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l’industrie cou<strong>le</strong>,<br />
<strong>le</strong>s fuites se multiplient<br />
Leak ? Comme dans WikiLeaks. “Fuite” en anglais, un mot tristement à la mode.<br />
Ou comment un artiste voit son album se faire pirater avant sa sortie officiel<strong>le</strong>.<br />
U2, Will.i.am, Phoenix, Daft Punk, Booba… Ils sont de plus en plus nombreux à<br />
être concernés. Alors, réel<strong>le</strong> menace ou tentative de buzz ?<br />
b SAMUEL DEGASNE, YOLAINE MAUDET & JÉRÉMY BIGNON | . FLORENT CHOFFEL<br />
la fuite d’un album ? Une réalité devenue banalité et à laquel<strong>le</strong> on ne<br />
prête plus trop attention. Presque du comique de répétition. D’autant<br />
que la forme est chaque fois différente : problème technique d’iTunes<br />
pour <strong>le</strong>s groupes Bon Iver et The Raconteurs (Jack White), mise en<br />
vente précoce du dernier U2, transfert de fichiers sur <strong>le</strong>s réseaux<br />
sociaux pour Carla Bruni et Christophe Wil<strong>le</strong>m, vol d’ordinateur portab<strong>le</strong><br />
pour Jai Paul (ironie du sort, et face au buzz enthousiaste, <strong>le</strong> chanteur révé<strong>le</strong>ra<br />
qu’il ne s’agit que de chansons non terminées…), voire de maquettes<br />
pour <strong>le</strong> chanteur des Black Eyed Peas (Will.i.am ira jusqu’à retourner en studio<br />
pour tout réenregistrer)… Aucun sty<strong>le</strong> n’est épargné. Cas unique, <strong>le</strong> dernier<br />
Daft Punk cumu<strong>le</strong> plusieurs axes : rareté de l’information pour faire<br />
monter <strong>le</strong>s enchères, remixes réalisés à partir de samp<strong>le</strong>s, sing<strong>le</strong> (puis fina<strong>le</strong>ment<br />
l’album) piraté, explosion des reprises et parodies… La bouc<strong>le</strong> est<br />
bouclée pour <strong>le</strong> duo croyant pouvoir maîtriser <strong>le</strong> timing de diffusion.<br />
29 LONGUEUR D’ONDES N°68<br />
mode de consommation<br />
La raison est simp<strong>le</strong> : Internet a modifié notre rapport à la musique. Une<br />
étude du ministère de la Culture montre d’ail<strong>le</strong>urs que la tranche des 25-<br />
39 ans, qui écoute de la musique tous <strong>le</strong>s jours et hors radio, est passée de<br />
19%, en 1973, à 70% en 2008. En dématérialisant la musique, nous l’avons<br />
rendue plus accessib<strong>le</strong>, plus nomade et interactive (vidéo / son), mais c’est<br />
éga<strong>le</strong>ment une désacralisation de l’objet qui s’est opérée. Devenus boulimiques<br />
de l’actualité, nous réservons <strong>le</strong> même traitement à la musique :<br />
une course contre la montre (officiel<strong>le</strong>) qui a nécessité la naissance du blog<br />
Has It Leaked ?, histoire de vérifier qui a fuité. Pure vengeance de l’internaute<br />
ou nouvel espace de liberté ? Le problème est plus comp<strong>le</strong>xe et<br />
même La Quadrature du Net - association de défense des droits et libertés<br />
des internautes - semb<strong>le</strong> rejeter la méthode. Même discours chez James<br />
dossier<br />
Murphy : <strong>le</strong> chanteur de LCD Soundsystem n’a eu aucun problème avec <strong>le</strong><br />
<strong>le</strong>ak qui <strong>le</strong> concernait. Seul <strong>le</strong> choix d’une temporalité imposée par autrui<br />
l’a gêné.<br />
Tous apprentis pirates ? La faute aux sorties différées suivant <strong>le</strong>s pays, la<br />
difficulté à voir émerger une offre globa<strong>le</strong> et claire, accessib<strong>le</strong> dans tous<br />
<strong>le</strong>s formats, adaptab<strong>le</strong> aux différents supports, avec un prix attractif et un<br />
catalogue exhaustif, une mise en ligne rapide des morceaux… Le parcours<br />
du téléchargement payant relève de celui du combattant. Assez, en tout<br />
cas, pour que <strong>le</strong> blog J’voulais pas pirater recense <strong>le</strong>s difficultés à choisir<br />
la légalité. Et encore, nous ne parlons que d’utilisateurs ayant accès à la<br />
technologie. Quid des seniors ou des catégories socia<strong>le</strong>s précaires ?<br />
Pour Guillaume Deziel (manager de Misteur Valaire, groupe ayant mis gratuitement<br />
son premier album en téléchargement), il faut évidemment distinguer<br />
plusieurs profils : “60% veu<strong>le</strong>nt du tout gratuit, que ce soit à travers<br />
<strong>le</strong> partage illégal de fichiers sur un serveur (35%), l’écoute en ligne (25%)<br />
ou <strong>le</strong> “pay what you want” à 0 €. Ceux qui choisissent de payer représentent<br />
13% des consommateurs, repartis entre iTunes (6,5%) ou l’achat en format<br />
physique (20%, dont 1,8% en viny<strong>le</strong>).” Au vu des chiffres, <strong>le</strong> <strong>le</strong>ak ne contenterait<br />
qu’une faib<strong>le</strong> part de consommateurs.<br />
David Picard, <strong>le</strong> responsab<strong>le</strong> web d’iWelcom (agence de promotion d’Horace<br />
Andy, Pierpoljak, Keny Arkana), estime, lui, que “avant même l’arrivée d’Internet,<br />
on pouvait trouver des albums de promotion en vente chez des disquaires<br />
parisiens. Le phénomène du piratage a toujours existé, même s’il<br />
était moins en amont avec <strong>le</strong>s copies de CD ou cassettes.” Idem pour Arnold,<br />
animateur à Ouï FM, qui pense que c’est davantage une attaque contre la<br />
forme que sur <strong>le</strong> fond : “S’il y a arrogance de la part de l’internaute, e