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Édition 2010-03-01 (PDF document) - les nouvelles de roumanie

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Les NOUVELLES <strong>de</strong> ROUMANIE<br />

42<br />

SUCEAVA<br />

BAIA<br />

MARE<br />

<br />

IASI CHISINAU<br />

ORADEA<br />

<br />

<br />

GHERLA <br />

<br />

ARAD<br />

<br />

CLUJ TARGU<br />

<br />

MURES<br />

BACAU<br />

TIMISOARA<br />

CRAIOVA<br />

<br />

<br />

SIBIU<br />

BRASOV<br />

<br />

GALATI <br />

PITESTI BRAILA <br />

<br />

<br />

TULCEA<br />

<br />

BUCAREST<br />

CONSTANTA<br />

Ah si Cartouche<br />

avait été Roumain !<br />

Amateurs <strong>de</strong> beaux films <strong>de</strong> cape<br />

et d'épée, <strong>les</strong> téléspectateurs français<br />

ont été bien déçus, à la veille <strong>de</strong> Noël,<br />

par le téléfilm <strong>de</strong> France 2 présentant<br />

<strong>les</strong> exploits <strong>de</strong> Cartouche, bandit au<br />

grand cœur Cartouche, mort à 29 ans,<br />

en 1721, en subissant le supplice <strong>de</strong><br />

la roue.<br />

On leur a servi un récit consternant<br />

d'ennui, avec <strong>de</strong>s personnages incarnés<br />

par <strong>de</strong>s acteurs médiocres, particulièrement<br />

le principal, jouant sans<br />

conviction, <strong>de</strong>s combats sans âmes,<br />

<strong>de</strong>s décors répétitifs, <strong>de</strong>s situations<br />

convenues, réglées par une mise en<br />

scène insipi<strong>de</strong> et une direction d'acteurs<br />

en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> tout. Le clou <strong>de</strong><br />

ce naufrage était d'entendre <strong>les</strong> protagonistes<br />

s'invectiver en français d'aujourd'hui:<br />

"Fous le camp", " Tire-toi ",<br />

"dégage"… Et pourquoi pas "Cassetoi,<br />

pov'con" tant qu’on y est…<br />

On peut légitimement penser que<br />

le cinéma roumain aurait réservé un<br />

bien meilleur traitement à ce héros<br />

populaire ! D'autant plus que ce<br />

"redresseur <strong>de</strong> torts" aurait du travail<br />

à faire dans la Roumanie d'aujourd'hui,<br />

et que <strong>les</strong> metteurs en scène roumains<br />

ont déjà excellé dans le genre<br />

en racontant la vie <strong>de</strong> "haiduci" qui ont<br />

jalonné son histoire, comme Pintea,<br />

Baba Novac, Iancu Jianu, Andrii<br />

Popa, etc…, magistralement incarnés<br />

à l'écran par <strong>de</strong>s grands acteurs<br />

comme Florin Piersic et Toma<br />

Caragiu! Dans <strong>les</strong> années 60, le<br />

public roumain avait beaucoup apprécié<br />

la version du "Cartouche" <strong>de</strong><br />

Philipe <strong>de</strong> Broca, interprété par Jean-<br />

Paul Belmondo et Claudia Cardinale.<br />

Au point que <strong>de</strong>s parents avaient baptisé<br />

leur enfant "Cartouche" !<br />

<br />

Littérature<br />

Connaissance et découverte<br />

Une ONG <strong>de</strong> Chisinau <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

Une ONG moldave, Asociatia Civica Hy<strong>de</strong> Park, a<br />

<strong>de</strong>mandé aux nouvel<strong>les</strong> autorités du pays d'accor<strong>de</strong>r la<br />

citoyenneté moldave à l'écrivain apatri<strong>de</strong> et dissi<strong>de</strong>nt<br />

Paul Goma, 74 ans (notre photo), né en 1935 dans la localité<br />

<strong>de</strong> Mana (ju<strong>de</strong>t d'Orhei), alors Bessarabie roumaine,<br />

ainsi que <strong>de</strong> lui décerner le titre <strong>de</strong> citoyen d'honneur <strong>de</strong><br />

la ville <strong>de</strong> Chisinau, pour le récompenser <strong>de</strong> son oeuvre<br />

littéraire, dans laquelle il évoque ses origines moldaves, et<br />

du courage dont il a fait preuve tout au long <strong>de</strong> sa vie.<br />

L'ONG Asociatia Civica Hy<strong>de</strong> Park, a suggéré également que le gouvernement<br />

moldave attribue à Paul Goma un appartement à Chisinau ou une<br />

maison dans son village natal, ainsi qu'une pension décente ou une bourse<br />

<strong>de</strong> création et qu'il examine aussi la possibilité <strong>de</strong> diffuser son œuvre à travers <strong>les</strong><br />

bibliothèques du pays et <strong>de</strong> Roumanie, tout en faisant traduire ses publications françaises.<br />

L'écrivain, déjà citoyen d'honneur <strong>de</strong> Timisoara, est réfugié à Paris <strong>de</strong>puis 1977 où<br />

la Securitate a essayé à plusieurs reprises <strong>de</strong> l'assassiner.<br />

Lycéen, interrogé huit jours d'affilée par la Securitate<br />

Fils d'instituteurs roumanophones, Paul Goma a cinq ans lorsque sa famille doit<br />

fuir <strong>de</strong>vant l'Armée rouge, alors qu'en application du protocole secret du pacte Hitler-<br />

Staline, l'URSS annexe son pays natal. La famille s'installe à Sibiu, où le communisme<br />

(roumain cette fois) la rattrapera cinq ans plus tard, alors que le petit Paul a dix ans.<br />

Paul Goma a montré dès sa jeunesse un esprit contestataire et provocateur, déclarant<br />

que "la persécution ou la disparition d'un citoyen n'est rentable pour un pouvoir,<br />

que si ce citoyen reste anonyme". En mai 1952, alors qu'il était élève en secon<strong>de</strong> au<br />

lycée Gheorghe Lazar <strong>de</strong> Sibiu, il défend <strong>de</strong>s camara<strong>de</strong>s accusés <strong>de</strong> "menées subversives"<br />

et, amené à la Securitate, il y est interrogé durant huit jours, après quoi il est exclu<br />

du lycée. Il réussit à poursuivre sa scolarité à 100 km <strong>de</strong> là, au lycée Radu Negru <strong>de</strong><br />

Fagaras, passant son bac en 1953.<br />

En 1954, le jeune homme réussit <strong>les</strong> examens d'admission en philologie à<br />

l'Université <strong>de</strong> Bucarest et en littérature à l' Institut <strong>de</strong> littérature Mihai Eminescu, choisissant<br />

ce <strong>de</strong>rnier. Il a comme professeurs Radu Florian, Tamara Gane, Mihai Gafita et<br />

T.G. Maiorescu et adhère à l'Union <strong>de</strong>s jeunesses communistes, pensant que la rénovation<br />

intérieure peut être plus efficace que la contestation extérieure.<br />

Exclu <strong>de</strong> l'université et emprisonné trois ans<br />

"L'infréquentable"<br />

Mais, suite à ses nombreuses provocations et disputes (entre autres, il manifeste<br />

son soutien à la révolution hongroise <strong>de</strong> Budapest), Paul Goma en est exclu en novembre<br />

1956 et aussitôt arrêté, puis jugé pour "tentative d'organiser une manifestation hostile<br />

au socialisme"; en mars 1957 il est condamné à <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> correctionnelle, et en<br />

fera trois (il fut insoumis en prison aussi) à Jilava et à Gherla. En 1960, il est envoyé<br />

en rési<strong>de</strong>nce forcée et sous contrôle judiciaire dans le village <strong>de</strong> Latesti, dans la plaine<br />

valaque du Baragan (la Sibérie roumaine), où il est assigné jusqu'en 1964.<br />

Ne pouvant pas reprendre ses étu<strong>de</strong>s là où el<strong>les</strong> avaient été interrompues, il se réinscrit<br />

en première année en philologie, à Bucarest, en 1965. Pensant toujours à la "résistance<br />

intérieure", il s'inscrit au P.C. roumain. En 1968 il adhère aux positions défendues<br />

à Prague par Alexandre Dubcek ("le Socialisme à visage humain"), et comme<br />

Ceausescu soutient lui aussi le Tchécoslovaque au début, Goma n'est pas inquiété. Il<br />

achève ses étu<strong>de</strong>s en 1970. En 1971, alors que son roman Ostinato (L'obstiné), censuré<br />

en Roumanie, paraît en version intégrale en R.F.A. (<strong>de</strong>s amis dissi<strong>de</strong>nts ont sorti<br />

le manuscrit), il est exclu du P.C.<br />

Les NOUVELLES <strong>de</strong> ROUMANIE<br />

que l'écrivain apatri<strong>de</strong>, réfugié en France, soit fait citoyen moldave<br />

Paul Goma esprit contestataire et provocateur né<br />

Au printemps 1977, Goma réussit par le même biais à<br />

envoyer une Lettre ouverte au gouvernement roumain à la<br />

radio américaine "Free Europe", exigeant le respect <strong>de</strong>s droits<br />

<strong>de</strong> l'homme en Roumanie. Cette lettre y est lue au micro.<br />

Victime <strong>de</strong> tentatives d'assassinat à Paris<br />

Paul Goma est aussi l'un <strong>de</strong>s signataires <strong>de</strong> la "Charte 77".<br />

Exclu <strong>de</strong> l'Union <strong>de</strong>s écrivains, puis arrêté et torturé par la<br />

Securitate, il est détenu plusieurs mois à la prison <strong>de</strong> Rahova.<br />

Mais, étant déjà connu en Occi<strong>de</strong>nt et répertorié par l'ONG<br />

Amnesty International, il ne peut plus être jugé et condamné<br />

sans provoquer <strong>de</strong>s protestations internationa<strong>les</strong>, alors même<br />

que le régime communiste tente <strong>de</strong> donner à l'étranger l'image<br />

d'une "démocratie populaire indépendante".<br />

Le 20 novembre 1977, Paul Goma, son épouse et son fils<br />

sont privés <strong>de</strong> la nationalité roumaine et expulsés vers la<br />

France. À Paris, ils <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt et obtiennent l'asile politique.<br />

Goma y continue son combat contre le système communiste,<br />

la dénonciation <strong>de</strong> ses crimes (en 2005, le gouvernement roumain<br />

a chiffré le nombre <strong>de</strong> victimes en Roumanie à <strong>de</strong>ux<br />

millions entre 1945 et 1989) et <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong> Ceausescu.<br />

La Securitate réagit par un colis piégé (désamorcé par la<br />

police française, qui protège alors Goma) puis par plusieurs<br />

tentatives d'empoisonnement contre Goma et son fils, ce qui<br />

provoquera une grave crise diplomatique entre <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux pays.<br />

Refus <strong>de</strong> <strong>de</strong>venir Français<br />

À partir <strong>de</strong> 1980 sa lutte contre le communisme prend un<br />

ton <strong>de</strong> plus en plus nationaliste et même anti-occi<strong>de</strong>ntal. Paul<br />

Goma refuse la nationalité française, offerte au bout <strong>de</strong> seulement<br />

trois ans <strong>de</strong> séjour, en même temps qu'au dissi<strong>de</strong>nt<br />

tchèque Milan Kun<strong>de</strong>ra (qui l'accepte), et se rapproche <strong>de</strong>s<br />

positions d'inspiration fascistes défendues avant-guerre en<br />

Roumanie par Nae Ionescu, Octavian Goga et Nichifor<br />

Crainic. Après la chute <strong>de</strong> Ceausescu, une partie <strong>de</strong> ses livres<br />

est publiée en Roumanie. Il écrit <strong>de</strong>s artic<strong>les</strong> dans <strong>les</strong> revues<br />

"Vatra", "Familia", "Timpul" et "Jurnalul Literar".<br />

Paul Goma a fait partie durant 8 jours <strong>de</strong> la Commission<br />

prési<strong>de</strong>ntielle pour l'analyse <strong>de</strong> la dictature communiste en<br />

Roumanie, dont il a été révoqué par son coordonnateur<br />

Vladimir Tismaneanu, suite à ses prises <strong>de</strong> position radica<strong>les</strong>.<br />

Politiquement incorrect après<br />

le scandale <strong>de</strong> la "Semaine rouge"<br />

Après 1989, Paul Goma se montre très irrité par la relative<br />

indifférence que <strong>les</strong> régimes communistes est-européens et<br />

leurs crimes suscitent en Occi<strong>de</strong>nt, en comparaison avec la<br />

mémoire <strong>de</strong> la Shoah qui, elle, est bien mieux entretenue par<br />

<strong>les</strong> historiens, <strong>les</strong> écrivains et <strong>les</strong> cinéastes.<br />

Au lieu <strong>de</strong> suivre l'exemple <strong>de</strong> ceux-ci, Paul Goma placé<br />

son témoignage littéraire dans l'engrenage <strong>de</strong> la concurrence<br />

Connaissance et découverte<br />

<strong>de</strong> la mémoire. Il exige <strong>de</strong>s auteurs juifs qu'ils "assument <strong>les</strong><br />

responsabilités pour <strong>les</strong> crimes commis contre <strong>les</strong> Roumains,<br />

et cessent <strong>de</strong> monopoliser l'histoire avec le mythe du génoci<strong>de</strong><br />

unique, celui dont ils ont été victimes, <strong>de</strong> culpabiliser toutes<br />

<strong>les</strong> autres nations, dans le but politique et économique <strong>de</strong> <strong>les</strong><br />

dominer et <strong>de</strong> leur extorquer <strong>de</strong>s fonds, sans aucune analyse<br />

critique <strong>de</strong> leurs propres agissements criminels anti-roumains<br />

(et en général contre <strong>les</strong> non-juifs), avec le soutien et l'approbation<br />

<strong>de</strong> la quasi-totalité <strong>de</strong>s cerc<strong>les</strong> israélites".<br />

Ce propos provoque un immense scandale et lui aliène la<br />

plupart <strong>de</strong>s anciens dissi<strong>de</strong>nts tels Doina Cornea, Romulus<br />

Rusan, Ana Blandiana, Gabriel Liiceanu, Andrei P<strong>les</strong>u ou<br />

Mihai Stanescu, qui se désolidarisent publiquement <strong>de</strong> lui. En<br />

2002, <strong>de</strong>venu politiquement "infréquentable" Paul Goma n'arrange<br />

rien en publiant son essai: La semaine rouge 28 juin - 3<br />

juillet 1940 ou la Bessarabie et <strong>les</strong> Juifs, y relatant son traumatisme<br />

<strong>de</strong> jeunesse, lorsqu'il fut témoin <strong>de</strong> la réaction d'une<br />

partie <strong>de</strong> la population non-roumanophone <strong>de</strong> Bessarabie lors<br />

<strong>de</strong> l'ultimatum <strong>de</strong> Staline à la Roumanie et <strong>de</strong> l'évacuation <strong>de</strong><br />

ce territoire par <strong>les</strong> autorités roumaines fin juin 1940.<br />

La Roumanie ne veut plus entendre parler <strong>de</strong> lui<br />

Paul Goma attribue spécifiquement aux Juifs <strong>de</strong>s pillages<br />

et atrocités commises alors contre la majorité moldave, puis<br />

enchaîne en tentant <strong>de</strong> "légitimer" <strong>les</strong> crimes contre l'humanité<br />

du régime fasciste roumain contre <strong>les</strong> Juifs après le 22 juin<br />

1941 (attaque <strong>de</strong> l'Axe contre l'URSS), par "la vengeance<br />

contre <strong>les</strong> actes commis l'année précé<strong>de</strong>nte".<br />

Les historiens roumains ont qualifié la Semaine rouge <strong>de</strong><br />

"manifeste politique qui réinterprète l'histoire, utilise <strong>de</strong>s<br />

sources tendancieuses, et n'en choisit que cel<strong>les</strong> qui peuvent<br />

servir son propos, rendant une population tout entière<br />

(250 000 juifs moldaves) responsable <strong>de</strong> l'action <strong>de</strong>s commandos<br />

communistes, dont <strong>les</strong> membres n'étaient pas majoritairement<br />

juifs". "La Semaine rouge ne sert pas la dénonciation <strong>de</strong>s<br />

crimes du communisme, mais <strong>de</strong>s thèses antisémites et négationniste"<br />

concluent-ils. Goma réplique en affirmant que "Les<br />

sources primaires concernant <strong>les</strong> évènements décrits dans La<br />

Semaine rouge se trouvent dans <strong>les</strong> Archives militaires roumaines<br />

et sont citées par <strong>de</strong>s historiens <strong>de</strong> renom”.<br />

Face à ces critiques, Paul Goma a tenté <strong>de</strong> crédibiliser son<br />

essai en multipliant <strong>les</strong> références et en renonçant à certaines<br />

approximations, généralisations et amalgames: il publia plusieurs<br />

variantes entre 2002 et 2005. La première mouture est<br />

parue chez l'éditeur moldave "Museum" <strong>de</strong> Chisinau en 20<strong>03</strong>,<br />

la <strong>de</strong>uxième chez "Criterion Publishing House" à Bucarest<br />

(20<strong>03</strong>), la troisième chez "Vremea", également à Bucarest<br />

(2004). Le résultat fut l'inverse <strong>de</strong> ce qu'il espérait: son isolement<br />

s'accentua tant en Roumanie qu'en France. La Roumanie<br />

refuse <strong>de</strong> lui rendre sa nationalité d'origine, et il est toujours<br />

apatri<strong>de</strong>. En 2006, une pétition en faveur <strong>de</strong> Goma, signée par<br />

300 personnes, s'est heurtée aux fins <strong>de</strong> non-recevoir du<br />

Prési<strong>de</strong>nt Traian Basescu.<br />

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