Clandestin-en-Un - Revue Onphi p.69 - 2009 - Xavier Pavie
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SATHYA RAO<br />
multitude de colloques (y compris récemm<strong>en</strong>t à la Sorbonne) organisés sous<br />
cette étiquette. On pourrait ainsi multiplier les points de converg<strong>en</strong>ce et<br />
conclure à une proximité inédite <strong>en</strong>tre non-philosophie et postcolonialisme.<br />
De nature ess<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t mondaine, l’appar<strong>en</strong>ce postcoloniale de la nonphilosophie<br />
trouve son origine dans une erreur d’interprétation (la nonphilosophie<br />
étant trop rapidem<strong>en</strong>t assimilée à la déconstruction derridi<strong>en</strong>ne)<br />
autant que sur la difficulté à circonscrire précisém<strong>en</strong>t la notion de<br />
postcolonialisme 6 . Dans une optique non-philosophique cette fois, la mise <strong>en</strong><br />
comparaison avec le postcolonialisme requiert bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du une toute autre<br />
posture. Le problème est alors moins d’établir un « croisem<strong>en</strong>t » (selon la<br />
pluralité des s<strong>en</strong>s que le postcolonialisme prête à ce terme) improbable <strong>en</strong>tre<br />
non-philosophie et postcolonialisme, que de matérialiser les prét<strong>en</strong>tions<br />
philosophiques du postcolonialisme.<br />
Postcolonialisme et déconstruction<br />
du subalterne à l’étranger<br />
La théorie postcoloniale emprunte massivem<strong>en</strong>t à la discipline<br />
philosophique, <strong>en</strong> particulier au postructuralisme français (Derrida, Lacan,<br />
Deleuze, Foucault) et au marxisme. Ce double héritage n’est pas sans susciter<br />
une t<strong>en</strong>sion au sein même de l’<strong>en</strong>treprise postcoloniale <strong>en</strong>tre d’une part, la<br />
ligne marxiste (que représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t notamm<strong>en</strong>t Terry Eagleton et Aijaz Ahmad)<br />
soucieuse d’ancrer son activité de réflexion dans la réalité politique et<br />
sociale du capitalisme sous son aspect de globalisation et, d’autre part, la<br />
ligne postructuraliste (qu’incarn<strong>en</strong>t <strong>en</strong> particulier Homi Bhabha et Robert<br />
Young) œuvrant à la déconstruction des stratégies de représ<strong>en</strong>tation de<br />
l’autorité coloniale dans le but de mieux la subvertir. Relativem<strong>en</strong>t classique,<br />
cette scission (qui répète les dichotomies assez conv<strong>en</strong>ues <strong>en</strong>tre texte et<br />
contexte, fiction et réalité, bourgeois et prolétariat, etc.) se fonde sur une<br />
difficulté structurelle à imaginer une praxis de la déconstruction (ce à quoi<br />
s’essaye néanmoins une Gayatri Spivak…) et une théorie autonome du<br />
marxisme (dont la légitimité ne ti<strong>en</strong>ne pas uniquem<strong>en</strong>t à ses conditions<br />
d’application à la réalité, à son réalisme <strong>en</strong> somme). La prise <strong>en</strong> main<br />
philosophique du postcolonial constitue <strong>en</strong> soi un phénomène conjoncturel<br />
assez complexe façonné tout à la fois par l’héritage marxiste des premiers<br />
théorici<strong>en</strong>s des indép<strong>en</strong>dances comme Cabral et Nkrumah, l’<strong>en</strong>gagem<strong>en</strong>t<br />
anticolonialiste d’intellectuels à l’instar de Sartre et de Camus, le discours<br />
libéral sur les minorités aux USA, l’intérêt suscité par la Fr<strong>en</strong>ch Theory aux<br />
USA 7 tout autant que son influ<strong>en</strong>ce sur la formation des théorici<strong>en</strong>s du<br />
postcolonialisme 8 . À cela s’ajoute, sur un plan plus structurel, la prop<strong>en</strong>sion<br />
<strong>Clandestin</strong>ité, une ouverture<br />
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