de ses vaches,<br />
713. Et mangerajusqu'a satiete.<br />
714. Le Cheikh lui dit: tu es vraiment maudit, mais tu as raison.<br />
715. 11 dit : cette poule, si tu ne l'avais pas tuee,<br />
716. Un fIls serait sous l'autorite de ses parents,<br />
717. Une femme serait sous l'autorite de son mart,<br />
718. Mais pUisque tu as tout detruit,<br />
719. Done tout cela est dorenavant gache.<br />
720. Je sais que demain un de tes compatriotes<br />
721. Cultivera jusqu'a l'article de la mort. sans obtenir de quoi manger.<br />
722. 11 arrivera demain aux gens de ta race de cultiver et de recolter<br />
beaucoup de mil,<br />
723. Sans pour autant obtenir du lait pour le verser au couscous.<br />
724. 11lui dit : 11 arrivera a notre race a la fm des temps...<br />
725. 11 lui dit : oui<br />
726. Illui dit : tu verras un pere ou une mere appeler son enfant,<br />
727. Et celui-ci a son arrivee IUi dire: je me moque de ce que tu<br />
racontes.
396<br />
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4<br />
o wii : Maa ar e cakkitte lenol meeePen janngo<br />
Gorko wiya debbo : hol to njahata ?<br />
o wiya : ko wondi maa e am ?<br />
Miin de mbiePo yaha haaju am<br />
Hol ko naamnanto-ePaa mi ?<br />
Sayku wii mo : ko kaal ePaa koo fof ko goonga,<br />
Kono haade na takkii e Jalaoeeji dee,<br />
Umar yiePaa jalao.<br />
Hunnde kala ko takkii e jalao Umar yiePaa.<br />
o wii mo : ePum ePoo kala Alia na waawi lomtinde,<br />
Tawa takkaan i e Jalao.<br />
I[)oon noon Fuuta duni juuePe e kunuePe.<br />
I[)oon noon bajo en oee mbonni segu oonnannde bonnde.<br />
Aali Woyteela dogi naatoyi Woyteela.<br />
I[)oon non diiniyaokoooe oee njaaoani Woyteela.<br />
Subahana 1 nalawma maooe e Woyteela.<br />
Woy jUu loe, woy heeferoe 2 .<br />
Heewoe cahodine Woyteela.<br />
Be mbonni Woyteela bonnannde bonnde.<br />
Aali dogi yaaoan i Hamdallaay.<br />
o tawi ePoon Aamadu mo Aamadu<br />
Wammbaaoe bajo na pirlii ePum na koePa e Saygalaare<br />
Aoe mbiya mo : Aamadu mo Aamadu<br />
Aamii dogde, aamii suuePaade.<br />
Aan e gay dimaaePe e gaawe bodeeje<br />
Haa Aali saami e koye maooe.<br />
Aali Woyteela wii : Fulake3 ?<br />
Aamadu mo Aamadu wii mo : Naam<br />
o wii A bori kana 4<br />
o wii mo ko mbiy-ePaa koo ?<br />
o wii mo A bori kana<br />
o wii mo Mi haoii e Ceerno, 0 riiwii kam,<br />
mi arii moolaade ma<br />
Intrusion de l'arabe.<br />
Poularisation de l'arabe : "kafir".<br />
Ali s'exprime ici en bambara.<br />
Vers dit en bambara.<br />
CORPUS 11
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Il dit : il arrivera a notre race a la fin des temps,<br />
Qu'un mart dise a sa femme: OU vas-tu?<br />
Et qu'elle lui reponde : de quoi te meles-tu ?<br />
Moi je m'occupe de mes propres affaires.<br />
Pourquoi me poses-tu des questions ?<br />
Le Cheikh lui dit : tout ce que tu as avance la est vrai,<br />
Mais c'est lie aux fetiches !<br />
Or, Oumar n'aime pas les fetiches!<br />
Tout ce qui reste lie aux fetiches, Oumar ne le veut pas.<br />
1l1ui dit : tout cela Allah peut le remplacer,<br />
Sans le recours aux fetiches.<br />
C'est la que le Fouta1 mit ses mains a ses bouches2.<br />
C'est la que les preux detruisirent Segou completement.<br />
Ali Woytela courut se refugier a Woytela.<br />
C'est la que les hommes de religion se dirigerent vers Woytela.<br />
Qu'Allah soit sanctifie le jour OU ils entrerent dans Woytela.<br />
MaIheur aux musulmans, malheur aux paiens!<br />
Il y eut de nombreux martyrs a Woytela.<br />
lIs detruisirent completement Woytela.<br />
All courut et se dirigea vers Hamdallahi.<br />
Il y trouva Ahmadou Ahmadou,<br />
Entoure par les grtots musiciens jouant le "saygalare",<br />
Lui disant : Ahmadou Ahmadou !<br />
A la paresse de fUir, a la paresse de se cacher,<br />
Possesseur des boeufs et des fleches rouges.<br />
A ce moment, Ali arriva.<br />
All Woytela dit : Peul ?<br />
Ahmadou Ahmadou lui repondit : oui.<br />
Il dit :" Abort kana ,,3.<br />
1l1ui dit : qu'est-ce que tu racontes ?<br />
Illui dit : "A bort kana ?"<br />
11 lui dit : j'ai combattu un marabout, il m'a chasse,je viens me<br />
refugier aupres de toi.<br />
Metonymie designant les habitants du Fouta.<br />
Mettre sa main a sa bouche constitue un signe d'etonnement.<br />
Ali s'exprime en bambara, langue qu'ignore Ahmadou. Le griot traduira ses<br />
propos par la suite, en faisant parler Ali en poular.
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a wii : Fulake ?<br />
Aamadu mo Aamadu wii mo : naam<br />
a wii : Alia, Fulaa walla kele<br />
a wii : Alia kam ko d'id'o walla ko gooto 1 ?<br />
Aamadu mo Aamadou wii mo : Alia kay ko lIilaahun<br />
waahidum ll2<br />
a Jibinaani 0 jibinaaka<br />
a minnaami 0 minnaaka<br />
a wii mbo d'um noon tawi Alia ko gooto<br />
a wii mbo aahaa<br />
a wii mo : Alia anndi mo ndew-d'aa 00<br />
Kono Ceerno jom faandu 00 kam wondi e Alia<br />
Ndeke laaDii kam.<br />
a wii : Aamadu mo Aamadu ?<br />
Aamadu mo Aamadu wii mo : naam<br />
a wii : tawi Alia ko d'id'o<br />
a wii mbo : Aahan<br />
a wii : ad'on turoo gaa od'on njuula,<br />
Kono ko cukatel ngel ndew-d'on<br />
Mawd'o 00, ko Ceerno Fuuta oke 00 wondi heen.<br />
Aamadu mo Aamadu wii :<br />
Ko ngel Fuutayel toraokeyel ena riddu maa<br />
Ad'a doga dogdu lella e seeno ad'a woppi galle maa 3 .<br />
Wallaay jood'o d'oo, ma mi dannde e bone Sayku Umar.<br />
CORPUS II<br />
Soko 0 in n iima d'oo, ma mi riddu mo mi nawa mo 0 hoota<br />
Fuuta Tooro Aamadaa !<br />
Doon noon kodda Aadama Ayse Elimaan Siree<br />
Sammba Demmba Aali Muttaar Seydu Buubu Njanu.<br />
Jood'ii haa jamma ari,<br />
a wii De : EE Fuuta ?<br />
a wii : on ndiddii keefeero 00 naatii Hamdallaay<br />
Traduction en poular du vers precedent, ce qui denote le caractere<br />
profondement polyglotte qu'exigeait la profession de griot.<br />
Formule de la profession de foi musulmane. Ce trait montre que le<br />
Macina connaissait bien l'Islam, avant meme la venue d'Omar.<br />
Vers extrait d'un poeme epique compose par Hammat Samba Ly, disciple<br />
de Cheikh Omar. Voir notre these de IIIeme cycle. Ce procede : emprunt,<br />
citation, montre l'importance de l'improvisation dans l'art du griot.
CORPUS IT 399<br />
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2<br />
I1 dit : Peul ?<br />
Ahmadou Ahmadou lui dit : oui.<br />
Il dit : Allah, c'est un ou deuxl .<br />
Il dit : Allah, c'est deux ou un ?<br />
Ahmadou Ahmadou lui dit : Allah, c'est un seul Dieu.<br />
11 n'a point enfante, I1 n'est point enfante.<br />
nn' apas de petit frere, Il n'est pas le petit frere de quelqu'un.<br />
lllui dit : done, pUisqu'Allah est unique.<br />
Illui dit : oui.<br />
11 lui dit : Dieu seul sait celui que tu adores,<br />
Mais c'est le marabout a la gourde qui est avec Allah.<br />
Cela m 'est evident.<br />
Il dit : Ahmadou Ahmadou ?<br />
Ahmadou Ahmadou lui dit : oui.<br />
n dit : mais s'il y a deux Allah.<br />
11 lui dit : oui.<br />
II dit : vous vous courbez la en priant.<br />
Mais, vous n'adorez que le petit frere.<br />
Le grand frere est avec le marabout toucouleur.<br />
Ahmadou Ahmadou lui dit :<br />
C'est ce petit habitant du Fouta qUi t'a chasse,<br />
Tu fuis comme une gazelle au milieu de la plaine, abandonnant ta<br />
famille.<br />
Par Allah, reste ici, je te protegerai contre Cheikh Omar,<br />
S'il te dit un mot. je le renverrai jusqu'au Fouta-Toro.<br />
C'est la que le cadet de Adama Ayse Elimane Cire<br />
Samba Demba Ali Moutar Saidou Boubou Ndiagnou2.<br />
Quand arriva la nuit, illeur dit : oh ! gens du Fouta ?<br />
lIs lui repondirent : oui.<br />
Il dit : vous avez chasse un paien, il est entre a Hamdallahi.<br />
Combien de dieux (Allah) existe-t-il, un ou deux? Derriere cette question se<br />
profile le monotheisme qui a secoue le pantheon bambara.<br />
Rupture de construction.
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J oon i hol ko mbiy-ePon ?<br />
Be mbii :Haade 0 naatoyii Hamdallaay, njahen toon<br />
CORPUS 11<br />
LaamePo Hamdallaay tuubna mo so wonaa ePum kirsen moo<br />
o wii De : He Fuuta ?<br />
Be mbii mo : naam.<br />
o wii De : Elimaan yaooataa banndi mum tawa tintinaani<br />
ePum.<br />
Naange ngee muti, kodda Aadama Ayse<br />
Elimaan Sire Sammba Demmba Aali<br />
WaePjj waaju, hiirde.<br />
Fuuta kala renndi<br />
o wii : EE Fuuta ! EE DioDe Fuuta<br />
MbiePo nela ePum to Aamadu mo Aamadu<br />
voo yahru maayde, wotoo yaaru ngurndam.<br />
MbiePo yeewa cuusePo mi jogii ePoo oataake, nawana mi ePum<br />
to<br />
Aamadu mo Aamadu<br />
Kono joom mum noon, so fellitii yahde<br />
voo yahru maayde, wotoo yahru nguurndam.<br />
Alfaa Umar Ceerno Baylaa to kanel haftii darii.<br />
o wii mo : hee tokara ?<br />
Sayku Umar wii mo : Naam !<br />
o wii mo : So a winndii oataake fayde laakara kay<br />
so a yii kam a danii mo nel-ePaa.<br />
o wii : Nga ri 1 nande mbaynotoo-mi kanel,<br />
MbiePo fiitina teemedere almuudo<br />
MbiePo nammina teemedere neePePo.<br />
o wii : so a yii mi woppii 00 galle<br />
mi rewii e maaePa, ko miin rewri e maaePa sabi Alia,<br />
so mi maayii mi naata aljanna.<br />
Winndu innde am, subaka janngo mi yiidat e<br />
Aamadu mo Aamadu<br />
Oon 0 winndi innde mum jooePii ePaa.<br />
o wii : EE Fuuta ! EE DioDe Fuuta !<br />
Variante de ngati Oll sabi.
CORPUS IT 401<br />
789. A present qu'avez-vous decide?<br />
790. Ils dirent : puisqu'il est entre a Hamdallahi, allons-y.<br />
791. Le souverain de Hamdallahi va le convertir, sinon nous a110ns<br />
l'egorger.<br />
792. IIleur dit : oh, Fouta ?<br />
793. Ils lu! repondirent : oui.<br />
794. 11 leur dit : un Imame n'attaque pas son homologue sans l'avertir.<br />
795. Le solei! se coucha, le cadet d'Adama Ayse Elimane<br />
796. Cire Samba Demba All Moutar organisa une seance de predication.<br />
797. Tout le Fouta s'y rassembla.<br />
798. 11 dit : oh ! Fouta ! Oh fils du Fouta !<br />
799. Je recherche ici un preux hors pair,<br />
800. Pour l'envoyer aupres de Ahmadou Ahmadou,<br />
801. Qu'il parte pour mourir, qu'il ne parte pas pour vivre.<br />
802. J'ai la une lettre, qu'il la porte pour moi a Ahmadou Ahmadou.<br />
803. Mais si la personne se decide a partir,<br />
804. Qu'elle parte pour mourir, qu'elle ne parte pas pour vivre.<br />
805. Alpha Oumar Thiemo BaIla de Kanel se leva brusquement.<br />
806. 11 lu! dit : Homonyme ?<br />
807. Cheikh Omar lui dit : oui !<br />
808. 11 lui dit : si tu rediges une lettre pour l'au-dela et que tu me vois,<br />
tu as qUi envoyer.<br />
809. 11 dit : le jour Oll je fis mes adieux a Kanel,<br />
810. J'avais cent disciples a former,<br />
811. J'avais cent personnes a nourrir.<br />
812. 11 dit : si tu me vois abandonner une telle maison pour te suivre,<br />
c'est que je te suis par Allah ; si je meurs j'entre au paradis.<br />
813. Ecris mon nom, demain matin je verrai Ahmadou Ahmadou.<br />
814. 11 ecrivit son nom et il s'assit.<br />
815. 11 dit : oh Fouta ! Oh enfants du Fouta ?
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MbiePo ndaara ePoo gorko tooroodo kuiiiiePo<br />
deftere alquraana ndee J<br />
Aamadu?<br />
mi nela ePum to Aamadu mo<br />
Jannga alquraana 00 e yeeso muuePum faccira.<br />
Woto 0 yettu diine makko omo wostoo keefeeru.<br />
Joom mum noon so na yaha J<br />
¥oo yahru maayde<br />
Wotoo yahru nguurndam<br />
CORPUS 11<br />
Tooroodo ena wiyee Aamadu Almaami Alasaan haftii darii.<br />
o wii mbo : EE Sayku Umar ?<br />
Sayku wii mo : Naam<br />
o wii mo : AePa felliti J aePa yananaa J teemedde tato<br />
De ngondu ePaa naatoooe kalwaoee<br />
o wii mbo : Aahan<br />
o wii mo : kamoe kala dacPcPo mi heen quraana alaa<br />
Koon i winndu in nde am) subaka jan ngo dee mi<br />
yiidat e Aamadu mo Aamadu.<br />
Sabu rewn i mi e maa ko mboePo fella diine Alia<br />
so mi maayii<br />
mi naata a Ijan na.<br />
Oon ne 0 winndi innde mum.<br />
o wii De : Ee Fuuta ! EE DioDe Fuuta !<br />
o wii : MbiePo ndaarta mona yahra maayde J<br />
yahrataa nguurndam ;<br />
Tawa na waawi fiyde coowti)<br />
Weddoo fetel mum dow J<br />
fetel 00 saamaan i.<br />
teoooo tawa<br />
Mi nela ePum e Aamadu mo Aamadu.<br />
Mi anndina Aamadu mo Aamadu)<br />
HaePaani mi haode e mum dee mi alaa haoeteeoe.<br />
Wotoo Y'ettu diine makko omo wostoo keefeeru.<br />
Bootol sawa Haako haftii darii.<br />
Fiyannde mum dilli.<br />
o werlii fetel 00 dow<br />
Bajo waePi coowti iiippii e leydi
CORPUS IT 403<br />
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J e recherche panni vous un Torodo qui a memorise le Coran, pour<br />
l'envoyer aupres d'Ahmadou Ahmadou ?<br />
Qu'lllise le Coran en sa presence et qu'il traduise ce qu'll a lu.<br />
Qu'll ne troque pas la religion contre l'idolatrie, le paganisme.<br />
Mais que le candidat parte<br />
En se disant qu'll va mourir,<br />
Qu'll ne parte pas pour vivre.<br />
Un Torodo appele Ahmadou Almamy Alassane se leva droit.<br />
Hlui dit : oh Cheikh Omar?<br />
Cheikh lui dit : oui.<br />
Hlui dit : tu es sur et certain que d'entre tes trois cents marabouts<br />
qui font la retraite spirituelle...<br />
Hlui dit : oui.<br />
Hlui dit :... nul ne me surpasse en Coran.<br />
De grace, ecris mon nom. Demain matin, je verrai Ahmadou<br />
Ahmadou.<br />
Parce que je ne t'a! suivi qu'a cause de la guerre sainte, si je meurs,<br />
j'entre au paradis.<br />
Celui la aussi, II ecrivit son nom.<br />
Illeur dit : oh Fouta ! 6 fils du Fouta !<br />
Il dit : je cherche quelqu'un qui va pour mourir qui ne va pas pour<br />
vivre ;<br />
Capable de faire de la parade gyrnnique1:<br />
Jeter son fusH en l'air, le reprendre avant qu'H ne tombe a terre.<br />
Pour que je l'envoie aupres d'Ahmadou Ahmadou.<br />
Pour que j'apprenne cl Ahmadou Ahmadou que,<br />
Ce n'est pas parce que je n'ai pas de combattants, que je ne lui ai<br />
pas livre bataille.<br />
Qu'll n'echange pas la religion contre l'infidelite.<br />
B6tol Sawa Hako se leva bien droit.<br />
Son coup de fusll tonna.<br />
Hjeta son fusll en l'air.<br />
Le bonhomme fit une parade, puis se posa a terre.<br />
Fiide coowti signifie litteralement faire une demonstration de souplesse<br />
physique. C'est une activite qui revient aux lutteurs, consistant<br />
generalement a faire des roulades ou a soumettre ses bras et ses jambes a<br />
des exercices penibles.
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Le fusil vint, ill'attrapa au vo!, du revers de la main.<br />
11 dit : oh Cheikh Omar.<br />
Cheikh lui dit : oui.<br />
Il dit : en realite1 tu veux Simplement avoir une confinnation.<br />
Mais si tu as quelqu'un de ma trempe, tu as qUi envoyer.<br />
11 dit : pUisque la nuit que tu passas chez moi au Fouta, tu m'as<br />
trouve avec quatre epouses peules,<br />
Chacune d'entre elles etant plus belle que l'autre,<br />
Recevait chaque fois plusieurs ecuelles de lait dans sa case.<br />
J'ai repudie toutes ces femmes.<br />
J'ai offert a chacune sa dot2.<br />
C'est moi qUi t'ai suivi a cause d'Allah.<br />
Allah sait que celui qUi a abandonne une telle maison<br />
Est celui qUi te suit [par Allah] sincerement, plus loyalement.<br />
Par Allah ecris mon nom.<br />
Demain matin je verrai Ahmadou Ahmadou.<br />
Il ecrivit le nom de celui-la aussi.<br />
1l1eur dit : 6 Fouta ! 0 enfants du Fouta !<br />
Je cherche parmi vous un homme qUi maitrise le cheval,<br />
Qui sait faire une belle demonstration sur son cheval,<br />
Jetant son fusH en l'air, puis le rattrapant au vol,<br />
Cheval au galop.<br />
Jetant a la fois son pied gauche et son pied droit, les trainant,<br />
tandis que son fusH ne tombe pas.<br />
Montrant a Ahmadou Ahmadou:<br />
Que j'ai des combattants au sol,<br />
Que j'ai des combattants a cheval.<br />
Qu'il ne troque pas la religion contre l'infidelite.<br />
Koly Mody Sy du Boundou se leva net.<br />
Il lui dit : oh Cheikh Omar !<br />
Cheikh lUi dit : oui.<br />
Il lui dit : ecris mon nom,<br />
Demain, je verrai Ahmadou Ahmadou.<br />
11 dit : quand tu vins au Boundou,<br />
Njuud'ka e raoDidka ou njuudka e ndaoDa longue ou courte (le mot haala,<br />
parole est sous-entendu). Parole longue ou courte, autrement dit, bref.<br />
La dot devait etre remboursee en cas de repudiation.
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2<br />
Taw-ePaa baaba am ko laamePo<br />
Na haooa J na soka J na dummba.<br />
An ndi noon goppuePo laa mu rewi e maaePa J<br />
Oon kay rewrii e maa sabi Alia.<br />
Tawi ko welde tan kay ouraani laamu.<br />
Kooni win ndu innde am.<br />
Subaka janngo dey kam<br />
mi yiydat e Aamadu mo Aamadu.<br />
Oon 0 winndi innde mum<br />
o wii : EE Fuuta ! EE DioDe Fuuta<br />
MbiePo ndaara gorko mo nul-mi<br />
Mbona yahra maay deJ<br />
Vahrataa nguurndam.<br />
Waasa yeewde gaawe boePeeje ePee<br />
Jumpa batu 00 haa yettoo Aamadu mo Aamadu J<br />
Nannga e daande wutte mum<br />
Bippa daande wutte makko laabi tati<br />
Wiya : Aamadu mo Aamadu accu Sayku UmarJ<br />
accu Sayku Umar<br />
So maayoowo nanngii guroowo deeJ<br />
Mayoowo maayatJ guroowo heddoo.<br />
Holi bakkilii ePo waePde ePum ?<br />
CORPUS 11<br />
Alfaa Umar haftiiJ wiyi e daande Sayku Umar teepl J bippi.<br />
Sayku wii mo : A Ifa wonaa miin wiyaa J<br />
Wiyaa ko Aamadou mo Aamadu.<br />
o wii : kono Sayku am 2 J mo waeP maa n iiJ<br />
Hulataa waePde n ii tagaaePo.<br />
So neePePo hulii Alia hulataa maayde.<br />
Koon i win ndu in nde am.<br />
Oon ne 0 win ndi innde muuePum.<br />
o wii : mbiePo ndaara ePoo gorko baawePo haaldeJ<br />
BaawePo haalde ko weli.<br />
Onomatopee marquant un broit legerement violent.<br />
Mon Cheikh,le possessif marque l'affection.
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Rewana mi e oee cfloo DioDe Fuuta wacfloe walanteer 1<br />
Be cuddoo leppi leydi subaka janngo gila naange riawlaani,<br />
Jaggana mi De ;<br />
Hay so gorko no maaya, yoo taw leeoi oanndu mum no<br />
ngimmii<br />
Hol mbona waawi wadande mi cflumen ?<br />
Tawa no yahri maayde, yahrataa nguurndam.<br />
Farba deY'Y'i haa huunde juuti<br />
Farba wii mbo : cflum kay, ouri anndude Fuuta ko oiye.<br />
Nel Aamadu moo.<br />
Fuuta fow Aamadu moo ouri anndude.<br />
Sabi ko waliyu, ko 0 Diy waliyu.<br />
Ombo anndi ko winndii,<br />
Ombo anndi ko winndaaki.<br />
Soa tawii ko cflum ndaartata kay, nel oon.<br />
Ko oon waawi yettinde ngal nelal.<br />
Sayku Umar deY'Y'i<br />
Haa huunde juuti, sayku wii :<br />
EE Fuuta ! EE oibbe Fuuta.<br />
Mbicflo ndaara gorko baawcflo haalde.<br />
Gannducflo ko haalata.<br />
Rewana mi e oicfloo DioDe Fuuta wacfloe "walanteer"<br />
Janngo, jaggana mi De haa leeoi oalli maooe ngimmoo<br />
Hay so gorko no maaya, yoo taw leeool Don ndu mum no<br />
immii.<br />
Mi rokka cflum ne hamdaat karme.<br />
Tan Faroa Guwaa wii :winndu innde am.<br />
Acfla anndi Fuuta fow miin dacfli haalde.<br />
Acfla anndi Fuuta fow miin ouri waawde haalde.<br />
Winndu innde am, subaka jaongo mi yiydat e maooe<br />
Oon ne 0 winndi innde mum.<br />
Joocflii haa jamma 00 jenngi<br />
Farba sawa Guwaa wii :<br />
CORPUS 11<br />
Deformation et poularisation du mot : volontaire. Peut-etre convient-il<br />
de voir par Ui l'influence du vocabulaire militaire, par suite du retour<br />
des anciens combattants, qui participerent aux deux guerres mondiales
CORPUS IT 409<br />
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4<br />
Pour qu'il suive ces fIls du Fouta, volontaires,<br />
Candidats cl la mort pour demain matin1,<br />
Que l'orateur les exalte,<br />
Car, meme si un homme doit mourir, il est bon de le flatter2 .<br />
Qui peut executer une telle tache?<br />
Qui accepte de les exalter et d'affronter egalement la mort ?<br />
Farba se tut un bon moment.<br />
Farba lui dit : dans ce cas, ton fUs surpasse tout le Fouta en science<br />
Envoie ton fIls Ahmadou.<br />
De tout le Fouta, ton HIs est plus savant,<br />
Car il est saint, fIls de saint.<br />
n connait tout ce qui est ecrit3.<br />
n connait tout ce qui n'est pas ecrit.<br />
Si tu recherches reellement quelqu'un, envoie-Ie.<br />
C'est lui qui peut transmettre un tel message.<br />
Cheikh Omar se tut.<br />
Un bon moment apres, Cheikh dit :<br />
o Fouta ! 0 enfants du Fouta !<br />
Je cherche quelqu'un qui sait bien parler,<br />
Qui sait ce qu'il dit,<br />
Qu'il suive ces enfants du Fouta, volontaires;<br />
Demain, qu'illes exalte ann que les poils de leur corps se levent,<br />
Meme si un homme doit mourir que ses poils se levent.<br />
Je vais lui donner une mesure d'or.<br />
Alors Farba Gouwa dit : ecris mon nom.<br />
Tu sais bien que je surpasse tout le Fouta en parole.<br />
Tu sais bien que je parle mieux que tout le Fouta.<br />
Ecris mon nom, demain matin je les verrai.<br />
n ecrivit aussi le nom de celui-ci.<br />
Quand la nuit s'epaissit,<br />
Farba Sawa Gouwa dit4 :<br />
Mot a mot : qui se couvriront demain d'etoffes en terre. L'enterrement est<br />
compare a une veture en terre.<br />
Mot a mot : meme si un homme doit mourir, que les poils de son corps se<br />
levent.<br />
Ce qui est ecrit I ce qui n'est pas ecrit ; les lois ecrites et les lois non<br />
ecrites.Il s'agit des sciences exoteriques et des sciences esot6riques.<br />
Monologue interieur.
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Aan del a naati d'oo e eereer 2<br />
Sabi binndud'o innde mum sabi hamdaat kaooe<br />
Kam ne so maayii, ko oiy mum ronata<br />
Dum kam alaa ko nafi joom mum<br />
Janngo mi haaytii yahde miin.<br />
Farba fini tan dawani sayku,<br />
Galle sayku gila subaka law.<br />
Owii: Miin da a 3 winndiino innde am haOki jamma.<br />
Mbid'o yahda e wad'oe walanteer<br />
Na koota laa ka ra oee<br />
Kono momtu,miin mi tawii mi wonaa cellud'o.<br />
Sayku ndaari mo ja li, wiyi mo :<br />
Wallay Farba, mi woondiri mawngu Alia,<br />
Silaama am kaa mi tafanaano d'um gawlo.<br />
Kono ko kud'ol am suuwi e ndahaa am winndi koo<br />
wonaa ko na firtee.<br />
Soko a yahaan i kay, ko maayde pinataa<br />
Subaka janngo mi dawa mi suddu maa leppi leydi<br />
Mi rokku maa gural baaba Jaraa iilu 4<br />
Farba hooti, 0 wii : UUhuum kam.<br />
Waliyaagal maa kam heyaani e woroe saka e rewoe.<br />
Kono so tawii won ko nganndu d'aa noon<br />
A danii d'o kuccind'aa.<br />
Haadi Aamadu mo Aamadu, mbona fina subaka<br />
Ujunnaaje oiy pullo na sawndoo d'um<br />
Aan kaya danii ko kao-d'aa ko wonaa Faroa.<br />
Farba arti noddi oiy mum<br />
o wii : Miin de mi yahiino to Sayku<br />
Mi wiyno yo 0 momtu inn-de am, mi haayti yahde<br />
Bid'd'o 00 wii mo Aan ne kay Baaba ko a gawlo,<br />
Kono ko a dimo.<br />
Aan ne hol no innde maa winndirtee<br />
Monologue interieur.<br />
Poularisation du fraDl;ais : erreur.<br />
Contraction de : miin dea winndiino.<br />
Azrael. range de la mort.<br />
CORPUS II
CORPUS IT 411<br />
936. Tu as commis la une erreur grave,<br />
937. Car s'inscnre pour une mesure d'or<br />
938. Devant etre heritee par son fUs, si l'on meurt,<br />
939. Cela n'aura servi de rien.<br />
940. Demain, je refuserai de partir.<br />
941. Au reveil, Farba se dirigea vers le Cheikh des le petit matin.<br />
942. 11 lui dit: 0 Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba All<br />
Moutar.<br />
943. Cheikh lui dit: oui.<br />
944. 11 dit : moi, tu avais ecrit mon nom hier nuit.<br />
945. Je devais accompagner les volontaires pour l'au-dela,<br />
946. Mais efface [ mon nom], moi j'ai trouve que je ne me porte pas<br />
bien.<br />
947. Le Cheikh le regarda, rit, puis lui dit :<br />
948. Par Allah, Farba, je le jure par la majeste d'Allah,<br />
949. Je n'avais pas commande ma lance pour un griot,<br />
950. Mais ce que ma plume a ecrit, a partir de l'encrier n'est pas a<br />
effacer,<br />
951. Si tu ne vas pas, tu te reveilleras mort.<br />
952. Demain matin, je te couvrirai d'etoffes de terre.<br />
953. Je t'enverrai au village de Pere Azrael1.<br />
954. Farba rentra. 11 dit: oh!<br />
955. Ta saintete ne peut etre contenue par des hommes, a fortiori par<br />
des femmes.<br />
956. Mais si tu sais quelque chose reellement,<br />
957. Tu as OU le prouver :<br />
958. Ahmadou Ahmadou qui, chaque matin,<br />
959. Est entoure de milliers de fUs de Peuls,<br />
960. Constitue un enjeu plus serieux que Farba.<br />
961. Farba revint et appela son fils.<br />
962. 11 dit: moi,je m'etais rendu chez Cheikh.<br />
963. Je lui avais demande d'effacer mon nom, je ne voulais plus partir.<br />
964. Son flls lui dit: toi aussi papa, tu es certes griot,<br />
965. Mais tu es noble.<br />
966. Toi aussi, comment peut-on ecrire ton nom<br />
1 Azrael l'ange de la mort. Il s'agit d'une periphrase designant l'au dela.
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Fuuta kala na jooePii J mbiyaa yoo innde maa momte ?<br />
o wii : goonga J ko aan e makko ndenndi "kommbiin" 1<br />
IPuur" 2 hamdatel kaooe ngel 0 rokki mi ngel<br />
So ko mi maayiiJ aan ne kenaa ePum J aan ne aePa Fiaama<br />
Aan ne ko a gawlo<br />
o wii : ePum ne kay ko noon woniri e mukko baaba.<br />
Huunde kala ko sayku woondiri Alla J<br />
AePa an ndi ko 0 baePoowo.<br />
Bajo en mbaali lelaade J<br />
mawngu Alia<br />
Farba kam waai ePaanaaki<br />
Be pini sabaka J dimaaePi ePii kannaama<br />
Be ndariima damal galle Sayku.<br />
o wii ne : Jooni noon on ngarii ?<br />
Be mbii : Min ngarii<br />
o wii : mbiePa Fiaagii on J kala gooto e mon<br />
Ko nelaa woto nen n itin J<br />
Mi yiePaa haala am nennitinee J<br />
Kono woto Imaokinee"3J mi yiePaa haala am "maokinee"<br />
o darii ePo yeeso pucci manne epoo.<br />
o waePi tuggordu nduu e leydi.<br />
Bajo win ndi haa gayn i.<br />
o wii : onon kala taanoePee epoo.<br />
Kamne kala ne taanii J<br />
o wii ne: Fuuta!<br />
Be mbii mo : Taal !<br />
o wii ne : Ngartiree hakillaaji mon<br />
Tawi wonaa cuuePi nalli mon<br />
Han nde a laa ko heddotoo Hamda Ilaay<br />
On ngartataa ePoo calmondiren<br />
Tan Farba turii e leydi luukii<br />
Jaa maalin J<br />
Poularisation de<br />
Poularisation de<br />
Poularisation de<br />
jaa elmin<br />
CORPUS 11<br />
ne ndaroyii too e binndol makko hee<br />
combine.<br />
pour.<br />
manquer (avec le sens de soustraire).
CORPUS IT 413<br />
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En presence de tout le Fouta, et que tu dises qu'on l'efface par la<br />
suite?<br />
n dit: c'est vrai, tu es de connivence avec lui.<br />
Pour les quelques grammes d'or qu'il m'a donnes,<br />
Pour que si je meurs, tu puisses en heriter et en disposer.<br />
Va, toi aussi tu es un griot.<br />
Il dit : en outre, Cheikh a dit que... si je ne vais pas, U me tue.<br />
11 dit: c'est sur, qu'll en est ainsi papa.<br />
Tout ce qUi fait jurer Cheikh par la majeste d'Allah sera execute<br />
par lui.<br />
Les preux dormirent cette nuit alors que Farba veilla.<br />
Le matin, au reveil, les destriers furent selles.<br />
Ils se tinrent devant la maison de Cheikh,<br />
11 leur dit : a present vous etes venus ?<br />
Ils dirent : nous sommes venus.<br />
Il dit : je demande a chacun d'entre vous,<br />
Qu'il ne depasse pas les termes de son message,<br />
Je ne veux pas qu'on ajoute a ma parole ;<br />
Mais aussi ne retranchez rien ;<br />
Je ne veux pas que ma parole soit amputee.<br />
Il se tint debout en face de leurs chevaux,<br />
11 posa son baton de pelerin a terre,<br />
Le Saint Homme ecrivit jusqu'a la fm.<br />
11 dit: enjambez tous par ici<br />
Ils enjamberent tous par l'endroit indique, et se tinrent par dela<br />
ces ecritures.<br />
Illeur dit: Fouta!<br />
Ils lui dirent: Tall!<br />
11 leur dit: soyez raisonnables1.<br />
A l'exception de vos squelettes2,<br />
Rien ne subsistera de vous aUjourd'hui a Hamdallahi.<br />
Vous ne reviendrez pas ici pour qu'on se salue.<br />
Alors Farba se baissajusqu'a terre, puis cria :<br />
Le Riche, l'Erudit<br />
Mot a mot : ramenez vos esprits.<br />
Mot a mot : a l'exception de la demeure de vos corps.
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Jaa ladabin J jaati jumaalin.<br />
"Akaramayni ibni akaramayni"<br />
EE toorooda I tooroooeJ wa IiyaI wa Iiyaaoe<br />
Amiral muuminiinaJ juulePo kulePo Alia.<br />
Ko aan janngi wiyaa Ceerno Umar<br />
Facciri wiyaa Tafsiiru UmarJ<br />
l\Jekki safaa e Marwa wiyaa AI Hajji Umar<br />
Tikka Alia tikka<br />
Haoee Alia Jinnga<br />
KoePo SubakaJ<br />
jom wuro naange e hooreJ almaami salifanaa.<br />
CORPUS 11<br />
Huunde fow ko ngunndo ndirno-ePaa e JoomiraaePo ko goonga.<br />
Jooni dee gawlo maa weltiima.<br />
DimaaePi njaaoani Hamdallaayl.<br />
Nde oe paandii HamdallaaYJ gural Farba Guude<br />
Be cooynii duuballeeje 2 Hammdallaay ePee<br />
Do Aamadu mo Aamadu batata ePoo.<br />
Biooe maasinaokoooe oee ne pirlii ePum<br />
Gooto fow na Y'etti gaawe nayiJ joy<br />
Na falii e koyePe muuePum<br />
Eoe cooynii gaawe ePee na pirlii to les duuoalleewe ePee.<br />
Kamoe e pucci FuutaJ nelaaoe oee ngon i e njeddondirde.<br />
WocPf:le na mbiya : Enen dee les duuballeewe ePee<br />
Maataw ko ndiyam won i toon.<br />
WoePoe na mbiya : maataw wonaa ndiyam<br />
Maataw ko naange amnata oikkon muuePum<br />
Maataw ko ePum cooyn i ePen toon.<br />
Ndeke ko gaawe.<br />
Be ngari haokadi haa oe njoofii e duballaaje Hamdallaay.<br />
Batu Aamadu mo Aamadu 00 fof ndaari<br />
Be mbii : oee de ko Fuuntaokoooe<br />
Alfaa wii : Bee de ko nelaaoe AI Hajj Umar.<br />
Intermede musical.<br />
Ficus thonningi.
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Haa dimaaji d'ii njoofii, bajo en naongi taltalii.<br />
Afaa Umar Ceerno Bayla wii : Amadu mo Aamadu ?<br />
o wii mbo : Naam<br />
o wii : ko min honoe moo<br />
Ko min nelaaoe AI Hadj Umar.<br />
Med'en nelaa e moo.<br />
Omo joginoo d'oon bammbaad'o makko gooto<br />
o wii : njippinoyee Fuutaokoooee nee<br />
Ned'anee oe ndiyam oe lootoo<br />
Ndokkaa oe riaamde, oe riaama<br />
Coodanaa ne gooro<br />
Dimaaji manne ndokkaa d'umen nampooji<br />
"Bisimilla" mon haa poofto-d'on<br />
Waktu alaasara ngaron njettinon nele mood'on.<br />
Bammbaad'o 00 ardii ne haa galle muud'um.<br />
Gasd'e d'e d'ee ngasaa,<br />
Gubbi ngubbaa.<br />
Gaweejecokkaa,<br />
Pucci ceoanaa gafakkeeji.<br />
Jawd'i kirsaa,<br />
Bottaaje caggi naa.<br />
Goro soodaa,<br />
Lehe nadtinaa.<br />
Bajo en riaami haa kaari,<br />
Y'akki goro haa oaaotii.<br />
Haa alaasara 00 yonti<br />
Be njuuli oe cilmin i<br />
Taballeeji makko d'ii jeed'id'i fow,<br />
kaOko Aamadu mo Aamadu, d'i njaayi.<br />
Tan wuro ngoo renndi.<br />
Wammbaaoe oee no mbiya mo<br />
Tuggid'o falo lefol geenol<br />
CORPUS II
CORPUS IT<br />
1028. Alors les destriers arriverent, les preux freinerent les chevaux.<br />
1029. Alpha Oumar Thiemo Bayla dit: Ahmadou Ahmadou ?<br />
1030. Illui repondit : oui.<br />
1031. Il dit : nous sommes tes hotes.<br />
1032. Nous sommes envoyes par El Hadj Omar.<br />
1033. Nous sommes envoyes vers toi :<br />
1034. Il y avait la un griot musicien.<br />
1035. Il dit : recevez les gens du Fouta :<br />
1036. Cherchez-leur de l'eau pour qu'ils se baignent :<br />
1037. Donnez-leur de la nourriture afm qu'ils mangent ;<br />
1038. Achetez-leur de la cola.<br />
1039. Donnez a leurs chevaux de quoi manger,<br />
1040. Soyez les bienvenus, apres vous etre reposes,<br />
1041. L'apres-midi1, venez transmettre vos messages.<br />
1042. Le griot musicien les dirigea chez lui.<br />
1043. Les trous furent creuses2<br />
1044. L'herbe fut coupee3 .<br />
1045. Du mil fut pile.<br />
1046. Des musettes furent attachees aux chevaux.<br />
1047. Des beliers furent egorges.<br />
1048. Des repas furent cuits.<br />
1049. De la cola fut achetee.<br />
1050. Des calebasses furent approchees.<br />
1051. Les preux mangerent jusqu'a satiete. puis<br />
1052. Croquerent de la cola.<br />
1053. A l'heure de la troisieme priere canonique,<br />
1054. Ils prierent, et a la fin de la priere ;<br />
1055. Les sept tarns-tarns royaux<br />
d'Ahmadou Ahmadou, retentirent.<br />
1056. Immediatement le bourg se reunit.<br />
1057. Les griots musiciens lui disant :<br />
1058. Appuye, tordant son cou4,<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
417<br />
Le alansara constitue la troisieme priere canonique musulmane et se situe<br />
entre 16h et 17h.<br />
11 s'agit des trous oil sont plantes des pieux auxquels sont attaches les<br />
chevaux.<br />
L'herbe servant a nourrir les chevaux.<br />
Signe de fantaisie. de vanite bien placee ici.
CORPUS IT 419<br />
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2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
L'homme au long cou1.<br />
"kikka kaa waaja kaaiiina waaja.<br />
kikka keke waaja, keke neeri waaja.<br />
kikka keke, kikka kaka.<br />
kikka kaall, keke waaja"2.<br />
Que la paix soit avec toi, quand mon Peul se fache,<br />
Le Macina passe la nuit cl veiller.<br />
JuSqu'cl ce que tous les f1ls du Fouta se rejoignent.<br />
Il dit : soyez les bienvenus, transmettez vos messages.<br />
Le premier intervenant fut Alpha Oumar Thierno Bayla de Kanel,<br />
Le f1ls de la vertueuse, le Torodo authentique.<br />
11 plongea la main dans la poche, y retira la lettre du Cheikh.<br />
Il dit : cette lettre provient du Noble, fils du Noble.<br />
MOi, c'est ce que Cheikh Omar m'avait envoye.<br />
LUi, Ahmadou Ahmadou,<br />
Il se retouma vers le Macina, et dit: 6 Macina.<br />
Ils lui dirent: oui.<br />
Il dit : Dieu a donne cl Omar, le Torodo, de bons lecteurs de lettres<br />
redigees cl l'aide de caracteres coraniques3 telles que Allah les a<br />
prescrites.<br />
C'est ainsi qu'Allah avait dit qu'on lise son Livre.<br />
En realite Allah a donne cl Omar le Torodo, un bon lecteur de lettre<br />
redigee en arabe.<br />
En ce moment Farba Sawa Gouwa se leva.<br />
Farba Sawa Gouwa lUi dit : Peul regarde moi par ici.<br />
Il le regarda.<br />
n lui dit : ceux-ci sont des enfants4.<br />
Tu sais que, pour une commission, ce sont les enfants qu'on<br />
envoie.<br />
On n'envoie pas les grandes personnes 5:<br />
Canon esth6tique peul.<br />
Devise musicale du heros peul. Le griot compose ici un poeme<br />
essentiellement fonde sur la rime, la musique et le rythme.<br />
Le griot confond ici le Coran, vulgate musulmane et les caracteres arabes.<br />
Cette confusion, est entretenue dans une large couche de la population.<br />
Mot a mot : tu sais que, quand on veut envoyer quelqu'un, c'est aux enfants<br />
qu'on recourt.<br />
Mot a mot : Les grandes personnes ne viennent pas.
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2<br />
Waawoe Janngude Ileeteruuji"!oee<br />
nana ngondi e kodda Aadama Ayse Eliman<br />
Siree Sammba Demmba Aali Muttaar<br />
tBeen so pinnii cPaccata IIleeteer" ko e jiifa<br />
Kanum1en ngona e janngudeJ tawa IIleeter ll 00 yaltaan i.<br />
oeen J ina ngondi e makko.<br />
tBe takkii e sara Farba J De mbii :<br />
Farba J Sayku dee wiino woto en oennitin haala mumJ<br />
kono woto en IImaokin"2.<br />
o wii : Hey ko onon mbiyaa ; wonaa min<br />
Miin ko mi gawlOJ ko weli mi kala mi haalat<br />
o wii: Aa ha n hol i gocPcPo ?<br />
Aamadu A Imaami A lasaan da ri i.<br />
Jaggee quraanaJ haala Alia kaa.<br />
Omo JanngaJ Omo faccira.<br />
Nde 0 gaynata Janngude<br />
Tawi goncPi Aamadu mo Aamadu<br />
Piondirii waare.<br />
Haa ogayni JanngudeJ owii:<br />
Miin de ko cPum nelanoo mi<br />
CORPUS 11<br />
Sayku Umar wii ma nena riddi keefeero nena waali galle maa<br />
Yaa tuubn u keefeero oOJ so cPu um a laa<br />
Tottaa moo 0 tuubna 0 tottu maa.<br />
o wii : Sariya Alia wii so keefeero 00<br />
saliima tuubde yo a hirsu cPum J<br />
So cPuum alaaJ tottaa mo 0 hirsa 0 tottu maa ubbaa<br />
Haadi keefeero 00 ko necPcPo maa.<br />
Miin dee ko cPum nelanoo mi.<br />
Aamadu mo Aamadu deY'Y'i haa huunde juuti<br />
o yiili hooreJ gite dee mbeddii goncPi<br />
o wii : Hayaa ko Maasina<br />
Be mbii mo : naam<br />
o wii :alla hokki Umar Tooroodo waawoe Janngude haala<br />
Alia.<br />
Pluriel de le etee r ou lettre.<br />
Poularisation du verbe : manquer, id dans le sens de diminuer.
CORPUS IT 421<br />
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2<br />
Les specialistes de la lecture des lettres sont restes aupres du<br />
Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba All Moutar.<br />
Ceux-la. une fois qu'ils se fachent. ils laissent la lettre en poche.<br />
Et se mettent a lire. alors que la lettre n'est pas sortie de leur<br />
poche. De tels lecteurs sont restes pres de lui.<br />
Us s'approcherent de Farba. puis dirent :<br />
Farba. Cheikh a dit de ne rien ajouter a sa parole. mais aussi de ne<br />
rien y retrancher.<br />
U dit: eh. c'est de vous qu'il s'agit ; et non point de moL<br />
Moi. je suis griot. je dis tout ce que je veux.<br />
U dit : oui. qui d'autre ?<br />
Ahmadou Almamy Alassane se leva.<br />
11 se mit a reciter le Coran. cette parole d'Allah.<br />
Recitant et traduisant.<br />
Avant qu'il ne finisse de lire.<br />
Les lannes d'Ahmadou Ahmadou<br />
S'etaient nouees a son menton1.<br />
A la fm de la lecture. il declara :<br />
Voila ce qu'on m'avait envoye..;<br />
Cheikh Omar te dit qu'il a chasse un paien qui a trouve refuge pres<br />
de toL<br />
Convertis le paien ou alors<br />
Envoie-le lui afin qu'ille convertisse et qu'il te le renvoie.<br />
11 dit : la loi divine dit que si le paien en question refuse de se<br />
convertir. egorge-le.<br />
Sinon. donne-Ie lui pour qu'il l'egorge et te retourne son corps<br />
pour que tu l'enterres.<br />
Puisque le paien est ton homme.<br />
Voila ce qu'on m'a envoye.<br />
Ahmadou Ahmadou se tut un bon moment.<br />
11 touma la tete. ses yeux s'inonderent de lannes.<br />
11 dit : oh Macina.<br />
Us lu1 repondirent : oui2.<br />
Il dit : Dieu a donne a Omar le Torodo de bons lecteurs de Coran.<br />
Mot a mot :a son menton.<br />
Mot a mot :qui a passe la nuit chez toL
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Ko n ii tigi AI/a wiinoo<br />
Yoo deftere al quraana ndee njanngire.<br />
Esksen Allay gol/e mum !<br />
Koon i won ko Alia rokki Fuutaokoooe.<br />
CORPUS 11<br />
Tawi Farba dariima.<br />
o wii mo : EEheey maa pullo am gorko<br />
o Ndaari mo<br />
o wii :wallaay, mi wiinoma ko sukaaoe neletee, mawoe<br />
ngaraan i.<br />
Woroe tooroooe nan toon, DioDe soknaaoe,<br />
oeen so payii e Janngude deftere quraana,<br />
CBe nanngat deftere ndee De mbeddoo dow<br />
Deftere ndee na saamira<br />
I{)erewol crerewol, crerewol crerewol<br />
Nde memata leydi tawi De ngaynii crum Janngude<br />
CBeen nana ngondi e kodda Aadama Ayse Elimaan Sire.<br />
Sammba Demmba Aali Muttar.<br />
Be noddi Farba, De mbii :<br />
Farba sayku dey wiino woto en oennintin haala mum.<br />
o wii : ko onon mbiyaa wonaa miin.<br />
Koon i njokee haaju mon,<br />
Ngoppee Farba ko haaju mum gollata<br />
o wii : Aahaa holi gocrcro?<br />
Tawi Bootol sawa haako wii "gi p"!<br />
Bajo wii fetel 00 haa wayino mbiip,<br />
o werli fetel 00 dow<br />
Bajo fiitin i tal talol<br />
Bajo fii cowti yeeso e caggal<br />
Tawi fetel 00 arii,<br />
A jawlii crumen 1<br />
o dicii nduya hofru,<br />
Nduya 0 darn i crum<br />
o tuggi fetel 00 e leydi,<br />
Fiyan nde ndee wii : "ga rill.<br />
1 'Dume nl d'um variantes.
CORPUS IT 423<br />
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C'est vraiment ainsi que Dieu avait ordonne que le Coran soit lu.<br />
Que soit sanctifiee la sanction divine.<br />
En realite, Dieu a octroye des dons aux gens du Fouta.<br />
A l'instant Farba se leva.<br />
Il dit : oh, Homme Peul!<br />
Il le regarda.<br />
Il dit : par Allah, je t'avais dit que ce sont les enfants qu'on envoie,<br />
les grandes personnes ne sont pas venues.<br />
Les Torodos sont hi-bas, fils de femmes vertueuses,<br />
ceux-la, s'ils se decident a lire le Coran1,<br />
Ils jettent le livre la-haut,<br />
Et le livre se met a tomber,<br />
Feuille par feuille, feuille par feuille.<br />
Avant qu'elle2 ne tombe a terre, ils ont fini de la lire.<br />
Ceux la sont restes aupres du Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire<br />
Samba Demba All Moutar.<br />
Us appelerent Farba et lui dirent :<br />
Farba, le Cheikh avait dit de ne pas exagerer ses propos.<br />
Il dit : il s'agit de vous et non point de moL<br />
En fait, occupez-vous de vos affaires.<br />
Laissez Farba en paix, il s'occupe de ce qui le regarde.<br />
Il dit : oui, qui d'autre ?<br />
Immediatement. B6tol Sawa Hako se leva.<br />
n leva bien droit son fusil,<br />
11 jeta le fusil.<br />
Le preux fit un coup.<br />
Il se jeta en avant, puis en arriere.<br />
Au meme moment, le fusH, qui etait toujours en l'air, retomba,<br />
Alors. B6tolle saisit au vol.<br />
11 plia un genou,<br />
Il planta l'autre au sol,<br />
Il tint le fusil droit au sol,<br />
Puis, appuya sur la gachette et le coup tonna : "gar" !<br />
Mot a mot :quand ceux-Ia sont faches pour lire le Coran.<br />
Elle designe ici une feuille.
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o wii : miin ko mi pullo haala am heewaani 1<br />
Sayku Umar wii maa<br />
Nena riiwi keefeero ena waali galle maa<br />
yo a tuubn u keefeero 00, so
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II dit : mol, je suis un peul, je ne parle pas beaucoup1.<br />
Cheikh Omar te dit qu'H a chasse un paien qUi a trouve refuge<br />
aupres de toi.<br />
Convertis-Ie ou alors retourne-Ie lui ann qu'il le convertisse et te le<br />
renvoie.<br />
Sache que ce n'est pas faute de combattants qu'il a refuse de te<br />
combattre.<br />
II a des combattants a pied, il a des combattants a cheval.<br />
N'echange pas ta foi contre l'infidelite.<br />
Voila ce qu'on m'avait envoye.<br />
II dit : oh Macina !<br />
lIs lui dirent : oh, Peul !<br />
II dit : Dieu a donne a Omar le Torodo, des specialistes du fusil.<br />
Que le Toucouleur maitrise le fusil !<br />
Et comme il s'est projete en avant et en arnere,<br />
Le fusil ne tomba pas, lui aussi ne tombant pas.<br />
II prit le fusH violemment, puis donna un coup a terre.<br />
Le coup partit sans blesser une seule personne.<br />
En verite, Dieu a donne a Omar le Torodo des specialistes du fusil.<br />
A l'instant Farba vint.<br />
Farba lui dit : Homme Peul !<br />
II lui dit : Homme Peul !<br />
IIlui dit : oui.<br />
II dit : les specialistes du fusil ne sont pas venus.<br />
Les specialistes du fusH s'etant mis en colere hier ont jete leur<br />
fusil,<br />
Et depuis lors, les fusils ne sont pas encore descendus.<br />
lIs sont au sixieme ciel2!<br />
Ceux-Ia ne sont pas encore venus.<br />
lIs attendent le jour du combat3.<br />
lIs lui dirent : Farba. toi aussi Farba n'exagere pas.<br />
Exaltation de l'ideal peul, pulaagu. fait de discretion, reserve. action.<br />
Ciel cache par celui que l'on voit. le septieme del.<br />
Le jour attendu.
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CORPUS 11<br />
Owii: kaalee haala mon,Farba haalata ko haala mum.<br />
Aamadu mo Aamadu wii : hayaa ko holi gocflcflo ?<br />
Koli Moodi sih haftii darii<br />
o wii : ngadda noyee kam puccu am ndimaangu nguu addaa,<br />
bajo hooDoo haa tiicfli.<br />
o wii : ndokkee kam fetelaaji tati<br />
Be ndokki mo fetelaaji tati<br />
kanji fow 0 loowi cfli conndi<br />
Oya fetel 0 joyyini cflum<br />
yeeso Aamadu mo Aamadu<br />
Oya 0 ya h ii ha a 0 wocflcfloyi<br />
o joyyini cflum 1 e leydi<br />
Oya 0 yahdi heen 0 oennidi heen omo wondi e puccu nguu.<br />
Haa De natti yiide puccu nguu<br />
Tan 0 rokki cflumen taltalol, 0 rokki cflumen tal talol.<br />
Gorko mawcflo 00 wiyi toon : laseet.<br />
Maasina2 Kala no darii no ndaara<br />
Koli Moodi sih haftii darii no gawY'al.<br />
Maasina wii : Hayaa ! ko oee mbaawi muusum binne<br />
Kooni Y'eewee cflo necflcflo darii e puccu<br />
haa waya no gawyal conangal<br />
Haa oooyi 0 weddii fetel 00 dow<br />
!Be njii fetel 00 no iina.<br />
KaOko 0 yaaoani leydi, 0 daasi koyngal nanal ngal e leydi<br />
Bajo foocfli hiirke tawi hawri e fetel artii 0 wii cflum "tef"<br />
o tukki fiyannde e leydi<br />
Fiyannde wacfli IIgarll!<br />
Maasina wii : hayaa ko yeewee<br />
no Fuutaoke amata e dow muusum binne<br />
Bajo haa 0 ari e fetel lowanoocflo no lelnaa 00<br />
o daasi naamal ngal e leydi<br />
OleIn i pellaacflo 00<br />
o haftoo die loowaacflo 00<br />
Ndimaangu no doga dartaaki.<br />
J 0 Y'yinid'um/ d'um!variante<br />
Metonymie.<br />
personnification.
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CORPUS 11<br />
Bajo haftii wii fiyan ndee leydi "gar" !<br />
Haokadi tawi ndimaangu weelanii 1 Aamadu mo Aamadu.<br />
Haa 0 anndi croo Ram so ngu soytii ngu dartotoo Aamadu mo<br />
Aamadu.<br />
o soyiti gorko Mawcro 00 to Ita 101<br />
Ndimaangu darii woni e siririude<br />
o sirkii2 e leydi J 0 darni fetel fiyannde wii : "gar"<br />
o wii : hayaa koo ! miin ko crum nelanoo mi.<br />
o wii : A I Hajji Umar wii ma<br />
woota a yettu diine moo acra wostoo keefeeru<br />
Hacrani mo yande moo wonde 0 0100 haoeteeoe<br />
Omo Jogii haoeteeoe leydi<br />
Omo Jogii haoeteeoe puce;<br />
Omo riaagi moo wota a yettu diine moo acra wostoo keefeeru.<br />
t{)oon noon Maasina huli.<br />
Aamadu mo Aamadu wii : Maasina, hayaa on njii crum ?<br />
'Be mbii : min njii<br />
o wii : ko oee croo Alia waawni marfa e muusum binne<br />
Y'eewee tan ndimaangu no doga<br />
Necrcro no ama e dow puccu<br />
ora fiya koycre mum e dow puccu<br />
ndimaangu no doga do rtaa ki<br />
Fetel ena weddaa saamaa n i<br />
Tawi Farba arii wii mo Pullo gorko ndaar am<br />
o wii mo :waawoe muusum binne oee ngaraani<br />
Waawoe marfa oeene kay ngaraani tawoJ Sabi woroe wocrDe nana ngondi e kodda Aadama Ayse<br />
Soko oe pinii oe mbeddoto fetel dow<br />
Eoe ndokna puccu<br />
'Be naata e gacra puccu<br />
'Be njaltira hunuko<br />
'Be kawra e fetel J oe pella<br />
'Be nduttoo oe koota e dow puccu<br />
Fuuta wii :Farba J crum croo de foorii3 .<br />
Weelanii lyaaf5anii (Macina IToro).<br />
o sirkii est une variante de 0 siryii..<br />
Encerclement : retour au point de depart.
CORPUS IT 429<br />
1195. Le preux se leva et tira un coup a terre: "gar" !<br />
1196. Le destrier se dirigea a ce moment vers Ahmadou Ahmadou.<br />
1197. Des que le cheval se rapprocha d'Ahmadou Ahmadou,<br />
1198. Koly Mody appuya sur la gachette.<br />
1199. Le cheval se mit a trembler.<br />
1200. Le guerrier cracha a terre, releva le fusil et fit un coup: "gar"!<br />
1201. 11 dit : oh, en realite voila ce qu'on m'avait charge de fairer<br />
1202. 11 dit : El Hadj Omar te dit de ne pas echanger ta religion contre<br />
l'infidelite.<br />
1203. Et que s'il ne fa pas attaque, ce n'est pas faute de combattants.<br />
1204. Il a des combattants au sol.<br />
1205. Il a des combattants [ montes ] sur des chevaux.<br />
1206. Il te prie de ne pas troquer ta foi contre l'infidelite.<br />
1207. Le Macina fut saisi de peur a !'instant.<br />
1208. Ahmadou Ahmadou dit : Macina avez-vous vu ceci ?<br />
1209. Us dirent : nous l'avons bien vu.<br />
1210. Il dit : Dieu a bien appris aces gens l'usage du fusil et l'equitation.<br />
1211. Voyez comment cet homme dansait au-dessus du cheval, alors qu'il<br />
galopait!<br />
1212. En outre, il jetait ses jambes sur le cheval en plein galop ;<br />
1213. Et le fusH jete en l'air sty suspendait mysterieusement !<br />
1214. A ce moment Farba vint vers lui : Homme Peul, regarde moL<br />
1215. Illui dit : les specialistes de l'equitation ne sont pas venus.<br />
1216. Les specialistes du fusH aussi ne sont pas venus.<br />
1217. Puisque certains preux, restes aupres du Cadet d'Adama Ayse,<br />
1218. Quand Us se fachent, ils jettent le fusil en l'air :<br />
1219. Et alors qu'ils font galoper le cheval,<br />
1220. Ils entrent par son anus,<br />
1221. Et ressortent par sa gueule.<br />
1222. La, ils rencontrent le fusH, le tirent,<br />
1223. Puis rejoignent la selle, posee au-dessus du cheval.<br />
1224. Le Fouta dit : Farba, ceci est tres fort !
430<br />
1225.<br />
1226.<br />
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1251.<br />
1252.<br />
1253.<br />
1254.<br />
1255.<br />
o wii : Ko onon mbiyaa. Miin kay ko mbelaa mi kala mi<br />
haalat<br />
o wii oe : hayaa ko holi gocrcro ?<br />
Tawi Alfaa Umar kadi fiddii<br />
Bajo yaaoani batu Aamadu mo Aamadu 00.<br />
Haa 00 teepti e dolokkaaji Aamadu mo Aamadu crii<br />
o bippi daande wutte makko<br />
o wii : Van ndi accu<br />
o bippi kadi 0 wii : Vanndi Moodiboo accu.<br />
Sayku Umar wii yo a accu crum.<br />
Vanndi Moodiboo<br />
So maayoowo nanngii guurowo<br />
Maayoowo 00 maaya guuroowo heddoo<br />
Kooni accu Sayku Umar<br />
Wonaa haodiicro maa.<br />
Ko croon noon Maasina huli<br />
Aamadu mo Aamadu ndaari mo kadi wii<br />
hayaa J Maasina<br />
Alia hollii on crum croo.<br />
rse mbii : min njiii<br />
o wii : Alia hokki Umar tooroodo moroe suusoe deedi<br />
Hol no gorko jumpirta hannde e oocroo batu<br />
Ena Y'eewa cree croo gaawe pirliicre mi ;<br />
Wakkiloo nanngude e daande wutte am<br />
Saka na foocra laabi tati.<br />
Alia rokkii Umar tooroodo<br />
Woroe suusoe deedi waawoe wolde.<br />
Tawi Farba arii J<br />
Farba wii mo : Pullo gorko<br />
Owii: naam<br />
o wii : ndaar am.<br />
o wii :woroe suusoe deedi n garaani<br />
Na padi tijjannde ndee.<br />
Woroe nani toon sonndo ko kanumen<br />
So nanngii e daande wutte maa mbippii<br />
rse mbacra labi oe ceeka reedu maacra<br />
CORPUS Il
CORPUS n 431<br />
1225. 11 dit : occupez-vous de vos affaires. Moi je dis tout ce que je veux<br />
dire.<br />
1226. IIleur dit : qUi d'autre ?<br />
1227. Prestement, Alpha Omar se leva.<br />
1228. Le preux se dirigea vers l'assemblee d'Ahmadou Ahmadou.<br />
1229. Il prit au colles boubous d'Ahmadou Ahmadou,<br />
1230. 11 tlra vivement le col de son boubou.<br />
1231. 11 dit : Bel Homme laisse [Cheikh Omar].<br />
1232. Il retira [le col] et dit : Bel Homme laisse [Cheikh Omar].<br />
1233. Cheikh Omar te dit de le laisser. [Bel Homme],<br />
1234. Si le mourant attrape le vivant,<br />
1235. Le mourant meurt et le vivant reste.<br />
1236. De grace laisse Cheikh Omar :<br />
1237. 11 n'est pas ton egal.<br />
1238. C'est la que le Macina prit peur.<br />
1239. Ahmadou Ahmadou le regarda et dit : oh, Macina.<br />
Allah vous a montre ceci.<br />
1240. lIs dirent : nous l'avons vu.<br />
1241. II dit : Allah a donne a Omar le Torodo des preux1.<br />
1242. Comment un homme peut-il traverser cette assemblee,<br />
1243. Regardant ces fleches qUi m'entourent,<br />
1244. Se decider a m'attraper par le col de mon vetement,<br />
1245. A fortiori a le tirer trois fois.<br />
1246. Allah a donne a Omar le Torodo<br />
1247. Des preux specialistes de la bataille.<br />
1248. A ce moment Farba vint. Farba lui dit : Homme Peul.<br />
1249. Illui dit : oui.<br />
1250. 11 dit : regarde moi.<br />
1251. 11 dit : les preux ne sont pas venus.<br />
1252. Ils attendent le jour du combat supreme.<br />
1253. Certains preux restes hi-bas, s'il s'agissait d'eux,<br />
1254. En prenant le col de ton vetement,<br />
1255. L'ayant violemment secoue, auraient ouvert ton ventre avec un<br />
couteau,<br />
Mot a mot des gens au ventre courageux.
432<br />
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'Be ngitta heenere maa De Y'akka<br />
Be mbii : Hayaa holi go
CORPUS IT 433<br />
1256. Us auraient retire ton foie et l'auraient mange1.<br />
1257. Us dirent : qui d'autre ?<br />
1258. Farba dit : U ne reste plus que mOi2•<br />
1259. Mais moi, je ne transmettrai mon message que la nuit3.<br />
1260. A ce moment Ahmadou Ahmadou dit: Macina.<br />
1261. Us dirent : oui.<br />
1262. U dit : faisons une entrevue.<br />
1263. Us se retirerent a huis clos. U dit : oh un paien n'en vaut pas la<br />
peine. Soyez resolus.<br />
1264. Sachez que si le Fouta entre dans le Macina, le Macina sera gate.<br />
1265. Qu'Ali se convertisse.<br />
1266. La conversion ne tue personne.<br />
1267. Qu'Ali se convertisse, la conversion sert quelqu'un.<br />
1268. Elle ne nuit pas.<br />
1269. Si Ali refuse de se convertir,<br />
1270. Qu'on l'envoie a Cheikh Omar Tidjane,<br />
1271. Qu'U en fasse ce que bon lui semble.<br />
1272. Les grtots musiciens lui dirent :<br />
1273. Cou penche, aux longues rides[par suite d'un embonpoint]<br />
1274. C'est peut-etre maintenant que tu vois des raisons de reculer4.<br />
1275. Mais)en realite,nous t'avons mis en garde avant cette scene5.<br />
1276. Nous avons dit qu'U fallait se mefier du Fouta :<br />
1277. Des hommes petits et solides :<br />
1278. Si tu luttes contre eux, Us te terrassent.<br />
1279. Si tu discutes avec eux, Us ont le dernier mot.<br />
1280. Si tu refuses la parole de Cheikh Omar, Us t'egorgent.<br />
1281. Us prennent ta veuve et la rapportent au Cadet d'Adama Ayse.<br />
1282. En vertte, nous avions parle avant que ceci n'arrive.<br />
1283. Alors Ahmadou Ahmadou surgit et dit :<br />
1284. Ohje refuse.<br />
1285. U dit : oh, ouije refuse.<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Allusion it des scenes d'anthropophagie pendant le jihad omarien; cf<br />
Amadou Hampate BA (communication particuliere).<br />
Le roi du Macina interroge ici le Fouta a travers sa memoire collective.<br />
Art du griot lie au temps.<br />
Mot it mot c'est maintenant que tu vois des raisons d'accepter.<br />
Mot a mot : mais nous t'avons parle avant que ceci n'arrive.
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1<br />
CORPUS II<br />
Ko miin nonngi Ali mi tottotoo<br />
So Fuuto nootii cfloo mi gollo cflum golle boncfle<br />
Hoyoo ko mi soli wommooooe.<br />
Ko cflum ton bonni neenoe.<br />
Yohi hoo jommo ori, oe mbii<br />
Hoto neloocflo gocflcflo 00 woni ?<br />
Towi Forbo doriimo.<br />
Forbo wii : Tooroodoo, kooni ndeenee ngoy<br />
Koddoo Aodom Ayse Elimoon Sire Sommbo Demmbo Aoli<br />
Muttoor,<br />
Koon i ndeenee ngoy.<br />
Kocflo suboko, jom wuro noonge hoore, olmoomi sollifonoo<br />
Koon i ndeenee ngoy<br />
Joo moo/in, joo elmin, joo lodobin, jooti jumoolin.<br />
IIAkoromoyni ibini okoromoyni ll , kooni ndeenee ngoy.<br />
Mote on ngonndoo koddo Aodomo Ayse,<br />
Ko!)ko jonngi 0 wiyoo Ceerno Umor.<br />
o focciri 0 wiyoo Alfoo Umor<br />
o nekki sofoo e Morwo 0 juurii Rowdo 1.<br />
Mote on ngondoo ko Soyku bonni Tommboo.<br />
Mote on ngondoo ko Soyku bon n i Gufode.<br />
Tooroodo 00 bonnii Jonngirde<br />
Ko Soyku hel i oene, tottiti oeeno bo.<br />
Ko tooroodo 00 firti Forobonnoo.<br />
Soyku lummbiri e Jookolel<br />
Koon i ndeenee joomolin, joo elmin<br />
Koon i ndeene ngoy.<br />
o wii : Min de ko cflum nelonoo mi.<br />
Aomodu mo Aomodu wii : hoyoo ko<br />
koolowel eno yooee ?<br />
Forbo wii mbo : noom<br />
o wii : kooni ko oon weli ko hooloto<br />
Koolowel eno yooee ?<br />
Lieux Saints de I'IsIam (La Mecque et Medine).
CORPUS IT 435<br />
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3<br />
C'est moi qui ai pris Ali, je refuse de le rendre,<br />
Si le Fouta entre ici, je le detruirai completement.<br />
OUi j'a! refuse reellement, griots musiciens.<br />
Voila pourquoi les gens castes sont mauvais.<br />
A la tombee de la nuit, Us dirent :<br />
Oil se trouve l'autre messager?<br />
Farba s'etait deja leve.<br />
Farba dit : Torodo, mefiez-vous de lui1.<br />
Demler ne d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba All Moutar.<br />
En realite, mefiez-vous de luL<br />
Etranger le matin, chef du village a midi, Imame l'apres-midL<br />
En realite, mefiez-vous de luL<br />
Le Riche, le Savant, le Bien eduque, le Pourvu.<br />
Noble fil de nobles ; en realite, mefiez-vous de luL<br />
Assurement vous ignorez le Cadet d'Adama Ayse:<br />
C'est lui qui a etudie et qu'on a surnomme le marabout Omar,<br />
11 a fait l'exegese du Coran et on l'a sumomme Alpha Omar,<br />
11 a fait les circuits du pelerinage et visite le Mausolee2 .<br />
Ne savez-vous pas que c'est le Cheikh qui a detruit Tamba,<br />
Ne savez-vous pas que c'est le Cheikh qui a detruit Goufade,<br />
C'est le Torodo qui a detruit Djanguirde,<br />
C'est le Cheikh qui a detruit Ghegne et l'a communique a<br />
Ghegneba,<br />
C'est le Torodo qui a detruit Farabanna,<br />
Le Cheikh a traverse le gue de Diakalelle.<br />
En realite, mefiez-vous du Riche, du Savant.<br />
En realite, mefiez-vous de luL<br />
11 dit : moi voila ce qu'on m'avait envoye.<br />
Ahmadou Ahmadou dit : oh, individu qui parle<br />
pour se faire payer3.<br />
Farba lui dit : oui.<br />
11 dit : que tes paroles sont delicieuses !<br />
Individu qui parle pour se faire payer?<br />
Lui designe Cheikh El Hadj Omar, comme I'explicitera le reste de la devise<br />
du beros que son griol declame ici.<br />
Il s'agit du Mausolee du Prophete Mohammed, piece essentielle ajoutee au<br />
circuit du pelerinage musulman.<br />
Periphrase designant le griOl.
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CORPUS II<br />
Farba wii mbo : naam<br />
o wii mo mi rokkiima teemedere nagge 1 woote heen gorke.<br />
Haayaa ! aan kay haala moo no jari ePum.<br />
haala moo no jari ko our; ePum.<br />
KaOko Farba 0 wii : ko mbii-ePaa pullo ?<br />
Owii: wallaahi 2<br />
o wii: ndeke mi eggii tooroooe ndeke mi hootat to Fuloe3 .<br />
o wii mbo : yeewaa noon Pullo gorko !<br />
Aamadu mo Aamadu wii : naam<br />
o wii: yeew 00 Tooroodo mo mantirat-mi.<br />
aePa anndi ko 0 rokki mi ?<br />
o wii: wallaahi ye AlIa mi anndaa. sabi huunde fow ko 0<br />
rokku moo aePa haandi heen.<br />
o wii: ePum noon ko luukat-moo-mi mi siwaa gayn u luuk<br />
demmbo koo,<br />
Kono 0 rokkini ko pucel gootel,<br />
tOum ne pucel ngel ko ePokkel<br />
tOum ne omo winndi heen<br />
innde makko<br />
Hay so mi yeeyii kay gooto suusaa soodde.<br />
Mi haaytii yiide ePo gawlo rokketee teemedere nagge.<br />
Ngan ndee koy so mi hootii ko mi go rtoyoowo gaa<br />
ko gaay koePat-m i.<br />
Aamadu mo Aamadu wii mo :<br />
"Bisimilla" !<br />
Miin ne mi wondiri mawngu Alia so a hoePii ePoo...<br />
o wii mbo : eey<br />
o wii : lewru fow maayndu<br />
mi limane teemedere nagge<br />
MbaePaa galle maa4 .<br />
tBe pini subaka, De mbii minen koy jooni mbiePen koota<br />
Indices de la generosite, mais aussi de la richesse du Macina.<br />
er voir la vision des vaincus.<br />
Formule theologique islamique.<br />
Revanche de l'ideologie peule pai'enne ou pulaagu sur le jihad omarien.<br />
Role des griots dans le jihad omarien.
CORPUS IT 437<br />
Individu qui parle pour se faire payer?<br />
1316. Farba lui dit : oui.<br />
1317. 1l1ui dit: je t'ai donne cent vaches avec des boeufs 1 .<br />
1318. Oh! ta parole vaut autant.<br />
1319. Ta parole vaut meme plus!<br />
1320. Lui Farba, il dit : que dis-tu Peu1?<br />
1321. 11 dit : par Allah.<br />
1322. U dit : alors je vais emigrer et quitter les Torodos au profit des<br />
Peuls.<br />
1323. Ului dit : vois-tu, Homme Peul...<br />
1324. Ahmadou Ahmadou dit : oui.<br />
1325. U dit : tu vois ce Torodo dont j'exalte ainsi la gloire, sais-tu ce qu'il<br />
m'a donne?<br />
1326. 11 dit : par Allah je ne sais pas. Mais tout ce qu'il te donne, tu le<br />
merites.<br />
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11 dit : done, malgre l'ampleur de mon exaltation, et je n'ai point<br />
fini de l'exalter,<br />
Mais il ne m'a donne qu'un petit cheval,<br />
Pire encore, le petit cheval est borgne.<br />
Pis encore, il y a ecrit son nom.<br />
Meme si je le vendais, personne n'oserait l'acheter.<br />
Je ne vois pas comment rester ailleurs, alors qU'ici on donne au<br />
griot cent vaches.<br />
Sachez que si je retoume, je reviendrai ici, c'est la que je vais<br />
habiter2.<br />
Ahmadou Ahmadou lui dit : sois le bienvenu.<br />
Moi aussi je le jure par la magnificence d'Allah, si tu habites ici...<br />
11 lui dit : oui.<br />
11 dit : a la fin de chaque mois, je t'offrtrais cent vaches3 .<br />
Le lendemain matin, ils dirent qU'actuellement nous allons rentrer.<br />
Alors c'est la qu'Ahmadou Ahmadou ecrivit une lettre.<br />
Indice de la generosite du Peul, mais aussi de la richesse du Macina.<br />
La cupidite de Farba s'oppose a la fascination de Jeli Moussa pour l'Islam.<br />
L'epopee, en mettant ces deux griots en gros plan, veut sans doute. montrer<br />
les differentes attitudes des griots pendant le jihad omarien.<br />
Mot a mot : je compterai pour toi cent vaches que tu mettras dans ta maison.<br />
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tOoon noon Aamadu winndi oataake<br />
o winndi e oataake hee : so a yahii mbiyaa Sayku Umar.<br />
o mbona riddi keefeero nena waal; galle am<br />
Keefeero 00 mi totataa mo<br />
Mi tuubnataa 0 tuubnataa.<br />
Mi hirsataa 0 hirsataa.<br />
So ko 0 memii kam ma mi riddu mo 0 hoota Fuutayel<br />
Tooro<br />
Aamadaa :<br />
Nganndinon Sayku Umar so min kawrii janngo weendu<br />
wiyeteendu caayawal nduu,<br />
Lekki fow ki 0 ndaari e caayawal maa 0 yii toon<br />
teemedere sagata jokkollo<br />
Na wad'd'ii ndimaangu mbaangu<br />
na wad'i gaawe muud'um<br />
CORPUS II<br />
Tawi hulataa, dogataa, yahataa.<br />
o winndi d'um e oataake 0 rokki Alfaa Umar Ceerno Bay/aa<br />
o wii : mbid'o salmina Sayku<br />
tOoon noon kamoe Fuuta oe njahi haokadi haa oe ngari e<br />
yolnde.<br />
Kamoe ne kooe njii Hamdallaay koo haokadi ne oerd'e d'ee<br />
taayii<br />
Alfaa Umar Ceerno Baylaa wii : Alia hollii on cPum ?<br />
Be mbii wallaahi min njii<br />
o wii : Nganndee koy Maasinaoke 00 ndeke ko keewcPo doole<br />
moolanaacPo moolee<br />
Be mbii wallaahi<br />
o wii : tOum noon so en njahii kaalanen A I Hajji Umar<br />
i\lande ndaweten Fuuta wonaa Keefeero gooto dawn u noD en;<br />
Kaadi ood'oo keefeero Jaoaani tuubde<br />
So maayi kam naatatnoo Jeyngol.<br />
Uu huu huu l wallaay ko min njii Hamdallaay koo<br />
sonndo ad'a anndi a accat.<br />
Anndi ko ned'd'o moyyi fOw,<br />
i\leeno hulaani noode d'um<br />
Interjection marquant la desapprobation.
CORPUS IT 439<br />
1340. 11 ecrivit dans cette lettre ; si tu arrives, dis cl Cheikh Omar,<br />
1341. 11 a pourchasse un paien qUi se trouve actuellement chez moi,<br />
1342. Ce paien je ne le lui rends pas.<br />
1343. Je ne le convertis pas, II ne le convertit pas,<br />
1344. Je ne l'egorge pas, il ne l'egorge pas,<br />
1345. S'll me touche, je le pourchasseraijusqu'au Fouta.<br />
1346. Dites cl Cheikh Omar que si on se rencontre demain au cours d'eau<br />
appele Thiayawal,<br />
1347. Sous chaque arbre qu'il regardera, il verra cent jeunes hommes<br />
robustes.<br />
1348. Chacun monte sur un cheval1tenant ses lances,<br />
1349. Intrepide, determine, immobile2.<br />
1350. 11 mit cela par ecrit et le remit cl Alpha Oumar Thiemo Bayla.<br />
1351. 11 dit ; je salue le Cheikh.<br />
1352. En cours de route, les Messagers estimerent qu'il y avait lieu de<br />
craindre le Macina, a cause de ce qu'ils avaient vu cl Hamdallahi.<br />
1353. Alpha Oumar Thiemo Bayla dit ; avez-vous bien vu cela3?<br />
1354. Ils dirent : par Allah, nous l'avons bien vu.<br />
1355. 11 dit : sachez que l'homme du Macina est tres puissant, il detient<br />
une puissance qUi force le respect.<br />
1356. Ils dirent : par Allah, c'est exact.<br />
1357. 11 dit : donc a notre arrivee, nous devons en informer le Cheikh,<br />
1358. Car en qUittant le Fouta nous n'avions pas en vue un seul paien,<br />
1359. Et puisque ce paien ne veut pas se convertir,<br />
1360. S'll meurt, c'est lui qUi va en enfer !<br />
1361. En tout cas, Cheikh, si tu savais ce que nous avons vu, tu laisserais<br />
Hamdallahi en paix.<br />
1362. Mats tu sais, quels que soient les merites'd'un homme,<br />
1363. Un homme caste ne craint point de medire de IUi4.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Rupture de construction de cent, le griot passe a un ef style coranique.<br />
Mot a mot : alors qu'il n'a pas peur, qu'il ne fuit pas, qu'il ne bouge pas.<br />
Mot a mot : Allah vous-at-il montre cela ?<br />
Rupture de construction : allusion a la liberte de Farba Gouwa, le griot d'EI<br />
Hadj Omar a la langue bien deliee.
440<br />
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Joo
CORPUS IT 441<br />
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1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
A la fin de la troisieme priere canonique,<br />
Alpha Oumar remit la lettre cl Cheikh Omar.<br />
11 lui dit : Cheikh !<br />
Le Cheikh lui dit : oui !.<br />
11 dit : voici la lettre que Ahmadou Ahmadou t'a envoyee.<br />
Mais 6 Cheikh, si tu acceptais, Tall, en qUittant le Fouta, sache que<br />
nous n'avions pas en vue un pays.<br />
o Tall, tu as certes des dons,<br />
Mais en verite1 sache que le Macina est tres pUissant.<br />
Il dit : ah bon, Alpha Oumar Thierno Bayla !<br />
C'est toi qUi dis que le Macinien est tres puissant2.<br />
Par Allah Fouta, je vous ferai savoir que c'est Allah qui est pUissant.<br />
Immediatement, Cheikh Omar se mit cl egrener son chapelet.<br />
La succession des pedes du chapelet faisait : 'Tall Tall Tall"3.<br />
Alpha Oumar s'ecria: oh Omar !<br />
Le Cheikh lui dit : oui.<br />
Il dit : arrete ce que tu es en train d'egrener.<br />
Le Cheikh ralentit son debit, puis s'arreta.<br />
lllui dit : Omar n'agis pas ainsi.<br />
Tu sais tres bien que cette priere que tu as entamee,<br />
Si tu l'acheves, tout ce qUi provenait de la boue, redeviendrait boue.<br />
De grace, cesse cette priere, reprends tes esprits4.<br />
Il dit : Alpha Tall, qu'Allah m'excuse5.<br />
n dit : Alpha Oumar, je vous ferai savoir que c'est Allah qUi est<br />
puissant.<br />
Le jour Oll je verrai Ahmadou Ahmadou, je lui ferai savoir que c'est<br />
Allah qui est pUissant.<br />
Il prit la fameuse lettre et la remit cl Cheikh Omar, le Cheikh la lut.<br />
gue trouva-t-il dans cette lettre ?<br />
Ahmadou Ahmadou dit que le jour de leur rencontre cl Hamdallahl,<br />
Mot a mot : mais c'est la parole d'Allah.<br />
Mot a mot : le Macina a beaucoup de force.<br />
Onomatopee designant le bruit produit par la succession de grains d'un<br />
chapelet qu'on egrene rapidement.<br />
Possede ton esprit.<br />
Le griot confond Alpha Oumar Thiemo Bayla Wane, generalissime de<br />
l'arrnee d'Omar, et Alpha Ahmadou Sai'dou Tall, pere de Tidjani, frere alne<br />
d'Omar.
442<br />
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1392.<br />
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1410 .<br />
1411.<br />
1412.<br />
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1414.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
CORPUS 11<br />
Lekki fow dariiki e caayawal<br />
Maa darnu ePoon teemedere sagata jokkolo<br />
Ka Oko ne 0 win ndi.<br />
Hol ko 0 winndi e oataake heen?<br />
o wii : Mi woondirii mawngu Alia<br />
aan Aamadu mo Aamadu<br />
Lekki fow ki ndarnu ePaa teemedere sagata<br />
Miin mi darna ePoon Janngo teemedere malayka e jinne<br />
o win ndi oataa ke 00 haa 0 gayn i<br />
o wii : EE Fuuta<br />
!Be mbii mo : naam<br />
o wii : hol e mooePon mbona yahra maayde yahrataa nguur<br />
ndam yettinana kam ooepoo oataake to Aamadu mo AamaduJ<br />
ko 00 gooto heddii hakkunde amen 1<br />
o mbo jogii almuudu goePePo ena wiyee yero Fullaoke kaOko<br />
toooani ePum bii2 J kaOko dursini ePum.<br />
Tan yero Fullaoke darii yeeso makko wii mo TaalJ<br />
So ko a dan ii 00 oataake kay ko miin kaan -ePaa nelde<br />
Toooi mi baa ko e junngo maa.<br />
A/finaa mi ko e junngo maa.<br />
So a win ndii 00 oataake kay ko miin kaan ePaa tottude.<br />
o itti oataa ke 0 rokki yero Fu lIa oke<br />
Vero Fullaoke yaaoani Hamdallaay3<br />
Ndeen 0 faandiima HamdallaaYJ awluoe na mbiya<br />
o aamii dogdeJ 0 aamii suuePaade<br />
Kikka bogoJ kanina waaja<br />
Kikka bogo waaja J bogoo neeri waaja<br />
Kikka kekeJ kikka kaka<br />
Kikka kaaluJ keke waaja<br />
Tan haa yero Fullaoke yettii<br />
EE Salaamaalee kum Aamadu mo Aamadu<br />
Lettre rapportee au style indirect.<br />
Premiere lettre de l'alphabet coranique. deuxieme de l'alphabet arabe.<br />
Le griot precede l'emissaire a Hamdallahi et fait assister aux partitions<br />
musicales des griots du Macina. jouant le saygalare pour leur prince. Ici<br />
l'harmonie de l'ensemble rend l'air que le griot joue en sourdine.
CORPUS IT 443<br />
1391. Sous chaque arbre situe a Thiayawal,<br />
1392. 11 placera cent jeunes hommes.<br />
1393. A son tour, il redigea une lettre.<br />
1394. Qu'est-ce qu'il y mit ?<br />
1395. Il ecrivit : je te jure par la magnificence d'Allah,<br />
que toi Ahmadou Ahmadou,<br />
1396. ,Sous chaque arbre Oll tu placeras cent jeunes hommes,<br />
1397. Moi aussi j'y placerai cent anges et djinns.<br />
1398. Il redigea ainsi sa lettre.<br />
1399. 11 dit : oh Fouta !<br />
1400. Ils lui dirent : ouil .<br />
1401. Il dit : qui d'entre vous veut partir pour mourir, qui n'y va pas pour<br />
vivre, qu'il transmette cette lettre a Ahmadou Ahmadou de ma<br />
part. C'est la derniere que nous echangeons.<br />
1402. 11 Y avait la un disciple appele Yero le Peul, c'est lui qui l'avait<br />
forme depuis le cours d'initiation.<br />
1403. Alors Yero le Peul se posa devant lui : Tall!<br />
1404. Si tu as une telle lettre, je suis le messager le plus indique2 .<br />
1405. C'est toi qui m'as initie au Coran3.<br />
1406. C'est toi qui m'as autorise a faire l'exegese4 .<br />
1407. Si tu ecris une telle lettre, tu dois me la remettre.<br />
1408. Il remit la lettre a Yero le Peul.<br />
1409. Yero le Peul se dirigea vers Hamdallahi.<br />
1410. A l'approche de Hamdallahi, les griots disaient :<br />
1411. Il a la paresse de fUir, il a la paresse de se cacher.<br />
1412. "Kikka ka waaja, kaaiiina waaja.<br />
Kikka kakka bogo waaja, bogoo neeri waaja .<br />
Kikka keke, kikka kaka.<br />
Kikka kaalu, keke waaja"5.<br />
1413. Jusqu'a ce que Yero le Peul arrive; [ il salua ]:<br />
1414. La paix soit avec toi Ahmadou Ahmadou.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Chevauchement entre les actions.<br />
Il n'y a pas de meilleur messager que le disciple du maitre. mais aussi : nul<br />
n'est mieux indique qu'un peul pour une mission en direction d'autres<br />
peuls.<br />
Mot a mot : c'est toi qui m'as appris la premiere lettre du Coran, "le ba".<br />
C'est toi qui m'as appris l'exegese, donc l'alpha et l'omega.<br />
Le griot d6clame la devise rythmique d'Ahmadou Ahmadou.
444<br />
1415.<br />
1416.<br />
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1418.<br />
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1437.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
CORPUS II<br />
Aamadu mo Aamadu wii mo : maalee kum ma salam<br />
o wii : oocfloo oataake ko Ummorde e AI Hajji Umar,<br />
Hono kodda Aadama Ayse Elimaan Siree Sammba Demmba<br />
Aali Muttaar Seydi buubu njanu.<br />
I[)oon noon Aamadu mo Aamadu humti oataake 00, janngi.<br />
o tawi heen Seyku Umar wii mo nokku fow cflo 0<br />
I[)arn i teemedere Sagata jokkollo no wondi e ndimaangu<br />
no fali<br />
Gaawal karnum e hoore muucflum ; moo darnu<br />
I[)oon teemedere malayka e jinne. Aamadu mo Aamadu wi:<br />
Oocfloo nelaacflo AI Hajji Umar, so a nanii daande salaatu 1 tan<br />
tayaa leggal daande makk02 .<br />
I[)oon noon haokadi yero Fullaoke mooftaama<br />
Haa ngori 00 Joggii<br />
Noddinaango adanngo ngoo noddinii<br />
KaOko yero Fullaoke 0 hokki baafal<br />
Maccucflo 00 wPi mo :hol ko woni haaju moo?<br />
00 wii mo : njaltinaa mi mbicflo salligoo alfajiri 00 arii e<br />
yonde, mbele so mbocfla hoota e joom am tawa mbocfla wondi<br />
e salligi<br />
I[)oon noon oon udditi mbo 0 yalti3 tBallin imo ndiyam.<br />
o salligii haa 0 gayni.<br />
o naatoyi nder huoeere.<br />
Oon uddi darii e damal.<br />
Ena jogii laoi mum4 .<br />
Ena fadi haa salaatu noddee5.<br />
taya leggal daande makko.<br />
Vero Fullaoke hucciti fUcflnaange.<br />
Bajo Juulii darcfle cflicfli.<br />
Personnification de la premiere priere.<br />
La vision des vainqueurs accuse ici le Macina de traitrise, par une<br />
violation manifeste d'une clause du droit. qui regissait la guerre : le<br />
meurtre.d'un emissaire.<br />
Vers courts qui succedent a des vers longs: rythme haletant en rapport<br />
avec l'etat d'ame de l'emissaire. ici sous cellule, condamne a mort.<br />
Indice des methodes d'execution (arme blanche).<br />
Personnification de la priere.
CORPUS IT 445<br />
1415. Ahmadou Ahmadou lui dit : que la paix soit avec toL<br />
1416. 11 dit : cette lettre provient d'EI Hadj Omar,<br />
1417. Le demier ne d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba All Moutar<br />
5eydi Boubou NDiagnou.<br />
1418. Alors Ahmadou Ahmadou deplia la lettre et la lut.<br />
1419. 11 Ytrouva un passage, ou Cheikh disatt que partout ou<br />
1420. 11 mettrait cent jeunes robustes, montes a cheval,<br />
1421. Ayant place une lance en traverse, lui y placerait cent anges et<br />
djinns.<br />
1422. Ce messager d'EI Hadj Omar, a l'appel du muezzin pour la priere<br />
de l'aube, egorge-Ie1, dit Ahmadou Ahmadou a un de ses esclaves.<br />
1423. Alors Yero le Peul fut garde.<br />
1424. Au chant du coq,<br />
1425. Le premier appel a la priere fut lance.<br />
1426. Yero le Peul frappa a la porte.<br />
1427. L'esclave IUi dit : Quel est ton desir ?<br />
1428. 11 dit : Que tu me sortes afin que je renouvelle mes ablutions, car la<br />
priere de l'aube s'approche, mais aussi pour que, si je dois mourir,<br />
je meure pur2.<br />
1429. Alors, celui-ci ouvrit la porte, 11 sortit.<br />
1430. Hlui donna de l'eau3.<br />
1431. H fit completement ses ablutions,<br />
1432. n retouma dans la chambre.<br />
1433. Celui-Ia oUvrit, puis se posta a la porte,<br />
1434. Arme d'un couteau,<br />
1435. Attendant I'appel du muezzin pour l'egorger.<br />
1436. Yero le Peul se touma vers l'Est,<br />
1437. 11 fit deux "rakas"4.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
Mot a mat : que tu coupes le bois de sa gorge.<br />
Mot a mat : que si je dais retoumer a man seigneur, que j'aie des ablutions<br />
intactes.<br />
Mot a mot : iI approcha de l'eau pres de lui.<br />
"Raka'a" : ensemble de genuflexions formant une unite.
CORPUS IT 447<br />
1438.<br />
1439.<br />
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2<br />
3<br />
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5<br />
Il appela le Riche, le Savant, le Bien eduque.<br />
Il appela Allah l'unique.<br />
o victoire, 6 chance,<br />
o grandeur, 6 noblesse,<br />
o Cheikh Omar du Fouta [Toroo].<br />
Le Cheikh egrenait son chapelet.<br />
Il se ressaisit brusquement.<br />
11 egrena une perle.<br />
l1s lui dirent : qu'est ce qu'il y a, El Hadj Omar ?<br />
Il dit : il y a un musulman en danger, il m'a appele1.<br />
Il m'a appele une seule fois : s'il recommence, il est sauve.<br />
S'il ne recommence pas, Allah en decidera autrement.<br />
Yero le Peul reprit :<br />
o victoire, 6 chance,<br />
o grandeur, et noblesse,<br />
o Cheikh Omar du Fouta [Toro].<br />
Le Cheikh dit : oUi 2 .<br />
Le Saint egrena sept perles3,<br />
Apres quoi ils virent Yero le Pew devant le Cheikh.<br />
Le lendemain, au reveil, les chevaux furent selles,<br />
Ils se dirigerent vers Hamdallahi4.<br />
L'esclave prepose a la garde de Yero le Pew,<br />
A l'appel de la priere. ouvrit la parte et trouva la chambre vide.<br />
Alors, ils se dirigerent vers Hamdallahi.<br />
Ils vinrent par le nord de Hamdallahi5.<br />
Ils se dirigerent vers un martgot situe a l'est de Hamdallahi<br />
appele Thiayawal.<br />
Mot a mot : un esclave d'Allah.<br />
Miracle qui figure dans la devise d'EI Hadj Omar: il repond de loin a tout<br />
appel.<br />
Le chiffre sept est tres symbolique, dans la tradition esoterique<br />
musulmane; il represente la perfection humaine.<br />
L'armee toucouleur. Interference de deux narrations.<br />
Mot a mot : par le noir de Hamdallahi ; ici l'ouest est ainsi designe par le fait<br />
que c'est ainsi qu'il indique le pays des Noirs.
CORPUS IT 449<br />
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Alors qu'a Hamdallahi, Ahmadou Ahmadou s'etait ceint, les gens du<br />
Macina sortirent.<br />
Us sortirent par l'ouest de Hamdallahi.<br />
Us se rencontrerent au lieu appele Thiayawal.<br />
L'armee de Cheikh Omar etant immobile.<br />
U avait un esclave appele Batou Dembele.<br />
Le Soleil fut arretel .<br />
Les bouches furent ouvertes.<br />
La terre fut dechiree.<br />
L'eau coula.<br />
Les yeux regarderent de travers, les oreilles entendirent de<br />
travers.<br />
Nul refuge pour celui qUi cherche refuge.<br />
A ce moment la, Batou Dembele avait deux pieces d'etoffe rouge.<br />
U portait un grand chapeau avec aussi un pantalon bouffant de cent<br />
metres.<br />
U se pavanait au milieu des chevaux du Fouta.<br />
Cependant Ahmadou Ahmadou venait d'apercevoir Batou Dembele.<br />
Il leur dit : n'est-ce pas cet homme au teint noir, portant un<br />
pantalon tres bouffant, avec des etoffes, n'est -ce pas celui-la<br />
Cheikh Omar ?<br />
Ils dirent : celui-la est son esclave nomme Batou Dembele.<br />
Alors Ahmadou Ahmadou declara :<br />
o sachez que le Fouta possede des esclaves de grande classe.<br />
Il avait un esclave qui s'appelait Yemgha2.<br />
Yemghe n'avait pas un bon boubou, ni un bon pantalon.<br />
Yemghe etait son esclave, mais il en avait fait un berger de chevres.<br />
Il passait la nuit en pleine cendre, il ne mangeait que des reliefs.<br />
Il y avait la un esclave devenu son courtisan,<br />
Images apocalyptiques avant le combat.<br />
Le griot emploie tantot Yemghe tantot Yerngha.
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1515.<br />
1516.<br />
1517.<br />
Oon noon 0 halfaani ePum 1<br />
Wiyetee ko Selimaka.<br />
Ko kam naamatnoo kedde payePe ePee<br />
Ko kanum oiirtatnoo lehe ePee<br />
t[)oon noon nde Selimaka sooynii pucci Fuuta ePii, dogi<br />
naati e ladde.<br />
Wallaahi mi woondiri mawngu 0110<br />
Kedde payePe, ePee, ko Selimaka naamatnoo<br />
DolokkaaJi ePii, ko Selimaka wakkotonoo<br />
DimaaePi payePi ePii, ko Selimaka waePePotonoo<br />
Naange ceeePu ngee, ko miin yerQo woodnoo<br />
Woo Idee kaatane, ko miin yerQa woodnoo<br />
Kono ee Aamadu mo Aamadu<br />
So a nehdii pucci, fonndu gafakkee majji<br />
A anndaa heen, ngu bone tawdat moo<br />
Mi wondirii mawngu alia, so a rokkii kam<br />
Ndimaangu, 0 rokkii kam gaawal<br />
MaccuePo Sayku Umar mo maantatoo 00<br />
Mi ittat m bo e pucci Fu uta joon i joon i.<br />
t[)oon noon 0 yeewi heen e dimaoji<br />
o wii : yeew e pucci hee ngu njieP-ePaa<br />
o suoi heen moolanaangu moolee<br />
o wii : ko mi maccuePo, ko nguu waawi jogaade mi.<br />
Bajo jawlii kowngu,<br />
Gaawe ePe ndenndinaa<br />
o yeewi heen keewngal doole.<br />
o jawli ePum e gooto 0 hooti e dow ndimaangu hee<br />
o ndaari Aamadu mo Aamadu<br />
o wii : Aamadu mo Aamadu<br />
o wii :naam<br />
o wii :yeew golle am<br />
Fonne insolite de d'um. I'emploi de d'ume nna demonstratif rejete.<br />
CORPUS II
CORPUS IT 451<br />
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2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Ce n'etait pas son esclave de droit1.<br />
Il s'appelait Selimaka,<br />
C'est lui qui mangeait les morceaux les plus gras.<br />
C'est lui qui nettoyait les plats 2 .<br />
Mais a l'approche des chevaux du Fouta, Selimaka s'enfuit dans la<br />
brousse.<br />
Je le jure par la grandeur d'Allah,<br />
Les morceaux les plus gras, c'est Selimaka qUi les mangeait,<br />
Les boubous ouvrages, c'est Selimaka qUi les portait.<br />
Les destriers, c'est Selimaka qUi les montait,<br />
Le soleil de saison seche, c'etait pour moi Yemgha.<br />
Passer la nuit a la cuisine me revenait a moL<br />
Mais Ahmadou Ahmadou,<br />
Si tu eleves des chevaux, egalise leur ration alimentaire3 ,<br />
Tu ne sais pas lequel tu monteras lors d'une bataille 4 .<br />
Je le jure par la grandeur d'Allah, si tu me donnes<br />
Un destrier, si tu me donnes une lance.<br />
L'esclave de Cheikh Omar que tu loues,<br />
Je l'enleverai parmi les chevaux du Fouta, sur le champ.<br />
Alors il chercha un destrier.<br />
Il dit : choisis parmi ces chevaux, celui qUi te convient.<br />
Il en choisit un d'excellente qualite5 .<br />
11 dit : je suis un esclave, c'est celui-ci qUi peut me porter.<br />
11 enfourcha vivement le cheval.<br />
Les lances furent rassemblees,<br />
11 en chercha une tres pUissante.<br />
11 en prit une vivement, alors qu'il etait a cheval.<br />
11 regarda Ahmadou Ahmadou.<br />
11 dit : Ahmadou Ahmadou.<br />
11 dit : oui.<br />
11 dit : contemple mes exploits.<br />
Esclave acquis par heritage paternel ou maternel.<br />
Mot a mat : c'est lui qui recurait les plats a la main. I1 mangeait aussi les<br />
restes des mets royaux.<br />
Mot a mat : egalise leur sac contenant leur ration.<br />
Mot 11 mat: tu ne sais pas avec lequel t'arrivera un malheur.<br />
Mot a mat : celui contre qui on se refugie doublement.
452<br />
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3<br />
4<br />
Jooni njiyaa golle am<br />
Jeyd'o e luoid'o ngonaa gootum.<br />
Y'eew luoinood'o 00 naatii e ladde alia jerennde<br />
Miin nde wonnoo ko mi jeyaad'o so mi yahii Alia d'o<br />
pay mi l<br />
Jooni jooni njiyaa golle am<br />
o yaaoani pucci Fuuta d'ii<br />
o arii haa e hakkunde boowal hee<br />
Bajo darii<br />
o wii : a Isaalaamaaleekum"2 mon Fuuta<br />
Be mbi mo : "maalee kuma salam"<br />
o wii : mi yaltii baara daagal<br />
Mi ndaartaani d'oo noon pullo<br />
Nganndon noon Fuuta mi noddaani tooroodo<br />
Mi ndaartaani baylo, mi noddaani ced'd'o<br />
Ndaartu-mi d'oo tan ko oii diimaajo piir3 Tawi so kaliifa muud'um nande duwii tutti fow<br />
nande heen juud'e muud'um...<br />
Fuuta fow ndaari Baatu Dammbele<br />
Baatu Dammbele wii :Fuuta hay, so on ndaaraani mi<br />
Mbod'o an ndi ko miin noddaa.<br />
Doon noon Baatu Dammbele yaaoani boowal ngal<br />
Sayku Umar wii mo : yaa aan Baatu am4 Baatu wii mo : naam.<br />
o wii : Baatu ar gaay<br />
Baatu ari, 0 wii Baatu wertu juud'e maa<br />
Baatu werti juud'e muud'um.<br />
Jaa maamin, jaa elmin, 0 janngi 0 tuuti e juud'e Baatu<br />
Gite makko d'ee fow mbeddii gond'i<br />
o wii : he, Baatu Dammbele<br />
CORPUS 11<br />
Allusion au comportement deloyal de Selimaka. La diversitc de<br />
comportement des esclaves. interdit toute generalisation<br />
Formule de salutation en poular, deformee ici en partie.<br />
Deformation du fran"ais : pur.<br />
Baatam : formulation affective.
CORPUS IT 453<br />
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3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
8<br />
Il dit : tu vas voir bient6t mon action.<br />
Le proprietaire et l'emprunteur ne sont pas identlques1.<br />
Vois: l'emprunteur a totalement disparu2;<br />
Etant donne que moi je suis possede. je n'ai pas ou me rendre;<br />
Tout de suite. tu verras mon oeuvre.<br />
Il se dirigea vers les chevaux du Fouta.<br />
Arrive au milieu de la plaine.<br />
Le preux s'arreta.<br />
Il dit : que la paix soit avec vous Fouta3.<br />
Ils lui dirent : que la paix soit avec toL<br />
n dit : je ne m'adresse pas a la noblesse.<br />
J e ne cherche pas un Peul.<br />
Sachez bien Fouta. que je n'appelle point ici un Torod04.<br />
Je ne cherche pas un forgeron. je n'appelle pas un Thiedd05.<br />
Je ne cherche qu'un fils d'esc1ave authentique6 .<br />
QUi obeit aux injonctions de son maitre jusqu'au prix de sa vie.<br />
Tout le Fouta regarda Batou Dembele7.<br />
Batou Dembele dit : 6 Fbtta meme si vous ne me regardez pas.<br />
Je sais que c'est moi qu'on appelle.<br />
Alors Batou Dembele se dirigea vers la plaine.<br />
Cheikh lui dit : 6 Batou mien.<br />
Batou lui dit : oui.<br />
Il dit : Batou, viens par icL<br />
Batou vint. Il dit : Batou etale tes mains8.<br />
Batou etala ses mains.<br />
Le Riche, le Savant. n recita et aspergea les mains de Batou.<br />
Ses yeux furent inondes de lannes.<br />
Il dit : oh Batou Dembele.<br />
Allusion a la couardise et a la traltnse de S6limaka.<br />
Yemgha insinue par la, que meme l'esclave est r6gi par une 6thique.<br />
Mot a mot : vois;l'emprunteur est entre dans la grande brousse d'Allah.<br />
Emploi metonymique de Fouta pour gens du Fouta.<br />
Torodo : aristocrate du savoir.<br />
Thieddo : caste des guerriers.<br />
Esclave aussi bien du cote patemel que matemel.<br />
Le griot emploie Demb616 ou Dambel6.<br />
Le marabout recite des prieres. puis asperge de fins crachats les paumes<br />
ouvertes du fidele.
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2<br />
3<br />
Baatu wii mo : naam<br />
o wii mo :allaahumma aqfirlahaa war ham haa l<br />
Han nde dee njiyaa rewoe uurulayn i 2 yoocfoe njaooo moo<br />
Doon noon Fuuta kala yiili koye J<br />
'Be nganndi Baatu ko (cfoon Heddotoo) ko jogorcfo maayde<br />
t[)oon noon Baatu yaaoani boowal ngal.<br />
Aamadu mo Aamadu wii : he Veraa.<br />
Veraa wii mbo : naam<br />
o wii : Veraa or gaay<br />
Veraa yettii : 0 wii wertii juu
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1<br />
2<br />
o wii : maccucflo am 00 e maccucflo Aamadu mo Aamadu<br />
OOJ ka mDe cflicflo fowJ ngadda non mi De cfloo joon i joon i.<br />
CORPUS 11<br />
Mi loota De J mu Juula De J kala mo looti De juuli De moo Alia<br />
yaafo cflumen 1.<br />
t[)oon noon Aamadu mo Aamadu wii De : EE Maasina<br />
tBe mbii mo : naam<br />
o wii : maccucflo am 00 e maccucflo<br />
Sayku Umar 00 ngaddanon mi De cfloo jooni jooni J mi juula De<br />
mi loota De 2<br />
Kala mo juuli De looti De J ma Alia yaafa cflum.<br />
Fuuta giddi J Maasina giddi<br />
Fuuta giddi J Maasina giddi<br />
Sayku Umar Jelii e hakkunde konuJ tucflcflii wudere ndeeJ<br />
o tami junngo makko<br />
Farba wii mo :jaa maalin J jaa elmin J jaati jumaalin<br />
IIAkaramayni ibnu akaramayni ll<br />
J hol ko dufii kodda e lelaade<br />
ne suddoo wudere.<br />
IIAkaramayni ibnu akaramayni" bonnu noocflo Tammba<br />
Bonni GufadeeJ bonni Janngirde<br />
Ko aan heli qene tottiri qeenaaba<br />
Firti Farabannaa J lummbiri Jaakelel<br />
EE kodda Aadama Ayse miin koy mi yiirii ma hannde<br />
Ko mi meecflaani yiirude ma J ko lelaade na suddoo hakkunde<br />
worDe<br />
Haa cfloon noon 00 yeesi wudere ndeeJ 0 ndaari gawJo 00<br />
o wii mbo : Farba ! J Farba wii mbo naam<br />
o wii : hay so mi sirridii e joomiraacflOJ mi yicflii<br />
humpinde yimDeJ aan Farba Sawa Guwaa a accataa.<br />
Farba J ko wirn unoo mi cfloo mibcflo suddii J ko mbicflo naagoo<br />
lIa llaahu waahidum ll 00 :<br />
Kala ko maayi e Fuuta yoo naat e aljanna<br />
Le griot ignore les dispositions theologiques relatives a l'enterrement du<br />
jihadiste, mort sur le champ de bataille. Il est enterre sans bain, habits,<br />
en tenue de combattant de la foi.<br />
Inversion inhabituelle : confusion du griot.
CORPUS IT 457<br />
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1<br />
2<br />
Il dit : mon esclave et l'esclave d'Ahmadou Ahmadou,<br />
Vous me les amenez ici, tous les deux, immediatement.<br />
Pour que je les lave, que je prie sur eux, afin qu'Allah leur<br />
pardonne.<br />
Alors Ahmadou Ahmadou leur dit : 6 Macina.<br />
Ils lui dirent : oui.<br />
Il dit : mon esc1ave, et l'esclave de Cheikh Omar,<br />
vous me les apportez ici et maintenant, pour que je prie<br />
sur eux et que je les lave1.<br />
Car qUiconque prie sur eux et les lave sera exauce par Allah.<br />
Le Fouta se leva vivement, le Macina se leva violemment.<br />
Que Dieu nous assiste !<br />
Cheikh Omar se coucha au milieu de son annee, enveloppe d'un<br />
pagne2.<br />
Il tendit la main a Farba Sawa Gouwa.<br />
Farba lui dit : le Riche, l'Erudit, le Richisssime.<br />
Noble fils de nobles, qu'est-ce qui a pousse le Cadet a se coucher et<br />
a se couvrir d'un pagne?<br />
Noble fils de nobles, qUi a detruit Tamba,<br />
Detroit Goufade, detruit Dianguirde.<br />
C'est toi qUi as casse Gheghe et Ghegnaba,<br />
Detroit Farabanna, traverse le gue de Diakalelle.<br />
o Cadet d'Adama Ayse, je t'ai vu aUjourd'hui,<br />
Comme je ne t'ai jamais vu, a savoir te coucher<br />
et te couvrir au milieu des hommes.<br />
Alors il souleva le pagne et regarda le griot.<br />
Illui dit : Farba. Farba lui dit : oui.<br />
Il dit : meme si je me vois en aparte avec le Seigneur et que je veux<br />
que ce soit a l'insu des hommes, toi Farba Sawa Gouwa, tu ne le<br />
permets pas.<br />
Farba, j'etais en couchette sous ce pagne pour prier Allah l'unique.<br />
Que tous ceux qUi meurent du Fouta entrent au paradis.<br />
Le griot confond ICI les phases de l'enterrement musulman en<br />
intervertissant leur ordre chronologique : bain, priere, enterrement. Mais<br />
ceci ne s'applique pas au jihadiste, qui doit etre enterre sans rituel avec sa<br />
tenue de combat.<br />
II s'agit du pagne de retraite spirituel qui doit etre immacule.
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Kala ko maayi e Maasina yoo naat e aljanna<br />
Sa bu ko keefee ro ren n di n i en, kono Fuuta ko Fu uta<br />
Maasina ko Maasina.<br />
Fuuta e Maasina Jiioondiri<br />
Conndi huooi hakkunde maooe<br />
Ko nande muuePum tan Sayku Umar meeePi fellude<br />
o ndaara maasinaokoooe tan, oajo 0<br />
o wiya haya ! EE Fuuta !<br />
Fuuta wiya : naam<br />
muooa 0 dadoo<br />
o wiya : holi ndee ePoo moooolde ?<br />
Holi oee ePoo woroe woePeeoe, moyyuoe oari.<br />
CBe mbiya : ko oee mbiyetee Maasina<br />
Tan bajo jagga e junngo mum naamo ngoo joofo<br />
o wiya : EE Fuuta !<br />
CORPUS II<br />
CBe mbiya mo : Taal<br />
o wiya : pellee ePoo<br />
PeePeeli ePii joy wooturo fow ina wonndee loowannde<br />
Asamaan 00 na diraa, leydi na diraa<br />
Tan haa njiyaa maayePo na lelii a anndaa ko debbo maa ko<br />
gorko<br />
Tawaa maayePo na lelii a yiyataa e mum soppannde leggal,<br />
A yiyataa e mum yuwannde gaawal.<br />
Nannde muuePum Fuuta bonni Maasina bonannde bonnde<br />
Wammbaaoe oee itti Aamadu mo Aamadu<br />
Tubbe faloo lefoo geenol.<br />
Juuta salifaaji daannde<br />
Farba refti e faleeje maooe kooni Fuuta bonnii Maasina.<br />
Bajo en na ngondi e ndimaangu, na cinndi gaawe<br />
o wiya: kollee kam AI Hajji Umar ?
CORPUS IT 459<br />
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2<br />
Que tous ceux qui meurent du Macina entrent au paradis.<br />
Car c'est un pai'en qui nous a brouilles, mais le Fouta, c'est le Fouta:<br />
le Macina c'est le Macina.<br />
Le Fouta et le Macina s'empoignerent.<br />
La poudre gronda entre eux.<br />
C'est ce jour la seulement que Cheikh Omar tira des coups de<br />
fusU 1 .<br />
11 regardait les Maciniens, puis U fermait [les yeux] et se ceignait.<br />
11 disait : oh ! Fouta !<br />
Le Fouta disait : oui.<br />
Quel est ce detachement ?<br />
QUi sont ces hommes de teint clair a la belle prestance ?<br />
Ils disaient : ce sont ces gens qu'on appelle les Maciniens.<br />
Alors le Saint pointait sa main droite [vers le Macina].<br />
11 disait : oh Fouta.<br />
Ils disaient : Tall.<br />
11 disait : tirez par la.<br />
Chacun de ses cinq doigts etait charge et tirait l'un a la suite de<br />
l'autre.<br />
Le ciel grondait, la terre grondait.<br />
Alors tu voyais un mort gisant, sans savoir s'il s'agissait d'une<br />
femme ou d'un homme.<br />
Tu trouvais un mort etendu, sans la moindre trace d'un coup ou la<br />
moindre blessure d'une lance.<br />
Ce jour-la, le Fouta detruisit completement le Macina.<br />
Les griots musiciens prirent Ahmadou Ahmadou :<br />
Penche au cou etofIe 2 ,<br />
Le Peul au cou ride.<br />
Farba suivit leurs traces. Pour vrai, le Fouta detruisit completement<br />
le Macina.<br />
Les preux avaient un destrier, etaient armes de lances.<br />
Us disaient : montrez-moi El Hadj Omar ?<br />
Ce fait est insolite. Il n'est pas atteste par d'autres versions, qui le niem<br />
presque toutes. Cheikh possedait plutot une lance qui lui permettait<br />
d'accomplir des miracles, tout comme le baton de Molse. L'epopee<br />
toucouleur soutient qu'Omar n'a jamais tue une personne durant tout le<br />
jihad.<br />
Mot a mot : au cou semblable a une etoffe.
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3<br />
Haa Elimaan e banndi mum njiida.<br />
CORPUS II<br />
Be mbiya : oya moyyo oariJ Daleejo jUcflcflo daanndeJ kuccitcflo<br />
FUcflnaangeJ na joocflii J ko oon woni Sayku Umar.<br />
Tawi Farba nanii Aamadu mo AamaduJ<br />
Na naamnoo Sayku.<br />
Farba wiy : kodda Adama Aye Elimaan Siree<br />
Sammba Demmba Aali Muttaar<br />
EE Tooroodoo 1 J ngari jumaa e jamaaJ Elimaan na yiiloo<br />
banndi mum<br />
Sayku wiya ndaaniiJ dimmba hoore<br />
o wiya : dum ne jiilotoocflo ma oOJ kodda Aadama Ayse<br />
Ombo wacflcflii ndimaangu mbaaraangu !<br />
Ombo sinndii gaawee bocfleeje)<br />
Mi yiyaani e yeeso maa hee so wonaa tuggordu maa nduu<br />
Kooni Sayku Umar Elimaan dee na yiilo banndi mum<br />
Sayku wiya ndaanii dimmba hooreJ jaDe na njana<br />
Haa Aamadu mo AamaduJ Sayku UmarJ<br />
Sagata turii Dokkitii gaawal 2<br />
Farba Sawa Guwa wii mo : kodda Aadama Ayse Elimaan Siree<br />
Sammba Demmba Aali Muttaar<br />
Ko nii de gaawal barma wacflatno nde wada ko boni<br />
So ahul dee fow ? Masinaoke 00 Dokkitii gaawal<br />
Dariima e alkabeejeJ junngo mum ngoo yeeyii dow<br />
Hay so ko a bareteecflo kam J lemo haa nganndaa non<br />
Wardu maa. Mi yiyaani hay huunde yeeso maa<br />
Sayku wii n ii fotti e Aamadu mo Aamadu<br />
Tambilii gaawal na wiyee Ujicci mbaalu u •<br />
Tooroodoo 00 jawliiJ 0 turi 0 Y'etti tuggordu nduu.<br />
o joofii e Aamadu mo Aamadu<br />
o wii e hunuko makko koo t uy3<br />
Tan haa De njii gaawal na wiyi e leydi pat!<br />
Abus de gemination par souci rythmique.<br />
Rupture de construction.<br />
Onomatopee marquant ici le broit de la lance
CORPUS IT 461<br />
1625. Pour que l'imame<br />
1626.<br />
1627.<br />
1628.<br />
1629.<br />
1630.<br />
1631.<br />
1632.<br />
1633.<br />
1634.<br />
1635.<br />
1636.<br />
1637.<br />
1638.<br />
1639.<br />
1640.<br />
1641.<br />
1642.<br />
1643.<br />
1644.<br />
1645.<br />
1646.<br />
1647.<br />
1648.<br />
1649.<br />
1650.<br />
1651.<br />
1652.<br />
1 et son homologue se voient.<br />
Ils disaient : cet homme a la belle tresse, noir au long cou,<br />
Tourne vers l'est, assis, c'est celui- la Cheikh Omar.<br />
A ce moment, Farba entendit Ahmadou Ahmadou<br />
Demander Cheikh Omar.<br />
Alors Farba dit : Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire Samba Demba All<br />
Moutar.<br />
o Torodo, champion de la mosquee et de la grande mosquee, un<br />
Imamee cherche son homologue.<br />
Le Cheikh faisait ainsi, remuait la tete.<br />
Il disait : en outre, celui qUi te cherche, Cadet d'Adama Ayse,<br />
n a enfourche un destrier.<br />
Il est arme de lances rouges.<br />
Je ne vois en face de lui que ton baton [de pelerin] ;<br />
En verite, Cheikh Omar, un imame cherche son homologue.<br />
Le Cheikh faisait ainsi, remuait la tete ; les pedes de son chapelet<br />
tombe'rent2 ,<br />
Jusqu'a ce qu'Ahmadou Ahmadou s'approchat de Cheikh Omar.<br />
Un jeune homme lacha une fleche.<br />
Farba Sawa Gouwa lUi dit: Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire Samba<br />
Demba All Moutar,<br />
C'est ainsi qu'agissaient les fleches malefiques ;<br />
Meme si tu as peur, le Macinien a decoche une fleche.<br />
Il se tint sur les etriers, son bras visa la-haut.<br />
Meme si tu dois mourir, regarde au moins comment U va te tuer ;<br />
J e ne vois rien en face de toL<br />
Le Cheikh se retouma et rencontra Ahmadou Ahmadou<br />
Tenant une lance appelee " Djithie mbalou."<br />
Le Torodo saisit violemment3, se baissa, prit son baton,<br />
Ille pointa en direction d'Ahmadou Ahmadou.<br />
Il fit dans sa bouche " Touy ! "4.<br />
Alors Us virent une lance se jeter a terre "patt"5.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
L'Imame designe celui qui dirige la priere musulmane. Ici Ahmadou III est<br />
I'Imame de Macina, Cheikh Omar celui du Fouta.<br />
Il s'agit des perles du chapelet qu'il egrenait.<br />
Le complement n'est pas exprime : il s'agit sans doute du baton.<br />
Onomatopee marquant un coup victorieux, c'est le coup du fusil.<br />
Onomatopee marquant un bruit sourd.
462<br />
1653.<br />
1654.<br />
1655.<br />
1656.<br />
1657.<br />
1658.<br />
1659.<br />
1660 .<br />
1661.<br />
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1665.<br />
1666.<br />
1667.<br />
1668.<br />
1669.<br />
1670 .<br />
1671.<br />
1672.<br />
1673.<br />
1674.<br />
1675.<br />
1676.<br />
1677.<br />
1678.<br />
Ndeka tuy 00 1 bonnii<br />
Aamadu mo Aamadu barmi<br />
o wii De : joon i Maasina<br />
'Bee mbii mo : naam<br />
o wii De : mi Darmii<br />
Jooni yoo dan e pucci hee ko ittaa<br />
Nawon mi haa to daande maayo tooJ pucci cPii<br />
Roota Hamdalaay miin njolnon-mi e laana<br />
RaOko Sayku Umar ne 0 tinii cPum J<br />
Aamadu mo Aamadu barmii J<br />
Pucci njolnoyaama e maayo<br />
tDoon ne ka Oko ne 0 hucciti e Fuuta<br />
o wii : Alfaa Umar Ceerno Baylaa !<br />
Alfa wii mbo : naam !<br />
o wii : Aamadu mo Aamadu alaa e pucci Maasina hee<br />
Aan ne ittu koyngal konu J<br />
Takko-cPaa e daande maayo ngooJ<br />
Ma on njii toon ombo joli e laana J<br />
yeeonon moo<br />
Mbiyon yo 0 naaw hakkunde amen<br />
kala no 0 wii so 0 heDiino mi ma 0 wacP-am noon J<br />
mbacPon mbo noon.<br />
tDoon noon De njaaDan i daande maayoJ<br />
Haa De njii Aamadu mo Aamadu.<br />
Aamadu mo Aamadu Sooynii pucci Fuuta.<br />
o wii De : Haaya koo Maasina<br />
De mbii mo : naam<br />
o wii : yoo laana kaa joof<br />
cPuma ko pucci Sayku Umar<br />
ko miin De ngabbii<br />
Laana kaa joofi<br />
Alfaa Umar Ceerno Bayla yettiiJ<br />
itti Dataake 00 rokki mo ;<br />
mo Sayku win ndu noG 00.<br />
o wii : Sayku wii ko yo mi naaw hakkunde amen<br />
Substantif forme a panir de l'onomatopee.<br />
CORPUS II
CORPUS IT 463<br />
1653. Cependant le "touy" avait bien atteint le roi :<br />
1654. Ahmadou Ahmadou etait gravement blesse.<br />
1655. Uleur dit: Macina.<br />
1656. Us dirent: oui.<br />
1657. Il leur dit: je suis blesse,<br />
1658. A present, choisissez quelques chevaux,<br />
1659. Pour m'emmener au bord du fleuve, puis les chevaux<br />
1660. Retoumeront a Hamdallahi ; moi, vous me transportez dans une<br />
pirogue.<br />
1661. Cheikh Omar aussi fut infonne,<br />
1662. Qu'Ahmadou Ahmadou etait blesse.<br />
1663. Les chevaux se dirigerent vers le fleuve [Niger].<br />
1664. Alors le Cheikh Omar fit face au Fouta et dit : Alpha Oumatrhiemo<br />
Bayla r<br />
1665. Alpha lUi dit : oui.<br />
1666. Il dit : Ahmadou Ahmadou ne se trouve pas parmi les chevaux du<br />
Macina.<br />
1667. Toi aussi prends une colonne, puis longe la rive du fleuve.<br />
1668. Vous le trouverez la, a bord d'une pirogue.<br />
1669. Dites lui de juger entre nous :<br />
1670. Son verdict sera le mien1.<br />
1671. Alors Us se dirigerent vers le rivage,<br />
1672. Jusqu'a ce qu'ils virent Ahmadou Ahmadou,<br />
1673. Ahmadou Ahmadou, ayant apen;u les chevaux du Fouta,<br />
1674. Leur dit : oh Macina ! ils lui dirent : oui. 11 dit :<br />
1675. Arretez la pirogue, les chevaux de Cheikh Omar arrivent, c'est moi<br />
qu'ils poursuivent.<br />
1676. La pirogue fut arretee.<br />
1677. Illui remet la lettre, que le Cheikh IUi a envoyee.<br />
1678. Il dit : le Cheikh me demande de juger entre nous.<br />
Mot a mot tout ce qu'il dira vouloir me faire s'il m'avait attrape, traitez-le<br />
ainsi.
464<br />
1679.<br />
1680 .<br />
1681.<br />
1682.<br />
1683.<br />
1684.<br />
1685.<br />
1686.<br />
1687.<br />
1688.<br />
1689.<br />
1690 .<br />
1691.<br />
1692.<br />
1693.<br />
1694.<br />
Wallaay so mi heDiino Sayku Umar,<br />
mi warat cfum<br />
So mi wariino mbo,<br />
mi lootat no mbo,<br />
So mi lootiino mbo,<br />
so mi hasniino mbo,<br />
Mi asa ngaska haa timma<br />
so mi asii ngaska haa timmii,<br />
Mi ubba mo,<br />
Mi juula mo njuulu moyyo.<br />
Yalla yo yaafo mi yaafoo moo<br />
o wii : awwaa, miin ne 0 wii mi<br />
kono mbii-
CORPUS IT 465<br />
1679.<br />
1680.<br />
1681.<br />
1682.<br />
1683.<br />
1684.<br />
1685.<br />
1686.<br />
1687.<br />
1688.<br />
1689.<br />
1690.<br />
1691.<br />
1692.<br />
1693.<br />
1694.<br />
1<br />
Par Allah si j'avais pris le Cheikh, je l'aurais tue,<br />
Dne fois tue, je l'aurais lave,<br />
Dne fois lave, je l'aurais vetu,<br />
Dne fois vetu, j'aurais creuse un trou adequat,<br />
Dne fois le trou convenablement creuse, je l'aurais enterre,<br />
J'aurais fait sur lui des prieres speciales,<br />
Qu'Allah me pardonne et lui pardonne aussi.<br />
Il dit : alors, moi aussi, il m'a dit que tu sois traite tel que tu voulais<br />
agir a son endroit .<br />
C'est ainsi qu'ils I'enterrerent a Mopti1.<br />
Ils revinrent, le Cheikh leur dit : comment avez-vous agi par<br />
rapport a Ahmadou Ahmadou ?<br />
Ils dirent : nous l'avons enterre.<br />
Ce lieu s'appelle Mopti, ville eternelle du Macina !<br />
C'est la que j'arrete l'epopee du Cadet d'Adama Ayse Elimane Cire<br />
Samba Demba All Moutar.<br />
Noble fils de Nobles.<br />
L'epopee du Cheikh ne s'acheve jamais,<br />
Mais je I'ai recitee jusque la.<br />
Mot a mot : ils le garderent a Mopti. La traduction dissocie le jeu de mots 6t.<br />
moptimo, resultant d'une similitude de radical entre le verbe garder<br />
moptude et la ville de Mopti. Par ailleurs, cette similitude morphologique<br />
est recuperee par l'epopee pour asseoir un mythe de fondation.
466<br />
1. Sayku Umar yaa 1<br />
BEYTOL HAMMAAT SAMMBA LII<br />
BAAR TO MAASINA,<br />
DAANDE DEMBA SAAR<br />
ko Fuuta Tooro 0 Ummorii J<br />
2. Fow kodda Aadama Ayse<br />
ToorODDe aan Durii.<br />
3. Ko Halwaar 0 jiDinaa<br />
o mawn i Tooroodo koy ferii J<br />
4. Tayii maaje lummbii caalli<br />
De 0 noddunoo ngarii.<br />
5. 0 wii ko Alia wiyi mi<br />
yo en pellu diine Mohammadaa.<br />
6. MalanOODe kaDDii pucci<br />
caasaati cfIiin ngarii J<br />
7. Doon juul De nani nootii mo<br />
mbii sayku min ngarii.<br />
8. 0 ummii 0 tiindi Fuuta<br />
Halwaar 0 jipporii J<br />
9. Tawii ndunngu faandiima<br />
Hoorefonde 0 ruumtoyii.<br />
10 . 0 wii Fuuta fow yoo nooto<br />
diine Mohammadaa.<br />
11. Dawcflo Halwaar so juulnii Makka<br />
ngal teddunngal yonii J<br />
12. Gila nele Sayku waynii Fuuta<br />
fucPnaange tan won ii J<br />
13. Aan anndi Misira e Makka<br />
toon DU rcPo 00 won ii.<br />
VI "Yaa ". vocatif arabe, ya poularise ici.<br />
CORPUS III
CORPUS ill<br />
1<br />
2.<br />
3.<br />
4.<br />
5.<br />
6<br />
7.<br />
8.<br />
9.<br />
10.<br />
11<br />
12.<br />
13.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
POEME DE HAMMAT SAMBA LY COMPOSE AV MACINA<br />
DECLAME PAR DEMBA SARR<br />
Cheikh Omar oh !<br />
c'est du Fouta-Toro qu'il est venUe<br />
De tous, Cadet d 'Adama Ayse,<br />
des Torodos1 tu es le meilleur.<br />
C'est a Halwar qu'il est ne,<br />
il a grandi, le Torodo a emigre.<br />
11 a traverse des mers et des cours d'eau,<br />
ceux qu'il avait appeles sont venus.<br />
n dit c'est Dieu qui m'a dit :<br />
Faisons la guerre sainte de Mohammed2.<br />
Les Bienheureux ont scelle les chevaux,<br />
les chevaux de course sont venus.<br />
La}les pieux entendirent et repondirent,<br />
disant : Cheikh nous voila.<br />
11 se leva et se dirigea vers le Fouta,<br />
c'est a Halwar qu'il descendit.<br />
C'etait a l'approche de l'hivernage3 ,<br />
c'est a H6refonde qu'il descendit.<br />
n dit a tout le Fouta de repondre<br />
a la religion de Mohammed.<br />
Celui qui a quitte Halwar le matin, s 'il dirige la priere a la Mecque,<br />
cet honneur que voila suffit.<br />
Depuis que Cheikh a quitte le Fouta,<br />
c'est en Orient qu'il se trouve.<br />
Soit au Caire, soit a la Mecque,<br />
c'est la que le Meilleur se trouve.<br />
467<br />
Hemistiche deux, Torodos : nobles.<br />
Nom ambigu dans ce poeme : Mohammadou ou Amadou designe soit le<br />
Prophete Mohammed, soit El Hadj Omar soit Cheikh Tidjane. 11 est aussi<br />
employe pour la rime, parfois il n'a aucun sens precis. Il fonctionne aussi<br />
comme une sone de refrain revenant apres un groupe de quatre verso<br />
11 s'agit de la deuxieme campagne de recrutement d'EI Hadj Omar. Elle est<br />
aussi appelee deuxieme emigration. Elle date de 1858-1859. Cf La Qacida en<br />
poular de Mohamadou Aliou Tyam (v 667, p. 113,v 700, p. 119).
470 CORPUS ITI<br />
27. Wonaa doole ko ballal miin<br />
ko Alia rokki mi.<br />
28. Mi wasoraaki d'um hay gooto<br />
kala yimoe ngondu-mi,<br />
29. Miin Sayku wii pellee<br />
ko Aljanna d'aoou mi,<br />
30. Cahodind'o so maayi janngo<br />
ko e diine Aamadaa.<br />
3 1. M i in Sa yku m ii n fell i<br />
Nooro felli Maasina,<br />
32. Miin felli kulikoro<br />
leydi heeferoe majjinaa.<br />
33. So mi wasiima ko wad'ata mi<br />
miin Umar mo fuutayel,<br />
34. Mi fellaani laarde jawdi<br />
saka dande heen nalel,<br />
35. Sogo am tan mi diwa mi juuroo<br />
mi nannda e maryamel,<br />
36. To nder leyd'eel heeferoe<br />
mi fella toon,<br />
37. Caliid'o fow mi hirsa<br />
mi hesd'itina diine Aamadaa.<br />
38. Nde keefeero huli hirseede<br />
dogi diine mooloyii,<br />
39. To Aamadu mo Aamadu 00<br />
mo waliyaaoe njokkoyii,<br />
40. 0 wii Taalo riddi kam<br />
ko Halwaar 0 ummorii,<br />
41. Tawi Alia waahidum 1 kogooto<br />
1 V41 Terme arabe unique, un.
CORPUS ill 471<br />
27.<br />
28.<br />
29.<br />
30.<br />
31.<br />
32.<br />
33.<br />
34.<br />
35.<br />
36.<br />
37.<br />
38.<br />
39.<br />
40.<br />
41.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
8<br />
Ce n'est pas par la force. c'est le secours.<br />
moi. c'est Dieu qui m'a comble.<br />
Je ne me vante pas pour cela.<br />
parmi mes compagnons.<br />
C'est moi Cheikh qui ai dit : tirez.<br />
c'est le paradis que je cherche.<br />
Celui qUi meurtl . s'il meurt demain.<br />
c'est dans la religion d'Amadou.<br />
C'est moi Cheikh qUi ai tire des coups de fusil<br />
sur Nioro. tire sur le Macina2 .<br />
J'ai tire des coups de fusil sur Koulikoro,<br />
le pays des paiens ignorants.<br />
Si je me vante qu'est-ce que cela me fait,<br />
moi. Oumar du Fouta3.<br />
J e ne fais pas la guerre pour des richesses<br />
ni pour acquerir une genisse 4 .<br />
Mon desir unique: m'envoler, puis atterrir<br />
semblable cl un pigeonneau.<br />
A l'interieur des pays des parens,<br />
Je vais y tirer un fusil.<br />
Tout incredule5. je l'egorge,<br />
je reforme la religion.<br />
Quand l'incredule refusa d'etre egorge.<br />
il fUit la religion pour se refugier,<br />
Aupres d'Amadou Amadou6.<br />
descendant de "waliyou".<br />
11 dit : le Tall7 m'a chasse,<br />
c'est de Halwar qu'il vient.<br />
Si Dieu l'unique8 est unique,<br />
Mot arabe : celui qui meurt en guerre. Repetition du mot arabe repris en<br />
poular. C'est un procede frequent dans ce poeme.<br />
Anticipation dans le recit.<br />
Diminutif de Fouta. Fuutayel.<br />
La vache est le bien supreme dans cette societe.<br />
Le palen designe ici Ali Diarra ou Ali Da Monzon. roi de Segou qui se<br />
refugia aupres du roi du Macina • Ahmadou Ahmadou ou Amadou In en<br />
1861.<br />
Amadou mo Amadou : Ahmadou fils de Ahmadou.<br />
El Hadj Omar Tall.<br />
Omar temoigne de l'omnipotence d'Allah.
472<br />
42.<br />
43.<br />
44.<br />
45.<br />
46.<br />
47.<br />
48.<br />
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50 .<br />
51.<br />
52.<br />
53.<br />
54.<br />
55.<br />
1<br />
2<br />
koye makko wondo yii J<br />
tOalam tan mi doga haa mi da
CORPUS ill 473<br />
42.<br />
43.<br />
44.<br />
45.<br />
46.<br />
47.<br />
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1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
11 est avee Lui1.<br />
Laisse-moi me sauver, afin d'eehapper<br />
au Cheikh Amadou.<br />
Amadou Amadou dit :<br />
reste, je vais te sauver.<br />
Si Cheikh vient iei,<br />
il ne rattrapera point pour t'egorger.<br />
Cet habitant du Fouta-Toro2<br />
te poursuit seulement3 ;<br />
Tu as fui eomme une gazelle dans la savane;<br />
laissant ainsi ta maison.<br />
Reste, aujourd'hui je vais te sauver<br />
de Cheikh Amadou.<br />
Cheikh eerivit une lettre qu'il eonfia a quelqu'un,<br />
afin qu'illa lui remette4 .<br />
Il dit : Amadou Amadou,<br />
Cheikh Omar en personne te salue.<br />
Il a ehasse la-bas un paien,<br />
qui a passe la nuit ehez toL<br />
Convertis-Ie ou alors remets-Ie IUi,<br />
afin qu'il le eonvertisse pour te le renvoyer.<br />
S'il refuseS qU'il6 l'egorge,<br />
afin de reformer la religion Amadou.<br />
Amadou Amadou dit :<br />
je ne [le] eonvertis pas, il ne le eonvertit pas.<br />
Il a passe la nuit dans ma maison,<br />
aUjourd'hui, il n'en sort pas.<br />
crest moi le roi du Maeina aujourd'hui,<br />
il verra que j e ne mens pas.<br />
Deuxieme hemistiche : El Hadj Omar.<br />
L'hemistiche juxtapose des diminutifs depreciatifs. On pourrait aussi<br />
traduire par : ce simple habitant du petit Fouta-Toro.<br />
Le deuxieme hemistiche implique une accusation. Il a le sens de : te<br />
poursuit alors sans motif.<br />
Lettre adressee a Ahmadou Ahmadou, Emir du Macina.<br />
Si Ali refuse la conversion.<br />
Amadou Amadou. Ce premier hemistiche est vague pour ne pas dire confus,<br />
par la multiplication du pronom personnel it.
474<br />
56.<br />
57.<br />
58.<br />
59.<br />
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67.<br />
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1<br />
2<br />
3<br />
Kala mo kaD-mi moo De ndiiw d'um<br />
De n didda De d'accataa,<br />
Haa De nawta d'um nder Fuuta<br />
tooroori 1 Aamadaa.<br />
Sayku wii mo mi yid'aano so ma mi wad'<br />
so weetii ma mi fella moo,<br />
Haa 0 ridda mi Fuuta<br />
Tooro mi manta moo,<br />
Mao min kawra janngo<br />
mi wad'a paaka 2 mi hirsa moo<br />
Aamadu mo Aamadu 00<br />
ko keefeero hoomtin 00,<br />
Yettud'o diine wostii keefeeru<br />
d'um wonaa e loa bi Aamadaa.<br />
Ndeen Aamadu mo Aamadu<br />
nelanii leyd'eele Maasinaa,<br />
Ko nootii mo Ujunere ned'd'o<br />
d'um ina famd'inaa 3 ,<br />
Silamaaji beld'i e pucci<br />
caasaati nga rdi naa,<br />
tEe njettiiDe mbii kaalen<br />
ed'en pella Sayku naa,<br />
So wonaa 0 bonna leyd'eele<br />
Maasina Aamadaa.<br />
tEe kaa Id i De kawri i<br />
haa De kooti De njood'oyii,<br />
Omo wirda Sayku ina wirda<br />
V57 Deformation de Toro, pour la rime.<br />
V60 "Paaka" est un mot wolof signifiant couteau, en poular c'est laBi.<br />
V64 La structure syntaxique du vers est transformee par le poete.<br />
Entendons : ujunere ned'd'o inajamd'inaaeko nootimo.<br />
CORPUS III
CORPUS III 475<br />
56.<br />
57.<br />
58.<br />
59.<br />
60.<br />
61.<br />
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66.<br />
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68.<br />
69.<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
QUiconque je combattrai. Us 1 le chasseront.<br />
Us le poursuivront sans relache.<br />
Jusqu'a le ramener a l'interieur du Fouta Toro2.<br />
6 Amadou.<br />
Cheikh lui3 dit : je ne le voulais pas, mais je le ferai,<br />
demain je l'attaquerai,<br />
Jusqu'a ce qu'll me renvoie au Fouta-Toro,<br />
alors je le louerai.<br />
Ou alors nous nous rencontrerons demain,<br />
je l'egorgerai au couteau .<br />
Amadou Amadou que voila4 ,<br />
c'est le paien qUi l'a seduit.<br />
Prendre la religion, la troquer contre le paganisme.<br />
cela est hors des voies d'Amadou.<br />
Quand Amadou Amadou<br />
fit appeler les provinces du Macina,<br />
Ceux qUi lui repondirent [ furentj,<br />
de loin superieurs a mille personnes5.<br />
Sabres tranchants et chevaux<br />
de course furent mis en avant.<br />
Us arriverent et dirent: parlons,<br />
nous allons attaquer notre Cheikh6 ,<br />
Sinon II detruira les provinces<br />
du Macina Amadou.<br />
I1s discuterent et se mirent d'accord.<br />
alors au retour, ils tinrent conseil.<br />
117 se mit a egrener son chapelet, Cheikh aussi<br />
Les soldats de l'armee du Macina qui, par ailleurs, etaient d'exeellents<br />
landers.<br />
Done Ahmadou Ahmadou designe. derriere son hypothese, El Hadj Omar,<br />
habitant du Fouta-Toro.<br />
Ahmadou Ahmadou.<br />
Le poete donne la parole a Cheikh Omar sans transition.<br />
L'inversion rend ce vers quelque peu difficile. Son sens est : "le nombre de<br />
personnes qui repondit a l'appel d'Ahmadou Ahmadou est de loin superieur<br />
a mille personnes ".<br />
Cheikh Omar. Le possessif "notre" s'explique par la rime en "ni" rendue par<br />
l'arabe" Saykuni".<br />
Amadou Amadou et Cheikh Omar.
476<br />
haa jamma jenngoyii J<br />
70. I{)oon Sayku waklii wonti<br />
huunde no mooytoyii J<br />
71. Tawi ooOcPi makko e kurus makko<br />
n i yettoyi i J<br />
72. 0 haamtii 0 anndii poolgu<br />
woodani Sayku Aamadaa.<br />
73. 0 wii ittaa so min kawrii janngo e karawal<br />
ko nduufri wontata J<br />
74. So min kawrii ko nalawma<br />
jamma cPum wontata J<br />
75. So min kawrii ko e lewlewal<br />
k0 n iDoe re won toto J<br />
76. So min kawrii ko 0 bocPeejo<br />
ko oaleejo 0 wontata J<br />
77. Sabi heewde puce; e yimoe<br />
Maasina Aamadaa.<br />
78. 0 wii so min kawrii jan ngo to Maasina lekki fow<br />
ma mi darnu heen pucci teemederee J<br />
79. E labangal e joom mum<br />
e hirke e mojoberee 1 J<br />
80. Eoe coppinii De ngaamaani<br />
dawriroe tamperee J<br />
81. Eoe mbeetan i ndee wolde<br />
De meecPaan i aooeree J<br />
82. Eoe pellana mi Fuutaoke<br />
Saykuujo Aamadaa.<br />
83. Sayku wii on nanii Aamadu mo Aamadu wii:<br />
so min kawrii to Maasina janngo<br />
84. Lekki fow ma 0 darnu heen pucci teemedere J<br />
CORPUS III<br />
V79 Tenne macinien se disant en poular du Fouta-Toro njogitaari (arme).
CORPUS ITI 477<br />
70.<br />
71.<br />
72.<br />
73.<br />
74.<br />
75.<br />
76.<br />
77.<br />
78.<br />
79.<br />
80.<br />
81.<br />
82.<br />
83.<br />
84.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
egrenait son chapelet jusqu'au plus fort de la nuit.<br />
A ce moment. Cheikh<br />
se metamorphosa en quelque chose.<br />
Alors qu'll sommeillait. chapelet [en main).<br />
alors II le prit1.<br />
n se lamenta. sachant que la victoire<br />
appartenait a Cheikh Amadou.<br />
Il dit : malgre tout. si nous nous affrontons demain.<br />
tout deviendra sablonneux.<br />
Si on se rencontre en plein jour.<br />
nuit cela deviendra.<br />
Si on se rencontre en pleine clarte.<br />
obscurite cela deviendra.<br />
Si on se rencontre alors qu'll est de teint clair.<br />
de teint noir il deviendra.<br />
A cause du nombre de chevaux et de personnes<br />
du Macina Amadou.<br />
Il dit: si on se rencontre demain au Macina. sous chaque arbre<br />
je mettrai cent chevaux2 .<br />
Avec un mors et son proprietaire.<br />
avec une selle et une arme.<br />
Us sont assist Us ne sont pas paresseux.<br />
prets ce jour a3 se fatiguer.<br />
Ils sont prets au matin4 de cette bataille.<br />
Us n'ont pas absorbe un seul grain.<br />
Us combattent pour moi l'habitant du Fouta.<br />
le Cheikh Amadou.<br />
Cheikh dit : vous avez entendu Amadou Amadou dire.<br />
que si on se rencontre au Macina demain.<br />
Sous chaque arbre il mettra cent chevaux.<br />
Cheikh Omar se metamorphosa en chat d'apres la tradition orale. Il trouva<br />
Ahmadou en train de somnoler, alors il prit son chapelet. C'etait ta. sur le<br />
plan mystique. un signe evident de victoire. car l'adversaire ayant perdu<br />
son arme devint vulnerable .<br />
Ici la numeration poular est respectee : chevaux cent. contrairement au v.<br />
23.<br />
Le deuxieme hemistiche est plus concis en poular.<br />
cr vers 80.
480 CORPUS ill<br />
99. 0 wii pellee mi fellii juulne<br />
woto e mon mo sikkitii,<br />
10 0 . tOoon conndi duki deyyaan i<br />
Maasina luuncitii,<br />
10 1. Ndeen kodda Aadama nanngi<br />
pucci caasaati feccitii,<br />
10 2. Ndeen diiraali keewi<br />
Aadama e Aliw luuncitii 1.<br />
10 3. tOimmere ndeen 0 wii<br />
kalhaldi woon ndi wii naamtataa,<br />
10 4. Kala moolcfo kan e moolaacfo<br />
cficfo fow m i cfaccataa,<br />
10 5. Ma mi wara ne mi naatna e leydi<br />
faal bada ne njaltataa,.<br />
10 6. Nde wona luuru nen n i Sayku<br />
cfoo rewi Aamadaa.<br />
10 7. Hay haamam noon ko ndokkanoo-mi gasii<br />
ha!)kadi mi nennataa,<br />
10 8. Mi yii maale majjum e ndiwri<br />
ndiwatnoon d iweeyataa,<br />
10 9. CSe ngasii leydi ne tawii toon<br />
ndiin peewnoondi oonataa,<br />
110. CSe pellii ne coppi ne ngartirii leydi<br />
faa' bada min nennataa,<br />
111. tOum fow ko kaacftud i<br />
diine Saykuuji Aamadaa.<br />
1 VlOO Luuncitii vocabulaire du Macina.
CORPUS ID 481<br />
99.<br />
100.<br />
101.<br />
102.<br />
103.<br />
104.<br />
105.<br />
106.<br />
107.<br />
108.<br />
109.<br />
110.<br />
Ill.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
7<br />
8<br />
n dit : tirez, j'ai tire musulmans,<br />
que personne de vous n 'en doute1.<br />
Alors la poudre cria sans se taire2 ,<br />
alors le Macina s'eloigna3.<br />
Alors le Cadet d'Adama prit<br />
des chevaux de course qu'il divisa4.<br />
Quand le tumulte atteignit son point culminant,<br />
Adama et Aliou s'eloignerent5.<br />
En second lieu, il dit :<br />
le Belier a jure, il ne se reniera pas.<br />
Celui qui a donne refuge et celui qui s'est refugie6 ,<br />
tous les deuxje ne les laisserai pas.<br />
Je les tuerai, je les enterrerai,<br />
plus jamais ils ne sortiront.<br />
A la fm du conflit, Cheikh<br />
est passe par hi Amadou.<br />
Je regrette7 que ma mission soit achevee,<br />
dorenavantje ne continuerai plus.<br />
J'en ai vu les signes par l'oiseau<br />
qui volait, qui ne plane plus.<br />
lIs ont creuse la terre, il y ont trouve<br />
celui8 qui etait droit qui ne se tord point.<br />
Ils l'ont tire, ils l'ont coupe puis recouvert de terre,<br />
ajamais nous ne continuerons plus.<br />
Tout ceci, c'est la limite<br />
de la religion de Cheikh Amadou.<br />
De l'issue victorieuse de la bataille.<br />
La personnification de la poudre est id tres evidente.<br />
Le Macina designe les Maciniens, c'est une metonymie.<br />
Qu'il divisa parrni ses guerriers.<br />
Adama est la mere d'EI Hadj Omar, Aliou son frere consanguin, mais plus<br />
que frere et ami. Selon le poete, ici, ces deux morts continuent<br />
d'accompagner El Hadj.<br />
Traduction mot a mot de : protecteur et protege, Ali et Amadou Ill.<br />
Le poete donne la parole a Cheikh Omar sans transition.<br />
Ndiin, classificateur qui accompagne ici le mot nboddi : serpent, sousentendu.<br />
Selon la tradition orale, El Hadj Omar avait un serpent sous terre<br />
et un oiseau dans l'espace qui le renseignaient. Arrives au Macina. pays de<br />
mystiques rompus, les deux auxiliaires du Cheikh furent reperes et tues<br />
avec l'aide de Bekkaye Kounta.
482<br />
112.<br />
113.<br />
114.<br />
115.<br />
116.<br />
117.<br />
118.<br />
119.<br />
120 .<br />
121.<br />
122.<br />
123.<br />
124.<br />
125.<br />
126.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Keefeero biyeteecflo Aa li<br />
daande mum mi fappitii 1 J<br />
Aamadu mo Aamadu mi jolnii mo<br />
e laana mi fokkitii J<br />
Mi nawii mo haa to nder maaje<br />
mawcfle mi sakkitii 2 J<br />
So mi soppu maa so mi yool mo<br />
daande makko mi muccitii 3<br />
Mi warii moolcflo kam e moolaacflo<br />
cflicflo fow Aamadaa.<br />
Miin Sayku kam so mi warii keefeer0 4<br />
tan oernde am welii J<br />
Mi warii laamcflo Maasina<br />
warngo bonngo 0 mona lelii J<br />
Heddiima cfloon miskinoe 5<br />
mbiyetee ko minsalii.<br />
Mi oenni mi naati e haayre<br />
wiyeteende salsa lii J<br />
Ko cfloon wolde ndee haacfli<br />
juuloooe Aamadaa.<br />
Defte mbii nde ko salsalii<br />
mbiy-cflen nde Dagamberee.<br />
Kodda Aadama naati e haayre<br />
oeydii ko fofteree J<br />
o sunii kaOko gaa miskinoe<br />
cflum oeydi majjeree.<br />
Soo guurcflo maa soo 0 maaycflo<br />
o naworaani tikkeree J<br />
Sabu 0 warii moolcflo kan e moolaacflo<br />
cflicflo fow to Aamadaa.<br />
CORPUS III<br />
V112 Terme du Macina rendu en poular du Fouta-Toro par tayii (couper).<br />
Vl14 Terme macinien.<br />
Vl16 Id.<br />
Vl17 Terme arabe signifiant "kafir" ou mecreant.<br />
V119 Terme arabe signifiant : pauvre.
CORPUS ill 483<br />
112.<br />
113.<br />
114.<br />
115.<br />
116.<br />
117.<br />
118.<br />
119.<br />
120.<br />
121.<br />
122.<br />
123.<br />
124.<br />
125.<br />
126.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Le paien appele All,<br />
son cou je I'ai coupe.<br />
Amadou Amadou je l'ai transporte<br />
dans une pirogue, puis je suis parti1.<br />
Je 1'ai emmene jusqu'au fond des mers<br />
les plus profondes, je l'ai jete.<br />
Oui, je l'ai coupe en morceau, oui je l'ai noye,<br />
son cou je I'ai coupe.<br />
J'ai tue celui qUi a donne refuge et celui qUi s'est refugie,<br />
tous les deux, 6 Amadou.<br />
Moi Cheikh, si seulement je tue un paien,<br />
alors mon coeur est satisfait.<br />
J'ai tue le roi du Macina,<br />
tue d'une mauvaise mort, le voUa qUi git.<br />
n reste la des pauvres,<br />
appeles "Minsalii".<br />
J'ai continue, je suis entre dans la grotte2,<br />
denommee "Salsali" .<br />
C'est hi que s'acheve la bataille,<br />
6 musuhnans Amadou.<br />
Les livres l'appellent3 Salsali,<br />
nous I'appelons4 Dagambere.<br />
Le Cadet d'Adama est entre dans la grotte,<br />
il a accru son repos.<br />
n s'est cache contre les pauvres,<br />
cela augmente l'ignorance5.<br />
S'U est vivant ou s'il est mort,<br />
il est parti sans amertume.<br />
Car il a tue celui qUi a donne refuge. et celui qUi s'est refugie,<br />
tous les deux chez Amadou.<br />
Deformation poetique du recit historique.<br />
Cf Dieng (5.), Une approche de l'epopee omarienne d'apres la chronique<br />
d'El Hadj Amadou Abdoul Niagane, Memoire de Maitrise, pp. 184-185.<br />
Le poete deforme les faits, d'autant plus qu'il fait parler le Cheikh. Cf.<br />
Dieng (5), op. Gir.<br />
La grotte oil est entre Cheikh Omar.<br />
Deuxieme hemistiche : le nom indigene.<br />
El Hadj disparaissant. les pauvres manquerent de guide et de bienfaiteur.
484<br />
127. Miin Sayku makkanaaoe e misiranaaoe<br />
ena ngandi mii.<br />
128. Saamnaaoe e misiranaaoe<br />
ena ngandi mii.<br />
129. Iraknaaoe e yamannaaoe<br />
ena ngandi mii.<br />
130. Faasnaaoe e leydi kuufanaaoe<br />
ene ngandi mii.<br />
131. CapancPe tati naatru-mi Makka<br />
ndeen njiy-mi kaabataa,<br />
132. Mohammadel galli min kawri<br />
ko e nokku cPeybataa,<br />
133. 0 duni mi jawiral ma aani 1<br />
deftere nde hay gooto yeddataa 2 ,<br />
134. Magaama Ibrahiima 3<br />
hajjirde Aamadaa.<br />
135. Duuoi tati ngon-mi e Makka<br />
tarbinii mi Ceerno am 4 :<br />
136. Mohammadel gaali rokki mi wirdu<br />
jaggi ko e jun ngo am,<br />
137. Yamiri mi dokkugol wirdu<br />
Seyku am,<br />
138. Annabiijo aan woni seede am<br />
janngo Aamadaa.<br />
139. 0 duwanii mi e qabri Rasulullaahi<br />
yaa woon seede am,<br />
140. Sayku Tijjaani yamiri e Sayku<br />
dokkugol wirdu am,<br />
141. Sayku Mohammadul qaali<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
CORPUS III<br />
V127 Cette partie ,V127 - 169 , est ajoutee au poeme de Ly par Saar.<br />
V133 Titre du livre de Cheikh Tidjane, ou se trouve consigne l'essentiel de<br />
la doctrine Tidjane.<br />
V134 Station d'Abraham : mot arabe "poularise".<br />
V135 L'adjectif possessif est proclitique en poular du Fouta-Toro ex : on di t<br />
ceernam au lieu de ceerno am comme dit le poular du Macina ou du Fouta<br />
Djallon. Ici le possessif am fonctionne comme une rime
CORPUS ITI 485<br />
127.<br />
128.<br />
129.<br />
130.<br />
131.<br />
132.<br />
133.<br />
134.<br />
135.<br />
136.<br />
137.<br />
138.<br />
139.<br />
140.<br />
141.<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
Moi, Cheikh, les Mecquois et les Cairois<br />
me connaissent1.<br />
Les Syrtens et les Cairois<br />
me connaissent.<br />
Les Iraquiens et les Yemenites<br />
me connaissent.<br />
Les habitants de Fes, et ceux du pays de Kl1fa<br />
me connaissent.<br />
Je suis entre a la Mecque a l'age de trente ans,<br />
c'est alors que je vis la Kaaba.<br />
Mohammadel Rali nous nous sommes rencontres,<br />
a un endroit pur.<br />
11 me remit le "Jawarhiral ma'ani",<br />
le livre que personne ne remet en cause.<br />
La station d'Abraham2,<br />
lieu de pelerinage Amadou.<br />
Je suis reste a la Mecque, trois ans.<br />
suivant mon maitre3 .<br />
C'est Mohammadel Rali qUi m'a donne le "wird"4.<br />
me prenant par la main.<br />
11 m'a autorise a donner le wird<br />
de mon Cheikh.<br />
Prophete, c'est toi mon temoin.<br />
demain Amadou.<br />
11 a prie pour moi au tombeau du Prophete.<br />
sois mon temoin.<br />
Cheikh TidJane a accorde au Cheikh [Rali]<br />
de me donner le wird5.<br />
Cheikh Mohammadel Rali,<br />
Le poete voit amSl son texte allonge par notre informateur. l'aveugle<br />
Demba Sarr. Ce rajoiit est compose en l'honneur d'EI Hadj Omar. malgre le<br />
style direct.<br />
Voir Le Coran. traduction Blachere. Sourate 11, v.1l9.<br />
Deuxieme hemistiche, mot a mot : faire serment d'allegeance et travailler<br />
pour un maitre jusqu'a sa pleine satisfaction.<br />
Priere chez les musulmans recitee avec un chapelet.<br />
Voir la chaine mystique d'EI Hadj Omar. Dumont (F.), L'Anti-sultan. op. dt.,<br />
p. 13.
48 6 CORPUS III<br />
oon ko giePo am habibu am,<br />
142. Sayku Tijjaani seeraani arde<br />
e baooe am,<br />
143. Mohammadu Rasulullaahi<br />
e jiiePe am,<br />
144. So e jiide maa so e koyePi<br />
o tawii kam e wirdu am,<br />
145. Mi fukkii bakkatuuji<br />
yiide Annadi Aamadaa.<br />
146. Bamande ma e Halwaar haa abbii e Makka<br />
ko Sayku daePi alluwal,<br />
147. So mo hajja wirto henndu<br />
Dura yaawde hay colel.<br />
148. Rimaahu ko deftere Sayku<br />
ittaaka hay ePorol,<br />
149. Safina ko deftere Sayku<br />
jaaroowo Aamadu jom Dural,<br />
150. WaePi mi yimde Sayku<br />
jaarePo Aamadaa.<br />
151. Ko biyeteeePo Hammat Sammba<br />
oon yimi Sayku haa nanaa,<br />
152. Ko ePoo liido yimi ePoo Taalo<br />
waePi baar to Maasinaa,<br />
153. Nde almuudo yimi ePoo Ceerno<br />
muuePum to Rabbanaa.<br />
154. So won goofi ngon i heen joom a m<br />
yaafo Rabbanaa.
CORPUS ill 487<br />
142.<br />
143.<br />
144.<br />
145.<br />
146.<br />
147.<br />
148.<br />
149.<br />
150.<br />
151.<br />
152.<br />
153.<br />
154.<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
c'est mon ami, mon ami1.<br />
Cheikh Tidjane n'a cesse<br />
de me frequenter.<br />
Mohammed, l'envoye de Dieu,<br />
de ma vue propre,<br />
Par mes yeux ou en songes,<br />
il m'a trouve faisant mon "wird".<br />
J e suis devenu pur2,<br />
en voyant le Prophete Amadou.<br />
Depuis Halwar jusqu'a la Mecque,<br />
Cheikh est le plus instruit.<br />
S'il effectue le pelerinage, un vent passe,<br />
plus rapide qu'un oiselet3 .<br />
Rimahu"4 est un livre du Cheikh,<br />
Oll il ne manque aucune feuille.<br />
"Safina"5 est un livre du Cheikh,<br />
faisant l'eloge du Prophete.<br />
C'est pourquoi je chante Cheikh,<br />
qUi a fait l'eloge du Prophete.<br />
C'est le nomme Hamrnat Samba6 ,<br />
qUi a chante le Cheikh, pour que tu entendes.<br />
C'est le Ly qui a chante le Tall,<br />
dans un air compose au Macina.<br />
Le disciple a chante son maitre<br />
en Dieu.<br />
Si des fautes s'y trouvent, mon Seigneur,<br />
[nous demandons] pardon, notre Maitre.<br />
Deuxieme hemistiche : le poular gipo est repris par le mot arabe "habib"<br />
traduit par ami, d'ou la repetion.<br />
Mot a mot : jai fait tomber mes peches.<br />
La tradition orale veut que Cheikh Omar, meme tres jeune, aille prier<br />
regulierement a la Mecque et y fasse chaque annee le pelerinage. A cet<br />
effet, il se metamorphosa en oiseau.<br />
"Rimahu" : Les lances, ecrit vers 1854 a Djegunko. Voir Dieng (S), Un e<br />
approche de l'epopee omarienne.<br />
"Safina" : la nef ou le navire. Cf Dieng (S), op. cit.<br />
Ce moudjahid, comme Mamadou Aliou Tyam, auteur de La Qacida en poular<br />
traduite par Gaden, a compose ce poeme au Macina apres "le drame de<br />
Deguimbere". C'est un compagnon d'El Hadj Omar.
!<br />
490<br />
Aljonno Aomodoo,<br />
170. Vo yimre Soyku Umor ndee hoocPi.<br />
CORPUS ITI<br />
tout entendement humain; cf. Blachere, Le Coran, Sourate "L'abondance",<br />
CV, v.3, p. 668.
CORPUS III<br />
au paradis Amadou.<br />
170. C'est la que le poeme dedie a Cheikh Omar prend fin.<br />
491
ANNEXES
ANNEXES<br />
ANNEXE I<br />
Liste des quatre-vingt dix premiers compagnons dlEI Hadj Omar d'apres<br />
1. Elimane Gu6d6<br />
2. Alpha Ahmadou<br />
3. Thierno Djiby<br />
4. Ahmadou Tapsirou<br />
5. Elimane Ahmadou Boubou<br />
6. Alpha Mohamadou<br />
7. Thiemo Bassam6r<br />
8. Alpha Oumar Thierno Baila<br />
9. Alpha Abbasse<br />
10. Alpha OumarThiemo M6116.<br />
11. Alpha Mamoudou Thiemo Abbasse<br />
12. Al Hadji SaYdou<br />
13. Thierno Alhassane Bii<br />
14. Thierno Ahmadou Ali Dielya<br />
15. Al:x:loulaye Haoussa<br />
16. Thiemo Khalidou Elimane Demba<br />
17. Thiemo Sileymane Biiba Raky Wane<br />
18. Tapsirou Miilick Guirladio<br />
19. Ismaila Daouda<br />
20. Thiemo Djiby<br />
21. Thiemo Moussa<br />
22. Thiemo Boubacar Elimane Hammiit<br />
23. Thierno HaYmouthe<br />
24. Mohamadou Hammiit Kouro<br />
25. Urn Toro Hamm6 Samba D6thi6<br />
26. B6tol Sawa Hiiko<br />
27. Boubacar Ali Doulndou<br />
28. Elimane Rindiaw<br />
29. Mamoudou Ali Doulndou<br />
30. Alpha Ali Sidi<br />
31. Thierno Sileye Amar B61a Racine<br />
32. Ardo Aliou Ndi6reby<br />
33. Koly Mody Sy<br />
34. Yem Djinnda Tabara<br />
35. Ahmadou Dhiihirou<br />
36. Boubacar Tacko Diido<br />
Massaba Ahmed Diop, griot omarien<br />
37. Samba Tacko Diido<br />
38. Idrissa Tacko Diido<br />
39. Ali Miimoudou<br />
493<br />
40. Abdoul Houdak6 Ndongo<br />
41. Mohamadou Ahmadou Thiemo<br />
42. Mohamadou Sileymane<br />
43. Abdoul Sakk6 Nguidjilone<br />
44. Khalidou Youssouph<br />
45. Hammady Ali<br />
46. Mody Ali<br />
47. SambaAtta<br />
48. Boubacar Aliou<br />
49. Alpha Mamoudou Boubou<br />
50. Alpha Abdarahmane<br />
51. Tapsirou Baila Hammat<br />
52. Tapsirou Bod6wal<br />
53. Tapsirou Salif<br />
54. Al:x:loul KhadOOiata<br />
55. Thierno Adama<br />
56. Samba Khadediata<br />
57. Boubacar Ahmadou Balasiidji<br />
58. Sadio Ali<br />
59. Alpha Ousmane Boubou<br />
60. Thiemo Sileymane Sy<br />
61. Elimane Boubacar Mbiiye<br />
62. SalifElimane<br />
63. Alpha Sileymane Ahmadou<br />
64. Ahmadou Hamme<br />
65. Ahmadou Samba Lobbo<br />
66. Alwaly Oumar<br />
67. Mody Al:x:loulaye<br />
68. Mody Mohamadou Hamme<br />
69. Mody Mohamadou Seydiyank6<br />
70. Alpha Youssouph<br />
71. Alpha Ndiathie<br />
72. Alpha Miimoudou Bassougui
ANNEXES<br />
73. Alpha Abdoul Samba Uli<br />
74. Alpha Ahmadou Yero<br />
75. 1biemo Mohamadou Lamine<br />
76. 1bierno Tillere<br />
77. 1bierno Boubacar Hamzatou<br />
78. Tapsirou Mamoudou Oumar<br />
79. Mamoudou IIammat Moukhtfu"<br />
80. Abderahmane Bassamor<br />
81. Alpha Ali, "fi qariyati"l wenndou NOdi<br />
82. Thiemo Abdoul1bioukalelle, "fi qariyati" Hammadi Hounare,<br />
83. Boubou Mohamadou Boubou, "fi qariyati" Wourossogui<br />
84. Elimane Ahmadou Boubou, "fi qariyati" Donnaye<br />
85. Alpha Kassoum, "fi qariyati" Sar Lion 2<br />
86. Alpha Oumar, "fi qaryati" Sare Mfullkka<br />
87. Elimane Hammady MaIoume, "fi qarayati" Demethe<br />
88. Lamine Tapsirou Ahmadou, "fi qarayati" Haire Lao<br />
89. Mohamadou Aliou Thiam 3 , "fi qarayati" Hai"re Lao<br />
90. Sileymani Elimane Boubacar, "fi qarayati" Dimat4.<br />
494<br />
N.B. Cette liste, manipulee selon les interets personnels des griots, subit de profondes<br />
modifications au ftl des versions.<br />
Ici elle met en relief le caractere intellectuel et aristocratique du jihad omarien qui comprit de<br />
nombreux erudits, ce que traduisent les titres "Alpha", "Tapsirou", "Thiemo", decemes aux<br />
savants musulmans. De meme les descendants de l'aristocratie peule des theocraties du Sokoto,<br />
du Macina et des deux Fouta figurent aussi en bonne place dans cette liste des premiers<br />
compagnons de Cheikh Omar.<br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
"Pi qariyati" : expression arabe signifiant "ressortissant du village de".<br />
Deformation de Sierra Leone.<br />
Auteur de La Qacida en poular editee par H. Gaden.<br />
Autre variante de Dimar, village du Fouta Toro (Departement de Podor).
GLOSSAIRE
GLOSSAIRE<br />
Almamy<br />
Almamyat<br />
Alpha<br />
Ardo<br />
Awlube<br />
Baraka<br />
Barou<br />
Boundounke<br />
Charia<br />
Cheikh<br />
Damel<br />
Diawara<br />
Djallonke<br />
Denianke<br />
Dina<br />
Elfeki<br />
Elimane<br />
Fama<br />
GLOSSAIRE<br />
A<br />
Titre que portaient les chefs du Fouta Djallon et du Fouta Toro au<br />
lendemain des revolutions theocrati- ques<br />
Regime politique du Fouta sous les Almamys.<br />
Titre donne aun erudit en Coran.<br />
Titre porte par un chef de tribu peule.<br />
499<br />
(sing. gawlo). Griots diseurs du Fouta, specialises dans les<br />
genealogies.<br />
B<br />
TeIme d'origine arabe signifiant benediction, faveurs divines.<br />
Diminutif de Oumar.<br />
Habitant du Boundou.<br />
c<br />
Mot arabe qui designe la loi musulmane.<br />
Mot arabe pour denommer le maitre, l'initiateur.<br />
Titre que portaient les Chefs du Cayor.<br />
D<br />
Nom de famille de l'aristocratie regnante dans le royaume de Diara,<br />
tombe par la suite sous la domination des Massassi devenus maitres<br />
de tout le Kaarta.<br />
Population d'origine mandingue qui habitait le massif montagneux<br />
du Djallonkadougou ; elle figurait parmi les premiers habitants du<br />
pays qui s'appela par la suite Fouta Djallon.<br />
Nom que portaient les Fulbe de la tribu de Koli Tenguella.<br />
Mot d'origine arabe qui, etymologiquement veut dire religion, passe<br />
dans le pulaar, dans le sens de pratique du culte islamique.<br />
Theocratie.<br />
E<br />
Titre que portait le Chef Peul de la Province du Ngenaar, au Fouta<br />
Toro.<br />
Titre religieux porte par certains chefs du Fouta Toro (Chefs de<br />
provinces ou de villages).<br />
Titre porte par les chefs Bambara.
GLOSSAIRE<br />
Farba<br />
Fergo<br />
Fulbe<br />
Futiyou<br />
Futa[ke<br />
Haal pulaar en<br />
Jaagorgal<br />
Jaawambe<br />
Jihad<br />
Karamoko<br />
Khalife<br />
Khalwa<br />
Khassonke<br />
Kodda<br />
Massassi<br />
Mawdo<br />
Muqadem<br />
Qacida<br />
Qadryya<br />
Ribat<br />
Titre d'origine mandingue porte par les chefs des Sebbe.<br />
Mot pulaar designant l'emigration.<br />
(sing. pullo). Appellation que se donnent les Peuls.<br />
Originaire du Fouta.<br />
Habitant du Fouta.<br />
H<br />
Ceux qui parlent le pulaar.<br />
J<br />
500<br />
Grands electeurs et grands dignitaires sous le regime de l'Almamyat,<br />
au Fouta Toro.<br />
(sing. Jaawando) : groupe ethnique peul, qui faisait fonction de<br />
conseillers des souverains.<br />
Mot arabe qui designe la guerre sainte, un effort sur le chemin<br />
d'Allah..<br />
K<br />
Terme bambara qui signifie maltre, passe dans le pulaar du Fouta<br />
Djallon.<br />
Terme arabe qui signifie successeur dans les confreries, il designe le<br />
delegue du Cheikh de l'ordre.<br />
Retraite spirituelle.<br />
Habitant du Khasso.<br />
Demier ne.<br />
M<br />
Etymologiquement, descendants de Massa, l'ancetre des premiers<br />
Bambara emigres au Kaarta.<br />
Grand, premier dans la hierarchie.<br />
Terme arabe pour designer le vicaire, celui qui seconde le Cheikh<br />
dans l'eclucation des disciples.<br />
Poeme en arabe.<br />
Confrerie mystique musulmane fondee par Cheikh Abdoul Qadr<br />
ZilooL<br />
Sortes de couvents fortifies, qui ont joue un role important dans la<br />
diffusion de l'Islam.
GLOSSAIRE<br />
Sai'ku Defonnation pulaar de Cheikh.<br />
Satigi Titre que portaient les Chefs des Denianke.<br />
Q<br />
501<br />
Sebbe (sing Ceddo), terme par lequel le haal pular designe tout Noir<br />
different de lui. Aussi, existe-il plusieurs types de Sebbe - groupe<br />
social Toucouleur.<br />
Soninke Terme par lequel se designent les populations appelees Sarakolle par<br />
les Fran9ais.<br />
Sokhna Femme pieuse.<br />
Soufi Un mystique musulman<br />
Sunna Theorie et pratique de l'Islam orthodoxe (sur la base de la tradition<br />
du prophete).<br />
Talibe Etudiant, disciple.<br />
Tapsirou, Tamsir: Titre porte par toute personne qui sait traduire le Coran.<br />
Tata Mot d'origine mandingue qui designe une forteresse.<br />
Tidjanyya Confrerie mystique musulmane fondee par Cheikh Ahmed Tidjane.<br />
Tokara Homonyme.<br />
Tondion Esclaves de la couronne, qui ont fini par prendre le pouvoir dans le<br />
royaume de Segou.<br />
Toorobbe (sing Toorodo) Aristocratie politico-religieuse qui dirigeait le Fouta<br />
Toro apartir de la revolution musulmane de la fin du XVIDe siecle.<br />
Tounka Titre que portaient les chefs soninke du Ghana et du Gadiaga.<br />
w<br />
Wazifa<br />
Wird<br />
Zaowa<br />
Un des elements du wird Tidjane.<br />
Oraison propre aune confrerie.<br />
z<br />
Place forte musulmane qui abritaient des hommes pieux s'adonnant a<br />
la fois ades activites religieuses et militaires.
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
BIDLIOGRAPHIE<br />
Anonyme<br />
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE<br />
Sources Premieres<br />
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503<br />
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Tadkhira al Ghafilin 'an gubh ikhtilafa/-mu'minfn ; n 2 5259, f - 67 ('Uthman b - fiIdi);<br />
n 2 5605, f. 10 : Kitab fi ma waq a a baina shaykh 'Umar wa Ahmad b - Ahmad, ou :<br />
Kitab Shaif al haqq al mu'tamad, fima waqa'a baina al Shaikh al Hajj 'Umar wa<br />
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Dossier 13 : Memoires generaux, publications, expositions: a : Envoi au Ministere des<br />
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BmLIOGRAPHIE 505<br />
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395 - 415.
INDEX
INDEX<br />
PRINCIPAUX NOMS<br />
514<br />
Abdoulaye All 45; 165; 182.<br />
Abdou1aye Haoussa 182.<br />
Adama Ayse 39; 108; 120; 140; 178; 179; 180; 195; 200; 319; 379; 383; 388; 399; 401; 411;<br />
421;423;429;433;435;445;450;457;461;465;467.<br />
Aguibou 45; 133; 489.<br />
Ahmadou Ahmadou 10; 47; 58; 128; 129; 130;156; 161; 168; 169; 175; 176; 177; 178; 190;<br />
191; 192; 193; 194; 196;253;262;267;270;273;286;287;291;397;399;401;403;405;407;<br />
411;415;417;419;421;427;431;433;435;437;441;443;449;451;455;460;457;461;463;<br />
465.<br />
Ahmadou Almamy Alassane 167; 178; 179; 192; 267; 274; 403; 421.<br />
Ahmed El Bekkar 252; 255; 286.<br />
Aliou 481<br />
Almamy Birane 245.<br />
Almamy Mohamadou Birful 258.<br />
Almamy Oumar 111; 112; 113; 114; 116; 260.<br />
Almamy Saada 245.<br />
Almamy Youssouph 245.<br />
Alpha Ahmadou 111; 143; 179; 323.<br />
Alpha Mamoudou Kaba 112; 115; 116<br />
Alpha OumarThierno Bayla 33; 34;36;54; 115; 121; 132; 159; 172; 178; 191; 196;253;274;<br />
353;355;377;379;385;417;419;439;441;463.<br />
Alpha Oumar Thiemo Molle 36; 54; 115.<br />
Alpha Ousmane 34; 132; 162; 165; 253.<br />
Amaa Sam Poolel 17.<br />
Archinard (L.) 3; 45; 133; 164; 290.<br />
Ardo Aliou Ndier6by 33; 34; 36; 58; 173; 175; 228; 261.<br />
Atiq 111<br />
Ba (A.H.) 288.<br />
Ba (K.) 136; 140; 148;232;234;236;296;302;307.<br />
Ba (0.) 145.<br />
Ba-Lobbo 57; 121; 129; 131; 165; 252; 253.<br />
Bathily (S.N.) 117; 264.<br />
Batou (D.) 58; 175; 176; 267; 268; 449; 454; 455.<br />
Boubakar Saada 37; 263.<br />
Blum (Cl.) 133.<br />
Bouchez (Lt) 117.<br />
Botol Sawa Hako 36; 179; 265; 267; 274; 283; 403.<br />
Cheikh Ahmed Tidjane 34; 51; 97; 110; 152; 231; 285; 485; 487; 489.<br />
CheikhCknar 10; 33; 34; 35; 36;37;38;40;41;44;45;46;47;48;49;51;52;59;63;98; 106;<br />
108; 109; 110; 111; 114; 115; 116; 117; 118; 119; 120; 121; 125; 126; 128; 129; 130; 131; 132;<br />
133; 138; 139; 140; 141; 142; 143; 144; 145; 146; 148; 150; 152; 153; 154; 155; 156; 157; 159;<br />
160; 161; 162; 163; 164; 165; 166; 167; 168; 170; 173; 175; 177; 178; 179; 182; 185; 186; 188;<br />
189; 190; 191; 192; 194; 196; 197;203;204;206;207;209;210;220;221;225;227;228;229;<br />
230;231;245;249;250;251;252;253;254;257;259;260;261;263;264;265;267;268;270;<br />
271;274;276;281;282;284;285;288;290;309;311;313;377;391;399;401;403;405;407;<br />
409;419;421;425;431;433;439;441;447;449;451;455;456;461;457;459;461;463;467;<br />
473;489;491<br />
Cisse (B.) 4; 286; 287; 290.<br />
Cissokho (S.M.) 254.<br />
Curtin (D.Ph.) 243.<br />
Dalil (A. 0.) 79.<br />
Delafosse (M.) 107; 109 ;277.<br />
Delavignette (R.)107.
INDEX 515<br />
Dernba Sarr 220.<br />
Diop (M.A.) 4I.<br />
Dioukha Sarnballa 122; 124; 125; 126; 127; 245; 287.<br />
Djeli Moussa 118; 204.<br />
Drarne (T.) 4; 33; 58; 63; 131; 163; 173; 187; 188; 189; 190; 223; 228; 260; 261; 264; 269.<br />
Durnont (F.)107; 108; 109; 129; 149; 255.<br />
Dumezil (G.) 224.<br />
Eggue Fari Saabu 17.<br />
Elimane Boubacar 139; 14I.<br />
Elimane Rindiaw 115; 258; 268.<br />
Equilbec 55.<br />
Erny (P.) 90.<br />
Fadjimba 313; 375.<br />
Faidherbe 60; 122; 124; 127; 250; 251; 254.<br />
FMel Bolaro 375.<br />
Fall (M.)109.<br />
Faral (E.) 280.<br />
Farba Gouwa 10; 58; 158; 176; 177; 178; 179; 180; 181; 182; 194; 195; 267; 268; 273; 280;<br />
283; 311; 379; 381; 383; 409; 419; 457;46I.<br />
Fatimel Sire Biidaane 16.<br />
Frrelich (lC.) 254.<br />
Gaden (H.) 2; 8; 35; 85; 109; 149; 258; 263; 266.<br />
Gaye (H.) 245.<br />
GhMi (M.EI)109; 110; 152; 203; 227; 271; 346.<br />
Gouilly (A.) 210.<br />
Grisward (lR.) 224.<br />
Gueladio Desse 177; 315.<br />
Guerresch (Cl.) 149.<br />
Guele! 17; 34<br />
Gueye (T.Y.) 74; 8I.<br />
Harn-Bodedio 9; 14; 15; 16; 17; 18; 20; 21; 30; 32; 33; 55; 59; 84;<br />
Rama Alasemi 14; 20.<br />
Holle (P.)124; 127; 251.<br />
Jab (0.) 47; 108.<br />
Kamara (C.M.) 46; 101; 269.<br />
Karounka33;57;58;63; 128; 173; 174; 185;228;260;261;266;317;375;387; 389.<br />
Khartoum Sarnballa 122; 124; 125; 126; 127; 251; 289.<br />
Koly Mody 34; 36, 168; 169; 170; 171; 179; 193; 245; 250; 260; 267; 274; 283; 405; 427; 429.<br />
Konko Boubou Moussa 12; 18; 23.<br />
Kouyate (G.) 4.<br />
Labouret (H) 85.<br />
Lestrange (M. de) 16.<br />
Lord (A.) 229; 233.<br />
Ly (H.S.) 3; 45; 98; 136; 149; 205; 220; 221; 230; 231; 232; 236; 296; 307; 487.<br />
Madelenat (D.) 7; 199; 275.<br />
Mage (E.) 38; 107; 169.<br />
Mamady Kandia 35; 121; 177; 250;.260; 269; 315.<br />
Mamadou DjaIi 315.<br />
Mabmoud Kati 100.<br />
Mari (F.) 138.<br />
MbOthiel (S.) 3; 10; 33; 38; 136; 148; 161; 169; 170; 171; 175; 177; 187; 188; 190; 191; 195;<br />
196; 197; 220; 223; 228;229; 232; 234; 235; 236; 260; 264;268; 274; 283; 296; 302; 307;<br />
309.<br />
Meyer (G.) 16; 24; 87; 88.<br />
Monteil (V.) 109.<br />
Monzon (A.D.) 15; 18; 47; 128; 129; 156.<br />
Monzon (D.)14.<br />
Niagane (El H.M.A.) 4; 46; 107; 148; 207; 227; 228; 264.
INDEX 516<br />
Ndiaye (M.) 296; 299.<br />
Niokhane (D. S.) 95<br />
Ousmane Dan Fodio 111,233.<br />
Parry (M.) 222; 229.<br />
Pidal (R.M.) 235; 236.<br />
PoullOri 13; 14; 16; 21; 22; 25; 27; 54; 55; 59; 61; 62.<br />
Propp (V.) 233.<br />
Reichadt (Ch.) 44; 45.<br />
Robinson (D.) 233<br />
Saint-Martin (Y.) 254.<br />
Salenc (J.) 51; 108.<br />
Samb (A.) 254.<br />
Samba Gueladio Diegui 9; 11; 14; 16; 18; 21; 23; 24; 31; 32; 55; 56; 59; 68; 84.<br />
Sarr (D.) 3; 136; 296; 302; 307.<br />
Seck (A.A.) 33; 41; 52; 141;148; 225.<br />
Selimaka 456<br />
Sellier (P.) 21; 136.<br />
Seydou (Ch.) 20; 25; 26; 30; 84; 102; 104.<br />
Siciliano (I.) 275.<br />
Silfumwka9; 13; 14; 15; 16;21;22;24;25;30;31;33;34;53;54;55;56;58;59;61;62;84.<br />
Sissokho (p.D.) 131; 245.<br />
Soce (0.) 145.<br />
Soh (S.A.) 101.<br />
Sow (A.I.) 16; 113.<br />
Suret-Canale (J.) 255.<br />
Tall (T.S.N.) 108; 140; 141; 284.<br />
Tamba Boukari 117; 119; 204; 260; 309; 311; 313; 349; 351; 353; 355; 357; 359; 363; 367;<br />
369; 371; 375;<br />
Tauxier (L.) 131; 190.<br />
Tene 14; 15; 18.<br />
Thiam (El H.A.O.) 4.<br />
Thiam (El H.M.) 4.<br />
Thiemo Boy 94; 95; 237.<br />
Thiemo Sadou Dalen 113.<br />
Thiemo Samba Mombeya 113; 234.<br />
Thiemo Mohammadou Samba 113.<br />
Tidjani (A.A.) 36; 45; 132; 133; 164; 166; 253; 288.<br />
Tiefolo 63; 111; 128; 276.<br />
Tounka 55; 56; 245.<br />
Tyam (M.A.) 2; 34; 45; 47; 48; 51; 98; 107; 110; 131; 158; 164.; 231; 236; 269.<br />
Verdat (M.) 141.<br />
Wane (M.H.K.) 172; 251.<br />
Yamfele Thiema 175<br />
Yemgha 175; 176; 449; 455; 460.<br />
Yimba Sakho 118; 119; 120; 121; 160; 260; 269.<br />
Zoghby (S.) 47.<br />
Zumthor (P.) 95; 105.
INDEX 519<br />
NigerI4;33;55; 102; 116; 131; 163; 164;210;243;249;251;252;267.<br />
Nigeria 102; 111; 233.<br />
Nioro 4; 33; 63; 121; 125; 131; 133; 164; 177; 182; 187; 190; 204; 206; 209; 211; 226; 250;<br />
251;258;259;260;262;265;288;315;385;387;471.<br />
Paris 3.<br />
Pellun Waaju 119; 273.<br />
Peul7; 8; 11; 13; 14; 15; 16; 17; 18; 19; 20; 24; 27; 28; 31; 33; 35; 45; 61; 62; 74; 75; 79; 83;<br />
84; 88; 92; 100; 101; 104; 105; 119; 122; 162; 166; 171; 172; 173; 176; 177; 193; 195; 208;<br />
211;228;234;237;244;250;252;253;265;266;267;274;283;289;290;375;377;387;397;<br />
411;419;423;425;429;431;437;443;445;447;459.<br />
Pire Sagnakhor 144; 202; 209; 225; 276.<br />
Podor 33; 46; 71; 107; 115 139.<br />
Poular 66; 67; 71; 76; 80; 81; 83; 88; 90; 91; 93; 94; 99; 100; 102; 103; 104; 105; 106; 107;<br />
110; 143; 151; 157; 163; 167; 169; 175; 176;220.<br />
Saboucire 122; 127.<br />
Sansanding 37; 63; 128; 129; 187; 189; 226; 228; 246; 252; 288; 289.<br />
Segou 2; 3; 4; 13; 14; 15; 33; 38; 44; 45; 47; 55; 57; 63; 101; 111; 128; 129; 131; 132; 133;<br />
156; 162; 163; 164; 174; 186; 187; 188; 189; 190;209;220;221;223;226;246;251;252;253;<br />
261;262;263;266;268;269;270;276;277;285;287;288;289;387; 389;397.<br />
SenegM(fleuve) 16;33;55;67;71;95; 101; 115; 116; 122; 123; 127; 131; 163; 164;210;225;<br />
246; 249; 250.<br />
Senegambie 59; 144; 243; 244; 249.<br />
Sokoto63;93;95; 102; 111; 118; 145; 162; 167;203;209;225;226;233;247;287;294;339.<br />
Soninke 55; 101; 121; 122.<br />
Soutoukhoulle 3; 250.<br />
Tamba 39; 119; 121; 209; 249; 315; 435; 457.<br />
11riayawM58;59; 130; 156; 168; 175; 176; 186; 190;226;252;267;270;285;439;443;447.<br />
Thies 91; 144.<br />
Timbo 86; 108; 109; 111; 112; 113; 114; 116; 119.<br />
Tornbouctoul00; 131; 132; 164;210;246;252;259;290;292.<br />
Tornora 122; 127; 211.<br />
Toro 115; 119; 160; 173; 225; 259.<br />
Torodol40; 172; 178; 180; 181; 182; 192; 195; 196;207;210;244;255;267;321; 337; 343;<br />
345;353;381;383;403;415;419;421;423;425;431;435;437;453;461;467.<br />
Toucouleur71; 83; 87; 88; 90; 97; 101; 115; 126; 127; 132; 140; 153; 159; 165; 168; 170; 172;<br />
179; 180; 182; 185; 188; 189; 190; 191;237;249;251;252;253;255;259;260;262;265;266;<br />
267; 281; 283.<br />
Woyrela59; 128;173; 185; 186; 187; 258;174; 228;251; 261; 397.<br />
Yelimane 177.
INDEX<br />
AUTRES NOMS IMPORTANTS.<br />
520<br />
Al-Azhar 110; 113; 185; 223; 225.<br />
Almamy 57; 82; 99; 107; 108; 111; 112; 113; 114; 116; 141; 168; 208; 210; 244; 245; 256;<br />
257; 259.<br />
AJnuunyat59; 141;244;245;257.<br />
Ansar 282.<br />
Ardo 14; 17; 24; 34; 165.<br />
Charia 49; 94; 129; 227; 244; 282.<br />
Dame157; 107; 141; 201.<br />
Fama 250.<br />
Fergo 251.<br />
Hadith 40; 153.<br />
hnfune 39; 60; 96; 100; 148; 149; 154; 158; 180; 196;281;291;313;317; 381;401;415;435;<br />
461.<br />
Jaagorde 244.<br />
Jaagorgal 244; 259.<br />
Jawamr-AI-Mafuri 34; 114; 185.<br />
Jihad omarien 3; 34; 40; 46; 47; 50; 55; 98; 114; 125; 128; 218; 224; 226; 227; 230; 235; 243;<br />
247;248;249;250;252;253;255;257;259;262;264;265;267;268;271;276;278;281;283;<br />
286;288;290;291;292;296;302.<br />
Khalwa 206.<br />
Muhadjirfin 280.<br />
Mujahid 106; 154; 156; 183; 185; 230; 255; 281.<br />
Mujahidin 249.<br />
Ou1ema 150; 168; 225; 227; 252.<br />
Qacida 2; 34; 37; 38; 45; 47; 48; 49; 50; 51; 52; 157; 163; 164; 165; 168; 169; 175; 176; 220;<br />
221;257;264;266;267;270;282;284;294.<br />
Qadiriyya 131;246; 252; 255.<br />
Ramadan 94; 200; 201; 226; 227.<br />
Rimah 34; 46; 108; 152; 254; 487.<br />
Salaatu1 Faatiha 203.<br />
Sofa 162; 175; 267; 287.<br />
Sourate 110; 150; 262; 285.<br />
Sultan 145; 279.<br />
Tafsirou 311.<br />
Tidjanyya 34; 46; 52; 98; 108; 110; 111; 114; 133; 152; 203; 227; 254; 255; 284.<br />
Tidjane 97; 111; 114; 126; 145; 190; 282; 391; 489.<br />
Tarikh e1-Fettach 100.<br />
Tarikh es-Soudan 100.<br />
Wird 97; 111; 114; 126; 343; 363; 485; 487.
TABLE DES MATIERES
TABLE DES MATIERES<br />
c) Le public.<br />
2°) Le modele peul islamise.<br />
a) L'artisan du verbe et le maitre de la plume.<br />
al) Le griot omarien.<br />
a2) Le maitre de la plume.de l'epopee du jihad.<br />
b) Le recit<br />
bI) Le cycle de la foi.<br />
b2) Le triptyque initiatique.<br />
b3) La devise.<br />
c) Le public.<br />
B - CLASSIFI<strong>CA</strong>TION: RECITS DE BASE ET VARIANlES.<br />
I LE mONC COMMUN.<br />
1°) Le noyau narratif de base.<br />
2°) Les invariants thematiques.<br />
2°) Les personnages originaux.<br />
3°) Les lieux et les temps.<br />
III VARIANTES A L'INTERIEUR DE CHAQUE BRANCHE.<br />
CHAPITRE IT : LA FORMATION DE L'EPOPEE DEL HADJ OMAR.<br />
A - FORMES LTITERAIRES PRE-EXISTANTES.<br />
I LEs GENRES lRADmONNELs.<br />
1°) Les genres specifiques.<br />
2°) Les genres communs.<br />
a) La poesie.<br />
b) Les "tinndi" ou "talli" (contes); les "cifri" (devinenes) ;<br />
les "purl" (proverbes).<br />
523<br />
39<br />
40<br />
41<br />
41<br />
44<br />
49<br />
49<br />
50<br />
51<br />
52<br />
53<br />
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55<br />
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58<br />
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60<br />
65<br />
66<br />
66<br />
67<br />
76<br />
76<br />
86
TABLEDESMATIERES 526<br />
3°) Vie religieuse. 268<br />
III - L'EPQPEE ET L'HISTOIRE. 271<br />
1°) Le traitement epique du jihad omarien. 272<br />
2°) Le traitement historique des versions de l'epopee d'Omar. 276<br />
3°) Rejet et rejaillissemenl 277<br />
B - VISION DES VAINQUEURS, VISION DES VAINCUS. 278<br />
I - LES CHANSONS DE GESTE : LEs CROISADES VUES PAR LES FRANCS 279<br />
ET PAR LES ARABES.<br />
1°) Les croisades vues par les Francs. 279<br />
2°) Les croisades vues par les Arabes. 280<br />
Il - LE JIHAD OMARIEN VU PAR LES OMARIENS ET PAR LES PEUPLES VAINCUS. 281<br />
1°) Le jihad d'E! Hadj Omar vu par les Omariens.<br />
2°) Le jihad d'E! Hadj Omar vu par les pays conquis.<br />
CONCLUSION GENERALE.<br />
TROISIEME PARTIE : EDITION<br />
PRESENTAnON.<br />
1 - LES AUTEURS.<br />
2 - LES TEXTES.<br />
LA DEVISE D'EL HADJ OMAR PAR SIDI MBOTHIEL<br />
CORPUS I: DE LA NAISSANCE AUX JOUlES ORATOIRES<br />
DU <strong>CA</strong>lRE PAR KALIDOU BA.<br />
CORPUS 11 : LE JIHAD : DE DINGUIRAYE A HAMDAlLAHI<br />
PAR SIDI MB01HIEL.<br />
CORPUS ID :LA DERNIERE PHASE DU JIHAD: DE THIAYAWAL<br />
ADEGUEMBERE, POEME DE HAMMAT SAMBA LY,<br />
DECLAME PAR DEMBA SARR.<br />
281<br />
286<br />
294<br />
295<br />
296<br />
296<br />
296<br />
308<br />
318<br />
348<br />
466
Annexe.<br />
Glossaire.<br />
Bibliographie.<br />
Index.<br />
Table des matieres.<br />
527
Presses Universitaires