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musée imaginaire - FRAC Basse-Normandie

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LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Réseau académique des galeries d’art 2006 - 2007<br />

<strong>FRAC</strong>.BN 9 RUE VAUBENARD 14000 CAEN 02 31 93 09 00 frac.bn@wanadoo.fr<br />

Le Frac bénéficie du concours du Ministère de la Culture, Direction Régionale des Affaires Culturelles de <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> et<br />

du Conseil Régional de <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong>


LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Œuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Sommaire<br />

Texte de présentation de l’exposition Le <strong>musée</strong> <strong>imaginaire</strong><br />

« Quelques pistes »<br />

« Quelques références »<br />

Bibliographie<br />

Notices biographiques :<br />

- Fariba Hajamadi<br />

- Bénédicte Hébert<br />

- Karen Knorr<br />

- Ernest T.


LE MUSÉE IMAGINAIRE (1)<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Œuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Les œuvres de l’exposition Le <strong>musée</strong> <strong>imaginaire</strong> prennent pour cadre le <strong>musée</strong>, réel ou réinventé<br />

par les artistes. Elles suscitent une réflexion, souvent a<strong>musée</strong>, sur ce lieu particulier où<br />

s’exerce le jugement esthétique du spectateur.<br />

Comme l’indique le titre de sa vidéo, Bénédicte Hébert convie le spectateur à une visite du<br />

Louvre en 1 minute 26 secondes, 2000. À raison d’une toile tous les 1/24ème de seconde, ce sont<br />

plus de 2000 œuvres du prestigieux <strong>musée</strong> qui défilent devant lui. Bénédicte Hébert propose<br />

ainsi une lecture cinématographique de l’histoire de la peinture où l’œil, trompé par la persistance<br />

rétinienne, croit distinguer des ensembles cohérents de formes et de couleurs. Elle ouvre<br />

également les portes d’un <strong>musée</strong> où il n’existerait ni cloisonnement entre les différentes<br />

périodes artistiques ni hiérarchie entre les œuvres, chacune se voyant attribuer la même durée<br />

d’exposition.<br />

Fariba Hajamadi réalise des photo-montages à partir d’images provenant de différents lieux de<br />

mémoire. Elle les transfère ensuite sur toile ou sur panneaux de bois, créant des oeuvres à michemin<br />

entre peinture et photographie. Le diptyque Bed of Razors/Swarms of Reasons, 1993, juxtapose<br />

deux images qui évoquent la féminité : d’un côté, une chambre, de l’autre, une guêpière<br />

entourée d’une collection d’insectes. Un cordon de sécurité et une vitrine font quant à eux référence<br />

à l’univers muséal. Fariba Hajamadi constitue ainsi une sorte de cabinet de curiosités,<br />

entre fiction et réalité.<br />

Karen Knorr met en scène des personnages dans des lieux marqués par l’histoire du goût. Dans<br />

The Analysis of Beauty, 1988, des « Connoisseurs » observent les œuvres accrochées aux murs à<br />

travers divers outils optiques. La composition de la photographie s’apparente à celle d’une peinture<br />

néo-classique du XVIIIe siècle et fait écho à l’aménagement intérieur du <strong>musée</strong>. C’est précisément<br />

les conceptions esthétiques héritées de cette époque que Karen Knorr interroge ici<br />

avec ironie.<br />

Ernest T. agrandit une caricature de presse du XIXe siècle où un amateur d’art, l’air dubitatif, se<br />

penche vers un tableau et dit au marchand qui se tient derrière lui : Vous me garantissez qu’il ne<br />

contient aucun sous-entendu politique, 1990. Le tableau en question est une toile composée de<br />

l’imbrication de lettres T peintes dans les trois couleurs primaires. La situation est éminemment<br />

absurde. Elle met en évidence les difficultés que le public peut parfois éprouver devant l’art<br />

consacré par l’institution muséale.<br />

(1) Le Musée <strong>imaginaire</strong>, premier volume de la trilogie de la Psychologie de l’art, paraît en 1947. Le « <strong>musée</strong> <strong>imaginaire</strong><br />

» qu’y décrit André Malraux est constitué de l’ensemble des œuvres qui s’imposent à la sensibilité d’une<br />

époque, c’est-à-dire celles que le XXème siècle a découvertes ou qu’il a appris à regarder enfin sans préjugés<br />

(notamment les arts sacrés). Chaque être humain puise dans ce fonds universel et y retrouve « sa part d’éternité<br />

». Le <strong>musée</strong> <strong>imaginaire</strong> est un <strong>musée</strong> de papier dans la mesure où c’est la photographie qui, en rendant disponibles<br />

les arts du monde entier, affirme leur égal droit à notre admiration.


LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Œuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

« Quelques pistes »<br />

La création par les artistes de <strong>musée</strong>s <strong>imaginaire</strong>s<br />

> par le photo-montage : Fariba Hajamadi juxtapose des photographies prises dans des lieux de<br />

mémoire différents et crée ainsi un espace muséal à mi-chemin entre fiction et réalité.<br />

> par la mise en scène photographique : Karen Knorr fait poser des acteurs dans des lieux de patrimoine<br />

existants, composant des sortes de « tableaux vivants ».<br />

> par le diaporama : Bénédicte Hébert fait se succéder à très grande vitesse des reproductions de<br />

tableaux du Louvre.<br />

> par le détournement d’une image : Ernest T. réalise un agrandissement photographique d’une caricature<br />

de presse dans laquelle il introduit une de ses « peintures nulles » (peintures composées de l’imbrication<br />

de lettres « T » peintes dans les trois couleurs primaires).<br />

L’interrogation du rapport entre l’œuvre et le spectateur<br />

> la « consommation culturelle » : dans la vidéo de Bénédicte Hébert, la vitesse à laquelle défilent les<br />

tableaux peut évoquer le rythme effréné auquel certains visiteurs parcourent les <strong>musée</strong>s.<br />

> la sacralisation de l’œuvre : dans la photographie de Karen Knorr, l’attitude d’extrême attention, de<br />

quasi recueillement des deux personnages témoigne d’une conception sacralisée de l’œuvre d’art.<br />

> l’incompréhension : dans l’œuvre d’Ernest T., le collectionneur a recours à l’avis expert du marchand<br />

car il ne saisit vraisemblablement pas la signification de la toile abstraite qui lui fait face.<br />

L’interrogation du rapport entre l’œuvre et le <strong>musée</strong><br />

> la présentation des œuvres : dans la vidéo de Bénédicte Hébert, les tableaux se succèdent sans que<br />

l’ordre chronologique ou qu’une quelconque hiérarchie soient respectés. Ce n’est pas le cas dans les<br />

<strong>musée</strong>s où l’accrochage des œuvres établit des classifications, chronologiques ou thématiques.<br />

> l’importance des « accessoires » muséaux : dans le diptyque de Fariba Hajamadi, ce sont le cordon de<br />

sécurité et la vitrine davantage que les objets exposés eux-mêmes qui permettent de dire que ces<br />

deux photographies ont été prises dans des <strong>musée</strong>s. Ce constat met en évidence la capacité du <strong>musée</strong><br />

à définir ce qui est art et ce qui ne l’est pas.<br />

> l’agencement spatial du <strong>musée</strong> : la composition de la photographie de Karen Knorr établit un parallèle<br />

entre l’agencement spatial du <strong>musée</strong> et la composition des tableaux qui y sont exposés. Karen<br />

Knorr pointe ainsi, non sans ironie, le fait que certains <strong>musée</strong>s sont tributaires des goûts esthétiques<br />

d’une époque (ici le XVIIIe siècle).


LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Oeuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

«Quelques références»<br />

Musée d’art moderne, Département des Aigles, Section<br />

des figures, 1972<br />

vue de l’installation à Düsseldorf<br />

Marcel Broodthaers (Bruxelles, 1924 - Cologne, 1976)<br />

Sous l’égide de Mallarmé et de Magritte, la pratique de Marcel<br />

Broodthaers ne cesse d’osciller entre «les mots et les<br />

choses». Dès 1964, le recueil le Pense-bête fige le texte dans<br />

le plâtre alors que le carton d’invitation de sa première exposition<br />

annonce, laconique : «Moi aussi je me suis demandé si<br />

je ne pouvais pas vendre quelque chose». Jusqu’en 1968,<br />

Broodthaers réalise de nombreux objets où la belgitude apparaît<br />

tel un leitmotiv et une géographie imagée et infinie, à la<br />

fois «poétique et politique». (...) A partir de 1968, la notion de<br />

<strong>musée</strong> devient prétexte à de multiples environnements ayant<br />

pour but de «séparer dans un objet ce qui est art et idéologie».<br />

Il ouvre ainsi en 1972 à Düsseldorf l’ultime section de son Musée d’art moderne, département des Aigles,<br />

la section «l’Aigle de l’Oligocène à nos jours». Celle-ci met sur le même plan - sous prétexte qu’il s’agit<br />

d’un aigle figuré - des publicités, des étiquettes de produits de consommation, des oeuvres d’art<br />

empruntées à des <strong>musée</strong>s. Entre une chose et son nom, entre une oeuvre et ce qu’on voit, entre un artiste<br />

et un conservateur de <strong>musée</strong>, entre ceci et cela : toujours une limite, infime si l’on veut, souvent<br />

cachée, mais dont on peut soudain mesurer l’importance, une frontière à l’assaut de laquelle grimpe<br />

l’avant-garde.<br />

Musée Khômbol, 1981-1985<br />

installation de 7 éléménts<br />

Collection Frac Midi-Pyrénées<br />

Musée Khômbol (Toulouse, 1960)<br />

«Un des premiers sujets que j'ai traités, c'était dans les années 80,<br />

c'était le Museum, Le Musée d'Histoire Naturelle, c'est-à-dire cette<br />

volonté d'installer en un seul endroit un éventail aussi large et aussi<br />

complet que possible d'un certain type de connaissances humaines.<br />

J'habitais dans la région et j'avais pris coutume d'aller visiter le<br />

Musée d'Histoire Naturelle de Toulouse, qui est saisissant parce<br />

qu'il est en l'état, c'est-à-dire qu'il n'a pas dû bouger depuis peutêtre<br />

une cinquantaine d'années, malgré les efforts successifs mais<br />

pratiquement invisibles.(…)<br />

J'ai débuté en faisant ce qu'on pourrait appeler une sorte de faux<br />

Musée d'Histoire Naturelle dans lequel je reprenais les objets les<br />

plus typiques d'un Museum. J'avais par exemple une tête d'animal<br />

empaillé. J'avais choisi un des plus gros, des plus impressionnants,<br />

le rhinocéros. J'avais aussi quelques momies (parce qu'on pourrait<br />

dire que la momie est incontournable dans un Museum), quelques<br />

reconstitutions d'animaux, avec le souci que cela soit malhabile, que l'on ait le sentiment que ces objets<br />

aient été patinés par le temps, comme ceux que l'on peut trouver dans ces <strong>musée</strong>s surannés qui existent<br />

en France, et avec une surcharge d'étiquettes et de renseignements qui le rendent illisible.<br />

C'était pour nous montrer aussi que notre prétention à expliquer le monde, à le raisonner, à le vulgariser,<br />

aboutit souvent à la plus grande des confusions.» (Musée Khômbol, juin 1998)


LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Oeuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

«Quelques références»<br />

Carpeaux, 1988<br />

épreuve cibachrome, 69 x 100 cm<br />

Collection Musée National d’Art Moderne<br />

Louise Lawler (New York, 1947)<br />

Depuis le début des années quatre-vingt, Louise Lawler photographie<br />

des œuvres d’art dans les collections privées ou<br />

dans les <strong>musée</strong>s et les recadre à sa manière. Elle questionne<br />

l’image de l’œuvre d’art, le statut que lui confèrent les différents<br />

contextes qui l’accueillent.<br />

Carpeaux est une photographie prise au <strong>musée</strong> d’Orsay d’une<br />

sculpture du célèbre artiste du XIXe siècle. L’œuvre de ce dernier<br />

y apparaît coupée en plein milieu, si bien que l’on comprend<br />

que le sujet de la photographie est moins de montrer la<br />

sculpture que de mettre en évidence son environnement et la<br />

manière dont elle est présentée : socle, cartel, revêtement<br />

mural… S’appliquant à choisir ce que les habitudes du métier de photographe désigneraient comme le<br />

plus mauvais point de vue (contre-jours, cadrages coupant les sujets, hauteurs de prise de vue paradoxales),<br />

Louise Lawler montre les œuvres comme des objets ordinaires, ni plus ni moins estimables<br />

que le mobilier avec lequel elles voisinent dans les collections privées ou publiques, et comme entrées<br />

dans le champ par hasard.(...)<br />

Comme Marcel Broodthaers ou Daniel Buren, Louise Lawler s’engage dans la critique de l’institution<br />

pour en souligner les conventions, dénoncer les stéréotypes de présentation ou de conservation inhérents<br />

aux genres institutionnels et amener le spectateur à s’interroger sur ce que représente la notion<br />

d’art. (source : www.centrepompidou.fr)<br />

Little Frank and His Carp, 2001<br />

vidéo couleur, 6 minutes<br />

Collection Frac Lorraine<br />

Andrea Fraser (Billings, Etats-Unis, 1965)<br />

Qu’elle se fasse passer pour une journaliste à l’occasion<br />

d’une biennale internationale, prononce devant des<br />

mécènes une conférence-striptease caricaturant les rapports<br />

obséquieux collectionneur-artiste ou bien que,<br />

déguisée en médiatrice, elle détourne le public d’un<br />

<strong>musée</strong> pour une visite subversive des lieux, Andrea Fraser<br />

ne cesse de défier la position de l’artiste au sein d’un<br />

champ institutionnel, économique et marketing de l’art.<br />

Au-delà de leur inscription directe dans cette réalité spécifique,<br />

ces mini-scénarii réactifs, qu’elle interprète ellemême,<br />

instillent néanmoins une critique structurelle aux<br />

enjeux politiques et sociaux plus universels.<br />

Ainsi de la courte vidéo-performance Little Frank and His Carp (2001), filmée en caméra cachée, dans<br />

laquelle l’artiste incarne une visiteuse du <strong>musée</strong> Guggenheim de Bilbao, réagissant naïvement et émotionnellement<br />

aux injonctions célébratives et distillées d’une voix suave par un audioguide vantant les<br />

mérites de cette architecture de Frank Gehry. Une façon de désigner l’espace institutionnel de l’art<br />

comme lieu de consommation, mais aussi lieu de pouvoir s’attachant à créer et à guider nos émotions<br />

vers la plus grande vulgarité. (source : In/visible. Collection Production Frac Lorraine, jrp/ringier, 2006)


LE MUSÉE IMAGINAIRE<br />

Fariba Hajamadi, Bénédicte Hébert, Karen Knorr, Ernest T.<br />

Œuvres de la collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Bibliographie<br />

(ouvrages en consultation au centre de documentation du Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong> tous les jours de 14h<br />

à 18h)<br />

Fariba Hajamadi :<br />

- Pascal Bouchaille, Fariba Hajamadi, Profil d’une collection, Fonds régional d’art contemporain de<br />

<strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong>, 1996<br />

- Fariba Hajamadi, Musée municipal de la Roche-sur-Yon, 1994<br />

Bénédicte Hébert :<br />

- Bénédicte Hébert. Vu d’ici, Artothèque de Caen, 1997<br />

Karen Knorr :<br />

- Genii loci. The photographic Work of Karen Knorr, Black Dog Publishing Limited, 2002<br />

- Antonio Guzman, Karen Knorr, Profil d’une collection, Fonds régional d’art contemporain de <strong>Basse</strong>-<br />

<strong>Normandie</strong>, 2001<br />

- Karen Knorr. Les vertus et les délices. Académies, Espace Interlope la Curieuse, Nantes, Editions de<br />

l’Aquarium agnostique, Valenciennes, 1996<br />

- Karen Knorr. Signes de distinction, Thames & Hudson, 1991<br />

- Karen Knorr. Vues de l’esprit, galerie Art et Essai, Galerie du Cloître, Galerie Le Lieu, Associations des<br />

Amis de l’Ecole Régionale des Beaux-Arts de Rennes, 1989<br />

- Karen Knorr. Compostures, Editions Paris-Musées, 1987<br />

Ernest T. :<br />

- Ernest T. Opera, Frac Limousin, Frac Bourgogne, La Box, Synagogue de Delme, 2001<br />

- La vie d’artiste, Michel Baverey éditeur, cneai Chatou, 2001<br />

- Ernest T. Art Dept, Galerie Gabrielle Maubrie, Paris, 1990


Fariba HAJAMADI<br />

Née en 1957 à Ispahan (Iran), vit et travaille à New York (Etats-Unis).<br />

Bed of Razors / Swarms of Reasons, 1993<br />

photo émulsion sur panneau de frêne, 176,4 x 154,3 cm<br />

Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Le travail photographique de<br />

Fariba Hajamadi est empreint<br />

d’une réflexion sur l’image, celleci<br />

devant être selon l’artiste « travaillée<br />

comme les mots d’une<br />

phrase ». Cette approche qualifiée<br />

de conceptuelle est commune<br />

à de nombreux artistes américains<br />

tels John Baldessari, Jeff<br />

Wall, Mac Adams.<br />

Les œuvres de Fariba Hajamadi présentent un univers complexe, ambigu, polysémique.<br />

Puisant dans les archives qu’elle a constituées depuis des années lors de visites dans les <strong>musée</strong>s du<br />

monde entier, elle réalise des montages où se juxtaposent les images provenant de lieux divers. Ces<br />

montages sont ensuite transférés sur toile ou sur panneaux de bois, parfois retouchés ou simplement<br />

recouverts d’un filtre coloré. Ces compositions « hybrides » s’articulent en polyptiques où les lieux sont<br />

recréés selon des perspectives et des thématiques <strong>imaginaire</strong>s.<br />

Bed of Rasors, Swarms of Reasons , dont le titre est emprunté au poète mexicain Octavio Paz, illustre la<br />

façon dont le jeu des images redoublé du jeu des mots attise la curiosité du spectateur et l’incite à<br />

démêler le sens des lectures possibles. Dans cette œuvre sont juxtaposés deux espaces, l’un privé,<br />

évoquant le salon d’une demeure historique, l’autre public, celui d’un <strong>musée</strong> d’histoire naturelle où<br />

trône, de façon incongrue parmi des collections d’insectes, une guêpière. La tonalité de l’ensemble est<br />

trouble, sensuelle. A l’évocation d’un monde plein de raffinement et de séduction s’opposent des<br />

signes de mort avec les collections d’insectes et de violence physique et sociale symbolisé par le corset.<br />

La question du temps et de la mémoire est mise à l’épreuve, les agrégats d’images de Fariba<br />

Hajamadi recomposent une sorte de « <strong>musée</strong> <strong>imaginaire</strong> » où chaque spectateur tentera vainement<br />

d’identifier son propre souvenir.


Bénédicte HEBERT<br />

Née en 1967 à Saint-Hilaire du Harcouet, vit et travaille à Caen.<br />

Le Louvre en 1 minute 26 secondes, 2000<br />

vidéo, 1 min 26<br />

Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Diplômée de l’Ecole des Beaux-Arts de Caen en<br />

1994, Bénédicte Hébert poursuit depuis plusieurs<br />

années une réflexion centrée sur les enjeux et les<br />

statuts de l’image. Qu’elle utilise la photographie ou<br />

la vidéo ou qu’elle aborde d’autres domaines de la<br />

création artistique (celui du théâtre en particulier),<br />

ses œuvres sont autant de questionnements sur la<br />

notion de représentation.<br />

Comme l’indique le titre de sa vidéo, qui rend hommage<br />

au film Bande à part réalisé en 1964 par Jean-Luc Godard*, Bénédicte Hébert convie le spectateur<br />

à une visite du Louvre en 1 minute 26 secondes. À raison d’une toile tous les 1/24ème de seconde, ce<br />

sont plus de 2000 œuvres du prestigieux <strong>musée</strong> qui défilent devant lui. Bénédicte Hébert propose ainsi<br />

une lecture cinématographique de l’histoire de la peinture où l’œil, trompé par la persistance rétinienne,<br />

croit distinguer des ensembles cohérents de formes et de couleurs. Elle ouvre également les portes d’un<br />

<strong>musée</strong> où il n’existerait ni cloisonnement entre les différentes périodes artistiques ni hiérarchie entre<br />

les œuvres, chacune se voyant attribuer la même durée d’exposition.<br />

*Dans ce film, les trois principaux personnages - incarnés par Anna Karina, Sami Frey et Claude Brasseur - visitent<br />

le Louvre en un temps record : 9 minutes 45 secondes.


Karen KNORR<br />

Née en 1954 à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), vit et travaille à Londres.<br />

The Analysis of Beauty, 1988<br />

photographie cibachrome et cadre en bois avec plaque de cuivre, 57,8 x 57,5 cm<br />

Collection Frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

des tableaux photographiques de Connoisseurs .<br />

Dans une esthétique résolument hybride - qui<br />

tient à la fois du tableau vivant et de la « grande<br />

peinture », de « l’installation » et du théâtre,<br />

de la photographie documentaire et de l’analyse<br />

des signes - Karen Knorr réalise des<br />

ensembles d’images délibérément ambiguës, à<br />

la fois critiques et fascinées, distantes et sensuelles<br />

où le regard posé sur une culture de la<br />

mémoire et de la tradition est en même temps<br />

celui de la plus extrême modernité : en ce qu’il<br />

se laisse traverser par l’ironie.<br />

Les séries photographiques de Karen Knorr<br />

sont autant d’étapes d’un parcours qui va des<br />

images noir et blanc légendées des lieux et des<br />

acteurs de la Gentry anglaise avec Belgravia,<br />

Gentlemen, Country Life aux allégories colorées<br />

« Très léchées, les photographies de Connoisseurs élisent pour sujet fétiche le <strong>musée</strong> pré-moderne et<br />

son univers normé jusqu'à l’outrance, un univers peuplé de spécialistes stylés ou de personnages prenant<br />

des poses de référence avec l’univers contourné du classicisme. Shattering an Old Dream of<br />

Symmetry : inscrite comme une image dans un décor des plus géométrisé, une femme se tient dans<br />

l’embrasure d’une porte, à la main l’arc de la Diane chasseresse. The Analysis of Beauty : deux hommes<br />

fort occupés, dans une salle de peinture, observant les toiles qui leur font face qui à travers un appareil<br />

photographique, qui à travers une longue vue-grandeur et misère de la fonction d’expert … Nulle figure<br />

humaine dans cette autre photographie de Connoisseurs qu’est Contemplation of the Essential Forms<br />

mais en revanche, une véritable démonstration des délirants fantasmes d’organisation propres à la culture<br />

rationaliste. /…/ Le pouvoir on le sait goûte les formes polyédriques, symboles de l’organisation<br />

reine et du chaos domestiqué. Tout ce dont Karen Knorr semble plaisanter, nous laissant perplexes<br />

quant à l’arbitraire des modes de représentation que la culture se sera donnée dans l’histoire à cette fin<br />

aussi, quelque peu honteuse, de s’auto-légitimer. »<br />

Extrait du texte de Paul Ardenne « Le corps dans l’orbite de sa décorporation figurative », Fonds régional d’art<br />

contemporain <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong>, 1983-2001, Caen, 2004


Ernest T.<br />

Né à Mons (Belgique) en 1943, vit et travaille à Paris.<br />

Vous me garantissez qu’il ne contient aucun sous-entendu politique, 1990<br />

photographie , peinture acrylique sur toile<br />

photographie : 120 x 151 cm, peinture : 32 x 37 cm<br />

Collection frac <strong>Basse</strong>-<strong>Normandie</strong><br />

Derrière le pseudonyme de Ernest T., se<br />

cache un esprit malicieux, dont la provocation<br />

a un sens prophylactique. Il se situe<br />

dans une tradition de la peinture française<br />

qui utilise volontiers la caricature et l’ironie,<br />

pour parfois émettre des idées pertinentes.<br />

Dans cette tradition se sont illustrés entre<br />

autres Honoré Daumier et Marcel Duchamp.<br />

Il aime provoquer le trouble : s’il exécute un<br />

dessin à la manière d’une caricature de presse<br />

agrandie en reproduction photographique,<br />

c’est pour la mettre en relation avec une<br />

véritable peinture sur toile, « faite à la main<br />

» entrelaçant des T dans le mode abstrait géométrique.<br />

Ernest T. appartient à une génération d’artistes qui porte un jugement critique et ironique sur une période<br />

récente de l’histoire de l’art et certains excès dogmatiques du discours de la modernité. En effet, l’art<br />

moderne a rompu avec les codes de lisibilité de l’œuvre dans les habitudes du public, ne s’attachant<br />

plus au récit, ni à l’anecdote, ni même au symbolisme qui caractérisait traditionnellement la peinture.<br />

Cette méfiance de l’amateur devant des valeurs dont il ne sait pas si elles sont véritables, Ernest T., invite<br />

chacun à l’avoir dans ses propres jugements. Et si Ernest T. était un imposteur ?

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