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Position et production de l'artiste dans un contexte périurbain - Blog

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POSITION ET PRODUCTION DE L’ARTISTE DANS UN CONTEXTE PERIURBAIN<br />

L’i<strong>de</strong>ntité est liée au langage<br />

L’i<strong>de</strong>ntité est liée au langage, à la parole. La parole rejoue la division entre soi <strong>et</strong> l’autre, entre soi <strong>et</strong> soi-même,<br />

entre le mot <strong>et</strong> la chose :<br />

“ Ainsi la fable ovidienne éclaire au départ ce qui se joue d'essentiel <strong>dans</strong> la notion d'image, si l'on tient<br />

compte <strong>de</strong> ce médiateur, le miroir. Nous avons vu qu'il s'agissait <strong>de</strong> l'altérité, plus exactement <strong>de</strong> la<br />

représentation insue <strong>de</strong> l'altérité. Or, c<strong>et</strong>te altérité ne peut se comprendre que comme perte <strong>et</strong><br />

séparation, à la mesure <strong>de</strong> ce qu'inflige à l'humain l'entrée <strong>dans</strong> le langage: la division d'avec soi,<br />

comme condition nécessaire pour assumer la division <strong>de</strong>s mots <strong>et</strong> <strong>de</strong>s choses. Il nous faut maintenant<br />

saisir que le concept d'image implique la question <strong>de</strong> l'institution <strong>de</strong> la division pour le suj<strong>et</strong>, à partir du<br />

statut structural du miroir.<br />

Dire, face au miroir, "je suis celui-là", ou se reconnaître <strong>dans</strong> l'image que réfléchit le miroir, c'est<br />

supposer que quelque chose d'indicible a été surmonté, maîtrisé, ouvrant la relation d'i<strong>de</strong>ntité. ”<br />

Pierre Legendre, Leçons III, p. 78.<br />

Maurice Leenhardt, anthropologue, a mis en évi<strong>de</strong>nce, il y a longtemps déjà, le concept d’i<strong>de</strong>ntité <strong>dans</strong> les sociétés<br />

canaques comme porteur d’altérité. L’individu, le kamo, se compose <strong>de</strong> plusieurs personnages, sans que cela pose<br />

problème. L’individu est multiple.<br />

“ C<strong>et</strong> être que l’on pressent au travers <strong>de</strong> la Parole, le Mélanésien ne le connaît qu’en sa forme<br />

d’humanité <strong>et</strong> il l’appelle kamo, le qui vivant. Nous avons traduit par personnage <strong>et</strong> le terme convient<br />

aussi bien à l’être mythique qu’à l’humain. L’<strong>un</strong>e <strong>et</strong> l’autre sont toujours situés <strong>dans</strong> <strong>un</strong> ensemble social<br />

ou socio-religieux <strong>et</strong> y jouent leur rôle. Tel le lézard assis sur la tête du chef <strong>de</strong> Koné. La femme <strong>de</strong> ce<br />

<strong>de</strong>rnier apercevant son époux pliant sous ce faix du monstre totémique s’écrie :<br />

- Ne pa kamo, c’est-à-dire, ensemble <strong>de</strong> personnages. Elle ne distingue pas quel est le personnage<br />

mythique <strong>et</strong> l’humain. Tous <strong>de</strong>ux forment <strong>un</strong> ensemble revêtu d’humanité.<br />

Le kamo est donc mal délimité aux yeux d’autrui. Il a d’ordinaire forme humaine, <strong>et</strong> il est l’homme <strong>dans</strong><br />

sa généralité, mais il peut être tout autre être investi d’humanité. Le corps du kamo apparaît donc<br />

comme le revêtement d’<strong>un</strong> personnage.<br />

Et le kamo lui-même n’est pas davantage délimité à ses propres yeux. Il ignore son corps, qui n’est que<br />

son support. Il ne se connaît que par la relation qu’il entr<strong>et</strong>ient avec les autres. Il n’existe que <strong>dans</strong> la<br />

mesure où il exerce son rôle <strong>dans</strong> le jeu <strong>de</strong> ses relations. Il ne se situe que par rapport à celles-ci. […] Il<br />

faut, pour comprendre ce que j’écris ici, avoir sous les yeux le paysage social mélanésien. On ne<br />

rencontre jamais <strong>un</strong> je<strong>un</strong>e homme seul. Mais toujours <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> “ frères ” faisant bloc <strong>et</strong><br />

entr<strong>et</strong>enant ensemble, <strong>et</strong> en bloc, les mêmes relations avec les autres groupes. Même <strong>dans</strong> les<br />

aventures galantes, ils redoutent d’être seuls, <strong>et</strong> le ren<strong>de</strong>z-vous se fixe entre <strong>de</strong>ux ou trois femmes <strong>et</strong><br />

<strong>de</strong>ux ou trois hommes. ”<br />

Maurice Leenhardt, Do kamo, la personne <strong>et</strong> le mythe <strong>dans</strong> le mon<strong>de</strong> mélanésien, p. 249.<br />

L’individu existe <strong>dans</strong> la parole <strong>de</strong> l’autre. Si on le parle, si on le raconte, le rappelle au souvenir, il<br />

existe, même au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la mort. Alors il accè<strong>de</strong> au statut d’ancêtre <strong>et</strong> poursuit sa vie parmi les vivants.<br />

“ La personnalité dure aussi longtemps que son nom est recherché. Quand elle se prolonge <strong>dans</strong> le<br />

mon<strong>de</strong> invisible <strong>et</strong> continue l’existence d’<strong>un</strong> déf<strong>un</strong>t, elle se trouve privée <strong>de</strong> l’appui <strong>et</strong> <strong>de</strong> la spontanéité<br />

que lui assurait le corps <strong>dans</strong> le mon<strong>de</strong> sensible. Et donc privée d’efficience. Elle exige alors, <strong>de</strong> ceux qui<br />

la recherchent, l’hommage qui la nourrit, culte, représentation esthétique, sacrifice, - elle veut être<br />

appréhendée ; elle se révèle à qui la cherche – <strong>dans</strong> le sommeil magique, au cours <strong>de</strong>s luttes avec<br />

l’esprit, ou <strong>de</strong>s transes. Elle subsiste aussi longtemps que la société a besoin d’elle. Elle peut être exaltée<br />

ou transformée en héros mythique ou en divinité. Elle meurt d’oubli, <strong>et</strong> son nom <strong>de</strong>vient vi<strong>de</strong> <strong>de</strong> sens.<br />

Proj<strong>et</strong> DORE – ECAV, 2001 48

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