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Numéro 63 - Le libraire

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écrire ce roman, mais je peux dire de façon candide que quand j’avais une<br />

panne de merveilleux, j’allais sur YouTube pour regarder des clips de Bruce<br />

<strong>Le</strong>e. Il est mon modèle, mon amour de jeunesse, une icône de beauté. »<br />

La romancière a toujours eu un faible pour les films de kung-fu où il est normal<br />

que les gens volent ou avalent un sabre, mais Bruce <strong>Le</strong>e l’a aussi inspirée pour<br />

célébrer l’homme asiatique, trop longtemps méprisé par les Occidentaux :<br />

« Décrire un homme beau a été le plus difficile. J’ai passé des semaines à<br />

réécrire la description de Li. Je voulais rendre hommage à la beauté des<br />

hommes asiatiques, qui ont toujours été les vilains dans notre mythologie. Dans<br />

les films de Hollywood, l’homme asiatique séduisant est toujours méchant,<br />

comme une incarnation du mal, du diable, d’une tentation étrangère à nous. Je<br />

voulais faire avec le personnage de Li un véritable empereur. »<br />

Sylvie, cette Québécois de retour de Chine, entretient aussi un culte pour la<br />

beauté et sa boutique d’antiquités chinoises lui fait faire des découvertes<br />

étonnantes, notamment des écritures chinoises dissimulées derrière le mur de<br />

plâtre du local qu’elle vient d’acheter. Cette trouvaille lance l’héroïne sur la<br />

trace des anciens propriétaires de ce qui s’avère avoir été une blanchisserie<br />

tenue par des Chinois. « Dragonville part d’une anecdote. Au Salon du livre de<br />

Sherbrooke en 2009, j’ai trouvé un petit livre de photos sur l’histoire de Magog<br />

avec un article de journal annonçant la fermeture de la buanderie C. <strong>Le</strong>e<br />

Brothers. J’en ai parlé à plusieurs aînés, mais personne n’avait souvenir de ces<br />

Chinois de Magog. De là m’est venue l’idée d’imaginer qui pouvait être <strong>Le</strong>e et<br />

d’installer quelqu’un dans l’ancienne buanderie en 2010. »<br />

Devenir libre<br />

La rencontre entre l’Orient et l’Occident se trouve donc au centre de ce roman<br />

où s’entrechoquent les cultures et les époques, mais où se tisse également un<br />

fil invisible entre les mondes. Porcelaine raconte le retour d’exil de Sylvie, qui<br />

débarque au Québec après avoir distillé sa vie aux bras d’un amant chinois et<br />

perdu sa mère, atteinte d’Alzheimer : « C’est l’histoire d’une réappropriation.<br />

Quand on a été ailleurs longtemps, on revient peut-être mieux placé pour voir<br />

l’horrible ou le merveilleux. Sylvie revient sans attache et découvre un Québec<br />

qui a changé. » Michèle Plomer a elle-même vécu ce retour d’exil, après avoir<br />

séjourné sur cet Empire du Milieu qui la fascine encore : « La Chine est arrivée<br />

dans un moment où j’en avais vraiment besoin. D’où mon intérêt pour ces<br />

témoignages de femmes qui reviennent fortifiées par l’exil et par la liberté<br />

qu’on a quand on est ailleurs. On devient libre. Toutes nos constructions, nos<br />

édifices peuvent tomber. »<br />

Porcelaine parle de déracinement, de retour au pays, mais l’auteure rend également<br />

un vibrant hommage à la culture raffinée de la Chine et à son goût marqué<br />

pour le commerce. <strong>Le</strong> titre fait d’ailleurs référence à cette matière fragile qui<br />

a aussi été au centre d’un commerce mondial. « C’est assez extraordinaire de<br />

penser qu’on a meublé tous les garde-manger de l’Occident avec des assiettes<br />

chinoises de porcelaine à une époque et qu’elles ne se cassaient pas durant le<br />

voyage. Je voulais rendre compte de la gloire marchande de Hong Kong, qui<br />

n’a rien d’ignoble pour les Chinois », explique l’auteure estrienne.<br />

À tous ceux qui mordront à ce joli roman d’aventures plein de délicatesse et<br />

de sensualité orientale, il faudra soutenir l’attente des prochains tomes pour<br />

connaître le dénouement des multiples mystères sur lesquels Porcelaine se<br />

referme. De quoi rêver et partir en voyage sur le dos d’un dragon...<br />

PORCELAINE.<br />

DRAGONVILLE (T. 1)<br />

Michèle Plomer<br />

Marchand de feuilles<br />

320 p. | 24,95$<br />

En librairie le 18 février 2011<br />

LES CHOIX DE LA RÉDACTION<br />

littérature québécoise<br />

Puisqu’on vous présente dans le présent numéro un dossier spécial sur la littérature<br />

en région, on ne pouvait passer à côté de la fameuse collection « Contes,<br />

légendes et récits du Québec » publiée aux éditions Trois-Pistoles. <strong>Le</strong>s deux plus<br />

récents tomes présentent ainsi des récits de Lanaudière et des Îles-de-la-<br />

Madeleine, accompagnés d’images d’archives, en couleurs, illustrant l’histoire de<br />

ces coins de pays. Dans Contes, légendes et récits de Lanaudière,<br />

Réjean Olivier a rassemblé des textes mettant en scène des<br />

réfugiés acadiens et des seigneurs<br />

CONTES, LÉGENDES ET<br />

RÉCITS DE LANAUDIÈRE<br />

Réjean Olivier<br />

Trois-Pistoles<br />

664 p. | 74,95$<br />

anglais dans ce lieu privilégié du<br />

patrimoine québécois. Une antho -<br />

logie exhaustive qui fait de cet<br />

ouvrage un objet de collection.<br />

« Où trouver le bonheur alors que sa vie n’est pas menacée? » Dans <strong>Le</strong>s enfants moroses,<br />

Aude, Christophe, Camille, Sarah et d’autres, pris au piège de la monotonie assommante<br />

du quotidien, s’abandonnent à leur ennui. <strong>Le</strong>s personnages qui peuplent ce recueil<br />

d’instantanés semblent avoir perdu le goût de s’ébattre. Ils constatent ni plus ni moins,<br />

au fil des histoires, la constance de leurs vies marquées ça et là de brèves manifestations<br />

de lucidité. Si les titres des nouvelles rappellent parfois les fables<br />

pour enfants (« La poupée de Sarah »,<br />

« Audrey apprend à recycler », « Conte de<br />

LES ENFANTS<br />

MOROSES<br />

Fannie Loiselle<br />

Marchand de feuilles<br />

156 p. | 19,95$<br />

Noël »), ici, pas de bons sentiments ni<br />

d’heureux dénouements. On a plutôt affaire<br />

à un premier livre à la mélancolie finement<br />

et froidement narrée.<br />

Dans L’Été 80 (Éditions de Minuit), Marguerite Duras relatait, en parallèle de ses<br />

articles publiés dans le journal Libération, sa rencontre avec Yann Andréa, un jeune<br />

étudiant qui deviendra après des années de correspondance son amant jusqu’à sa<br />

mort. Serge Fisette reprend l’anecdote dans Un été par la suite en entreprenant un<br />

échange épistolaire fictif avec ce même Yann Andréa afin de poursuivre l’aventure<br />

littéraire. Même si la longue missive que signe Fisette ne<br />

parviendra jamais au dernier compagnon de Duras, le geste<br />

poétique captive. Il ne s’agit au fond<br />

que d’un prétexte pour parler de<br />

UN ÉTÉ PAR LA SUITE<br />

Serge Fisette<br />

<strong>Le</strong>s heures bleues<br />

98 p. | 19,95$<br />

création littéraire et avant tout d’elle,<br />

la grande dame de lettres qui a dit un<br />

jour : « Écrire, c’est aussi ne pas parler.<br />

C’est se taire, c’est hurler sans bruit. »<br />

Nombreux sont les auteurs qui ont tenté, au cours de leur carrière, d’emprunter la voix<br />

d’un narrateur enfant ou adolescent, et ce, avec plus ou moins de succès. Ce n’est pas<br />

le cas de Marie Clark, qui maîtrise au contraire fort bien le langage un peu mâché de<br />

son Benjamin, un jeune garçon passionné de jeux vidéo qui découvre un jour le cadavre<br />

de sa meilleure amie. Dès lors, Benjamin réalisera que la mort n’est pas comme dans<br />

ces jeux qu’il aime tant. La frontière entre la réalité et la vie virtuelle se fait mince, alors<br />

que l’adolescent cherche à comprendre ce qui<br />

a bien pu arriver à sa camarade. Voilà un court<br />

MÉMOIRES<br />

D’OUTRE-WEB<br />

Marie Clark<br />

Hurtubise<br />

140 p. | 19,95$<br />

roman bien de son temps qui nous ramène<br />

sur terre!<br />

LE LIBRAIRE • FÉVRIER - MARS 2011 • 17

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