Nuisances sonores aéroportuaires - Centre d'information et de ...
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore – Avignon<br />
18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005<br />
Sommaire<br />
Avant-propos 2<br />
Allocutions d’ouverture<br />
Thierry Trouvé, directeur <strong>de</strong> la prévention <strong>de</strong>s pollutions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s risques, ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable 3<br />
François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé <strong>de</strong> l’environnement 6<br />
Marcelle Ramon<strong>et</strong>, prési<strong>de</strong>nte du Conseil national du bruit (CNB), députée du Finistère 7<br />
Séance plénière<br />
Protéger la santé <strong>de</strong>s citoyens, fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la directive 2002/49/CE 10<br />
Séance plénière<br />
La gestion <strong>de</strong> l'environnement sonore urbain : cadres européen <strong>et</strong> national 16<br />
Séance plénière<br />
Des politiques globales pour réduire le bruit en agglomération 23<br />
Séance plénière<br />
Des politiques nationales fondées sur l’analyse <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices 33<br />
Séance plénière<br />
Les outils pour prévenir <strong>et</strong> réduire le bruit <strong>de</strong>s transports en milieu urbain en France : exemples <strong>de</strong> mise en œuvre 38<br />
Atelier<br />
Recherche en acoustique : bilan d’étape du programme "Bruit <strong>et</strong> nuisances <strong>sonores</strong>" 54<br />
Atelier<br />
<strong>Nuisances</strong> <strong>sonores</strong> aéroportuaires 64<br />
Atelier<br />
Programme européen Harmonoise : les métho<strong>de</strong>s harmonisées <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong> l’exposition au bruit dans le cadre <strong>de</strong> la directive<br />
européenne<br />
Atelier<br />
Confort acoustique dans les bâtiments – Maîtrise <strong>de</strong>s maillons <strong>de</strong> la chaîne <strong>de</strong> l’acoustique dans les logements <strong>et</strong> le tertiaire,<br />
en neuf <strong>et</strong> en réhabilitation : prévision, produits, mise en œuvre, mesure <strong>et</strong> contrôle<br />
78<br />
83<br />
Atelier<br />
Bruits <strong>et</strong> vie quotidienne 95<br />
Atelier<br />
Cartographie <strong>et</strong> surveillance du bruit urbain 111<br />
Allocution <strong>de</strong> clôture<br />
François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé <strong>de</strong> l’environnement 126<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 1
Avant-propos<br />
Alice Debonn<strong>et</strong>-Lambert, directrice du <strong>Centre</strong> d’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> documentation sur le bruit<br />
Après Strasbourg en 1995, Paris en 1998, Angers en 2001,<br />
Avignon accueillait en janvier 2005 les quatrièmes Assises <strong>de</strong><br />
la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore. Ces Assises, dont<br />
l’initiative revient au ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du<br />
Développement durable, ont pour objectif <strong>de</strong> réunir les<br />
acteurs intervenant dans les domaines <strong>de</strong> la gestion du bruit<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l'environnement sonore pour faire le bilan<br />
<strong>de</strong>s recherches <strong>et</strong> <strong>de</strong>s politiques menées dans ce secteur <strong>et</strong><br />
élaborer <strong>de</strong>s pistes pour l'avenir. Tous ceux qui agissent au<br />
quotidien pour l’amélioration <strong>de</strong> l’environnement sonore<br />
participent à ce ren<strong>de</strong>z-vous <strong>et</strong> y expriment leur point <strong>de</strong><br />
vue.<br />
La directive européenne relative à l'évaluation <strong>et</strong> à la<br />
gestion du bruit dans l'environnement, <strong>et</strong> sa transcription en<br />
droit français (ordonnance du 14 novembre 2004),<br />
constituent le fil conducteur <strong>de</strong> ces Assises 2005.<br />
Ces trois journées s'adressent principalement aux autorités<br />
publiques concernées directement par la mise en œuvre <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te directive : régions <strong>et</strong> départements, communautés<br />
urbaines <strong>et</strong> d'agglomération, villes, gestionnaire d'aéroports,<br />
services <strong>de</strong> l'État...<br />
Sont aussi directement impliqués les consultants, bureaux<br />
d'ingénierie opérationnelle <strong>et</strong> agences d’urbanisme<br />
intéressés par les techniques <strong>de</strong> cartographie <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
surveillance (monitoring) du bruit dans l'environnement <strong>et</strong> la<br />
mise en place <strong>de</strong> plans d'action <strong>de</strong> lutte contre le bruit.<br />
Ces journées sont également ouvertes à un public plus large<br />
qui vient s'exprimer dans le cadre <strong>de</strong>s ateliers thématiques :<br />
responsables <strong>de</strong> laboratoire <strong>de</strong> recherche, fabricants <strong>de</strong><br />
matériaux acoustiques, professionnels du secteur <strong>de</strong> la<br />
santé, représentants d'associations…<br />
PAGE 2<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Allocution d’ouverture<br />
Thierry Trouvé, directeur <strong>de</strong> la prévention <strong>de</strong>s pollutions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s risques, ministère <strong>de</strong> l’Écologie<br />
<strong>et</strong> du Développement durable<br />
En matière <strong>de</strong> bruit, comme pour tous les suj<strong>et</strong>s<br />
d’environnement ou <strong>de</strong> risques, les échanges d’expériences,<br />
la qualité scientifique ainsi que la transparence <strong>de</strong><br />
l’information sont nécessaires pour mener à bien la lutte<br />
contre les nuisances <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> ai<strong>de</strong>r les maîtres d’ouvrages<br />
<strong>et</strong> les déci<strong>de</strong>urs dans leurs orientations <strong>et</strong> leurs choix<br />
stratégiques. Le programme <strong>de</strong> travail riche <strong>et</strong> varié <strong>de</strong> ces<br />
trois jours <strong>de</strong>vrait contribuer à atteindre ces objectifs.<br />
Le bruit figure, vous le savez, parmi les préoccupations que<br />
nos concitoyens placent en tête <strong>de</strong> liste dans les enquêtes<br />
d’opinion. La <strong>de</strong>rnière enquête <strong>de</strong> l’Insee parue en 2002 le<br />
confirme. À la question : « quels problèmes dans votre<br />
commune ou votre quartier vous préoccupent le plus », 54%<br />
<strong>de</strong>s habitants d’agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 50 000 habitants<br />
se déclarent gênés par le bruit à leur domicile ; le bruit est<br />
ainsi cité <strong>de</strong>vant le manque <strong>de</strong> sécurité ou la pollution. Qu’il<br />
s’agisse <strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> voisinage, <strong>de</strong> ceux provoqués par<br />
les infrastructures <strong>de</strong> transports terrestres ou aériens, ou<br />
encore <strong>de</strong> ceux liés aux performances acoustiques du<br />
bâtiment, tous sont ressentis comme une agression, un<br />
facteur d’atteinte à la santé…<br />
La lutte contre les nuisances <strong>sonores</strong> n’est pas une action<br />
récente <strong>de</strong>s pouvoirs publics. L'édifice réglementaire est en<br />
place <strong>de</strong>puis 1992 grâce à la loi du 31 décembre 1992 qui a<br />
permis d’encadrer strictement la lutte contre le bruit. Le<br />
bilan <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te loi dressé par le Conseil national du bruit,<br />
voici maintenant <strong>de</strong>ux ans, soulignait le travail<br />
réglementaire accompli <strong>et</strong> préconisait une mobilisation <strong>de</strong><br />
l'ensemble <strong>de</strong>s acteurs impliqués en matière <strong>de</strong> lutte contre<br />
le bruit.<br />
C'est la raison pour laquelle les pouvoirs publics ont<br />
manifesté la volonté <strong>de</strong> redynamiser l'action <strong>de</strong> l'État dans<br />
ce domaine en présentant le 6 octobre 2003 un plan national<br />
d'actions contre le bruit. Ce plan d'actions se veut fidèle à<br />
l’esprit <strong>de</strong> la charte <strong>de</strong> l’environnement <strong>et</strong> aux principes qui<br />
ont guidé l’élaboration <strong>de</strong> la stratégie nationale <strong>de</strong><br />
développement durable. Il se veut également réaliste,<br />
concr<strong>et</strong>, adapté aux attentes <strong>de</strong> nos concitoyens, <strong>et</strong> il se<br />
décline selon trois axes : l’isolation acoustique <strong>de</strong>s<br />
logements soumis à un bruit excessif, la lutte contre le bruit<br />
au quotidien, la préparation <strong>de</strong> l’avenir.<br />
Certains <strong>de</strong> nos concitoyens ont leur domicile situé dans une<br />
zone où le bruit est manifestement excessif, au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>s<br />
seuils <strong>de</strong> 70 décibels. Je pense en premier lieu aux riverains<br />
<strong>de</strong>s grands aéroports ou ceux situés à proximité <strong>de</strong> grands<br />
axes <strong>de</strong> transports terrestres. À ces nuisances<br />
environnementales peuvent s’ajouter d’autres handicaps,<br />
notamment dans les quartiers urbains défavorisés où la gêne<br />
sonore aggrave la détresse sociale. C'est la raison pour<br />
laquelle <strong>de</strong>s mesures spécifiques pour ai<strong>de</strong>r à l’isolation<br />
acoustique <strong>de</strong> ces logements, orientées vers les quartiers les<br />
plus exposés au bruit ou situés dans les zones urbaines<br />
sensibles ont été engagées. Trois ministères sont<br />
étroitement associés dans ce dispositif. Il s'agit : du<br />
ministère <strong>de</strong> l'Écologie <strong>et</strong> du Développement durable ; du<br />
ministère <strong>de</strong> l'Équipement, <strong>de</strong>s Transports, <strong>de</strong><br />
l'Aménagement du territoire, du Tourisme <strong>et</strong> <strong>de</strong> la Mer ; du<br />
ministère <strong>de</strong> l'emploi, du travail <strong>et</strong> <strong>de</strong> la cohésion sociale,<br />
dont les crédits viennent abon<strong>de</strong>r ceux que mobilisent les<br />
collectivités territoriales.<br />
Dans le domaine du transport aérien, le dispositif d’ai<strong>de</strong> à<br />
l’insonorisation <strong>de</strong>s logements riverains <strong>de</strong>s dix principaux<br />
aéroports a été rénové : <strong>de</strong>puis le premier janvier 2004, les<br />
gestionnaires <strong>de</strong> ces aéroports bénéficient du produit <strong>de</strong> la<br />
taxe prélevée sur les compagnies aériennes, conformément<br />
au principe <strong>de</strong> réparation <strong>de</strong>s nuisances qu’elles génèrent.<br />
C<strong>et</strong>te taxe, qui a sensiblement augmenté au cours <strong>de</strong> ces<br />
<strong>de</strong>rnières années (17 M€ en 2003, 34 M€ en 2004, 55 M€ en<br />
2005) est désormais directement <strong>et</strong> intégralement affectée à<br />
l'isolation acoustique <strong>de</strong>s logements situés dans les plans <strong>de</strong><br />
gêne sonore. Ce nouveau dispositif présente divers<br />
avantages : le circuit administratif du traitement <strong>de</strong>s<br />
dossiers est simplifié, l’augmentation significative <strong>de</strong>s<br />
crédits affectés doit perm<strong>et</strong>tre d’ai<strong>de</strong>r les travaux<br />
concernant 8 800 logements par an contre 3 000 avant 2004,<br />
les gestionnaires d’aéroports sont responsabilisés <strong>et</strong> la<br />
transparence <strong>et</strong> l’information du public sont garanties.<br />
L’État, <strong>et</strong> en particulier le ministre <strong>de</strong> l'Écologie <strong>et</strong> du<br />
développement durable, n’abandonne pas sa responsabilité<br />
en la matière : les préf<strong>et</strong>s restent prési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>s<br />
commissions locales <strong>de</strong> concertation. Les Commissions<br />
consultatives <strong>de</strong> l'environnement (CCE) <strong>et</strong> les ai<strong>de</strong>s à<br />
l'insonorisation sont désormais attribuées sur avis conforme<br />
<strong>de</strong> ces commissions. L'État reste garant en tout état <strong>de</strong><br />
cause du bon fonctionnement <strong>de</strong> ce dispositif.<br />
Afin <strong>de</strong> lutter contre le bruit excessif <strong>de</strong>s transports<br />
terrestres, <strong>de</strong>s mesures spécifiques ont été engagées pour<br />
financer, avec le soutien <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux autres ministères que je<br />
viens <strong>de</strong> citer (Equipement, Travail, Emploi <strong>et</strong> Cohésion<br />
sociale) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s collectivités locales concernées, l’isolation<br />
acoustique <strong>de</strong> ces logements. Orientées vers les quartiers les<br />
plus exposés au bruit ou situés dans les zones urbaines<br />
sensibles, <strong>de</strong>s opérations d’isolation seront réalisées sur<br />
50 000 logements soumis au bruit <strong>de</strong>s réseaux nationaux<br />
routier <strong>et</strong> ferroviaire d'ici 2008. Ces opérations concernent<br />
en priorité les logements situés en zones urbaines sensibles<br />
<strong>et</strong> exposés à plus <strong>de</strong> 70 décibels le jour ou 65 décibels la<br />
nuit, ainsi que les logements situés hors ZUS mais exposés à<br />
plus <strong>de</strong> 70 décibels le jour <strong>et</strong> 65 décibels la nuit.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 3
Les nuisances <strong>sonores</strong> sont traitées <strong>de</strong> plusieurs manières. La<br />
réduction à la source du bruit est privilégiée, avec <strong>de</strong>s<br />
techniques comme la pose <strong>de</strong> revêtement routier<br />
acoustique, le meulage <strong>de</strong>s rails, le renouvellement <strong>de</strong>s<br />
semelles <strong>de</strong> frein <strong>de</strong>s trains, ou en <strong>de</strong>rnier recours, les<br />
écrans antibruit. En outre, ces opérations comprennent <strong>de</strong>s<br />
travaux d’isolation acoustique <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s, notamment <strong>de</strong>s<br />
étages supérieurs. Enfin, dans certains cas, la lutte contre<br />
les nuisances <strong>sonores</strong> doit passer par la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s<br />
logements <strong>et</strong> leur reconstruction aux normes actuelles.<br />
Le ministre présentera dans les prochaines semaines le bilan<br />
à un an <strong>de</strong> ce vol<strong>et</strong> du plan national d'actions <strong>de</strong>vant le<br />
Conseil national du bruit.<br />
Le bruit au quotidien est le second axe <strong>de</strong> ce plan. Chacun<br />
peut, dans sa vie quotidienne, être agressé par le bruit, dont<br />
les origines sont extrêmement diverses. Il s’agit souvent <strong>de</strong><br />
problématiques locales, qui intéressent en premier lieux les<br />
élus locaux <strong>et</strong> notamment les maires dont je tiens à rappeler<br />
le rôle crucial. Dans ce contexte, l’action du ministère <strong>de</strong><br />
l'Écologie <strong>et</strong> du Développement durable a été ciblée sur<br />
quelques priorités pour lesquelles <strong>de</strong>s progrès sensibles sont<br />
attendus. Afin <strong>de</strong> limiter le stress <strong>et</strong> la fatigue <strong>de</strong>s enfants<br />
<strong>et</strong> du personnel d'encadrement, une campagne <strong>de</strong><br />
réhabilitation acoustique <strong>de</strong> 500 crèches, 500 salles <strong>de</strong> repos<br />
d’écoles maternelles, 500 cantines scolaires <strong>et</strong> 250 salles <strong>de</strong><br />
sport utilisées par les collèges <strong>et</strong> les lycées est engagée sur 5<br />
ans. Des améliorations significatives peuvent être apportées<br />
par les techniques mo<strong>de</strong>rnes à l’acoustique intérieure <strong>de</strong> ce<br />
type <strong>de</strong> locaux. Le ministère <strong>de</strong> l'Écologie <strong>et</strong> du<br />
Développement durable cofinance jusqu' à 50% les travaux<br />
avec les collectivités locales qui souhaitent répondre à c<strong>et</strong><br />
appel à proj<strong>et</strong>s (20% pour les salles <strong>de</strong> sport). De nouvelles<br />
instructions ont été adressées début janvier 2005 aux DIREN<br />
chargées du traitement <strong>de</strong> ces dossiers. Elles assouplissent le<br />
dispositif fixé par la circulaire du 10 février 2004 <strong>et</strong><br />
perm<strong>et</strong>tront <strong>de</strong> réserver une suite favorable à un nombre<br />
plus important <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s.<br />
En outre, dans le cadre <strong>de</strong> la stratégie nationale <strong>de</strong><br />
développement durable, le gouvernement a décidé <strong>de</strong><br />
consacrer à l’éducation à l’environnement 30 heures dans<br />
l’enseignement primaire <strong>et</strong> autant dans le secondaire à<br />
partir <strong>de</strong> la rentrée 2004/2005. Une partie <strong>de</strong> c<strong>et</strong> horaire<br />
doit être consacrée à l’éducation à l’environnement sonore.<br />
Les matières abordées seront notamment la sensibilisation à<br />
l’écoute, l’éducation au civisme sonore <strong>et</strong> au respect<br />
d’autrui, <strong>et</strong> la prévention <strong>de</strong>s comportements<br />
potentiellement dangereux, comme l’écoute <strong>de</strong> musique<br />
amplifiée. Un CD <strong>de</strong>stiné à tous les enfants du primaire sera<br />
ainsi diffusé au cours <strong>de</strong> l'année scolaire 2005/2006 auprès<br />
<strong>de</strong>s enfants du primaire. La préparation d'outils<br />
pédagogiques à l'intention <strong>de</strong>s collégiens <strong>et</strong> lycéens sera par<br />
ailleurs engagée dès c<strong>et</strong>te année en vue d'une diffusion dans<br />
un an <strong>et</strong> <strong>de</strong>mi.<br />
Lorsqu'on évoque le bruit au quotidien, on doit également<br />
s'interroger sur les moyens, notamment réglementaires,<br />
perm<strong>et</strong>tant d'effectuer le contrôle <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
Les plaintes contre les nuisances <strong>sonores</strong> ont trop souvent<br />
fait l’obj<strong>et</strong> d’un classement sans suite. Dans le cadre <strong>de</strong> la<br />
mise en place <strong>de</strong>s juges <strong>de</strong> proximité, qui ont la compétence<br />
<strong>de</strong> juger ce type <strong>de</strong> contravention, le ministre <strong>de</strong> la Justice,<br />
gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s Sceaux, a donné <strong>de</strong>s instructions, le 16 octobre<br />
2004, pour que ces plaintes soient mieux traitées : les<br />
procureurs ont donc été invités à recourir plus régulièrement<br />
à <strong>de</strong>s dispositions alternatives aux poursuites, telles que le<br />
rappel solennel à la loi, la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> régularisation <strong>de</strong><br />
situation, l'obligation <strong>de</strong> réparation ou la médiation pénale.<br />
Ces mesures sont particulièrement indiquées dans le cas <strong>de</strong>s<br />
bruits <strong>de</strong> voisinage où la pacification <strong>de</strong>s relations doit<br />
primer sur la sanction pénale.<br />
Une circulaire complémentaire à l'intention <strong>de</strong> l'ensemble<br />
<strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong>vrait prochainement être signée<br />
par les ministères chargés <strong>de</strong> l'intérieur <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'écologie.<br />
C<strong>et</strong>te circulaire a pour objectif <strong>de</strong> mobiliser les services<br />
préfectoraux chargés du contrôle <strong>de</strong>s nuisances, d'améliorer<br />
la connaissance locale <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> <strong>et</strong>, pour la<br />
première fois, d' abor<strong>de</strong>r <strong>de</strong> manière spécifique la question<br />
du bruit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux roues motorisés.<br />
Enfin, le <strong>de</strong>rnier vol<strong>et</strong> du plan national d'actions contre le<br />
bruit concerne la recherche sur la perception du bruit <strong>et</strong><br />
contre les nuisances <strong>sonores</strong>, que l’État soutiendra via le<br />
programme PREDIT, à hauteur <strong>de</strong> 5,6 M€ par an. Deux<br />
domaines offrent <strong>de</strong> sérieuses perspectives d’avancées dans<br />
les prochaines années : d’une part, la technologie liée à la<br />
réduction <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> à la source <strong>et</strong>, d’autre part,<br />
les recherches sur la perception même du bruit <strong>et</strong> ses<br />
conséquences.<br />
Le ministère <strong>de</strong> l'Écologie <strong>et</strong> du Développement durable va<br />
accompagner les agglomérations dans la réalisation <strong>de</strong><br />
cartes <strong>de</strong> bruit, qui illustrent graphiquement les niveaux<br />
<strong>sonores</strong> dans les gran<strong>de</strong>s agglomérations. Il soutient par<br />
exemple le proj<strong>et</strong> européen « GipSyNoise » qui regroupe<br />
quinze agglomérations européennes dont dix françaises. Ces<br />
cartes seront un outil d’information du public <strong>et</strong> d’assistance<br />
à l’urbanisme.<br />
Voici donc présenté le plan d’actions contre le bruit qui sert<br />
<strong>de</strong> ligne <strong>de</strong> conduite aux services <strong>de</strong> l’État compétents en la<br />
matière. Ce plan sera poursuivi en 2005 <strong>et</strong> sera complété par<br />
diverses actions <strong>de</strong> portée nationale. La mise en oeuvre <strong>de</strong><br />
la directive bruit ambiant sera poursuivie. Je me félicite <strong>de</strong><br />
l’application prochaine <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te directive, qui va améliorer<br />
la connaissance en matière <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> dynamiser à terme<br />
les politiques publiques. L'ordonnance <strong>de</strong> transposition a été<br />
publiée le 14 novembre 2004, le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> loi sera déposé à<br />
l'Assemblée nationale d'ici 15 jours <strong>et</strong> nous travaillons dès à<br />
présent à l'élaboration <strong>de</strong>s décr<strong>et</strong>s d'application, en liaison<br />
avec l'ensemble <strong>de</strong>s ministères concernés. Inutile d'évoquer<br />
davantage ce suj<strong>et</strong> qui sera largement examiné au cours <strong>de</strong><br />
ces Assises.<br />
Une valorisation <strong>de</strong>s questions relatives au bruit dans la<br />
démarche développement durable sera recherchée : le bruit<br />
est aujourd'hui encore trop peu abordé dans ce cadre, or<br />
plusieurs suj<strong>et</strong>s tels que le bruit <strong>et</strong> l'aménagement urbain, le<br />
bruit <strong>et</strong> le concept <strong>de</strong> haute qualité environnementale<br />
(HQE), ou encore l'éducation <strong>de</strong>s jeunes en matière<br />
d'environnement sonore peuvent enrichir la démarche. Nous<br />
nous efforcerons donc en 2005 <strong>de</strong> mieux intégrer le bruit<br />
dans c<strong>et</strong>te démarche.<br />
Il s'agira également en 2005 <strong>de</strong> promouvoir diverses mesures<br />
techniques relatives : à la qualité acoustique <strong>de</strong>s<br />
infrastructures (encourager la pose <strong>de</strong> revêtements non<br />
bruyants, s'assurer <strong>de</strong> la non dégradation <strong>de</strong> la qualité<br />
acoustique lors d'une modification <strong>de</strong> revêtements, <strong>et</strong>c.) ; à<br />
l'analyse <strong>de</strong>s dégradations du niveau sonore <strong>de</strong>s poids lourds<br />
dans le temps <strong>et</strong> à la définition d'éventuelles mesures<br />
correctives à m<strong>et</strong>tre en oeuvre. L'étu<strong>de</strong> que nous avons<br />
commandée début 2004 vient <strong>de</strong> nous être remise <strong>et</strong> fera<br />
l'obj<strong>et</strong> d'une exploitation dans le courant du premier<br />
semestre 2005.<br />
Le plan bruit, assorti <strong>de</strong> ces actions complémentaires,<br />
représente un proj<strong>et</strong> ambitieux. Mais vous le savez bien, si<br />
l'action <strong>de</strong>s pouvoirs publics a vocation à impulser <strong>de</strong>s<br />
initiatives, elle doit nécessairement s'appuyer, pour être<br />
efficace, sur tous ses partenaires, en l'occurrence ceux <strong>de</strong> la<br />
gran<strong>de</strong> famille du bruit : les collectivités mais aussi, bien<br />
sûr, les industriels, techniciens, chercheurs, représentants<br />
PAGE 4<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
d'associations, tous impliqués au premier rang. Dans ce<br />
domaine comme dans d'autres, les réflexions collectives, les<br />
échanges professionnels sont essentiels.<br />
C'est la raison pour laquelle j'attache une gran<strong>de</strong> importance<br />
à ces Assises. Ces trois journées <strong>de</strong> travail vous perm<strong>et</strong>tront<br />
d'abor<strong>de</strong>r successivement tout les aspects <strong>de</strong> l'i<strong>de</strong>ntification<br />
<strong>et</strong> la gestion <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
Madame Ramon<strong>et</strong>, prési<strong>de</strong>nte du CNB <strong>et</strong> députée du<br />
Finistère, dirigera dès la fin <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te présentation, le débat,<br />
aujourd'hui sous les feux <strong>de</strong> l'actualité, sur la protection <strong>de</strong><br />
la santé <strong>de</strong>s citoyens. Puis les questions relatives à la<br />
protection <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'environnement sonore urbain<br />
seront abordées en début d'après-midi avant <strong>de</strong> traiter en<br />
ateliers <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> aéroportuaires, la recherche<br />
en acoustique <strong>et</strong> le programme européen Harmonoise.<br />
Demain <strong>et</strong> après <strong>de</strong>main, ce programme sera complété par<br />
diverses contributions présentant <strong>de</strong>s actions exemplaires,<br />
qu'il s'agisse <strong>de</strong> politique globale à l'échelle d'une<br />
agglomération ou <strong>de</strong> politiques nationales, menées par<br />
d'autres pays, fondées sur l'analyse <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices.<br />
Demain après-midi, trois ateliers relatifs au bruit au<br />
quotidien, au confort acoustique dans les bâtiments <strong>et</strong>,<br />
enfin, à la cartographie <strong>et</strong> la surveillance du bruit urbain<br />
seront, comme aujourd'hui, organisés en parallèles. Et pour<br />
terminer, jeudi matin, divers outils <strong>de</strong>stinés à prévenir <strong>et</strong><br />
réduire le bruit <strong>de</strong>s transports en milieu urbain vous seront<br />
présentés.<br />
Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter <strong>de</strong>s échanges riches<br />
d'enseignements. Je ne pourrai, vous le comprenez, assister<br />
à l'ensemble <strong>de</strong>s travaux, mais mes collaborateurs ici<br />
présents ne manqueront pas <strong>de</strong> me rapporter vos<br />
suggestions, observations ou interrogations…<br />
Je vous remercie <strong>de</strong> votre écoute <strong>et</strong> <strong>de</strong> votre implication<br />
pour c<strong>et</strong>te gran<strong>de</strong> cause qu’est le bruit.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 5
Allocution d’ouverture<br />
François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé <strong>de</strong> l’environnement<br />
Voilà pourquoi, <strong>de</strong>puis quelques années, notre Ville, comme<br />
je suppose un grand nombre en France, a entamé une lutte<br />
contre le bruit qui passe par différentes actions coordonnées<br />
par les services <strong>de</strong> l’Environnement, Hygiène <strong>et</strong> Santé, en<br />
liaison avec le Pôle bruit créé en Préfecture <strong>et</strong> piloté par la<br />
DDASS. Ces actions portent sur <strong>de</strong>s domaines divers dont<br />
voici une liste qui n’est pas exhaustive mais qui n’en révèle<br />
pas moins la multiplicité <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> nuisances <strong>sonores</strong> :<br />
bruits <strong>de</strong> voisinage, bruits <strong>de</strong> musique, bruits<br />
d’équipements, bruits <strong>de</strong> chantiers, aboiements <strong>de</strong> chiens,<br />
bruits <strong>de</strong> lieux musicaux, bruits industriels, ceux liés aux<br />
livraisons <strong>et</strong> enfin tous les bruits qui relèvent <strong>de</strong> l’instruction<br />
sanitaire <strong>de</strong>s permis <strong>de</strong> construire.<br />
En tant qu’adjoint à l’environnement <strong>et</strong> au déplacement<br />
urbain d’Avignon, je suis particulièrement heureux<br />
d’accueillir ces quatrièmes Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore dans le cadre prestigieux, cela a été<br />
déjà rappelé, du Palais <strong>de</strong>s papes, <strong>et</strong> <strong>de</strong> transm<strong>et</strong>tre à tous<br />
les congressistes le souhait <strong>de</strong> bienvenue au nom <strong>de</strong> la Ville<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> son maire, la ministre Marie-José Roig, dont les<br />
obligations ministérielles l’ont r<strong>et</strong>enue à Paris.<br />
Parmi les fléaux <strong>de</strong> la vie mo<strong>de</strong>rne, le bruit est sans doute<br />
celui qui fait le plus <strong>de</strong> ravages, aussi invisibles<br />
qu’assourdissants. En eff<strong>et</strong>, la plupart <strong>de</strong>s conflits <strong>de</strong><br />
voisinage, qui représentent plus <strong>de</strong> 100 000 plaintes par an<br />
en France avec <strong>de</strong>s passages à l’acte parfois spectaculaires,<br />
trouvent leur origine dans c<strong>et</strong>te cause. Stressés par le<br />
rythme <strong>de</strong> leurs préoccupations quotidiennes, nos<br />
contemporains aspirent au calme <strong>et</strong> à la paix, difficilement<br />
compatible avec un environnement bruyant, peu propice à<br />
ce besoin <strong>de</strong> pause <strong>et</strong> d’apaisement.<br />
C’est un fait, nos villes sont <strong>de</strong> plus en plus bruyantes, comme<br />
s’il était entendu que le bruit est le tribut à payer au<br />
développement économique <strong>et</strong> à l’activité commerciale <strong>de</strong>s<br />
centres urbains. Depuis la loi bruit <strong>de</strong> 1992, le nombre <strong>de</strong>s<br />
victimes du bruit en France est loin <strong>de</strong> baisser avec, en tête,<br />
les nuisances <strong>de</strong>s transports terrestres. On estime en eff<strong>et</strong> à<br />
environ 7 millions, soit 12% <strong>de</strong> la population, le nombre <strong>de</strong><br />
français qui sont exposés à <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> supérieures<br />
à 65 dB pour ce qui est <strong>de</strong>s trafics routier <strong>et</strong> ferroviaire. Un<br />
chiffre qui a <strong>de</strong> quoi inquiéter lorsque l’on sait que le bruit,<br />
par <strong>de</strong>là la dimension subjective <strong>de</strong> sa perception, est très<br />
souvent une véritable agression sur la santé, un facteur <strong>de</strong><br />
stress important qui explique notamment l’usage trop<br />
fréquent <strong>de</strong> tranquillisants par nos concitoyens.<br />
Les expositions régulières pendant plusieurs années à <strong>de</strong><br />
forts niveaux <strong>sonores</strong>, comme ceux rencontrés dans<br />
l’industrie ou les discothèques risquent en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
provoquer une baisse d’audition. De façon générale, être<br />
exposé à un bruit non désiré accroît notre niveau <strong>de</strong> stress<br />
<strong>et</strong> peut conduire à la longue à un état <strong>de</strong> fatigue générale<br />
plus sérieux. Apparaissent alors une irritabilité plus<br />
marquée, <strong>de</strong> l’intolérance face aux p<strong>et</strong>its désagréments <strong>de</strong><br />
la vie, une augmentation <strong>de</strong> l’anxiété, voire l’apparition <strong>de</strong><br />
problèmes <strong>de</strong> santé.<br />
Notre municipalité a entrepris une véritable croisa<strong>de</strong> contre<br />
toutes ces pollutions <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> nous avons lancé une<br />
campagne <strong>de</strong> sensibilisation en direction <strong>de</strong> la population<br />
afin <strong>de</strong> lutter contre les bruits <strong>de</strong> voisinage notamment ceux<br />
liés, <strong>et</strong> là je parle plutôt dans le centre historique, au<br />
problème <strong>de</strong>s ordures ménagères. Par ailleurs, nous avons<br />
mis en place <strong>de</strong>s bus hybri<strong>de</strong>s (diesel/électrique) moins<br />
bruyants <strong>et</strong> moins polluants dans l’intra muros grâce à une<br />
action conjointe <strong>de</strong> la communauté d’agglomération <strong>et</strong> du<br />
syndicat en charge <strong>de</strong>s transports <strong>de</strong> l’agglomération<br />
d’Avignon. C<strong>et</strong>te action s’est accompagnée d’une mise en<br />
service <strong>de</strong> véhicules électriques dans le parc municipal,<br />
véhicules légers aussi bien qu’utilitaires notamment pour le<br />
service <strong>de</strong> la propr<strong>et</strong>é urbaine. Dans ce même état d’esprit,<br />
nous participons activement au comité <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> la ligne<br />
TGV, en prenant part aux négociations conduites en liaison<br />
avec les associations <strong>de</strong> défense <strong>et</strong> celles <strong>de</strong> protection <strong>de</strong><br />
l’environnement afin <strong>de</strong> servir au mieux les intérêts <strong>de</strong>s<br />
riverains <strong>de</strong> la voie TGV. Toujours en liaison avec les<br />
associations avignonnaises, nous avons élaboré une charte <strong>de</strong><br />
bonne conduite avec l’aéroclub vauclusien basé sur<br />
l’aérodrome d’Avignon-Caumont. Les négociations avec la<br />
Chambre <strong>de</strong> commerce <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’industrie, les autorités<br />
aéroportuaires <strong>et</strong> l’aviation civile afin <strong>de</strong> limiter les<br />
nuisances engendrées par le trafic <strong>de</strong>s vols sur Avignon <strong>et</strong> les<br />
communes riveraines ont permis <strong>de</strong> satisfaire toutes les<br />
parties grâce à un compromis harmonieux, mais toutefois<br />
encore perfectible. Enfin, au sein <strong>de</strong> la police municipale,<br />
nous avons créé une briga<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’environnement chargée<br />
notamment en matière <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong> lutter contre diverses<br />
nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
À l’ordre du jour <strong>de</strong> ces quatrièmes Assises, il est logique que<br />
nombre <strong>de</strong> thèmes rejoignent les préoccupations <strong>de</strong> notre<br />
ville <strong>et</strong> <strong>de</strong> toutes les villes <strong>de</strong> notre pays, notamment dans le<br />
domaine du développement aéroportuaire, <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong><br />
l’acoustique, <strong>de</strong>s logements <strong>et</strong> du tertiaire <strong>et</strong> en ce qui<br />
concerne également les bruits <strong>de</strong> la vie quotidienne, qui<br />
affectent les bons rapports <strong>de</strong> voisinages dans nos cités. Ces<br />
rapports d’ailleurs connaissent à Avignon une problématique<br />
majeure lors du festival du mois <strong>de</strong> juill<strong>et</strong> <strong>et</strong> il est vrai qu’à<br />
c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> s’ajoute la spécificité <strong>de</strong>s villes provençales où<br />
l’on prolonge les soirées <strong>et</strong> les conversations à l’extérieur<br />
tandis que d’autres essayent <strong>de</strong> trouver le sommeil, les<br />
fenêtres gran<strong>de</strong>s ouvertes à cause <strong>de</strong> la chaleur.<br />
C’est donc avec une oreille attentive que nous allons suivre<br />
ces Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore afin d’en<br />
tirer les meilleurs enseignements pour améliorer la qualité<br />
<strong>de</strong> vie dans nos villes. Car il est évi<strong>de</strong>nt que la lutte contre<br />
le bruit est un <strong>de</strong>s enjeux majeurs <strong>de</strong> la convivialité, du<br />
bien-être ensemble au sein <strong>de</strong> nos cités <strong>et</strong> l’un <strong>de</strong>s objectifs<br />
principaux d’un développement acceptable par tous.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Allocution d’ouverture<br />
Marcelle Ramon<strong>et</strong>, prési<strong>de</strong>nte du Conseil national du bruit (CNB), députée du Finistère<br />
patients anxio-dépressifs —, s’ajoute un coût social du bruit<br />
encore mal discerné mais aussi une « fracture<br />
environnementale ».<br />
Parmi les objectifs <strong>de</strong> santé publique en France r<strong>et</strong>enus au<br />
niveau du ministère <strong>de</strong> la Santé, <strong>de</strong>ux se réfèrent<br />
directement à la limitation <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit. Le premier<br />
objectif est la réduction <strong>de</strong>s pollutions, quelle que soient<br />
leurs sources ; le second objectif concerne le bruit au<br />
travail : Il s’agit <strong>de</strong> réduire <strong>de</strong> 20% en 5 ans le nombre <strong>de</strong><br />
travailleurs exposés à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 85<br />
dB(A) pendant plus <strong>de</strong> 20 heures par semaine, <strong>et</strong> cela sans<br />
port <strong>de</strong> protections auditives.<br />
Ces quatrièmes assises <strong>de</strong> l’environnement sonore<br />
auxquelles je suis heureuse <strong>de</strong> vous voir si nombreux se<br />
déroulent dans ce lieu hautement symbolique pour la<br />
médiation <strong>et</strong> la sérénité : <strong>de</strong>ux notions importantes pour le<br />
suj<strong>et</strong> qui nous rassemble aujourd’hui. Le bruit, qui constitue<br />
une préoccupation majeure <strong>de</strong> nos concitoyens, représente<br />
pour la majorité d’entre eux plus qu’une gêne, une réelle<br />
pollution dégradant la qualité <strong>de</strong> la vie <strong>et</strong> ayant, le cas<br />
échéant, <strong>de</strong>s conséquences importantes sur la santé.<br />
Monsieur le directeur <strong>de</strong> la prévention <strong>de</strong>s pollutions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
risques du ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du développement<br />
durable vient <strong>de</strong> nous le rappeler.<br />
Aujourd’hui, notre société est parvenue à contrôler la<br />
qualité <strong>de</strong> l’eau, à mesurer la qualité <strong>de</strong> l’air, qui<br />
représentent <strong>de</strong>s risques <strong>de</strong> nuisances avérées <strong>et</strong> dont les<br />
eff<strong>et</strong>s sur la santé sont désormais prouvés. Mais<br />
l’appréhension <strong>et</strong> le traitement <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>, la<br />
connaissance <strong>de</strong> ses conséquences, sont encore très<br />
incomplètes. Si les eff<strong>et</strong>s mécaniques <strong>de</strong> l’exposition au<br />
bruit sur l’acuité auditive sont aujourd’hui patents, les<br />
troubles extra auditifs qu’elle induit sont beaucoup plus<br />
difficiles à cerner. Le philosophe Alain Finkelkraut déclarait<br />
en 2000 : « le silence se meurt, le bruit prend tout le<br />
pouvoir ; c’est la seule calamité écologique dont personne<br />
ne parle ». C<strong>et</strong>te assertion n’est d’ailleurs plus vraie <strong>de</strong>puis<br />
que les pouvoirs publics, prenant la pleine mesure <strong>de</strong> ce<br />
fléau, ont relancé en 2003 la lutte contre le bruit avec le<br />
Plan national d’action. Ledit plan vous sera présenté par M.<br />
Pascal Valentin, <strong>de</strong> la Mission bruit du ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie.<br />
Le bruit est un phénomène complexe tant ses sources sont<br />
nombreuses. Le plus souvent local avec <strong>de</strong>s <strong>de</strong>grés<br />
d’acceptation variable, ses eff<strong>et</strong>s sont insidieux <strong>et</strong><br />
heureusement rarement mortels, ce qui peut expliquer la<br />
difficulté <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s normes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s seuils<br />
communs. L’impact du bruit sur la santé humaine tend à<br />
être minoré, car on perçoit souvent c<strong>et</strong>te question sous<br />
l’angle du confort. Or, la santé <strong>de</strong> l’homme est, selon la<br />
définition donnée dans le préambule <strong>de</strong> constitution <strong>de</strong><br />
l’Organisation mondiale <strong>de</strong> la santé, « un état compl<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
bien-être physique, mental <strong>et</strong> social qui ne consiste pas<br />
seulement en une absence <strong>de</strong> maladie ou d’infirmité ». À la<br />
dimension sanitaire bien réelle — j’indiquerai à titre<br />
d’exemple que c’est la première nuisance pour 59 % <strong>de</strong>s<br />
Les conséquences sanitaires du bruit sont aujourd’hui bien<br />
i<strong>de</strong>ntifiées, nous disposons <strong>de</strong> nombreux éléments<br />
établissant clairement la relation entre le bruit <strong>et</strong> divers<br />
paramètres <strong>de</strong> santé. Dans notre environnement, le bruit est<br />
présent naturellement. L’homme est naturellement<br />
bruyant ; cependant, les bruits auxquels il est soumis ont<br />
évolué. Une part significative <strong>de</strong> nos concitoyens vivant le<br />
plus souvent dans <strong>de</strong>s quartiers défavorisés est confrontée à<br />
ce que j’appelais il y a un instant c<strong>et</strong>te fracture<br />
environnementale. Les nuisances ou les eff<strong>et</strong>s liés à<br />
l’environnement y sont souvent vécus avec une plus gran<strong>de</strong><br />
acuité <strong>de</strong> sorte que ces handicaps ten<strong>de</strong>nt à s’additionner<br />
les uns aux autres. Ce sont les nuisances liées au transport<br />
aérien <strong>et</strong> au transport terrestre dans un contexte <strong>de</strong><br />
croissance exponentielle. Ainsi, environ 7 millions <strong>de</strong><br />
français, soit plus <strong>de</strong> 12% <strong>de</strong> la population, sont exposés à<br />
<strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit extérieur excé<strong>de</strong>nt le seuil <strong>de</strong> 65 dB(A)<br />
<strong>de</strong> jour, c’est-à-dire le niveau <strong>de</strong> pression acoustique<br />
continu qui peut être considéré comme la limite à partir <strong>de</strong><br />
laquelle apparaît une forte gêne. Parmi ces 7 millions <strong>de</strong><br />
personnes exposées, on peut estimer que plus <strong>de</strong>s trois<br />
quarts sont <strong>de</strong>s riverains d’infrastructures routières. Pour ce<br />
qui concerne le bruit <strong>de</strong>s transports aériens, on estime,<br />
qu’en France, 500 000 riverains sont gênés aux abords<br />
directs <strong>de</strong>s aéroports, dont 300 000 en Ile-<strong>de</strong>-France. Mais<br />
en Ile-<strong>de</strong>-France, ce sont 2 millions d’habitants qui sont<br />
survolés par <strong>de</strong>s avions volants à moins <strong>de</strong> 3000 mètres<br />
d’altitu<strong>de</strong>. Par ailleurs, une augmentation tendancielle<br />
prévisible du trafic aérien doit être regardée comme une<br />
constante durable. Dans le seul domaine <strong>de</strong>s transports, une<br />
étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Inspection générale <strong>de</strong>s finances <strong>et</strong> du conseil<br />
général <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées prévoit, d’ici à 2020, une<br />
augmentation minimum <strong>de</strong> 50% <strong>de</strong>s déplacements aussi bien<br />
pour la route, que pour le trafic ferroviaire <strong>de</strong>s voyageurs.<br />
L’Organisation mondiale <strong>de</strong> la santé a ainsi constaté, au<br />
travers <strong>de</strong> différentes étu<strong>de</strong>s, que les eff<strong>et</strong>s les plus<br />
fréquemment cités sont les perturbations du sommeil, les<br />
difficultés d’endormissement, les réveils fréquents, dont les<br />
contrecoups sur la santé sont patents, ainsi que le stress <strong>et</strong><br />
les maladies cardiovasculaires, que le bruit <strong>de</strong>s transports<br />
contribue à aggraver, comme les eff<strong>et</strong>s néfastes sur les<br />
systèmes psychophysiologiques. Que les bruits soient<br />
continus, fluctuants ou discontinus, ils ont un impact<br />
d’autant plus important sur notre santé lorsqu’ils se<br />
produisent durant la nuit.<br />
Le développement <strong>de</strong>s loisirs bruyants constitue également<br />
un suj<strong>et</strong> d’inquiétu<strong>de</strong> tant les eff<strong>et</strong>s risquent, dans l’avenir,<br />
d’avoir <strong>de</strong>s répercussions considérables en terme <strong>de</strong> santé<br />
publique. L’utilisation prolongée d’un bala<strong>de</strong>ur, comme<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 7
l’évolution <strong>de</strong>s pratiques d’écoute musicale ont notablement<br />
augmenté le niveau d’exposition au bruit <strong>de</strong>s jeunes. Nous<br />
en mesurons dès à présent les eff<strong>et</strong>s pervers avec les<br />
nombreux cas d’acouphènes, dont une majorité a pour<br />
origine un traumatisme sonore parfois très aigu lié à<br />
l’écoute <strong>de</strong> la musique amplifiée. Ainsi, un lycéen sur dix<br />
présente un déficit auditif parfois irréversible.<br />
Le Conseil national du bruit (CNB) que je prési<strong>de</strong> est<br />
préoccupé <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te évolution, ce qui nous a amené à initier<br />
une réflexion sur ce suj<strong>et</strong> précis. Je pense, s’agissant du<br />
bruit, que l’on peut parler <strong>de</strong> maladie <strong>de</strong> civilisation car les<br />
principales composantes sont ici réunies, la fréquence liée à<br />
l’évolution <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie ou <strong>de</strong> l’environnement. À ceci<br />
près ici, que le bruit est un facteur <strong>de</strong> risque <strong>de</strong> maladie <strong>et</strong><br />
non pas une pathologie en soi. C’est un facteur <strong>de</strong> risque<br />
diffus, faible à p<strong>et</strong>ite dose, mais très élevé pour <strong>de</strong>s millions<br />
<strong>de</strong> personnes exposées d’une façon quasi permanente. Même<br />
si les conséquences sont, à tort, considérées comme moins<br />
dramatiques que d’autres pathologies, nous <strong>de</strong>vons évaluer<br />
dans la globalité son impact sanitaire car, comme toute<br />
maladie <strong>de</strong> civilisation, le bruit n’est pas une fatalité. C’est<br />
le jeu <strong>de</strong> la prévention <strong>et</strong> <strong>de</strong> la répression qui doit être<br />
actionné pour faire reculer les nuisances <strong>sonores</strong>. C’est<br />
avant tout par la volonté politique que c<strong>et</strong>te cause peut<br />
avancer.<br />
Au niveau <strong>de</strong> la communauté européenne, les premières<br />
actions menées pour résoudre les problèmes <strong>de</strong> bruit<br />
industriel <strong>et</strong> <strong>de</strong>s transports remontent à plus <strong>de</strong> 30 ans. Elles<br />
consistaient essentiellement en <strong>de</strong>s mesures sectorielles<br />
fixant le niveau maximum <strong>de</strong> bruit que pouvaient ém<strong>et</strong>tre<br />
les véhicules routiers, les avions, les machines dans une<br />
optique <strong>de</strong> réalisation du marché unique. Elles ne<br />
s’inscrivaient donc pas dans le cadre d’une politique<br />
générale <strong>de</strong> lutte contre le bruit.<br />
L’élaboration <strong>de</strong> véritables programmes <strong>de</strong> lutte contre le<br />
bruit a, dans un premier temps, relevé <strong>de</strong> la volonté propre<br />
<strong>de</strong> chaque État membre au niveau national. Ainsi, la loi<br />
cadre du 31 décembre 1992 a constitué en France une<br />
avancée importante dans la lutte contre le bruit.<br />
Parallèlement, dans le début <strong>de</strong>s années 90, le bruit causé<br />
par la circulation, l’industrie <strong>et</strong> les activités <strong>de</strong> loisirs a<br />
commencé à s’imposer en Europe comme l’un <strong>de</strong>s principaux<br />
problèmes d’environnement, surtout en zone urbaine, <strong>et</strong><br />
comme la source <strong>de</strong> plainte la plus fréquente du public. Il a<br />
été estimé que près <strong>de</strong> 20% <strong>de</strong>s habitants d’Europe<br />
occi<strong>de</strong>ntale souffraient <strong>de</strong> niveaux <strong>de</strong> bruit que les<br />
scientifiques <strong>et</strong> les experts <strong>de</strong> la santé jugeaient<br />
inacceptables, avec les eff<strong>et</strong>s que j’évoquais il y a un<br />
instant. Le cinquième programme d’action en matière<br />
d’environnement élaboré en 1993 prévoyait <strong>de</strong> remédier à<br />
c<strong>et</strong>te situation en fixant certains objectifs à atteindre avant<br />
l’an 2000 en matière d’exposition au bruit par <strong>de</strong>s mesures<br />
relevant du domaine <strong>de</strong> l’information, <strong>de</strong> la technologie, <strong>de</strong><br />
la planification <strong>de</strong> l’économie <strong>et</strong> <strong>de</strong> la formation. En matière<br />
d’environnement local, un sondage d’Euro-baromètre réalisé<br />
en 1995 a révélé que le bruit était le cinquième suj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
plainte après la circulation routière, la pollution routière, la<br />
dégradation <strong>de</strong>s paysages <strong>et</strong> les déch<strong>et</strong>s, mais était aussi le<br />
seul problème au suj<strong>et</strong> duquel le nombre <strong>de</strong> plaintes<br />
enregistré avait augmenté <strong>de</strong>puis 1992, ce qui traduisait une<br />
sensibilisation croissante <strong>de</strong>s citoyens au problème <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong>. La même année, la proposition <strong>de</strong><br />
réexamen du cinquième programme d’action a annoncé un<br />
programme <strong>de</strong> lutte initié par l’élaboration en 1996 du<br />
premier Livre vert, première étape <strong>de</strong> la mise au point d’un<br />
programme européen <strong>de</strong> lutte contre le bruit constituant<br />
une approche globale d’une politique européenne commune.<br />
La Commission y désignait le bruit comme l’un <strong>de</strong>s<br />
principaux problèmes d’environnement qui se pose en<br />
Europe. Ce texte évoquait les eff<strong>et</strong>s non auditifs du bruit sur<br />
la santé tels que le stress, les réactions cardio-vasculaires<br />
déterminant même certains niveaux cibles d’exposition au<br />
bruit pour les perturbations du sommeil <strong>et</strong> la perception du<br />
langage. Le Livre vert procédait, également, à un état <strong>de</strong>s<br />
lieux tel que l’information sur le bruit <strong>et</strong> ses eff<strong>et</strong>s, les<br />
principales zones <strong>de</strong> bruit, le coût social <strong>de</strong> la pollution<br />
sonore, la politique <strong>de</strong> réduction du bruit, <strong>et</strong> évoquait les<br />
mesures à prendre pour évaluer <strong>et</strong> réduire l’exposition au<br />
bruit. Il proposait d’introduire une approche globale d’une<br />
politique européenne <strong>de</strong> lutte contre le bruit, reposant<br />
notamment sur un réel partage <strong>de</strong>s responsabilités, sur <strong>de</strong>s<br />
actions cohérentes visant <strong>de</strong>s objectifs déterminés, sur un<br />
suivi <strong>de</strong>s résultats par <strong>de</strong>s indicateurs pertinents.<br />
La directive 2002/49/CE fait suite aux recommandations<br />
émises dans le Livre vert. C<strong>et</strong>te directive vise à établir une<br />
approche commune <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s États membres pour<br />
évaluer l’exposition <strong>de</strong>s populations au bruit, adopter <strong>de</strong>s<br />
plans d’action <strong>de</strong> prévention <strong>et</strong> <strong>de</strong> réduction du bruit <strong>et</strong><br />
informer le public. Elle concrétise enfin la prise en compte<br />
<strong>de</strong> la lutte contre le bruit comme une priorité au même titre<br />
que la pollution <strong>de</strong> l’air ou la pollution <strong>de</strong> l’eau. Son premier<br />
constat indique, dans le cadre <strong>de</strong> la politique<br />
communautaire, qu’un niveau élevé <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> la<br />
santé <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’environnement doit être atteint, <strong>et</strong> la<br />
protection contre le bruit est un <strong>de</strong>s objectifs fixés.<br />
Si le bruit au travail a obtenu également un traitement à<br />
l’échelon européen par la directive 2003/10/CE en cours <strong>de</strong><br />
transposition, il n’en est pas <strong>de</strong> même pour les bruits <strong>de</strong><br />
voisinage, qui restent une source importante <strong>de</strong> nuisance<br />
pouvant se cumuler avec d’autres pollutions <strong>sonores</strong>.<br />
Monsieur le directeur <strong>de</strong> la prévention <strong>de</strong>s pollutions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
risques vient également <strong>de</strong> le rappeler, les pouvoirs publics<br />
ont pour vocation d’impulser <strong>de</strong>s initiatives que tous les<br />
acteurs dans le domaine du bruit doivent relayer. C’est l’une<br />
<strong>de</strong>s missions du CNB que j’ai l’honneur <strong>de</strong> prési<strong>de</strong>r. À c<strong>et</strong><br />
égard, le Conseil a mis en place un comité <strong>de</strong> suivi du plan<br />
bruit composé <strong>de</strong> trois groupes reprenant les trois vol<strong>et</strong>s <strong>de</strong><br />
ce plan, afin <strong>de</strong> suivre, mais aussi <strong>de</strong> favoriser sa mise en<br />
œuvre.<br />
La transposition <strong>de</strong> la directive 2002/49/CE du Parlement <strong>et</strong><br />
du Conseil européen relative à l’évaluation <strong>et</strong> à la gestion du<br />
bruit dans l’environnement, actuellement en cours, est l’une<br />
<strong>de</strong>s actions du troisième vol<strong>et</strong> qui s’intitule : « Préparer<br />
l’avenir ». Je peux vous assurer que le CNB sera très vigilant<br />
à l’égard <strong>de</strong> la mise en œuvre <strong>et</strong> du suivi <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te directive.<br />
De même, le gouvernement s’apprête à publier le décr<strong>et</strong><br />
présenté par le ministère <strong>de</strong> l’Emploi relatif à l’exposition<br />
<strong>de</strong>s travailleurs aux risques dus aux agents physiques (bruit),<br />
pour lequel le CNB vient <strong>de</strong> rendre un avis officiel. Le CNB<br />
constate avec satisfaction que ce nouveau texte constitue<br />
une avancée par rapport au décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1988, notamment en<br />
ce qui concerne l’abaissement <strong>de</strong>s seuils d’action <strong>de</strong> 5 dB(A)<br />
<strong>et</strong> les précisions apportées sur le contenu <strong>de</strong> l’évaluation<br />
<strong>de</strong>s risques. Le texte donne également <strong>de</strong>s indications sur le<br />
contenu du plan <strong>de</strong> réduction du bruit, en citant <strong>de</strong>s<br />
exemples d’actions.<br />
Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s textes que je viens d’évoquer, le Conseil s’est<br />
saisi <strong>de</strong> plusieurs questions qui nous sont apparues<br />
essentielles : sur les bruits <strong>de</strong> voisinage, sur la musique<br />
amplifiée, sur l’aviation légère notamment.<br />
Afin <strong>de</strong> prendre notamment en compte certaines<br />
propositions du rapport Ritter sur les difficultés<br />
d’application <strong>de</strong> la réglementation sur les bruits <strong>de</strong><br />
voisinage, propositions <strong>de</strong>stinées à renforcer la défense <strong>de</strong>s<br />
victimes du bruit, le CNB a mis en place un groupe <strong>de</strong><br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
éflexion sur la révision du décr<strong>et</strong> du 18 avril 1995 sur les<br />
bruits <strong>de</strong> voisinage. En eff<strong>et</strong>, les trois premières propositions<br />
<strong>de</strong> ce rapport préconisaient d’abaisser le seuil limite <strong>de</strong><br />
bruit ambiant, ainsi que le terme correctif <strong>de</strong> l’émergence<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> prendre en compte l’émergence par ban<strong>de</strong>s d’octaves<br />
pour l’évaluation <strong>de</strong> la gêne. La proposition 36, quant à elle,<br />
visait à renforcer les pénalités. La réflexion menée avec le<br />
ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable, celui<br />
<strong>de</strong> la Justice, ainsi que les ministères chargés <strong>de</strong> la santé, <strong>de</strong><br />
l’équipement <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’industrie, est actuellement en cours.<br />
Sur la musique amplifiée, le Conseil participe aux travaux du<br />
ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable <strong>et</strong> du<br />
ministère chargé <strong>de</strong> la santé sur la révision du décr<strong>et</strong> du 16<br />
décembre 1998 sur la musique amplifiée, travaux qui sont<br />
notamment <strong>de</strong>stinés à élargir le champ à tous les<br />
établissements diffusant <strong>de</strong> la musique amplifiée <strong>et</strong> à la<br />
musique amplifiée <strong>de</strong> plein air, ainsi qu’à m<strong>et</strong>tre en<br />
cohérence les <strong>de</strong>ux indicateurs mentionnés dans le décr<strong>et</strong><br />
(niveaux continu équivalent <strong>et</strong> <strong>de</strong> pression crête). À c<strong>et</strong><br />
égard, le CNB mène une réflexion sur la musique amplifiée<br />
<strong>de</strong> plein air, qui ne fait pas, à ce jour, l’obj<strong>et</strong> d’une<br />
réglementation spécifique.<br />
Sur l’aviation légère, le Conseil a mis en place un groupe <strong>de</strong><br />
travail sur c<strong>et</strong>te activité non encore réglementée, présidé<br />
par M. Lamure, qui a abouti à l’élaboration d’un rapport,<br />
puis à la création d’un comité <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong>stiné à m<strong>et</strong>tre en<br />
place les principales recommandations <strong>de</strong> ce rapport. Elles<br />
concernent notamment la généralisation <strong>de</strong>s chartes <strong>de</strong><br />
l’environnement entre utilisateurs <strong>et</strong> riverains <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
commissions consultatives <strong>de</strong> l’environnement, la mise en<br />
place éventuelle <strong>de</strong> restrictions <strong>de</strong> vols, ainsi que le<br />
développement <strong>de</strong> l’information <strong>de</strong>s riverains <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
formation <strong>de</strong>s utilisateurs.<br />
D’autres actions que je ne peux toutes rappeler ici sont<br />
menées. Je signalerai cependant en matière <strong>de</strong> publication<br />
notre participation aux documents <strong>de</strong> référence du<br />
département <strong>de</strong> l’Isère sur la problématique bruit <strong>et</strong> plan<br />
local d’urbanisme <strong>et</strong> la publication programmée en 2005 par<br />
le CNB d’une plaqu<strong>et</strong>te à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s enfants afin <strong>de</strong> les<br />
sensibiliser à ce fléau.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 9
Séance plénière<br />
Protéger la santé <strong>de</strong>s citoyens, fon<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la directive 2002/49<br />
Séance présidée par Marcelle Ramon<strong>et</strong>, prési<strong>de</strong>nte du Conseil national du bruit <strong>et</strong> députée du Finistère<br />
Modérateur : Nicolas Grén<strong>et</strong>ier (ministère <strong>de</strong> la Santé)<br />
Introduction<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier (Direction générale <strong>de</strong> la<br />
santé, ministère <strong>de</strong> la Santé)<br />
L’OMS a émis en 1999 <strong>de</strong>s recommandations en matière <strong>de</strong><br />
bruit <strong>et</strong> mène actuellement <strong>de</strong>s travaux plus particulièrement<br />
axés sur l’exposition en pério<strong>de</strong> nocturne. Célia Rodrigues, du<br />
bureau <strong>de</strong> l’OMS à Bonn, présente les travaux, passés <strong>et</strong><br />
présents, <strong>de</strong> l’OMS en matière <strong>de</strong> bruit, ainsi que l’état <strong>de</strong>s<br />
connaissances sur la gêne <strong>et</strong> la perturbation du sommeil, pour<br />
finir par les priorités <strong>de</strong> l’OMS pour l’avenir. Le sommeil <strong>et</strong><br />
l’exposition nocturne sont au cœur <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’OMS. On<br />
attendra notamment avec impatience les recommandations qui<br />
vont découler du groupe <strong>de</strong> travail Night time noise gui<strong>de</strong>lines.<br />
L’exposition nocturne est également une préoccupation <strong>de</strong> la<br />
directive 2002/49, puisque ce texte impose la prise en compte<br />
d’un indicateur <strong>de</strong> bruit spécifique à la pério<strong>de</strong> nocturne, <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
produire <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit nocturne. Sur c<strong>et</strong>te question du<br />
bruit nocturne, <strong>et</strong> <strong>de</strong> la gêne qu’il occasionne, Jacques<br />
Lambert apporte <strong>de</strong>s compléments d’information, en<br />
présentant les travaux du groupe européen Santé <strong>et</strong> aspects<br />
socioéconomiques du bruit. On a maintenant <strong>de</strong>s courbes doseréponse,<br />
vraiment très intéressantes, mais il reste malgré tout<br />
beaucoup <strong>de</strong> questions à éluci<strong>de</strong>r.<br />
La directive du 25 juin 2002, qui est au cœur <strong>de</strong> ces<br />
Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore, a pour<br />
objectif premier d’éviter, <strong>de</strong> prévenir ou <strong>de</strong> réduire les<br />
eff<strong>et</strong>s néfastes pour la santé humaine <strong>de</strong> l’exposition au<br />
bruit dans l’environnement. Il était logique <strong>de</strong> consacrer<br />
c<strong>et</strong>te première séance plénière au thème <strong>de</strong> la santé<br />
publique pour, en quelque sorte, « planter le décor ».<br />
Le docteur Gilles Dixsaut est responsable <strong>de</strong> l’unité agents<br />
physiques <strong>de</strong> l’Agence française <strong>de</strong> sécurité sanitaire<br />
environnementale. C<strong>et</strong>te agence a produit un véritable<br />
document <strong>de</strong> référence sur les eff<strong>et</strong>s du bruit sur la santé. Le<br />
rapport final vient d’être finalisé <strong>et</strong> M. Dixsaut en présente les<br />
principaux enseignements.<br />
Les travaux <strong>et</strong> recommandations <strong>de</strong> l'Organisation mondiale <strong>de</strong> la santé<br />
Célia Rodrigues (Organisation mondiale <strong>de</strong> la<br />
santé, European <strong>Centre</strong> for Environment and<br />
Health, Bonn)<br />
Passé <strong>et</strong> présent <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’OMS<br />
Les valeurs gui<strong>de</strong>s pour le bruit communautaire publiées en<br />
1999, bien connues <strong>de</strong> tous, font référence à <strong>de</strong>s données<br />
qui remontent déjà à 1995. Ces <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières années,<br />
l’OMS s’est notamment penchée sur la mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong><br />
quelques relations dose-eff<strong>et</strong>s en matière <strong>de</strong> gêne.<br />
En juill<strong>et</strong> 2004, l’OMS a proposé quatre indicateurs à la<br />
Commission européenne : population exposée à différents<br />
niveaux <strong>sonores</strong> (L <strong>de</strong>n and L night ) pour différentes sources ;<br />
population déclarant souffrir <strong>de</strong> gêne le jour <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
perturbation du sommeil la nuit (détermination au moyen<br />
d’enquêtes) ; mortalité <strong>et</strong> morbidité par maladies cardiovasculaires<br />
attribuables à une exposition à <strong>de</strong>s bruits<br />
excessifs ; indicateur d’action <strong>de</strong>stiné à déterminer<br />
l’existence <strong>de</strong> politiques visant à réduire l’exposition aux<br />
bruits <strong>de</strong> loisirs (musique amplifiée). Concernant les<br />
maladies cardio-vasculaires dues à l’exposition au bruit, tous<br />
les experts sont désormais d’accord sur l’existence d’un<br />
risque relatif <strong>de</strong> contracter <strong>de</strong>s maladies cardio-vasculaires à<br />
cause du bruit. Nombre d’étu<strong>de</strong>s ont mis en évi<strong>de</strong>nce un lien<br />
fort entre l’exposition au bruit <strong>et</strong> l’hypertension. Nous avons<br />
développé un indicateur qui rend compte <strong>de</strong> ce risque.<br />
Si certains pays comme la France sont plutôt avancés dans<br />
les connaissances, il y a encore trop peu <strong>de</strong> données fiables<br />
<strong>et</strong> comparables, à l’échelle internationale <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’Europe,<br />
sur l’importance <strong>de</strong>s populations exposées. De nombreuses<br />
enquêtes montrent que le bruit environnemental est un vrai<br />
problème <strong>de</strong> santé publique : la gêne <strong>et</strong> la perturbation du<br />
sommeil dues au bruit sont ressenties comme <strong>de</strong>s problèmes<br />
sérieux par <strong>de</strong>s populations importantes, mais sans que c<strong>et</strong><br />
enjeu soit reconnu comme tel par les politiques. L’OMS va<br />
donc continuer ses efforts pour que c<strong>et</strong> enjeu soit mieux pris<br />
en compte.<br />
L’OMS a réalisé une enquête dans huit villes européennes,<br />
dont Angers en France : l’enquête WHO/LARES, qui a porté<br />
sur un échantillon <strong>de</strong> 7800 personnes. Dans c<strong>et</strong>te enquête,<br />
25% <strong>de</strong>s adultes disent avoir un sommeil perturbé, 40%<br />
d’entre eux attribuent c<strong>et</strong>te perturbation au bruit : en<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
d’autres termes, un adulte sur dix déclare avoir un sommeil<br />
perturbé par le bruit. Les bruits <strong>de</strong> circulation, pour lesquels<br />
17% <strong>de</strong>s personnes interrogées se disent gênés, constituent<br />
la première source <strong>de</strong> nuisances <strong>sonores</strong> ; les bruits <strong>de</strong><br />
voisinage sont également mal ressentis. Un pourcentage<br />
assez élevé <strong>de</strong> l’échantillon interrogé, 22%, déclare avoir<br />
connu <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux semaines ou plus avec<br />
un sommeil perturbé. Un autre aspect intéressant <strong>de</strong><br />
l’enquête concerne les risques relatifs <strong>de</strong> maladie chez les<br />
personnes au sommeil perturbé, par comparaison à<br />
l’échantillon au sommeil "normal" : <strong>de</strong> fortes associations<br />
sont notées, pour la dépression <strong>et</strong> les migraines notamment.<br />
Il ressort également <strong>de</strong> l’enquête que le fait <strong>de</strong> mal dormir<br />
la nuit augmente le risque d’acci<strong>de</strong>nt domestique <strong>de</strong> 46%.<br />
On souffre toutefois <strong>de</strong> l’absence <strong>de</strong> protocole international<br />
pour mener <strong>de</strong> telles enquêtes. Au Royaume-Uni, une<br />
enquête (BRE social survey 1999/2000) indique que 18% <strong>de</strong> la<br />
population a son sommeil perturbé par le bruit ; aux Paysbas,<br />
ce chiffre est <strong>de</strong> 24,5% (RIVM survey 2003).<br />
Impact sur la santé d’un sommeil perturbé<br />
Un sommeil perturbé est d’abord synonyme <strong>de</strong> moindre<br />
qualité du sommeil : les réveils constituent un paramètre<br />
essentiel, mais on s’intéresse aussi aux changements <strong>de</strong><br />
sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sommeil, à la réduction <strong>de</strong> sa durée ou <strong>de</strong> son<br />
efficacité, au r<strong>et</strong>ard <strong>de</strong> l’endormissement <strong>et</strong> à la réduction<br />
<strong>de</strong> la “qualité” ressentie du sommeil. Parmi les<br />
conséquences possibles <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te perturbation du sommeil,<br />
on trouve l’attention réduite, l’augmentation du risque<br />
d’acci<strong>de</strong>nts, la productivité du travail réduites, la fatigue<br />
diurne <strong>et</strong> l’altération <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> la vie. Lorsqu’on<br />
s’habitue à dormir dans le bruit, notre système sensitif<br />
continue néanmoins <strong>de</strong> recevoir les stimuli <strong>sonores</strong>. À ces<br />
conséquences d’un sommeil perturbé, s’ajoutent donc les<br />
pathologies liées au mécanisme <strong>de</strong> la réponse à <strong>de</strong>s stress,<br />
qui ne sont pas filtrées par le cortex cérébral, <strong>et</strong> qui ne<br />
connaissent pas <strong>de</strong> phénomène d’habituation (sécrétions<br />
hormonales, maladies cardiovasculaires, hypertension…).<br />
C<strong>et</strong>te exposition nocturne au bruit sur le long terme peut<br />
avoir <strong>de</strong> sérieuses conséquences. Quant à l’utilisation <strong>de</strong> la<br />
pathologie <strong>de</strong> l’insomnie en tant que modèle pour évaluer<br />
l’impact du bruit nocturne sur la santé, elle semble faire<br />
consensus. Il conviendrait par ailleurs d’étudier plus en<br />
détail l’impact sur la santé une fois adulte <strong>de</strong>s enfants<br />
exposés au bruit la nuit <strong>de</strong> façon chronique, par exemple par<br />
<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s longitudinales. Les conséquences possibles d’un<br />
sommeil perturbé par le bruit chez les enfants sont non<br />
seulement les symptômes associés au manque <strong>de</strong> sommeil,<br />
mais aussi l’altération possible du système immunitaire, la<br />
perturbation du métabolisme <strong>de</strong>s gluci<strong>de</strong>s <strong>et</strong> l’altération <strong>de</strong>s<br />
fonctions endocriniennes.<br />
L’exposition au bruit la nuit a <strong>de</strong>s conséquences en terme <strong>de</strong><br />
santé publique qui justifient donc que l’OMS se préoccupe<br />
<strong>de</strong> la question. C’est la raison pour laquelle l’organisation a<br />
initié, en juin 2004, un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> définition <strong>de</strong>s valeurs gui<strong>de</strong><br />
pour le bruit la nuit. Cofinancé par l’OMS <strong>et</strong> la Commission<br />
européenne, impliquant 18 partenaires, ce proj<strong>et</strong> poursuit<br />
l’objectif <strong>de</strong> faire le point sur les connaissances <strong>de</strong>s impacts<br />
sur la santé d’une exposition nocturne au bruit provenant <strong>de</strong><br />
différentes sources (air, rail, route, voisinage..). Autre but<br />
avoué, celui d’obtenir un consensus sur <strong>de</strong>s valeurs<br />
d’émissions qui pourraient servir <strong>de</strong> base à la mise en œuvre<br />
<strong>de</strong>s futures directives européennes, <strong>et</strong> au développement<br />
harmonisé <strong>de</strong> législations. Tout ceci pour que les 80 millions<br />
d’Européens qui sont exposés aujourd’hui voient leur<br />
situation améliorée <strong>et</strong> leur sommeil protégé, <strong>et</strong> que ces<br />
mesures s’exportent sur les autres continents bien sûr.<br />
Les travaux à venir <strong>de</strong> l’OMS<br />
Dans un avenir proche, les principaux suj<strong>et</strong>s sur lesquels<br />
l’OMS entend porter ses efforts sont l’amélioration <strong>de</strong>s<br />
connaissances sur les eff<strong>et</strong>s du bruit sur la santé, en<br />
particulier sous l’angle <strong>de</strong>s durées d’exposition, le<br />
perfectionnement <strong>de</strong>s valeurs gui<strong>de</strong>s, la concrétisation, par<br />
une publication, <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> l’OMS sur le bruit <strong>de</strong>s avions<br />
<strong>et</strong>, enfin, un accent sur le bruit lié aux activités <strong>de</strong> loisir<br />
(acouphènes). Des valeurs gui<strong>de</strong>s uniformément reconnues,<br />
mieux documentées, perm<strong>et</strong>traient notamment <strong>de</strong> mieux<br />
connaître l’impact sanitaire d’une réduction du bruit. Il<br />
importe également <strong>de</strong> progresser dans la connaissance <strong>de</strong><br />
l’impact du bruit sur la santé mentale. Pour cela, il convient<br />
<strong>de</strong> mieux décrire la gêne, prise comme indicateur <strong>et</strong> non<br />
comme eff<strong>et</strong>, <strong>et</strong> ses liens avec le stress, dont on connaît<br />
assez bien les implications mentales. Pour d’autres eff<strong>et</strong>s, il<br />
nous faut d’autres indicateurs, afin <strong>de</strong> pouvoir m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre <strong>de</strong>s actions <strong>et</strong> établir <strong>de</strong>s comparaisons entre pays.<br />
Les recommandations du groupe <strong>de</strong> travail européen « Santé <strong>et</strong> aspects<br />
socioéconomiques »<br />
Jacques Lambert (Inr<strong>et</strong>s, membre du groupe<br />
<strong>de</strong> travail européen « Santé <strong>et</strong> aspects<br />
socioéconomiques du bruit »)<br />
Historique du groupe <strong>de</strong> travail<br />
Peu après la conférence <strong>de</strong> Copenhague <strong>de</strong> 1998, point <strong>de</strong><br />
départ <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> la Commission européenne sur la<br />
directive, trois groupes <strong>de</strong> travail avaient été mis en place :<br />
l’un, présidé par J. Lambert, était axé sur les relations doseeff<strong>et</strong>s<br />
; le second s’occupait <strong>de</strong> la réduction du bruit, sous la<br />
houl<strong>et</strong>te <strong>de</strong> Mme S. Paikkala (Finlan<strong>de</strong>) ; le troisième,<br />
chapeauté par le Britannique T. Worsley, s’intéressait aux<br />
coûts <strong>et</strong> bénéfices <strong>de</strong> la réduction du bruit. En 2002, pour<br />
<strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> financement notamment, ces groupes ont<br />
fusionné, donnant naissance au groupe actuel “Santé <strong>et</strong><br />
aspects socioéconomiques”, présidé par le Néerlandais<br />
M. van <strong>de</strong>n Berg. Principal but : explorer la question <strong>de</strong>s<br />
aspects tant sanitaires que socioéconomiques <strong>de</strong>s politiques<br />
<strong>de</strong> réduction du bruit. Directive 2002/49 oblige, il faut<br />
désormais compter avec l’indice L <strong>de</strong>n 1 . Dès lors, il importait<br />
avant tout d’établir, sur la base <strong>de</strong> travaux scientifiques,<br />
<strong>de</strong>s relations dose-eff<strong>et</strong>s entre la gêne sur le long terme <strong>et</strong><br />
l’indice L <strong>de</strong>n ; <strong>et</strong> d’en faire <strong>de</strong> même pour l’indice L night 2 ,<br />
également consacré par la directive, pour ce qui concerne la<br />
pério<strong>de</strong> nocturne. Troisième vol<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te entreprise :<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit. Enfin, le<br />
quatrième <strong>de</strong> ces travaux a consisté à formuler <strong>de</strong>s<br />
recommandations sur l’utilisation <strong>de</strong> l’analyse coûtsavantages<br />
en matière d’évaluation <strong>de</strong>s politiques <strong>de</strong> lutte<br />
contre le bruit.<br />
Les résultats concr<strong>et</strong>s <strong>de</strong>puis 2002<br />
Trois documents ont été publiés. L’un, en février 2002, un<br />
position paper sur les relations dose-réponses entre le bruit<br />
<strong>de</strong>s transports <strong>et</strong> la gêne. Approuvé par la Commission<br />
européenne, il est maintenant disponible sur Intern<strong>et</strong>. En<br />
novembre 2003, une contribution sur l’évaluation<br />
1 L <strong>de</strong>n : Indice acoustique Jour-Soirée-Nuit (“<strong>de</strong>n” pour Day/Evening/Night)<br />
accordant une pondération plus élevée aux pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la soirée <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nuit.<br />
2 L night : indice correspondant au niveau sonore équivalent <strong>de</strong> nuit<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 11
économique du bruit a notamment permis d’avancer sur le<br />
thème <strong>de</strong> la “valorisation” <strong>de</strong>s bénéfices <strong>de</strong> la réduction du<br />
bruit au travers <strong>de</strong> plans d’action. Plus récemment, en<br />
novembre 2004, un rapport sur les relations dose-eff<strong>et</strong>s a<br />
été établi pour le bruit nocturne, en relation, bien<br />
évi<strong>de</strong>mment, avec les perturbations du sommeil. Ce<br />
document est en cours d’évaluation par la Commission.<br />
Devrait paraître enfin, dans le courant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te année 2005,<br />
une étu<strong>de</strong> sur l’efficacité <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit,<br />
fruit <strong>de</strong> travaux menés par un consultant allemand.<br />
permis <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s relations entre les<br />
niveaux <strong>de</strong> bruit (au sens L <strong>de</strong>n ) <strong>et</strong> la gêne <strong>de</strong> long terme.<br />
Pour un même niveau d’exposition, ces résultats indiquent<br />
que le bruit <strong>de</strong>s avions occasionne une gêne déclarée plus<br />
élevée que le bruit <strong>de</strong> la route, le bruit ferroviaire étant le<br />
moins gênant <strong>de</strong> ces trois mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport. Ces données<br />
sont disponibles sur les sites <strong>de</strong> la Commission européenne<br />
<strong>et</strong> du ministère français chargé <strong>de</strong> l’écologie.<br />
Utilité <strong>de</strong>s relations dose-eff<strong>et</strong>s<br />
En quoi la recherche <strong>de</strong> relations entre la dose <strong>de</strong> bruit<br />
reçue <strong>et</strong> les eff<strong>et</strong>s tels que la gêne <strong>et</strong> les perturbations du<br />
sommeil s’inscrit-elle dans l’application <strong>de</strong> la directive<br />
2002/49 ? Tout d’abord, en association avec la cartographie<br />
du bruit, <strong>de</strong> telles relations perm<strong>et</strong>tent d’estimer le nombre<br />
<strong>de</strong> personnes affectées, c’est-à-dire, à proprement parler,<br />
“atteintes”, par le bruit. Elles constituent aussi un moyen<br />
d’informer le public sur les eff<strong>et</strong>s du bruit — on notera que<br />
certaines villes envisagent même <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s du<br />
bruit. Elles contribuent à une prise <strong>de</strong> conscience accrue, <strong>de</strong><br />
la part du public, <strong>de</strong> l’enjeu sanitaire que revêt la<br />
problématique du bruit. Pour les déci<strong>de</strong>urs, elles sont une<br />
ai<strong>de</strong> pour fixer <strong>de</strong>s valeurs limites d’exposition, tant pour le<br />
jour que pour la nuit.<br />
L’état <strong>de</strong>s connaissances<br />
Pour l’ensemble <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> transport (route, train <strong>et</strong><br />
avion), <strong>de</strong>puis 2002, la relation entre la gêne <strong>de</strong> long terme<br />
<strong>et</strong> l’indice L <strong>de</strong>n a pu être établie. En revanche, une meilleure<br />
connaissance <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s du bruit industriel se fait crûment<br />
attendre. Pour certaines sources <strong>de</strong> bruit industriel, les<br />
données sont quasi inexistantes.<br />
S’agissant <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur le sommeil, certains indicateurs<br />
constituent <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> preuve suffisante. C’est le cas<br />
<strong>de</strong> la motilité 3 : dans le cas du bruit du transport aérien, le<br />
surcroît <strong>de</strong> mouvement du corps imputable au bruit peut<br />
être interprété comme une réaction <strong>de</strong> l’individu pendant<br />
son sommeil. Pour d’autres indicateurs <strong>de</strong>s répercussions sur<br />
le sommeil, rien n’a en revanche pu encore être mis en<br />
évi<strong>de</strong>nce. Si l’impact du bruit aéronautique est plutôt bien<br />
décrypté, celui <strong>de</strong> la route <strong>et</strong> du train restent encore mal<br />
élucidés. Un suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> satisfaction : pour les réveils,<br />
paramètre ô combien important, on dispose <strong>de</strong> données<br />
suffisantes pour la route <strong>et</strong> l’avion.<br />
Du côté <strong>de</strong>s indicateurs « plus pathologiques », par exemple<br />
le risque d’hypertension, ou le risque d’infarctus, les<br />
travaux <strong>de</strong>s Allemands Maschke <strong>et</strong> Babisch publiés en 2003<br />
laissent supposer que <strong>de</strong> tels eff<strong>et</strong>s existent, ou le montrent,<br />
dans le cas du risque d’hypertension.<br />
Des travaux, anciens mais pertinents, menés notamment au<br />
Japon, ont apporté la preuve d’un eff<strong>et</strong> du bruit <strong>de</strong>s avions<br />
sur le poids <strong>de</strong> naissance. Ce même bruit aéronautique a<br />
également <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur les performances scolaires, comme<br />
le montrent <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s récentes, notamment le proj<strong>et</strong><br />
Ranch financé par la Commission européenne.<br />
Sur les <strong>de</strong>ux points importants r<strong>et</strong>enus par la Commission<br />
européenne, à savoir la gêne <strong>et</strong> les perturbations du<br />
sommeil, <strong>de</strong>s courbes dose-réponses ont pu être établies<br />
pour les trois mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport. Ces courbes réalisées par<br />
le TNO (Pays-Bas) portent sur une compilation <strong>de</strong> données<br />
collectées à travers le mon<strong>de</strong>, totalisant 60 000 personnes :<br />
26 étu<strong>de</strong>s concernent le bruit routier, 8 le bruit ferroviaire<br />
<strong>et</strong> 19 le bruit aéronautique. La taille <strong>de</strong> c<strong>et</strong> échantillon a<br />
3 Motilité moyenne : mouvement du corps durant le sommeil<br />
Un recueil <strong>de</strong> données similaire, portant c<strong>et</strong>te fois sur un<br />
échantillon total <strong>de</strong> 15000 personnes, a permis <strong>de</strong><br />
déterminer <strong>de</strong>s relations entre le niveau <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong> nuit<br />
(mesuré en niveau équivalent) <strong>et</strong> les perturbations du<br />
sommeil rapportées. Les courbes dose-réponses spécifiques<br />
<strong>de</strong>s perturbations du sommeil montrent la même hiérarchie<br />
entre les trois mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport que celle observée pour la<br />
gêne.<br />
Tentant <strong>de</strong> caractériser la perturbation du sommeil au<br />
moyen d’indicateurs moins subjectifs que la perturbation<br />
rapportée, <strong>de</strong>s auteurs néerlandais se sont intéressés au<br />
nombre <strong>de</strong> réveils imputables au bruit <strong>de</strong>s avions. Ce <strong>de</strong>rnier<br />
est exprimé à travers le niveau <strong>de</strong> bruit équivalent à<br />
l’intérieur <strong>de</strong> la chambre. À partir <strong>de</strong> 40 dB(A), voire 35<br />
dB(A), le nombre <strong>de</strong> réveils imputables au bruit croît très<br />
fortement. Des valeurs qui convergent avec les<br />
recommandations <strong>de</strong> l’OMS, qui sont <strong>de</strong> 35 dB(A) à<br />
l’intérieur <strong>de</strong> la chambre.<br />
Les recommandations<br />
Le groupe <strong>de</strong> travail « Santé <strong>et</strong> aspects socioéconomiques du<br />
bruit » a émis <strong>de</strong>s recommandations relatives à l’intégration<br />
dans l’annexe III <strong>de</strong> la directive 2002/49 <strong>de</strong>s travaux menés<br />
par ce groupe. Il s’agit notamment <strong>de</strong>s relations dose-eff<strong>et</strong>s,<br />
établies à la fois pour la gêne sur le long terme <strong>et</strong> pour la<br />
perturbation du sommeil, en particulier pour le bruit <strong>de</strong>s<br />
avions.<br />
Ces courbes correspondant à <strong>de</strong>s situations stables<br />
d’exposition au bruit, on notera toutefois qu’elles ne<br />
sauraient être représentatives <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s à court terme <strong>de</strong>s<br />
changements <strong>de</strong> l’environnement sonore consécutifs, par<br />
exemple, à la mise en place <strong>de</strong> plans d’action.<br />
Des recommandations en matière <strong>de</strong> recherche ont par<br />
ailleurs été soumises au réseau Calm. Une meilleure<br />
connaissance <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s à court terme implique <strong>de</strong> suivre<br />
l’évolution <strong>de</strong> la relation bruit-gêne dans le temps : il<br />
convient <strong>de</strong> confirmer ou non la tendance voulant que les<br />
populations très fortement gênées le soient à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong><br />
bruit plus faibles qu’autrefois. La question <strong>de</strong> l’inci<strong>de</strong>nce du<br />
bruit sur les réveils doit être approfondie pour les transports<br />
routier <strong>et</strong> ferroviaire. Concernant les réactions humaines à<br />
un nombre faible d’événements — le cas <strong>de</strong> la nuit,<br />
PAGE 12<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
typiquement —, il importe <strong>de</strong> savoir s’il s’agit seulement<br />
d’une perturbation <strong>de</strong> court terme, sans conséquence<br />
sanitaire sur le long terme. Il reste aussi à s’intéresser à<br />
l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’insonorisation <strong>de</strong>s logements, <strong>et</strong> aussi <strong>de</strong> la<br />
présence ou non <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s au calme dans le logement.<br />
Pour les eff<strong>et</strong>s à moyen terme, la question <strong>de</strong>s basses<br />
fréquences, mais aussi celle <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l’exposition à <strong>de</strong>s<br />
sources multiples, restent insuffisamment éclaircies.<br />
Enfin, pour les eff<strong>et</strong>s sur le long terme, qui relèvent d’eff<strong>et</strong>s<br />
plus pathologiques, il s’agit d’approfondir les questions <strong>de</strong> la<br />
prise <strong>de</strong> médicaments, <strong>de</strong> l’hypertension <strong>et</strong> <strong>de</strong>s risques<br />
cardio-vasculaires.<br />
Les recommandations <strong>de</strong> l’Agence française <strong>de</strong> sécurité sanitaire<br />
environnementale<br />
Gilles Dixsaut (Afsse)<br />
En juill<strong>et</strong> 2003, les ministères chargés <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’environnement ont <strong>de</strong>mandé à l’Afsse un état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong><br />
la connaissance scientifique sur l’impact sanitaire du bruit.<br />
Autre suj<strong>et</strong> sur lequel il était <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> s’appesantir : la<br />
pertinence <strong>de</strong>s indicateurs utilisés dans la réglementation.<br />
Deux objectifs ont guidé la réalisation <strong>de</strong> ce rapport : faire<br />
porter l’analyse sur le suj<strong>et</strong> du bruit dans sa globalité, plutôt<br />
que <strong>de</strong> cibler un domaine particulier, comme c’est trop<br />
souvent le cas ; ai<strong>de</strong>r les pouvoirs publics à la transposition<br />
<strong>de</strong> la directive 2002/49/CE, si possible, en proposant <strong>de</strong><br />
nouveaux indicateurs ou <strong>de</strong> nouvelles orientations.<br />
Un groupe <strong>de</strong> 28 experts, couvrant un large champ <strong>de</strong><br />
compétences, tant techniques que réglementaires, a été<br />
constitué. Les experts ont disposé d’une totale liberté pour<br />
formuler leurs recommandations, l’intervention <strong>de</strong> l’Afsse<br />
s’étant limitée à la coordination du groupe.<br />
Des sources <strong>de</strong> bruit bien méconnues<br />
Le bruit <strong>et</strong> l’opinion publique entr<strong>et</strong>iennent <strong>de</strong>s relations<br />
pour le moins paradoxales : si nous sommes nombreux à nous<br />
plaindre du bruit, peu sont disposés à le citer comme un<br />
enjeu <strong>de</strong> santé publique majeur ; <strong>et</strong> pour cause, c’est la<br />
pollution atmosphérique qui est la plus couramment<br />
dénoncée, quand bien même ses répercussions sanitaires<br />
sont loin d’être évi<strong>de</strong>ntes aux yeux du grand public.<br />
Autre suj<strong>et</strong> qui gagnerait à être mieux décrypté, celui <strong>de</strong>s<br />
sources <strong>de</strong> bruit dans les transports, qui ont rarement fait<br />
l’obj<strong>et</strong> d’une analyse spécifique. En milieu industriel,<br />
toutefois, l’exposition au bruit bénéficie d’une surveillance<br />
attentive. À cela, une raison simple : l’enjeu financier <strong>de</strong>s<br />
réparations pour maladies professionnelles dont le bruit peut<br />
être la cause.<br />
Si l’exposition en un lieu <strong>et</strong> un temps donnés est connue,<br />
l’exposition réelle, pondérée dans le temps sur une journée,<br />
voire plus, n’est, elle, pas évaluée. L’Afsse recomman<strong>de</strong><br />
donc <strong>de</strong> progresser sur ce point.<br />
L’exposition cumulée, résultant <strong>de</strong> l’exposition à différentes<br />
sources <strong>de</strong> bruit est, elle aussi, méconnue. En cause, <strong>de</strong>s<br />
indicateurs spécifiques <strong>de</strong> chacune <strong>de</strong>s sources.<br />
Par ailleurs, seules quelques étu<strong>de</strong>s ponctuelles,<br />
restrictives, se sont penchées sur les niveaux d’exposition à<br />
l’intérieur <strong>de</strong>s transports. Même insuffisance pour<br />
l’exposition à l’occasion <strong>de</strong>s loisirs où, pourtant, les niveaux<br />
sont parfois extrêmement élevés.<br />
Enfin, il est à déplorer que les mesures ponctuelles, non<br />
pondérées sur la durée, ne ren<strong>de</strong>nt pas compte <strong>de</strong>s<br />
variations importantes du bruit en fonction <strong>de</strong>s conditions<br />
environnementales <strong>et</strong> météorologiques.<br />
Les eff<strong>et</strong>s auditifs du bruit<br />
On peut se réjouir que <strong>de</strong> nombreuses étu<strong>de</strong>s sur les eff<strong>et</strong>s<br />
auditifs du bruit existent, mais, faute <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s<br />
d’évaluation harmonisées, toute comparaison entre ces<br />
étu<strong>de</strong>s est impossible. En outre, il est difficile <strong>de</strong> faire la<br />
part <strong>de</strong>s choses entre le rôle du seul niveau <strong>de</strong> bruit, <strong>et</strong> celui<br />
<strong>de</strong>s autres facteurs susceptibles d’influer. Reste aussi à<br />
développer les connaissances <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s multiexpositions<br />
1 , ainsi que <strong>de</strong>s co-expositions 2 . Enfin, chez les<br />
jeunes, <strong>de</strong>s expositions importantes lors <strong>de</strong>s loisirs sont<br />
clairement en cause dans les déficits observés chez nombre<br />
d’entre eux.<br />
L’Afsse estime donc indispensable <strong>de</strong> définir un protocole<br />
unifié d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s auditifs du bruit. Encore faut-il<br />
que c<strong>et</strong> effort <strong>de</strong> cohérence soit associé au développement<br />
d’outils diagnostiques <strong>et</strong> épidémiologiques fiables. Dernier<br />
point sur le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s auditifs, il conviendrait<br />
également <strong>de</strong> caractériser les atteintes auditives <strong>de</strong> la<br />
population par classe d’âge.<br />
Les eff<strong>et</strong>s extra-auditifs<br />
Nous sommes loin <strong>de</strong> tout connaître <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s extra-auditifs<br />
<strong>de</strong> l’exposition au bruit. Nombreux, ces eff<strong>et</strong>s sont difficiles<br />
à attribuer au bruit <strong>de</strong> manière univoque, car associés à <strong>de</strong><br />
multiples facteurs <strong>de</strong> confusion dont on ignore le<br />
r<strong>et</strong>entissement réel. Qu’il s’agisse <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur les<br />
systèmes végétatifs, notamment respiratoires <strong>et</strong> cardiaques,<br />
sur le sommeil ou sur la santé mentale, les indicateurs<br />
censés rendre compte <strong>de</strong> ces eff<strong>et</strong>s restent très imparfaits :<br />
d’importantes différences interindividuelles expliquent qu’il<br />
soit difficile <strong>de</strong> tirer <strong>de</strong>s conclusions formelles quant aux<br />
mécanismes sous-jacents. Qui plus est, le statut<br />
socioéconomique <strong>de</strong> la population constitue une source <strong>de</strong><br />
confusion importante.<br />
Tous ces éléments poussent donc les experts <strong>de</strong> l’Afsse à<br />
appeler <strong>de</strong> leurs vœux la formulation <strong>de</strong> protocoles<br />
standardisés. Seule c<strong>et</strong>te exigence d’étu<strong>de</strong>s cohérentes<br />
perm<strong>et</strong>trait en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> s’attaquer à la compréhension <strong>de</strong> ce<br />
problème.<br />
Les eff<strong>et</strong>s subjectifs<br />
La gêne due au bruit, en tant qu’eff<strong>et</strong> subjectif, n’échappe<br />
pas à la règle : au vu <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> variabilité intraindividuelle<br />
<strong>et</strong> interindividuelle qui caractérise la<br />
manifestation <strong>de</strong> la gêne, on imagine volontiers la difficulté<br />
à établir tous les déterminants <strong>de</strong> la relation entre bruit <strong>et</strong><br />
gêne. Tout au plus peut-on aujourd’hui avancer que le<br />
niveau <strong>de</strong> bruit compte à lui seul pour 30 ou 40% <strong>de</strong> la gêne<br />
exprimée. Parmi les autres facteurs non acoustiques qui<br />
interviennent dans la perception <strong>de</strong> la gêne, citons en<br />
premier lieu la nature <strong>de</strong> la source, en particulier la<br />
perception du bénéfice personnel qui est tiré <strong>de</strong> la source.<br />
Aussi faut-il compter avec les gran<strong>de</strong>s différences culturelles<br />
1 Multi-exposition : exposition à diverses sources <strong>de</strong> bruit<br />
2 Co-exposition : exposition au bruit associée à un autre facteur potentiellement<br />
toxique<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 13
<strong>et</strong> sociales dans la perception <strong>de</strong> la gêne. Ce qui ne veut pas<br />
dire pour autant que le risque sanitaire ne soit pas aussi<br />
élevé, pour peu qu’il soit lié au niveau <strong>de</strong> bruit.<br />
Descripteurs <strong>et</strong> indicateurs du bruit<br />
Le groupe d’experts auteur du rapport Afsse s’accor<strong>de</strong> à<br />
dénoncer la confusion entr<strong>et</strong>enue par le trop grand nombre<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>scripteurs utilisés pour évaluer l’exposition au bruit.<br />
Certes, on ne peut se contenter <strong>de</strong>s seuls indices<br />
énergétiques intégrés 3 , insuffisants pour décrire les eff<strong>et</strong>s<br />
<strong>de</strong>s sources évènementielles. De fait, l’impact <strong>de</strong>s<br />
événements individuels, même s’ils sont <strong>de</strong> niveau élevé, y<br />
est amoindri par l’intégration sur la durée. Qui plus est, il<br />
reste encore à vali<strong>de</strong>r les pondérations dans le temps<br />
introduites dans différents indices intégrés tels que le L <strong>de</strong>n .<br />
Les indices évènementiels <strong>de</strong>vraient quant à eux prendre en<br />
compte l’émergence, le nombre d’événements isolés <strong>et</strong> la<br />
pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la journée. La réflexion a aussi conduit à<br />
préconiser la création d’un indicateur synthétique<br />
représentatif <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> multi-exposition <strong>et</strong><br />
d’exposition sur le long terme, un peu à la manière du<br />
dosimètre à rayonnements ionisants.<br />
Somme toute, ces considérations rejoignent la ligne tenue<br />
par l’OMS <strong>de</strong> vouloir favoriser l’émergence d’un indice<br />
vraiment représentatif <strong>de</strong> l’exposition au bruit, à l’instar <strong>de</strong><br />
l’indice ATMO adopté pour la pollution atmosphérique.<br />
Les recommandations générales concernant la recherche<br />
Au chapitre <strong>de</strong>s préconisations d’ordre général sur la<br />
conduite <strong>de</strong> la recherche, le rapport <strong>de</strong> l’Afsse souligne tout<br />
d’abord le danger qu’il y a à fon<strong>de</strong>r toutes les stratégies sur<br />
la gêne. On l’a vu, celle-ci est loin <strong>de</strong> constituer le seul<br />
eff<strong>et</strong> à prendre en compte. En outre, face à c<strong>et</strong>te vaste<br />
question <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s du bruit sur la santé, en ciblant les<br />
recherches non pas sur la population générale mais sur les<br />
populations à risques, <strong>de</strong>s conclusions plus contrastées<br />
pourraient peut-être se faire jour.<br />
Sur le plan <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong> recherche épidémiologique suggérés<br />
par l’Afsse, citons l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s basses fréquences<br />
liées au transport, notamment en milieu urbain, ainsi que<br />
celle <strong>de</strong> l’impact sanitaire <strong>de</strong>s multi-expositions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
expositions cumulées, en pério<strong>de</strong> nocturne notamment.<br />
Autre besoin criant soulevé par les experts, celui <strong>de</strong><br />
connaître les eff<strong>et</strong>s sanitaires <strong>de</strong>s co-expositions, en<br />
particulier dans les zones à l’environnement dégradé, où<br />
l’on sait que les populations exposées au bruit sont<br />
également exposées à d’autres sources <strong>de</strong> pollution.<br />
Concernant les eff<strong>et</strong>s du bruit en milieu scolaire, face aux<br />
nombreux facteurs <strong>de</strong> confusion — le statut socioéconomique<br />
notamment —, un effort <strong>de</strong> caractérisation <strong>de</strong> ces eff<strong>et</strong>s<br />
s’impose.<br />
Le rôle <strong>de</strong>s pouvoirs publics<br />
Première recommandation à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s pouvoirs<br />
publics : faire respecter les valeurs limites d’exposition. Il<br />
faudrait aussi mesurer les niveaux d’exposition <strong>de</strong> la<br />
population dans les établissements publics. Car l’une <strong>de</strong>s<br />
surprises révélées par c<strong>et</strong>te expertise a été <strong>de</strong> constater <strong>de</strong>s<br />
niveaux d’exposition non réglementaires dans certains<br />
établissements publics. Quant au vol<strong>et</strong> préventif, à travers<br />
l’intégration <strong>de</strong> l’objectif <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong> bruit dans les<br />
politiques d’aménagement du territoire, il est plus que<br />
jamais d’actualité, quand on sait sa supériorité sur le<br />
curatif. Enfin, comme le souligne l’étu<strong>de</strong> menée par l’Ifen,<br />
il faut informer <strong>et</strong> sensibiliser la population sur les eff<strong>et</strong>s<br />
auditifs <strong>et</strong> extra-auditifs du bruit.<br />
Surveiller les impacts sanitaires du bruit<br />
En réunissant l’ensemble <strong>de</strong>s données sanitaires produites<br />
sur le suj<strong>et</strong> du bruit par les différents acteurs concernés,<br />
l’on pourrait constituer un dispositif <strong>de</strong> surveillance <strong>de</strong>s<br />
impacts sanitaires du bruit. Placé sous la compétence <strong>de</strong><br />
l’Institut <strong>de</strong> veille sanitaire, ce proj<strong>et</strong> ambitieux <strong>de</strong>vrait être<br />
fondé sur la mesure en continu <strong>de</strong> marqueurs (directs <strong>et</strong><br />
indirects) <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sanitaires du bruit. La consommation<br />
médicamenteuse, les eff<strong>et</strong>s du bruit en milieu scolaire ou<br />
l’acuité auditive <strong>de</strong> la population, sont au nombre <strong>de</strong>s<br />
indicateurs envisageables.<br />
Où trouver les sources ? Dans les services <strong>de</strong> santé scolaire,<br />
les centres d’examens <strong>de</strong> santé, les caisses d’assurance<br />
maladie, les cellules interrégionales d’épidémiologie (CIRE),<br />
les observatoires régionaux <strong>de</strong> la santé (ORS), les unions<br />
régionales <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins libéraux (URML), ou encore, les<br />
services statistiques <strong>de</strong>s DDASS <strong>et</strong> <strong>de</strong>s DRASS.<br />
Le levier <strong>de</strong> la réglementation<br />
Le groupe <strong>de</strong> travail a proposé <strong>de</strong> clarifier le dispositif<br />
réglementaire dédié à la maîtrise du bruit, que tous<br />
s’accor<strong>de</strong>nt à considérer comme difficile à appliquer, en<br />
raison <strong>de</strong> son caractère hétéroclite. Pour ce faire, il<br />
convient <strong>de</strong> mieux définir les responsabilités <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s<br />
acteurs, <strong>et</strong> <strong>de</strong> regrouper leurs compétences. Deuxième axe<br />
d’amélioration, la priorité à donner aux populations<br />
sensibles. De fait, les premiers bénéficiaires <strong>de</strong> l’adoption<br />
<strong>de</strong> nouvelles valeurs limites d’exposition <strong>de</strong>vraient être les<br />
enfants ou les personnes co-exposées, à leur travail<br />
notamment, au bruit <strong>et</strong> à <strong>de</strong>s substances ototoxiques. La<br />
pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la nuit est aussi à privilégier. On notera par<br />
ailleurs l’idée <strong>de</strong> la création <strong>de</strong> périmètres <strong>de</strong> sécurité<br />
<strong>de</strong>stinés à rendre inaccessibles les zones dans lesquelles les<br />
valeurs limites sont dépassées. De tels périmètres<br />
trouveraient notamment toute leur utilité dans les<br />
établissements diffusant <strong>de</strong> la musique amplifiée. Enfin, il<br />
conviendrait <strong>de</strong> reconsidérer les valeurs limites d’exposition<br />
en milieu scolaire <strong>et</strong> périscolaire.<br />
En matière <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong> voisinage, les orientations <strong>de</strong> la<br />
circulaire du 16 octobre 2003 ont fait un pas en direction<br />
d’une meilleure gestion <strong>de</strong> c<strong>et</strong> enjeu. Encore faut-il les<br />
m<strong>et</strong>tre réellement en œuvre. Quant au problème <strong>de</strong>s <strong>de</strong>uxroues<br />
motorisés, la réponse passe par une évolution <strong>de</strong>s<br />
procédures d’homologation <strong>de</strong>s silencieux d’échappement<br />
<strong>de</strong>s véhicules, ainsi que par l’application effective <strong>de</strong> la<br />
réglementation. Concernant la qualité acoustique <strong>de</strong>s<br />
bâtiments, il faut la faire évoluer, par voie réglementaire ou<br />
normative, <strong>et</strong> définir les éléments d’une réglementation<br />
relative aux vibrations <strong>et</strong> aux bruits solidiens. Enfin, il<br />
importe <strong>de</strong> former les personnels <strong>de</strong>s collectivités<br />
territoriales aux précieux outils <strong>de</strong> prévention <strong>de</strong>s nuisances<br />
<strong>sonores</strong> que sont l’aménagement urbain <strong>et</strong> les étu<strong>de</strong>s<br />
d’impact.<br />
La part <strong>de</strong>s professionnels<br />
Loin d’être en reste, les professionnels ont également un<br />
rôle clé à jouer dans la réduction <strong>de</strong>s impacts sanitaires du<br />
bruit. Citons pour exemple les vertus préventives d’une<br />
sensibilisation <strong>de</strong>s maîtres d’ouvrages <strong>et</strong> maîtres d’œuvre à<br />
la qualité acoustique, <strong>et</strong> ce dès la conception d’un<br />
bâtiment, qu’il soit public ou privé. Ou encore, le besoin<br />
d’étudier l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> matériaux absorbants en milieu urbain :<br />
on le sait, la réflexion du bruit sur les faça<strong>de</strong>s est un facteur<br />
<strong>de</strong> niveau sonore important en ville. Dernier point, un gros<br />
effort reste à accomplir en ce qui concerne les transports,<br />
au niveau <strong>de</strong>s motorisations, <strong>de</strong>s pneumatiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bruits<br />
<strong>de</strong> roulement.<br />
3 Les <strong>de</strong>scripteurs énergétiques intégrés, parfois associés à une pondération<br />
dans le temps, intègrent la puissance acoustique sur une certaine durée.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Et le grand public ?<br />
Les recommandations du groupe d’experts concernent aussi<br />
le grand public. Le rapport souligne le besoin <strong>de</strong> sensibiliser<br />
le public aux inégalités face au risque d’atteinte auditive<br />
par le bruit, ainsi que <strong>de</strong> sensibiliser les enfants <strong>et</strong> les<br />
enseignants du primaire aux facteurs <strong>de</strong> risque. C<strong>et</strong>te<br />
démarche passe notamment par la large diffusion <strong>de</strong><br />
supports d’information auprès <strong>de</strong>s jeunes, <strong>et</strong> par l’affichage<br />
<strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong> dans les lieux les plus bruyants. Enfin,<br />
l’éducation au civisme en matière <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s du bruit reste à<br />
construire.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 15
Séance plénière<br />
La gestion <strong>de</strong> l'environnement sonore<br />
urbain : cadres européen <strong>et</strong> national<br />
Séance présidée par Pascal Valentin, chef <strong>de</strong> la Mission bruit du ministère <strong>de</strong> l'Écologie <strong>et</strong> du Développement durable,<br />
<strong>et</strong> David Delcampe, chargé <strong>de</strong> mission à la Direction générale <strong>de</strong> l’environnement <strong>de</strong> la Commission européenne<br />
David Delcampe, qui est en charge du dossier bruit à la Commission européenne, se frotte ici à l’exercice <strong>de</strong> dresser un<br />
panorama compl<strong>et</strong> du cadre communautaire en matière <strong>de</strong> bruit dans l’environnement. Partant du traité instituant la<br />
Communauté, il précise la teneur du sixième programme d’action pour l’environnement <strong>et</strong> passe en revue les différentes<br />
directives existantes, pour terminer par l’accompagnement technique <strong>et</strong> financier mis en place au niveau communautaire<br />
pour supporter la politique européenne en matière <strong>de</strong> bruit dans l’environnement.<br />
Pascal Valentin précise ensuite les dispositions réglementaires relatives à la transposition en droit français <strong>de</strong> la directive<br />
européenne sur le bruit dans l'environnement.<br />
Présentation <strong>de</strong> la politique communautaire<br />
David Delcampe (Direction générale <strong>de</strong><br />
l’Environnement, Commission européenne)<br />
Le traité instituant la CE<br />
Dans le traité instituant la Communauté européenne, un seul<br />
article, l’article 174, traite <strong>de</strong>s questions d’environnement.<br />
Les orientations politiques <strong>et</strong> les principes fondateurs qui y<br />
sont précisés constituent le socle <strong>de</strong> la législation<br />
communautaire en matière d’environnement. On r<strong>et</strong>iendra<br />
que la politique <strong>de</strong> la communauté doit contribuer à la<br />
préservation, à la protection <strong>et</strong> à l’amélioration <strong>de</strong> la<br />
qualité <strong>de</strong> l’environnement ; que c<strong>et</strong>te politique a<br />
également vocation à protéger la santé <strong>de</strong>s Européens ; <strong>et</strong><br />
que la Communauté doit m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s dispositions<br />
visant à un niveau <strong>de</strong> protection élevé dans ces domaines,<br />
en tenant compte <strong>de</strong> la diversité géographique <strong>et</strong> historique<br />
<strong>de</strong> l’Europe. Quant aux principes qui gui<strong>de</strong>nt l’action <strong>de</strong> la<br />
communauté, ils sont au nombre <strong>de</strong> quatre : principe <strong>de</strong><br />
précaution ; principe <strong>de</strong> prévention ; principe <strong>de</strong> correction<br />
<strong>de</strong>s nuisances en priorité à la source ; principe<br />
pollueur/payeur. Si leur application pratique est loin d’être<br />
aisée, ils restent néanmoins la référence fondamentale sur<br />
laquelle repose toute la législation européenne en matière<br />
d’environnement.<br />
Le sixième programme d’action communautaire en<br />
matière d’environnement<br />
Deuxième niveau <strong>de</strong> prescription communautaire, le<br />
programme d’action, actuellement sixième du genre, décrit<br />
<strong>de</strong> manière plus détaillée la politique communautaire en<br />
matière d’environnement. Il précise pour la pério<strong>de</strong> 2002-<br />
2012 les objectifs <strong>de</strong> protection environnementale, les<br />
actions à m<strong>et</strong>tre en place <strong>et</strong> les instruments à utiliser pour<br />
atteindre ces objectifs. Fait important, ce sixième<br />
programme d’action liste <strong>de</strong>s priorités qui gui<strong>de</strong>nt fortement<br />
l’action <strong>de</strong> la Commission dans le domaine <strong>de</strong><br />
l’environnement ou <strong>de</strong> la santé. Ces priorités sont réparties<br />
en cinq chapitres : changement climatique ; protection <strong>de</strong> la<br />
biodiversité ; protection <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> maintien <strong>et</strong><br />
amélioration <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> vie ; protection <strong>de</strong>s ressources<br />
naturelles <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature ; déch<strong>et</strong>s.<br />
Les objectifs du vol<strong>et</strong> “Santé <strong>et</strong> qualité <strong>de</strong> vie”, qui traite <strong>de</strong><br />
la problématique du bruit, sont <strong>de</strong>s plus ambitieux : « la<br />
communauté doit contribuer à atteindre un niveau élevé <strong>de</strong><br />
qualité <strong>de</strong> vie <strong>et</strong> <strong>de</strong> bien-être social pour les citoyens, […],<br />
en leur procurant un environnement dans lequel la pollution<br />
n’a pas d’eff<strong>et</strong> nuisible sur la santé humaine <strong>et</strong><br />
l’environnement, […], ainsi qu’en encourageant un<br />
développement urbain durable ». On le voit, la spécificité<br />
urbaine est pointée dès le programme d’action.<br />
L’article 7 du programme d’action apporte <strong>de</strong>s précisions sur<br />
la nature <strong>de</strong>s actions à conduire. L’une d’elles consiste à<br />
“réduire sensiblement le nombre <strong>de</strong> personnes soumises <strong>de</strong><br />
manière régulière à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit moyens élevés,<br />
provoqués notamment par la circulation, qui selon les<br />
étu<strong>de</strong>s scientifiques réalisées, ont <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s néfastes sur la<br />
santé humaine”. On r<strong>et</strong>rouve ici l’origine <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong><br />
bruit moyen préconisés par la directive 2002/49 : dès le<br />
programme d’action <strong>de</strong> 2002, priorité est donc donnée à la<br />
réduction <strong>de</strong> l’exposition <strong>de</strong> longue durée à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong><br />
bruit permanent moyen relativement élevés. Avec, pour<br />
cible principale, la circulation routière, dont les eff<strong>et</strong>s<br />
néfastes pour la santé sont révélés, données scientifiques à<br />
l’appui. L’action qui, elle, consiste à “préparer la prochaine<br />
étape <strong>de</strong>s travaux sur la directive sur le bruit dans<br />
l’environnement” a été accomplie, comme chacun sait, avec<br />
l’adoption <strong>de</strong> la directive. Quant à l’action qui préconise <strong>de</strong><br />
“tenir compte <strong>de</strong>s normes, orientations <strong>et</strong> programmes <strong>de</strong><br />
l’Organisation mondiale <strong>de</strong> la santé (OMS)”, elle exprime<br />
PAGE 16<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
clairement les relations étroites entre l’action<br />
communautaire <strong>et</strong> l’OMS.<br />
Dans un contexte <strong>de</strong> marché communautaire, l’échelle<br />
européenne est pertinente pour tenter <strong>de</strong> réduire les<br />
émissions <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> bruit. Principe <strong>de</strong> priorité <strong>de</strong> la<br />
correction <strong>de</strong>s nuisances à la source oblige, véhicules,<br />
pneumatiques, revêtements routiers <strong>et</strong> machines bruyantes<br />
sont ainsi visés dès le programme d’action, à travers le vol<strong>et</strong><br />
appelant à “compléter <strong>et</strong> améliorer les dispositions en<br />
matière d’émissions <strong>sonores</strong> <strong>de</strong>s véhicules <strong>et</strong> machines”.<br />
Signe <strong>de</strong> la priorité que constitue le bruit <strong>de</strong> circulation, la<br />
réduction du bruit dû au trafic routier fait l’obj<strong>et</strong> d’une<br />
action spécifique relevant <strong>de</strong> la mise en place <strong>de</strong> mesures<br />
politiques <strong>et</strong> d’instruments visant à rationaliser la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> transport : réduction <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> transports,<br />
passage à <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s moins bruyants, mesures techniques,<br />
planification durable <strong>de</strong>s transports”.<br />
Côté maîtrise <strong>de</strong> l’environnement urbain, il conviendra<br />
également que la stratégie communautaire accor<strong>de</strong> une plus<br />
gran<strong>de</strong> place aux mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport alternatifs à la voiture,<br />
tels que le transport public, le rail, les voies navigables, la<br />
marche à pied ou le vélo. Il faudra aussi maîtriser le volume<br />
croissant <strong>de</strong> la circulation <strong>et</strong> instaurer un découplage entre<br />
développement <strong>de</strong>s transports <strong>et</strong> PIB, dont les courbes <strong>de</strong><br />
croissance sont parallèles <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années. Enfin, l’action<br />
<strong>de</strong> la communauté doit contribuer à promouvoir les<br />
véhicules à faible taux d’émission dans les transports<br />
publics.<br />
Le cadre législatif applicable aux sources <strong>de</strong> bruit<br />
De ces <strong>de</strong>ux blocs <strong>de</strong> prescriptions communautaires que sont<br />
le traité <strong>et</strong> le programme d’action découlent une législation<br />
relativement importante sur le bruit dans l’environnement,<br />
couvrant à la fois les différentes sources <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong>, <strong>de</strong><br />
manière plus récente, la gestion du bruit ambiant perçu.<br />
D’autres législations, quoi que non purement dédiées aux<br />
nuisances <strong>sonores</strong>, contribuent aussi à réglementer la<br />
problématique du bruit.<br />
La première législation communautaire portant sur le bruit<br />
remonte à 1970 : la directive 70/157/CEE fixe les valeurs<br />
limites d’émission sonore <strong>de</strong>s véhicules à quatre roues <strong>et</strong><br />
plus. Depuis, <strong>de</strong>s modifications sont venues accroître la<br />
sévérité <strong>de</strong> ces limites, la <strong>de</strong>rnière révision datant <strong>de</strong> 1999<br />
(directive 1999/101/CE). Les modalités d’essai sont quant à<br />
elles établies par la Commission économique pour l’Europe<br />
<strong>et</strong> les Nations Unies (CENU) dans le cadre du règlement 51<br />
CEE/NU qui est en cours <strong>de</strong> révision. Les valeurs limites<br />
correspon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit maximaux, L Amax ,<br />
mesurés au passage sur une piste normalisée, à 7,5 mètres<br />
du véhicule. Actuellement, la limite pour une automobile est<br />
<strong>de</strong> 74 dB(A), 76 ou 77 dB(A), suivant les cas, pour un<br />
utilitaire léger, <strong>de</strong> 77 à 80 dB(A) pour un camion ou un<br />
autobus. Dans les faits, il faut bien avouer que ces valeurs<br />
limites ont plus servi l’harmonisation <strong>de</strong>s spécifications<br />
techniques, dans une logique <strong>de</strong> marché unique, que tiré le<br />
marché vers <strong>de</strong> meilleures performances environnementales.<br />
Certes, en trente ans, les niveaux <strong>de</strong> bruit maximum<br />
admissibles à l’homologation <strong>de</strong>s véhicules ont notablement<br />
baissé. Mais ces gains ne doivent pas masquer la réalité, à<br />
savoir <strong>de</strong>s gains sur le bruit <strong>de</strong> trafic qui, eux, restent assez<br />
ténus. Des progrès sont attendus : le Parlement <strong>et</strong> la<br />
direction Environnement du Conseil agissent <strong>de</strong> concert pour<br />
que la Commission gui<strong>de</strong> le marché vers <strong>de</strong>s véhicules plus<br />
silencieux. Autre fait encourageant, certains modèles sont<br />
<strong>de</strong> 3 à 9 dB en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong> la limite admissible. On notera, non<br />
sans intérêt, que sous la récente prési<strong>de</strong>nce néerlandaise du<br />
Conseil, les États ont montré une certaine volonté <strong>de</strong> faire<br />
progresser c<strong>et</strong>te législation <strong>et</strong> d’améliorer les performances<br />
<strong>sonores</strong> <strong>de</strong>s véhicules. Mais il faut gar<strong>de</strong>r à l’esprit que le<br />
rythme <strong>de</strong> réduction du bruit <strong>de</strong>s véhicules est aussi<br />
tributaire <strong>de</strong>s autres émissions polluantes, elles aussi vécues<br />
comme <strong>de</strong>s freins à la bonne santé du marché automobile.<br />
Le bruit <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux-roues <strong>et</strong> trois-roues à moteur est quant à<br />
lui réglementé par la directive 97/24/CE. Elle limite à 71<br />
dB(A) le bruit émis (L Amax au passage, comme pour les<br />
quatre-roues) par un cyclomoteur à <strong>de</strong>ux roues (la limite est<br />
comprise entre 66 <strong>et</strong> 71 dB(A), selon la vitesse autorisée du<br />
véhicule) ; un cyclomoteur à trois roues ne peut dépasser 76<br />
dB(A) ; quant aux motocycl<strong>et</strong>tes, suivant la cylindrée, les<br />
limites admissibles sont <strong>de</strong> 75, 77 ou 80 dB(A) — on voit donc<br />
que les plus grosses motos peuvent faire autant <strong>de</strong> bruit<br />
qu’un poids lourd. Faut-il faire mieux ? Assurément oui.<br />
Partout en Europe les émissions <strong>sonores</strong> en circulation <strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>ux-roues motorisés s’avèrent anormalement élevées. Mais<br />
l’Europe ne peut pas tout : contrôle technique <strong>et</strong> contrôle<br />
<strong>de</strong>s véhicules en circulation sont du ressort <strong>de</strong>s États. À eux<br />
<strong>de</strong> faire en sorte que les véhicules anormalement bruyants<br />
soient contrôlés <strong>et</strong> rectifiés. De son côté, la Commission<br />
étudie <strong>de</strong>s solutions, en partenariat avec les États. Un<br />
rapport officiel prévu pour 2005 <strong>de</strong>vrait formuler <strong>de</strong>s<br />
propositions, semble-t-il sur le contrôle technique <strong>de</strong>s<br />
véhicules <strong>et</strong> sur le renforcement <strong>de</strong>s valeurs limites.<br />
Autre législation relative au bruit routier, la directive<br />
2001/43/CE réglemente les caractéristiques acoustiques <strong>de</strong>s<br />
pneumatiques neufs. Les limites sont fonction <strong>de</strong> la largeur<br />
du pneu <strong>et</strong> du type <strong>de</strong> véhicule sur lequel il est posé. Les<br />
conclusions <strong>de</strong> la prési<strong>de</strong>nce néerlandaise communiquées en<br />
octobre 2004 sont sans équivoque sur le souhait largement<br />
partagé, chez les vingt-cinq États, <strong>de</strong> voir se renforcer la<br />
législation dans ce domaine. On s’en doute, la difficulté<br />
tient à trouver <strong>de</strong>s solutions représentant un compromis<br />
acceptable entre coût <strong>et</strong> bénéfice. Un prochain rapport<br />
officiel <strong>de</strong> la Commission doit évoquer la question d’une<br />
secon<strong>de</strong> étape <strong>de</strong> valeurs limites. Au sommaire également,<br />
la faisabilité <strong>de</strong> l’abaissement <strong>de</strong>s valeurs limites en regard<br />
<strong>de</strong>s problèmes d’adhérence. Enfin, on l’a dit, les protocoles<br />
d’essai (règlement 51 CEE/NU) seront bientôt révisés, afin<br />
<strong>de</strong> mieux prendre en compte les performances <strong>de</strong>s<br />
pneumatiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s revêtements <strong>de</strong> chaussée.<br />
Au chapitre du bruit ferroviaire, la démarche actuelle <strong>de</strong><br />
libéralisation du marché — celui du fr<strong>et</strong> dans un premier<br />
temps (2007), celui du transport <strong>de</strong> voyageurs par la suite<br />
(2012) — impose <strong>de</strong>s spécifications techniques<br />
d’interopérabilité, définies au niveau communautaire pour<br />
perm<strong>et</strong>tre la libre circulation <strong>de</strong>s trains. La réduction du<br />
bruit n’échappe pas à c<strong>et</strong>te vague d’uniformisation. Pour le<br />
réseau à gran<strong>de</strong> vitesse, les spécifications ont d’ores <strong>et</strong> déjà<br />
été adoptées : la directive 96/48/CE <strong>et</strong> les décisions<br />
2002/732/CE <strong>et</strong> 2002/735/CE limitent le bruit au passage <strong>et</strong><br />
le bruit à l’arrêt. Sont concernés les infrastructures <strong>et</strong> les<br />
véhicules neufs ou modifiés. À 25 mètres d’un train à gran<strong>de</strong><br />
vitesse neuf, la valeur limite du bruit au passage L Aeq,tp est<br />
<strong>de</strong> 87 dB(A) à 250 km/h, 91 dB(A) à 300 km/h <strong>et</strong> 92 dB(A) à<br />
320 km/h. Ces spécifications feront l’obj<strong>et</strong> d’une révision<br />
prochaine qui tiendra notamment compte <strong>de</strong>s résultats du<br />
proj<strong>et</strong> européen Noemie piloté par la SNCF. Le réseau<br />
conventionnel a lui aussi son propre vol<strong>et</strong> <strong>de</strong> spécifications,<br />
constitué par la directive 2001/16/CE <strong>et</strong> par une décision<br />
attendue pour 2005. Mais ces spécifications ne concernent<br />
que le matériel neuf ou rénové faisant l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
modifications importantes. Le bruit du matériel existant en<br />
circulation, <strong>et</strong> notamment <strong>de</strong>s wagons <strong>de</strong> marchandises, qui<br />
peuvent présenter une durée <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> 30 à 40 ans, qui<br />
circulent <strong>et</strong> circuleront sur le réseau trans-européen, la nuit<br />
surtout, est un enjeu <strong>de</strong> taille. Sur le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s solutions<br />
techniques <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire, les efforts<br />
consentis par la Commission européenne se sont révélés<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 17
précieux. Un vaste corpus d’informations techniques <strong>et</strong><br />
d’évaluations a été réuni au sein d’un position paper<br />
consacré au bruit ferroviaire. La solution préconisée consiste<br />
à remplacer la fonte <strong>de</strong>s semelles <strong>de</strong> freins par <strong>de</strong>s<br />
matériaux moins bruyants. On gagne ainsi <strong>de</strong> 8 à 10 dB au<br />
passage ! Mais équiper les 600 000 wagons coûterait entre<br />
0,9 milliards d’euros (semelle <strong>de</strong> type LL) <strong>et</strong> 3 milliards<br />
d’euros (semelle <strong>de</strong> type K). Des sommes importantes, bien<br />
en <strong>de</strong>çà néanmoins <strong>de</strong> ce que coûterait la protection par<br />
murs antibruit. Aussi c<strong>et</strong>te solution fait-elle l’obj<strong>et</strong> d’un<br />
consensus large au niveau communautaire. On attend avec<br />
impatience l’homologation définitive <strong>de</strong> la semelle LL (trois<br />
fois moins coûteuse que la semelle K), prévue pour 2006-<br />
2007. Le dialogue est engagé avec l’industrie <strong>et</strong> les<br />
entreprises ferroviaires pour la recherche d’un accord<br />
volontaire sur ce suj<strong>et</strong>. Les tramways, métros légers <strong>et</strong><br />
autres moyens <strong>de</strong> transport urbain guidé, quant à eux, ne<br />
bénéficient pas du même état d’harmonisation technique<br />
<strong>de</strong>s infrastructures <strong>et</strong> <strong>de</strong>s matériels roulants que le<br />
ferroviaire. La Commission a lancé une consultation publique<br />
<strong>et</strong> la DG Environnement a veillé à ce que le bruit <strong>et</strong> les<br />
vibrations fassent partie <strong>de</strong>s spécifications techniques<br />
harmonisées.<br />
Concernant maintenant le bruit <strong>de</strong>s avions, quel est le rôle<br />
communautaire dans c<strong>et</strong>te problématique ? Premier constat,<br />
l’essentiel ne se joue pas à Bruxelles, mais au sein <strong>de</strong><br />
l’Organisation <strong>de</strong> l’aviation civile internationale (OACI), qui<br />
joue un rôle clé dans l’élaboration <strong>de</strong>s règles adoptées au<br />
niveau international, en particulier la limitation <strong>de</strong>s<br />
émissions <strong>de</strong>s aéronefs. Au sein <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te organisation, les<br />
États négocient directement les normes <strong>de</strong> bruit, <strong>et</strong> la<br />
Commission européenne n’y a qu’un rôle d’observateur. Le<br />
chapitre 4 entrera en vigueur au 1 er janvier 2006. Autrement<br />
dit, tout avion neuf commercialisé <strong>de</strong>vra alors respecter <strong>de</strong>s<br />
valeurs limites <strong>de</strong> bruit conformes à c<strong>et</strong>te catégorie<br />
acoustique plus performante. La notion d’approche<br />
équilibrée autour <strong>de</strong>s aéroports, qui est préconisée au<br />
niveau international, joue aussi un rôle important. Issue <strong>de</strong><br />
la résolution A 33-7, l’approche équilibrée est un concept<br />
d’une gran<strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce environnementale, puisqu’elle<br />
entend viser un équilibre délicat entre protection <strong>de</strong><br />
l’environnement <strong>et</strong> circulation aérienne internationale. Les<br />
restrictions sont possibles, mais elles doivent être étudiées<br />
au cas par cas, après évaluation <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices, <strong>et</strong><br />
proportionnées à l’objectif <strong>de</strong> protection <strong>de</strong> l’aéroport. On<br />
notera que, dans un document diffusé par l’OACI, référencé<br />
98 29 (disponible sur le site Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’OACI),<br />
l’organisation ne manque pas <strong>de</strong> souligner l’importance <strong>de</strong> la<br />
gestion <strong>de</strong> l’occupation <strong>de</strong>s sols pour limiter l’urbanisation<br />
<strong>de</strong>s territoires autour <strong>de</strong>s aéroports. Des recommandations<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>s orientations ont aussi été réunies au sein d’un<br />
document référencé 91 84. Ces documents ont leur<br />
importance, car ils finissent en pratique par délimiter le<br />
contexte dans lequel la Communauté doit s’efforcer<br />
d’appliquer les grands principes inscrits au traité instituant<br />
l’UE.<br />
Quel a été l’apport <strong>de</strong> la Commission européenne sur ce<br />
dossier du bruit <strong>de</strong>s avions ? Trois directives : la directive<br />
2002/49/CE qui vise la cartographie du bruit <strong>et</strong> les plans<br />
d’action visant à gérer le bruit <strong>de</strong>s avions créé dans<br />
l’environnement autour <strong>de</strong>s grands aéroports civils <strong>et</strong> dans<br />
les gran<strong>de</strong>s agglomérations ; la directive 92/14/CE, qui date<br />
<strong>de</strong> 1992, qui interdit les avions <strong>de</strong> chapitre 2 <strong>de</strong>puis 1992 ; la<br />
directive 2002/30/CE, qui définit les conditions dans<br />
lesquelles les États peuvent restreindre la circulation<br />
aérienne dans les grands aéroports <strong>de</strong> la communauté (plus<br />
<strong>de</strong> 50 000 mouvements annuels). Idée séduisante que c<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>rnière directive, mais qui ne doit pas masquer une<br />
limitation majeure, à savoir que ces prescriptions<br />
reprennent à l’i<strong>de</strong>ntique celles établies dans le cadre <strong>de</strong><br />
l’OACI. La 2002/30 perm<strong>et</strong> d’appliquer <strong>de</strong>s restrictions, mais<br />
au cas par cas : elle peut s’appliquer aux avions présentant<br />
une faible marge <strong>de</strong> conformité avec le chapitre 3 ; elle<br />
prévoit la possibilité <strong>de</strong> restreindre les vols <strong>de</strong> nuit ; elle<br />
impose une étu<strong>de</strong> d’impact <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> restriction, mais<br />
avec obligation <strong>de</strong> démontrer que les mesures prises<br />
présentent le meilleur rapport coût/bénéfice. Sa<br />
transposition est fixée à septembre 2003. La direction<br />
générale <strong>de</strong>s transports <strong>de</strong> la Commission européenne, chef<br />
<strong>de</strong> file <strong>de</strong> ce dossier, a lancé diverses étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>stinées à<br />
évaluer la mise en œuvre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te directive <strong>et</strong>,<br />
éventuellement, à la faire évoluer. Un rapport est prévu<br />
pour 2007. L’enjeu est crucial : d’ici 2015, il faut s’attendre<br />
à une augmentation <strong>de</strong>s populations exposées à <strong>de</strong> fortes<br />
expositions (L <strong>de</strong>n > 65 dB(A)), hausse comprise entre 10 <strong>et</strong><br />
50%, selon les divers scénarios. Ceci justifie bien la nécessité<br />
<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> l’exposition<br />
au bruit dans le cadre <strong>de</strong> la directive 2002/30 <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
directive 2002/49.<br />
Il existe également une directive sur les bateaux <strong>de</strong><br />
plaisance, la 2003/44/CE : elle impose <strong>de</strong>s valeurs limites au<br />
passage. Un rapport <strong>de</strong> la Commission est prévu pour 2006,<br />
<strong>de</strong>s propositions législatives étant possibles avant 2007.<br />
On trouve aussi une directive sur les tracteurs, la<br />
74/151/CEE, directive ancienne sur laquelle aucune<br />
évolution n’est à prévoir.<br />
Domaine plus essentiel, les activités fixes, font l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
directive 96/61/CE. Ce texte prévoit la prévention <strong>et</strong> la<br />
réduction intégrées <strong>de</strong>s pollutions dans les gran<strong>de</strong>s<br />
installations nouvelles <strong>et</strong> modifiées, qu’elles soient<br />
industrielles ou agricoles. L’étu<strong>de</strong> d’impact préalable à<br />
autorisation doit obligatoirement prendre en compte le<br />
bruit. On notera qu’un réseau d’experts européens produit<br />
<strong>de</strong>s documents <strong>de</strong> référence d’une gran<strong>de</strong> qualité, qui<br />
portent sur les techniques <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong>s nuisances <strong>et</strong> les<br />
procédures <strong>de</strong> surveillance <strong>de</strong> ces installations.<br />
Depuis 2000, une directive, la 2000/14/CE, assure<br />
l’harmonisation <strong>de</strong> la puissance acoustique <strong>de</strong>s matériels<br />
utilisés en extérieur. Couvrant 57 types <strong>de</strong> matériels<br />
différents, son obj<strong>et</strong> principal est le marquage CE :<br />
l’affichage du niveau <strong>de</strong> puissance acoustique est obligatoire<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>s valeurs limites doivent être respectées. Celles-ci<br />
s’appliquent en <strong>de</strong>ux phases, janvier 2002 <strong>et</strong> janvier 2006.<br />
En complément, les États peuvent réglementer l’utilisation<br />
<strong>de</strong> ces matériels en restreignant les horaires d’utilisation,<br />
notamment dans les zones sensibles. Un rapport <strong>de</strong> la<br />
Commission prévu pour 2005 étudiera la faisabilité <strong>de</strong>s<br />
valeurs limites pour la <strong>de</strong>uxième étape <strong>de</strong> 2006 <strong>et</strong> pourrait<br />
déboucher sur un assouplissement <strong>de</strong>s exigences en la<br />
matière pour une série <strong>de</strong> matériels.<br />
En ce qui concerne les sources <strong>de</strong> bruit, une communication<br />
passe en revue l’ensemble <strong>de</strong> la législation communautaire<br />
en vigueur en matière <strong>de</strong> sources <strong>de</strong> bruit dans<br />
l’environnement. Ce document, référencé COM (2004) 160,<br />
est disponible sur le site Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong> la Commission 1 .<br />
L’évaluation <strong>et</strong> la gestion du bruit ambiant<br />
La directive 2002/49/CE sur l’évaluation <strong>et</strong> la gestion du<br />
bruit dans l’environnement, thème principal <strong>de</strong> ces Assises,<br />
vient en complément <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te abondante législation<br />
communautaire sur les sources. Ses objectifs ? Perm<strong>et</strong>tre<br />
une évaluation harmonisée, dans les vingt-cinq États<br />
européens, <strong>de</strong> l’exposition au bruit dans l’environnement,<br />
au moyen <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques ; prévenir <strong>et</strong><br />
réduire les bruits excessifs au moyen <strong>de</strong> plans d’action ;<br />
1 www.europa.eu.int/comm/environment/noise<br />
PAGE 18<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
protéger les zones calmes ; faire en sorte que l’information<br />
<strong>et</strong> la participation du public soient au cœur du processus.<br />
Précieux outil que c<strong>et</strong>te directive pour, qu’enfin, puissent<br />
être collectées <strong>de</strong>s données harmonisées, portant sur <strong>de</strong>s<br />
indicateurs communs, <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s actions puissent être<br />
menées à l’échelon communautaire. Routes, voies ferrées,<br />
aéroports, industries, telles sont les gran<strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> bruit<br />
ambiant ciblées par c<strong>et</strong>te directive, qui s’applique<br />
notamment aux agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000<br />
habitants. Une approche en <strong>de</strong>ux étapes a été adoptée : les<br />
gran<strong>de</strong>s agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 250 000 habitants sont<br />
concernées par la première étape (échéance pour les cartes<br />
<strong>de</strong> bruit : 30 juin 2007 ; échéance pour les plans d’action :<br />
18 juill<strong>et</strong> 2008) ; les plus p<strong>et</strong>ites agglomérations par la<br />
secon<strong>de</strong> (2012–2013). Si la directive 2002/49 détaille<br />
précisément les prescriptions techniques relatives à la<br />
cartographie, elle laisse en revanche aux États le soin <strong>de</strong><br />
désigner les autorités responsables <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong>s<br />
cartes, <strong>de</strong>s plans d’action <strong>et</strong> <strong>de</strong> la collecte <strong>de</strong>s données au<br />
niveau national.<br />
Concernant les cartes <strong>de</strong> bruit, la directive impose, au<br />
minimum, l’utilisation <strong>de</strong>s indicateurs L <strong>de</strong>n + L night 2 . Ce qui<br />
n’empêche pas d’en utiliser, d’autres, en complément.<br />
Citons par exemple le niveau <strong>de</strong> bruit maximum L Amax ,<br />
indicateur événementiel que beaucoup préconisent. Pour la<br />
première étape <strong>de</strong> 2007, les États disposant <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s<br />
nationales peuvent les utiliser sous certaines conditions, les<br />
autres <strong>de</strong>vant appliquer les métho<strong>de</strong>s provisoires<br />
recommandées en annexe 2 <strong>de</strong> la directive <strong>et</strong> les lignes<br />
directrices <strong>de</strong> la Commission du 6 août 2003. Pour la<br />
<strong>de</strong>uxième étape <strong>de</strong> la cartographie, fixée pour 2012, les<br />
États <strong>de</strong>vront utiliser la même métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> prévision du<br />
bruit. Les proj<strong>et</strong>s Harmonoise <strong>et</strong> Imagine sont le socle d’une<br />
révision technique <strong>de</strong> la directive qui aboutira à l’émergence<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> harmonisée. En complément <strong>de</strong>s<br />
spécifications techniques précisées à l’Annexe 4 <strong>de</strong> la<br />
directive, la DG Environnement a confié à un groupe<br />
d’expert européen (WG AEN) la réalisation d’un gui<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
bonnes pratiques en matière cartographique. La Commission<br />
se réserve par ailleurs la possibilité <strong>de</strong> publier <strong>de</strong>s lignes<br />
directrices si le besoin s’en faisait sentir.<br />
Pour la mise en œuvre <strong>de</strong>s plans d’action, les États ont<br />
n<strong>et</strong>tement plus <strong>de</strong> marge <strong>de</strong> manœuvre : critères d’action,<br />
valeurs limites <strong>et</strong> choix <strong>de</strong>s actions sont <strong>de</strong> la discrétion <strong>de</strong>s<br />
États <strong>et</strong> <strong>de</strong>s autorités compétentes. En revanche,<br />
l’information, la consultation <strong>et</strong> la participation du public<br />
sont obligatoires <strong>et</strong> doivent respecter les prescriptions <strong>de</strong>s<br />
directives 2003/4/CE <strong>et</strong> 2003/35/CE. Des obligations<br />
relatives au contenu <strong>et</strong> au format <strong>de</strong> l’information du public<br />
sont fixées par la directive 2002/49.<br />
C<strong>et</strong>te directive a une importance majeure pour la<br />
Commission. Afin d’en accompagner l’application, un<br />
dispositif d’envergure a été mis en place. Six groupes<br />
d’experts mis en place par la Commission avec l’accord <strong>de</strong>s<br />
États se partagent les différents enjeux couverts par la<br />
directive : bruit routier, bruit ferroviaire, bruit <strong>de</strong>s avions,<br />
bruit <strong>de</strong>s machines, aspects socioéconomiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> santé,<br />
évaluation <strong>de</strong> l’exposition au bruit. Leur rôle est <strong>de</strong><br />
conseiller la Commission sur les politiques à m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre <strong>et</strong> <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s techniques. La diffusion<br />
<strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> la recherche <strong>et</strong> l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s besoins<br />
<strong>de</strong> recherche pour l’avenir sont coordonnés dans le cadre du<br />
réseau dénommé Calm. Enfin, <strong>de</strong>ux ou trois fois par an, se<br />
réunit le groupe <strong>de</strong> pilotage sur le bruit (noise steering<br />
group), auquel prennent part les États membres, les ONG,<br />
2 La pério<strong>de</strong> 23h00-7h00 est la plus couramment considérée pour la nuit, mais<br />
les Etats peuvent aussi bien choisir 22h00-6h00, l’important étant que la nuit<br />
dure 8 heures.<br />
les lobbies industriels <strong>et</strong> les prési<strong>de</strong>nts <strong>de</strong>s groupes<br />
d’experts, sous la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> la Commission (DG<br />
Environnement). Trois autres directions générales <strong>de</strong> la<br />
Commission sont fortement impliquées : la DG Transports <strong>et</strong><br />
Énergie (DG TREN), la DG Entreprises (DG ENTR) <strong>et</strong> la DG<br />
Recherche <strong>et</strong> Développement (DG RTD).<br />
Quel bilan peut-on dresser, début 2005, <strong>de</strong>s travaux menés<br />
par les groupes d’experts ? Dans c<strong>et</strong>te foule <strong>de</strong><br />
contributions, il faut souligner l’importance <strong>de</strong>s position<br />
papers publiés sur le site Intern<strong>et</strong> <strong>de</strong> la Commission<br />
européenne 3 . L’un d’eux, consacré aux indicateurs <strong>de</strong> bruit<br />
communautaire, r<strong>et</strong>race l’historique <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong>s<br />
indices L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night , <strong>et</strong> explore largement le champ <strong>de</strong>s<br />
relations entre gêne <strong>et</strong> L <strong>de</strong>n . D’autres sont également<br />
disponibles sur les mesures <strong>de</strong> réduction du bruit, le bruit<br />
<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux roues, la monétarisation du bruit, la stratégie<br />
communautaire en matière <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire,<br />
les relations entre les niveaux <strong>de</strong> bruit L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> la gêne, sans<br />
oublier le position paper sur le proj<strong>et</strong> Harmonoise. D’autres<br />
productions sont attendues sous peu : la <strong>de</strong>uxième version<br />
du gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonnes pratiques en matière <strong>de</strong> cartographie 4 ;<br />
un position paper sur les relations entre L night <strong>et</strong> les<br />
perturbations du sommeil ; un rapport sur l’efficacité <strong>de</strong>s<br />
mesures <strong>de</strong> réduction du bruit. Enfin, un <strong>de</strong>rnier enjeu<br />
d’importance concerne le proj<strong>et</strong>, piloté par l’OMS <strong>et</strong> financé<br />
par la Commission, portant sur les valeurs gui<strong>de</strong>s<br />
recommandées en matière <strong>de</strong> bruit nocturne.<br />
Avant <strong>de</strong> clôturer la présentation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te directive sur<br />
l’évaluation <strong>et</strong> la gestion du bruit dans l’environnement, il<br />
convient <strong>de</strong> rappeler l’obligation faite aux États d’assurer la<br />
remontée d’information à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> la Commission.<br />
Ceci vaut tant pour les données d’exposition au bruit issues<br />
<strong>de</strong>s cartes que pour les résumés <strong>de</strong>s plans d’action. Pour ce<br />
faire, la DG Environnement développe un mécanisme<br />
électronique qui facilitera la centralisation <strong>de</strong>s données par<br />
l’Agence européenne <strong>de</strong> l’environnement. Le recueil <strong>de</strong> ces<br />
données <strong>de</strong>vrait, dès le rapport <strong>de</strong> la Commission prévu pour<br />
2009, fournir une vision plus claire <strong>de</strong> l’exposition au bruit<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices à attendre <strong>de</strong> certaines mesures.<br />
On peut espérer que les enseignements tirés <strong>de</strong> ces données<br />
feront évoluer la législation communautaire sur les émissions<br />
<strong>sonores</strong>.<br />
Les autres législations non spécifiques du bruit<br />
D’autres législations, sans être directement consacrées à la<br />
réduction <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>, intègrent la dimension<br />
bruit. C’est le cas <strong>de</strong>s directives sur l’analyse <strong>de</strong>s impacts<br />
sur l’environnement (directive 85/337/CEE modifiée par la<br />
directive 97/11/CE pour les proj<strong>et</strong>s, directive 2001/42/CE<br />
pour les plans <strong>et</strong> <strong>de</strong>s programmes). Il en va également <strong>de</strong> la<br />
législation sur la tarification <strong>de</strong>s transports, suj<strong>et</strong><br />
fondamental qui reste l’un <strong>de</strong>s principaux point <strong>de</strong> fixation<br />
<strong>de</strong>s dissensions qui règnent entre les États. Or, à travers c<strong>et</strong><br />
enjeu se <strong>de</strong>ssine notamment la question <strong>de</strong> l’internalisation<br />
<strong>de</strong>s coûts environnementaux dus au bruit <strong>de</strong>s transports. Le<br />
récent livre blanc <strong>de</strong> la politique commune <strong>de</strong>s transports<br />
(2001) préconise une tarification qui intègre les coûts<br />
externes environnementaux. Les débats sur la directive<br />
Eurovign<strong>et</strong>te (1999/62/CE) ont montré que la Commission<br />
avançait difficilement sur ce dossier <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s progrès<br />
restent à faire pour que le principe d’internalisation <strong>de</strong>s<br />
coûts externes environnementaux <strong>de</strong>vienne une réalité.<br />
La politique <strong>de</strong> cohésion, plus couramment désignée sous le<br />
terme <strong>de</strong>s “fonds structurels”, constitue également un levier<br />
important. Fait encourageant, la Commission a adopté en<br />
2004 <strong>de</strong> nouvelles propositions — au Parlement européen <strong>et</strong><br />
3<br />
http://europa.eu.int/comm/environment/noise/home.htm<br />
4 voir précé<strong>de</strong>nte note <strong>de</strong> bas <strong>de</strong> page<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 19
au Conseil — <strong>de</strong> règlements qui vont dans le sens d’une<br />
meilleure prise en compte <strong>de</strong>s enjeux d’environnement :<br />
pour la pério<strong>de</strong> 2007-2013, les 336 milliards d’euros <strong>de</strong>stinés<br />
à une remise à niveau <strong>de</strong>s États les moins économiquement<br />
dotés <strong>de</strong> l’Union seraient conditionnés à <strong>de</strong>s critères<br />
d’éligibilité qui intègrent le développement <strong>de</strong> transports<br />
plus propres <strong>et</strong> plus durables, <strong>et</strong> qui privilégient la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong> l’activité communautaire en matière<br />
d’environnement. Quoi qu’il en soit, la DG Environnement<br />
veillera à ce que les lignes directrices qui découleront <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te politique <strong>de</strong> cohésion intègrent bien la problématique<br />
du bruit, cartes <strong>et</strong> plans d’action à l’appui. Une stratégie sur<br />
la gestion <strong>de</strong> l’environnement urbain est également en<br />
préparation. Devant être proposée aux États fin 2005, la<br />
stratégie COM(2004) 60 visera notamment la mise en œuvre<br />
<strong>de</strong> plans <strong>de</strong> transports urbains durables dans tous les États<br />
<strong>de</strong> l’Union, en particulier dans les agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong><br />
100 000 habitants. On r<strong>et</strong>rouve ici les plans <strong>de</strong> déplacements<br />
urbains déjà obligatoires en France, mais avec une<br />
coloration environnementale encore plus accentuée.<br />
Les proj<strong>et</strong>s européens<br />
Parmi les moyens mis à la disposition <strong>de</strong>s États membres par<br />
la Commission pour améliorer l’environnement, citons en<br />
premier lieu le programme Life Environment. Outil financier<br />
<strong>de</strong> la Commission européenne en matière d’environnement,<br />
Life perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> financer <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s visant à ai<strong>de</strong>r les États<br />
ou les collectivités locales à appliquer l’acquis<br />
communautaire <strong>et</strong> à mener une politique volontariste en la<br />
matière. Mais il s’agit d’un dispositif très opérationnel. Pour<br />
ne citer que quelques proj<strong>et</strong>s dédiés à l’application <strong>de</strong> la<br />
directive bruit ambiant, GipSynoise 5 (Grand Lyon), Smile 6<br />
(A<strong>de</strong>me), Goal 7 (Ville <strong>de</strong> Graz) <strong>et</strong> la cartographie du bruit <strong>de</strong><br />
Bruxelles 8 ont été financés dans le cadre du programme Life<br />
Environnement. Le budg<strong>et</strong> associé à ce programme — 1<br />
milliard d’euros sur 7 ans entre 2000 <strong>et</strong> 2006 — est loin<br />
d’être négligeable. Ce programme <strong>de</strong>vrait évoluer à terme<br />
(migration vers Life+).<br />
Le <strong>de</strong>uxième vol<strong>et</strong> <strong>de</strong>s moyens déployés à l’échelon<br />
européen pour stimuler l’émergence <strong>de</strong> pratiques<br />
environnementales innovantes repose sur le programme<br />
cadre en matière <strong>de</strong> recherche <strong>et</strong> <strong>de</strong> développement<br />
(PCRD). On l’a vu, la coordination du PCRD s’effectue au<br />
sein du réseau Calm. Sur le site web <strong>de</strong> Calm 9 , qui recense<br />
tous les proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> recherche sur le bruit financés par la<br />
communauté, un document très récent est consacré aux<br />
5 www.gipsynoise.org<br />
6 www.smile-europe.org<br />
7 www.goal-graz.at<br />
8 www.ibgebim.be<br />
9 www.calm-n<strong>et</strong>work.org<br />
perspectives <strong>de</strong> recherche à l’horizon 2020 pour une Europe<br />
plus silencieuse. Document clé, Research for a qui<strong>et</strong>er<br />
Europe 2020 passe en revue l’essentiel <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong><br />
recherche qui seront financés à compter <strong>de</strong> 2007 en matière<br />
<strong>de</strong> réduction du bruit. Au nombre <strong>de</strong>s priorités figurent<br />
l’application <strong>de</strong> la directive 2002/49 <strong>et</strong> la préparation <strong>de</strong>s<br />
futures législations en matière d’émissions <strong>sonores</strong> liées aux<br />
transports <strong>et</strong> aux machines utilisées en extérieur. Bien<br />
coordonnée <strong>et</strong> dotée d’une puissance <strong>de</strong> feu respectable,<br />
c<strong>et</strong>te recherche <strong>de</strong>vrait se traduire par <strong>de</strong>s avancées<br />
notables.<br />
Les proj<strong>et</strong>s clés en matière <strong>de</strong> bruit dans l’environnement<br />
Quels sont les proj<strong>et</strong>s phares menés actuellement sur le<br />
front <strong>de</strong> la réduction du bruit dans l’environnement ? Les<br />
proj<strong>et</strong>s Harmonoise <strong>et</strong> Imagine portent sur l’évaluation du<br />
bruit dans l’environnement, sa cartographie <strong>et</strong> sa mesure.<br />
Rotranomo, quant à lui, mise sur la modélisation du bruit<br />
<strong>de</strong>s sources routières <strong>et</strong> une approche coûts-bénéfices pour<br />
déterminer les meilleures solutions <strong>de</strong> gestion du bruit<br />
routier. Siruus 10 <strong>et</strong> Silvia 11 sont <strong>de</strong>ux proj<strong>et</strong>s très riches<br />
d’enseignements qui portent sur les revêtements <strong>de</strong><br />
chaussée peu bruyants. Pour ce qui concerne le bruit<br />
ferroviaire, on citera trois proj<strong>et</strong>s particulièrement dignes<br />
d’intérêt : le proj<strong>et</strong> Stairrs pose le fon<strong>de</strong>ment technique qui<br />
régit les arbitrages entre, par exemple, une stratégie<br />
d’action au niveau <strong>de</strong>s rails <strong>et</strong> une autre se focalisant sur les<br />
semelles <strong>de</strong> freins ; avec le proj<strong>et</strong> ERS se joue le<br />
développement <strong>de</strong>s semelles LL évoquées précé<strong>de</strong>mment,<br />
semelles à meilleur rapport, à meilleurs cycles <strong>de</strong> vie <strong>et</strong> à<br />
moindre coût ; le proj<strong>et</strong> Noemie, enfin, vise une meilleure<br />
connaissance du bruit à l’émission <strong>de</strong>s véhicules à gran<strong>de</strong><br />
vitesse. En matière <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong>s avions, le proj<strong>et</strong> Sourdine,<br />
l’un <strong>de</strong>s nombreux proj<strong>et</strong>s financés par la Commission<br />
européenne sur ce thème, traite <strong>de</strong> la question <strong>de</strong>s<br />
trajectoires à moindre bruit (voir, entre autres, les résultats<br />
particulièrement éloquents obtenus par l’aéroport <strong>de</strong><br />
Schiphol). QCity <strong>et</strong> Silence relèvent quant à eux davantage<br />
<strong>de</strong>s plans d’action en matière <strong>de</strong> réduction du bruit en<br />
milieu urbain. Le proj<strong>et</strong> Ranch porte, lui, sur la meilleure<br />
connaissance <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur la santé du bruit <strong>de</strong>s avions <strong>et</strong> du<br />
bruit routier, notamment sur les enfants. Enfin, citons à<br />
nouveau le proj<strong>et</strong> soutenu par la DG Environnement <strong>et</strong> que<br />
pilote l’OMS Europe, le proj<strong>et</strong> Night time gui<strong>de</strong>lines <strong>de</strong>s<br />
recommandations en matière <strong>de</strong> bruit nocturne <strong>et</strong> <strong>de</strong> valeurs<br />
gui<strong>de</strong>s.<br />
10 Voir Inr<strong>et</strong>s<br />
11 www.silvia.trl.uk<br />
Dispositions réglementaires relatives à la transposition <strong>de</strong> la directive<br />
européenne sur le bruit dans l'environnement (cartes <strong>et</strong> plans d'action en<br />
agglomération)<br />
Pascal Valentin (Mission bruit, ministère <strong>de</strong><br />
l'Écologie <strong>et</strong> du Développement durable)<br />
Comme on l’a vu dans l’exposé précé<strong>de</strong>nt, la mise en œuvre<br />
<strong>de</strong> la directive sur le bruit dans l’environnement fait une<br />
large place à la liberté <strong>et</strong> à la responsabilité <strong>de</strong>s États.<br />
Surtout en ce qui concerne l’adoption <strong>de</strong>s plans d’action,<br />
puisque le contenu <strong>et</strong> les critères <strong>de</strong> déclenchement <strong>de</strong> ces<br />
plans sont laissés à la discrétion <strong>de</strong>s autorités compétentes.<br />
En France, les ministères concernés ont souhaité confier<br />
c<strong>et</strong>te responsabilité aux collectivités territoriales,<br />
notamment au titre du bruit émis en ville par les<br />
infrastructures <strong>de</strong> transports terrestre <strong>et</strong> aérien <strong>et</strong> par les<br />
ICPE. Pour transposer c<strong>et</strong>te directive, la France a choisi <strong>de</strong><br />
modifier le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Environnement, en créant ses articles<br />
L. 572-1 <strong>et</strong> suivants, <strong>et</strong> ce par voie d’ordonnance. En voici<br />
les principaux termes.<br />
L’article L 572-1 consacre le principe <strong>de</strong> l’évaluation du<br />
bruit émis dans l’environnement aux abords <strong>de</strong>s principales<br />
infrastructures <strong>de</strong> transport. Sont concernés : les<br />
infrastructures routières <strong>et</strong> autoroutières dont le trafic<br />
annuel est supérieur à 3 millions <strong>de</strong> véhicules ; les<br />
PAGE 20<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
infrastructures ferroviaires dont le trafic est supérieur à<br />
30 000 passages <strong>de</strong> trains par an ; les aérodromes civils dont<br />
le trafic annuel est supérieur à 50 000 mouvements (hors<br />
mouvements effectués exclusivement à <strong>de</strong>s fins<br />
d’entraînement sur <strong>de</strong>s avions légers).<br />
La liste <strong>de</strong>s agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000 habitants sera<br />
déterminée par un décr<strong>et</strong> en Conseil d’État. En outre, c<strong>et</strong>te<br />
liste sera très proche <strong>de</strong> celle correspondant à la<br />
surveillance <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’air, par ailleurs visée par un<br />
autre décr<strong>et</strong>.<br />
L’article L. 572-3 rappelle le principe <strong>et</strong> l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s cartes<br />
<strong>de</strong> bruit. Leur objectif ? Perm<strong>et</strong>tre une évaluation globale <strong>de</strong><br />
l’exposition du bruit dans l’environnement <strong>et</strong> <strong>de</strong> son<br />
évolution à venir. Les cartes sont établies sur la base<br />
d’indicateurs du niveau sonore selon <strong>de</strong>s conditions qui<br />
seront précisées par décr<strong>et</strong> en Conseil d’État. Les cartes<br />
relatives aux agglomérations prennent en compte le bruit<br />
émis par les trafics routier, ferroviaire <strong>et</strong> aérien, les<br />
activités industrielles <strong>et</strong>, le cas échéant, d’autres sources <strong>de</strong><br />
bruit. En tout état <strong>de</strong> cause, en agglomération, il conviendra<br />
que les cartes <strong>de</strong> bruit reflètent la multi-exposition.<br />
Mais quelles sont les autorités compétentes pour établir les<br />
cartes <strong>de</strong> bruit ? Hors agglomérations, pour les<br />
infrastructures <strong>de</strong> transport correspondant aux critères <strong>de</strong><br />
trafic énoncés précé<strong>de</strong>mment, c’est le représentant <strong>de</strong><br />
l’État qui se charge <strong>de</strong> la cartographie ; dans le périmètre<br />
<strong>de</strong>s agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000 habitants, c’est aux<br />
communes ou, s’il en existe, aux établissements <strong>de</strong><br />
coopération intercommunale compétents en matière <strong>de</strong><br />
lutte contre les nuisances <strong>sonores</strong>, <strong>de</strong> réaliser les cartes <strong>de</strong><br />
bruit. On s’en doute, dans le cas d’une infrastructure<br />
importante traversant une agglomération <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000<br />
habitants, il convient que le gestionnaire <strong>de</strong> l’infrastructure<br />
partage ses informations (cartes <strong>de</strong> bruit dans l’idéal,<br />
données entrantes sinon), afin d’éviter que le travail ne soit<br />
réalisé <strong>de</strong>ux fois.<br />
L’article 572-5 pose le principe d’un réexamen <strong>et</strong>, le cas<br />
échéant, d’une révision <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit, tous les cinq ans<br />
au moins. Bien évi<strong>de</strong>mment, les cartes <strong>de</strong> bruit sont rendues<br />
publiques, éventuellement par voie électronique.<br />
On l’a vu, pour l’établissement <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit, la<br />
directive <strong>et</strong> ses annexes laissent peu <strong>de</strong> place à l’à-peu-près.<br />
Les plans <strong>de</strong> prévention du bruit dans l’environnement,<br />
quant à eux, sont bien moins encadrés. Pourquoi c<strong>et</strong>te<br />
différence ? D’une part, parce que le financement <strong>de</strong>s plans<br />
d’action est assuré par les autorités chargées <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre les<br />
plans en œuvre. D’autre part, parce que les plans d’action<br />
ne sont pas un simple catalogue <strong>de</strong>s mesures pouvant être<br />
prises pour lutter contre le bruit, mais trouvent leur<br />
ancrage, le cas échéant, dans les mesures existantes. Seront<br />
donc comprises dans les plans <strong>de</strong> prévention du bruit les<br />
dispositions relatives au classement sonore <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s voies<br />
routières <strong>et</strong> ferroviaires. Il en va <strong>de</strong> même pour les<br />
servitu<strong>de</strong>s d’urbanisme définies par le plan d’exposition au<br />
bruit au voisinage <strong>de</strong>s aérodromes, ou pour celles qui<br />
concernent l’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation. Mais il n’est bien sûr<br />
pas question <strong>de</strong> confier à qui que ce soit d’autre que l’État<br />
la réalisation du classement sonore.<br />
Compte tenu <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit existantes<br />
en France, qui sont bien rôdées, l’on peut légitimement se<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r ce que c<strong>et</strong>te directive représente comme<br />
obligations nouvelles. Pour les collectivités territoriales, la<br />
nouveauté est évi<strong>de</strong>nte : dans les agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong><br />
100 000 habitants, c’est à la commune ou, lorsqu’il existe, à<br />
l’établissement public <strong>de</strong> coopération intercommunal<br />
compétent en matière <strong>de</strong> lutte contre les nuisances <strong>sonores</strong>,<br />
que revient l’élaboration <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> prévention du bruit. Pour les<br />
gestionnaires d’infrastructures, c’est la responsabilité <strong>de</strong>s<br />
plans d’action qui change la donne : pour les infrastructures<br />
qui ne relèvent pas <strong>de</strong> l’État, gestionnaires ou propriétaires<br />
d’infrastructures ont la charge d’élaborer les plans <strong>de</strong><br />
prévention du bruit dans l’environnement. Pour les<br />
autoroutes <strong>et</strong> les routes d’intérêt national <strong>et</strong> européen<br />
faisant parties du domaine public routier national, pour les<br />
infrastructures ferroviaires <strong>et</strong> pour les principaux<br />
aérodromes (ceux qui enregistrent plus <strong>de</strong> 50 000<br />
mouvements par an), l’autorité compétente sera le<br />
représentant <strong>de</strong> l’État.<br />
On le voit, le besoin se fait sentir <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s<br />
dispositifs <strong>de</strong> concertation <strong>et</strong> <strong>de</strong> dialogue, afin <strong>de</strong> prévenir<br />
le cas d’une agglomération qui prendrait <strong>de</strong>s dispositions qui<br />
ne seraient pas <strong>de</strong> son ressort. Prenons l’exemple d’un maire<br />
qui, soucieux <strong>de</strong> protéger ses administrés, déci<strong>de</strong>rait <strong>de</strong> la<br />
ferm<strong>et</strong>ure d’un aérodrome ou d’une infrastructure à<br />
certaines heures. De fait, il importe que les plans <strong>de</strong><br />
prévention du bruit dans l’environnement ne comportent<br />
que <strong>de</strong>s mesures qui puissent être mises en œuvre <strong>de</strong><br />
manière réaliste.<br />
Les plans <strong>de</strong> prévention du bruit dans l’environnement<br />
comporteront également <strong>de</strong>s prescriptions <strong>de</strong> nature à<br />
prévenir les eff<strong>et</strong>s du bruit ou à réduire, si nécessaire, les<br />
eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> bruit, ainsi qu’à protéger les zones calmes.<br />
L’ordonnance définit ces <strong>de</strong>rnières comme <strong>de</strong>s « espaces<br />
extérieurs remarquables par leur faible exposition au bruit<br />
dans lesquelles l’autorité qui établit le plan souhaite<br />
maîtriser l’évolution <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te exposition compte tenu <strong>de</strong>s<br />
activités humaines pratiquées ou prévues ». Autrement dit,<br />
il sera non seulement possible <strong>de</strong> protéger les zones calmes<br />
qui existent mais également <strong>de</strong> créer, autant que faire se<br />
peut, <strong>de</strong> nouvelles zones calmes. Les plans <strong>de</strong> prévention<br />
comporteront une évaluation du nombre <strong>de</strong> personnes<br />
exposées à un niveau <strong>de</strong> bruit excessif <strong>et</strong> i<strong>de</strong>ntifieront les<br />
sources <strong>de</strong> bruit dont les niveaux <strong>de</strong>vraient être réduits. Ils<br />
recenseront les mesures prévues par les autorités<br />
compétentes pour traiter les situations critiques i<strong>de</strong>ntifiées<br />
par les cartes <strong>de</strong> bruit, en particulier lorsque les valeurs<br />
limites (fixées dans <strong>de</strong>s conditions définies par décr<strong>et</strong>)<br />
seront dépassées ou risqueront <strong>de</strong> l’être. Comme pour les<br />
cartes <strong>de</strong> bruit, les plans <strong>de</strong> prévention du bruit dans<br />
l’environnement <strong>de</strong>vront être publiés <strong>et</strong> réexaminés au<br />
minimum tous les 5 ans <strong>et</strong> avant ce délai en cas d’évolution<br />
significative <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit.<br />
Qu’en est-il maintenant <strong>de</strong>s délais d’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
directive ? Pour les agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 250 000<br />
habitants, les infrastructures routières <strong>de</strong> trafic supérieur à<br />
6 millions <strong>de</strong> véhicules, les infrastructures ferroviaires <strong>de</strong><br />
trafic supérieur à 60 000 passages <strong>et</strong> les aérodromes <strong>de</strong><br />
trafic annuel supérieur à 50 000 mouvements, le délai pour<br />
la publication <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit est fixé au 30 juin 2007 au<br />
plus tard. Pour ces mêmes agglomérations <strong>et</strong> infrastructures,<br />
les plans <strong>de</strong> prévention du bruit correspondants <strong>de</strong>vront être<br />
établis avant le 18 juill<strong>et</strong> 2008. Les agglomérations <strong>et</strong><br />
infrastructures plus réduites bénéficient d’un délai<br />
supplémentaire <strong>de</strong> 5 ans : publication <strong>de</strong>s cartes avant le 30<br />
juin 2012, mise en œuvre <strong>de</strong>s plans d’action correspondants<br />
avant le 18 juill<strong>et</strong> 2013.<br />
L’État français sera chargé <strong>de</strong> répercuter les cartes <strong>et</strong> les<br />
résumés <strong>de</strong>s plans d’action (en 10 pages maximum) à la<br />
Commission européenne. Par conséquent, pour les cartes <strong>de</strong><br />
bruit <strong>et</strong> les plans d’action dont l’établissement revient à <strong>de</strong>s<br />
autorités autres que l’État, les informations <strong>de</strong>vront être<br />
transmises à l’État.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 21
Débat<br />
Et l’émergence, dans tout çà ?<br />
Dans c<strong>et</strong>te discussion, on s’est interrogé sur la suprématie,<br />
dans l’évaluation du bruit ambiant, <strong>de</strong>s indicateurs<br />
dosimétriques tels que le L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> le L night . À ces niveaux<br />
moyens, certains opposent une certaine tradition française<br />
qui évalue volontiers la gêne au moyen <strong>de</strong> l’émergence<br />
sonore (entre un bruit particulier <strong>et</strong> un bruit résiduel).<br />
Quelles sont les raisons <strong>de</strong> ce choix ? D’une part, il faut<br />
revenir au programme d’action communautaire en matière<br />
d’environnement, qui donne la priorité, en matière <strong>de</strong> bruit<br />
dans l’environnement, à la réduction <strong>de</strong>s expositions <strong>de</strong><br />
longue durée à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit moyen élevés. D’autre<br />
part, la directive 2002/49 impose une évaluation harmonisée<br />
dans toute l’Europe <strong>de</strong> l’exposition au bruit. Ce qui a poussé<br />
les États à adopter au moins <strong>de</strong>ux indicateurs “fédérateurs”.<br />
Mais il est clairement établi dans la directive que d’autres<br />
indicateurs <strong>de</strong> bruit peuvent être utilisés en complément,<br />
afin <strong>de</strong> caractériser l’exposition au bruit ou <strong>de</strong> définir <strong>de</strong>s<br />
critères pour les plans d’action. À ce titre, l’annexe 1 <strong>de</strong> la<br />
directive dresse une liste non limitative d’indicateurs <strong>de</strong><br />
bruit complémentaires. La pertinence <strong>de</strong>s indicateurs<br />
événementiels tels que le L Amax y est clairement soulignée,<br />
notamment pour l’évaluation du bruit ferroviaire <strong>et</strong> du bruit<br />
<strong>de</strong>s avions. Il ne faut pas perdre <strong>de</strong> vue que les États ont<br />
toute latitu<strong>de</strong> pour définir leurs critères d’action <strong>de</strong><br />
réduction du bruit. Par ailleurs, la législation<br />
communautaire, pour fixer les limites <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> bruit,<br />
fait largement appel à la notion <strong>de</strong> bruit maximum au<br />
passage L Aeq,tp . Enfin, <strong>de</strong>rnier élément <strong>de</strong> réponse, c<strong>et</strong>te<br />
directive peut évoluer : le programme <strong>de</strong> recherche<br />
communautaire laisse la porte gran<strong>de</strong> ouverte à<br />
l’amélioration <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> à l’amélioration<br />
<strong>de</strong>s connaissances en matière d’eff<strong>et</strong> du bruit sur la santé ;<br />
un rapport <strong>de</strong> la commission est prévu pour 2009. Et puis la<br />
profusion d’indicateurs est couramment dénoncée comme un<br />
frein à l’évaluation <strong>de</strong> l’exposition au bruit sur le long terme<br />
<strong>de</strong>s citoyens d’Europe. Seule la collecte <strong>de</strong> données robustes<br />
<strong>et</strong> comparables, par mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> transport, perm<strong>et</strong>tra <strong>de</strong><br />
déterminer les priorités <strong>et</strong> <strong>de</strong> quantifier les gains pour la<br />
société.<br />
La crainte d’une coûteuse “valse <strong>de</strong>s<br />
indicateurs”<br />
Le débat a également porté sur la pérennité <strong>de</strong>s indicateurs<br />
choisis pour établir les cartes <strong>de</strong> bruit. En eff<strong>et</strong>, dans<br />
l’éventualité où le rapport <strong>de</strong> la Commission prévu pour<br />
2009 <strong>de</strong>vait infléchir les choix actuels du L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> du L night , un<br />
tel revirement, pour les autorités compétentes, les<br />
agglomérations notamment, serait lourd <strong>de</strong> conséquences.<br />
En d’autres termes, quelle garantie ont les États membres<br />
<strong>de</strong> ne pas <strong>de</strong>voir établir <strong>de</strong> nouvelles cartes <strong>de</strong> bruit avec <strong>de</strong><br />
nouveaux indicateurs tous les cinq ans ? David Delcampe,<br />
s’exprimant au nom <strong>de</strong> la DG Environnement, a clairement<br />
écarté un tel scénario. Pour lui, les règles du jeu<br />
complémentaires sont <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong>s États.<br />
Expert, vous avez dit expert…<br />
Le débat a ensuite porté sur les modalités <strong>de</strong> recrutement<br />
<strong>de</strong>s experts <strong>et</strong> sur la faible représentativité <strong>de</strong> certaines<br />
disciplines, les sciences dites “molles” notamment, telles<br />
que la sociologie, la psychologie ou la linguistique. En outre,<br />
certaines conclusions établies <strong>de</strong> longue date — comme par<br />
exemple la part du niveau <strong>de</strong> bruit dans l’explication <strong>de</strong> la<br />
gêne qui, selon toute vraisemblance, se limite à 30% —, ne<br />
se seraient toujours pas concrétisées par voie réglementaire.<br />
À <strong>de</strong> telles critiques, la Commission rétorquera que, dans les<br />
instances <strong>de</strong> l’Union, le choix <strong>de</strong>s experts suit une logique<br />
toute transparente : la Commission déci<strong>de</strong> avec les États, en<br />
l’occurrence, pour ce qui est du domaine du bruit dans<br />
l’environnement, avec leurs ministères chargés <strong>de</strong><br />
l’environnement. Pragmatique, la Commission prend sa<br />
décision, faisant peser dans la balance, ici, les coûts <strong>de</strong><br />
participation, là, la pertinence <strong>de</strong>s références <strong>de</strong>s<br />
spécialistes pressentis. Avec vingt-cinq États, on s’en doute,<br />
l’équilibre à trouver a tout du casse-tête. Dès lors, que<br />
certaines disciplines soient sous représentées n’a rien <strong>de</strong><br />
surprenant.<br />
Quant à l’Afsse, l’instance est totalement indépendante<br />
dans ses choix. L’équipe qui a étudié l’impact sanitaire du<br />
bruit, par exemple, comprenait dans ses rangs <strong>de</strong>s<br />
professeurs <strong>de</strong> sociologie, <strong>de</strong>s chargés <strong>de</strong> la gestion du<br />
risque au sein <strong>de</strong> collectivités locales <strong>et</strong> <strong>de</strong>s techniciens<br />
maîtrisant d’autres disciplines que le bruit.<br />
À l’OMS, pour finir, les collectifs d’experts très cosmopolites<br />
commis par l’organisation s’efforceront, pour suggérer <strong>de</strong>s<br />
indicateurs du bruit, <strong>de</strong> concilier <strong>de</strong>ux exigences majeures :<br />
les orientations <strong>de</strong> la directive <strong>et</strong> les meilleurs arguments<br />
possibles <strong>de</strong> représentativité <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s réels sur la santé.<br />
Les moyens déployés contre le bruit <strong>de</strong>s<br />
avions : dérisoires, au vu <strong>de</strong> l’ampleur <strong>de</strong><br />
l’enjeu ?<br />
Prenant exemple sur le dispositif d’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation au<br />
voisinage <strong>de</strong>s aéroports français, lequel, en dix ans, a<br />
concerné à peine plus du quart <strong>de</strong>s logements éligibles, la<br />
discussion a ensuite porté sur la faible adéquation entre les<br />
moyens déployés <strong>et</strong> l’ampleur <strong>de</strong> la tâche à accomplir. Sans<br />
infirmer c<strong>et</strong>te vision <strong>de</strong>s choses, la réponse ministérielle<br />
s’est voulue positiviste, m<strong>et</strong>tant en avant la possibilité,<br />
<strong>de</strong>puis le 1 er janvier 2005, d’assuj<strong>et</strong>tir la taxe prélevée au<br />
trafic 1 , à la catégorie acoustique <strong>de</strong> l’appareil <strong>et</strong> à l’heure<br />
<strong>de</strong> décollage.<br />
1 Dans les aéroports parisiens <strong>et</strong> à Toulouse, ce taux est 22 euros par tonne ;<br />
dans les autres aéroports, Mulhouse excepté, <strong>de</strong> 8 €/t ; à Mulhouse, <strong>de</strong> 0,5 €/t.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Séance plénière<br />
Des politiques globales pour réduire le bruit en agglomération<br />
Séance présidée par François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé <strong>de</strong> l’environnement<br />
Modérateur : Jean-Pierre Gualezzi, vice-Prési<strong>de</strong>nt du CIDB.<br />
Introduction<br />
Jean-Pierre Gualezzi (vice-Prési<strong>de</strong>nt du CIDB,<br />
membre du Conseil national du bruit)<br />
L’ordonnance transposant, en France, la directive<br />
2002/49/CE sur le bruit dans l’environnement est venue<br />
imposer aux agglomérations <strong>de</strong> se doter à court terme <strong>de</strong><br />
plans d’actions contre les nuisances <strong>sonores</strong>, plans <strong>de</strong>vant<br />
prendre appui sur les cartographies du bruit dans le<br />
territoire considéré. C<strong>et</strong>te obligation constitue une<br />
importante avancée, elle constitue en quelque sorte l’acte<br />
fondateur <strong>de</strong>s politiques globales, au niveau local, <strong>de</strong> lutte<br />
contre le bruit. Qui plus est, c<strong>et</strong>te obligation prend un<br />
caractère irréversible, les cartographies <strong>et</strong> les plans d’action<br />
<strong>de</strong>vant être actualisés au moins tous les cinq ans. La force<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te législation tient aussi à son ancrage dans la<br />
gouvernance, puisque la participation effective <strong>de</strong> la<br />
population à l’élaboration <strong>et</strong> à l’évaluation <strong>de</strong>s plans<br />
d’action est requise.<br />
Certes, les vol<strong>et</strong>s traités par la directive ne recouvrent pas<br />
tous les types <strong>de</strong> bruits — les bruits <strong>de</strong>s activités<br />
domestiques <strong>et</strong> les bruits <strong>de</strong> voisinage, notamment, en sont<br />
exclus — mais rien n’empêche qu’un plan d’action les<br />
concerne. La dimension globale inhérente à ce texte n’est<br />
pas la moindre <strong>de</strong> ses qualités : seuls <strong>de</strong>s plans<br />
véritablement globaux ont la capacité d’éviter ce que Serge<br />
Lepeltier, maire <strong>de</strong> Bourges <strong>et</strong> ancien ministre <strong>de</strong> l’Écologie<br />
<strong>et</strong> du Développement durable, appelle le « paradoxe du<br />
maire ». À savoir qu’une action ciblée sur une nuisance<br />
seulement risque <strong>de</strong> faire rejaillir une autre nuisance encore<br />
moins tolérable, jusqu’alors masquée par la première. Il en<br />
va ainsi <strong>de</strong> l’isolation acoustique aux bruits extérieurs, qui<br />
révèle <strong>de</strong>s bruits intérieurs à l’immeuble, auparavant à<br />
peine audibles ; ou <strong>de</strong> la création d’une rue piétonne, qui<br />
favorise le passage nocturne <strong>de</strong> piétons dont les<br />
conversations à voix hautes, surtout s’ils sortent <strong>de</strong><br />
discothèques ou bars <strong>de</strong> nuit, perturbent les riverains.<br />
L’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te directive constitue donc un tournant,<br />
<strong>et</strong> ces Assises <strong>de</strong> l’environnement sonore tombent à point<br />
nommé pour réfléchir collectivement aux moyens par<br />
lesquels le dirigeants locaux concernés pourraient être aidés<br />
dans la mise en œuvre <strong>de</strong> leurs prérogatives. La Commission<br />
européenne s’y emploie <strong>de</strong>puis plusieurs années <strong>et</strong> plusieurs<br />
villes <strong>et</strong> agglomérations <strong>de</strong> différents pays européens ont<br />
anticipé. Parallèlement, plusieurs pays mènent déjà <strong>de</strong>s<br />
politiques incitatives, la France, notamment, avec son plan<br />
national d’action contre le bruit lancé en octobre 2003, dont<br />
le suivi a été confié au Conseil national du bruit. Ce plan<br />
comporte en particulier un important dispositif<br />
d’amélioration <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s populations <strong>de</strong>s points<br />
noirs du bruit <strong>de</strong>s transports terrestres. Une première<br />
initiative <strong>de</strong> contribution décentralisée est à porter au<br />
crédit <strong>de</strong> la Région Ile-<strong>de</strong>-France, qui participe<br />
financièrement à ce dispositif. Les observatoires du bruit se<br />
multiplient par ailleurs. C<strong>et</strong>te secon<strong>de</strong> journée <strong>de</strong>s Assises a<br />
donc vocation à faire le tour <strong>de</strong> ces questions.<br />
C<strong>et</strong>te séance plénière est résolument axée sur le vol<strong>et</strong><br />
transports <strong>et</strong> circulation. Sur ce suj<strong>et</strong>, il convient <strong>de</strong><br />
rappeler qu’un récent sondage commandé par l’association<br />
<strong>de</strong>s maires <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s villes <strong>de</strong> France indique que l’une<br />
<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux principales attentes <strong>de</strong>s habitants <strong>de</strong>s villes n’est<br />
autre que la réduction <strong>de</strong> la circulation automobile, l’autre<br />
priorité restant bien sûr la sécurité.<br />
Au programme <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te plénière figure donc le proj<strong>et</strong> SMILE,<br />
initié par la Commission européenne dans le cadre <strong>de</strong> son<br />
programme Life, qui ne concerne pas directement le bruit<br />
mais qui inclut un vol<strong>et</strong> bruit. Suivent différents exemples<br />
<strong>de</strong> politiques globales mises en place localement pour<br />
réduire le bruit en agglomération : l’exemple <strong>de</strong> Londres, <strong>de</strong><br />
Graz en Autriche, <strong>de</strong> Nantes <strong>et</strong> d’Annecy.<br />
Après un premier débat portant sur c<strong>et</strong>te première partie,<br />
c<strong>et</strong>te séance plénière se tourne ensuite vers le vol<strong>et</strong> bruit du<br />
proj<strong>et</strong> Smile, en quelque sorte, avec la présentation du<br />
gui<strong>de</strong> Smile <strong>de</strong>s bonnes pratiques <strong>de</strong> réduction du bruit en<br />
milieu urbain.<br />
Présentation générale du programme européen SMILE<br />
Jean-Louis Plazy (A<strong>de</strong>me)<br />
SMILE est l’acronyme <strong>de</strong> sustainable mobility initiatives for<br />
local environment, ce qu’on pourrait traduire<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 23
par « Initiatives en mobilité durable pour un contexte<br />
local ». Ce programme traite donc <strong>de</strong> la mobilité urbaine<br />
sous tous ses aspects, qu’il s’agisse <strong>de</strong> protéger la qualité <strong>de</strong><br />
l’air, <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s économies d’énergie ou <strong>de</strong> lutter<br />
contre les nuisances <strong>sonores</strong>. SMILE s’articule autour d’un<br />
consortium regroupant divers partenaires : quatre agences<br />
nationales — ADEME en France, ENEA en Italie, EVA en<br />
Autriche <strong>et</strong> IDAE en Espagne ; trois réseaux <strong>de</strong> villes<br />
européennes — Énergie-Cités (Association <strong>de</strong>s municipalités<br />
en faveur d'une politique énergétique locale durable),<br />
Access-Eurocités (Villes européennes pour une nouvelle<br />
culture <strong>de</strong> la mobilité), Climate alliance (Alliance <strong>de</strong> villes<br />
européennes pour le climat) ; une organisation non<br />
gouvernementale (EAUE, European Aca<strong>de</strong>my of the Urban<br />
Environment).<br />
L’objectif <strong>de</strong> ce programme : formuler <strong>de</strong>s recommandations<br />
<strong>de</strong>stinées à réduire l’impact <strong>de</strong>s transports sur<br />
l’environnement local urbain. Il s’agit d’encourager les<br />
bonnes pratiques, <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s solutions innovantes <strong>et</strong><br />
permanentes <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>, telles que<br />
les alternatives à l’usage <strong>de</strong> la voiture, mais sans perdre <strong>de</strong><br />
vue les besoins spécifiques <strong>de</strong>s populations en matière <strong>de</strong><br />
mobilité.<br />
La métho<strong>de</strong> a consisté à collecter <strong>et</strong> analyser les initiatives<br />
<strong>de</strong>s collectivités prises dans le cadre <strong>de</strong>s opérations “En ville<br />
sans ma voiture” <strong>et</strong> <strong>de</strong> la “semaine européenne <strong>de</strong> la<br />
mobilité”. Un questionnaire a été envoyé dans les villes <strong>de</strong>s<br />
25 pays <strong>de</strong> l’Union ayant participé à ces manifestations. Sur<br />
les mille villes sollicitées, 170 réponses utilisables <strong>et</strong> bien<br />
documentées ont alimenté une base <strong>de</strong> données relatives<br />
aux mesures permanentes mises en place dans ces villes. La<br />
diffusion <strong>de</strong>s informations a tout d’abord été assurée par<br />
une série <strong>de</strong> séminaires <strong>et</strong> <strong>de</strong> conférences, puis par un site<br />
Intern<strong>et</strong> collectant ces données.<br />
Au total, 170 exemples <strong>de</strong> mesures permanentes sont<br />
présentés. Les différentes modalités d’action sont<br />
regroupées selon les thèmes suivants : les transports<br />
publics ; les transports <strong>de</strong> marchandise <strong>et</strong> livraisons en ville ;<br />
le vélo ; la marche <strong>et</strong> les piétons ; l’intermodalité ; la<br />
circulation douce ; l’usage raisonné <strong>de</strong> la voiture, les plans<br />
<strong>de</strong> mobilité ; les parkings ; les politiques locales <strong>de</strong><br />
déplacement ; la planification urbaine ; la sensibilisation du<br />
public.<br />
Ces différents exemples nous révèlent à quel point il<br />
importe <strong>de</strong> mener <strong>de</strong>s actions globales résultant d’une<br />
politique cohérente menée à l’échelon <strong>de</strong> la ville ou <strong>de</strong> la<br />
collectivité territoriale. De ce corpus d’expériences, quatre<br />
gui<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recommandations pour les collectivités ont été<br />
réalisés. L’un traite <strong>de</strong>s politiques locales en faveur <strong>de</strong>s<br />
déplacements soutenables, un autre <strong>de</strong>s transports publics —<br />
ce pilier <strong>de</strong> la mobilité soutenable —, un autre encore est<br />
axé sur le thème <strong>de</strong> la mobilité pour tous. Enfin, émanation<br />
du groupe <strong>de</strong> travail dédié aux nuisances <strong>sonores</strong>, le <strong>de</strong>rnier<br />
document est un gui<strong>de</strong> pour la réalisation <strong>de</strong>s plans<br />
d’atténuation <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> liées au trafic.<br />
Des circuits <strong>de</strong> visite ont par ailleurs été organisés dans<br />
quatorze villes jugées comme étant les meilleurs exemples<br />
<strong>de</strong>s différents registres d’action. En France, Nantes <strong>et</strong> La<br />
Rochelle sont les <strong>de</strong>ux villes r<strong>et</strong>enues pour ces “voyages<br />
d’étu<strong>de</strong>”.<br />
Concernant les nuisances <strong>sonores</strong>, le groupe d’experts piloté<br />
par Christophe Rau (EAUE) a analysé les mesures prises dans<br />
diverses villes européennes. Voici quelques exemples <strong>de</strong><br />
villes comptant parmi les initiatives <strong>de</strong> réduction du bruit les<br />
plus intéressantes : Annecy (France), Berlin (Allemagne),<br />
Breda (Pays-Bas), Parme (Italie), Valence (Espagne), Vienne<br />
(Autriche), Göteborg (Suè<strong>de</strong>), Modène (Italie), Madrid<br />
(Espagne).<br />
Pour en savoir plus, ou pour se procurer les différents<br />
documents disponibles, on contactera les agences nationales<br />
ou les villes relais : www.smile-europe.org.<br />
La politique <strong>de</strong> limitation du trafic à Londres<br />
Patrick Allcorn (Transport for London)<br />
Londres compte presque 7,5 millions d’habitants, mais<br />
n’occupe que 1600 kilomètres carrés. Les jours ouvrés, la<br />
<strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population passe du simple au double. Le nombre<br />
<strong>de</strong> foyers, quant à lui, est <strong>de</strong> 3,1 millions. Londres est<br />
organisée en 33 divisions administratives (boroughs), chacun<br />
<strong>de</strong> ces arrondissements ayant son propre plan d’urbanisme<br />
<strong>et</strong> sa propre autorité routière. Ainsi, sur les 14 500 km <strong>de</strong><br />
routes que compte Londres, le maire n’est responsable que<br />
<strong>de</strong> 1000 km. Ceci a son importance car, pour entreprendre la<br />
moindre action, il est indispensable <strong>de</strong> s’entendre avec les<br />
arrondissements. De surcroît, les 945 stations du réseau<br />
ferré appartiennent au secteur privé, seules les 350 stations<br />
<strong>de</strong> métro <strong>et</strong> les autobus étant gérés par la Ville. Le maire <strong>de</strong><br />
Londres a passé les quatre premières années <strong>de</strong> son mandat<br />
à concevoir un plan en neuf stratégies, le bruit ambiant<br />
comptant pour l’une d’elles. Pour la première fois <strong>de</strong>puis<br />
cinquante ans, une stratégie globale intéressant l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s arrondissements londoniens a vu le jour.<br />
Le péage urbain <strong>de</strong> Londres ne concerne que l’hypercentre<br />
<strong>de</strong> la capitale, soit 22 km 2 . Du lundi au vendredi, pour<br />
entrer, circuler ou se garer dans c<strong>et</strong>te zone, <strong>de</strong> 07h00 à<br />
18h30, il faut acquitter une somme <strong>de</strong> 5 £ (8 euros). Les<br />
personnes habitant c<strong>et</strong>te zone ne payent que 10% <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
taxe. Le système est fondé sur le pré paiement par l’usager,<br />
puis par le contrôle vidéo <strong>de</strong> la plaque minéralogique <strong>de</strong>s<br />
véhicules entrant dans la zone.<br />
Malheureusement, faute d’une technologie suffisante, ce<br />
système n’est économiquement viable que dans une zone <strong>de</strong><br />
superficie restreinte. De plus, le trafic dans la zone a<br />
recommencé à croître. À tel point que, dans une prochaine<br />
étape, il est envisagé <strong>de</strong> porter la taxe à 8 £ par jour. Plutôt<br />
que <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r par <strong>de</strong> p<strong>et</strong>ites augmentations annuelles, le<br />
maire estime en eff<strong>et</strong> plus efficace <strong>de</strong> pratiquer une<br />
augmentation substantielle, en une fois. Ce point est au<br />
cœur du débat à l’heure actuelle. L’extension <strong>de</strong> la zone<br />
vers l’ouest fait également l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> pourparlers. Le<br />
recours à <strong>de</strong>s technologies nouvelles, qui autoriseraient <strong>de</strong>s<br />
taxations différenciées, compte également parmi les pistes<br />
envisagées. Enfin, l’impact du péage urbain sur le<br />
dynamisme économique <strong>de</strong> la zone est également à l’étu<strong>de</strong>.<br />
Côté résultats, après <strong>de</strong>ux ans d’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te mesure<br />
[NDLR : en janvier 2005], la zone a connu une baisse <strong>de</strong> 15%<br />
du trafic. Plus intéressant encore, aucune augmentation<br />
significative du trafic n’a été remarquée aux limites <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te zone. Autre satisfaction, la régularité <strong>de</strong>s bus dans<br />
l’hypercentre s’est améliorée <strong>de</strong> 50 % (un bus toutes les trois<br />
à quatre minutes). Les déplacements à vélo <strong>et</strong> à pied ont<br />
été qualitativement améliorés. Par exemple, le temps<br />
nécessaire pour traverser Trafalgar Square à pied a diminué.<br />
PAGE 24<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
En revanche, en ce qui concerne le bruit, aucune variation<br />
notable n’a été décelée. Deux raisons à cela : d’une part,<br />
les véhicules dans c<strong>et</strong>te zone se déplacent plus vite<br />
qu’auparavant ; d’autre part, s’il y a moins <strong>de</strong> voitures, il y<br />
a davantage d’autobus, qui sont plus bruyants. Les fameux<br />
autobus à impériale, auxquels les londoniens sont si<br />
attachés, circulent en moyenne <strong>de</strong>puis 45 ans <strong>et</strong> sont loin<br />
d’être silencieux. Pour c<strong>et</strong>te raison, <strong>de</strong>s autobus plus<br />
récents, à moteur Merce<strong>de</strong>s, commencent à être intégrés au<br />
parc <strong>de</strong>s bus londoniens. Curieusement, les sondages<br />
montrent que ces autobus sont perçus comme étant bien<br />
moins bruyants qu’ils ne le sont en réalité.<br />
Alors, la ville <strong>de</strong> Londres a-t-elle un problème <strong>de</strong> bruit ? Aux<br />
dires <strong>de</strong>s Londoniens eux-mêmes, la réponse est oui : 46 %<br />
d’entre eux estiment que le bruit est un problème à<br />
Londres ; 55 % citent le trafic routier <strong>et</strong> les chantiers<br />
routiers comme les principaux points à améliorer ; quant aux<br />
Londoniens vivant en périphérie, ils sont 22 % à s’estimer<br />
gênés par le bruit, 24 heures sur 24 <strong>et</strong> sept jour sur sept. En<br />
l’état actuel <strong>de</strong> ce bilan, compte tenu du faible impact du<br />
péage urbain sur le bruit, il est impossible d’envisager une<br />
taxation.<br />
Aussi la ville se tourne-t-elle vers d’autres pistes<br />
d’amélioration. Comme celle <strong>de</strong>s bus à hydrogène.<br />
Potentiellement plus silencieux <strong>et</strong> plus efficaces, ils font<br />
partie du proj<strong>et</strong> QCity. Différents revêtements <strong>de</strong> surface<br />
sont également en cours d’évaluation. Bien sûr, les écrans<br />
acoustiques, le long <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> bus <strong>et</strong> <strong>de</strong> métro, sont<br />
également envisagés, mais ils ont l’inconvénient<br />
d’augmenter l’emprise <strong>de</strong>s routes, ayant ainsi un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
coupure <strong>de</strong>s quartiers. Une certitu<strong>de</strong>, l’augmentation <strong>de</strong> la<br />
vitesse <strong>de</strong>s véhicules doit être évitée. En matière <strong>de</strong><br />
sécurité, les dos d’âne sont largement utilisés, mais ils sont<br />
source <strong>de</strong> bruit, au passage <strong>de</strong>s poids lourds (<strong>de</strong>s camions <strong>de</strong><br />
lait !) notamment. Quant aux comportements illicites,<br />
également cause <strong>de</strong> bruit, il est difficile <strong>de</strong> les verbaliser. Et<br />
l’échelon local n’est pas le plus pertinent pour régler tous<br />
ces problèmes.<br />
Dès lors, face à ces questions, Transport for London mise sur<br />
l’évolution <strong>de</strong>s comportements, sur la responsabilité<br />
individuelle du citoyen. En quoi doit consister ce réveil <strong>de</strong>s<br />
consciences ? Les déplacements doux (marche <strong>et</strong> vélo), une<br />
meilleure attitu<strong>de</strong> au volant, la conscience <strong>de</strong> l’impact<br />
environnemental <strong>de</strong>s véhicules polluants, le covoiturage en<br />
sont quelques exemples. Sont également mis en avant la<br />
meilleure accessibilité <strong>de</strong>s transports en commun, les<br />
bienfaits <strong>de</strong> l’activité physique, l’amélioration <strong>de</strong> la sécurité<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> la sûr<strong>et</strong>é <strong>de</strong>s déplacements. On notera, non sans<br />
intérêt, que les enjeux du bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’air sont<br />
délibérément exclus du propos. Et pour cause : dans l’esprit<br />
<strong>de</strong>s gens, ces gran<strong>de</strong>s questions d’environnement relèvent<br />
d’une problématique globale, lour<strong>de</strong>, <strong>de</strong> ce fait difficile à<br />
résoudre. En m<strong>et</strong>tant ainsi l’accent sur les aspects<br />
personnels du problème (la santé, la sécurité, les difficultés<br />
à se rendre d’un endroit à un autre), le pari est que,<br />
indirectement, <strong>de</strong>s progrès en matière <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong> l’air <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> bruit seront obtenus.<br />
Pour favoriser l’évolution <strong>de</strong>s comportements, la Ville a<br />
lancé “Good going”, une campagne <strong>de</strong> sensibilisation axée<br />
sur la notion <strong>de</strong> déplacement durable (travel awareness).<br />
Une sorte <strong>de</strong> Semaine européenne <strong>de</strong> la mobilité, mais mise<br />
en œuvre tout au long <strong>de</strong> l’année. Concrètement, c<strong>et</strong>te<br />
stratégie repose sur la mise en place <strong>de</strong> plans <strong>de</strong><br />
déplacement d’entreprise, <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> déplacement <strong>de</strong>s<br />
écoles <strong>et</strong> <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> déplacements personnels. Ces plans<br />
piochent dans la pal<strong>et</strong>te complète <strong>de</strong> solutions : mo<strong>de</strong>s<br />
doux, transports collectifs, covoiturage <strong>et</strong> stationnement. La<br />
partie information n’a pas été négligée, loin <strong>de</strong> là. Grâce à<br />
<strong>de</strong>s manifestations, à une l<strong>et</strong>tre d’information, chaque<br />
habitant est ainsi informé <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière ligne <strong>de</strong> bus créée,<br />
ou <strong>de</strong> l’extension d’une piste cyclable. Il importe que les<br />
Londoniens sachent qu’ils peuvent marcher ou utiliser leur<br />
vélo <strong>de</strong> tel endroit à tel autre. Au plan national, on notera<br />
que les plans <strong>de</strong> déplacement d’entreprise ont permis <strong>de</strong><br />
réduire le trafic <strong>de</strong> 14%. À Londres, l’autorité locale <strong>de</strong><br />
Wandsworth a relevé une diminution <strong>de</strong> 6% ; un hôpital une<br />
réduction <strong>de</strong> 10% ; une école publique une baisse <strong>de</strong> 21% du<br />
nombre <strong>de</strong> parents accompagnant leurs enfants en voiture.<br />
L’objectif, à l’horizon 2009, est que chaque école <strong>de</strong><br />
Londres se soit dotée d’un plan <strong>de</strong> déplacement. Les plans<br />
<strong>de</strong> déplacement personnels consistent à cibler les familles <strong>et</strong><br />
à leur apporter une information adéquate. Ce mo<strong>de</strong> d’action<br />
s’avère plutôt coûteux, mais le rapport coût-bénéfice par<br />
habitant — sur 4000 familles londoniennes, une réduction <strong>de</strong><br />
6% <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> la voiture a pu être atteinte, pour<br />
moins d’un million <strong>de</strong> livres sterling d’investissement<br />
(1 600 000 €) — reste bien supérieur à celui d’un péage<br />
urbain ou d’une nouvelle infrastructure <strong>de</strong> transport.<br />
Quand on prend un peu <strong>de</strong> recul sur toutes ces mesures, on<br />
doit adm<strong>et</strong>tre que l’équilibre entre sécurité routière, bruit<br />
<strong>et</strong> qualité <strong>de</strong> l’air est difficile à trouver. Lesquels <strong>de</strong> ces<br />
enjeux, qui ne sont pas forcément compatibles, faut-il<br />
privilégier ? Le bruit semble gagner à être inclus dans un<br />
“emballage” plus global, axé sur l’utilisateur : il ne s’agit<br />
pas tant <strong>de</strong> lui faire comprendre pourquoi la ville souhaite<br />
appliquer ces mesures, mais qu’il voit en quoi ces mesures<br />
sont bonnes pour lui. Sans vouloir abandonner tout<br />
investissement dans les infrastructures <strong>et</strong> les lignes<br />
d’autobus, il convient <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r à l’esprit que chaque livre<br />
sterling dépensée dans la mise en place <strong>de</strong> plans <strong>de</strong><br />
déplacement d’entreprise se traduit par une réduction du<br />
trafic équivalente, en termes <strong>de</strong> bruit, <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong> l’air <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> sécurité, à un gain pour la collectivité <strong>de</strong> 10 £.<br />
Stratégie <strong>de</strong> développement durable <strong>de</strong>s transports à Graz<br />
Gerhart Ablasser (mairie <strong>de</strong> Graz, Autriche)<br />
Graz est une p<strong>et</strong>ite ville du sud-est <strong>de</strong> l’Autriche, déclarée<br />
capitale culturelle <strong>de</strong> l’année 2003 <strong>et</strong> dont le centre<br />
historique est entré au patrimoine <strong>de</strong> l’Unesco en 1999. La<br />
ville a également reçu le prix 1999 du développement<br />
durable, dans la catégorie <strong>de</strong>s Villes. Son centre historique<br />
est un dédale <strong>de</strong> ruelles trop p<strong>et</strong>ites pour y ménager<br />
davantage <strong>de</strong> place pour les déplacements. Pour preuve, les<br />
axes prioritaires ne représentent que le quart <strong>de</strong>s 1056 km<br />
du réseau routier <strong>de</strong> Graz ; les p<strong>et</strong>ites voies secondaires sont<br />
donc très majoritaires. Le réseau <strong>de</strong> transport public — 6<br />
lignes <strong>de</strong> tramway <strong>et</strong> 37 lignes d’autobus — couvre 294 km.<br />
Depuis 1979, Graz a progressivement mis en place un certain<br />
nombre <strong>de</strong> mesures ayant vocation à mieux maîtriser les<br />
déplacements urbains. Différents programmes ont été<br />
lancés : Gentle mobility, Space for People, GOAL <strong>et</strong><br />
MLA/AMOS en sont les principaux.<br />
Sous la bannière du programme Gentle mobility, sont<br />
rassemblées un certain nombre <strong>de</strong> mesures diverses : une<br />
zone bleue (en 1979) ; un centre d’information, le premier<br />
en Autriche, sur l’offre en transports publics (Mobil Zentral,<br />
financé en partie par les proj<strong>et</strong>s européens Momentum <strong>et</strong><br />
Centaur EU) ; la création <strong>de</strong> 200 km <strong>de</strong> sites cyclables (Velo-<br />
City, 1988) ; en périphérie <strong>de</strong> la ville, un parking relais, géré<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 25
<strong>de</strong> manière privée, existe <strong>de</strong>puis 1991. Depuis 2004, un tarif<br />
spécial pour les véhicules à faibles émissions polluantes <strong>et</strong> la<br />
gratuité pour les véhicules électriques sont en vigueur. La<br />
majeure partie <strong>de</strong>s revenus <strong>de</strong> ce parking est réinvestie dans<br />
la mo<strong>de</strong>rnisation du réseau <strong>de</strong> transport public. Les<br />
nouveaux tramways surbaissés, qui roulent au biodiesel, un<br />
carburant à base d’huiles <strong>de</strong> friture usagées, en sont un bon<br />
exemple. Depuis 1992, la limite <strong>de</strong> vitesse en ville est <strong>de</strong> 30<br />
km/h sur les axes secondaires, les artères principales étant<br />
limitées à 50 km/h.<br />
Le programme Space for People s’articule quant à lui autour<br />
du concept <strong>de</strong> réoccupation <strong>de</strong> l’espace par les habitants <strong>de</strong><br />
Graz. Voies piétonnes, trafic dans certaines rues permis<br />
uniquement le matin pour les livraisons, pont promena<strong>de</strong><br />
implanté sur la rivière Mur, en sont quelques exemples.<br />
Le programme GOAL — acronyme <strong>de</strong> “Gesund Ohne Auto und<br />
Lärm” (La santé sans voitures ni bruit) — a fait l’obj<strong>et</strong> d’un<br />
financement européen Life. Ce proj<strong>et</strong> entend restaurer une<br />
meilleure qualité <strong>de</strong> vie dans le centre-ville, par la<br />
réduction du bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong>s émissions <strong>de</strong> polluants<br />
atmosphériques. Pour ce faire, la ville n’a, par exemple, pas<br />
hésité à reclasser certaines voies à 50 km/h en axes à 30<br />
km/h, notamment quand une école est à proximité. Elle a<br />
aussi engagé <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> rénovation du revêtement<br />
routier, interdit le trafic <strong>de</strong>s poids lourds la nuit <strong>et</strong> financé<br />
la construction d’écrans acoustiques <strong>et</strong> d’isolations <strong>de</strong><br />
faça<strong>de</strong>. Enfin, a été mise en place une formation à la<br />
conduite silencieuse à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s conducteurs <strong>de</strong> taxis<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> bus. Le système <strong>de</strong> transport public est aussi<br />
largement impliqué dans GOAL : l’une <strong>de</strong>s principales<br />
mesures <strong>de</strong> sensibilisation a consisté en un autobus itinérant<br />
où était proposée <strong>de</strong> l’information sur le bruit, notamment<br />
la possibilité d’écouter l’impact sonore <strong>de</strong> différents moyens<br />
<strong>de</strong> transport.<br />
Le Proj<strong>et</strong> MLA, acronyme <strong>de</strong> Multifunktionale Lärmschutz<br />
Anlage (système <strong>de</strong> protection antibruit multifonction),<br />
concerne quant à lui le tronçon autoroutier Graz-Vienne, qui<br />
passe à 20 km du centre-ville. Des écrans acoustiques d’une<br />
hauteur <strong>de</strong> 2,75 m ont été implantés, sur une longueur <strong>de</strong> 3<br />
km, associés à <strong>de</strong>s revêtements moins bruyants, protégeant<br />
ainsi 6000 riverains. Pour éviter l’augmentation <strong>de</strong> la vitesse<br />
sur les tronçons dotés d’écrans antibruit, un système<br />
novateur a été adopté : <strong>de</strong>s capteurs acoustiques mesurent<br />
le bruit en faça<strong>de</strong> <strong>de</strong>s immeubles riverains, <strong>et</strong> ce niveau <strong>de</strong><br />
bruit est directement répercuté sur la vitesse limite<br />
autorisée. La pluie, l’augmentation du trafic, par exemple,<br />
peuvent augmenter le niveau <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> dépasser la<br />
capacité d’atténuation <strong>de</strong>s écrans. Pour encourager<br />
davantage encore les usagers à lever le pied, ce système est<br />
complété par <strong>de</strong>s affichages insistant sur le lien entre<br />
vitesse <strong>et</strong> bruit. Des écrans antibruit à cellules<br />
photovoltaïques ont par ailleurs été mis en place, sur une<br />
longueur <strong>de</strong> 1200 mètres, pour une capacité <strong>de</strong> crête <strong>de</strong> 101<br />
kW. Les autres bénéfices <strong>de</strong> ces mesures sont l’amélioration<br />
<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’air, une meilleure fluidité du trafic, plus<br />
<strong>de</strong> sécurité sur la route <strong>et</strong> un r<strong>et</strong>our sur investissement.<br />
Pour finir, le proj<strong>et</strong> AMOS, pour “Active Mastering Of Sound“<br />
mise sur le principe <strong>de</strong> la résonance pour disperser les on<strong>de</strong>s<br />
<strong>sonores</strong> <strong>et</strong> ainsi diminuer la perception du bruit. Un gain <strong>de</strong><br />
50% (-10 dB) est attendu, dans une gamme <strong>de</strong> fréquences<br />
assez large centrée sur les fréquences basses (50-700 Hz).<br />
Eff<strong>et</strong>s du PDU <strong>de</strong> Nantes sur la réduction <strong>de</strong>s pollutions<br />
Olivier Sorin (Nantes métropole)<br />
La politique <strong>de</strong>s déplacements à Nantes n’a pas pour seul<br />
objectif <strong>de</strong> limiter l’impact sonore <strong>de</strong> la circulation. L’action<br />
menée à Nantes, plus globale, vise l’amélioration <strong>de</strong> la<br />
qualité <strong>de</strong> vie par la maîtrise <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en transports <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la circulation automobile <strong>et</strong> par la promotion <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong> déplacements alternatifs.<br />
La communauté urbaine nantaise comprend une population<br />
<strong>de</strong> 555 000 habitants répartie sur 24 communes, <strong>et</strong> un bassin<br />
<strong>de</strong> 255 000 emplois. Les actions publiques, dont une gran<strong>de</strong><br />
part vont à la politique <strong>de</strong>s transports, bénéficient d’un<br />
budg<strong>et</strong> annuel <strong>de</strong> 700 millions d’euros environ.<br />
L’urbanisation à Nantes a connu un essor important durant<br />
les années 70, avec le développement du réseau <strong>de</strong> voiries<br />
principales, complété notamment par le périphérique<br />
achevé en 1994 <strong>et</strong>, en parallèle, le développement du<br />
réseau <strong>de</strong> transports collectifs. Le boulevard périphérique a<br />
permis <strong>de</strong> décongestionner le centre en réduisant le trafic<br />
<strong>de</strong> transit par le centre ville. Les déplacements, qui ont<br />
connu une explosion dans les années 80 <strong>et</strong> 90, semblent se<br />
stabiliser actuellement autour <strong>de</strong> 2 millions <strong>de</strong> déplacements<br />
par jour. La population <strong>de</strong> l’agglomération continue quant à<br />
elle d’augmenter <strong>de</strong> 1% par an environ. Au cours <strong>de</strong> la<br />
décennie 90, l’agglomération ayant gagné 50 000 habitants,<br />
la part modale <strong>de</strong> l’automobile a fortement augmenté<br />
(20 000 véhicules supplémentaires), pour se stabiliser<br />
ensuite. C<strong>et</strong>te augmentation s’est faite au détriment <strong>de</strong> la<br />
marche à pied <strong>et</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux-roues, motorisés notamment, la<br />
part <strong>de</strong>s transports publics restant stable, à hauteur <strong>de</strong> 14%<br />
<strong>de</strong> part modale.<br />
Face à la hausse <strong>de</strong>s déplacements <strong>de</strong> périphérie à<br />
périphérie, le transport collectif souffre d’un manque <strong>de</strong><br />
compétitivité par rapport aux déplacements individuels, vu<br />
la difficulté d’assurer <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ssertes avec <strong>de</strong>s fréquences<br />
importantes. Comme c’est le cas un peu partout en France,<br />
la périurbanisation reste donc un enjeu majeur à Nantes,<br />
l’une <strong>de</strong>s solutions consistant à encourager la re<strong>de</strong>nsification<br />
<strong>de</strong> l’habitat du cœur <strong>de</strong> ville.<br />
La première ligne <strong>de</strong> tramway dans sa version mo<strong>de</strong>rne, a<br />
été ouverte en 1985, après moult débats au niveau local. Le<br />
premier plan <strong>de</strong> déplacement voté en 1991 visait cinq<br />
objectifs majeurs : mieux utiliser le périphérique ; r<strong>et</strong>raiter<br />
les pénétrantes urbaines ; créer <strong>de</strong> nouveaux<br />
franchissements <strong>de</strong> la Loire ; développer les transports<br />
collectifs ; amorcer le réseau <strong>de</strong>s continuités cyclables <strong>de</strong><br />
l’agglomération. Concrètement, c<strong>et</strong>te politique s’est<br />
déclinée selon trois axes, à savoir un schéma <strong>de</strong> transports<br />
collectifs (lignes <strong>de</strong> tramways 2 <strong>et</strong> 3, développement du<br />
réseau d’autobus), un schéma <strong>de</strong> continuités cyclables (sur<br />
300 km) <strong>et</strong> un schéma <strong>de</strong>s continuités vélo/promena<strong>de</strong>, le<br />
long <strong>de</strong>s cours d’eau notamment (250 à 300 km).<br />
Le plan <strong>de</strong> déplacement urbain 2000-2010 actuel, outre la<br />
mise à jour du précé<strong>de</strong>nt plan <strong>et</strong> la mise en conformité avec<br />
la loi sur l’air, a pour principale ambition d’atteindre<br />
l’équilibre entre la part <strong>de</strong> la voiture <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s autres<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport (en 2002, la part modale <strong>de</strong> l’automobile<br />
était <strong>de</strong> 60%). Cela exige bien évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> développer<br />
l’offre alternative à la voiture, <strong>de</strong> repenser l’usage <strong>de</strong> la<br />
voirie <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’espace public, <strong>et</strong> d’expérimenter <strong>de</strong> nouveaux<br />
services <strong>de</strong> mobilité. Sans oublier <strong>de</strong> traiter le problème <strong>de</strong><br />
l’acheminement <strong>de</strong>s marchandises <strong>et</strong> <strong>de</strong> définir une<br />
politique <strong>de</strong> stationnement. Dans le même temps, il<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
convient d’assurer l’accessibilité aux différents pôles<br />
d’activité, l’agglomération <strong>de</strong>venant <strong>de</strong> plus en plus<br />
multipolaire. Enfin, tout ceci ne peut se faire sans une vision<br />
globale, une démarche <strong>de</strong> management <strong>de</strong> la mobilité, au<br />
moyen notamment <strong>de</strong> plans <strong>de</strong> mobilité d'entreprise<br />
associant tous les acteurs.<br />
Depuis les années 90, les pénétrantes urbaines nantaises <strong>et</strong><br />
l’espace public du cœur d’agglomération ont vu<br />
progressivement la place <strong>de</strong> la voiture régresser. De<br />
pénétrantes à <strong>de</strong>ux fois <strong>de</strong>ux voies, on est passé à <strong>de</strong>s axes à<br />
<strong>de</strong>ux fois une voie où le gain d’espace est dédié aux<br />
tramways, aux autobus en site propre, aux pistes cyclables<br />
ou aux trottoirs. Pour le traj<strong>et</strong> du tramway en périphérie, un<br />
traitement végétal, à la fois esthétique <strong>et</strong> insonorisant, a<br />
été privilégié. Bien que relativement silencieuses, les rames<br />
occasionnent néanmoins <strong>de</strong>s crissements dans les virages qui<br />
suscitent <strong>de</strong> nombreuses critiques.<br />
La requalification du Cours <strong>de</strong>s 50 otages constitue un<br />
exemple symbolique du recul du tout automobile au profit<br />
d’un environnement urbain <strong>de</strong> qualité. Dans les années 80,<br />
ce boulevard partageant les <strong>de</strong>ux centres <strong>de</strong> Nantes<br />
consistait en une <strong>de</strong>ux fois quatre voies servant d’axe <strong>de</strong><br />
transit, vers la Br<strong>et</strong>agne notamment. A l’occasion <strong>de</strong> la<br />
construction <strong>de</strong> la ligne 2 du tramway, c<strong>et</strong> axe a été<br />
totalement transformé en espace public reliant les <strong>de</strong>ux<br />
centres-villes. On y trouve aujourd’hui une voie réservée aux<br />
autobus, <strong>de</strong>ux voies <strong>de</strong> circulation générale, le tramway <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s espaces publics piétons. L’île Fey<strong>de</strong>au, bien que n’étant<br />
plus une île <strong>de</strong>puis longtemps, était quant à elle ceinturée<br />
d’un important flot d’automobiles. Sa requalification s’est<br />
attachée à faire <strong>de</strong> ce quartier une sorte d’île verte<br />
entourée par <strong>de</strong>s douves recouvertes <strong>de</strong> verdure, avec <strong>de</strong>s<br />
cheminements piétons <strong>et</strong> où le nombre <strong>de</strong> voies <strong>de</strong><br />
circulation a été diminué.<br />
En périphérie, la construction du tramway a été l’occasion<br />
<strong>de</strong> réduire l’espace dédié à la voiture <strong>et</strong> <strong>de</strong> créer une sorte<br />
<strong>de</strong> verrou en entrée <strong>de</strong> ville afin d’inciter à l’utilisation <strong>de</strong>s<br />
parkings relais. A l’usage, il s’avère que les parkings relais<br />
les plus utilisés sont les plus proches du centre-ville, les<br />
parkings relais <strong>de</strong> terminus ayant tendance à être sous<br />
utilisés. Sur le campus universitaire <strong>de</strong> la faculté <strong>de</strong> l<strong>et</strong>tres<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> droit, avec l’augmentation du nombre d’étudiants, le<br />
parking avait pris <strong>de</strong>s proportions gigantesques. Par une<br />
démarche assez volontariste <strong>de</strong> requalification du site, <strong>de</strong><br />
limitation du stationnement, <strong>de</strong> pose d’appuis-vélos <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
renforcement <strong>de</strong>s transports en commun, le campus a<br />
r<strong>et</strong>rouvé une ambiance n<strong>et</strong>tement plus paisible.<br />
Côté périphérique, initialement limité à 110 km/h, suite aux<br />
plaintes émanant d’associations <strong>de</strong> riverains, un<br />
observatoire du bruit a été créé en 1997. A la suite d’un<br />
diagnostic établi en concertation avec les communes, les<br />
riverains <strong>et</strong> l’agglomération nantaise, <strong>de</strong>s revêtements <strong>de</strong><br />
chaussée moins bruyants ont été progressivement mis en<br />
œuvre (bétons bitumineux minces, échelonnés sur cinq ans),<br />
pour un gain <strong>de</strong> 3,1 dB en journée <strong>et</strong> <strong>de</strong> 2,3 dB la nuit.<br />
Parallèlement, la limite <strong>de</strong> vitesse a été abaissée à 90 km/h<br />
en 1998.<br />
Dans le cadre du schéma directeur <strong>de</strong>s transports collectifs,<br />
qui est décliné <strong>de</strong>puis 2002, le développement du réseau<br />
d’autobus a fait l’obj<strong>et</strong> d’efforts particuliers, afin <strong>de</strong> hisser<br />
le niveau <strong>de</strong> service à égalité avec celui offert par le tram.<br />
Le renouvellement <strong>de</strong> la flotte d’autobus a motivé<br />
l’acquisition <strong>de</strong> 185 bus au gaz naturel, au confort sonore<br />
amélioré. Mais ce n’est pas tout. La communauté urbaine<br />
m<strong>et</strong> actuellement en place un concept <strong>de</strong> lignes <strong>de</strong> bus à<br />
fréquence importante, dénommé Chronobus, bénéficiant<br />
notamment <strong>de</strong> la priorité aux carrefours, associé à <strong>de</strong>s lignes<br />
express en périphérie reliées aux points d’échange<br />
tramways. Mise à part l’extension <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> tramway,<br />
l’année 2005 voit par ailleurs pour trois ans<br />
l’expérimentation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux nav<strong>et</strong>tes fluviales équipées <strong>de</strong><br />
moteurs thermiques. Pour 2006, un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> quatrième<br />
ligne <strong>de</strong> transport collectif en site propre est prévu pour la<br />
pénétrante sud, ainsi qu’une ligne express <strong>de</strong>vant relier le<br />
nord <strong>de</strong> la périphérie. Avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Région, une<br />
première ligne <strong>de</strong> TER « urbain » perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> relier Vertou,<br />
une commune <strong>de</strong> la périphérie, <strong>et</strong> le centre <strong>de</strong> Nantes en 12<br />
mn, contre 30 à 40 mn en voiture.<br />
Concernant maintenant les parkings relais, d’une capacité<br />
actuelle <strong>de</strong> 3000 places, l’on <strong>de</strong>vrait passer à 6000<br />
emplacements en 2010. En matière <strong>de</strong> politique <strong>de</strong><br />
stationnement, un levier qui n’est pas à négliger pour<br />
maîtriser les déplacements, la stratégie adoptée repose sur<br />
une réponse différenciée selon les usagers du<br />
stationnement. Ainsi, le stationnement <strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nts est<br />
encouragé en cœur <strong>de</strong> ville, afin qu’ils ne soient pas tentés<br />
d’utiliser leur véhicule, tandis que pour les visiteurs, la<br />
limitation du temps <strong>de</strong> stationnement assure une meilleure<br />
rotation <strong>de</strong>s places disponibles en cœur <strong>de</strong> ville. A compter<br />
<strong>de</strong> juin 2005, la zone <strong>de</strong> stationnement payante sera<br />
étendue. Preuve <strong>de</strong> l’efficacité <strong>de</strong> ces mesures, en 2003, la<br />
seule intensification <strong>de</strong>s contrôles en centre-ville s’est<br />
traduite par une augmentation <strong>de</strong> 7% <strong>de</strong> la fréquentation <strong>de</strong>s<br />
parkings relais.<br />
Concernant les vélos, le schéma cyclable, qui représente<br />
aujourd’hui près <strong>de</strong> 300 km <strong>de</strong> pistes, vise un total <strong>de</strong> 846<br />
km. Ce schéma inclut aussi un réseau <strong>de</strong> continuité le long<br />
<strong>de</strong>s cours d’eau <strong>de</strong> l’agglomération (vélo-promena<strong>de</strong>,<br />
itinéraires à pieds). Qui plus est, <strong>de</strong>s stationnements<br />
sécurisés pour les <strong>de</strong>ux-roues sont également à l’étu<strong>de</strong>.<br />
Enfin, la communauté urbaine apporte son soutien à<br />
l’association Vélo Campus, qui propose le prêt <strong>de</strong> vélos aux<br />
étudiants pour 30 euros par an. Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s 300 vélos<br />
disponibles, c<strong>et</strong>te initiative fait <strong>de</strong> chaque étudiant cycliste<br />
un ambassa<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la politique cyclable <strong>de</strong> l’agglomération.<br />
Pour finir, Nantes a stimulé la mise en place <strong>de</strong> plans <strong>de</strong><br />
mobilité entreprises : cinq plans ont été signés au printemps<br />
2004, concernant près <strong>de</strong> 13 000 employés. D’autres plans<br />
sont en cours <strong>de</strong> discussion, avec 22 autres entreprises <strong>de</strong><br />
l’agglomération, essentiellement du cœur <strong>de</strong> ville. L’une <strong>de</strong>s<br />
mesures phares consiste à proposer une réduction sur<br />
l’abonnement aux transports collectifs aux employés <strong>de</strong>s<br />
entreprises ayant signé un plan <strong>de</strong> mobilité. Selon le<br />
volontarisme <strong>de</strong> l’entreprise, les autres mesures incluent<br />
notamment la constitution d’un parc <strong>de</strong> vélos <strong>de</strong> service, ou<br />
la distribution <strong>de</strong> tick<strong>et</strong>s <strong>de</strong> bus pour les déplacements<br />
professionnels.<br />
[NDLR : A l’heure où nous m<strong>et</strong>tons sous presse, certains <strong>de</strong>s chiffres présentés<br />
dans c<strong>et</strong>te synthèse ont connu <strong>de</strong> sensibles variations. Pour plus <strong>de</strong> détails, se<br />
renseigner auprès <strong>de</strong> l’auteur.]<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 27
Le plan <strong>de</strong> circulation en centre-ville d’Annecy<br />
Maryse Bouvier (Ville d’Annecy)<br />
Annecy, préfecture <strong>de</strong> la Haute-Savoie, est une ville<br />
moyenne <strong>de</strong> 52 000 habitants incluse dans une<br />
agglomération <strong>de</strong> 134 000 habitants. Sa situation privilégiée<br />
dans les Hautes-Alpes <strong>et</strong> le cach<strong>et</strong> <strong>de</strong> sa vieille ville datant<br />
du Moyen Age, <strong>de</strong> même que son passé industriel, en font<br />
une ville très attractive tant pour son dynamisme<br />
économique, que pour son attrait touristique. Rançon <strong>de</strong> ce<br />
succès, l’agglomération connaît une augmentation régulière<br />
<strong>de</strong> sa population, qui est passée <strong>de</strong> 120 000 habitants en<br />
1990 à 134 000 en 2000, soit une augmentation <strong>de</strong> 11,6% en<br />
dix ans. Les treize communes <strong>de</strong> la communauté<br />
d’agglomérations sont très soucieuses du respect <strong>de</strong><br />
l’environnement, en particulier <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s eaux du<br />
lac. Celui-ci a été considéré en son temps, c’est peut-être<br />
encore le cas, comme l’un <strong>de</strong>s plus purs d’Europe.<br />
La ville d’Annecy a été r<strong>et</strong>enue comme proj<strong>et</strong> pilote du<br />
programme Smile d’élaboration d’un gui<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
recommandations pour la réduction du bruit en ville.<br />
Le trafic automobile induit par les activités a conduit très<br />
tôt la ville à imaginer <strong>de</strong>s solutions pour préserver son cadre<br />
<strong>de</strong> vie. Ainsi, au début <strong>de</strong>s années 70, une première zone<br />
piétonne a été créée dans le centre-ville. Seules y étaient<br />
autorisées, à certaines heures <strong>de</strong> la journée, les livraisons <strong>et</strong><br />
l’accès <strong>de</strong>s riverains. Simultanément, une politique <strong>de</strong><br />
création <strong>de</strong> parkings, gratuits <strong>et</strong> payants, a progressivement<br />
été menée, se concrétisant par la réalisation <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 5000<br />
places <strong>de</strong> parkings à proximité du centre-ville. Très vite, la<br />
lutte contre le bruit a fait partie <strong>de</strong>s priorités politiques <strong>de</strong><br />
la municipalité : un arrêté bruit, plus contraignant que<br />
l’arrêté préfectoral, a été pris en 1991 <strong>et</strong> révisé en 2003.<br />
Depuis 1985, la ville contrôle les véhicules bruyants,<br />
essentiellement les <strong>de</strong>ux-roues, suivant en cela le modèle<br />
suisse. Sur certaines mesures <strong>de</strong> réduction du bruit urbain,<br />
comme l’enfouissement <strong>de</strong>s containers à verres, Annecy a<br />
fait figure <strong>de</strong> ville pionnière. L’interdiction du transit poids<br />
lourds en ville, la réduction <strong>de</strong> la vitesse <strong>de</strong> 50 à 30 km/h,<br />
l’achat <strong>de</strong> véhicules <strong>de</strong> voirie moins bruyants, sont d’autres<br />
aspects <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te politique volontariste. Enfin, symbole du<br />
contact permanent que la ville entr<strong>et</strong>ien avec les habitants,<br />
le bus du service Vie <strong>de</strong>s quartiers sillonne les quartiers afin<br />
d’aller à la rencontre <strong>de</strong>s habitants <strong>et</strong> d’entendre leurs<br />
attentes <strong>et</strong> doléances, lesquelles sont en majorité liées au<br />
bruit.<br />
La loi sur l’air <strong>de</strong> 1996 a introduit l’obligation d’élaborer un<br />
PDU dans toutes les agglomérations <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000<br />
habitants. Le plan <strong>de</strong> l’agglomération d’Annecy, approuvé<br />
en juin 2001, reprend les principaux objectifs préconisés par<br />
c<strong>et</strong>te loi, à savoir : réduction du trafic ; développement <strong>de</strong>s<br />
transports collectifs ; partage <strong>de</strong> l’espace ; organisation du<br />
stationnement ; maîtrise du transport <strong>et</strong> <strong>de</strong>s livraisons ;<br />
usage accru <strong>de</strong>s transports en commun.<br />
Le diagnostic élaboré en préparation à la mise en place du<br />
PDU a montré <strong>de</strong>s perspectives d’accroissement<br />
démographique <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 11% à l’horizon 2010, soit<br />
145 000 habitants <strong>de</strong> plus. Les prévisions indiquaient, dans<br />
l’hypothèse qu’aucune mesure ne soit prise, que c<strong>et</strong>te<br />
croissance démographique <strong>de</strong>vrait se traduire par une hausse<br />
<strong>de</strong> 40 % <strong>de</strong>s déplacements, passant <strong>de</strong> 300 000 à 413 000<br />
déplacements par jour. Autre constat fort regr<strong>et</strong>table, la<br />
part modale <strong>de</strong> l’automobile représentait plus <strong>de</strong> 75% <strong>de</strong>s<br />
déplacements, avec <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> trafic qui paralysaient le<br />
centre ville pendant <strong>de</strong> longues heures, rendant difficile<br />
l’accès aux commerces <strong>et</strong> aux services. À signaler que les<br />
attentes <strong>de</strong> la population étaient très fortes en matière <strong>de</strong><br />
qualité <strong>de</strong> l’air, <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
préservation <strong>de</strong>s espaces. La décision a été prise dans un<br />
premier temps <strong>de</strong> rendre les transports publics plus<br />
performants <strong>et</strong> plus attractifs. le réseau d’autobus étant<br />
principalement pénalisé dans sa traversée du centre ville,<br />
l’amélioration <strong>de</strong>s performances <strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> bus<br />
nécessitait la création <strong>de</strong> sites propres.<br />
La réflexion sur l’élaboration d’un nouveau plan <strong>de</strong><br />
circulation a été initiée conjointement à la décision prise en<br />
1998 <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s transports en commun en site propre.<br />
L’objectif principal ? Supprimer le fort trafic <strong>de</strong> transit <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>ssertes — 140 000 véhicules par jour — qui traversait la<br />
ville d’est en ouest sur <strong>de</strong>ux axes principaux. Il convenait en<br />
même temps d’assurer l’accessibilité aux commerces <strong>et</strong> aux<br />
parkings, aux logements pour les riverains, tout en<br />
améliorant le cheminement <strong>de</strong>s piétons <strong>et</strong> <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux-roues. Il<br />
s’agissait aussi <strong>de</strong> gagner en qualité <strong>de</strong> vie, sur le plan du<br />
bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> la pollution notamment, <strong>de</strong> récupérer à<br />
l’occasion <strong>de</strong>s espaces publics, tout en réduisant l’insécurité<br />
routière. Le nouveau plan <strong>de</strong> circulation a été élaboré sur le<br />
principe <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cordons interdisant le transit du centreville<br />
: une roca<strong>de</strong> <strong>de</strong> contournement <strong>et</strong> un anneau <strong>de</strong><br />
distribution plus central, reliés par <strong>de</strong>s voies d’accès. Pour<br />
limiter les possibilités <strong>de</strong> transit, <strong>de</strong>ux poches presque<br />
étanches ont été <strong>de</strong>ssinées dans l’hypercentre : les sens <strong>de</strong><br />
circulation y sont tels que, quand on pénètre ces poches, on<br />
doit en ressortir par le même endroit, interdisant ainsi la<br />
traversée <strong>de</strong> la ville d’est en ouest. Le tout aboutit à un<br />
cœur <strong>de</strong> ville où les voies autorisées aux voitures sont toutes<br />
en sens unique <strong>et</strong> les voies réservées aux autobus sont à<br />
contresens. Une configuration qui supprime toute utilisation<br />
<strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> bus par les voitures. Entre 1996 <strong>et</strong> 2000, les<br />
différentes simulations <strong>de</strong> trafic réalisées ont permis<br />
d’alimenter la décision politique mais ont aussi servi <strong>de</strong><br />
support d’information au cours <strong>de</strong> réunions publiques. Le<br />
proj<strong>et</strong> r<strong>et</strong>enu par Annecy s’est également appuyé sur la<br />
création <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux tunnels routiers. Leur avantage est<br />
double : écoulement du trafic nord-sud en souterrain <strong>et</strong><br />
libération <strong>de</strong> vastes espaces <strong>de</strong>stinés à être reconquis par les<br />
piétons. L’aménagement <strong>de</strong>s tunnels a nécessité la<br />
construction d’ouvrages spécifiques antibruit pour tenir<br />
compte <strong>de</strong> la proximité d’habitations. Une large<br />
concertation a été menée, afin que chacun puisse faire<br />
entendre son point <strong>de</strong> vue : l’inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s riverains tenait<br />
à la facilité d’accès à leur logement, aux conditions <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>sserte ; celle <strong>de</strong>s commerçants — ce qui n’étonnera<br />
personne — était focalisée sur la perte éventuelle <strong>de</strong><br />
clientèle qu’une baisse du trafic automobile pourrait<br />
amener. La mise en place <strong>de</strong>s nouvelles règles <strong>de</strong> circulation<br />
dans le centre-ville nécessitant la création <strong>de</strong> nouveaux sens<br />
<strong>de</strong> circulation, <strong>de</strong> verrous <strong>et</strong> <strong>de</strong> circulation à contresens, il a<br />
été décidé d’intervenir la nuit. En une nuit, celle du 2 au 3<br />
juill<strong>et</strong> 2001, balis<strong>et</strong>tes en plastique, barrières, bidons<br />
métalliques <strong>et</strong> autres fléchages provisoires ont <strong>de</strong>ssiné le<br />
nouveau plan <strong>de</strong> circulation d’Annecy. Les travaux, qui se<br />
sont échelonnés sur trois ans, ont été programmés rue par<br />
rue, afin <strong>de</strong> minimiser les situations <strong>de</strong> blocage. Certaines<br />
réactions ont été plutôt hostiles, la ville étant accusée <strong>de</strong><br />
favoriser les habitants <strong>et</strong> les commerçants, au détriment <strong>de</strong>s<br />
autres usagers.<br />
Quel premier bilan tirer <strong>de</strong> ce nouveau plan <strong>de</strong> circulation ?<br />
S’il est trop tôt pour réaliser un bilan chiffré, il est certain<br />
que plusieurs objectifs sont déjà atteints : grâce aux sites<br />
propres, les temps <strong>de</strong> parcours <strong>de</strong>s bus se sont réduits <strong>et</strong><br />
leur fréquentation a augmenté ; le trafic automobile dans le<br />
centre a fortement diminué, réduisant donc le bruit <strong>et</strong> la<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
pollution ; l’accès aux commerces <strong>et</strong> aux parkings publics<br />
s’est amélioré, avec un maintien, voire même une<br />
augmentation, <strong>de</strong>s parts <strong>de</strong> marché <strong>de</strong>s commerces <strong>de</strong><br />
centre-ville par rapport à la périphérie <strong>et</strong> aux zones<br />
commerciales <strong>de</strong> type hypermarché. Ont également été<br />
constatées une diminution du nombre d’acci<strong>de</strong>nts, liée à la<br />
réduction <strong>de</strong> la vitesse, une forte augmentation <strong>de</strong> l’usage<br />
du vélo en ville — ceux-ci sont tolérés dans les voies <strong>de</strong> bus<br />
—, <strong>et</strong> une augmentation <strong>de</strong> l’emprise <strong>de</strong>s zones piétonnes.<br />
Malheureusement, le nouveau plan a aussi ses eff<strong>et</strong>s<br />
négatifs. En premier lieu, il faut déplorer le report <strong>de</strong>s<br />
difficultés <strong>de</strong> circulation sur les voies <strong>de</strong> contournement. On<br />
s’en doute, sur ces axes, bruit <strong>et</strong> pollution ont augmenté, ce<br />
que confirment une opération <strong>de</strong> comptage <strong>de</strong>s véhicules <strong>et</strong><br />
une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la pollution <strong>de</strong> l’air. Les “nouveaux gênés”,<br />
s’ils acceptent le principe d’un nouveau plan <strong>de</strong> circulation,<br />
n’enten<strong>de</strong>nt toutefois pas en supporter seuls les<br />
conséquences <strong>et</strong> réclament <strong>de</strong>s mesures compensatoires.<br />
Que faire donc pour ces axes nouvellement encombrés,<br />
notamment la route nationale 508 qui, été comme hiver,<br />
sert <strong>de</strong> voie <strong>de</strong> transit vers les stations touristiques <strong>de</strong><br />
Savoie ? Une <strong>de</strong>s solutions pour désengorger c<strong>et</strong>te voie<br />
principale serait <strong>de</strong> créer un accès direct au lac au moyen<br />
d’un tunnel percé à travers la montagne. Ce proj<strong>et</strong> est à<br />
l’étu<strong>de</strong>, mais l’État semble réticent à le financer. Une autre<br />
solution consisterait à tenter <strong>de</strong> fluidifier la circulation en<br />
remplaçant les feux tricolores <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te artère par <strong>de</strong>s ronds<br />
points giratoires. Quant à la roca<strong>de</strong> <strong>de</strong> contournement, <strong>de</strong>ux<br />
fois <strong>de</strong>ux voies séparées par un îlot central, il conviendrait<br />
<strong>de</strong> lui redonner <strong>de</strong>s caractéristiques <strong>de</strong> boulevard urbain :<br />
les immeubles d’habitation qui la jouxtent, sans être <strong>de</strong>s<br />
points noirs du bruit, sont en eff<strong>et</strong> soumis à <strong>de</strong>s niveaux<br />
<strong>sonores</strong> assez élevés.<br />
Ces eff<strong>et</strong>s négatifs du nouveau plan <strong>de</strong> circulation rappellent<br />
l’importance d’inclure habitants, commerçants <strong>et</strong> usagers<br />
dans un processus <strong>de</strong> concertation permanent. À toutes les<br />
étapes, <strong>et</strong> même une fois le plan mis en place, <strong>de</strong>s<br />
améliorations peuvent être apportées, ce qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
souplesse, mais exige aussi une volonté politique forte pour<br />
résister aux critiques. Par exemple, certains commerçants<br />
ont eu à subir <strong>de</strong>s baisses sensibles <strong>de</strong> leur chiffre d’affaire<br />
pendant les travaux.<br />
Quoi qu’il en soit, l’attractivité <strong>de</strong> la ville reste forte. Mais,<br />
les déplacements continuant d’augmenter, les efforts<br />
engagés doivent être continués. Le plan <strong>de</strong> circulation n’est<br />
qu’un <strong>de</strong>s outils venant s’inscrire dans un dispositif plus<br />
large : le PDU. La circulation <strong>de</strong> transit a pu être jugulée,<br />
mais en la reportant sur d’autres axes. Alors que le véritable<br />
objectif initial n’était pas <strong>de</strong> déplacer la circulation mais <strong>de</strong><br />
la faire diminuer. Prochaine étape (actuellement en cours<br />
<strong>de</strong> réalisation) : la création <strong>de</strong> parkings relais. Il serait vain<br />
<strong>de</strong> vouloir limiter l’action au seul centre-ville ; d’autres<br />
aménagements restent à réaliser, pour que chacun puisse<br />
parcourir <strong>et</strong> faire usage <strong>de</strong>s rues à son rythme.<br />
Présentation du gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> recommandations pratiques pour la réduction du<br />
bruit émis par le trafic<br />
Catherine Serve (CETE <strong>de</strong> l’Est)<br />
La coordination <strong>de</strong> l’atelier bruit du proj<strong>et</strong> Smile a été<br />
confiée à l’A<strong>de</strong>me <strong>et</strong> l’EAUE <strong>de</strong> Berlin (European Aca<strong>de</strong>my of<br />
the Urban Environment). Pour l’assistance technique<br />
spécialisée sur le suj<strong>et</strong> du bruit, l’A<strong>de</strong>me s’est rapprochée<br />
du <strong>Centre</strong> d’étu<strong>de</strong>s techniques <strong>de</strong> l’équipement <strong>de</strong> l’Est,<br />
basé à Strasbourg, l’EAUE ayant fait appel à Lärmkontor, un<br />
bureau d’étu<strong>de</strong> en acoustique basé à Hambourg. Un groupe<br />
d’experts, issus <strong>de</strong> six pays européens (Espagne, Italie,<br />
Autriche, Danemark, Allemagne <strong>et</strong> France), a également été<br />
constitué.<br />
Les missions <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier sont au nombre <strong>de</strong> quatre. Il<br />
convenait dans un premier temps <strong>de</strong> passer en revue les<br />
initiatives diverses <strong>de</strong> réduction du bruit mises en place dans<br />
les villes européennes. L’analyse <strong>de</strong> ce panorama <strong>de</strong>vait<br />
ensuite faire ressortir les aspects positifs <strong>de</strong>s mesures<br />
adoptées, mais également, le cas échéant, les eff<strong>et</strong>s<br />
néfastes observés. Le troisième vol<strong>et</strong> <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> a consisté<br />
à sélectionner <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s pilotes regroupant les exemples<br />
les plus novateurs <strong>de</strong> lutte contre le bruit en ville. Enfin, la<br />
rédaction d’un gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> recommandations est venue<br />
concrétiser l’ensemble <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te démarche.<br />
Recensement <strong>de</strong>s initiatives<br />
Le questionnaire, adressé dans 86 villes <strong>de</strong> douze pays<br />
différents, comportait déjà un effort <strong>de</strong> classement<br />
typologique <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit. Ces<br />
catégories sont au nombre <strong>de</strong> huit : réduction <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité<br />
du trafic ; réduction <strong>de</strong> la vitesse (pistes cyclables,<br />
interdictions <strong>de</strong> circulation <strong>de</strong>s poids lourds) ;<br />
renouvellement <strong>de</strong>s véhicules <strong>de</strong> transport en commun ;<br />
changement <strong>de</strong> la couche <strong>de</strong> roulement ; écrans<br />
acoustiques ; isolement <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> ; planification urbaine ;<br />
mesures organisationnelles (mesures non techniques, à<br />
caractère réglementaire le plus souvent, comme les<br />
restrictions d’horaires pour les livraisons, mise en place <strong>de</strong><br />
chartes, <strong>et</strong>c.) <strong>et</strong> stratégiques (campagnes d’information <strong>de</strong><br />
sensibilisation du public). Certaines <strong>de</strong> ces mesures<br />
stratégiques <strong>et</strong> organisationnelles n’étaient pas<br />
exclusivement vouées à réduire le bruit, mais participaient<br />
d’une logique plus large, correspondant à une mission<br />
environnementale fixée pour la ville.<br />
Le taux <strong>de</strong> r<strong>et</strong>our <strong>de</strong>s questionnaires, 63%, soit 54 villes, est<br />
plutôt satisfaisant. La taille <strong>de</strong> ces villes — il ne s’agit pas<br />
d’agglomérations mais bien <strong>de</strong> villes au sens administratif du<br />
terme — se répartit en douze p<strong>et</strong>ites villes (<strong>de</strong> moins <strong>de</strong><br />
100 000 habitants), 19 villes moyennes (<strong>de</strong> population<br />
comprise entre 100 000 <strong>et</strong> 250 000 habitants) <strong>et</strong> 23 gran<strong>de</strong>s<br />
villes (<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 250 000 habitants). Peu <strong>de</strong> réponses ont<br />
été obtenues concernant le rapport coût-ren<strong>de</strong>ment <strong>de</strong>s<br />
mesures mises en place. Sans doute faut-il m<strong>et</strong>tre cela sur le<br />
compte du fait que ces informations n’étaient pas<br />
disponibles <strong>et</strong> qu’elles nécessitaient un travail conséquent<br />
pour les obtenir. Ou encore, que certaines villes n’ont pas<br />
souhaité communiquer c<strong>et</strong>te information. De même,<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s mesures a été peu renseignée dans les<br />
questionnaires. Une raison à cela : très souvent, les mesures<br />
mises en place étaient trop récentes pour pouvoir en dresser<br />
le bilan.<br />
L’analyse <strong>de</strong>s réponses révèle que les <strong>de</strong>ux mesures les plus<br />
couramment mises en œuvre sont celles qui agissent<br />
directement sur le trafic, dans sa <strong>de</strong>nsité comme dans sa<br />
vitesse. Les autres mesures les plus “populaires”, elles aussi<br />
utilisées par au moins la moitié <strong>de</strong>s villes recensées, sont la<br />
planification urbaine, le changement <strong>de</strong> la couche <strong>de</strong><br />
roulement <strong>et</strong> le renouvellement du parc <strong>de</strong> véhicules.<br />
Les principaux écueils<br />
Chaque fiche du gui<strong>de</strong> — il y a une fiche par mesure <strong>de</strong><br />
réduction du bruit — fait donc une large place aux<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 29
problèmes rencontrés par les municipalités dans la mise en<br />
place <strong>de</strong>s mesures. Les surprises, bonnes ou mauvaises, qui<br />
n’ont pas manqué <strong>de</strong> survenir, y sont également traitées.<br />
Quels sont donc les principaux écueils à éviter ? Tout<br />
d’abord, il convient <strong>de</strong> s’interroger si le “jeu en vaut bien la<br />
chan<strong>de</strong>lle” : autrement dit, avant <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place<br />
certaines mesures qui requièrent une forte mobilisation <strong>de</strong><br />
la part <strong>de</strong>s services, ou une concertation importante avec le<br />
public, il importe <strong>de</strong> savoir si le bénéfice en termes <strong>de</strong><br />
réduction du bruit sera suffisamment conséquent pour que<br />
tous ces efforts apparaissent louables. Une trop faible<br />
amplitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> réduction du niveau sonore, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 1, 2<br />
ou 3 dB(A), a toutes les chances <strong>de</strong> ne pas être perçue. À<br />
l’arrivée, l’initiative est vécue négativement. Deuxième<br />
remarque : attention à bien distinguer réduction du niveau<br />
sonore <strong>et</strong> réduction <strong>de</strong> la perturbation due au bruit. Par<br />
exemple, un gain <strong>de</strong> 2 ou 3 dB(A) obtenu par la suppression<br />
<strong>de</strong> la circulation <strong>de</strong>s poids lourds peut être perçu, sur le plan<br />
du ressenti <strong>de</strong> la gêne, <strong>de</strong> manière plus positive qu’un gain<br />
<strong>de</strong> 4 à 5 dB(A) obtenu par une réduction <strong>de</strong> vitesse mais avec<br />
circulation <strong>de</strong>s poids lourds. Troisième écueil,<br />
l’augmentation <strong>de</strong> vitesse qui est très souvent associée à la<br />
rénovation d’une couche <strong>de</strong> roulement <strong>et</strong> qui a obligé bon<br />
nombre <strong>de</strong> villes à associer une limitation <strong>de</strong> la vitesse au<br />
changement d’enrobé.<br />
Quand on procè<strong>de</strong> à l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> d’un immeuble,<br />
chacun sait que l’atténuation du bruit extérieur a un eff<strong>et</strong><br />
connexe qui mérite quelques aménagements <strong>et</strong> précautions :<br />
en eff<strong>et</strong>, dans un immeuble nouvellement insonorisé contre<br />
les bruits extérieurs, <strong>de</strong> nouveaux bruits intérieurs, qui n’ont<br />
plus l’anonymat <strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> circulation qui dominaient<br />
l’ambiance sonore auparavant, font “irruption” dans les<br />
appartements. Mis à part c<strong>et</strong> exemple bien connu, l’analyse<br />
menée dans le cadre <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> a pu lister quelques autres<br />
eff<strong>et</strong>s fortuits qu’il convient <strong>de</strong> bien gar<strong>de</strong>r à l’esprit. Il en<br />
va ainsi <strong>de</strong>s coûts d’entr<strong>et</strong>ien <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit, qui sont trop souvent sous estimées, voire même non<br />
provisionnées. Autre mise en gar<strong>de</strong>, l’établissement d’une<br />
cartographie du bruit, préalable fréquent à la mise en place<br />
<strong>de</strong> mesures <strong>de</strong> réduction du bruit, présente le risque qu’un<br />
phénomène <strong>de</strong> dépréciation immobilière frappe les quartiers<br />
désignés comme bruyants, <strong>et</strong> que les zones calmes<br />
connaissent au contraire une inflation. Les mesures <strong>de</strong><br />
réduction du bruit peuvent aussi occasionner <strong>de</strong>s<br />
changements dans les pratiques d’urbanisme. Évolutions qui<br />
ne sont pas forcément négatives, mais mieux vaut les avoir<br />
prévues que les subir. On prêtera bien sûr attention aux<br />
eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> circulation : même si les seuils<br />
réglementaires sont respectés, une zone calme qui <strong>de</strong>vient<br />
passante, est moins calme ; une déviation n’est pas<br />
forcément bien vécue, suivant qu’on est riverain,<br />
commerçant, usager en transit, <strong>et</strong>c. Enfin, <strong>de</strong>rnier<br />
avertissement, non <strong>de</strong>s moindres : pour être acceptée <strong>et</strong><br />
porter ses fruits, une mesure <strong>de</strong> réduction du bruit doit,<br />
dans la majorité <strong>de</strong>s cas, être accompagnée d’un effort<br />
d’information <strong>de</strong>s populations concernées.<br />
Les proj<strong>et</strong>s pilotes<br />
Dix villes ont été r<strong>et</strong>enues comme proj<strong>et</strong> pilote. Annecy,<br />
pour la réduction <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité du trafic ; Berlin Essel, pour<br />
la réduction <strong>de</strong> la part modale <strong>de</strong>s poids lourds ; Breda pour<br />
les réductions <strong>de</strong> vitesse ; Parme, pour le renouvellement du<br />
parc <strong>de</strong> véhicules <strong>de</strong> transports en commun ; Valence,<br />
(Espagne) pour le changement <strong>de</strong> couche <strong>de</strong> roulement ;<br />
Vienne (Autriche), pour les écrans antibruit ; Göteborg, pour<br />
les isolements <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s ; Modène, pour la planification<br />
urbaine ; Paris, pour l’approche stratégique <strong>et</strong> Madrid, pour<br />
l’approche organisationnelle.<br />
Le gui<strong>de</strong><br />
Dans une première partie, le gui<strong>de</strong> consacre une vingtaine<br />
<strong>de</strong> pages à un rappel <strong>de</strong>s connaissances acquises sur le suj<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la réduction du bruit en ville. Par exemple, une étu<strong>de</strong><br />
réalisée à l’occasion <strong>de</strong> la construction d’un mur antibruit à<br />
l’Hay-les-Roses, a eu pour principale conclusion que la gêne<br />
commence à baisser à partir d’un gain en niveau sonore <strong>de</strong> 6<br />
dB(A). Ce qui ne signifie pas qu’il faut renoncer aux mesures<br />
qui ne pourraient apporter <strong>de</strong> tels gains, mais plutôt qu’il<br />
convient <strong>de</strong> prévoir un assortiment <strong>de</strong> mesures qui,<br />
ensemble, pourront se traduire par un gain <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5<br />
ou 6 dB.<br />
Si l’on prend l’exemple <strong>de</strong> la création d’une piste cyclable,<br />
la fiche consacrée à ce thème précise, mais si cela semble<br />
évi<strong>de</strong>nt, qu’il convient d’évaluer la vitesse maximale à<br />
adopter sur les voies où l’on introduit les pistes cyclables. La<br />
fiche rappelle également le besoin d’un minimum <strong>de</strong><br />
concertation interne entre les différents services <strong>de</strong> la ville,<br />
afin <strong>de</strong> connaître les mesures <strong>de</strong> construction <strong>et</strong><br />
d’urbanisme savoir, par exemple, si d’éventuels travaux<br />
d’intervention sur le réseau <strong>de</strong> gaz, d’électricité ou <strong>de</strong><br />
télécommunication sont prévues au droit <strong>de</strong> la piste cyclable<br />
en question, dans un avenir plus ou moins proche. Au<br />
nombre <strong>de</strong>s recommandations, toujours s’agissant <strong>de</strong>s pistes<br />
cyclables, on r<strong>et</strong>iendra qu’il faut s’efforcer <strong>de</strong> donner le<br />
plus souvent possible la priorité aux vélos, <strong>et</strong> s’assurer que<br />
les sites soient bien i<strong>de</strong>ntifiées, non déviées, les carrefours<br />
bien sécurisés <strong>et</strong> que le réseau soit bien bidirectionnel<br />
(qu’on puisse aller du point A au point B <strong>et</strong> vice-versa).<br />
Le gui<strong>de</strong> sera traduit en français <strong>et</strong> diffusé à la fois via<br />
Intern<strong>et</strong> <strong>et</strong> sous forme papier.<br />
Les pistes cyclables prioritaires <strong>de</strong> Breda<br />
La ville <strong>de</strong> Breda a été r<strong>et</strong>enue en tant que ville pilote à la<br />
fois pour le développement <strong>de</strong> ses pistes cyclables <strong>et</strong> pour la<br />
réduction <strong>de</strong> vitesse. L’originalité du réseau mis en place ?<br />
Un système <strong>de</strong> pistes cyclables à <strong>de</strong>ux vitesses : un grand<br />
réseau <strong>de</strong>sservant la ville, sans carrefours : chaque traversée<br />
<strong>de</strong> voie s’y fait par souterrain ou passerelle ; un réseau avec<br />
carrefour mais où les vélos ont en permanence la priorité sur<br />
les voitures. Qui plus est, <strong>de</strong> nombreux parkings à vélo, vrais<br />
abris qui n’ont rien à voir avec les simples anneaux auxquels<br />
l’on attache son vélo, sont proposés à travers la ville.<br />
Côté réduction <strong>de</strong> la vitesse, la ville <strong>de</strong> Breda s’est<br />
distinguée par une mesure plutôt hardie : la transformation<br />
d’une autoroute en voie <strong>de</strong> communication urbaine. Breda<br />
était traversée par une <strong>de</strong>ux fois <strong>de</strong>ux voies, un trafic <strong>de</strong><br />
60 000 véhicules par jour, dont un quart <strong>de</strong> poids lourds, <strong>et</strong><br />
une vitesse limitée à 70 km/h. En 1994, c<strong>et</strong> axe est <strong>de</strong>venu<br />
une <strong>de</strong>ux fois une voie, avec un trafic <strong>de</strong> 24 000 véhicules<br />
par jour, 4% seulement <strong>de</strong> poids lourds, <strong>et</strong> une vitesse<br />
limitée à 50 km/h. Des radars, une couche <strong>de</strong> surface<br />
silencieuse, <strong>de</strong>s pistes cyclables <strong>de</strong> chaque côté, séparées<br />
<strong>de</strong> la route par une ban<strong>de</strong> réservée au stationnement, <strong>de</strong>s<br />
trottoirs élargis, complètent le dispositif. Le reste du trafic<br />
a été détourné sur une voie <strong>de</strong> déviation qui contourne la<br />
ville.<br />
Les écrans transparents <strong>de</strong> Vienne<br />
Le caractère exemplaire <strong>de</strong> l’initiative menée à Vienne, qui<br />
a donc contribué à la r<strong>et</strong>enir comme site pilote, rési<strong>de</strong> dans<br />
l’effort <strong>de</strong> préservation <strong>de</strong>s zones calmes déployé par la<br />
municipalité. Un enjeu, rappelons-le, qui est au cœur <strong>de</strong> la<br />
directive 2002/49/CE. Ainsi, lorsqu’une route bor<strong>de</strong> un parc,<br />
on protège l’ambiance sonore <strong>de</strong> ce parc par <strong>de</strong>s écrans<br />
acoustiques transparents. Pour protéger la cour <strong>de</strong>sservant<br />
un ensemble d’immeubles d’habitat social, une structure<br />
monumentale transparente, haute <strong>de</strong> cinq étages dans<br />
laquelle on a ménagé un portail d’entrée, apporte à la fois<br />
PAGE 30<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
son pouvoir <strong>de</strong> protection acoustique <strong>et</strong> son esthétisme<br />
mo<strong>de</strong>rne. Dernier détail, mais qui a son importance quand<br />
on sait le frein que constitue le coût <strong>de</strong> telles initiatives,<br />
certains <strong>de</strong>s écrans qui jalonnent Breda servent d’espace<br />
publicitaire, mais tout en conservant leur transparence,<br />
contribuant ainsi à rembourser une partie <strong>de</strong>s sommes<br />
investies.<br />
La planification urbaine à Modène<br />
Dans le cadre <strong>de</strong> la politique italienne <strong>de</strong> réduction du bruit,<br />
la ville <strong>de</strong> Modène a défini un zonage acoustique du<br />
territoire <strong>de</strong> la ville servant <strong>de</strong> socle à <strong>de</strong>s actions tant<br />
préventives que curatives. Sept zones ont été adoptées,<br />
avec pour chacune <strong>de</strong>s plans d’action <strong>et</strong> <strong>de</strong>s seuils <strong>de</strong> bruit à<br />
respecter, <strong>de</strong> jour comme <strong>de</strong> nuit. D’une part, toute<br />
construction nouvelle ne peut dépasser les niveaux<br />
d’exposition au bruit prévus pour la zone ; d’autre part, les<br />
habitations existantes dépassant ces seuils font l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
mesures <strong>de</strong> rattrapage visant à r<strong>et</strong>rouver les niveaux <strong>sonores</strong><br />
réglementaires <strong>de</strong> la zone. Deux indicateurs ont guidé ces<br />
actions : une évaluation <strong>de</strong> l’impact du bruit, consistant,<br />
pour toute nouvelle activité bruyante ou infrastructure, a<br />
comparer les niveaux “avant” <strong>et</strong> “après” l’implantation ;<br />
une évaluation du “climat <strong>de</strong> bruit”, sorte d’indicateur<br />
d’ambiance sonore perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> vérifier que les niveaux<br />
<strong>de</strong> bruit sont conformes lors <strong>de</strong> nouveaux proj<strong>et</strong>s<br />
rési<strong>de</strong>ntiels. En parallèle, une structure <strong>de</strong> concertation<br />
perm<strong>et</strong> aux habitants concernés <strong>de</strong> prendre part à la<br />
définition <strong>de</strong>s plans locaux <strong>de</strong> réduction du bruit. À noter<br />
aussi que les <strong>de</strong>ux indicateurs <strong>de</strong> bruit sont rendus publics.<br />
Ainsi, l’ensemble <strong>de</strong>s intervenants — notamment les<br />
architectes, qui collaborent beaucoup à Modène avec les<br />
spécialistes du bruit — ont les moyens <strong>de</strong> suivre ces enjeux.<br />
Sur la base <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit, se prennent, par exemple<br />
pour redonner une bonne qualité d’environnement sonore à<br />
un site rési<strong>de</strong>ntiel, certaines décisions, qui restent<br />
raisonnables dans leur ampleur : renforcer un remblai,<br />
construire un écran acoustique sur quelques dizaines <strong>de</strong><br />
mètres, supprimer un immeuble pour le reconstruire<br />
ailleurs, transformer <strong>de</strong>s bâtiments d’habitations en<br />
commerces, en immeubles administratifs ou <strong>de</strong> bureau.<br />
Débat<br />
Moins <strong>de</strong> bruit grâce aux ronds-points ?<br />
Les ronds-points sont ils vraiment efficaces pour fluidifier le<br />
trafic, <strong>et</strong> quand bien même ils le seraient, apportent-ils un<br />
mieux en termes <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> pollution <strong>de</strong> l’air ? Telle est<br />
en substance la première question soulevée au cours <strong>de</strong> ce<br />
débat. À Annecy, comme l’a montré Maryse Bouvier, <strong>de</strong>s<br />
ronds-points ayant remplacé certains feux tricolores, le<br />
trafic a gagné en fluidité. Mais une étu<strong>de</strong> menée par la DDE<br />
<strong>de</strong> Haute-Savoie indique qu’il ne faut pas attendre <strong>de</strong>s<br />
ronds-points <strong>de</strong> gain significatif en termes <strong>de</strong> pollution <strong>de</strong><br />
l’air. Ce qui vaut pour la pollution vaut-il aussi pour le<br />
bruit ? D’autre part, sur une artère à fort trafic, où trois ou<br />
quatre ronds-points doivent se succé<strong>de</strong>r, certains se<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt s’il y a une différence entre un rond-point<br />
engorgé <strong>et</strong> un feu tricolore. À Nantes, que certains<br />
n’hésitent pas à présenter comme la capitale française du<br />
rond-point, il apparaît que les ronds-points fluidifient<br />
effectivement le trafic, même sur <strong>de</strong>s pénétrantes urbaines<br />
importantes. Quoi qu’il en soit, leur impact sur le bruit reste<br />
incertain. Selon Philippe Ritter (communauté urbaine <strong>de</strong><br />
Lyon), l’expérience montre qu’un trafic entièrement<br />
congestionné est souvent moins bruyant qu’un trafic plus<br />
flui<strong>de</strong>. Mais, pour en avoir le cœur n<strong>et</strong>, rien ne vaut une<br />
campagne <strong>de</strong> mesure. Pour Judicaël Picaut (Laboratoire<br />
Central <strong>de</strong>s Ponts-<strong>et</strong>-Chaussées, LCPC), l’impact acoustique<br />
<strong>de</strong>s ronds-points relève du cas par cas : c’est en tout cas ce<br />
qu’indique une étu<strong>de</strong> du Laboratoire régional <strong>de</strong> Blois. On<br />
r<strong>et</strong>iendra non sans intérêt qu’une étu<strong>de</strong> menée par le LCPC<br />
sur l’impact acoustique <strong>de</strong>s aménagements tels que rondspoints,<br />
feux tricolores <strong>et</strong> chicanes <strong>de</strong>vrait se concrétiser par<br />
la formulation <strong>de</strong> modèles <strong>de</strong> prévision.<br />
Les rues piétonnes, forcément moins<br />
bruyantes ?<br />
La discussion a ensuite porté sur les voies piétonnes <strong>et</strong> leurs<br />
éventuels bienfaits sur le bruit. La requalification d’une voie<br />
en rue piétonne constitue certes une solution radicale pour<br />
supprimer le bruit routier, mais sa réappropriation par les<br />
piétons peut réserver <strong>de</strong>s surprises. Ainsi, M. Ritter a-t-il<br />
mentionné qu’un relevé acoustique effectué à Lyon le jour<br />
<strong>de</strong> En ville sans ma voiture avait montré, dans <strong>de</strong>s quartiers<br />
inattendus, un L Aeq(7h—22h) plus élevé que lorsque les<br />
automobiles y circulent. Quant à la nuit, il est bien connu<br />
que le caractère piétonnier d’une rue dans un quartier<br />
animé est parfois source <strong>de</strong> nuisances <strong>sonores</strong>. D’où<br />
l’intérêt, pour M. Ritter, <strong>de</strong> la métrologie pour contrôler le<br />
bénéfice sonore d’une voie piétonne.<br />
Pour Philippe Woloszyn (laboratoire Cerma), une<br />
manifestation comme la journée En ville sans ma voiture ne<br />
doit s’analyser que globalement : dans bien <strong>de</strong>s villes, c<strong>et</strong>te<br />
journée expérimentale consiste tout au plus à reporter la<br />
circulation automobile d’un endroit à un autre, ce qui<br />
revient à gagner 1,5 à 3 dB(A) à un endroit pour augmenter<br />
le niveau sonore <strong>de</strong> 5 ou 6 dB(A) ailleurs, sur les roca<strong>de</strong>s ou<br />
les rues avoisinantes. Sur le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’impact sonore d’une<br />
rue piétonne, M. Woloszyn considère qu’une évaluation<br />
purement quantitative, ne tenant compte que <strong>de</strong>s niveaux<br />
<strong>sonores</strong>, n’est pas suffisante. Pour lui, la piétonisation d’une<br />
rue, si elle n’apporte pas forcément un mieux sur le plan du<br />
niveau sonore global, a néanmoins un eff<strong>et</strong> sur la<br />
composition, la tonalité <strong>de</strong>s ambiances <strong>sonores</strong>. Nantes, <strong>de</strong><br />
1990 à 1995, a fait figure <strong>de</strong> ville pilote avec la réalisation,<br />
en partenariat avec le CNRS, d’une vaste cartographie<br />
qualitative <strong>de</strong>s ambiances <strong>sonores</strong> du centre historique<br />
nantais. C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> a justement servi à requalifier le plan<br />
<strong>de</strong> circulation, notamment le circuit cœur. Au croisement <strong>de</strong><br />
la mesure acoustique <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’évaluation qualitative du<br />
paysage sonore, <strong>de</strong>s modèles pourraient se perfectionner <strong>et</strong><br />
constituer une ai<strong>de</strong> précieuse pour les collectivités<br />
territoriales.<br />
De l’importance du nombre <strong>de</strong> personnes<br />
affectées par le bruit<br />
La directive sur le bruit dans l’environnement accor<strong>de</strong> certes<br />
<strong>de</strong> l’importance aux niveaux <strong>de</strong> bruit, mais elle se<br />
préoccupe encore davantage du nombre <strong>de</strong> personnes<br />
affectées par le bruit. Lors <strong>de</strong> la redéfinition d’un plan <strong>de</strong><br />
circulation, il y aurait grand intérêt à raisonner en termes <strong>de</strong><br />
dose totale <strong>de</strong> bruit perçu, <strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> population<br />
soumise au bruit, <strong>et</strong> pas seulement en termes <strong>de</strong> niveau<br />
sonore d’une rue.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 31
Le péage urbain <strong>de</strong> Londres : <strong>de</strong>stination du<br />
produit <strong>de</strong> la taxe ?<br />
À Londres, pour les dix ans à venir, le produit du péage<br />
urbain doit être réinvesti dans le système <strong>de</strong> transport <strong>de</strong> la<br />
ville. À l’heure actuelle, les bénéfices dégagés servent à<br />
rembourser les sommes investies préalablement à l’entrée<br />
en vigueur du péage : création <strong>de</strong> voies d’autobus, <strong>de</strong> voies<br />
cyclables, mo<strong>de</strong>rnisation du parc d’autobus, <strong>et</strong>c. Il n’est<br />
ensuite pas prévu d’affecter les gains à <strong>de</strong>s mesures<br />
environnementales, telles que la surveillance du bruit, mais<br />
à <strong>de</strong>s mesures d’aménagement <strong>de</strong> la voirie (amélioration <strong>de</strong>s<br />
infrastructures, rénovation du revêtement routier,<br />
élargissement <strong>de</strong>s voies, <strong>et</strong>c.).<br />
Comment inciter aux déplacements doux ?<br />
Comment inciter les automobilistes à lever le<br />
pied ? L’approche <strong>de</strong> Londres.<br />
À Londres, où 45% <strong>de</strong>s traj<strong>et</strong>s inférieurs à 2 km sont toujours<br />
réalisés en voiture, pour dissua<strong>de</strong>r les habitants <strong>de</strong> prendre<br />
leur véhicule, Transport for London axe son discours sur les<br />
bienfaits pour la santé <strong>de</strong> l’usage du vélo ou <strong>de</strong> la marche à<br />
pied <strong>et</strong> sur les désavantages que présentent l’usage <strong>de</strong> la<br />
voiture. Cela passe par une démarche <strong>de</strong> proximité,<br />
consistant à délivrer <strong>de</strong>s messages personnalisés visant à<br />
prouver qu’un traj<strong>et</strong> donné est plus court à pied ou à vélo,<br />
(si l’on comptabilise le traj<strong>et</strong> porte à porte, incluant<br />
notamment le temps pour trouver un stationnement, <strong>et</strong>c.).<br />
Les analyses menées à Londres indiquent que bon nombre <strong>de</strong><br />
Londoniens ne souhaitent pas prendre leur voiture, ou<br />
encore qu’ils prennent le bus <strong>de</strong>puis vingt ans sans vraiment<br />
maîtriser tout le potentiel du réseau.<br />
Concernant l’incitation à limiter la vitesse sur la route, la<br />
démarche est tout autre. Délaissant l’approche “génie civil”<br />
du rétrécissement <strong>de</strong>s voies <strong>et</strong> <strong>de</strong>s dos d’ânes, qui ne sont<br />
pas neutres en termes <strong>de</strong> pollution atmosphérique <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
bruit, Londres a évolué <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> douce vers une<br />
approche plus dure. C<strong>et</strong>te démarche part du postulat que,<br />
pour arriver à faire évoluer les comportements, il faut<br />
quinze ans d’efforts <strong>de</strong> communication continus avant que<br />
<strong>de</strong>s résultats substantiels soient observés. Pendant 15 ou 20<br />
ans, les messages <strong>de</strong> sécurité routière ont conditionné les<br />
mentalités sur l’importance <strong>de</strong> réduire la vitesse au volant,<br />
mais pas par la manière forte. Récemment, la Gran<strong>de</strong>-<br />
Br<strong>et</strong>agne a lancé une campagne <strong>de</strong> sensibilisation <strong>de</strong> gran<strong>de</strong><br />
ampleur, dénommée Think, qui n’hésite pas employer la<br />
métho<strong>de</strong> forte. Par exemple, une campagne diffusée dans<br />
tout le pays, à la télévision aux heures <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> écoute <strong>et</strong><br />
dans les cinémas, montre une victime d’un acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la<br />
route qui revient à la vie pour expliquer que si c<strong>et</strong><br />
automobiliste avait roulé à 30 km/h plutôt qu’à 45 km/h, il<br />
serait toujours vivant.<br />
Les murs transparents <strong>de</strong> Vienne : quelle<br />
durée <strong>de</strong> vie ? quelle résistance à l’impact ?<br />
Les murs antibruit transparents <strong>de</strong> Vienne n’ont pas dix ans,<br />
<strong>et</strong> aucun problème <strong>de</strong> dégradation particulier n’a été<br />
mentionné par l’équipe <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Vienne. En revanche,<br />
ce type d’écran, en particulier l’écran monumental implanté<br />
en bordure <strong>de</strong> la cité HLM, pose <strong>de</strong>s problèmes d’entr<strong>et</strong>ien.<br />
S’agissant <strong>de</strong> la sécurité, <strong>de</strong> la résistance au choc <strong>de</strong> ces<br />
écrans par rapport aux écrans traditionnels qui, a priori, ont<br />
offrent une meilleure résistance en cas d’acci<strong>de</strong>nt, la ville<br />
<strong>de</strong> Vienne n’a pas fait mention <strong>de</strong> problème <strong>de</strong> sécurité<br />
particulier. Sauf pour les oiseaux, auxquels il arrive <strong>de</strong><br />
percuter un écran.<br />
Quels indicateurs <strong>de</strong> performance <strong>de</strong>s<br />
améliorations ?<br />
Les niveaux moyens L Aeq présentent certes l’inconvénient <strong>de</strong><br />
ne pas refléter fidèlement l’efficacité d’une mesure <strong>de</strong><br />
réduction du bruit, soit que cela en minimise, soit au<br />
contraire que cela en exagère, l’eff<strong>et</strong> réel.<br />
Malheureusement, mis à part Modène <strong>et</strong> ses <strong>de</strong>ux indicateurs<br />
— l’un, purement acoustique, comparable à ce qui s’utilise<br />
dans les étu<strong>de</strong>s d’impact, l’autre, un indicateur <strong>de</strong> climat<br />
sonore —, le r<strong>et</strong>our d’information concernant l’évaluation<br />
<strong>de</strong>s performances <strong>de</strong>s mesures mises en place a été plutôt<br />
décevant. Tout au plus les villes ont elles réalisé <strong>de</strong>s<br />
mesures acoustiques avant <strong>et</strong> après la mise en œuvre <strong>de</strong><br />
l’action.<br />
L’expérience menée à Nantes <strong>de</strong> 1990 à 1995, rappelons-le,<br />
a consisté à faire appel à la notion d’i<strong>de</strong>ntité sonore, sans se<br />
cantonner exclusivement au registre quantitatif, pour<br />
évaluer la qualité <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s quartiers.<br />
On peut espérer que, sous l’impulsion <strong>de</strong> la directive<br />
2002/49/CE, les plans d’action feront l’obj<strong>et</strong>, à l’occasion<br />
<strong>de</strong> leur révision tous les cinq ans, <strong>de</strong> vraies évaluations <strong>et</strong><br />
d’enquêtes auprès <strong>de</strong> la population.<br />
Écrans transparents, mais eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> coupure<br />
quand même ?<br />
La route constitue une coupure en ville, capable d’isoler <strong>de</strong>s<br />
quartiers. Et les murs antibruit transparents tels que adoptés<br />
à Vienne n’annulent effectivement pas c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> coupure.<br />
Si Vienne est ainsi montrée en exemple dans le proj<strong>et</strong> Smile,<br />
c’est principalement pour le côté novateur d’écrans<br />
acoustiques implantés en plein centre-ville. Sa présence<br />
dans ce gui<strong>de</strong> perm<strong>et</strong> au moins <strong>de</strong> réintégrer ce type <strong>de</strong><br />
solution dans l’éventail <strong>de</strong>s mesures possibles en centreville.<br />
Toutes les solutions présentées dans le cadre <strong>de</strong> ce<br />
gui<strong>de</strong> ne sont pas forcément adaptées à toutes les<br />
situations, mais elles constituent <strong>de</strong>s exemples d’initiatives<br />
auxquelles il est possible <strong>de</strong> faire appel.<br />
PAGE 32<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Séance plénière<br />
Des politiques nationales fondées sur<br />
l'analyse <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices<br />
Séance présidée par François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé <strong>de</strong> l’environnement<br />
Modérateur : Jean-Pierre Gualezzi, vice-Prési<strong>de</strong>nt du CIDB<br />
Stratégie globale <strong>de</strong> maîtrise du bruit routier au Danemark<br />
Brian Kristensen (Danish environmental<br />
agency)<br />
La stratégie <strong>de</strong> maîtrise du bruit routier menée au Danemark<br />
<strong>de</strong>puis 2003 est résolument ancrée dans une approche <strong>de</strong><br />
“rentabilité” <strong>de</strong>s actions. Prenant appui sur une estimation<br />
du coût <strong>de</strong> la réduction du bruit, c<strong>et</strong>te initiative exerce une<br />
analyse socioéconomique afin <strong>de</strong> déduire les outils <strong>de</strong><br />
réduction du bruit routier présentant le meilleur rapport<br />
coût/efficacité.<br />
Le contexte<br />
Ces vingt <strong>de</strong>rnières années, le volume du trafic routier n’a<br />
pas été réduit au Danemark. Les progrès les plus marquants<br />
en bordure <strong>de</strong>s habitations existantes ont été le fait du<br />
réseau routier national. Lors <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong> nouvelles<br />
routes, ou l’extension <strong>de</strong> routes existantes en zone urbaine,<br />
<strong>de</strong>s ressources substantielles ont été allouées à la réduction<br />
du bruit, typiquement, à hauteur <strong>de</strong> 10% du coût <strong>de</strong><br />
l’infrastructure ou <strong>de</strong>s travaux d’extension. Ces efforts<br />
déployés par les pouvoirs publics durant ces 15 ou 20<br />
<strong>de</strong>rnières années ont permis qu’aucun nouveau logement<br />
nouvellement construit ne soit exposé à un niveau sonore<br />
excédant 55 dB(A) : en eff<strong>et</strong>, aucune zone rési<strong>de</strong>ntielle<br />
nouvelle ne peut être construite là où le bruit routier<br />
dépasse ce seuil. Ainsi, <strong>de</strong>puis les années 80, 300 000<br />
logements ont été construits en prenant en compte les<br />
nuisances <strong>sonores</strong>. Grâce à ces mesures, l’ampleur du<br />
problème a pu être stabilisé, mais 700 000 logements<br />
restent exposés à <strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong> excédant 55 dB(A), <strong>et</strong><br />
150 000 d’entre eux sont même exposés à <strong>de</strong>s niveaux<br />
excédant 65 dB(A). Plus <strong>de</strong> 90 % <strong>de</strong>s habitations exposées au<br />
bruit routier sont situées le long <strong>de</strong> routes municipales.<br />
Face à ce constat, le gouvernement danois a lancé en 2003<br />
une stratégie nationale <strong>de</strong> réduction du bruit, qui a vu le<br />
jour grâce aux efforts conjoints <strong>de</strong> six ministères, le<br />
ministère <strong>de</strong> l’environnement s’étant chargé <strong>de</strong> recueillir <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> coordonner les différentes contributions. Dans un premier<br />
temps, il s’est agi d’analyser les mesures pouvant être prises<br />
pour traiter c<strong>et</strong>te problématique. L’analyse a débouché sur<br />
la formulation <strong>de</strong> dix initiatives spécifiques <strong>de</strong>stinées à ai<strong>de</strong>r<br />
les collectivités territoriales à organiser leurs efforts <strong>de</strong><br />
lutte contre le bruit, dans une démarche <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong>s<br />
coûts.<br />
Évaluation économique <strong>de</strong> la réduction du bruit<br />
Selon l’OMS, l’exposition chronique au bruit du trafic routier<br />
peut avoir <strong>de</strong>s répercussions sur la santé, liées au stress<br />
principalement. Dans le cadre <strong>de</strong> la stratégie <strong>de</strong> lutte contre<br />
le bruit routier, une revue <strong>de</strong> la littérature internationale a<br />
été commanditée afin <strong>de</strong> tenter d’évaluer le coût <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s<br />
du bruit routier sur la santé. On ne dispose à l’heure<br />
actuelle d’aucune preuve formelle d’un eff<strong>et</strong> significatif du<br />
bruit sur la santé, mais, néanmoins, les spécialistes<br />
s’accor<strong>de</strong>nt pour adm<strong>et</strong>tre qu’il existe <strong>de</strong>s relations entre le<br />
bruit routier <strong>et</strong> l’inci<strong>de</strong>nce d’hypertension <strong>et</strong> <strong>de</strong> maladies<br />
cardiovasculaires. Plusieurs facteurs interviennent bien<br />
évi<strong>de</strong>mment dans le développement <strong>de</strong> telles maladies, mais<br />
la littérature rapporte que l’exposition au bruit routier peut<br />
induire un risque accru <strong>de</strong> développer ces affections. Sur la<br />
base <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te analyse, il a été estimé que entre 200 <strong>et</strong> 500<br />
Danois meurent prématurément chaque année<br />
d’hypertension ou <strong>de</strong> maladie cardiaque liée à une<br />
exposition chronique au bruit du trafic routier. La<br />
monétarisation du coût social annuel <strong>de</strong> ces 200 à 500 décès<br />
prématurés est estimée à 0,5 milliard d’euros.<br />
Pour évaluer le coût <strong>de</strong> la gêne, le gouvernement danois<br />
s’est basé sur une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s prix <strong>de</strong> l’immobilier menée au<br />
printemps 2003 par l’Agence <strong>de</strong> protection <strong>de</strong><br />
l’environnement danoise. C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> indique que les biens<br />
immobiliers subissent une décote <strong>de</strong> 1% pour chaque décibel<br />
<strong>de</strong> trafic routier supplémentaire. À noter que ce chiffre<br />
concerne les logements tant individuels que collectifs (tout<br />
porte à croire que la décote pour les seuls logements<br />
collectifs serait inférieure). À partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te estimation <strong>de</strong><br />
la dépréciation immobilière due au bruit routier, la valeur<br />
monétaire annuelle attribuée à la gêne induite par le bruit<br />
routier au Danemark a été estimée à 0,7 milliard d’euros.<br />
Au total, le coût social annuel du bruit routier, tenant<br />
compte à la fois <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur la santé <strong>et</strong> <strong>de</strong> la dépréciation<br />
immobilière, est donc estimé à 1,2 milliard d’euros. Le coût<br />
correspondant à l’inaction est donc conséquent.<br />
Les mesures <strong>de</strong> réduction du bruit les plus rentables<br />
Dans l’esprit d’efficacité économique insufflé par la<br />
stratégie danoise <strong>de</strong> réduction du bruit, il importait que les<br />
futures initiatives <strong>de</strong> réduction du bruit offrent le meilleur<br />
rapport entre les sommes dépensées <strong>et</strong> les progrès<br />
environnementaux accomplis. Une analyse coûts-avantages<br />
<strong>de</strong>s diverses solutions <strong>de</strong> réduction du bruit a donc été<br />
entreprise. Les calculs <strong>de</strong>s économistes révèlent que, dans<br />
bien <strong>de</strong>s cas, le coût <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit reste<br />
inférieur au bénéfice pour la communauté que constituent le<br />
revalorisation <strong>de</strong>s logements <strong>et</strong> la baisse <strong>de</strong>s maladies <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
décès imputés à l’exposition au bruit.<br />
Quelles sont donc les mesures <strong>de</strong> réduction du bruit les plus<br />
rentables ? S’il est un enseignement à tirer <strong>de</strong> l’analyse<br />
socioéconomique menée par le gouvernement danois, c’est<br />
que c’est rentable <strong>de</strong> réduire le bruit ! En eff<strong>et</strong>, la plupart<br />
<strong>de</strong>s outils, d’un point <strong>de</strong> vue socioéconomique, donnent un<br />
résultat positif. Seules <strong>de</strong>ux solutions sont à éviter :<br />
l’utilisation généralisée <strong>de</strong>s écrans acoustiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
limitations <strong>de</strong> vitesse.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 33
Voyons cela dans le détail. Les enrobés moins bruyants <strong>et</strong> les<br />
fenêtres acoustiques, mesures assez coûteuses, ont un<br />
rapport socioéconomique plutôt élevé, car elles offrent un<br />
bon eff<strong>et</strong> d’atténuation. Les limitations <strong>de</strong> vitesse ne<br />
coûtent pas cher <strong>et</strong> ont un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
moyen, mais leur apport socioéconomique peut être négatif<br />
s’il est trop généralisé : en eff<strong>et</strong>, dans les calculs, une<br />
gran<strong>de</strong> importance est donnée aux pertes <strong>de</strong> temps liées<br />
induites par la limitation <strong>de</strong> la vitesse. Cependant, si c<strong>et</strong>te<br />
mesure est appliquée sur <strong>de</strong>s axes traversant <strong>de</strong> nombreux<br />
logements, sérieusement affectés par le bruit, les<br />
limitations <strong>de</strong> vitesse sont socioéconomiquement<br />
excé<strong>de</strong>ntaires. Quant aux écrans acoustiques, qui ont<br />
beaucoup été utilisés par le passé au Danemark, leur<br />
généralisation se sol<strong>de</strong>rait par un résultat socioéconomique<br />
négatif dans certains cas. La raison à cela : le coût assez<br />
élevé <strong>de</strong>s écrans, qui fait qu’ils ne <strong>de</strong>vraient être utilisés<br />
que dans les zones <strong>de</strong> forte <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> logements. Sur les<br />
axes routiers moins <strong>de</strong>nsément peuplés, d’autres outils,<br />
comme les enrobés moins bruyants, les fenêtres acoustiques<br />
ou les limitations <strong>de</strong> vitesse, doivent être envisagés. Enfin,<br />
les pneus moins bruyants ou les moteurs plus silencieux ont<br />
un faible eff<strong>et</strong> d’atténuation sonore localement, mais leur<br />
eff<strong>et</strong> se fait sentir partout, sur toutes les routes. Par<br />
conséquent, à condition d’être utilisés à gran<strong>de</strong> échelle, ces<br />
outils donnent un résultat socioéconomique positif. Ce qui<br />
renforce la pertinence <strong>de</strong>s efforts consentis par l’Union<br />
européenne en matière <strong>de</strong> recherche sur les véhicules moins<br />
bruyants.<br />
Le financement <strong>de</strong> la réduction du bruit<br />
Au Danemark, l’État prend en charge les investissements<br />
correspondant au réseau routier national (autoroutes <strong>et</strong><br />
routes nationales), les initiatives <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
concernant le réseau régional étant <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong>s<br />
communes. Dans le sillage <strong>de</strong> la stratégie du bruit routier, le<br />
ministre <strong>de</strong>s Transports a décidé d’investir 15 millions<br />
d’euros supplémentaires dans la réduction du bruit le long<br />
<strong>de</strong>s routes gérées par l’État. L’avenir dira si les gran<strong>de</strong>s<br />
municipalités du Danemark seront capables <strong>de</strong> faire <strong>de</strong><br />
même sur leurs routes. Car, rappelons-le, plus <strong>de</strong> 90% <strong>de</strong>s<br />
logements exposés au bruit au Danemark sont situés le long<br />
<strong>de</strong> routes régionales.<br />
À la lumière <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s menées dans le cadre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
initiative, les pouvoirs publics danois enten<strong>de</strong>nt exploiter<br />
l’hypothèse selon laquelle les propriétaires <strong>de</strong> biens<br />
immobiliers ont avantage à voir <strong>de</strong>s investissements réduire<br />
l’impact du bruit sur leur logement. C’est la raison pour<br />
laquelle le ministère <strong>de</strong> l’environnement a consacré 700 000<br />
euros à la réalisation d’un gui<strong>de</strong> d’accompagnement aux<br />
partenariats financiers entre municipalités <strong>et</strong> propriétaires<br />
<strong>de</strong> biens immobiliers. Selon Brian Kristensen, c<strong>et</strong>te forme <strong>de</strong><br />
cofinancement pourrait se généraliser.<br />
Le plan suisse <strong>de</strong> maîtrise du bruit ferroviaire<br />
P<strong>et</strong>er Hübner (SBB)<br />
Le plan suisse <strong>de</strong> maîtrise du bruit ferroviaire constitue un<br />
bon exemple <strong>de</strong> pragmatisme en matière <strong>de</strong> politique <strong>de</strong><br />
réduction du bruit.<br />
Les Chemins <strong>de</strong> fer fédéraux suisses (CFF, SBB, FFS)<br />
emploient 29 000 personnes — c’est le cinquième plus gros<br />
employeur en Suisse —, gèrent un réseau <strong>de</strong> 3000 km <strong>de</strong><br />
voies ferrées, pour 8000 trains <strong>et</strong> 800 000 passagers par jour.<br />
Concernant la part modale du train, l’entreprise publique<br />
représente 25% <strong>de</strong>s transports en commun, 20% du transport<br />
<strong>de</strong> passagers <strong>et</strong> 40% du transport <strong>de</strong> fr<strong>et</strong>.<br />
Abrégé d’histoire du bruit ferroviaire en Suisse<br />
Dans les années 80-90, un ensemble <strong>de</strong> lois<br />
environnementales ont été introduites, parmi lesquelles,<br />
l’ordonnance sur la protection contre le bruit, entrée en<br />
vigueur en 1987, qui avait pour but <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place, en<br />
quinze ans, une protection efficace <strong>de</strong> la population contre<br />
l’exposition au bruit. Au moment <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
législation, le coût global <strong>de</strong> la réduction du bruit, tous<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transport confondus, a été estimé à 64 millions<br />
d’euros pour le pays entier. Mais, faute <strong>de</strong> crédits<br />
disponibles, la route <strong>et</strong> le fer n’ont pu amorcer la mise en<br />
application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réglementation. L’année 1992 marque<br />
un autre jalon important : les chemins <strong>de</strong> fer ont reçu<br />
l’ordre <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rniser les couloirs <strong>de</strong> ferroutage du Gothard<br />
<strong>et</strong> du Lötschberg. Le cahier <strong>de</strong>s charges inclut l’obligation<br />
d’une prise en compte <strong>de</strong> l’environnement, notamment <strong>de</strong><br />
protéger du bruit les riverains <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux couloirs. Ces <strong>de</strong>ux<br />
proj<strong>et</strong>s ont constitué le départ d’un grand programme <strong>de</strong><br />
réduction du bruit ferroviaire en Suisse.<br />
SBB, qui a la responsabilité <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong> ces couloirs, lance à<br />
c<strong>et</strong>te occasion la première initiative suisse <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit basée sur un système d’information géographique. Une<br />
cartographie du bruit est réalisée sur la totalité du couloir,<br />
long <strong>de</strong> 300 kilomètres. Que disent les cartes <strong>de</strong> bruit ? Qu’il<br />
faut ériger 200 km d’écrans acoustiques, sur une hauteur<br />
moyenne <strong>de</strong> 4 à 5 mètres. Ce que les services en charge <strong>de</strong><br />
la protection du paysage voient d’un mauvais œil. De<br />
surcroît, pour généraliser une telle mesure à l’ensemble du<br />
réseau ferré suisse, il faudrait débourser 4,5 milliards<br />
d’euros environ. À l’évi<strong>de</strong>nce, personne ne pouvant payer<br />
une telle somme, il fallait trouver une autre solution.<br />
Celle-ci a été amenée à la faveur d’une <strong>de</strong>uxième étape, les<br />
travaux du groupe <strong>de</strong> travail interministériel sur le réseau<br />
ferré global, groupe dans lequel étaient impliqués les<br />
ministères <strong>de</strong> l’Environnement, <strong>de</strong>s Transports, <strong>de</strong>s Finances<br />
<strong>et</strong> la direction en charge <strong>de</strong>s Chemins <strong>de</strong> fer. C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> ne<br />
s’est pas seulement intéressée au couloir nord-sud, mais a<br />
porté sur le réseau SBB entier. Là encore, une cartographie<br />
du bruit basée sur un système d’information géographique a<br />
été établie, perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> pointer les besoins en matière <strong>de</strong><br />
protection contre le bruit. L’étape suivante a consisté à<br />
mener une analyse coûts-efficacité <strong>de</strong>s écrans acoustiques.<br />
Un écran acoustique, par trop coûteux <strong>et</strong> ne protégeant que<br />
quelques personnes, est d’une faible pertinence. Des lois ont<br />
ainsi été établies afin <strong>de</strong> structurer c<strong>et</strong>te démarche. Ainsi,<br />
en limitant la hauteur <strong>de</strong>s murs antibruit à 2 mètres, il est<br />
apparu que le coût pouvait être réduit <strong>de</strong> moitié, tout en<br />
protégeant 75% <strong>de</strong> la population.<br />
Un progrès crucial est ensuite accompli avec la prise <strong>de</strong><br />
conscience qu’il faut avant tout agir à la source, sur le<br />
matériel roulant. Un ensemble <strong>de</strong> scénarios <strong>de</strong><br />
rééquipement du matériel roulant sont modélisés, <strong>et</strong> ce<br />
processus d’optimisation amène à la conclusion qu’un<br />
investissement <strong>de</strong> 1,3 milliards d’euros perm<strong>et</strong>trait<br />
d’obtenir une réduction du bruit ferroviaire suffisante.<br />
L’examen <strong>de</strong>s différents indices coût/efficacité a permis<br />
d’i<strong>de</strong>ntifier les surcoûts qui n’apportent qu’un bénéfice<br />
modéré. Concernant les écrans acoustiques, la Suisse fait<br />
ainsi la même constatation que les Danois, à savoir qu’il<br />
n’est pas rentable <strong>de</strong> trop en augmenter la hauteur.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Prenons donc un peu <strong>de</strong> recul sur les chiffres : l’estimation<br />
initiale du coût <strong>de</strong> protection contre le bruit <strong>de</strong> l’ensemble<br />
du réseau ferré suisse était <strong>de</strong> 4,5 milliards d’euros ; après<br />
analyse <strong>de</strong>s coûts <strong>et</strong> bénéfices, c<strong>et</strong>te estimation est<br />
diminuée <strong>de</strong> moitié ; enfin, avec le scénario <strong>de</strong><br />
rééquipement du parc roulant (équipement <strong>de</strong>s trains en<br />
semelles <strong>de</strong> frein composites principalement), la ligne <strong>de</strong><br />
crédit à allouer n’est plus que <strong>de</strong> 1,3 milliard d’euros.<br />
Malgré c<strong>et</strong>te démarche d’optimisation, les 1,3 milliard<br />
d’euros n’étant toujours pas disponibles, décision est prise<br />
<strong>de</strong> financer le rééquipement dans le cadre d’un grand<br />
programme <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> développement du<br />
réseau ferré suisse, doté d’une enveloppe budgétaire <strong>de</strong> 19<br />
milliards d’euros sur vingt ans (1995-2015). Fin 1998, 60%<br />
<strong>de</strong>s électeurs votent pour la mobilisation <strong>de</strong>s 1,3 milliard<br />
d’euros à la lutte contre le bruit <strong>de</strong>s chemins <strong>de</strong> fer. On<br />
notera, non sans intérêt, que 60% <strong>de</strong>s 19 milliards d’euros<br />
proviennent <strong>de</strong>s taxes sur le carburant <strong>et</strong> sur la circulation<br />
<strong>de</strong>s poids lourds. En plus <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te loi <strong>de</strong> finance, le registre<br />
réglementaire est également exploité, adaptation <strong>de</strong><br />
l’ancienne réglementation <strong>de</strong> 1987 oblige. Un premier texte<br />
établissant les priorités <strong>de</strong> la politique <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit, le budg<strong>et</strong> <strong>et</strong> le délai imparti, est produit en mars 2000<br />
(loi fédérale sur la réduction du bruit émis par les chemins<br />
<strong>de</strong> fer), puis, en novembre 2001, une ordonnance précise les<br />
modalités d’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te politique. Véhicules<br />
concernés, coûts à la charge <strong>de</strong> la Confédération,<br />
introduction <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong>s “2 mètres” sur la hauteur <strong>de</strong>s<br />
écrans acoustiques, introduction du rapport <strong>de</strong><br />
coût/efficacité <strong>de</strong>s écrans... trois ans après le vote <strong>de</strong> 1998,<br />
les outils réglementaires sont fin prêts.<br />
La mise en application du programme<br />
L’ampleur <strong>de</strong> ce programme dépasse tout ce qui avait été<br />
réalisé auparavant : plus <strong>de</strong> mille sites, répartis sur<br />
l’ensemble du réseau ferré, ont été recensés. Pour chaque<br />
proj<strong>et</strong>, afin <strong>de</strong> s’assurer d'une exécution conforme aux<br />
coûts, aux délais <strong>et</strong> aux objectifs, un ensemble <strong>de</strong><br />
procédures <strong>de</strong> contrôle <strong>et</strong> d’autorisation est appliqué<br />
systématiquement. Deux métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> planification sont<br />
envisagées. L’une, un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> proj<strong>et</strong><br />
traditionnel, consiste à mandater <strong>de</strong>s bureaux d’étu<strong>de</strong>s en<br />
ingénierie pour réaliser la planification. L’autre procédure<br />
est plus centralisée : les calculs sont effectués par les<br />
services <strong>de</strong> la SBB, seules les vérifications <strong>de</strong> détail étant<br />
confiées aux équipes locales <strong>de</strong> planification. C’est c<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>rnière solution, moins coûteuse, qui est r<strong>et</strong>enue. La clé <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> rési<strong>de</strong> dans la centralisation <strong>de</strong> toutes les<br />
données d'entrée au sein d’un seul système d’information<br />
géographique, ce qui offre la possibilité <strong>de</strong> réaliser les<br />
calculs <strong>et</strong> <strong>de</strong> visualiser les niveaux <strong>sonores</strong>, à l’émission <strong>et</strong> à<br />
la réception, à l’échelle <strong>de</strong> l’ensemble du réseau ferré. De<br />
même, les calculs <strong>de</strong> dimensionnement <strong>de</strong>s protections<br />
peuvent aussi être réalisés à l’échelle du réseau ferré<br />
entier. Bien sûr, <strong>de</strong>s analyses coûts-efficacité sont réalisées,<br />
<strong>et</strong> un système automatisé d’autorisation <strong>de</strong>s dossiers est mis<br />
en œuvre. Ce dossier contient tous les éléments nécessaires<br />
à la phase <strong>de</strong> planification.<br />
Écrans <strong>et</strong> isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> : état actuel du programme<br />
Pour le seul réseau public, un total <strong>de</strong> 1060 sites<br />
susceptibles <strong>de</strong> bénéficier d’écrans ou <strong>de</strong> fenêtres<br />
acoustiques ont été recensés. Pour 420 d’entre eux,<br />
l’autorisation d’engagement <strong>de</strong> la phase préliminaire a été<br />
délivrée, 150 dossiers sont en cours d’instruction, 30 sont en<br />
phase <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong>s travaux, 15 ont été menés à leur<br />
terme <strong>et</strong> 60 s’avèrent ne pas nécessiter <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong><br />
réduction du bruit. Les délais étant jusqu’à présent<br />
respectés, l’ensemble <strong>de</strong> l’infrastructure <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit <strong>de</strong>vrait être finalisée d’ici 2015. Le coût total <strong>de</strong>vrait<br />
se situer aux environs <strong>de</strong> 450 millions d’euros.<br />
Le rééquipement du matériel roulant<br />
Le bruit <strong>de</strong> roulement constitue la principale source <strong>de</strong> bruit<br />
<strong>de</strong> bruit ferroviaire. C’est pourquoi l’état <strong>de</strong> surface <strong>de</strong>s<br />
roues <strong>et</strong> <strong>de</strong>s rails, leur rugosité, est un paramètre essentiel<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te problématique. L’une <strong>de</strong>s pistes d’action sur le<br />
matériel roulant consiste à remplacer les semelles <strong>de</strong> freins<br />
en fonte traditionnelles par <strong>de</strong>s semelles en matériau<br />
composite. Celles-ci ne dégra<strong>de</strong>nt pas la surface <strong>de</strong><br />
roulement <strong>de</strong> la roue, mais l’améliorent en la polissant.<br />
L’autre piste consiste à adopter le système <strong>de</strong> freinage à<br />
disque, qui ne sollicite pas la surface <strong>de</strong> contact roue-rail.<br />
L’option <strong>de</strong>s semelles en matériau composite, qui est<br />
apparue comme la plus viable économiquement, nécessite<br />
<strong>de</strong>ux phases <strong>de</strong> développement. Le développement <strong>de</strong>s<br />
semelles <strong>de</strong> frein doit inclure dans son cahier <strong>de</strong>s charges<br />
l’impératif <strong>de</strong> compatibilité avec le réseau ferré<br />
international, <strong>de</strong> l’Italie à la Norvège. La <strong>de</strong>uxième phase<br />
concerne l’ingénierie du véhicule. Chaque type <strong>de</strong> véhicule<br />
doit faire l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> modifications. En eff<strong>et</strong>, le coefficient<br />
<strong>de</strong> friction plus important <strong>de</strong>s semelles en matériau<br />
composite <strong>de</strong> type K nécessite <strong>de</strong> modifier les pressions <strong>de</strong><br />
freinage. Le rééquipement <strong>de</strong>s matériels roulants consiste<br />
enfin à remplacer les semelles <strong>de</strong> frein ainsi que <strong>de</strong> modifier<br />
la géométrie du système <strong>de</strong> freinage afin d’adapter la force<br />
<strong>de</strong> freinage.<br />
Rééquipement <strong>de</strong>s voitures : où en est-on ?<br />
Fin 2004, l’ensemble du parc <strong>de</strong> wagons <strong>de</strong> voyageurs avait<br />
été rééquipé, soit 1030 wagons sur un parc total <strong>de</strong> 1077<br />
wagons. Le coût moyen par véhicule, incluant l’installation<br />
d’un système anti-glissement, s’établit à hauteur <strong>de</strong> 25 000<br />
euros, pour un coût total du rééquipement <strong>de</strong>s voitures <strong>de</strong><br />
27 millions d’euros.<br />
Le traitement <strong>de</strong>s wagons <strong>de</strong> marchandise est quant à lui<br />
compliqué par la diversité <strong>de</strong>s types <strong>de</strong> wagons. On<br />
dénombre tout au plus une <strong>de</strong>mi-douzaine <strong>de</strong> wagons <strong>de</strong><br />
passagers, tandis que la diversité règne chez les wagons <strong>de</strong><br />
fr<strong>et</strong>. Deux wagons <strong>de</strong> marchandise <strong>de</strong> même type, Hbis par<br />
exemple, peuvent même être équipés <strong>de</strong> freins différents<br />
(Westinghouse, Knorr), suivant le type <strong>de</strong> rail sur lequel ils<br />
sont exploités. Par conséquent, ce type <strong>de</strong> matériel roulant<br />
nécessite une stratégie <strong>de</strong> rééquipement adaptée. Début<br />
2005, trois prototypes avaient été rééquipés, représentatifs<br />
<strong>de</strong> la majorité du parc, <strong>et</strong> étaient en phase <strong>de</strong> test<br />
opérationnel. Au lieu d’une émission sonore voisine <strong>de</strong> 90<br />
décibels à 80 km/h <strong>et</strong> 75 mètres <strong>de</strong> distance, ces wagons<br />
rééquipés n’ém<strong>et</strong>tent plus que 79 décibels. Le rééquipement<br />
<strong>de</strong> ces wagons perm<strong>et</strong> donc un gain <strong>de</strong> au moins 10 décibels.<br />
Les autorités suisses ont alloué à ce programme un budg<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 190 millions d’euros. Le rééquipement <strong>de</strong>vait<br />
commencer en 2005 <strong>et</strong> prendre fin en 2009. Le même délai a<br />
été fixé pour les compagnies privées. Le budg<strong>et</strong> total affecté<br />
au rééquipement du parc ferroviaire suisse, transport <strong>de</strong><br />
passagers <strong>et</strong> <strong>de</strong> marchandises confondus, est <strong>de</strong> 340 millions<br />
d’euros.<br />
Le bilan<br />
L’année 2004 a constitué un tournant important dans le<br />
programme <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire en Suisse. C<strong>et</strong>te<br />
année a en eff<strong>et</strong> vu la conclusion du programme <strong>de</strong><br />
rééquipement <strong>de</strong>s wagons <strong>de</strong> passagers, ainsi que le<br />
lancement du rééquipement <strong>de</strong>s wagons <strong>de</strong> marchandise.<br />
Qui plus est, 2004 coïnci<strong>de</strong> avec le dixième anniversaire <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te vaste opération <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire. Il<br />
faudra encore dix ans supplémentaires pour le finaliser. L’un<br />
<strong>de</strong>s objectifs fixés à ce programme était d’obtenir une<br />
réduction durable du bruit ferroviaire. Les résultats déjà<br />
obtenus attestent que c<strong>et</strong> objectif sera atteint. Comme le<br />
souligne P<strong>et</strong>er Hübner, désormais, “vous voyez le train <strong>de</strong><br />
marchandise, mais vous ne l’enten<strong>de</strong>z pas”. D’ici 2009, tout<br />
le matériel roulant suisse <strong>de</strong>vrait avoir été rééquipé. Cela<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 35
signifie que les trains suisses ne feront pas plus <strong>de</strong> bruit<br />
qu’un train d’interconnexion régionale mo<strong>de</strong>rne. Fin 2014,<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s écrans acoustiques programmés <strong>de</strong>vraient<br />
avoir été installés, <strong>et</strong> la maîtrise du bruit ferroviaire <strong>de</strong>vrait<br />
avoir été généralisée à l’ensemble du réseau. Ce qui signifie<br />
que la population ne sera plus vraiment gênée par le bruit<br />
ferroviaire.<br />
Stratégies <strong>de</strong> réduction du bruit adaptées à l’ensemble d’un réseau<br />
ferroviaire<br />
Jakob Oertli (SBB)<br />
Stairrs est un proj<strong>et</strong> financé par l’Union européenne.<br />
Acronyme <strong>de</strong> Strategies and tools to assess and implement<br />
noise reducing measures for railway systems [NDLR :<br />
littéralement, stratégies <strong>et</strong> outils <strong>de</strong>stinés à évaluer <strong>et</strong> à<br />
m<strong>et</strong>tre en oeuvre <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit dans le<br />
domaine ferroviaire], ce proj<strong>et</strong> constitue en quelque sorte le<br />
prolongement <strong>de</strong> ce qui a été accompli en Suisse en matière<br />
<strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire. C’est une bonne<br />
illustration <strong>de</strong> la façon d’exploiter ces stratégies à l’échelle<br />
<strong>de</strong> l’ensemble d’un réseau ferroviaire.<br />
Éléments d’une stratégie <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong>s bruits<br />
ferroviaires<br />
Quels sont les facteurs susceptibles d’influencer une<br />
stratégie <strong>de</strong> maîtrise du bruit ferroviaire ? La<br />
réglementation, bien sûr, qu’elle soit européenne ou<br />
nationale. La directive européenne sur le bruit dans<br />
l’environnement nécessite que <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit soient<br />
établies d’ici 2007 <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s plans d’action soient mis en<br />
œuvres dès 2008 ; dans certains cas, au niveau national, <strong>de</strong>s<br />
seuils <strong>de</strong> bruit sont fixés pour les lignes existantes — ce qui<br />
reste rare — ou pour les nouvelles lignes — ce qui est<br />
courant. Autre facteur qui a son importance, la dimension<br />
économique. Le leitmotiv, c’est la recherche du moindre<br />
coût, car la maîtrise du bruit peut coûter très cher. Pour<br />
rester compétitif par rapport aux autres moyens <strong>de</strong><br />
transport, le chemin <strong>de</strong> fer ne peut se perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong>s<br />
mesures <strong>de</strong> gestion du bruit coûteuses. Enfin, <strong>de</strong>rnier<br />
facteur, mais non <strong>de</strong>s moindres, il importe <strong>de</strong> réduire le<br />
bruit le plus possible.<br />
Les partenaires du proj<strong>et</strong><br />
Le proj<strong>et</strong> Stairrs a pour vocation <strong>de</strong> fournir un système<br />
d’ai<strong>de</strong> au développement <strong>de</strong> stratégies <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
ferroviaire. Pour ce faire, <strong>de</strong>s informations acoustiques<br />
détaillées issues <strong>de</strong> sept pays européens ont été collectées<br />
afin d’alimenter une base <strong>de</strong> données. Qui plus est, <strong>de</strong>s<br />
données acoustiques brutes, provenant d’autres pays<br />
européens, ont été rassemblées, afin <strong>de</strong> perm<strong>et</strong>tre<br />
l’extrapolation <strong>de</strong> ces résultats à l’ensemble du réseau <strong>de</strong><br />
chemin <strong>de</strong> fer européen, ainsi qu’individuellement, à<br />
l’échelle d’un seul pays. Dans c<strong>et</strong>te intention, les différents<br />
partenaires du proj<strong>et</strong> ont exploré un certain nombre <strong>de</strong><br />
fonctions perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> relier coûts <strong>et</strong> efficacité. Une<br />
méthodologie d’extrapolation a également été finalisée.<br />
Toutes ces étapes ont, bien entendu, pour fonction<br />
d’aboutir à la définition d’une combinaison optimale <strong>de</strong><br />
mesures <strong>de</strong> réduction du bruit.<br />
La coordination <strong>de</strong> l’ensemble du proj<strong>et</strong> a été confiée au<br />
European Rail Research Institute, lequel n’existe plus<br />
aujourd’hui. Les Chemins <strong>de</strong> fer fédéraux suisses se sont<br />
chargés <strong>de</strong> la responsabilité opérationnelle <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong><br />
travail, avec, pour les différents partenaires : la SNCF, les<br />
chemins <strong>de</strong> fer allemands (DB), les consultants autrichien<br />
PSI-A <strong>et</strong> anglais AEAT, l'Université Libre <strong>de</strong> Bruxelles (ULB),<br />
l'institut <strong>de</strong> technologie suisse ETH.<br />
Principe d’utilisation<br />
Dans quelle logique d’utilisation le proj<strong>et</strong> Stairrs a-t-il été<br />
conçu ? Deux cas <strong>de</strong> figure : soit l’utilisateur a déjà établi<br />
son programme <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire <strong>et</strong> il<br />
souhaiterait en connaître le coût <strong>et</strong> l’efficacité ; soit, à<br />
l’inverse, l’utilisateur souhaiterait connaître le programme<br />
d’action le mieux adapté aux objectifs fixés dans le cadre <strong>de</strong><br />
sa politique <strong>de</strong> réduction du bruit. Dans son principe, Stairrs<br />
constitue un outil d’ai<strong>de</strong> à la décision : d’un côté, y sont<br />
introduits les paramètres propres à la situation <strong>de</strong><br />
l’utilisateur — programme déjà défini ou simples<br />
orientations politiques —, <strong>de</strong> l’autre, sont précisées les<br />
données d’entrée telles que les paramètres géographiques<br />
(zone urbaine, zone rurale), <strong>de</strong> trafic (nombre <strong>et</strong><br />
composition <strong>de</strong>s trains), <strong>de</strong> configuration acoustique <strong>de</strong>s<br />
voies <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population. Une fois ce paramétrage<br />
effectué, différents modules perm<strong>et</strong>tent d’évaluer les<br />
niveaux <strong>de</strong> bruit, <strong>de</strong> mener une analyse coûts-efficacité,<br />
d’extrapoler <strong>de</strong>s résultats à l’échelle d’un autre réseau ou<br />
d’effectuer une optimisation. Au final, on dispose <strong>de</strong><br />
programmes <strong>de</strong> réduction du bruit spécialement adaptés à<br />
une ligne <strong>de</strong> chemin <strong>de</strong> fer donnée, à un ou plusieurs pays,<br />
ou à l’ensemble du réseau <strong>de</strong> chemin <strong>de</strong> fer européen.<br />
À partir <strong>de</strong>s données d'entrée, l’algorithme <strong>de</strong> calcul<br />
formule <strong>de</strong>s recommandations en matière <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit — écrans acoustiques, amélioration <strong>de</strong>s voies, isolation<br />
<strong>de</strong> faça<strong>de</strong> — <strong>et</strong> évalue l’efficacité <strong>de</strong>s mesures (nombre <strong>de</strong><br />
personnes exposées à un niveau sonore excédant un seuil<br />
donné).<br />
Les données acoustiques détaillées, collectées dans sept<br />
pays d’Europe, ont porté sur un total <strong>de</strong> 11 000 km <strong>de</strong> voies<br />
ferrées. Quant aux données acoustiques plus approximatives,<br />
elles ont porté sur 21 pays européens différents. Les<br />
paramètres étudiés, pour le rééquipement du matériel<br />
roulant, ont consisté soit en une réduction standard <strong>de</strong> 10<br />
dB, soit en l’introduction <strong>de</strong> semelles en matériau composite<br />
<strong>de</strong> type K. Pour l’amélioration <strong>de</strong>s voies, l’étu<strong>de</strong> a pris en<br />
compte le meulage <strong>de</strong>s rails <strong>et</strong> la mise en place d’absorbeurs<br />
dynamiques sur les rails. Enfin, pour les écrans antibruit,<br />
<strong>de</strong>ux hauteurs ont été considérées : une hauteur <strong>de</strong> 2 mètres<br />
<strong>et</strong> une hauteur <strong>de</strong> 4 mètres. Chacune <strong>de</strong> ces mesures a été<br />
étudiée séparément, ainsi qu’en association avec d’autres<br />
partenaires.<br />
Les résultats<br />
Les résultats extrapolés aux 21 pays européens considérés<br />
perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> formuler les conclusions suivantes : le<br />
meulage, s’il ne coûte pas très cher, n’apporte que peu<br />
d’eff<strong>et</strong>s ; le rééquipement du matériel roulant perm<strong>et</strong><br />
d’atteindre la moitié <strong>de</strong> l’efficacité maximum, tout en étant<br />
relativement peu coûteuse, ce qui lui confère un bon<br />
rapport coût/efficacité ; les écrans acoustiques <strong>de</strong> 4 mètres<br />
<strong>de</strong> haut, à cause <strong>de</strong> leur coût prohibitif, ont un rapport<br />
coût/bénéfice très peu intéressant ; les écrans acoustiques<br />
<strong>de</strong> 2 mètres <strong>de</strong> haut ne s’avèrent pas non plus très<br />
performants, mais leur combinaison avec <strong>de</strong>s semelles <strong>de</strong><br />
type K offre une efficacité accrue <strong>et</strong> un rapport<br />
coût/efficacité intéressant ; il en va <strong>de</strong> même <strong>de</strong><br />
l’association entre les absorbeurs sur rail <strong>et</strong> les semelles <strong>de</strong><br />
type K, combinaison qui obtient un rapport coût/efficacité<br />
PAGE 36<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
très satisfaisant. Conclusion ? Le rééquipement du matériel<br />
roulant perm<strong>et</strong> d’obtenir le meilleur rapport<br />
coût/efficacité, <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> d’améliorer le rapport<br />
coût/efficacité d’autres mesures.<br />
L’extrapolation <strong>de</strong> ces résultats au cas <strong>de</strong> la France donne<br />
approximativement les mêmes tendances. Il apparaît donc<br />
qu’une solution apparaissant comme optimale pour<br />
l’ensemble <strong>de</strong> l’Europe s’avère également constituer une<br />
option optimale pour un pays pris individuellement. C<strong>et</strong>te<br />
observation est corroborée par une étu<strong>de</strong> réalisée<br />
antérieurement, portant sur <strong>de</strong>ux couloirs <strong>de</strong> fr<strong>et</strong> : la ligne<br />
Rotterdam-Milan <strong>et</strong> la ligne Hambourg-Lyon. Là encore, les<br />
mêmes tendances sont observées.<br />
Étant donné que les applications étendues à l’ensemble d’un<br />
réseau perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> bons rapports coût/efficacité, lors du<br />
développement d’une stratégie <strong>de</strong> réduction du bruit, il<br />
semble pertinent <strong>de</strong> suivre les étapes suivantes : tout<br />
d’abord, réaliser une cartographie approximative — l’échelle<br />
du 1/25000 ou même du 1/50000 est suffisante — afin <strong>de</strong><br />
tester différents scénarios <strong>et</strong> <strong>de</strong> déterminer une solution<br />
optimale à partir <strong>de</strong> laquelle développer la stratégie. Une<br />
fois c<strong>et</strong>te étape accomplie, il apparaît utile <strong>de</strong> déterminer<br />
les zones critiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> réaliser une cartographie détaillée,<br />
habitation par habitation, <strong>et</strong> <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r les mesures <strong>de</strong><br />
réduction du bruit sur c<strong>et</strong>te représentation détaillée. Pour la<br />
première étape, n’importe quel outil <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong> bruit fera<br />
l’affaire. Pour développer la stratégie, Stairrs est un<br />
exemple d’outil spécialement développé pour c<strong>et</strong>te étape.<br />
Un outil <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> acoustique peut être utilisé<br />
pour les étapes <strong>de</strong> la cartographie détaillée <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
définition <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> réduction du bruit.<br />
Un conseil : ce peut être une bonne idée que d’informer le<br />
gouvernement <strong>de</strong> son pays <strong>de</strong> l’intention <strong>de</strong> réaliser un<br />
programme <strong>de</strong> réduction du bruit, car il existe peut-être <strong>de</strong>s<br />
opportunités, par du lobbying, <strong>de</strong> faire adopter une<br />
législation qui correspon<strong>de</strong> à la stratégie adoptée. En<br />
général, les gouvernements fixent <strong>de</strong>s seuils d’exposition<br />
qui, pour être respectés, s’avèrent bien plus coûteux que <strong>de</strong><br />
définir une stratégie <strong>de</strong> coût/efficacité. Cela a fonctionné<br />
en Suisse, <strong>et</strong> il se pourrait que cela fonctionne aussi bientôt<br />
au Luxembourg.<br />
Conclusions<br />
L’adoption d’une approche coût/efficacité perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
réaliser <strong>de</strong>s économies très substantielles. Pour le transport<br />
par chemin <strong>de</strong> fer, les mesures <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
présentant un bon rapport coût/efficacité incluent <strong>de</strong>s<br />
mesures généralisables à l’ensemble d’un réseau ferré telles<br />
que le rééquipement du matériel roulant. En conséquence,<br />
pour m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>de</strong>s mesures rentables, il faut<br />
considérer le réseau dans son ensemble, <strong>et</strong> pas seulement<br />
les agglomérations principales. Et c’est précisément en<br />
planifiant <strong>de</strong>s mesures dimensionnées uniquement pour une<br />
agglomération donnée que <strong>de</strong>s solutions plus globales, ayant<br />
toutes les chances <strong>de</strong> s’avérer être les plus rentables,<br />
risquent d’être ignorées.<br />
Débat<br />
200 à 500 décès dus au bruit par an ! D’où<br />
viennent ces chiffres ?<br />
L’OMS n’a pas encore réussi à établir <strong>de</strong> relation robuste<br />
entre l’exposition au bruit <strong>et</strong> un taux <strong>de</strong> mortalité. Les<br />
chiffres avancés par Brian Kristensen font donc pour le moins<br />
gran<strong>de</strong> impression. L’Agence <strong>de</strong> l’environnement danoise<br />
s’est en fait basée sur une revue <strong>de</strong> la littérature, confiée à<br />
l’agence danoise Working environment Agency, pour estimer<br />
le nombre <strong>de</strong> morts prématurées pouvant être attribuées à<br />
l’exposition au bruit. M. Kristensen avoue qu’on trouve peu<br />
<strong>de</strong> traces dans la littérature <strong>de</strong> preuve formelle d’une<br />
relation entre bruit <strong>et</strong> mortalité. Mais pour lui, « dire que<br />
personne ne meurt <strong>de</strong> ces problèmes est aussi une sousestimation<br />
». C<strong>et</strong>te tentative <strong>de</strong> monétarisation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
problématique est bien entendu très entachée d’incertitu<strong>de</strong>.<br />
Il faut évi<strong>de</strong>mment plus <strong>de</strong> recherche sur ce suj<strong>et</strong>.<br />
Comment construire les écrans sans gêner ?<br />
L’implantation <strong>de</strong> murs antibruit le long <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> chemin<br />
<strong>de</strong> fer pose le problème <strong>de</strong> la perturbation du trafic <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong> pour les riverains. La stratégie adoptée<br />
par les Chemins <strong>de</strong> fer fédéraux suisses a consisté, dès les<br />
appels d’offre, à encourager les contractants à adopter <strong>de</strong><br />
bonnes pratiques <strong>de</strong> construction, moins gênantes.<br />
Également, <strong>de</strong>s trains spéciaux perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> construire<br />
l’écran <strong>de</strong>puis le train. Enfin, dans le cas d’une intervention<br />
sur une ligne entière, lorsqu’une opération <strong>de</strong> maintenance<br />
a été programmée, les équipes s’efforcent d’intervenir à ce<br />
moment.<br />
Les écrans ne suffisent pas toujours. Isolation<br />
<strong>de</strong> faça<strong>de</strong> en complément ?<br />
On a vu que dans le programme suisse, comme dans le<br />
proj<strong>et</strong> Stairrs, la combinaison <strong>de</strong> l’amélioration du matériel<br />
roulant <strong>et</strong> <strong>de</strong>s murs antibruit perm<strong>et</strong> d’atteindre <strong>de</strong> bons<br />
rapports coût/efficacité. Cependant, chaque fois que les<br />
écrans ne perm<strong>et</strong>tent pas <strong>de</strong> respecter les seuils <strong>de</strong> bruit,<br />
l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> est bien entendu associée.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 37
Séance plénière<br />
Les outils pour prévenir <strong>et</strong> réduire le bruit <strong>de</strong>s transports en milieu<br />
urbain en France : exemples <strong>de</strong> mise en œuvre<br />
Modérateur : Pascal Valentin, chef <strong>de</strong> la Mission bruit, ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable<br />
Introduction<br />
Pascal Valentin (Mission bruit, ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable)<br />
urbanisation sauvage <strong>et</strong> <strong>de</strong> veiller, au même titre que<br />
d'autres préoccupations écologiques clairement i<strong>de</strong>ntifiées —<br />
le r<strong>et</strong>raitement <strong>de</strong>s déch<strong>et</strong>s notamment —, à la prise en<br />
compte <strong>de</strong> la qualité sonore dans l'aménagement <strong>de</strong>s<br />
quartiers urbains.<br />
De quels moyens disposons-nous ? L'une <strong>de</strong>s solutions les plus<br />
pertinentes consiste à élaborer <strong>de</strong>s outils perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong><br />
mieux prévenir <strong>et</strong> <strong>de</strong> mieux gérer les nuisances. Le bruit <strong>de</strong>s<br />
transports, nous l'avons vu, est l'une <strong>de</strong>s principales sources<br />
<strong>de</strong> nuisances dont se plaignent nos riverains. S'il convient <strong>de</strong><br />
rechercher toutes les solutions perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> réduire le<br />
bruit émis par les infrastructures <strong>de</strong> transport, une <strong>de</strong>s<br />
premières mesures <strong>de</strong> nature à réduire l'exposition <strong>de</strong>s<br />
populations au bruit nous paraît être <strong>de</strong> faire en sorte que<br />
les infrastructures bruyantes ne viennent pas, autant que<br />
faire se peut, s'installer trop près <strong>de</strong>s lieux où rési<strong>de</strong>nt les<br />
populations <strong>et</strong>, dans le même temps, d'éviter que les<br />
populations ne s'installent aux abords directs <strong>de</strong>s<br />
infrastructures.<br />
Les <strong>de</strong>ux premières journées <strong>de</strong> ces Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore ont permis <strong>de</strong> dresser un constat :<br />
on assiste à une augmentation sensible <strong>de</strong>s nuisances<br />
<strong>sonores</strong> en milieu urbain. En perpétuelle mutation <strong>de</strong>puis la<br />
révolution industrielle, le milieu urbain, au fil du temps <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s évolutions, voit les bruits s’y superposer <strong>et</strong> affecter un<br />
nombre croissant <strong>de</strong> personnes. En France, 7 millions <strong>de</strong><br />
personnes, soit 12 % <strong>de</strong> la population, sont exposées à <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>de</strong> bruit extérieur excédant le seuil <strong>de</strong> 65 dB(A) <strong>de</strong><br />
jour <strong>et</strong> subissent ainsi une forte gêne. Parmi ces 7 millions<br />
<strong>de</strong> personnes exposées, environ les trois-quarts sont <strong>de</strong>s<br />
riverains d'infrastructures <strong>de</strong> transports terrestres, routières<br />
notamment. L'objectif est maintenant <strong>de</strong> susciter <strong>de</strong>s<br />
politiques locales <strong>de</strong> prise en compte du bruit dans la qualité<br />
environnementale <strong>de</strong>s villes. La politique <strong>de</strong> développement<br />
durable a trouvé une première traduction concrète dans la<br />
démarche <strong>de</strong> haute qualité environnementale <strong>de</strong>s<br />
constructions, <strong>et</strong> il est aujourd'hui important que le vol<strong>et</strong><br />
acoustique <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te démarche soit soutenu.<br />
Il apparaît surtout aujourd'hui que les bâtiments sont<br />
souvent construits dans un environnement urbain dégradé<br />
qui grève fortement la qualité sonore améliorée <strong>de</strong>s<br />
constructions actuelles. Il <strong>de</strong>vient donc indispensable <strong>de</strong><br />
mieux prendre en compte les nuisances <strong>sonores</strong> en amont<br />
<strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s d'aménagement urbain. Il importe donc<br />
d'apporter <strong>de</strong>s solutions concrètes afin d'éviter toute<br />
L’intervention <strong>de</strong> Daniel Pillant (Certu) abor<strong>de</strong> donc ce<br />
thème <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> la prise en compte du bruit dès la<br />
planification, dans les documents d'urbanisme <strong>et</strong>, d'une<br />
manière générale, en matière d'utilisation <strong>de</strong>s sols. Didier<br />
Cattenoz (Mission bruit) souligne ensuite le rôle que joue le<br />
classement sonore <strong>de</strong>s infrastructures <strong>de</strong> transport terrestre<br />
dans la protection <strong>de</strong>s riverains contre le bruit. Puis,<br />
Véronique Poirot <strong>et</strong> Marc Esmenjaud (DDE <strong>et</strong> DDASS Isère)<br />
précisent en quoi le PLU constitue une boîte à outils <strong>de</strong><br />
l'aménageur en matière <strong>de</strong> lutte contre le bruit. Ils sont les<br />
auteurs du remarquable gui<strong>de</strong> intitulé “PLU <strong>et</strong> bruit”<br />
reproduit avec le soutien du Conseil national du bruit <strong>et</strong><br />
adressé par la prési<strong>de</strong>nte du CNB à chaque député.<br />
Dominique Prat (Certu) traite ensuite <strong>de</strong> l’apport <strong>de</strong>s<br />
aménagements <strong>de</strong> voirie en matière <strong>de</strong> lutte contre le bruit,<br />
en comparant les eff<strong>et</strong>s respectifs <strong>de</strong>s aménagements<br />
ponctuels, <strong>de</strong>s aménagements <strong>de</strong> zone ou <strong>de</strong>s<br />
aménagements d'itinéraire. Gérard Horvath (mairie <strong>de</strong><br />
Clermont-Ferrand) livre une présentation <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong><br />
régulation du trafic routier. Nathalie Fürst (Certu) consacre,<br />
quant à elle, ses développements aux différents dispositifs<br />
capables <strong>de</strong> réduire le bruit <strong>de</strong>s infrastructures, qu'il s'agisse<br />
<strong>de</strong> protection à la source ou <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s.<br />
Georges Innocenti (Escota), Nadine Asconchilo, Anne<br />
Guerrero <strong>et</strong> Pascal Fodiman, représentants du ministère <strong>de</strong>s<br />
Transports, <strong>de</strong> RFF <strong>et</strong> <strong>de</strong> la SNCF respectivement,<br />
présentent enfin <strong>de</strong>s exemples d’actions <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit <strong>de</strong>s transports terrestres.<br />
PAGE 38<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Les documents <strong>de</strong> planification (SCoT, PDU)<br />
Daniel Pillant (<strong>Centre</strong> d'étu<strong>de</strong>s sur les<br />
réseaux, les transports, l'urbanisme <strong>et</strong> les<br />
constructions publiques - Certu)<br />
En 1998, déjà, le Conseil économique <strong>et</strong> social mentionnait<br />
que la « prévention <strong>de</strong>s nuisances passe en tout premier lieu<br />
par la prise en considération du bruit dans l’élaboration <strong>de</strong>s<br />
documents d’urbanisme <strong>et</strong> dans toute décision concernant<br />
l’utilisation <strong>de</strong>s sols ». Il semble que c<strong>et</strong> appel n’ait pas été<br />
suffisamment entendu : le bruit augmente, les trafics routier<br />
<strong>et</strong> ferroviaire sont en hausse, les zones bâties gagnent du<br />
terrain <strong>et</strong> le phénomène <strong>de</strong> l'étalement urbain est une<br />
réalité contre laquelle il est difficile <strong>de</strong> lutter. La question<br />
qui s’impose alors : peut-on œuvrer en amont, à travers la<br />
planification, pour maîtriser les déplacements <strong>et</strong> maîtriser<br />
l’urbanisme ? Oui, notamment, grâce aux plans <strong>de</strong><br />
déplacements urbains (PDU) <strong>et</strong> aux schémas <strong>de</strong> cohérence<br />
territoriale (SCoT). L’ennui, c'est que ni les PDU, ni les SCoT,<br />
n’ont le bruit pour préoccupation première.<br />
Les PDU<br />
Les PDU sont loin d’être récents : à l'origine, ils ont été<br />
instaurés par la loi d'orientation sur les transports intérieurs<br />
(LOTI, 1982) puis complétés par la loi sur l'air <strong>et</strong> l'utilisation<br />
rationnelle <strong>de</strong> l’énergie (LAURE,1996) <strong>et</strong> confortés enfin par<br />
la loi solidarité <strong>et</strong> renouvellement urbains (SRU, 2000). En<br />
l’occurrence, toute agglomération <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 100 000<br />
habitants doit se doter d’un PDU.<br />
À quoi servent-ils? À préciser les principes généraux <strong>de</strong><br />
l'organisation <strong>de</strong>s transports, <strong>de</strong> la circulation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
stationnements dans un périmètre urbain. Le PDU vise un<br />
équilibre durable entre les besoins en mobilité <strong>et</strong> la<br />
protection <strong>de</strong> l'environnement — sonore notamment — <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
la santé. Tenant <strong>de</strong> l'usage coordonné <strong>de</strong> tous les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
déplacement, le PDU favorise la baisse du trafic automobile,<br />
l’affectation appropriée <strong>de</strong>s voiries <strong>et</strong> la promotion <strong>de</strong>s<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> déplacements les moins polluants. Le PDU n’est<br />
pas qu’un document <strong>de</strong> planification, c’est également un<br />
plan d’action : doivent y être précisées, à travers les<br />
orientations politiques mentionnées dans les scénarios, les<br />
mesures d'aménagement <strong>et</strong> d'exploitation à m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre.<br />
Et le bruit dans tout çà ? En agissant sur le volume <strong>de</strong> trafic,<br />
sur la nature <strong>et</strong> la vitesse <strong>de</strong>s véhicules, sur la fluidité du<br />
trafic, en privilégiant les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> déplacement doux <strong>et</strong> en<br />
organisant l'intermodalité, le PDU contribue à limiter les<br />
émissions <strong>sonores</strong>. Limiter les véhicules particuliers au profit<br />
<strong>de</strong>s transports en commun, restreindre la circulation dans<br />
certains secteurs, aménager <strong>de</strong>s zones 30, autant<br />
d’exemples d’actions aptes à réduire le bruit urbain.<br />
En juin 2004, 78 % <strong>de</strong>s collectivités concernées avaient<br />
arrêté les obligations propres à leur PDU (56 agglomérations<br />
sur 72). L’analyse <strong>de</strong> la première génération <strong>de</strong> PDU révèle<br />
que la problématique du bruit, mais aussi d'autres enjeux<br />
d'environnement, tels que la qualité <strong>de</strong> l'air, faisait l’obj<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> nombreuses déclarations d'intention — du type « nous<br />
veillerons à limiter l'impact sonore <strong>de</strong>s infrastructures » —,<br />
mais que les objectifs à atteindre étaient rarement précisés<br />
<strong>de</strong> manière quantitative.<br />
Les SCoT<br />
La loi SRU mentionne explicitement la réduction <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong> au nombre <strong>de</strong>s obligations <strong>de</strong> planification<br />
précisées dans les SCoT, PLU, <strong>et</strong> cartes communales : « Les<br />
schémas <strong>de</strong> cohérence territoriale, les plans locaux<br />
d'urbanisme <strong>et</strong> les cartes communales déterminent les<br />
conditions perm<strong>et</strong>tant d'assurer : […] 3° Une utilisation<br />
économe <strong>et</strong> équilibrée <strong>de</strong>s espaces naturels, urbains,<br />
périurbains <strong>et</strong> ruraux, la maîtrise <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong><br />
déplacement <strong>et</strong> <strong>de</strong> la circulation automobile […], la<br />
réduction <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> […], <strong>de</strong>s pollutions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>de</strong> toute nature. » (Art. L.122-1 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
l’urbanisme).<br />
Le SCoT est l’outil d’une planification stratégique<br />
intercommunale à moyen ou long terme (10 ans). SCoT <strong>et</strong><br />
PDU n’ont pas forcément les mêmes aires d’action. On<br />
constate néanmoins aujourd'hui que bon nombre <strong>de</strong> SCoT se<br />
calquent sur les aires <strong>de</strong>s PDU. Que contient un SCoT ? Un<br />
rapport <strong>de</strong> présentation, un proj<strong>et</strong> d'aménagement <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
développement durable (PADD) <strong>et</strong> un document<br />
d'orientations générales. Le rapport <strong>de</strong> présentation analyse<br />
l'état initial <strong>de</strong> l'environnement <strong>et</strong> évalue l’impact <strong>de</strong>s<br />
orientations du PADD sur l’environnement. Le document<br />
d'orientation précise notamment les espaces <strong>et</strong> sites naturels<br />
à protéger. A noter que SCoT <strong>et</strong> PDU doivent satisfaire à<br />
certaines obligations <strong>de</strong> compatibilité.<br />
La logique du SCoT <strong>de</strong>vrait être d’urbaniser en priorité les<br />
secteurs accessibles aux transports en commun. Chose<br />
importante, ce sont les systèmes <strong>de</strong> déplacement qui<br />
organisent la hiérarchie <strong>de</strong>s espaces urbains : le SCoT vise la<br />
pertinence d'ensemble du système <strong>de</strong> transports en<br />
commun, construit l’intermodalité, hiérarchise les rôles <strong>de</strong><br />
la voirie, <strong>et</strong> favorise la maîtrise <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong> déplacement<br />
(en structurant la ville autour d’axes <strong>de</strong> transports en<br />
commun forts).<br />
La directive plans <strong>et</strong> programmes<br />
La directive 2001/42/CE sur l'évaluation <strong>de</strong>s inci<strong>de</strong>nces <strong>de</strong><br />
certains plans <strong>et</strong> programmes sur l'environnement (EIPPE)<br />
place l’évaluation environnementale à tous les niveaux <strong>de</strong><br />
procédure, à tous les niveaux territoriaux (SCoT, PDU,<br />
PLU…). Pour ce qui concerne les SCoT, on notera que la loi<br />
SRU avait anticipé c<strong>et</strong>te directive : s’y trouvaient déjà<br />
précisées les obligations en matière d’analyse <strong>de</strong> l'état<br />
initial <strong>de</strong> l'environnement, d’évaluation <strong>de</strong>s inci<strong>de</strong>nces <strong>de</strong>s<br />
orientations, <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> mesures réductrices <strong>et</strong><br />
correctrices, <strong>et</strong> <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> la mise en œuvre <strong>et</strong> <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s.<br />
Sur les 200 SCoT en cours d'élaboration, la majorité en est<br />
encore à la phase <strong>de</strong> diagnostic initial. On dispose donc <strong>de</strong><br />
moins <strong>de</strong> recul sur les SCoT que sur les PDU.<br />
L’analyse <strong>de</strong> l’état initial<br />
Quels sont les problèmes actuels ? Quels seront les<br />
problèmes futurs si aucune planification n’est réalisée ?<br />
Voilà en substance les interrogations auxquelles le diagnostic<br />
initial doit répondre. Un diagnostic bruit s’attachera donc à<br />
i<strong>de</strong>ntifier les zones où les niveaux <strong>de</strong> bruit dépassent une<br />
valeur jugée inacceptable, à recenser les populations<br />
concernées, à i<strong>de</strong>ntifier les zones sensibles, à établir une<br />
représentation cartographique, puis à croiser ces<br />
informations à partir d’indicateurs. Le tout aboutit à<br />
l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s zones à traiter.<br />
Côté données d’entrée, les données d’émission proviendront<br />
du classement sonore <strong>de</strong>s voies (niveaux <strong>sonores</strong> d’émission,<br />
données d’entrée telles que débits, vitesses, allures,<br />
typologie du tissu bâti traversé, largeurs <strong>de</strong> chaussées,<br />
rampe,...). Relevés <strong>de</strong> terrain, morphologie du bâti,<br />
localisation <strong>de</strong>s protections existantes (écrans, isolements<br />
<strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s,…) complèteront le bilan. A ce sta<strong>de</strong>, on est<br />
capables <strong>de</strong> déterminer les zones déjà protégées du bruit.<br />
Les actes <strong>de</strong>s Quatrièmes assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore – CIDB — Septembre 2005 PAGE 39
Des mesures acoustiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s informations sur<br />
l’occupation <strong>de</strong>s sols (zones urbanisées, population, zones<br />
sensibles, zones calmes) viendront alors parfaire c<strong>et</strong><br />
instantané.<br />
Les orientations ou scénarios<br />
Il serait utopique pour une agglomération <strong>de</strong> vouloir<br />
concentrer toute sa stratégie <strong>de</strong> réduction du bruit dans les<br />
seuls instruments du PDU ou du ScoT. Quelles pistes suivre<br />
alors ? On peut raisonnablement se fixer pour scénario<br />
l’amélioration <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s zones fragiles recensées, la<br />
création ou la préservation <strong>de</strong> zones calmes, la recherche<br />
d’améliorations spécifiques à chaque secteur <strong>et</strong>, bien sûr, la<br />
planification dans l’espace <strong>et</strong> dans le temps.<br />
Pour ce qui est <strong>de</strong>s infrastructures, les options sont variées :<br />
créer <strong>de</strong>s voies nouvelles ou en modifier <strong>de</strong> manière<br />
significative ; restreindre les capacités <strong>de</strong> circulation, le<br />
stationnement ; dévier le trafic lourd ; limiter les vitesses,<br />
par la réglementation ou les aménagements ; fluidifier le<br />
trafic (on<strong>de</strong>s vertes, giratoires, <strong>et</strong>c.) ; concentrer le trafic<br />
sur les réseaux principaux disposant <strong>de</strong> protections <strong>sonores</strong><br />
— une manière <strong>de</strong> dégager un r<strong>et</strong>our sur les investissements<br />
d’argent public ; développer les mo<strong>de</strong>s doux (TC silencieux,<br />
vélo, <strong>et</strong>c.).<br />
L’évaluation<br />
La loi SRU prévoit qu’après mise en œuvre, les plans soient<br />
évalués, cinq ans après pour les PDU, 10 ans après pour les<br />
SCoT. Les objectifs <strong>de</strong> réduction du bruit sont-ils atteints ?<br />
Pour répondre à une telle question, encore faut-il avoir fixé<br />
<strong>de</strong>s objectifs spécifiques <strong>de</strong> réduction du bruit, <strong>de</strong>s objectifs<br />
réalistes <strong>et</strong> quantifiables, avoir mis en œuvre <strong>de</strong>s scénarios<br />
réellement en phase avec ces objectifs <strong>et</strong>, enfin, ne pas<br />
oublier <strong>de</strong> prendre en compte l’apport d’éventuelles actions<br />
complémentaires qui n’étaient pas purement vouées à ces<br />
objectifs.<br />
Les indicateurs, incontournables<br />
À toutes les phases — état initial, diagnostic, objectifs,<br />
scénarios, évaluation <strong>et</strong> suivi —, les indicateurs ont leur<br />
utilité. Les indicateurs primaires tels que L Aeq <strong>et</strong> L <strong>de</strong>n sont<br />
bien connus mais, pour fon<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s stratégies opérationnelles<br />
<strong>et</strong> réalistes, l’important est <strong>de</strong> croiser ces données<br />
acoustiques avec les données <strong>de</strong> population, les surfaces<br />
habitées <strong>et</strong> les zones sensibles. (C'est c<strong>et</strong>te logique même<br />
qui prési<strong>de</strong> à la résorption <strong>de</strong>s points noirs bruit <strong>de</strong>s<br />
transports terrestres, dans les zones urbaines sensibles<br />
notamment.) On s’intéressera donc au nombre <strong>de</strong> zones <strong>de</strong><br />
bruit critique (habitat, zones sensibles), au linéaire <strong>de</strong> voie<br />
(traversant une zone bâtie dont le niveau sonore dépasse un<br />
seuil donné), au nombre <strong>de</strong> personnes exposées à <strong>de</strong>s<br />
niveaux en faça<strong>de</strong>s supérieurs à un seuil donné, à <strong>de</strong>s<br />
indicateurs agrégés, utiles pour comparer les scénarios<br />
(construits, à partir <strong>de</strong> l’indicateur population, par cumul<br />
pondéré du nombre <strong>de</strong> personnes dans chaque classe <strong>de</strong><br />
bruit).<br />
Les orientations fortes<br />
La réduction du kilométrage total parcouru en mo<strong>de</strong><br />
motorisé est une orientation forte qui peut légitimement<br />
figurer <strong>de</strong> façon explicite dans un PDU ou dans un SCoT. De<br />
même, on pourra concentrer les scénarios sur<br />
l’i<strong>de</strong>ntification <strong>et</strong> le dénombrement <strong>de</strong>s populations<br />
soumises à <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit considérés comme excessifs,<br />
sur la proposition <strong>de</strong> mesures prioritaires pour les<br />
populations les plus exposées ou sur la préservation <strong>de</strong>s<br />
zones calmes.<br />
Le suivi<br />
En théorie, dans tout PDU ou ScoT, à chaque objectif<br />
<strong>de</strong>vraient être assignés <strong>de</strong>s résultats quantitatifs. Pour<br />
pouvoir évaluer, il faut pouvoir mesurer. Cela suppose <strong>de</strong><br />
construire <strong>de</strong>s outils d’évaluation, <strong>de</strong> bâtir <strong>de</strong>s indicateurs<br />
adaptés <strong>et</strong> accessibles <strong>et</strong> d’organiser le recueil <strong>de</strong> données.<br />
En théorie toujours, car tout ceci a un coût, il conviendrait<br />
<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place un dispositif d’observation <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
communiquer sur le vol<strong>et</strong> bruit du PDU ou du SCoT. Début<br />
2005, une dizaine d’observatoires <strong>de</strong> PDU étaient en place<br />
mais, autres priorités obligent, la mesure du bruit (avant,<br />
après) n’est que rarement réalisée.<br />
Les pré-requis indispensables<br />
Quels sont les éléments indispensables à une réelle prise en<br />
compte du bruit dans les documents <strong>de</strong> planification ? Tout<br />
d’abord, <strong>et</strong> cela n’étonnera personne, prendre le bruit en<br />
considération. Ensuite, avoir la volonté d’utiliser les moyens<br />
<strong>de</strong> planification comme moyen <strong>de</strong> lutte <strong>et</strong>, enfin, s’en<br />
donner les moyens, par <strong>de</strong>s observatoires, <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong><br />
bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong>s plans d'action.<br />
La stratégie <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>its pas<br />
Mais ce n’est pas tout : se pose toujours le problème <strong>de</strong> la<br />
hiérarchie <strong>de</strong>s enjeux <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’échelle d’intervention. De fait,<br />
ce sont rarement les mêmes élus qui ont la responsabilité<br />
<strong>de</strong>s SCoT, <strong>de</strong>s PDU ou du bruit, a fortiori dans ces espaces<br />
pluri-communaux que sont les agglomérations. D’où les<br />
vertus d’actions concrètes menées à p<strong>et</strong>ite échelle, à un<br />
moindre <strong>de</strong>gré que celui du PDU ou du SCoT. A <strong>de</strong> telles<br />
échelles plus mo<strong>de</strong>stes, l’évaluation par les collectivités <strong>de</strong>s<br />
eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s actions est facilitée. Il en va <strong>de</strong> même <strong>de</strong> la<br />
valorisation <strong>de</strong>s réussites <strong>et</strong> <strong>de</strong> la sensibilisation, tant <strong>de</strong> la<br />
population que <strong>de</strong>s élus non concernés par le SCoT. Autre<br />
point non négligeable, la communication. Le vol<strong>et</strong> bruit <strong>de</strong>s<br />
PDU <strong>et</strong> <strong>de</strong>s SCoT doit faire l’obj<strong>et</strong> d’une communication qui<br />
se démarque <strong>de</strong>s trop habituelles généralités sur les méfaits<br />
du bruit, qui traite précisément <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
objectifs visés à travers les documents <strong>de</strong> planification.<br />
Enfin, gouvernance <strong>et</strong> cohérence locales jouent un rôle clé<br />
dans ce registre d’action, où, ne l’oublions pas, le bruit<br />
n’est pas la priorité. Pour finir, il convient <strong>de</strong> rappeler les<br />
autres moyens d’action — plan local d'urbanisme, écrans<br />
acoustiques, aménagement <strong>de</strong> voirie, régulation <strong>de</strong> trafic —<br />
dont disposent les collectivités pour réduire le bruit.<br />
Le classement sonore<br />
Didier Cattenoz (Mission bruit, ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable)<br />
Le classement sonore, outre le dispositif préventif qu'il<br />
constitue, perm<strong>et</strong> précisément d'alimenter les différents<br />
outils <strong>de</strong> prévention <strong>et</strong> <strong>de</strong> réduction du bruit <strong>de</strong>s transports<br />
en milieu urbain. Il constitue en quelque sorte un travail<br />
préparatoire à la cartographie <strong>et</strong> aux plans d'actions prévus<br />
par la directive 2002/49/CE.<br />
Principe du classement sonore<br />
En France, la lutte contre le bruit <strong>de</strong>s transports terrestres<br />
s'articule autour <strong>de</strong> trois axes : un dispositif préventif, le<br />
classement sonore <strong>de</strong>s voies ; la prise en compte du bruit<br />
lors <strong>de</strong> la construction ou <strong>de</strong> la modification<br />
d'infrastructures ; la détection <strong>et</strong> la résorption <strong>de</strong>s points<br />
noirs du bruit. Le dispositif juridique <strong>de</strong> prévention est<br />
abusivement dénommé “classement sonore” puisqu’il ne se<br />
limite pas qu’à cela. Il prévoit en eff<strong>et</strong> que le réseau soit<br />
PAGE 40<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
classifié en cinq catégories, que soient délimités <strong>de</strong>s<br />
secteurs dits “affectés par le bruit” (dans lesquels les futurs<br />
bâtiments sensibles au bruit <strong>de</strong>vront présenter une isolation<br />
acoustique renforcée) <strong>et</strong>, surtout, que le public ait accès à<br />
ces informations, via les documents d’urbanisme.<br />
Concernant les seuils <strong>de</strong> trafic définissant les infrastructures<br />
concernées, on notera que le classement sonore diffère <strong>de</strong>s<br />
cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques <strong>de</strong> la directive 2002/49/CE : le<br />
trafic moyen journalier annuel (TMJA) est <strong>de</strong> 5000 véhicules<br />
par jour pour le classement, <strong>de</strong> 8200 véhicules par jour (3<br />
millions <strong>de</strong> véhicules par an) pour les cartes. Il en va <strong>de</strong><br />
même pour les lignes ferroviaires : le TMJA est <strong>de</strong> 100 trains<br />
(en site urbain) ou 50 trains (en site interurbain) pour le<br />
classement, <strong>de</strong> 82 trains pour les cartes.<br />
Fait important, le classement sonore ne tient aucun compte<br />
<strong>de</strong> la propagation du bruit, mais seulement <strong>de</strong> son 'émission.<br />
Le préf<strong>et</strong> arrête la catégorie du tronçon en fonction d'un<br />
niveau <strong>de</strong> bruit évalué à un emplacement conventionnel <strong>et</strong> à<br />
un horizon <strong>de</strong> vingt ans. Ce niveau peut-être mesuré mais il<br />
est le plus souvent calculé. Est également précisée la<br />
largeur <strong>de</strong>s secteurs affectés par le bruit <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre<br />
<strong>de</strong>s tronçons, ainsi que les niveaux <strong>de</strong> bruit à prendre en<br />
compte pour le calcul <strong>de</strong>s isolements <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> à respecter<br />
lors <strong>de</strong> la construction d’un bâtiment.<br />
Comment protéger les nouveaux bâtiments ?<br />
Dans un premier temps, il s'agit d’adopter un parti<br />
d’insertion urbanistique <strong>et</strong> architecturale minimisant<br />
l’exposition au bruit <strong>de</strong>s personnes : faça<strong>de</strong> borgne (cas<br />
extrême), interposition d’espaces tampons (coursives),<br />
optimisation <strong>de</strong> l’orientation <strong>de</strong>s parois. Fait regr<strong>et</strong>table, ce<br />
registre <strong>de</strong> protection acoustique semble très rarement<br />
exploité lors <strong>de</strong> la conception <strong>de</strong>s bâtiments, les architectes<br />
se contentant <strong>de</strong> dimensionner les vitrages. A l'échelle d'un<br />
lotissement, on peut par ailleurs combiner plusieurs<br />
protections <strong>et</strong>, notamment, interposer un écran pour<br />
optimiser le dimensionnement <strong>de</strong>s vitrages acoustiques.<br />
Suivant la même logique que celle adoptée pour les<br />
nouvelles infrastructures, le rapport coût/efficacité gui<strong>de</strong> la<br />
décision <strong>de</strong> construire ou non un écran acoustique. Les<br />
faça<strong>de</strong>s doivent présenter <strong>de</strong>s niveaux d’isolement compris<br />
entre 30 <strong>et</strong> 45 décibels. La nouvelle réglementation<br />
acoustique (arrêtés du 30 juin 1999) exige un minimum <strong>de</strong> 30<br />
décibels pour tout logement, quel que soit l’endroit où il se<br />
situe.<br />
Information <strong>de</strong>s riverains<br />
Début 2005, les arrêtés <strong>de</strong> classement sonore se<br />
présentaient simplement sous la forme <strong>de</strong> tableaux, ce qui<br />
manque <strong>de</strong> lisibilité pour le riverain, qui souhaiterait<br />
connaître la situation propre à son habitation. Depuis la<br />
circulaire du 25 mai 2004, en plus <strong>de</strong> l’obligation <strong>de</strong> reporter<br />
le classement sonore dans les documents d'urbanisme, il est<br />
<strong>de</strong>mandé aux préf<strong>et</strong>s d’inciter les services compétents à<br />
indiquer ces informations dans les certificats d'urbanisme,<br />
<strong>de</strong> cartographier les secteurs affectés par le bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
publier les cartes sur Intern<strong>et</strong>. Il a été <strong>de</strong>mandé d’adopter<br />
une échelle mieux adaptée à la consultation <strong>de</strong>s cartes par<br />
les riverains. A noter que ces cartes ne représentent pas <strong>de</strong>s<br />
courbes isophones mais s’en tiennent uniquement à préciser<br />
la catégorie acoustique <strong>de</strong>s voies <strong>et</strong> la largeur <strong>de</strong>s secteurs<br />
affectés.<br />
Faute <strong>de</strong> délai réglementaire, le report <strong>de</strong>s informations<br />
issues du classement sonore dans les annexes du PLU n’est,<br />
malheureusement, que rarement réalisé. Pourtant, une<br />
simple mise à jour par arrêté municipal suffit.<br />
Les autres vertus du classement sonore<br />
Outre sa vocation préventive, le classement sonore présente<br />
plusieurs intérêts. Il constitue une information <strong>de</strong> premier<br />
ordre sur les niveaux <strong>de</strong> bruit à l'émission du réseau <strong>de</strong><br />
transport terrestre, qu’il conviendrait d’intégrer dans les<br />
divers documents d’urbanisme que sont les PADD, SCoT,<br />
PDU, PLU <strong>et</strong> cartes communales. Il constitue également un<br />
outil d’information à <strong>de</strong>stination du public <strong>et</strong> pose les bases<br />
du dialogue nécessaire avec les riverains. Enfin, il prépare à<br />
l’établissement <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit telles que définies par<br />
l’article L. 572 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’environnement (qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
diffuser les données d’émission).<br />
Articulation entre directive 2002/49/CE <strong>et</strong> classement<br />
sonore<br />
L'articulation réglementaire entre l’article L. 572 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
l'Environnement — l'article qui transpose la directive — <strong>et</strong> le<br />
classement sonore repose sur le principe d’une<br />
représentation visuelle <strong>de</strong>s secteurs affectés par le bruit<br />
dans les cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques. On s’oriente vers <strong>de</strong>s<br />
cartes dynamiques sur support informatique perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong><br />
superposer <strong>de</strong>s calques, l’un <strong>de</strong> ces calques pouvant<br />
correspondre aux secteurs affectés par le bruit. Deuxième<br />
articulation avec la directive, compte tenu du fait que les<br />
plans d’action <strong>de</strong>vront énoncer les mesures <strong>de</strong> réduction du<br />
bruit déjà mises en place, les prescriptions acoustiques sur<br />
les isolements <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s figureront en tant que mesures<br />
dans les plans <strong>de</strong> prévention du bruit dans l’environnement.<br />
Enfin, la fréquence <strong>de</strong> révision du classement sonore sera<br />
harmonisée avec celle <strong>de</strong>s cartes <strong>et</strong> plans exigés par la<br />
directive, soit tous les cinq ans. Il faut ajouter que le<br />
dispositif réglementaire du classement sonore ne répond pas<br />
en soi aux exigences <strong>de</strong> la directive portant sur les cartes <strong>de</strong><br />
bruit <strong>de</strong>s transports terrestres. De fait, certaines voies non<br />
classées peuvent néanmoins être bruyantes, dans le cas<br />
d’une configuration en U par exemple. A ce titre, les cartes<br />
du bruit qui seront mises à la disposition du public grâce à la<br />
directive constituent un progrès.<br />
Les données <strong>de</strong> trafic ayant servi au classement sonore, à<br />
condition d’être actualisées, fourniront une information<br />
pour l’évaluation <strong>de</strong>s données <strong>de</strong> trafic nécessaires à<br />
l’établissement <strong>de</strong>s premières cartes <strong>de</strong> bruit attendues<br />
pour 2007. Détail important, il est recommandé <strong>de</strong> préparer<br />
les bases <strong>de</strong> données <strong>de</strong> prévision <strong>de</strong> trafic (débits, vitesses,<br />
allures par catégories <strong>de</strong> véhicules sur les réseaux) sur<br />
chacune <strong>de</strong>s trois pério<strong>de</strong>s 6h00-18h00, 18h00-22h00 <strong>et</strong><br />
22h00-6h00.<br />
Il a été <strong>de</strong>mandé au Certu <strong>de</strong> fournir une métho<strong>de</strong><br />
forfaitaire <strong>de</strong> calcul du L <strong>de</strong>n à partir <strong>de</strong>s données L Aeq (6h-22h)<br />
<strong>et</strong> L Aeq (22h-6h) , mais, le mieux reste tout <strong>de</strong> même d’exploiter<br />
les données <strong>de</strong> base.<br />
Débat<br />
Classement sonore : prévision à 20 ans -<br />
Cartes <strong>de</strong> bruit : situation actuelle. Quelle<br />
compatibilité <strong>de</strong>s représentations ?<br />
Le classement sonore porte sur <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit évalués<br />
à un horizon <strong>de</strong> vingt ans. Les cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques<br />
reflètent, elles, la situation actuelle. L’on peut<br />
légitimement se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comment faire figurer sur le<br />
même document <strong>de</strong>s informations aussi hétérogènes. Dans<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 41
un souci <strong>de</strong> proposer au public l’information la plus<br />
complète possible, l’empreinte du classement sonore sera<br />
reportée sur les cartes <strong>de</strong> bruit quelles que soient la<br />
référence temporelle <strong>de</strong> ce classement sonore.<br />
Publication sur Intern<strong>et</strong> <strong>et</strong> licence IGN<br />
Certaines DDE ont eu la mauvaise surprise <strong>de</strong> s’apercevoir<br />
que la licence IGN qu’elles avaient acquittée ne leur<br />
perm<strong>et</strong>tait pas <strong>de</strong> diffuser les cartes du classement sonore<br />
sur Intern<strong>et</strong>. À la date <strong>de</strong> ces Assises, ce problème était en<br />
passe d’être réglé par la Direction générale <strong>de</strong><br />
l'administration <strong>et</strong> <strong>de</strong> la fonction publique.<br />
Responsabilité juridique <strong>et</strong> publication sur<br />
Intern<strong>et</strong><br />
Certaines DDE se sont interrogées sur la responsabilité<br />
juridique liée à d’éventuelles erreurs dans la restitution <strong>de</strong>s<br />
informations du classement sonore sous forme <strong>de</strong> cartes<br />
publiées sur Intern<strong>et</strong>. La réponse ministérielle apportée<br />
postérieurement au colloque indique que les cartes<br />
graphiques placées sur Intern<strong>et</strong> n’ont qu’une valeur<br />
informative, il convient <strong>de</strong> le signaler par une mention<br />
explicite dans le site, d’indiquer également l’endroit où<br />
consulter l’information officielle. Le préf<strong>et</strong> arrête une<br />
distance au bord extérieur <strong>de</strong> la voie, elle seule fait foi.<br />
Enfin, c’est au constructeur <strong>de</strong> juger quand il dimensionne<br />
les protections grâce à un calcul détaillé <strong>de</strong> propagation du<br />
bruit.<br />
Publication Intern<strong>et</strong> du classement sonore :<br />
vers un cahier <strong>de</strong>s charges type ?<br />
Début 2005, seule la DDE <strong>de</strong> Seine-Maritime avait publié sur<br />
Intern<strong>et</strong> une carte représentant à la fois la catégorie<br />
acoustique <strong>de</strong>s voies <strong>et</strong> la largeur <strong>de</strong>s secteurs affectés. Le<br />
souhait a été formulé par les participants <strong>de</strong> faire profiter<br />
les autres départements <strong>de</strong> ce type d’expérience réussie, à<br />
la faveur, par exemple, d’un cahier <strong>de</strong>s charges type <strong>de</strong> la<br />
publication <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> classement sonore sur Intern<strong>et</strong>.<br />
Aller plus loin dans la prise en compte du bruit dans le PLU<br />
Véronique Poirot (DDE <strong>de</strong> l’Isère) <strong>et</strong> Marc<br />
Esmenjaud (DDASS <strong>de</strong> l’Isère)<br />
L’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te présentation est <strong>de</strong> montrer comment le<br />
plan local d’urbanisme (PLU) peut être un outil perm<strong>et</strong>tant<br />
<strong>de</strong> prendre <strong>de</strong> prendre en compte les problèmes <strong>de</strong> bruit<br />
dans les décisions d’aménagement, <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> même d’aller<br />
plus loin que le minimum exigé par la réglementation.<br />
Dans le cadre du pôle <strong>de</strong> compétence bruit <strong>de</strong> l’Isère, un<br />
groupe <strong>de</strong> travail a souhaité rédiger un gui<strong>de</strong> pour une<br />
meilleure prise en compte <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong> nuisances<br />
<strong>sonores</strong> dans les PLU. La réflexion, commencée en 1999, a<br />
été quelque peu bouleversée par les modifications<br />
intervenues dans ce champ avec, en 2000, la loi SRU <strong>et</strong>, en<br />
2003, la loi urbanisme <strong>et</strong> habitat. Ce gui<strong>de</strong>, intitulé, Plan<br />
local d’urbanisme <strong>et</strong> bruit : la boîte à outil <strong>de</strong> l’aménageur,<br />
est disponible <strong>de</strong>puis début 2005 (en version papier ainsi<br />
qu’en version téléchargeable <strong>de</strong>puis le site du ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie).<br />
C<strong>et</strong>te démarche a initialement été motivée par un constat :<br />
les élus sont insuffisamment sensibilisés aux problèmes <strong>de</strong><br />
bruit <strong>et</strong> ce paramètre est insuffisamment pris en compte<br />
dans les documents d’urbanisme, ce qui est à l’origine <strong>de</strong><br />
fréquentes situations <strong>de</strong> conflit. Les techniciens <strong>de</strong> terrain,<br />
dans les services <strong>de</strong>s communes comme dans ceux <strong>de</strong><br />
l’Équipement, ont aussi un besoin <strong>de</strong> formation<br />
complémentaire sur ce suj<strong>et</strong>.<br />
Ce gui<strong>de</strong> fait suite à un premier travail, réalisé au sein du<br />
pôle <strong>de</strong> compétence bruit <strong>de</strong> l’Isère, sur les problématiques<br />
du bruit <strong>et</strong> du permis <strong>de</strong> construire. En l’occurrence, la<br />
procédure du permis <strong>de</strong> construire a montré ses limites : elle<br />
intervient souvent trop tardivement pour pouvoir trouver <strong>de</strong>s<br />
solutions satisfaisantes aptes à éviter les conflits, <strong>et</strong> n’offre<br />
pas <strong>de</strong> possibilité pour l’instructeur <strong>de</strong> savoir si une<br />
installation bruyante existe à proximité du bâtiment sensible<br />
qui va s’implanter. La démarche d’élaboration d’un PLU<br />
offre un cadre plus général perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> mieux connaître<br />
le contexte dans lequel interviendra le permis <strong>de</strong> construire.<br />
Le gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong> Bruit a donc vocation à sensibiliser les élus<br />
<strong>et</strong> les professionnels <strong>de</strong> l’urbanisme, à les inciter à une<br />
réflexion globale <strong>et</strong> prospective à l’échelle <strong>de</strong> la commune<br />
<strong>et</strong> du territoire. En travaillant en amont <strong>de</strong>s autorisations <strong>de</strong><br />
construire, les instructeurs sont plus à même <strong>de</strong> détecter les<br />
situations <strong>de</strong> conflits potentiels. La problématique du bruit<br />
étant complexe, difficile à vulgariser, ce gui<strong>de</strong> se veut à la<br />
fois simple <strong>et</strong> compl<strong>et</strong> ; il entend favoriser l’adoption d’une<br />
démarche pragmatique, adaptable partout.<br />
Se poser les bonnes questions au bon moment<br />
La métho<strong>de</strong> d’élaboration du PLU suivie dans c<strong>et</strong> ouvrage<br />
correspond à une démarche <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> structurée en trois<br />
temps : le diagnostic, le proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> la traduction graphique <strong>et</strong><br />
réglementaire. L’étape du diagnostic, qui servira à rédiger<br />
le rapport <strong>de</strong> présentation du PLU, consiste à dresser un état<br />
initial <strong>de</strong> l’environnement, à analyser c<strong>et</strong> état initial <strong>et</strong> à<br />
fournir un effort <strong>de</strong> prospective, puis à définir les enjeux <strong>et</strong><br />
à les hiérarchiser. Le proj<strong>et</strong> d’aménagement <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
développement durable (PADD) s’apparente, quant à lui, à<br />
un proj<strong>et</strong> urbain : il comporte un programme d’actions<br />
définies <strong>et</strong> mises en cohérence, qui doit aboutir à la<br />
traduction <strong>de</strong>s enjeux du PADD dans le règlement, dans les<br />
documents graphiques <strong>et</strong> les annexes du PLU.<br />
Voyons maintenant comment le bruit peut être pris en<br />
compte à chaque étape <strong>de</strong> l’élaboration d’un PDU.<br />
Le diagnostic<br />
Suivant la sensibilité <strong>de</strong> la population, <strong>et</strong> l’intérêt <strong>de</strong>s élus<br />
pour la problématique du bruit, on peut distinguer quatre<br />
niveaux d’analyse. Tout d’abord, certaines données doivent<br />
obligatoirement être reportées dans un PLU : c’est le cas du<br />
classement sonore <strong>de</strong>s voies <strong>et</strong>, le cas échéant, <strong>de</strong>s plans<br />
d’exposition au bruit (PEB). Dans ces zones, il faudra donc<br />
tenir compte du bruit.<br />
Pour aller un peu plus loin, tout en restant dans une<br />
démarche relativement simple, on peut mener un inventaire<br />
<strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> bruit ainsi que <strong>de</strong>s secteurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bâtiments<br />
sensibles au bruit. C<strong>et</strong>te démarche s’appuie sur la<br />
connaissance du terrain <strong>et</strong> sur les données fournies par<br />
l’Administration. Peuvent également être reportées sur une<br />
carte les zones <strong>de</strong> bruit critique, les éventuels points noirs<br />
du bruit routier <strong>et</strong> ferroviaire <strong>et</strong> les zones <strong>de</strong> silence, le cas<br />
échéant. Ces cartes perm<strong>et</strong>tront d’i<strong>de</strong>ntifier les zones <strong>de</strong><br />
conflits, les secteurs où les outils <strong>de</strong> l’urbanisme pourraient<br />
être mis à profit pour tenter <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s solutions.<br />
PAGE 42<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Troisième niveau d’implication : la cartographie sonore.<br />
Etablie à la suite d’une étu<strong>de</strong> acoustique, elle sera<br />
principalement basée sur le bruit <strong>de</strong>s infrastructures <strong>de</strong><br />
transports — souvent la principale source <strong>de</strong> bruit —, <strong>et</strong><br />
éventuellement complétée par les bruits <strong>de</strong>s activités, sans<br />
oublier, bien sûr, l’inventaire <strong>de</strong>s secteurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bâtiments<br />
sensibles au bruit. Les niveaux <strong>de</strong> bruit (courbes isophones)<br />
sont soit déterminés par <strong>de</strong>s mesures, soit par le calcul, ou,<br />
le plus souvent, par la combinaison <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux moyens. La<br />
cartographie peut porter sur la commune entière ou<br />
seulement sur <strong>de</strong>s portions <strong>de</strong> territoires communaux jugés<br />
plus sensibles.<br />
Établie à partir d’une étu<strong>de</strong> acoustique tant qualitative que<br />
quantitative, la carte d’ambiance sonore vise à représenter<br />
la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore sur tout ou partie du<br />
territoire communal. Plus délicates à traduire en termes<br />
réglementaires, les cartes d’ambiance sonore constituent<br />
néanmoins un outil pédagogique privilégié pour l’information<br />
<strong>et</strong> le dialogue avec la population. À Meylan, commune <strong>de</strong> la<br />
banlieue grenobloise qui s’est dotée d’une telle carte, on<br />
distingue par exemple <strong>de</strong>s “zones très calmes”, <strong>de</strong>s “zones<br />
caractéristiques <strong>de</strong>s villes” <strong>et</strong> <strong>de</strong>s “zones très bruyantes”.<br />
Analyse <strong>et</strong> prospective<br />
L’étape <strong>de</strong> l’analyse vise à établir une vision du paysage<br />
sonore <strong>de</strong> la commune. La situation est-elle dégradée,<br />
moyenne ou <strong>de</strong> bonne qualité ? Quels secteurs traiter en<br />
priorité ? Quelles sont les zones <strong>de</strong> conflit ? Ici, une vision<br />
systémique s’impose : il s’agit <strong>de</strong> croiser toutes les<br />
problématiques <strong>de</strong> la commune, sans s’attacher au seul<br />
paysage sonore. Il convient aussi <strong>de</strong> se proj<strong>et</strong>er dans<br />
l’avenir, en prévoyant l’impact sonore <strong>de</strong>s éventuels proj<strong>et</strong>s<br />
d’infrastructures, en tenant compte <strong>de</strong>s emplacements<br />
réservés à <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s futurs d’implantation d’activités<br />
bruyantes.<br />
Définition <strong>de</strong>s enjeux<br />
À ce sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> la démarche, les orientations en matière <strong>de</strong><br />
nuisances <strong>sonores</strong> sont définies : réduire les nuisances,<br />
préserver les zones calmes, limiter l’exposition au bruit <strong>de</strong>s<br />
constructions nouvelles, encadrer l’installation <strong>de</strong>s activités<br />
nuisantes, autant <strong>de</strong> mesures qu’il convient <strong>de</strong> hiérarchiser.<br />
L’inci<strong>de</strong>nce sur le bruit <strong>de</strong>s autres orientations est<br />
également à prendre en considération dans c<strong>et</strong>te<br />
hiérarchisation. Un exemple : la mixité <strong>de</strong>s fonctions<br />
urbaines, l’un <strong>de</strong>s grands enjeux <strong>de</strong> la loi SRU, n’est pas<br />
neutre en termes <strong>de</strong> nuisances <strong>sonores</strong>. Elle nécessitera une<br />
<strong>de</strong> porter une attention toute particulière aux points <strong>de</strong><br />
conflit bruit/calme, <strong>et</strong> d’accompagner c<strong>et</strong>te mixité, par <strong>de</strong>s<br />
étu<strong>de</strong>s acoustiques notamment.<br />
Le proj<strong>et</strong> d’aménagement <strong>et</strong> <strong>de</strong> développement durable<br />
Le PADD s’apparente à un proj<strong>et</strong> urbain qui peut comporter<br />
un programme d’actions définies <strong>et</strong> mises en cohérence. Une<br />
approche cartographique <strong>de</strong>s actions envisagées perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce les conflits <strong>sonores</strong> éventuels <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
prendre <strong>de</strong>s décisions correctives. Il ne s’agit pas d’une<br />
étu<strong>de</strong> fine, mais d’une analyse sommaire <strong>de</strong>s interactions<br />
entre les actions du PADD, ainsi qu’entre les actions <strong>et</strong> le<br />
tissu urbain existant.<br />
Les secteurs <strong>de</strong> conflit <strong>et</strong> d’impact sonore (axe routier,<br />
activités bruyantes), qu’ils soient existants ou en proj<strong>et</strong>,<br />
sont i<strong>de</strong>ntifiés. Les zones en <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> calme sont, elles<br />
aussi, i<strong>de</strong>ntifiées. Après avoir analysé l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
interactions entre les proj<strong>et</strong>s envisagés par la commune,<br />
i<strong>de</strong>ntifié les conflits existants <strong>et</strong> les probables conflits<br />
futurs, <strong>de</strong>s corrections ou compensations sont proposées.<br />
Cela peut par exemple consister à intercaler une zone<br />
tampon entre un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> salle <strong>de</strong>s fêtes <strong>et</strong> la zone occupée<br />
par <strong>de</strong>s logements <strong>et</strong> un groupe scolaire, une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
accès aboutissant à l’ouverture du parking du côté qui n’est<br />
pas habité. Autre exemple : la mise en place d’un merlon<br />
viendra protéger un lotissement du bruit causé par un atelier<br />
<strong>de</strong> carrosserie.<br />
Le tout aboutit à la réalisation d’un document explicatif <strong>de</strong>s<br />
choix r<strong>et</strong>enus, reprenant tous les proj<strong>et</strong>s, les conditions <strong>de</strong><br />
leur réalisation <strong>et</strong> les mesures compensatoires, correctives<br />
ou préventives qui sont proposées. Ce n’est pas le seul<br />
intérêt <strong>de</strong> ce document. La commune va aussi s’en servir<br />
pour concerter la population sur ses choix.<br />
Le diagnostic ayant été réalisé <strong>et</strong> les choix d’aménagements<br />
exprimés dans le PADD, il reste à traduire ces choix dans les<br />
documents graphiques, le règlement <strong>et</strong> les annexes.<br />
Les stratégies <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> l’habitat le long <strong>de</strong>s<br />
infrastructures<br />
Le groupe <strong>de</strong> travail a recensé différentes stratégies<br />
adaptées à la gestion <strong>de</strong> l’urbanisation à proximité <strong>de</strong>s<br />
infrastructures bruyantes.<br />
Première stratégie : protéger. Voyons quelques exemples <strong>de</strong><br />
solutions susceptibles <strong>de</strong> protéger <strong>de</strong>s habitations du bruit<br />
issu d’un axe routier ou ferroviaire. En rétablissant une<br />
continuité du bâti, on remédie ainsi à une situation <strong>de</strong><br />
perméabilité au bruit. Autre exemple, le bâtiment écran. Il<br />
peut faire l’obj<strong>et</strong>, du côté exposé, d’isolements prévus dans<br />
le cadre du classement <strong>de</strong>s voies, ou bien être affecté à <strong>de</strong>s<br />
activités tertiaires ou <strong>de</strong> stockages. L’on peut également<br />
faire appel au principe <strong>de</strong> l’épannelage, où la hauteur<br />
progressive <strong>de</strong>s bâtiments leur perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> se protéger les uns<br />
<strong>et</strong> les autres. Les bâtiments les plus hauts, situés à l’arrière,<br />
bénéficient à la fois <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> d’éloignement <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
protection <strong>de</strong>s bâtiments situés <strong>de</strong>vant. Pour inscrire un tel<br />
dispositif dans le PLU, un zonage U est réalisé, accompagné<br />
d’un document graphique représentant un plan masse coté<br />
en trois dimensions <strong>et</strong> précisant <strong>de</strong>s règles spéciales<br />
d’implantation <strong>et</strong> <strong>de</strong> hauteur.<br />
Une autre stratégie peut consister à éloigner le bâtiment<br />
sensible <strong>de</strong> la source <strong>de</strong> bruit : le règlement du PLU impose<br />
alors un r<strong>et</strong>rait <strong>de</strong>s constructions par rapport à l’alignement<br />
<strong>de</strong> la voie. Compte tenu <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> propagation <strong>de</strong> l’énergie<br />
sonore, les premiers mètres sont cruciaux. L’éloignement<br />
fait gagner quelques précieux décibels. Reste toutefois à<br />
prévoir la <strong>de</strong>stination <strong>de</strong> l’espace rendu disponible. Parfois,<br />
l’on pourra tirer profit <strong>de</strong> c<strong>et</strong> espace pour y ériger un écran<br />
acoustique. Ou profiter <strong>de</strong> l’éloignement pour intercaler un<br />
terrain <strong>de</strong> boules, faisant quadrupler la distance par rapport<br />
à la route, pour un gain <strong>de</strong> 6 dB(A). Dans une variante plus<br />
globale <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te stratégie d’éloignement, on peut aussi<br />
procé<strong>de</strong>r à une gradation <strong>de</strong> l’occupation <strong>de</strong>s secteurs en<br />
fonction du bruit. La première zone la plus exposée au bruit<br />
pourra être affectée à <strong>de</strong>s activités industrielles, artisanales<br />
ou commerciales ; une <strong>de</strong>uxième zone tampon comportera<br />
<strong>de</strong>s bâtiments tertiaires, moins sensibles au bruit que les<br />
immeubles d’habitation ; la zone d’habitations, enfin,<br />
bénéficiera à la fois <strong>de</strong> l’éloignement <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’écran constitué<br />
par les <strong>de</strong>ux premières lignes <strong>de</strong> bâtiments. Autre<br />
possibilité, perm<strong>et</strong>tre un changement <strong>de</strong> <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s<br />
locaux. C<strong>et</strong>te stratégie s’adresse tout particulièrement aux<br />
zones immédiatement attenantes aux voies bruyantes où les<br />
rez-<strong>de</strong>-chaussée sont particulièrement exposés à la fois à la<br />
pollution <strong>et</strong> au bruit. Pour ce faire, on introduit dans le PLU<br />
<strong>de</strong>s prescriptions spéciales : le long <strong>de</strong>s linéaires portés au<br />
document graphique, les constructions nouvelles <strong>et</strong> les<br />
changements <strong>de</strong> <strong>de</strong>stination ne sont autorisés, pour les rez<strong>de</strong>-chaussée<br />
donnant sur voie, que pour <strong>de</strong>s affectations<br />
autres que l’habitation. On favorise ainsi la réappropriation<br />
d’un bâti par <strong>de</strong>s activités moins sensibles au bruit.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 43
Une autre stratégie consistera, en bordure d’une voie<br />
bruyante, à inscrire dans le PLU un secteur plan masse AU<br />
indicé (b) — b comme bruit —, avec obligation d’un<br />
document graphique pour toute urbanisation du secteur <strong>et</strong><br />
d’une notice acoustique conseillée, <strong>de</strong>vant expliquer les<br />
choix d’aménagement en fonction <strong>de</strong> la problématique <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
Enfin, <strong>de</strong>rnier point, qui correspond à un domaine restant à<br />
explorer, il serait souhaitable, comme c’est le cas à<br />
Grenoble, d’insérer en annexe du PLU <strong>de</strong>s recommandations<br />
techniques à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s maîtres d’ouvrage <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
architectes. En intervenant c<strong>et</strong>te fois au niveau du permis<br />
<strong>de</strong> construire, les quatre stratégies présentées<br />
précé<strong>de</strong>mment — éloigner, protéger, orienter, isoler —<br />
peuvent constituer un canevas d’organisation possible pour<br />
la conception <strong>de</strong> solutions d’aménagement cohérentes.<br />
Débat<br />
Et les activités bruyantes, les lieux diffusant<br />
<strong>de</strong> la musique amplifiée notamment ? La boîte<br />
à outils marche aussi ?<br />
Compte tenu du thème <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te séance plénière — la gestion<br />
du bruit le long <strong>de</strong>s infrastructures —, V. Poirot <strong>et</strong><br />
M. Esmenjaud ne se sont pas appesantis dans leur<br />
intervention sur les problématiques liées aux activités. Lors<br />
du diagnostic ou <strong>de</strong> la phase <strong>de</strong> prospective, il convient<br />
d’i<strong>de</strong>ntifier s’il existe un problème ou s’il risque <strong>de</strong> s’en<br />
poser un. Les salles <strong>de</strong> spectacles, les bars musicaux sont<br />
bien entendu concernés au premier chef par les plans<br />
d’aménagements. Le gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong> bruit abor<strong>de</strong> aussi les<br />
problèmes <strong>de</strong>s activités.<br />
Quand le traitement d’une nuisance sonore<br />
crée une autre nuisance sonore…<br />
L’exemple <strong>de</strong> la stratégie consistant à implanter <strong>de</strong>s<br />
commerces en rez-<strong>de</strong>-chaussée soulève en même temps la<br />
problématique <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> occasionnées par les<br />
livraisons. À travers c<strong>et</strong>te remarque s’exprime la difficulté<br />
supplémentaire que constitue pour les urbanistes l’objectif<br />
<strong>de</strong> mixité <strong>de</strong>s fonctions urbaines prôné par la loi SRU. Le<br />
risque <strong>de</strong> report <strong>de</strong>s nuisances existe <strong>et</strong> doit être pris en<br />
compte au niveau du permis <strong>de</strong> construire <strong>et</strong>,<br />
éventuellement, au niveau <strong>de</strong> la réglementation sur les<br />
bruits <strong>de</strong> voisinage. Le parti urbanistique <strong>de</strong> la proximité<br />
entre commerces <strong>et</strong> habitat n’est pas forcément facile à<br />
gérer, mais la ségrégation présente elle aussi d’autres<br />
inconvénients.<br />
Sur ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s bruits occasionnés par les commerces <strong>et</strong><br />
supér<strong>et</strong>tes, il faut signaler que le groupe <strong>de</strong> travail mené par<br />
M. Ritter au sein du Conseil national du bruit <strong>de</strong>vait, courant<br />
2005, produire <strong>de</strong>s propositions sur ce thème.<br />
Habitation construite à proximité d’une<br />
activité bruyante : qui est responsable ?<br />
Quand une mairie déci<strong>de</strong> d’autoriser la construction<br />
d’habitations à proximité d’une activité bruyante, par<br />
exemple, un champ <strong>de</strong> tir, un atelier, une usine, une salle<br />
<strong>de</strong>s fêtes, <strong>et</strong> que les riverains entament ensuite une<br />
procédure contre l’activité, il appartient bien sûr aux<br />
tribunaux <strong>de</strong> déterminer le responsable. Il faut savoir que la<br />
règle <strong>de</strong> l’antériorité ne s’applique plus dès lors que la<br />
réglementation sur les bruits <strong>de</strong> voisinage n’est pas<br />
respectée. Souvent, c’est l’activité qui se trouve en tort,<br />
malgré son antériorité. Parfois, le tribunal administratif est<br />
amené à modérer ce type <strong>de</strong> posture <strong>et</strong> à annuler un permis<br />
<strong>de</strong> construire pour non prise en compte <strong>de</strong>s problématiques<br />
<strong>de</strong> bruit. Quoi qu’il en soit, c’est exactement pour tenter <strong>de</strong><br />
prévenir ce type <strong>de</strong> conflits, qui se règlent, soit par<br />
contentieux <strong>de</strong> voisinage, soit par contentieux d’urbanisme,<br />
que la DDASS <strong>et</strong> la DDE <strong>de</strong> l’Isère ont créé leur gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong><br />
bruit.<br />
Qualité sonore <strong>de</strong>s espaces publics : existe-t-il<br />
une boîte à outils <strong>de</strong> l’aménageur ?<br />
Dans le sillage <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> mixité entre le social <strong>et</strong><br />
l’économique, on pourrait se préoccuper <strong>de</strong> la qualité<br />
sonore <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> vie publics en milieu urbain, comme les<br />
places <strong>de</strong> marché par exemple. Dans leur gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong> bruit,<br />
V. Poirot <strong>et</strong> M. Esmenjaud ont pris le parti <strong>de</strong> ne pas abor<strong>de</strong>r<br />
directement la notion <strong>de</strong> qualité sonore, restant dans le<br />
registre plus réglementaire du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’urbanisme, <strong>de</strong><br />
l’élaboration d’un PLU. [NDLR : Pour ces problématiques <strong>de</strong><br />
qualité sonore, auxquelles les auteurs <strong>de</strong> ce gui<strong>de</strong> sont loin<br />
d’être indifférents, mais qui sont difficiles à abor<strong>de</strong>r sous<br />
l’angle strictement réglementaire, on se reportera<br />
notamment vers les travaux <strong>de</strong> laboratoires tels que le<br />
<strong>Centre</strong> pour la recherche sur l'environnement sonore<br />
(Cresson, Grenoble)].<br />
L’aménagement <strong>de</strong> la voirie<br />
Dominique Prat (<strong>Centre</strong> d'étu<strong>de</strong>s sur les<br />
réseaux, les transports, l'urbanisme <strong>et</strong> les<br />
constructions publiques - Certu)<br />
Au Certu, Dominique Prat s’occupe <strong>de</strong> sécurité <strong>de</strong>s<br />
déplacements <strong>et</strong> <strong>de</strong>s usagers, domaine qui n'est pas<br />
directement lié à la problématique du bruit, mais qui traite<br />
plutôt <strong>de</strong> la sécurité routière, <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> “conduite<br />
apaisée en ville” <strong>et</strong> <strong>de</strong> la valorisation du cadre <strong>de</strong> vie.<br />
Néanmoins, sur le terrain <strong>de</strong> la vitesse, <strong>de</strong> la fluidité <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l'apaisement du trafic, l’acoustique <strong>et</strong> l’aménagement <strong>de</strong> la<br />
voirie ont certains intérêts communs.<br />
L'aménagement <strong>de</strong> la voirie en ville, historiquement, a pour<br />
principale vocation la sécurité routière, l'amélioration du<br />
cadre <strong>de</strong> vie <strong>et</strong> le meilleur usage <strong>de</strong> l'espace public.<br />
Quelques données d’acci<strong>de</strong>ntologie sont à connaître pour<br />
bien saisir l’importance <strong>de</strong> l’enjeu <strong>de</strong> la sécurité routière en<br />
ville : les <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts corporels surviennent en<br />
ville ; un tiers <strong>de</strong>s tués ou blessés graves sont le fait<br />
d’acci<strong>de</strong>nts survenus en ville ; en ville, les tués <strong>et</strong> les<br />
blessés graves sont, pour presque 70%, <strong>de</strong>s conducteurs <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>ux roues motorisés, <strong>de</strong>s cyclistes ou <strong>de</strong>s piétons ; les<br />
statistiques pour l’année 2003 font état <strong>de</strong> 2000 tués en<br />
zone urbaine.<br />
On le voit, la vitesse est l’élément déterminant <strong>de</strong> la<br />
sécurité routière en ville. Ce sont en eff<strong>et</strong> les usagers<br />
vulnérables, non protégés, qui sont les plus à risque. Deux<br />
autres données à connaître, <strong>et</strong> qui ne peuvent que renforcer<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
la légitimité <strong>de</strong>s zones trente : à 30 km/h, il faut environ 15<br />
mètres pour s’arrêter, alors qu’à 50 km/h, il en faut 25 ;<br />
dans un choc à 50 km/h, un piéton a 60% <strong>de</strong> risque mortel<br />
<strong>et</strong>, à 30 km/h, 15% seulement. Enfin, la relation entre le<br />
débit d’écoulement <strong>de</strong>s véhicules <strong>et</strong> la vitesse indique que<br />
l’optimum se situe à 50 km/h (2000 véhicules à l’heure),<br />
mais qu’à 30 km/h, le débit est encore <strong>de</strong> 1750 véhicules<br />
par heure, pas très éloigné <strong>de</strong> celui correspondant à 70<br />
km/h (1875 véhicules/h).<br />
Les aménagements ponctuels<br />
On distingue trois types d’aménagements <strong>de</strong> voirie : les<br />
aménagements ponctuels, <strong>de</strong> zones <strong>et</strong> d'itinéraires. Avant<br />
d’en abor<strong>de</strong>r quelques exemples, un principe à connaître : la<br />
réduction <strong>de</strong> la géométrie fait lever le pied. Soit par crainte<br />
d’abîmer sa voiture (toucher un rétroviseur, par exemple),<br />
soit par inconfort (à un mini carrefour giratoire, le véhicule<br />
est vite déporté par la force centrifuge ; un ralentisseur trop<br />
vite abordé, c’est la secousse assurée).<br />
Le coussin berlinois est dimensionné <strong>de</strong> manière telle qu'une<br />
voiture ne peut le franchir sans rouler <strong>de</strong>ssus, a contrario<br />
<strong>de</strong>s autres véhicules plus larges (poids lourds, autobus) <strong>et</strong><br />
moins larges (<strong>de</strong>ux roues). Ce type d’aménagement moins<br />
contraignant pour les poids lourds est donc moins bruyant.<br />
Un certain nombre <strong>de</strong> restrictions d’exploitation<br />
s’appliquent à ces obj<strong>et</strong>s isolés. Ils sont réservés aux voiries<br />
sans gros trafic, sur un seul sens <strong>et</strong> sur <strong>de</strong>s sections déjà<br />
ralenties, soit <strong>de</strong>s zones “apaisées” ou à vitesse régulière.<br />
Sinon, c’est la succession freinage-accélération, qui est<br />
acoustiquement décevante.<br />
Les plateaux surélevés, plus imposants que les coussins, sont<br />
fréquemment rencontrés aux carrefours ou en section<br />
courante, à proximité <strong>de</strong>s écoles ou dans <strong>de</strong>s secteurs<br />
sensibles.<br />
Les mini giratoires, quant à eux, sont intéressants du point<br />
<strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la sécurité, mais ils posent quelques problèmes<br />
d’acoustique. Cela tient à l’anneau central, qui est<br />
franchissable <strong>et</strong> complété par un traitement <strong>de</strong> sol. Son<br />
bilan acoustique n’est pas obligatoirement positif, mais le<br />
traitement <strong>de</strong> sol est indispensable pour lui conserver son<br />
caractère <strong>de</strong> contournement.<br />
Le giratoire se r<strong>et</strong>rouve plutôt en milieu périurbain. Sur<br />
l’anneau, les vitesses sont très raisonnables, <strong>de</strong> type 30<br />
km/h, mais l’important, en ce qui concerne le bruit, tient<br />
aux conditions d'approche <strong>et</strong> d’éloignement du giratoire :<br />
<strong>de</strong>s changements d'allure effectués dans un temps ou dans<br />
un espace trop court sont facteurs <strong>de</strong> hauts régimes moteur<br />
<strong>et</strong> donc <strong>de</strong> bruit.<br />
Les ralentisseurs, dos d’ânes ou ralentisseurs trapézoïdaux,<br />
sont l’un <strong>de</strong>s rares obj<strong>et</strong>s routiers ayant fait l'obj<strong>et</strong> d'un<br />
décr<strong>et</strong> d'application <strong>et</strong> d’une norme. Utilisés seuls, ils ont<br />
peu d’eff<strong>et</strong> sur la sécurité, <strong>et</strong> sont pénalisants au niveau<br />
acoustique. En intégration énergétique moyenne, ils peuvent<br />
facilement se traduire par 1, 2 voire 3 décibels<br />
supplémentaires, <strong>et</strong> davantage encore en niveau <strong>de</strong> crête.<br />
Ils n’ont donc d’intérêt que dans un ensemble cohérent,<br />
pour contribuer à l’apaisement du trafic dans un secteur<br />
délimité, <strong>et</strong> ne sont surtout pas adaptés aux voies à fort<br />
trafic ou aux zones <strong>de</strong> transition (passage <strong>de</strong> 90 km/h à 50<br />
km/h par exemple).<br />
Où implanter les zones 30 ?<br />
Les aménagements <strong>de</strong> zones, ou “zones 30”, sont <strong>de</strong>s zones<br />
<strong>de</strong> circulation homogène où la vitesse est limitée à 30 km/h,<br />
<strong>et</strong> dont les entrées <strong>et</strong> sorties sont annoncées par une<br />
signalisation <strong>et</strong> font l'obj<strong>et</strong> d’aménagements spécifiques.<br />
Ces aménagements spécifiques ont leur importance<br />
notamment pour rappeler à l’usager qu’il se trouve dans une<br />
zone 30.<br />
Contrairement à une idée répandue, une très gran<strong>de</strong><br />
majorité <strong>de</strong> la voirie urbaine est concernée : centre-ville,<br />
rues commerciales, zones rési<strong>de</strong>ntielles mais aussi certains<br />
axes forts. En agglomération, grosso modo, il n’y a guère<br />
que 10 à 20 % <strong>de</strong> la voirie qui soit incompatible avec le<br />
statut <strong>de</strong> zone 30. Ces voies dites “d’orientation du trafic”,<br />
majoritairement artérielles, voies <strong>de</strong> distribution moins<br />
fréquemment, sont <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong> trafic fort qui s’avèrent<br />
aussi être les plus bruyantes. Les voies “d’intérêt local”,<br />
principalement <strong>de</strong>s voies <strong>de</strong> <strong>de</strong>sserte, sont généralement <strong>de</strong><br />
parfaites candidates aux zones 30. Autrement dit, dans une<br />
agglomération, plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s voiries ont plus un<br />
intérêt local qu'un intérêt d'orientation du trafic <strong>et</strong>, pour<br />
c<strong>et</strong>te raison, pourraient passer en zone 30.<br />
L'un <strong>de</strong>s intérêts <strong>de</strong>s zones 30, à condition d’être bien<br />
aménagées, est <strong>de</strong> pouvoir s’affranchir, aux carrefours, <strong>de</strong>s<br />
stop, feux tricolores <strong>et</strong> cé<strong>de</strong>z-le-passage. L’on favorise ainsi<br />
une fluidité <strong>et</strong> une circulation apaisée sur un espace étendu.<br />
Les zones 30 offrent alors une multiplicité <strong>de</strong>s usages<br />
favorable à la revalorisation <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> déplacements<br />
lents, moins bruyants, tels que les <strong>de</strong>ux roues <strong>et</strong> les piétons.<br />
En France <strong>et</strong> en Europe, les zones 30 sont un <strong>de</strong>s piliers <strong>de</strong>s<br />
stratégies <strong>de</strong> déplacement mises en place dans le cadre d’un<br />
PDU. Par exemple, le PDU <strong>de</strong> la métropole lilloise prévoit<br />
plus <strong>de</strong> 2200 km <strong>de</strong> voirie en zone 30. Un bilan <strong>de</strong>s zones 30<br />
réalisé très récemment en France, portant sur plus <strong>de</strong> mille<br />
d’entre elles, démontre les eff<strong>et</strong>s très positifs <strong>de</strong> ce type<br />
d’aménagement. Après les objectifs prioritaires <strong>de</strong> la<br />
sécurité routière <strong>et</strong> <strong>de</strong> la valorisation <strong>de</strong> la circulation à<br />
pied, la qualité <strong>de</strong> l'environnement <strong>et</strong> la qualité <strong>de</strong> vie ont<br />
récolté <strong>de</strong>s indices <strong>de</strong> satisfaction très importants.<br />
Les aménagements d'itinéraire<br />
En entrées <strong>de</strong> ville, <strong>de</strong> façon classique, la vitesse est<br />
ralentie, suffisamment, pour marquer le point d'entrée.<br />
C’est assez efficace, à condition <strong>de</strong> pouvoir maintenir c<strong>et</strong>te<br />
vitesse réduite une fois l’entrée <strong>de</strong> ville passée. En<br />
traversée d’agglomération, l’on jouera très fréquemment<br />
sur la section courante. Dans le principe, on réduit la<br />
géométrie, libérant ainsi <strong>de</strong> l’espace pour les <strong>de</strong>ux-roues, on<br />
marque bien les flux par exemple au moyen d’un terre-plein<br />
central, pour éviter les conflits, <strong>et</strong> on donne à l’espace une<br />
signature qui tranche avec la traditionnelle infrastructure<br />
réservée au “tout automobile”. Sécurité, vitesse <strong>et</strong> bruit y<br />
sont gagnants. Les requalifications d'infrastructure, quoi que<br />
beaucoup plus lourds, participent <strong>de</strong> la même logique.<br />
Transformer un boulevard à 2 × 2 en un 2 × 1 voie avec<br />
implantation <strong>de</strong> pistes cyclables, voies d’autobus <strong>et</strong><br />
plantations axiales, c’est changer radicalement l’ambiance<br />
urbaine, les mo<strong>de</strong>s d’occupation <strong>de</strong> l’espace <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
déplacement. Aux carrefours giratoires, la requalification<br />
n’est pas forcément synonyme <strong>de</strong> débit d’écoulement<br />
réduit, bien au contraire : à Nantes, boulevard <strong>de</strong><br />
Sarrebruck, on est passé <strong>de</strong> vitesses moyennes <strong>de</strong> 60 km/h<br />
aux heures <strong>de</strong> pointe <strong>et</strong> <strong>de</strong> 110 km/h aux heures creuses, à<br />
<strong>de</strong>s vitesses <strong>de</strong> 35 à 40 km/h aux heures <strong>de</strong> pointe <strong>et</strong> <strong>de</strong> 50<br />
km/h aux heures creuses. Dans le même temps, le trafic,<br />
lui, est passé <strong>de</strong> 37 000 véhicules par jour à 43 000 véhicules<br />
par jour. Quant au gain acoustique, il est <strong>de</strong> 2 à 3 dB(A).<br />
Dans la même logique, beaucoup <strong>de</strong> collectivités suppriment<br />
les autoponts, structures plutôt dédiées à la vitesse, pour<br />
rem<strong>et</strong>tre à niveau l’ensemble <strong>de</strong>s infrastructures.<br />
La tendance est donc à l’effacement <strong>de</strong>s infrastructures<br />
dédiées à l’automobile, à une lecture <strong>de</strong> l’espace simplifiée,<br />
au profit <strong>de</strong>s cheminements piétonniers <strong>et</strong> <strong>de</strong>s transports en<br />
commun <strong>et</strong> d’une réduction <strong>de</strong> la vitesse.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 45
Les autoroutes “apaisées”<br />
Certaines collectivités ont commencé à réfléchir à la<br />
transposition <strong>de</strong> ces réflexions aux axes autoroutiers.<br />
L’objectif ? Réintégrer ce type d’infrastructure dans le tissu<br />
urbain <strong>et</strong> dans la vie locale, en supprimant l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
coupure, en réduisant la vitesse en permanence, <strong>et</strong> pas<br />
seulement aux heures <strong>de</strong> pointe, en supprimant les<br />
nuisances, <strong>sonores</strong> bien sûr, mais aussi paysagères, <strong>de</strong><br />
pollution atmosphérique. Réflexions ambitieuses mais qui<br />
méritent d’être suivies. L’agglomération grenobloise, à<br />
travers l’agence d’urbanisme <strong>de</strong> Grenoble <strong>et</strong> la DDE <strong>de</strong><br />
l’Isère, s’intéresse à <strong>de</strong> tels aménagements.<br />
La bonne nouvelle dans tout cela, c’est qu’on peut “faire<br />
d’une pierre <strong>de</strong>ux coups” : en réduisant la vitesse <strong>et</strong> en<br />
assurant la fluidité du trafic, on réduit le bruit <strong>et</strong> on<br />
améliore la sécurité routière.<br />
L’impact acoustique <strong>de</strong>s aménagements <strong>de</strong> voirie<br />
En 2002, le laboratoire régional <strong>de</strong>s Ponts-<strong>et</strong>-Chaussées <strong>de</strong><br />
Blois a étudié une trentaine d’aménagements —<br />
aménagements isolés, zones 30, carrefours giratoires,<br />
entrées <strong>de</strong> ville, traversées d’agglomérations.<br />
Les aménagements isolés <strong>de</strong> type dos d’âne ou coussins, en<br />
cas <strong>de</strong> changement d’allure marquée, s’accompagnent d’une<br />
augmentation <strong>de</strong> 1 à 2 dB(A). Les carrefours giratoires,<br />
ponctuellement, c’est-à-dire au droit du carrefour, ont un<br />
eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong> 1 à 3 dB(A) mais, sur l’ensemble <strong>de</strong> la<br />
structure, ils sont acoustiquement transparents. Quant aux<br />
zones 30, les résultats sont variables selon les zones. Bien<br />
aménagées, elles peuvent faire gagner 2 dB(A). Les entrées<br />
<strong>de</strong> ville, à condition d’assurer une réduction progressive <strong>de</strong>s<br />
vitesses, sont plutôt efficaces, avec <strong>de</strong>s gains <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 2<br />
à 4 dB(A). Les traversées d’agglomérations peuvent faire<br />
gagner 2 dB(A) mais, pour cela, il faut absolument maintenir<br />
la vitesse réduite.<br />
Une remarque néanmoins sur les étu<strong>de</strong>s avant-après : il<br />
n’est pas toujours facile <strong>de</strong> distinguer l’apport du<br />
revêtement moins bruyant ou <strong>de</strong> l’aménagement, ou <strong>de</strong>s<br />
nombreux autres paramètres qui sont modifiés à l’occasion<br />
d’un aménagement <strong>de</strong> voirie.<br />
Régulation <strong>de</strong> vitesse <strong>et</strong> bruit en milieu urbain : le cas <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s vertes<br />
modérantes<br />
Gérard Horvath (ville <strong>de</strong> Clermont-Ferrand)<br />
Gérard Horvath est directeur du service <strong>de</strong> circulation à la<br />
ville <strong>de</strong> Clermont-Ferrand. Comme l’a souligné<br />
précé<strong>de</strong>mment M. Prat, la régulation <strong>de</strong> la vitesse en ville a<br />
pour principal but la sécurité routière, mais l’influence <strong>de</strong> la<br />
régulation du trafic sur le bruit n’est pas négligeable. C<strong>et</strong>te<br />
intervention s’attache à présenter les modalités <strong>de</strong> mise en<br />
place d’une on<strong>de</strong> verte modérante, <strong>et</strong> les conséquences sur<br />
la vitesse <strong>et</strong> le bruit qu’on peut raisonnablement en<br />
attendre.<br />
Un p<strong>et</strong>it rappel utile : la capacité d’un réseau urbain est<br />
celle <strong>de</strong>s carrefours, <strong>et</strong> notamment <strong>de</strong>s carrefours à feux. En<br />
d’autres termes, conduire vite en ville n’est pas utile, car la<br />
vitesse moyenne d’un véhicule particulier en ville, compte<br />
tenu <strong>de</strong>s arrêts aux feux tricolores <strong>et</strong> <strong>de</strong>s encombrements,<br />
se situe aux alentours <strong>de</strong> 25 à 28 km/h. En transports<br />
collectifs, seulement la moitié du temps d’un déplacement<br />
est consacré au roulage.<br />
Bénéfices <strong>et</strong> limites<br />
Pour m<strong>et</strong>tre en place une coordination d’itinéraire, la<br />
condition indispensable est la présence rapprochée <strong>de</strong> feux<br />
sur un ou plusieurs axes du réseau. Le décalage dans<br />
l’apparition du feu vert d’un carrefour à l’autre perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
générer <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong> circulation privilégiés, l’objectif étant<br />
la diminution du nombre <strong>et</strong> <strong>de</strong> la durée <strong>de</strong>s arrêts. Les<br />
bénéfices <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s vertes ? Plus <strong>de</strong> confort pour l’usager<br />
motorisé, plus <strong>de</strong> crédibilité <strong>de</strong>s feux, plus <strong>de</strong> sécurité, par<br />
homogénéisation <strong>de</strong> la vitesse, <strong>et</strong> moins <strong>de</strong> nuisances.<br />
En revanche, l’on<strong>de</strong> verte a ses limites. Elle n’augmente pas<br />
la capacité d’écoulement <strong>de</strong> la voirie (à moins d’un eff<strong>et</strong><br />
dynamique dans certaines conditions). La durée <strong>de</strong> cycle<br />
doit être commune, ce qui réduit considérablement la marge<br />
<strong>de</strong> manœuvre pour optimiser chacun <strong>de</strong>s carrefours. En<br />
régime saturé, l’on<strong>de</strong> verte ne fonctionne pas. Elle est<br />
souvent incompatible avec les priorités à donner aux<br />
transports en commun. Elle pose problème pour les<br />
carrefours à trois phases <strong>et</strong>, dans le cas <strong>de</strong>s voies à double<br />
sens, c<strong>et</strong>te mesure est très difficile à optimiser.<br />
En milieu urbain <strong>de</strong>nse, la présence <strong>de</strong> carrefours à feux<br />
espacés <strong>de</strong> 250 à 300 mètres constitue la condition optimale<br />
pour réaliser une coordination. En milieu urbain non<br />
perturbé, c<strong>et</strong>te distance est <strong>de</strong> 500 mètres.<br />
Les différentes métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> coordination<br />
La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> la minimisation <strong>de</strong>s r<strong>et</strong>ards s’adresse plutôt<br />
au réseau maillé exempt d’eff<strong>et</strong> d’itinéraire. Son intérêt<br />
collectif est certain, mais il exige <strong>de</strong> puissants outils<br />
informatiques. L’on<strong>de</strong> verte, quant à elle, est conseillée<br />
pour les itinéraires suivis ne comportant ni trop d’apports<br />
<strong>de</strong>s voies adjacentes ni trop <strong>de</strong> sorties. L’on<strong>de</strong> verte<br />
modérante, enfin, une évolution <strong>de</strong> l’on<strong>de</strong> verte, vise à<br />
augmenter la sécurité <strong>et</strong> à diminuer les nuisances en<br />
régulant la vitesse.<br />
La coordination d’une on<strong>de</strong> verte unidirectionnelle se fait au<br />
moyen d’un diagramme où l’axe vertical représente les<br />
différentes positions <strong>de</strong>s feux tricolores, où l’axe horizontal<br />
indique le temps, <strong>et</strong> où l’inclinaison <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s du<br />
diagramme correspond à la vitesse du trafic. La ban<strong>de</strong><br />
passante correspond à la durée <strong>de</strong> feu vert minimale<br />
commune à tous les carrefours. Le principe du “calage à<br />
l’ouverture” correspond à la situation où l’ouverture du<br />
premier carrefour déci<strong>de</strong> <strong>de</strong>s ouvertures <strong>de</strong>s carrefours<br />
suivants. Ce système fonctionne bien en cas d’apport faible<br />
<strong>de</strong>s transversales. Le calage à la ferm<strong>et</strong>ure, quant à lui, est<br />
à privilégier, car il n’incite pas à la vitesse. En eff<strong>et</strong>, il<br />
empêche toute tentative <strong>de</strong> “remontée <strong>de</strong> la zone verte”,<br />
ce comportement dangereux consistant à accélérer pour<br />
passer tous les feux au vert.<br />
L’on<strong>de</strong> verte modérante<br />
Dans le cas <strong>de</strong> l’on<strong>de</strong> verte modérante, on s’efforce <strong>de</strong><br />
diminuer autant que possible la ban<strong>de</strong> passante. Le feu vert<br />
est ainsi réduit à la durée minimale réglementaire<br />
d’ouverture d’un feu, soit le temps minimum nécessaire à la<br />
traversée d’un piéton sur une voie transversale. Ce système<br />
a un eff<strong>et</strong> très dissuasif sur la vitesse, car il interdit<br />
pratiquement toute tentative d’accélération pour<br />
“remonter” la zone verte. Le but <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s vertes<br />
modérantes, bien entendu, est la modération <strong>et</strong><br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
l’homogénéité <strong>de</strong>s vitesses, <strong>et</strong>, partant, la diminution <strong>de</strong>s<br />
nuisances.<br />
Quelles sont les conditions requises pour m<strong>et</strong>tre en place les<br />
on<strong>de</strong>s vertes modérantes ? Des carrefours proches les uns<br />
<strong>de</strong>s autres (200-300 m), un environnement peu contraint <strong>et</strong><br />
homogène, un calage à l’ouverture <strong>et</strong> à la ferm<strong>et</strong>ure, une<br />
ban<strong>de</strong> passante étroite (20 secon<strong>de</strong>s) <strong>et</strong> une vitesse <strong>de</strong><br />
coordination faible (40 à 42 km/h). Autre condition<br />
essentielle : que les feux lointains soient masqués, afin que<br />
l’automobiliste ne puisse les voir longtemps à l’avance.<br />
Les résultats sont très encourageants : dans sa version<br />
modérante, l’on<strong>de</strong> verte ne compte plus que 2 à 3%<br />
d’automobilistes la parcourant à 70 km/h, contre 13% avec<br />
l’on<strong>de</strong> verte classique. Une écrasante majorité <strong>de</strong>s véhicules<br />
adoptent une vitesse comprise entre 35 <strong>et</strong> 45 km/h.<br />
Les on<strong>de</strong>s vertes modérantes constituent en fait l’un <strong>de</strong>s<br />
seuls moyens <strong>de</strong> réguler la vitesse au moyen <strong>de</strong> feux<br />
tricolores. Elles offrent <strong>de</strong>s perspectives intéressantes en<br />
ville. On notera au passage que les feux asservis à la vitesse,<br />
dits “feux espagnols”, qui consistent à arrêter par un feu les<br />
conducteurs qui roulent trop vite, sont interdits en France,<br />
en raison <strong>de</strong> certains eff<strong>et</strong>s pervers.<br />
Le cas <strong>de</strong> Clermont-Ferrand<br />
Le centre-ville <strong>de</strong> Clermont-Ferrand est actuellement le<br />
siège d’important travaux : insertion d’un tramway,<br />
piétonisation <strong>de</strong> la place centrale, large extension <strong>de</strong><br />
l’emprise piétonnière en hyper centre. Conséquence <strong>de</strong>s<br />
travaux, l’offre <strong>de</strong> voirie a subi une très forte réduction <strong>et</strong><br />
l’offre <strong>de</strong> transports publics s’est n<strong>et</strong>tement dégradée. Pour<br />
maintenir l’activité en ville, décision a été prise d’aménager<br />
un boulevard <strong>de</strong> contournement. Dans son emprise<br />
existante, les boulevards Aristi<strong>de</strong> Briand, Jean Jaurès <strong>et</strong><br />
Cote-Blatin sont ainsi passés <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à trois voies. C<strong>et</strong>te<br />
solution s’étant accompagnée <strong>de</strong> problèmes <strong>de</strong> sécurité, en<br />
raison <strong>de</strong> la vitesse <strong>et</strong> <strong>de</strong>s traversées <strong>de</strong> piétons, ainsi que<br />
<strong>de</strong> nuisance <strong>sonores</strong>, une on<strong>de</strong> verte modérante a été mise<br />
en place.<br />
Les vitesses relevées après mise en place sont très proches<br />
<strong>de</strong> 50 km/h. Les écarts-types pour chacune <strong>de</strong>s trois voies<br />
sont très faibles, peu <strong>de</strong> véhicules circulant à <strong>de</strong>s vitesses<br />
supérieures à 70 km/h. Côté nuisances <strong>sonores</strong>, le<br />
laboratoire régional <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées avait été chargé<br />
<strong>de</strong> vérifier la conformité réglementaire <strong>de</strong> l’opération. Il<br />
s’agissait notamment <strong>de</strong> vérifier s’il s’agissait d’une<br />
modification significative <strong>de</strong> l’infrastructure, au sens <strong>de</strong>s<br />
articles 2 <strong>et</strong> 3 du décr<strong>et</strong> 95-22. Le laboratoire avait mené<br />
une modélisation simplifiée au moyen du logiciel Artémis.<br />
Aux trois points récepteurs considérés par le modèle, en ne<br />
prenant en compte que l’augmentation <strong>de</strong> trafic (6000<br />
unités <strong>de</strong> véhicules particuliers par jour), l’écart obtenu<br />
entre la configuration <strong>de</strong>ux voies <strong>et</strong> la configuration trois<br />
voies était <strong>de</strong> 0,9 dB(A), 1,9 dB(A) <strong>et</strong> 1,1 dB(A). Des mesures<br />
acoustiques avaient été réalisées avant <strong>et</strong> après le passage à<br />
trois voies <strong>et</strong> la mise en place <strong>de</strong> l’on<strong>de</strong> verte modérante. Le<br />
trafic moyen journalier annuel est passé <strong>de</strong> 18 000 véhicules<br />
par jour environ à 23 000 véhicules par jour. Quant aux<br />
niveaux <strong>sonores</strong> moyens L Aeq, <strong>de</strong> jour, ils ont connu une<br />
baisse <strong>de</strong> un <strong>de</strong>mi décibel sur tous les points ; la nuit, <strong>de</strong>ux<br />
points sont en baisse, un seul en légère hausse (+ 0,2 dB(A)).<br />
Conclusion ? Malgré l’augmentation du trafic <strong>de</strong> 35%, l’on<strong>de</strong><br />
verte modérante a permis <strong>de</strong> ne pas dégra<strong>de</strong>r les niveaux<br />
<strong>sonores</strong>. La mise en place d’un tel système apporte une<br />
régulation <strong>de</strong> la vitesse — ce qui est bon pour la sécurité —,<br />
un confort accru pour les automobilistes <strong>et</strong> une non<br />
dégradation <strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong>.<br />
Débat<br />
L’on<strong>de</strong> verte ne reporte-t-elle pas les<br />
nuisances sur les voies adjacentes ?<br />
Deux axes importants qui se croisent en un point peuvent,<br />
l’un <strong>et</strong> l’autre, être régulés par on<strong>de</strong> verte modérante. Pour<br />
rejoindre l’axe régulé, un véhicule provenant d’un axe<br />
transversal doit avoir le feu vert pour lui, donc l’axe régulé<br />
est alors au rouge. Plus loin, il trouve un feu rouge <strong>et</strong> entre<br />
réellement dans l’on<strong>de</strong> verte quand il redémarre ensuite. En<br />
revanche, la régulation par on<strong>de</strong> verte n’est plus adaptée<br />
lorsque le réseau est fortement maillé c’est-à-dire trop<br />
complexe pour maîtriser l’itinéraire <strong>de</strong>s véhicules <strong>de</strong>puis<br />
leur point d’entrée jusque leur point <strong>de</strong> sortie. S’imposent<br />
alors <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> régulation <strong>de</strong> trafic différentes, qui<br />
n’ont pas les mêmes eff<strong>et</strong>s <strong>et</strong> qui sont moins bien perçus par<br />
les automobilistes.<br />
Quel est le coût <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> régulation ?<br />
Le coût <strong>de</strong> mise en place d’une on<strong>de</strong> verte modérante est<br />
négligeable, dans la mesure où il s’agit d’une simple<br />
adaptation <strong>de</strong>s calculs propres à la régulation centralisée.<br />
Compatibilité avec le triphasé ?<br />
Les 3,6 km <strong>de</strong> boulevard aménagés à Clermont-Ferrand<br />
comptent plusieurs carrefours à feux dont <strong>de</strong>ux ou trois sont<br />
à trois phases. L’on<strong>de</strong> verte modérante a pu être mise en<br />
place malgré ces carrefours à 3 phases, mais cela a nécessité<br />
<strong>de</strong>s inversions <strong>de</strong> phase.<br />
Les écrans antibruit, les revêtements routiers peu bruyants <strong>et</strong> l'isolation<br />
<strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s : leur utilisation en milieu urbain<br />
Nathalie Fürst (<strong>Centre</strong> d'étu<strong>de</strong> sur les<br />
réseaux, les transports, l'urbanisme<br />
<strong>et</strong> les constructions publiques)<br />
Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>s mesures préventives, telles que la planification<br />
dans les documents d’urbanisme, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s mesures<br />
curatives, mais “douces”, telles que la gestion du trafic <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la vitesse, il arrive parfois que l’on ait besoin <strong>de</strong> solutions<br />
immédiates qui apportent <strong>de</strong>s gains bien plus conséquents. Il<br />
faut alors se tourner vers les solutions lour<strong>de</strong>s que sont les<br />
écrans acoustiques, les revêtements <strong>et</strong> l’isolation acoustique<br />
<strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Voici donc un état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> ces différents<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> protection. L’ordre suivi pour les présenter —<br />
écrans, isolation <strong>et</strong> revêtements — correspond aux<br />
préconisations réglementaires nationales ainsi qu’aux<br />
orientations européennes. C<strong>et</strong> ordre respecte aussi<br />
l’efficacité respective <strong>de</strong> ces différentes techniques. Ce qui<br />
ne signifie pas que l’une ou l’autre <strong>de</strong> ces techniques soit<br />
meilleure que les autres. Elles sont en réalité<br />
complémentaires les unes <strong>de</strong>s autres.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 47
Spécificités du contexte urbain<br />
Le domaine périurbain se caractérise par un espacement<br />
relativement important entre le bâti <strong>et</strong> les infrastructures<br />
<strong>de</strong> transport, un bâti élevé mais assez dispersé, <strong>de</strong>s vitesses<br />
plutôt élevées, comprises entre 70 <strong>et</strong> 110 km/h, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s flux<br />
en général continus perm<strong>et</strong>tant au trafic <strong>de</strong> s’écouler assez<br />
facilement. En centre urbain, en revanche, l’espace est<br />
restreint, le bâti <strong>de</strong>nse se trouve à proximité immédiate <strong>de</strong>s<br />
infrastructures, les vitesses sont plus faibles <strong>et</strong> les allures<br />
plus heurtées.<br />
Les écrans acoustiques<br />
En centre urbain, l’utilisation <strong>de</strong>s écrans acoustiques est très<br />
limitée. À quelques exceptions près, comme à Vienne, c’est<br />
une solution réservée au milieu périurbain, où la protection<br />
par murs antibruit est d’ailleurs largement utilisée<br />
aujourd’hui.<br />
Il suffit d’esquisser les quelques principes <strong>de</strong><br />
fonctionnement <strong>de</strong>s écrans pour en saisir aussi les limites.<br />
Trois paramètres sont à prendre en compte. La capacité<br />
qu’a l’écran d’empêcher la transmission est liée à la nature<br />
<strong>de</strong>s matériaux qui le constituent — à leur <strong>de</strong>nsité en<br />
particulier — <strong>et</strong> à sa mise en œuvre. Dans la majorité <strong>de</strong>s<br />
cas, à condition que l’écran soit correctement installé, sa<br />
capacité d’atténuation en transmission est satisfaisante.<br />
Lors <strong>de</strong> la diffraction <strong>de</strong>s on<strong>de</strong>s <strong>sonores</strong>, le somm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’écran agit comme une secon<strong>de</strong> source sonore qui s’ajoute<br />
aux sons partiellement transmis <strong>et</strong> limite ainsi la<br />
performance <strong>de</strong> l’écran. Des pistes existent pour influer sur<br />
la diffraction, notamment en modifiant les matériaux ou la<br />
forme <strong>de</strong>s têtes d’écrans. Troisième paramètre, la réflexion,<br />
qui dépend <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s matériaux utilisés ainsi que <strong>de</strong><br />
l’inclinaison <strong>et</strong> <strong>de</strong> la configuration <strong>de</strong> l’écran. La réflexion,<br />
qui doit être bien prise en compte, sera, selon les cas,<br />
supprimée ou diminuée. Un écran acoustique a une zone<br />
d’influence limitée, appelée “zone d’ombre”, si bien que<br />
<strong>de</strong>s protections complémentaires ou d’autres solutions<br />
<strong>de</strong>vront être recherchées pour les bâtiments <strong>de</strong> dimensions<br />
importantes. D’autant que c<strong>et</strong>te forte atténuation en zone<br />
d’ombre est limitée par le phénomène <strong>de</strong> la diffraction,<br />
paramètre sur lequel il convient donc <strong>de</strong> travailler. Dans le<br />
cas <strong>de</strong> bâtiments situés en vis-à-vis, <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre <strong>de</strong><br />
l’axe routier, la réflexion doit être prise en compte sous<br />
peine <strong>de</strong> voir les on<strong>de</strong>s <strong>sonores</strong> renvoyées sur les bâtiments<br />
situés du côté non protégé.<br />
Dans quels cas utiliser les écrans ?<br />
Les recommandations réglementaires, qui incitent à<br />
privilégier les actions à la source, sont un motif majeur<br />
d’utilisation <strong>de</strong>s écrans. Pourquoi ? Agissant au plus près <strong>de</strong><br />
la source, offrant <strong>de</strong>s atténuations importantes, efficace<br />
pour protéger un nombre important <strong>de</strong> bâtiments, c<strong>et</strong>te<br />
solution offre le meilleur rapport coût/efficacité. On s’en<br />
doute, les écrans protègent aussi les espaces extérieurs,<br />
jardins, aires <strong>de</strong> jeux, zones <strong>de</strong> détente, notamment aux<br />
pieds <strong>de</strong>s immeubles. C<strong>et</strong>te capacité à protéger les espaces<br />
extérieurs est d’ailleurs l’un <strong>de</strong>s critères les plus cités par<br />
les riverains lors <strong>de</strong> consultations. Enfin, les écrans peuvent<br />
être complétés par <strong>de</strong>s couronnements. Certaines étu<strong>de</strong>s ont<br />
montré <strong>de</strong>s possibilités <strong>de</strong> gain <strong>de</strong> 1 à 2 dB(A) par l’ajout <strong>de</strong><br />
couronnements. L’efficacité d’un couronnement dépend <strong>de</strong><br />
sa nature <strong>et</strong> <strong>de</strong> la façon dont il est mis en œuvre ; <strong>de</strong>s<br />
évaluations complémentaires doivent être menées pour<br />
mieux en apprécier l’intérêt.<br />
Efficacité <strong>et</strong> coût <strong>de</strong>s écrans<br />
L’atténuation globale d’un écran est fonction <strong>de</strong> la nature<br />
<strong>de</strong> l’écran, <strong>de</strong>s matériaux, <strong>de</strong> l’inclinaison <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
topographie du site. Il est évi<strong>de</strong>nt qu’un écran placé en pied<br />
<strong>de</strong> colline aura très peu d’efficacité pour les bâtiments<br />
situés en surplomb. À l’inverse, en bordure d’une route en<br />
remblais, l’écran aura une efficacité beaucoup plus<br />
importante. Autre fait important, l’atténuation dépend aussi<br />
<strong>de</strong> la distance entre le récepteur <strong>et</strong> l’écran : l’efficacité est<br />
maximale pour les récepteurs très proches <strong>de</strong> l’écran, <strong>et</strong>,<br />
plus l’on s’éloigne, plus c<strong>et</strong>te efficacité diminue. Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong><br />
quelques centaines <strong>de</strong> mètres, la présence <strong>de</strong> l’écran n’est<br />
plus perceptible. L’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> l’atténuation varie<br />
entre 5 <strong>et</strong> 12 dB(A) pour les séparations verticales classiques<br />
(buttes, écrans) ; les couvertures (partielles, à damiers,<br />
totales) peuvent atteindre jusqu’à 15 dB(A) d’atténuation.<br />
De telles atténuations ont bien évi<strong>de</strong>mment un coût<br />
important. Quels sont les éléments à prendre en compte<br />
pour l’estimation du coût d’un écran ? Les matériaux<br />
(panneaux, poteaux), la pose (fondations, chantier, qui peut<br />
s’avérer coûteux, notamment en cas <strong>de</strong> restrictions<br />
d’implantation liées à l’acoustique), les dépenses connexes<br />
(acquisition <strong>de</strong> terrain, insertion paysagère, traitements<br />
paysagers), la maintenance <strong>et</strong> l’entr<strong>et</strong>ien. Ce <strong>de</strong>rnier point<br />
est trop souvent oublié : pourtant, pour assurer la pérennité<br />
<strong>de</strong>s performances d’un écran, le suivi <strong>et</strong> l’entr<strong>et</strong>ien sont<br />
essentiels. Pour <strong>de</strong>s hauteurs courantes comprises entre 2 <strong>et</strong><br />
5 mètres, le coût, incluant uniquement les matériaux <strong>et</strong> la<br />
pose, d’un modèle industriel (bois, béton, béton-bois)<br />
produit en gran<strong>de</strong> série est <strong>de</strong> 300 à 450 € par mètre carré ;<br />
pour <strong>de</strong>s matériaux plus coûteux (matériau transparent), ou<br />
<strong>de</strong>s écrans correspondant à un proj<strong>et</strong> d'architecte, ou une<br />
construction moins industrialisée, l’écran “fourni posé” peut<br />
coûter entre 450 <strong>et</strong> 800 € par mètre carré.<br />
Limites d’utilisation <strong>de</strong>s écrans acoustiques<br />
L’espace disponible pour l’écran <strong>et</strong> les fondations est la<br />
contrainte majeure, qui explique que ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> protection<br />
soit souvent inadapté au milieu urbain. Dans le cas <strong>de</strong><br />
configuration <strong>de</strong> bâtiments en vis-à-vis, <strong>de</strong>s traitements<br />
visant à réduire les problèmes <strong>de</strong> réflexions multiples<br />
s’imposent. Egalement, les problèmes d’accès <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
visibilité, liés au fait que l’écran constitue une séparation<br />
physique entre le bâti <strong>et</strong> l’infrastructure, compliquent la<br />
mise en œuvre <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> construction. L’accès aux<br />
transports collectifs <strong>et</strong> aux commerces est donc à prévoir.<br />
Autre point à signaler : comme toujours en acoustique, une<br />
mise en œuvre approximative se sol<strong>de</strong>ra par <strong>de</strong> moindres<br />
performances. Le suivi du chantier lors d’un proj<strong>et</strong> d’écran<br />
est donc un point important. A noter que <strong>de</strong>s normes<br />
perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> mesurer les performances in situ d’un écran<br />
pour s’assurer que la mise en œuvre a été correcte. Autre<br />
limitation, l’entr<strong>et</strong>ien <strong>et</strong> la maintenance : dégradations,<br />
panneaux ou vitrages manquants, jointures d’étanchéité<br />
défectueuses, suffisent à diminuer fortement les<br />
performances. Il convient donc <strong>de</strong> prévoir un programme <strong>de</strong><br />
suivi. Enfin, les écrans seuls ne suffisent pas toujours à<br />
résoudre le problème. Pour les bâtiments <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> hauteur<br />
par exemple, <strong>de</strong>s traitements complémentaires s’imposent,<br />
tels qu’une isolation acoustique <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>.<br />
L’isolation acoustique <strong>de</strong> faça<strong>de</strong><br />
L’intérêt <strong>de</strong> l’isolation acoustique <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>, solution<br />
complémentaire par excellence, tient au fait qu’elle<br />
s’applique pratiquement partout. C’est une solution qui<br />
compte peu <strong>de</strong> limites techniques. Elle a en revanche un<br />
grand inconvénient : elle ne protège pas les espaces<br />
extérieurs <strong>et</strong> n’est efficace que fenêtres fermées.<br />
Dans l’isolation acoustique d’une faça<strong>de</strong>, tous les éléments<br />
constitutifs <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> ont leur importance : la paroi<br />
opaque (béton, brique), les ouvertures (portes, fenêtres) <strong>et</strong><br />
les équipements (coffres <strong>de</strong> vol<strong>et</strong>s roulants, bouches<br />
d’aération). De préférence, c<strong>et</strong>te solution doit s’envisager<br />
lorsque les protections à la source ne sont pas<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
techniquement, économiquement, ou<br />
environnementalement réalisables (manque d’espace,<br />
technique trop coûteuse, relativement au nombre<br />
d’habitations à protéger, situation paysagère incompatible,<br />
<strong>et</strong>c.). Ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> protection peut par ailleurs trouver un<br />
intérêt en complément <strong>de</strong> protections à la source, en<br />
particulier pour les bâtiments <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> hauteur. Enfin,<br />
<strong>de</strong>rnière circonstance pouvant justifier la mise en œuvre <strong>de</strong>s<br />
isolements <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>, la multi-exposition (exposition à<br />
plusieurs sources <strong>de</strong> bruit, route, ferroviaire, aérienne,<br />
industrielle) peut rendre nécessaire l’association <strong>de</strong><br />
plusieurs techniques <strong>de</strong> protection.<br />
Efficacité <strong>et</strong> coût <strong>de</strong> l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong><br />
Dans le parc <strong>de</strong> bâtiments d’habitation actuel, en moyenne,<br />
on estime à 25 dB l’isolement minimal vis-à-vis <strong>de</strong>s bruits<br />
extérieurs. C<strong>et</strong>te valeur <strong>de</strong>vrait progressivement se<br />
rapprocher d’une valeur moyenne <strong>de</strong> 30 dB, la nouvelle<br />
réglementation acoustique exigeant que toute habitation<br />
construite après le 1 er janvier 1996 ait un isolement minimal<br />
<strong>de</strong> 30 dB. Quand on réalise un proj<strong>et</strong> d’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>,<br />
le minimum d’isolement à respecter est donc <strong>de</strong> 30 dB. Les<br />
valeurs d’isolement couramment pratiquées, compatibles<br />
avec <strong>de</strong>s coûts raisonnables, sont comprises entre 30 <strong>et</strong> 35<br />
dB. Quand les prescriptions vont au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> ces valeurs, 40<br />
ou même 45 dB, les conditions d’étanchéité pour atteindre<br />
ces valeurs étant extrêmement exigeantes, les coûts sont<br />
alors très élevés.<br />
Les éléments à prendre en compte pour estimer le coût <strong>de</strong><br />
l’isolation d’une faça<strong>de</strong> comprennent les matériaux (vitrage,<br />
menuiserie, bouches d’aération acoustiques le cas échéant)<br />
la pose <strong>et</strong> les dépenses connexes, telles que la remise en<br />
état <strong>de</strong>s lieux ou la ventilation. Concernant ce <strong>de</strong>rnier point,<br />
il faut savoir que <strong>de</strong>s spécifications particulières doivent<br />
être respectées en matière <strong>de</strong> renouvellement <strong>de</strong> l’air<br />
intérieur. L’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> consistant à supprimer les<br />
fuites d’air, il est indispensable <strong>de</strong> restaurer, ou d’installer,<br />
suivant les cas, la ventilation. Enfin, <strong>de</strong>rnier poste<br />
budgétaire à prendre en compte : les mesures acoustiques<br />
<strong>de</strong> validation <strong>de</strong>s travaux.<br />
Dans un logement individuel moyen, comprenant cinq<br />
ouvertures, le coût <strong>de</strong> l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> (matériaux <strong>et</strong><br />
pose) est compris entre 4500 <strong>et</strong> 7500 €. Dans les logements<br />
collectifs, où les opérations sont généralement groupées, les<br />
coûts sont plus faibles <strong>et</strong> sont compris entre 2000 <strong>et</strong> 4000 €.<br />
Le coût au mètre carré dépend, on s’en doute, <strong>de</strong><br />
l’isolement recherché : 35 dB(A) d’isolement coûtent 300 €<br />
du m 2 ; 36 à 38 dB(A) d’isolement coûtent 340 € par m 2 ; 38 à<br />
40 dB(A) d’isolement coûtent 400 € par m 2 .<br />
Limites d’utilisation <strong>de</strong> l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong><br />
Comme déjà mentionné, ce type <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong> protection<br />
acoustique souffre <strong>de</strong> son incapacité à protéger les espaces<br />
extérieurs aux bâtiments. Autre limite importante : elle<br />
n’est efficace que les fenêtres fermées. Dans certains<br />
bâtiments anciens ou dans les immeubles classés, pour<br />
lesquels <strong>de</strong>s spécifications techniques draconiennes<br />
s’appliquent, les contraintes d’architecture <strong>et</strong> d’esthétisme<br />
sont un autre frein important. Dernier inconvénient, à<br />
l’instar <strong>de</strong>s écrans acoustiques, l’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> exige<br />
une mise en œuvre soignée pour que l’efficacité visée soit<br />
atteinte.<br />
Les revêtements <strong>de</strong> chaussée peu bruyants<br />
Les revêtements <strong>de</strong> chaussée peu bruyants constituent une<br />
alternative technique intéressante, mais dans certaines<br />
circonstances seulement, notamment en tant que moyen <strong>de</strong><br />
traitement temporaire avant la mise en œuvre d’une autre<br />
solution. En eff<strong>et</strong>, leurs performances sont difficiles à<br />
évaluer <strong>et</strong> leur pérennité est encore mal connue. On ne<br />
dispose aujourd’hui d’aucune métho<strong>de</strong> idéale, en milieu<br />
urbain notamment, pour évaluer l’efficacité acoustique <strong>de</strong><br />
ces revêtements <strong>et</strong>, faute <strong>de</strong> recul suffisant, on ne peut<br />
garantir si les solutions mises en œuvre vont durer 5 ou 10<br />
ans.<br />
Intérêt <strong>de</strong>s revêtements peu bruyants<br />
Les <strong>de</strong>ux principales composantes du bruit émis par un<br />
véhicule sont le bruit moteur <strong>et</strong> le bruit du contact entre les<br />
pneumatiques <strong>et</strong> la chaussée. Les bruits d’échappement <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> transmission sont, eux, négligeables. Le bruit du contact<br />
pneu-chaussée augmente avec la vitesse. Dès la fin du<br />
troisième rapport <strong>de</strong> boîte <strong>de</strong> vitesse, il dépasse le niveau<br />
sonore du moteur. Le bruit <strong>de</strong> contact pneu-chaussée est<br />
donc prépondérant pour <strong>de</strong>s vitesses <strong>et</strong> <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong><br />
boîtes élevées.<br />
Le bruit <strong>de</strong> contact pneu-chaussée a <strong>de</strong>ux origines<br />
principales : le bruit d’impact, soit le bruit <strong>de</strong> nature<br />
vibratoire que fait le pneumatique au moment où il entre en<br />
contact avec la chaussée, <strong>et</strong> la résonance d’air occasionnée<br />
par la rupture d’adhérence entre le pneumatique <strong>et</strong> la<br />
chaussée. Le bruit d’impact, n<strong>et</strong>tement prépondérant,<br />
augmente avec la taille <strong>de</strong>s granulats du revêtement (la<br />
dimension D <strong>de</strong>s granulats). Pour limiter le phénomène <strong>de</strong> la<br />
résonance d’air, qui est produit par la libération <strong>de</strong> l’air<br />
emprisonné dans les alvéoles non communicantes du<br />
pneumatique, il faut privilégier les revêtements dotés <strong>de</strong><br />
pourcentages <strong>de</strong> vi<strong>de</strong> communiquant importants ; ces<br />
revêtements absorbent l’air <strong>et</strong> évitent ainsi le bruit lié à sa<br />
libération.<br />
Les <strong>de</strong>ux qualités nécessaires aux revêtements peu bruyants<br />
sont donc une faible dimension <strong>de</strong>s granulats <strong>et</strong> un<br />
pourcentage <strong>de</strong> vi<strong>de</strong> communiquant important.<br />
Conditions <strong>de</strong> mise en œuvre<br />
Vitesses <strong>et</strong> rapports <strong>de</strong> boîte élevés obligent, l’utilisation <strong>de</strong><br />
ces revêtements est surtout intéressante sur les grands axes<br />
<strong>et</strong> les voies rapi<strong>de</strong>s urbaines. Concernant les allures <strong>de</strong><br />
circulation plus typiquement urbaines, il semble que<br />
certains revêtements présentent un certain intérêt. C’est le<br />
cas notamment <strong>de</strong>s revêtements à double couche, qui<br />
auraient un eff<strong>et</strong> d’absorption du bruit à très faible<br />
distance, au droit <strong>de</strong> la circulation <strong>de</strong>s véhicules. Pour<br />
l’heure, faute <strong>de</strong> recherches suffisamment abouties, il est<br />
trop tôt pour recomman<strong>de</strong>r l’utilisation <strong>de</strong> ces revêtements<br />
particuliers en centre urbain. Dès lors, le recours aux<br />
revêtements <strong>de</strong> chaussée peu bruyants doit s’envisager<br />
avant tout comme complément, lorsque les autres mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
protection sont insuffisants. L’autre cas où ces revêtements<br />
peuvent s’avérer payants correspond aux sites à forte<br />
fréquence <strong>de</strong> renouvellement du revêtement. En milieu<br />
urbain, compte tenu <strong>de</strong>s changements d’allure, le<br />
revêtement peut subir <strong>de</strong> fortes dégradations : l’avantage<br />
<strong>de</strong> changer fréquemment le revêtement perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> s’assurer<br />
<strong>de</strong> la pérennité <strong>de</strong> ses performances acoustiques.<br />
Efficacité <strong>et</strong> coût <strong>de</strong>s revêtements peu bruyants<br />
Suivant la qualité du nouveau revêtement, <strong>et</strong> la nature du<br />
revêtement précé<strong>de</strong>nt, les gains acoustiques moyens (en<br />
L Aeq ) sont <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 3 à 5 dB(A). En revanche, à une<br />
gran<strong>de</strong> distance <strong>de</strong> la route, ces gains sont plus réduits, en<br />
particulier à cause <strong>de</strong>s phénomènes météorologiques qui<br />
agissent sur la propagation. Autre caractéristique, à courte<br />
distance, l’efficacité respective <strong>de</strong>s différentes techniques<br />
<strong>de</strong> revêtement suit la même hiérarchie qu’à gran<strong>de</strong><br />
distance, à ceci près que les écarts sont alors moins élevés.<br />
Les paramètres entrant en ligne <strong>de</strong> compte dans le coût d’un<br />
revêtement <strong>de</strong> chaussée incluent les matériaux constitutifs<br />
du revêtement, la pose, les couches d’accrochage sur<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 49
lesquelles viennent reposer le revêtement ainsi qu’un<br />
certain nombre <strong>de</strong> dépenses connexes, loin d’être<br />
négligeables, telles que les sujétions <strong>de</strong> chantier pour travail<br />
<strong>de</strong> nuit ou arrêt <strong>de</strong> la circulation. Les ordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>urs,<br />
ne prenant en compte que les matériaux <strong>et</strong> la pose, pour les<br />
enrobés coulés à froid <strong>et</strong> les enduits superficiels,<br />
revêtements assez peu intéressants du point <strong>de</strong> vue<br />
acoustique, sont <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 1 à 3 € par mètre carré ; les<br />
bétons bitumineux semi grenus, les bétons bitumineux très<br />
minces <strong>et</strong> les bétons bitumineux drainants, coûtent quant à<br />
eux entre 2,5 <strong>et</strong> 8 € par mètre carré.<br />
Limites d’utilisation <strong>de</strong>s revêtements peu bruyants<br />
Le principal frein à l’utilisation <strong>de</strong> ces moyens <strong>de</strong> réduction<br />
du bruit reste la difficulté à évaluer les performances<br />
acoustiques <strong>de</strong>s revêtements <strong>de</strong> chaussée. Les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
mesures au passage, qui, en France, sont normalisées,<br />
exigent <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> mesure très contraignantes<br />
(sonomètre placé à 7,5 m <strong>de</strong> la chaussée, site relativement<br />
dégagé autour du microphone). Problème : en milieu<br />
urbanisé ou même périurbain, peu <strong>de</strong> sites répon<strong>de</strong>nt à un<br />
tel cahier <strong>de</strong>s charges. Aussi a-t-on mis au point une<br />
métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> mesure beaucoup mieux adaptée au contexte<br />
urbain : les mesures en continu où, c<strong>et</strong>te fois, le matériel <strong>de</strong><br />
mesure est embarqué sur le véhicule. Ces mesures ne sont<br />
malheureusement pas encore stabilisées <strong>et</strong> aucune norme<br />
les concernant n’a encore été finalisée. Un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> norme<br />
internationale est toutefois en cours d’élaboration <strong>et</strong>, au<br />
niveau français, le Laboratoire Central <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong><br />
Chaussées <strong>de</strong> Nantes a mis au point une métho<strong>de</strong> qui est en<br />
voie <strong>de</strong> fiabilisation. Outre les performances acoustiques, la<br />
pérennité <strong>de</strong>s performances sous trafic <strong>et</strong> météo est<br />
également difficile à appréhen<strong>de</strong>r. Tout au plus a-t-on<br />
i<strong>de</strong>ntifié quelques pistes : les performances acoustiques <strong>de</strong>s<br />
revêtements poreux diminuent au cours du temps, à mesure<br />
que les vi<strong>de</strong>s se colmatent ; à l’inverse, les revêtements<br />
fermés à gros granulats voient leurs performances<br />
s’améliorer quelque peu à l’usage, par un phénomène <strong>de</strong><br />
lissage <strong>de</strong>s granulats ; enfin, les revêtements fermés à p<strong>et</strong>its<br />
granulats ont, eux, <strong>de</strong>s performances stables dans le temps.<br />
Mais il ne s’agit là que <strong>de</strong> tendances, les données manquent<br />
pour établir <strong>de</strong> réelles orientations pour chaque type <strong>de</strong><br />
revêtement. Une autre limitation est à signaler, celle liée à<br />
la prévision <strong>de</strong>s performances in situ <strong>de</strong>s revêtements.<br />
Formulations, mise en œuvre caractéristiques propres à<br />
chaque site, trop <strong>de</strong> paramètres interviennent. Enfin, le<br />
milieu urbain se distingue par une plus gran<strong>de</strong> fréquence <strong>de</strong>s<br />
interventions sur voirie, les reprises <strong>de</strong> revêtements étant<br />
synonymes <strong>de</strong> dégradation <strong>de</strong>s performances acoustiques du<br />
revêtement.<br />
Synthèse<br />
Que r<strong>et</strong>enir <strong>de</strong> ce tour d’horizon <strong>de</strong>s trois principales<br />
métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> protection contre le bruit <strong>de</strong>s transports<br />
terrestres en milieu urbain ? Les écrans acoustiques sont <strong>de</strong>s<br />
dispositifs efficaces mais <strong>de</strong> mise en œuvre parfois difficile<br />
en milieu urbain. L’isolation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> est une technique<br />
généralement aisée à réaliser mais qui ne protège pas<br />
l’extérieur <strong>de</strong>s habitations. Les revêtements <strong>de</strong> chaussée<br />
peu bruyants sont un moyen efficace sous certaines<br />
conditions <strong>de</strong> circulation (vitesse ou rapport <strong>de</strong> boîte élevé),<br />
mais l’évaluation <strong>de</strong> leurs performances sur site urbain doit<br />
être améliorée <strong>et</strong> leur pérennité n’est pas avérée.<br />
Excepté la diminution très sensible <strong>de</strong>s véhicules, il n’existe<br />
pas un moyen <strong>de</strong> protection idéal contre le bruit en milieu<br />
urbain. Ces solutions sont davantage à envisager comme <strong>de</strong>s<br />
dispositifs complémentaires : selon les objectifs, les<br />
contraintes techniques, les coûts <strong>et</strong> les souhaits <strong>de</strong>s<br />
riverains, certains moyens sont plus adaptés que d’autres.<br />
Les actions spécifiques <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire (traitement <strong>de</strong>s<br />
matériels roulants <strong>et</strong> <strong>de</strong> l'infrastructure)<br />
Nadine Asconchilo (Direction <strong>de</strong>s transports<br />
terrestres, ministère <strong>de</strong> l'Équipement)<br />
Qui fait quoi en matière <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire<br />
en France ?<br />
En France, en matière <strong>de</strong> réduction du bruit ferroviaire,<br />
trois entités se partagent <strong>de</strong>s domaines <strong>de</strong> responsabilité<br />
bien distincts : l’entreprise ferroviaire (SNCF), qui exploite<br />
le matériel roulant ; le gestionnaire d’infrastructure (RFF),<br />
qui est propriétaire <strong>de</strong>s voies ; l’État (ministère <strong>de</strong><br />
l’Équipement), qui a la tutelle <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux établissements<br />
publics précités.<br />
Au ministère <strong>de</strong> l’Équipement, à l’échelon central, les<br />
services <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong>s transports terrestres se chargent<br />
du suivi <strong>de</strong>s actions au niveau national. Avec leurs<br />
homologues du ministère <strong>de</strong> l’Écologie, ils participent<br />
notamment aux arbitrages liés à la réglementation. À<br />
l’échelon <strong>de</strong>s services déconcentrés, les Directions<br />
départementales <strong>de</strong> l’équipement (DDE) <strong>et</strong> les Directions<br />
régionales <strong>de</strong> l’équipement (DRE) sont en charge <strong>de</strong><br />
l’animation <strong>de</strong>s observatoires départementaux <strong>et</strong> régionaux,<br />
<strong>de</strong> la coordination <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong> pilotage <strong>et</strong> du suivi <strong>de</strong>s<br />
actions locales. Les services techniques du ministère (SETRA,<br />
CERTU, CETE) apportent quant à eux un appui technique<br />
précieux. À chacun <strong>de</strong> ces niveaux, par les liens étroits qu’ils<br />
entr<strong>et</strong>iennent, les services <strong>de</strong> l’État, la SNCF <strong>et</strong> RFF<br />
s’efforcent <strong>de</strong> maintenir un climat <strong>de</strong> concertation propice<br />
aux avancées.<br />
Côté réglementation, dans le sillage <strong>de</strong> la loi bruit <strong>de</strong> 1992,<br />
la tendance consiste à traiter les transports terrestres<br />
(routes <strong>et</strong> chemin <strong>de</strong> fer) dans leur globalité. Toutefois,<br />
<strong>de</strong>ux textes spécifiques du bruit ferroviaire ont été publiés :<br />
l’arrêté du 8 novembre 1999 relatif au bruit <strong>de</strong>s<br />
infrastructures ferroviaires ; la circulaire du 28 février 2002<br />
relative aux politiques <strong>de</strong> prévention <strong>et</strong> <strong>de</strong> résorption du<br />
bruit ferroviaire.<br />
Anne Guerrero (Réseau Ferré <strong>de</strong> France)<br />
Toute la complexité, en matière <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
ferroviaire, consiste à déterminer qui, <strong>de</strong> l’infrastructure ou<br />
du matériel, est source <strong>de</strong> bruit. Sachant que ce bruit est<br />
issu du contact roue-rail, c<strong>et</strong>te problématique ne peut<br />
s’envisager qu’en bonne intelligence. RFF est non seulement<br />
responsable du bruit <strong>de</strong> l’infrastructure mais il a également<br />
une obligation <strong>de</strong> résultat vis-à-vis <strong>de</strong> la réglementation.<br />
À RFF, la stratégie <strong>de</strong> lutte contre le bruit ferroviaire<br />
s’articule en trois axes principaux : un vol<strong>et</strong> préventif,<br />
consistant à limiter le bruit <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s d’aménagements <strong>de</strong>s<br />
lignes nouvelles <strong>et</strong> existantes ; un vol<strong>et</strong> curatif, ayant<br />
vocation à résorber les situations critiques existantes ; un<br />
vol<strong>et</strong> innovation, <strong>de</strong>stiné à la recherche <strong>de</strong> solutions<br />
techniques plus performantes <strong>et</strong> adaptées aux différents<br />
contextes.<br />
Classement sonore <strong>et</strong> cartographie<br />
En ce qui concerne le vol<strong>et</strong> préventif, l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
données <strong>de</strong> trafic ferroviaire nécessaires au classement <strong>de</strong>s<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
voies bruyantes ont été transmises aux préf<strong>et</strong>s dès 1998.<br />
Quant à la cartographie <strong>de</strong>s zones <strong>de</strong> bruits critiques, elle a<br />
été réalisée sur l’ensemble du réseau ferré national classé,<br />
<strong>et</strong> diffusée, dans le courant <strong>de</strong> l’année, à l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
DRE, DIREN, DDE <strong>et</strong> services <strong>de</strong> tutelle. On notera que,<br />
contrairement au réseau routier, où la cartographie est<br />
plutôt départementalisée, le principe, en matière<br />
ferroviaire, est <strong>de</strong> cartographier l’ensemble du réseau<br />
classé.<br />
La résorption <strong>de</strong>s points noirs bruit<br />
Au chapitre <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> lutte contre les “points noirs<br />
bruit”, en janvier 2005, 56 étu<strong>de</strong>s étaient en cours, pour<br />
environ 70 communes concernées, en Rhône-Alpes,<br />
Languedoc-Roussillon, Aquitaine, Alsace, Lorraine,<br />
Bourgogne, Nord-Pas-<strong>de</strong>-Calais <strong>et</strong> Ile-<strong>de</strong>-France. Lancées<br />
dans le sillage <strong>de</strong> la circulaire <strong>de</strong> 2001, ces opérations<br />
commencent à se concrétiser. Sur <strong>de</strong>ux sites, à Aix-les-Bains<br />
<strong>et</strong> Montereau-Fault-Yonne, les travaux sont réalisés ou en<br />
voie <strong>de</strong> l’être. Sur une dizaine <strong>de</strong> sites, <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s d’avant<br />
proj<strong>et</strong> sont en cours, tandis que <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s acoustiques<br />
préalables sont réalisées sur une trentaine <strong>de</strong> sites. Côté<br />
financement, le coût <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong>s opérations est pour<br />
moitié supporté par l’État <strong>et</strong> RFF, l’autre moitié revenant<br />
aux collectivités. À noter que l’Ile-<strong>de</strong>-France a prévu un<br />
programme <strong>et</strong> un budg<strong>et</strong> pour la lutte contre les point noirs<br />
bruit dans le cadre d’un contrat <strong>de</strong> plan État-Région.<br />
Pour accompagner la montée en puissance <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te politique<br />
<strong>de</strong> lutte contre les points noirs bruit, l’État <strong>et</strong> RFF ont<br />
mobilisé <strong>de</strong>s financements pour la protection à la source. En<br />
2004, ces financements ont totalisé 1 million d’euros ; pour<br />
2005, ces financements étaient évalués à 13,8 M€ ; pour<br />
2006, à 24,5 M€ ; pour 2007, à 15,4 M€.<br />
La protection <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> est quant à elle financée par une<br />
subvention du ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du Développement<br />
durable (MEDD) correspondant à une enveloppe <strong>de</strong> 11,9<br />
millions d’euros.<br />
L’exemple <strong>de</strong> la commune d’Aix-les-Bains illustre bien la<br />
difficulté qu’il y a à mobiliser l’ensemble <strong>de</strong>s financements<br />
nécessaires aux opérations <strong>de</strong> résorption <strong>de</strong>s points noirs. Le<br />
proj<strong>et</strong> aura en eff<strong>et</strong> mis près <strong>de</strong> 9 ans à être réalisé.<br />
En 1997, un groupe <strong>de</strong> pilotage constitué <strong>de</strong> la Ville d’Aixles-Bains,<br />
<strong>de</strong> la DDASS 73, <strong>de</strong> la mission bruit du MEDD, <strong>de</strong> la<br />
SNCF <strong>et</strong> <strong>de</strong> RFF a été lancé afin d’engager le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
résorption <strong>de</strong> ce point noir bruit. Il s’agit du principal axe <strong>de</strong><br />
fr<strong>et</strong> ferroviaire France-Italie (axe Dijon-Culoz-Modane). En<br />
1998, une étu<strong>de</strong> acoustique préalable, cofinancée par le<br />
MEDD, le conseil régional, le conseil général, la Ville <strong>et</strong> la<br />
SNCF a permis d’i<strong>de</strong>ntifier dix sites homogènes d’exposition.<br />
Après une étu<strong>de</strong> complémentaire ayant porté sur les trois<br />
sites les plus affectés, une solution technique a été arrêtée :<br />
1370 m <strong>de</strong> mur antibruit <strong>de</strong> 1,20 à 2 m <strong>de</strong> haut, complétés<br />
par <strong>de</strong>s isolations <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>. Le coût <strong>de</strong>s écrans a été évalué<br />
à 4 M€ (25% État, 25% RFF, 12,5% Région, 5% Département,<br />
32,5% Ville), celui <strong>de</strong>s isolations <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s à 1 M€<br />
(subvention du MEDD). La maîtrise d’ouvrage <strong>de</strong>s écrans a<br />
été confiée à RFF, la maîtrise d’œuvre technique à la SNCF,<br />
l’insertion paysagère <strong>et</strong> la concertation étant assurées par la<br />
Ville. Le 3 mai 2004, une convention travaux était signée, le<br />
début <strong>de</strong>s travaux étant prévu pour fin 2005.<br />
Sans doute peut-on espérer que la mise en place progressive<br />
<strong>de</strong>s observatoires du bruit à l’échelon départemental<br />
perm<strong>et</strong>tra d’accélérer ces opérations.<br />
Les dispositifs <strong>de</strong> protection<br />
On peut distinguer <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> dispositifs <strong>de</strong> protection :<br />
les dispositifs opérationnels <strong>et</strong> maîtrisés, <strong>et</strong> les dispositifs<br />
expérimentaux.<br />
Dans la première catégorie, la conception technique du<br />
proj<strong>et</strong> constitue le premier niveau <strong>de</strong> protection. Il convient<br />
en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> ne pas oublier que l’acoustique fait partie<br />
intégrante <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s d’infrastructure ferroviaire. Par le<br />
choix du tracé, la conception du profil en long, on s’efforce<br />
<strong>de</strong> limiter le bruit. Deuxième niveau d’intervention,<br />
l’infrastructure : les longs rails soudés, les traverses bétons<br />
sont <strong>de</strong>ux exemples <strong>de</strong> dispositifs propres à l’infrastructure<br />
qui perm<strong>et</strong>tent d’en améliorer l’acoustique. Viennent<br />
ensuite les dispositifs <strong>de</strong> protection à la source (écrans,<br />
merlons, …) <strong>et</strong> les dispositifs complémentaires (protections<br />
<strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s).<br />
Côté dispositifs expérimentaux, trois grands programmes <strong>de</strong><br />
recherche, réalisés en partenariat avec la SNCF, sont en<br />
cours. L’un <strong>de</strong> ces programmes porte sur la diminution du<br />
bruit <strong>de</strong>s ponts métalliques. Ce sont <strong>de</strong>s ouvrages très<br />
bruyants qui sont à l’origine <strong>de</strong> bon nombre <strong>de</strong> points noirs<br />
du bruit. Pourtant, leur prise en compte dans les logiciels <strong>de</strong><br />
simulation acoustique est assez limitée. Le programme<br />
s’était fixé quatre objectifs : modéliser les phénomènes<br />
vibro-acoustiques pour en déduire les éléments du pont<br />
étant à l’origine <strong>de</strong>s principales émissions <strong>sonores</strong> (en <strong>de</strong>çà<br />
<strong>de</strong> 300 Hz le platelage serait le principal élément entrant en<br />
jeu, au-<strong>de</strong>là, ce seraient les rails) ; rechercher <strong>de</strong>s solutions<br />
<strong>de</strong> réduction du bruit <strong>et</strong> les évaluer par la simulation ;<br />
expérimenter les solutions les plus prom<strong>et</strong>teuses par<br />
combinaison itérative (pour les hautes fréquences,<br />
absorbeurs sur rails, renforcement <strong>de</strong> la rai<strong>de</strong>ur rail-pont,<br />
pose d’écrans fixes ; pour les basses fréquences, absorbeurs<br />
sur platelage, tôle « sandwich » en élastomère) ; enfin,<br />
procé<strong>de</strong>r à l’homologation <strong>de</strong> ces procédés.<br />
Un autre <strong>de</strong> ces programmes <strong>de</strong> recherche consiste à étudier<br />
l’utilisation <strong>de</strong>s absorbeurs sur rail, solution assez<br />
prom<strong>et</strong>teuse dont les gains espérés sont <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 3 à 5<br />
dB(A). La SNCF a tout d’abord réalisé une étu<strong>de</strong> sur l’état <strong>de</strong><br />
l’art en la matière, puis, <strong>de</strong>ux prototypes d’absorbeur<br />
différents ont été réalisés. Ils font l’obj<strong>et</strong> d’essais en voies<br />
(acoustique, sécurité) à Pierrelatte <strong>de</strong>puis avril 2004.<br />
Enfin, la limitation du bruit <strong>de</strong>s triages, notamment <strong>de</strong>s<br />
freins <strong>de</strong> voies, fait également l’obj<strong>et</strong> d’un programme <strong>de</strong><br />
recherche. Lors du freinage, un dépôt par microsoudure <strong>de</strong>s<br />
particules d’usure peut se traduire par un bruit<br />
extrêmement stri<strong>de</strong>nt (4000 Hz) pouvant atteindre, à<br />
proximité immédiate, un niveau sonore dangereux, <strong>de</strong><br />
l’ordre <strong>de</strong> 130 à 150 dB(A). Pour limiter le bruit causé par le<br />
frottement entre le rail freineur <strong>et</strong> la roue, plusieurs<br />
solutions ont été testées. À Hourca<strong>de</strong> <strong>et</strong> Saint-Jory, les tests<br />
ont porté sur <strong>de</strong>s écrans acoustiques <strong>de</strong> 1,20 m <strong>de</strong> haut<br />
encadrant les freins <strong>de</strong> voie. C<strong>et</strong>te solution comporte<br />
plusieurs inconvénients : manque <strong>de</strong> visibilité sur le frein <strong>de</strong><br />
voie, nécessité <strong>de</strong> démonter les écrans pour intervenir sur<br />
les freins <strong>de</strong> voie, détérioration en cas <strong>de</strong> déraillement sur<br />
le triage. Une autre solution repose sur l’injection d’un<br />
mélange spécial lubrifiant avec détecteur <strong>de</strong> présence <strong>de</strong><br />
roue, intégré au système <strong>de</strong> freins <strong>de</strong> voie. À partir <strong>de</strong> 2005,<br />
ce système doit être testé au triage <strong>de</strong> Drancy. Enfin, une<br />
<strong>de</strong>rnière expérimentation, consistant en un rail rainuré en<br />
acier, est testée à Achères.<br />
Pascal Fodiman (SNCF)<br />
En dix ans, entre les TGV oranges <strong>et</strong> les versions duplex, 10<br />
décibels ont été gagnés. Ainsi, un train à gran<strong>de</strong> vitesse<br />
actuel produit, à 300 km/h, une énergie sonore comparable<br />
à celle d’un train corail circulant à 160 km/h. Se pose<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 51
désormais la question <strong>de</strong> savoir comment aller plus loin dans<br />
la réduction du bruit <strong>et</strong>, notamment, comment valoriser les<br />
progrès réalisés sur le trafic à gran<strong>de</strong> vitesse sur <strong>de</strong>s<br />
matériels plus conventionnels, en particulier dans le<br />
domaine du fr<strong>et</strong>.<br />
Parmi les mécanismes d’émission du bruit ferroviaire, le<br />
bruit <strong>de</strong> roulement est la source dominante aux vitesses<br />
commerciales actuelles. Ce bruit, qui dépend <strong>de</strong> la qualité<br />
<strong>de</strong> surface <strong>de</strong> la roue <strong>et</strong> du rail, a <strong>de</strong>ux<br />
composantes <strong>sonores</strong> : celle <strong>de</strong> la voie, qui ém<strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
fréquences plutôt basses ; celle <strong>de</strong> la roue, dont les<br />
fréquences sont plus élevées. Ces quinze <strong>de</strong>rnières années,<br />
les travaux <strong>de</strong> recherche accomplis par la SNCF sur le bruit<br />
<strong>de</strong> roulement perm<strong>et</strong>tent aujourd’hui <strong>de</strong> disposer<br />
d’éléments fiables, tant en termes <strong>de</strong> modélisation qu’en<br />
termes <strong>de</strong> solutions à m<strong>et</strong>tre en œuvre. Le bruit <strong>de</strong><br />
roulement n’est bien évi<strong>de</strong>mment pas la seule source <strong>de</strong><br />
bruit ferroviaire. Le bruit d’origine aérodynamique,<br />
important aux gran<strong>de</strong>s vitesses, se caractérise par ses<br />
composantes basses fréquences. Il peut <strong>de</strong>meurer significatif<br />
<strong>de</strong>rrière un écran acoustique, notamment en partie haute du<br />
train. Le bruit <strong>de</strong> traction concerne quant à lui les vitesses<br />
les plus faibles, voire même le stationnement en gare<br />
(ventilateur, moteur, convertisseurs auxiliaires). Le bruit <strong>de</strong><br />
crissement, au freinage ou en courbe, fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s<br />
<strong>de</strong> recherche assez complexes, les efforts portant<br />
actuellement sur la modélisation, qui ouvrent <strong>de</strong>s pistes<br />
prom<strong>et</strong>teuses. Enfin, le bruit <strong>de</strong>s triages (freins <strong>de</strong> voies) <strong>et</strong><br />
le bruit <strong>de</strong>s ponts métalliques nécessitent eux aussi <strong>de</strong>s<br />
efforts <strong>de</strong> recherche.<br />
Mise en place <strong>de</strong> semelles <strong>de</strong> freins en matériau<br />
composite<br />
Si les protections <strong>sonores</strong> classiques restent un moyen<br />
efficace <strong>et</strong> validé, la mise en place, sur le matériel roulant,<br />
<strong>de</strong> semelles <strong>de</strong> freins en matériaux composites, présente<br />
quant à elle l’avantage d’être efficace partout où roule le<br />
matériel <strong>et</strong> <strong>de</strong> ne pas exiger <strong>de</strong> modification <strong>de</strong><br />
l’infrastructure. Les gains à attendre <strong>de</strong> tels dispositifs se<br />
situent entre 5 <strong>et</strong> 10 dB(A) selon les configurations. Autre<br />
bénéfice <strong>de</strong> ces systèmes silencieux, ils réduisent aussi la<br />
contribution sonore <strong>de</strong> la voie. Leurs inconvénients : sur <strong>de</strong>s<br />
flottes anciennes, ils s’accompagnent d’une modification<br />
importante du véhicule <strong>et</strong>, pour être efficaces, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />
que l’ensemble <strong>de</strong> la flotte <strong>de</strong>s matériels soit modifié, <strong>et</strong> ce<br />
suffisamment rapi<strong>de</strong>ment pour constater une réelle<br />
amélioration. Autre points négatifs, c<strong>et</strong>te solution nécessite,<br />
outre le changement <strong>de</strong>s semelles <strong>de</strong> freins <strong>et</strong> le réglage <strong>de</strong><br />
l’effort <strong>de</strong> freinage, pour prévenir le blocage <strong>de</strong>s freins <strong>et</strong> la<br />
création <strong>de</strong> méplats, l’ajout <strong>de</strong> dispositifs anti-enrailleurs<br />
relativement coûteux. Au total, le coût du rééquipement du<br />
matériel roulant par ce type <strong>de</strong> dispositif, estimé entre 3000<br />
<strong>et</strong> 7000 euros par véhicule modifié, dépasse les moyens <strong>de</strong>s<br />
seuls exploitants. Quant aux coûts d’exploitation, ils restent<br />
encore mal connus, en particulier dans le domaine du fr<strong>et</strong>,<br />
puisque peu <strong>de</strong> matériels, à ce jour, sont équipés. Pour la<br />
flotte européenne <strong>de</strong> marchandise, qui compte 650 000<br />
wagons, ce coût <strong>de</strong> rééquipement a un impact lourd. Sans<br />
oublier l'impact <strong>de</strong> la pose <strong>de</strong> tels dispositifs sur les règles<br />
<strong>de</strong> maintenance. Or, le trafic fr<strong>et</strong> ayant un rayonnement<br />
européen, il importe <strong>de</strong> résoudre ce problème à l’échelle <strong>de</strong><br />
l’Europe, <strong>et</strong> pas seulement dans un pays en particulier. En<br />
résumé, si la faisabilité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te solution autorise<br />
l’admission <strong>de</strong>s matériels fr<strong>et</strong> équipés <strong>de</strong> semelles<br />
composites en régime international, <strong>de</strong>s réserves persistent,<br />
<strong>et</strong> concernent les conditions d’homologation, encore lour<strong>de</strong>s<br />
<strong>et</strong> coûteuses, <strong>et</strong> le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> financement d'une telle<br />
démarche, qui reste à définir.<br />
L’impact <strong>de</strong> la réglementation européenne<br />
Outre la directive sur la gestion du bruit dans<br />
l’environnement, les directives d’interopérabilité ferroviaire<br />
(96/48/CE <strong>et</strong> 2001/16/CE) contribuent progressivement, à<br />
mesure du renouvellement <strong>de</strong>s flottes, à changer le paysage<br />
<strong>de</strong> l’émission sonore <strong>de</strong>s trains en Europe. Au travers <strong>de</strong><br />
spécifications techniques d’interopérabilité, ces directives<br />
traitent en réalité <strong>de</strong> l’homologation <strong>de</strong>s matériels roulants<br />
neufs sur le réseau trans-européen. Les conditions<br />
d’homologation, très exigeantes, pour le fr<strong>et</strong> notamment,<br />
vont se traduire par une limitation du bruit <strong>de</strong>s trains à<br />
l’émission, qui entraînera <strong>de</strong> fait le bannissement <strong>de</strong>s<br />
semelles en fonte. En ce qui concerne le rééquipement <strong>de</strong> la<br />
flotte existante, la Commission européenne donne<br />
clairement la priorité à la flotte <strong>de</strong> wagons <strong>de</strong> fr<strong>et</strong><br />
(homologation obligatoire pour toute nouvelle autorisation<br />
<strong>de</strong> mise en service d’un matériel rénové).<br />
Équipement en système <strong>de</strong> freinage silencieux : état <strong>de</strong>s<br />
lieux en France à fin 2004<br />
Où en étions-nous, en France, fin 2004, au niveau <strong>de</strong><br />
l’équipement en système <strong>de</strong> freinage silencieux <strong>de</strong>s<br />
matériels roulants ? Le bilan, quelque peu contrasté, indique<br />
un n<strong>et</strong> progrès. La totalité <strong>de</strong>s TGV sont équipés <strong>de</strong><br />
dispositifs silencieux, soit <strong>de</strong> freins à disques, soit <strong>de</strong><br />
semelles en matériau composite, le taux d’équipement <strong>de</strong><br />
l’ensemble <strong>de</strong> la flotte <strong>de</strong> matériels voyageurs étant <strong>de</strong><br />
l’ordre <strong>de</strong> 50%. Pour le fr<strong>et</strong>, tout reste à faire. Moins <strong>de</strong> 10%<br />
<strong>de</strong>s wagons <strong>de</strong> marchandise sont équipés <strong>de</strong> semelles en<br />
matériaux composites. Directive d’interopérabilité oblige,<br />
les matériels neufs sont systématiquement équipés. Côté<br />
matériels existants, un certain nombre d’opérations <strong>de</strong><br />
rééquipement vont progressivement se m<strong>et</strong>tre en place. Par<br />
exemple, dans le cadre d’une convention entre la SNCF, la<br />
Région Ile-<strong>de</strong>-France <strong>et</strong> l’État, 600 voitures circulant sur la<br />
ligne <strong>de</strong> RER C vont être rééquipées en 2005.<br />
Nadine Asconchilo (direction <strong>de</strong>s transports<br />
terrestres, ministère <strong>de</strong> l'Équipement)<br />
Quelles conclusions tirer <strong>de</strong> ce panorama <strong>de</strong> la réduction du<br />
bruit ferroviaire ? Il appartient à l’État <strong>de</strong> soutenir la<br />
poursuite <strong>de</strong>s nombreuses actions engagées pour la<br />
réduction du bruit ferroviaire. Il faudra gérer c<strong>et</strong><br />
accompagnement dans un contexte particulier associant la<br />
réorganisation profon<strong>de</strong> du ministère <strong>de</strong> l’Équipement, <strong>de</strong>s<br />
Transports, <strong>de</strong> l’Aménagement du territoire, du Tourisme <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la Mer, un renforcement <strong>de</strong>s contraintes budgétaires <strong>et</strong> la<br />
nouveauté <strong>de</strong>s dispositions liées à l’application <strong>de</strong> la<br />
directive 2002/49/CE. Quoi qu’il en soit, comme on l’a vu à<br />
travers ces présentations, le processus <strong>de</strong> réduction du bruit<br />
ferroviaire est définitivement engagé.<br />
Exemple d’un partenariat entre la société <strong>de</strong>s Autoroutes Estérel-Côte<br />
d’Azur-Provence-Alpes (Escota) <strong>et</strong> la Communauté du Pays d’Aix<br />
Georges Innocenti (Escota)<br />
En 2002, Escota a recensé dans la traversée du Pays d’Aix,<br />
parmi les habitations riveraines <strong>de</strong>s autoroutes qui lui<br />
sont concédées, celles bénéficiant <strong>de</strong> l’antériorité <strong>et</strong> soumises<br />
à l’horizon 2010 à un niveau <strong>de</strong> bruit moyen annuel supérieur à<br />
70 dB(A) en pério<strong>de</strong> diurne (6h00-22h00). C<strong>et</strong>te démarche a<br />
consisté à appliquer les dispositions <strong>de</strong>s circulaires <strong>de</strong>s 12<br />
PAGE 52<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
décembre 1997 (points noirs bruit) <strong>et</strong> 12 juin 2001<br />
(observatoires du bruit <strong>et</strong> résorption <strong>de</strong>s points noirs<br />
bruit). Souhaitant toutefois faire un effort significatif en<br />
faveur <strong>de</strong>s riverains bénéficiant <strong>de</strong> l'antériorité, dans le<br />
cadre d'un partenariat établi avec les collectivités locales<br />
concernées, Escota a élargi le recensement aux<br />
habitations riveraines bénéficiant <strong>de</strong> l’antériorité <strong>et</strong><br />
soumises à terme à un niveau <strong>de</strong> bruit moyen annuel<br />
diurne compris entre 65 dB(A) <strong>et</strong> 70 dB(A). La<br />
Communauté d'Agglomération du Pays d'Aix (CPA), quant à<br />
elle, était sollicitée principalement par <strong>de</strong>s riverains<br />
situés en bordure <strong>de</strong> voies dans <strong>de</strong>s secteurs où les<br />
niveaux <strong>de</strong> bruit diurnes sont supérieurs à 65 dB(A). Ces<br />
riverains ne pouvaient espérer d'amélioration <strong>de</strong> leur<br />
situation du seul fait <strong>de</strong> l'application <strong>de</strong> la réglementation<br />
en vigueur. Aussi, la Communauté d'Agglomération du<br />
Pays d'Aix <strong>et</strong> Escota ont décidé d’engager un partenariat<br />
visant à améliorer le confort acoustique <strong>de</strong>s riverains<br />
situés à proximité <strong>de</strong>s axes autoroutiers. Un protocole<br />
d’accord triennal (2003-2005) a été signé le 17 janvier<br />
2003 pour la protection <strong>de</strong>s habitations recensées en 2002<br />
par Escota.<br />
Concernant les conditions financières du partenariat, le<br />
traitement <strong>de</strong>s points noirs du bruit est bien entendu<br />
revenu à la charge d’Escota, les protections<br />
complémentaires ont été réparties entre la CPA (60%) <strong>et</strong><br />
Escota (40%). Au terme du recensement, 519 logements<br />
ont été i<strong>de</strong>ntifiés, à raison <strong>de</strong> 183 points noirs du bruit <strong>et</strong><br />
336 logements complémentaires. Sur les 519 logements,<br />
136 ont bénéficié d’une protection par écran acoustique.<br />
Le restant était essentiellement constitué <strong>de</strong> logements situés<br />
dans les étages supérieurs <strong>de</strong>s immeubles, où la protection à la<br />
source n’est pas efficace. Ce premier partenariat se traduit par<br />
un investissement <strong>de</strong> 3,9 millions d’euros, dont 1,5 million à la<br />
charge <strong>de</strong> la Communauté du Pays d’Aix <strong>et</strong> 2,4 millions à la<br />
charge d’Escota.<br />
En 2004, la société Autoroutes du Sud <strong>de</strong> la France (ASF) a<br />
rejoint ce même protocole, ajoutant ainsi 125 logements au<br />
programme pour un investissement <strong>de</strong> 1 million d’euros, dont<br />
0,6 million à la charge <strong>de</strong> la Communauté du Pays d’Aix <strong>et</strong> 0,4<br />
million à la charge d’ASF. À noter que ASF avait déjà pris à son<br />
compte le traitement <strong>de</strong> 60 points noirs du bruit dans ces<br />
zones.<br />
Au total, 5 millions d’euros seront investis au titre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
opération, pour la protection <strong>de</strong> 644 logements dont 461<br />
logements complémentaires au titre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux partenariats. On<br />
soulignera la participation <strong>de</strong> la Communauté du Pays d’Aix, à<br />
hauteur <strong>de</strong> 2,1 millions d’euros, le groupe ASF/Escota prenant<br />
en charge les 2,8 millions d’euros restants.<br />
Au niveau <strong>de</strong> l’échangeur <strong>de</strong>s Trois Saut<strong>et</strong>s à Aix en Provence,<br />
<strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre <strong>de</strong> la br<strong>et</strong>elle, 450 mètres d’écran ont été<br />
érigés. Ce secteur a d’ailleurs fait l’obj<strong>et</strong> d’une urbanisation<br />
intelligente, puisque <strong>de</strong>s bâtiments à usage <strong>de</strong> bureau, non<br />
protégés, servent d’écran antibruit à un <strong>de</strong>uxième rang<br />
d’immeubles à usage d’habitation. L’aménagement paysager<br />
soutenu <strong>de</strong> ces écrans témoigne <strong>de</strong> la préoccupation constante<br />
d’insertion paysagère, <strong>et</strong> la couverture végétale partielle<br />
perm<strong>et</strong> aussi <strong>de</strong> dissua<strong>de</strong>r les poseurs <strong>de</strong> graffitis.<br />
Débat<br />
Le cas d’Aix-les-Bains : volontarisme salutaire<br />
<strong>de</strong> la Ville<br />
Philippe Michat (mairie d’Aix-les-Bains) a souhaité préciser<br />
que, si l’opération <strong>de</strong> résorption <strong>de</strong>s points noirs du bruit<br />
ferroviaire avait, à Aix-les-Bains, effectivement débuté en<br />
1997 à l’initiative du pôle <strong>de</strong> compétence bruit <strong>de</strong> la Savoie<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> la Ville d’Aix-les-Bains, c<strong>et</strong>te opération n’a réellement<br />
aboutie que grâce à la bonne volonté <strong>de</strong> la Ville, qui a<br />
accepté d’être le principal financeur <strong>de</strong>s écrans acoustiques.<br />
Pour lui, dans ce cas précis, en matière d’application du<br />
principe pollueur-payeur, on est loin du compte.<br />
Pour Nadine Asconchilo, chacun est libre <strong>de</strong> juger si le<br />
principe pollueur-payeur est ici bien appliqué ou non. Il n’en<br />
reste pas moins que c’est la réglementation qui fixe à 50% la<br />
part du financement revenant aux collectivités territoriales,<br />
le restant du financement étant à la charge <strong>de</strong> RFF <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’État.<br />
Insertion paysagère <strong>de</strong>s écrans acoustiques :<br />
côté habitations également ?<br />
L’insertion paysagère <strong>de</strong>s écrans implantés par Escota à Aixen-Provence<br />
a soulevé une interrogation : <strong>de</strong> quel côté <strong>de</strong><br />
l’écran s’est-on soucié <strong>de</strong> l’intégration paysagère, côté<br />
route ou côté habitations ? Selon Georges Innocenti, dans<br />
l’opération qui a concerné l’échangeur <strong>de</strong>s Trois Saut<strong>et</strong>s,<br />
l’insertion paysagère à l’arrière <strong>de</strong>s écrans n’a pas été<br />
prévue. En revanche, un soin particulier a été apporté à la<br />
végétation existante <strong>et</strong> lorsqu’il a fallu arracher <strong>de</strong>s arbres,<br />
ils ont été remplacés.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 53
Atelier<br />
Recherche en acoustique : bilan d'étape du programme "Bruit <strong>et</strong><br />
nuisances <strong>sonores</strong>"<br />
Séance présidée par Jean-Dominique Polack (LAM) <strong>et</strong> Jean-Clau<strong>de</strong> Serrero (consultant)<br />
Introduction<br />
Jean-Clau<strong>de</strong> Serrero (consultant en<br />
acoustique, ex responsable <strong>de</strong> la recherche<br />
sur le bruit au ministère chargé <strong>de</strong> l’écologie)<br />
aussi <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> bruit) étant également membres du<br />
comité scientifique du programme Bruit <strong>et</strong> nuisances<br />
<strong>sonores</strong>.<br />
Dominique Polack s’exprime ici sur la pertinence <strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>scripteurs d’ambiance sonore urbaine. Ces travaux<br />
souhaités à la fois par le ministère chargé <strong>de</strong> la recherche,<br />
l’A<strong>de</strong>me <strong>et</strong> le ministère chargé <strong>de</strong> l’écologie, confirment le<br />
constat fait lors <strong>de</strong> la séance plénière qui a précédé, à<br />
savoir l’importance <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s barèmes <strong>de</strong><br />
pertinence <strong>de</strong>s indicateurs. Frédérique Guyot a quant à elle<br />
rappelé les objectifs <strong>et</strong> précisé l’avancement <strong>de</strong>s travaux<br />
engagés au titre <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> interculturelle visant à classifier<br />
les sources <strong>sonores</strong> urbaines <strong>de</strong> manière physique <strong>et</strong><br />
perceptive. Ces <strong>de</strong>ux premières contributions témoignent<br />
bien du positionnement “qualité sonore” <strong>de</strong> ce programme<br />
<strong>de</strong> recherche. Si la dimension psycho-acoustique y est bien<br />
représentée, la mesure physique n’est pas en reste. C<strong>et</strong>te<br />
attitu<strong>de</strong> cadre bien avec les observations rapportées dans les<br />
exposés précé<strong>de</strong>nts, à savoir la pertinence qu’il y a à<br />
anticiper les tendances au moyen d’indicateurs qualitatifs,<br />
en complément <strong>de</strong>s indicateurs quantitatifs.<br />
Après cinq années <strong>de</strong> répit, le ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du<br />
Développement durable a renoué, en 2003, avec le soutien à<br />
la recherche en acoustique, en lançant un programme<br />
intitulé Bruit <strong>et</strong> nuisances <strong>sonores</strong>. Réparti sur quatre ans,<br />
ce programme a exclusivement porté sur <strong>de</strong>s travaux<br />
directement liés au bruit <strong>de</strong>s transports, rem<strong>et</strong>tant le suj<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> la directive européenne sur le bruit<br />
ambiant entre les mains d’un <strong>de</strong>uxième vol<strong>et</strong> du programme.<br />
Lequel exigeait que les porteurs <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s constituent <strong>de</strong>s<br />
équipes pluridisciplinaires. De fait, la richesse <strong>de</strong>s équipes<br />
constituées autour <strong>de</strong> ces proj<strong>et</strong>s témoigne <strong>de</strong> ce que c<strong>et</strong>te<br />
exigence a été respectée. Seul regr<strong>et</strong> <strong>de</strong> ce premier appel<br />
d’offres, l’absence <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s portant sur les aspects<br />
socioéconomiques du bruit, alors que les chiffres sur ce<br />
thème manquent cruellement. Il conviendra <strong>de</strong> faire porter<br />
les efforts <strong>de</strong> recherche dans ce domaine.<br />
Les présentations qui suivent ne rapportent pas <strong>de</strong> résultats<br />
définitifs, la plupart <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s n’étant, à l’heure <strong>de</strong> ces<br />
Assises [NDLR : début 2005], pas encore achevés. Les <strong>de</strong>ux<br />
ministères décisionnaires, la Recherche <strong>et</strong> l’Écologie, ont<br />
volontairement ancré leurs choix dans la problématique du<br />
bruit dans l’environnement. Ainsi ne s’étonnera-t-on pas <strong>de</strong><br />
trouver plusieurs contributions étudiant l’influence <strong>de</strong>s<br />
conditions météorologiques sur la propagation du bruit à<br />
longue distance, rejoignant par là les préoccupations <strong>de</strong><br />
certains programmes <strong>de</strong> recherche européens, tels que<br />
Harmonoise.<br />
Ajoutons que tous ces proj<strong>et</strong>s ont été “avalisés” par le<br />
Predit 1 , nombre <strong>de</strong>s experts du groupe Predit 7 (qui traite<br />
1 Predit : Programme national <strong>de</strong> recherche <strong>et</strong> d'innovation dans les transports<br />
Dans un registre plus “science dure”, les <strong>de</strong>ux étu<strong>de</strong>s<br />
suivantes sur la propagation du bruit font suite à <strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s émanant <strong>de</strong> diverses instances publiques, le<br />
ministère <strong>de</strong> l’Équipement notamment, pour ce qui concerne<br />
les infrastructures <strong>de</strong> transports <strong>et</strong> le logement.<br />
Fabrice Junker <strong>et</strong> son équipe se sont penchés sur la<br />
classification <strong>de</strong> l’influence relative <strong>de</strong>s paramètres<br />
physiques affectant les conditions <strong>de</strong> propagation à gran<strong>de</strong><br />
distance. Ce proj<strong>et</strong> a été r<strong>et</strong>enu pour sa cohésion avec les<br />
préoccupations du programme européen Harmonoise. Ce<br />
problème récurrent <strong>de</strong> la propagation à longue distance pose<br />
<strong>de</strong> sérieux problèmes d’environnement, ne serait-ce que<br />
dans la construction d’infrastructures dans les vallées<br />
alpines par exemple, <strong>et</strong> les conditions météorologiques sont<br />
loin d’avoir un eff<strong>et</strong> négligeable sur les niveaux <strong>sonores</strong> à la<br />
réception. Judicaël Picaut <strong>et</strong> son équipe se sont quant à eux<br />
intéressés au milieu urbain, <strong>et</strong> plus particulièrement à la<br />
réflexion diffuse sur les faça<strong>de</strong>s.<br />
La contribution suivante, consacrée à l’évaluation <strong>de</strong> la<br />
sonie <strong>de</strong>s bruits non stationnaires, correspond à une<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> émanant du ministère <strong>de</strong> la Recherche. Jérémy<br />
Marozeau présente c<strong>et</strong>te approche fondamentale qui<br />
constitue une tentative intéressante <strong>de</strong> faire émerger un<br />
indicateur psycho-acoustique.<br />
La présentation <strong>de</strong> Thierry Legouis qui suit constitue un<br />
exemple concr<strong>et</strong> <strong>de</strong> traitement du bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong>s vibrations <strong>de</strong>s<br />
tramways. Ce proj<strong>et</strong>-ci ne rentre pas dans le cadre “bruit”<br />
du Predit, mais relève plutôt <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> la directive<br />
européenne sur le bruit ambiant.<br />
terrestres<br />
PAGE 54<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
À l’occasion <strong>de</strong> ces quatrièmes Assises, la revue Acoustique<br />
& Techniques a consacré un dossier spécial au programme<br />
Bruit <strong>et</strong> nuisances <strong>sonores</strong>. Les sept travaux <strong>de</strong> recherche<br />
présentés dans le cadre <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier ont fait l’obj<strong>et</strong> d’un<br />
article dans ce numéro. Les lecteurs souhaitant approfondir<br />
sur ces suj<strong>et</strong>s se reporteront donc au n°39 <strong>de</strong> la revue<br />
éditée par le CIDB.<br />
Pertinence <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scripteurs d'ambiance sonore urbaine - Application aux<br />
bruits <strong>de</strong>s transports pendant les pério<strong>de</strong>s sensibles<br />
Jean-Dominique Polack (Laboratoire<br />
d’acoustique musicale)<br />
Dans le principe, une première classification, limitée aux<br />
seules variables physiques jouant un rôle dans la <strong>de</strong>scription<br />
du bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa perception, est tout d’abord élaborée. Pour<br />
parfaire c<strong>et</strong>te hiérarchisation, <strong>de</strong>s mesures acoustiques sur<br />
site tentent ensuite <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r certains paramètres.<br />
Troisième acte, une catégorisation perceptive <strong>de</strong> ces zones<br />
urbaines est menée, pour aboutir à la qualification <strong>de</strong><br />
“zones prototypes”. Sont enfin définis <strong>de</strong> nouveaux indices,<br />
plus en phase avec la gêne propre à chacun <strong>de</strong> ces<br />
prototypes.<br />
La classification basée sur les variables physiques, <strong>de</strong> façon<br />
très classique, convoque <strong>de</strong>s critères liés à la configuration<br />
du site (rue en U ou tissu ouvert, pente, type <strong>de</strong><br />
revêtement, <strong>et</strong>c.) <strong>et</strong> aux conditions <strong>de</strong> trafic (type <strong>de</strong><br />
véhicules, caractéristiques du trafic, <strong>et</strong>c.). Un gros effort <strong>de</strong><br />
simplification s’impose alors, afin <strong>de</strong> ne considérer au final<br />
qu’une vingtaine <strong>de</strong> situations. Chacune d’entre elles <strong>de</strong>vant<br />
bien sûr offrir un environnement propice aux relevés<br />
acoustiques.<br />
Le proj<strong>et</strong> regroupe, autour du département Transport <strong>et</strong><br />
environnement <strong>de</strong> l’Inr<strong>et</strong>s, le Laboratoire d’acoustique<br />
musicale (LAM, Université Pierre <strong>et</strong> Marie<br />
Curie/CNRS/Ministère <strong>de</strong> la Culture), l’Institut polytechnique<br />
<strong>de</strong> Turin <strong>et</strong> les bureaux d’étu<strong>de</strong> Acouphen <strong>et</strong><br />
Acouphen Environnement. Début 2005, ce proj<strong>et</strong> n’avait<br />
encore que six mois d’existence, si bien que sont<br />
essentiellement rappelés ici les objectifs poursuivis par ces<br />
travaux.<br />
La vocation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te recherche est d’améliorer la<br />
<strong>de</strong>scription du bruit perçu en m<strong>et</strong>tant l’accent sur les<br />
pério<strong>de</strong>s sensibles que sont l’endormissement <strong>et</strong> le réveil.<br />
Dépassant les indices <strong>sonores</strong> traditionnels, l’on s’intéresse<br />
ici aux notions d’émergence, d'évènements <strong>sonores</strong>. Point<br />
fort du proj<strong>et</strong>, la démarche fait largement appel à la<br />
catégorisation perceptive pour explorer <strong>de</strong>s indices <strong>sonores</strong><br />
capables <strong>de</strong> représenter les diverses situations <strong>sonores</strong><br />
rencontrées en milieu urbain.<br />
Début 2005, date <strong>de</strong> ces Assises, l’équipe s’apprêtait à<br />
entrer dans la <strong>de</strong>uxième phase du proj<strong>et</strong>, celle <strong>de</strong>s mesures<br />
acoustiques. Pour les prises <strong>de</strong> son, il était prévu d’utiliser<br />
avant tout le système Ambisonics conçu pour une restitution<br />
ultérieure à six canaux, <strong>et</strong> <strong>de</strong> cantonner les microphones<br />
classiques à la mesure <strong>de</strong>s indices.<br />
La salle d’écoute du LAM sera alors le théâtre du troisième<br />
acte <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong>, à savoir l’appréciation perceptive <strong>de</strong> ces<br />
données <strong>sonores</strong>. Les conditions d’écoute r<strong>et</strong>enues ont fait<br />
preuve <strong>de</strong> leur efficacité : six haut-parleurs disposés dans le<br />
plan <strong>de</strong> la tête <strong>de</strong> la personne, plus un caisson <strong>de</strong> basse,<br />
dissimulé, bien sûr, afin <strong>de</strong> ne pas influencer la perception.<br />
Quels sont les indices <strong>sonores</strong> nouveaux qui sortiront<br />
finalement <strong>de</strong> ces travaux ? Ils pourront bien évi<strong>de</strong>mment<br />
être recrutés parmi les indices statistiques tels que L Aeq ,<br />
L <strong>de</strong>n , L 10 , L 50 ou L 90 , mais il se pourrait aussi qu’ils émergent<br />
d’une décomposition du signal sonore en processus<br />
aléatoires élémentaires, sous la forme d’un “temps<br />
d’attente entre évènements <strong>sonores</strong>”. Pour chacun <strong>de</strong> ces<br />
indices, il conviendra d’étudier l’influence <strong>de</strong> la typologie<br />
<strong>de</strong> zone urbaine <strong>et</strong> <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la journée.<br />
Étu<strong>de</strong> interculturelle pour une classification physique <strong>et</strong> perceptive <strong>de</strong>s<br />
sources <strong>sonores</strong> urbaines<br />
Frédérique Guyot (LAPS Design sonore)<br />
La dimension interculturelle <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> tient au fait<br />
qu’elle concerne <strong>de</strong>ux villes européennes : Paris <strong>et</strong><br />
Thessalonique (Grèce). L’équipe réunit <strong>de</strong>ux psychoacousticiens<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong>ux acousticiens, avec, pour l’un d’entre<br />
eux, un profil tourné vers les sciences humaines <strong>et</strong> les<br />
technologies <strong>de</strong> la cognition.<br />
C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> se consacre à la question <strong>de</strong> l’influence relative<br />
<strong>de</strong> différentes sources <strong>sonores</strong> urbaines sur la qualité globale<br />
<strong>de</strong> l’environnement ou d’une ambiance. Deuxième objectif :<br />
vérifier l’existence ou non <strong>de</strong> différences culturelles dans la<br />
perception <strong>de</strong> ces sources. À plus long terme, l’intérêt d’un<br />
tel travail est multiple : établir une métho<strong>de</strong> d’investigation<br />
pouvant être systématisée ; approfondir la connaissance <strong>de</strong>s<br />
critères <strong>de</strong> qualité <strong>de</strong>s environnements urbains (en d’autres<br />
termes, baser les critères <strong>de</strong> qualité sonore <strong>et</strong> <strong>de</strong> gêne sur<br />
les sources <strong>et</strong> leur signification) ; constituer une base <strong>de</strong><br />
données <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>scriptives <strong>de</strong>s sources <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
ambiances. Du reste, <strong>de</strong> tels résultats pourraient<br />
avantageusement venir en ai<strong>de</strong> aux urbanistes dans leur<br />
tâche <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s sources <strong>sonores</strong> ; ou venir qualifier,<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 55
sous une forme restant à déterminer, les cartes <strong>de</strong> bruit,<br />
afin d’en améliorer la compréhension ou la pertinence.<br />
Les sites sélectionnés<br />
Le choix <strong>de</strong>s sites a été motivé par le souhait d’étudier trois<br />
ambiances <strong>sonores</strong> contrastées : une rue piétonne avec<br />
commerces, correspondant à une ambiance où l’activité<br />
humaine est au premier plan, prédominante par comparaison<br />
à la circulation automobile ; une rue étroite avec<br />
commerces, où <strong>de</strong>s sources <strong>sonores</strong> autres que celles <strong>de</strong> la<br />
circulation — <strong>de</strong> nature humaine notamment — coexistent <strong>de</strong><br />
manière équilibrée avec la circulation ; un boulevard, où<br />
prédomine la circulation automobile. On imagine volontiers<br />
la difficulté, dans <strong>de</strong>ux villes ayant leur propre architecture,<br />
leur propre structure urbanistique, <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s paires <strong>de</strong><br />
sites équivalents. Une classification s’imposait : nombre <strong>et</strong><br />
largeur <strong>de</strong>s voies, type <strong>de</strong> bâti, flux <strong>de</strong> circulation, types<br />
d’activité, niveau sonore, sont parmi les différents critères<br />
recrutés pour tenter d’objectiver la sélection <strong>de</strong>s sites.<br />
Enregistrements <strong>sonores</strong><br />
Il importait d’acquérir un matériau se prêtant à la fois à une<br />
analyse acoustique <strong>de</strong>s signaux <strong>et</strong> à une restitution<br />
stéréophonique convaincante, dans l’optique d’une<br />
exploitation éventuelle <strong>de</strong> ces ambiances par <strong>de</strong>s tests<br />
d’écoute en laboratoire. Un microphone Soundfield dédié au<br />
format Ambisonics a été envisagé dans un premier temps<br />
pour ses différentes possibilités <strong>de</strong> matriçage offrant une<br />
excellente restitution <strong>de</strong>s ambiances <strong>sonores</strong>. Problème : ce<br />
microphone est rare, le système d’acquisition lourd <strong>et</strong><br />
coûteux, les matriçages complexes. Lui a été préféré une<br />
solution plus simple, la métho<strong>de</strong> MS, constituée <strong>de</strong><br />
microphones <strong>de</strong> prise <strong>de</strong> son <strong>et</strong> d’un système d’acquisition<br />
classiques : un microphone omni (ou cardioï<strong>de</strong>, plus<br />
classiquement) <strong>et</strong> un microphone Forme 8 placés en<br />
coïnci<strong>de</strong>nce. L’omni perm<strong>et</strong> l’analyse acoustique <strong>de</strong>s<br />
signaux, un matriçage A+B <strong>et</strong> A-B offrant la possibilité d’une<br />
restitution stéréophonique finale. Six séquences d’une durée<br />
<strong>de</strong> 1h30 ont été enregistrées, entre 11h00 <strong>et</strong> 14h00.<br />
Caractérisation acoustique <strong>et</strong> physique<br />
Reste maintenant à caractériser ces lieux, ces ambiances <strong>et</strong><br />
ces sources. Ici, les <strong>de</strong>scripteurs à caractère acoustique tels<br />
que le temps <strong>de</strong> réverbération <strong>et</strong> le niveau L <strong>de</strong>n trouveront<br />
toute leur utilité pour expliciter les spécificités acoustiques<br />
<strong>de</strong>s lieux. Concernant les ambiances, il conviendra d’évaluer<br />
la sonie moyenne, la répartition spectrale <strong>de</strong>s ambiances <strong>et</strong><br />
certains paramètres psycho-acoustiques, tels que l’acuité.<br />
Pour les sources <strong>sonores</strong>, niveaux d’émergence <strong>et</strong> niveaux<br />
<strong>sonores</strong> (en dB, dB(A) <strong>et</strong> sonie) viendront compléter certains<br />
paramètres psycho-acoustiques. On citera, pour les plus<br />
légitimes <strong>de</strong> ces paramètres, la rugosité, pour le bruit <strong>de</strong><br />
circulation, l’acuité, l’absence ou la présence <strong>de</strong> raies (le<br />
caractère plus ou moins chantant <strong>de</strong>s ambiances), le<br />
caractère impulsif <strong>de</strong>s sources, les distributions temporelles<br />
<strong>et</strong> d’autres critères encore. Sur le plan <strong>de</strong> la caractérisation<br />
physique, les sources <strong>sonores</strong> seront passées au crible <strong>de</strong>s<br />
critères <strong>de</strong> localisation <strong>et</strong> <strong>de</strong> temporalité (fréquence<br />
d’occurrence dans les lieux, par exemple) ; les lieux seront,<br />
eux, décrits sous l’angle <strong>de</strong>s activités qui s’y tiennent (type,<br />
localisation <strong>et</strong> proportion en faça<strong>de</strong>, rythme).<br />
Les enquêtes<br />
L’étape suivante consistera, enquêtes à l’appui, à établir<br />
<strong>de</strong>s corrélations entre différents critères objectifs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
critères perceptifs liés à l’environnement <strong>et</strong> aux sources<br />
<strong>sonores</strong>. C<strong>et</strong>te consultation aura notamment vocation à<br />
livrer <strong>de</strong>s enseignements d’ordre qualitatif sur l’importance<br />
qu’accor<strong>de</strong>nt les usagers <strong>de</strong> ces rues à l’ambiance sonore,<br />
en comparaison à d’autres enjeux d’environnement. À noter<br />
que le terme d’usager ne se résout pas ici aux seuls riverains<br />
<strong>et</strong> leur particularisme <strong>de</strong> relations <strong>de</strong> voisinage, mais à<br />
l’éventail compl<strong>et</strong> que constituent les passants,<br />
commerçants <strong>et</strong> clients fréquentant ces sites.<br />
Classification <strong>de</strong>s sources<br />
La classification <strong>de</strong>s sources — le but <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te recherche<br />
rappelons-le —, s’appuiera sur les corrélations entre les<br />
paramètres acoustiques <strong>et</strong> la qualité perçue <strong>de</strong>s sources.<br />
Seront également pris en compte les travaux existants, à<br />
savoir ceux d’Alain Leobon, <strong>de</strong> Murray Schafer ou ceux<br />
accomplis au LAM par Valérie Maffiolo. En l’occurrence,<br />
c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> ambitionne bien sûr <strong>de</strong> débor<strong>de</strong>r largement le<br />
cadre très ordonné d’un classement <strong>de</strong>s sources qui se<br />
partagerait entre les sources d’origine mécanique, les<br />
sources <strong>sonores</strong> révélant la présence humaine (pas, voix…)<br />
<strong>et</strong> les sources <strong>sonores</strong> révélant l’activité humaine (bruit <strong>de</strong>s<br />
loisirs, les commerces…). Autre évi<strong>de</strong>nce, ces sources seront<br />
classées suivant leur pertinence par rapport aux données<br />
perceptives obtenues dans le registre <strong>de</strong> l’appréciation<br />
qualitative. De fait, c’est avant tout ce type d’enseignement<br />
qui est recherché à travers ce travail. Enfin, les sources<br />
seront aussi classifiées à la lumière <strong>de</strong>s relations<br />
qu’entr<strong>et</strong>iendront, dans c<strong>et</strong>te recherche, la <strong>de</strong>scription<br />
physique <strong>de</strong>s sources <strong>et</strong> leur appréciation qualitative.<br />
Une fois encore, rappelons qu’une telle démarche pourrait<br />
contribuer à l’émergence d’une métho<strong>de</strong> à fort pouvoir<br />
systématisant, susceptible d’être appliquée dans d’autres<br />
quartiers, d’autres villes <strong>et</strong> d’autres cultures. À terme,<br />
c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> pourrait perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> déduire la qualité<br />
d’une ambiance urbaine, <strong>de</strong>s activités qui s’y déroulent ou<br />
<strong>de</strong>s sources qui s’y font entendre. Ou servir à sensibiliser les<br />
différents “compositeurs” d’une ambiance sonore à leur<br />
poids relatif dans l’appréciation qualitative <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>rnière.<br />
Classification <strong>de</strong> l'influence relative <strong>de</strong>s paramètres physiques affectant les<br />
conditions <strong>de</strong> propagation à gran<strong>de</strong> distance<br />
Fabrice Junker (EDF)<br />
Ce proj<strong>et</strong> a été mis en place dans le sillage d’une<br />
collaboration amorcée au sein du GDR “bruit <strong>de</strong>s<br />
transports”. Il réunit quatre partenaires : EDF, la SNCF, le<br />
Laboratoire <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées, <strong>et</strong> l’École centrale <strong>de</strong><br />
Lyon. Son but : réaliser une étu<strong>de</strong> approfondie, sur un cas<br />
concr<strong>et</strong>, <strong>de</strong> la sensibilité à certains paramètres <strong>de</strong> la<br />
propagation du bruit à gran<strong>de</strong> distance. Démarré en avril<br />
2004, ce proj<strong>et</strong> s’étend sur une durée <strong>de</strong> 24 mois.<br />
Les paramètres physiques influents<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Quels sont les phénomènes jouant un rôle dans la<br />
propagation du bruit considérés dans le cadre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
étu<strong>de</strong> ? La hauteur <strong>de</strong> la source, du récepteur <strong>et</strong> la distance<br />
qui les sépare. La dissipation par absorption atmosphérique,<br />
dont la contribution sera facile à estimer (cf. norme<br />
ISO 9613). Ce paramètre est à prendre en compte dans les<br />
calculs ; il constitue même une opportunité <strong>de</strong> s’affranchir<br />
<strong>de</strong> certains calculs coûteux, notamment en haute fréquence,<br />
pour les gran<strong>de</strong>s distances. Les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> sol : hypothèse est<br />
faite d’un sol homogène, mais dont la résistance au passage<br />
<strong>de</strong> l’air est variable. Enfin, <strong>de</strong>rnier paramètre considéré, les<br />
eff<strong>et</strong>s micro-métérologiques : leur incorporation se fait au<br />
moyen <strong>de</strong> plages <strong>de</strong> profils <strong>de</strong> célérité effective, basés sur<br />
<strong>de</strong>s profils <strong>de</strong> vent <strong>et</strong> <strong>de</strong> température issus d’observations<br />
météorologiques. La turbulence atmosphérique est aussi<br />
prise en compte. L’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s obstacles, le plus souvent<br />
tridimensionnel, est en revanche mis <strong>de</strong> côté pour le<br />
moment dans c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>.<br />
Le déroulement <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong><br />
Quelles sont les hypothèses <strong>de</strong> travail ? Une source<br />
ponctuelle, omnidirectionnelle, dont on fera varier la<br />
hauteur ; un sol plan, homogène, en présence d’eff<strong>et</strong>s<br />
micro-métrologiques ; un récepteur, situé à une distance <strong>et</strong><br />
une hauteur variables. Quelques spectres typiques <strong>de</strong>s<br />
sources routières, ferroviaires <strong>et</strong> industrielles, une dizaine<br />
tout au plus, vont être considérés.<br />
Fait important, les plages <strong>de</strong> paramètres sont choisies <strong>de</strong><br />
telle façon qu’une précision <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> +/- 1 dB(A) soit<br />
obtenue sur l’ensemble <strong>de</strong>s types <strong>de</strong> sources. Compte tenu<br />
<strong>de</strong> la complexité <strong>de</strong>s cas concr<strong>et</strong>s, c<strong>et</strong> ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s<br />
variations est tout à fait satisfaisant.<br />
La métho<strong>de</strong> consiste donc à définir les plages pour chaque<br />
paramètre, en cohérence les +/- 1 dB(A) <strong>de</strong> variation définis<br />
sur <strong>de</strong>s cas « enveloppe », <strong>et</strong> à réduire notablement le<br />
nombre <strong>de</strong> cas à prévoir (ou à mesurer). Deuxième acte <strong>de</strong><br />
la métho<strong>de</strong> : réaliser <strong>de</strong>s calculs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s mesures définis pour<br />
l’ensemble <strong>de</strong> ces plages <strong>de</strong> paramètres, <strong>et</strong> (ou) <strong>de</strong>s mesures<br />
couvrant l’ensemble <strong>de</strong>s cas possibles, <strong>de</strong> manière couplée<br />
avec <strong>de</strong>s modèles plus ou moins évolués, selon les<br />
phénomènes considérés.<br />
Les limites adoptées pour la hauteur <strong>de</strong> la source sont<br />
comprises entre 5 cm (bruit routier), <strong>et</strong> 50 m (bruit<br />
industriel). Six hauteurs <strong>de</strong> référence ont d’ores <strong>et</strong> déjà été<br />
arrêtées : 5 cm ; 1 m (hauteur équivalente côté récepteur) ;<br />
2 m ; 4 m (hauteur imposée par la directive bruit ambiant) ;<br />
10 m (hauteur intéressante pour les calculs météo) <strong>et</strong> 50 m<br />
(à compléter en interaction avec les résultats d’une étu<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> sensibilité réalisée pour l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> sol). Côté récepteur,<br />
les hauteurs limites sont comprises entre 1 <strong>et</strong> 10 mètres. La<br />
distance entre la source <strong>et</strong> le récepteur, elle, varie entre<br />
une vingtaine <strong>de</strong> mètres <strong>et</strong> mille mètres. Le but étant<br />
d’obtenir les classes <strong>de</strong> distance correspondant à une<br />
variation <strong>de</strong> +/- 1 dB(A), avec un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> sol <strong>de</strong> type<br />
herbeux (eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> décroissance maximum au centre du<br />
spectre <strong>et</strong> donc en dB(A)). Des gains significatifs peuvent<br />
être ainsi obtenus sur le nombre <strong>de</strong> calculs, pour peu que les<br />
paramètres soient fixés à l’avance.<br />
pour chaque tiers d’octave, le nombre <strong>de</strong> valeurs <strong>de</strong><br />
fréquence considérées pour le calcul, tout en restant<br />
compatible avec la précision <strong>de</strong> l’ordre du décibel fixée<br />
initialement. Ce principe a été validé par une étu<strong>de</strong> menée<br />
sur les phénomènes <strong>de</strong> lissage. Classiquement, l’examen <strong>de</strong><br />
la littérature montre qu’une moyenne <strong>de</strong> 10 points est<br />
considérée par tiers d’octave. Avec c<strong>et</strong>te approche<br />
optimisée, le gain sur le nombre <strong>de</strong> calculs à réaliser est<br />
d’un facteur <strong>de</strong>ux ou trois.<br />
Il en va <strong>de</strong> même pour la délimitation du domaine spatial :<br />
jusqu’à quelle fréquence <strong>et</strong> à quelle distance arrêter les<br />
calculs ? Pour répondre à c<strong>et</strong>te question, l’examen <strong>de</strong>s<br />
courbes d’absorption atmosphérique suffit. Il en ressort une<br />
faible influence <strong>de</strong>s hautes fréquences à gran<strong>de</strong> distance :<br />
typiquement, à partir <strong>de</strong> 1000 mètres <strong>de</strong> distance, toutes les<br />
fréquences supérieures à 1600 Hz peuvent être négligées.<br />
Sans que l’exigence <strong>de</strong> précision <strong>de</strong> 1 dB(A) sur l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s types <strong>de</strong> sources ne soit remise en cause. C<strong>et</strong>te<br />
simplification constitue un gain sur le nombre <strong>de</strong> calculs à<br />
réaliser, gain qui, c<strong>et</strong>te fois, est <strong>de</strong> facteur 10.<br />
Pour l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> sol, phénomène sur lequel les travaux <strong>de</strong><br />
l’équipe sont moins aboutis, l’unique paramètre considéré<br />
est la résistance au passage <strong>de</strong> l’air σ. Les valeurs <strong>de</strong> σ sont<br />
comprises entre 100 kNsm - 4 (sol très absorbant) <strong>et</strong> 20 000<br />
kNsm - 4 (sol très réfléchissant). Là encore, les plages <strong>de</strong><br />
σ sont déterminées par <strong>de</strong>s calculs relativement<br />
conservatifs : un premier calcul est réalisé en conditions<br />
homogènes (calculs analytiques), puis un test <strong>et</strong> une<br />
correction éventuelle <strong>de</strong>s plages obtenues sont effectués en<br />
conditions favorables.<br />
Concernant enfin l’influence <strong>de</strong> la météorologie, le registre<br />
<strong>de</strong> vent adopté s’inscrit dans la plage <strong>de</strong> vitesses [0 ;10<br />
m/s], pour une hauteur <strong>de</strong> référence <strong>de</strong> 10 m. À ce sta<strong>de</strong>, il<br />
convient <strong>de</strong> considérer <strong>de</strong>s plages <strong>de</strong> profils réalistes, en<br />
termes <strong>de</strong> température notamment. Une consultation <strong>de</strong><br />
météorologues a été menée dans l’intention <strong>de</strong> définir les<br />
types <strong>de</strong> profils possibles, étant données <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong><br />
vent <strong>et</strong> d’humidité fixées. Quand bien même <strong>de</strong>s plages <strong>de</strong><br />
profils <strong>de</strong> célérité effective (lin-log) peuvent ainsi être<br />
déterminées, il faut gar<strong>de</strong>r à l’esprit que la direction du<br />
vent peut influer. L’influence <strong>de</strong> la turbulence n’est bien<br />
entendu pas occultée, mais faute <strong>de</strong> pouvoir mener <strong>de</strong>s<br />
calculs pour chaque valeur <strong>de</strong> ce paramètre, on s’en tiendra<br />
à <strong>de</strong>s ordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur s’appuyant sur <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong><br />
diffusion simplifiés, associés à quelques calculs <strong>de</strong> référence<br />
avec l’équation parabolique.<br />
Enfin, la limite basse associée aux niveaux calculés est fixée<br />
à 25 dB(A), soit le bruit résiduel propre à une zone assez<br />
calme. Pour ce faire, <strong>de</strong>s spectres <strong>de</strong> référence <strong>de</strong> bruit<br />
résiduel sont intégrés au modèle, afin <strong>de</strong> pouvoir écarter les<br />
situations qui, pour une fréquence donnée, correspondraient<br />
à un niveau inférieur à 25 dB(A).<br />
Autre choix important, la gamme <strong>de</strong> fréquence, pour les<br />
mesures comme pour les calculs, s’étend quant à elle <strong>de</strong> 50<br />
Hz à 4 kHz. Mais avec un principe systématique : optimiser,<br />
La campagne d’essai sera réalisée sur le site <strong>de</strong> recherche<br />
atmosphérique <strong>de</strong> Lannemezan (Hautes-Pyrénées). Ce site<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 57
éférencé Météo France est plan, couvert <strong>de</strong> prairie <strong>et</strong><br />
balayé par <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> vent assez variées, <strong>de</strong> secteur<br />
ouest ou sud préférentiellement. Cent voix acoustiques,<br />
cinquante voix <strong>de</strong> mesures météorologiques (anémomètres<br />
soniques, girou<strong>et</strong>tes, son<strong>de</strong>s thermiques) seront réparties<br />
selon les différents axes <strong>de</strong> propagations. Des mesures<br />
d’impédance <strong>de</strong> sol viendront compléter ce dispositif.<br />
Les essais à Lannemezan sont prévus pour juin 2005,<br />
l’analyse, les calculs complémentaires <strong>et</strong> la synthèse<br />
s’échelonneront jusqu’en avril 2006. Une participation au<br />
groupe <strong>de</strong> travail Afnor sur les incertitu<strong>de</strong>s est prévue. De<br />
fait, il est <strong>de</strong> l’intention <strong>de</strong>s auteurs <strong>de</strong> faire profiter au plus<br />
vite le cadre normatif <strong>de</strong>s enseignements <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
sensibilité.<br />
[NDLR : A l'heure où nous m<strong>et</strong>tons sous presse, certains <strong>de</strong>s chiffres présentés<br />
dans c<strong>et</strong>te synthèse ont connu <strong>de</strong> sensibles variations. Pour plus <strong>de</strong> détails, se<br />
renseigner auprès <strong>de</strong> l'auteur.]<br />
Eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la réflexion diffuse <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s sur la propagation acoustique <strong>et</strong><br />
sur la représentation <strong>de</strong> l'environnement sonore en milieu urbain<br />
Judicaël Picaut (Laboratoire central <strong>de</strong>s Ponts<br />
<strong>et</strong> Chaussées)<br />
Nous faisons ici cap sur le milieu urbain <strong>de</strong>nse, fortement<br />
construit. C’est en eff<strong>et</strong> à la compréhension <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s<br />
réflexions diffuses <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s urbaines, tant d’un point <strong>de</strong><br />
vue acoustique que sur le plan perceptif, que nous convie<br />
c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>. À l’instar du proj<strong>et</strong> présenté par Fabrice<br />
Junker, ce proj<strong>et</strong> a trouvé naissance au gré <strong>de</strong><br />
collaborations nouées au sein du GDR “bruit <strong>de</strong>s transports”.<br />
Collaborent à c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> le <strong>Centre</strong> scientifique <strong>et</strong><br />
technique du bâtiment (CSTB), l’école d’architecture <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
paysage <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux (laboratoire Greco), l’école<br />
d’architecture <strong>de</strong> Nantes (Laboratoire Cerma), sous le<br />
pilotage du Laboratoire central <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées<br />
(LCPC). Commencé en avril 2004, ce proj<strong>et</strong>, qui s’étend sur<br />
24 mois, doit prendre fin en avril 2006.<br />
Contrairement aux autres proj<strong>et</strong>s, l’équipe avait quelque<br />
peu anticipé l’obtention <strong>de</strong> ce financement. Aussi<br />
l’avancement <strong>de</strong>s travaux perm<strong>et</strong>-il d’ores <strong>et</strong> déjà <strong>de</strong><br />
présenter quelques résultats.<br />
Portée <strong>et</strong> contenu du proj<strong>et</strong><br />
En quoi ce proj<strong>et</strong> contribue-t-il aux objectifs que s’est fixé<br />
le programme Bruit <strong>et</strong> nuisances <strong>sonores</strong> ? Tout d’abord,<br />
compte tenu <strong>de</strong> l’enjeu clé que constitue la cartographie du<br />
bruit en milieu urbain, la précision <strong>de</strong>s outils reste un<br />
problème fondamental. Chacun sait en eff<strong>et</strong> que la<br />
caractérisation <strong>de</strong>s environnements <strong>sonores</strong> extérieurs est<br />
loin d’être un acte neutre sur le plan économique. D’où<br />
l’intérêt d’examiner en quoi les phénomènes <strong>de</strong> réflexion<br />
diffuse <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s peuvent influencer le cheminement <strong>de</strong><br />
l’énergie sonore à travers nos rues. Ne serait-ce que pour<br />
intégrer la notion <strong>de</strong> “forme architecturale” dans les outils<br />
d’évaluation. Au <strong>de</strong>là du seul aspect physique, l’existence<br />
d’un éventuel eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> la réflexion diffuse sur la perception<br />
est un autre axe d’investigation à ne pas négliger. Enfin,<br />
dans la perspective <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong> nouveaux outils à<br />
<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s architectes ou <strong>de</strong>s urbanistes, une telle<br />
démarche <strong>de</strong> modélisation <strong>de</strong>s phénomènes, d’un point <strong>de</strong><br />
vue perceptif <strong>et</strong> physique, ne manque pas d’intérêt.<br />
été exploitées en parallèle : la métho<strong>de</strong> BEM <strong>et</strong> la métho<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>s particules <strong>sonores</strong>.<br />
La métho<strong>de</strong> BEM offre l’avantage <strong>de</strong> pouvoir étudier <strong>de</strong>s<br />
coupes <strong>de</strong> rues en prenant en compte la géométrie réelle<br />
<strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Baptisé Mikado, ce co<strong>de</strong> <strong>de</strong> calcul développé<br />
par le CSTB se base sur les éléments <strong>de</strong> frontière pour<br />
estimer le champ sonore réfléchi par les faça<strong>de</strong>s. Différentes<br />
fréquences <strong>de</strong> source sonore peuvent être expérimentées,<br />
sources <strong>et</strong> récepteurs pouvant par ailleurs être disposés à<br />
l’envi. À titre <strong>de</strong> comparaison, les mêmes simulations sont<br />
réalisées pour une faça<strong>de</strong> <strong>de</strong> référence totalement plane. À<br />
un point <strong>de</strong> réception donné, on notera, non sans intérêt,<br />
qu’entre une rue <strong>de</strong> type faça<strong>de</strong> plane <strong>et</strong> une rue aux<br />
faça<strong>de</strong>s présentant quelques irrégularités, les différences<br />
peuvent atteindre jusqu’à 10 dB. Des simulations portant sur<br />
<strong>de</strong>s cas plus “académiques” ont montré <strong>de</strong>s tendances<br />
similaires : par rapport à une faça<strong>de</strong> plane, la présence <strong>de</strong><br />
trois balcons s’est par exemple traduite par une différence<br />
<strong>de</strong> 7 à 8 dB.<br />
La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s particules <strong>sonores</strong>, une approche<br />
tridimensionnelle ayant recours au programme SPPS<br />
développé par le LCPC, perm<strong>et</strong> quant à elle <strong>de</strong> simuler,<br />
c<strong>et</strong>te fois, non pas <strong>de</strong>s géométries réelles, mais <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong><br />
réflexions arbitraires <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>. Le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> calcul est<br />
relativement simple : une unique source ém<strong>et</strong> <strong>de</strong>s particules<br />
<strong>sonores</strong> dans différentes directions ; ces particules sont<br />
réfléchies soit <strong>de</strong> manière spéculaire (même angle pour<br />
l’on<strong>de</strong> réfléchie <strong>et</strong> l’on<strong>de</strong> inci<strong>de</strong>nte), soit <strong>de</strong> manière diffuse<br />
(cinq lois <strong>de</strong> réflexion différentes sont testées, en faisant<br />
varier l’angle <strong>de</strong> réflexion autour <strong>de</strong> la normale à la faça<strong>de</strong>).<br />
Bien sûr, l’énergie sonore subit aussi les phénomènes<br />
physiques classiques que sont l’atténuation atmosphérique<br />
<strong>et</strong> l’absorption par les parois. La métho<strong>de</strong> perm<strong>et</strong> par<br />
ailleurs d’intégrer <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> réflexion semi-diffuses. De<br />
fait, tout porte à croire que la réalité <strong>de</strong>s réflexions, au gré<br />
<strong>de</strong>s irrégularités <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s, n’est pas très éloignée du<br />
comportement spéculaire. L’idée est <strong>de</strong> simuler<br />
numériquement différents types <strong>de</strong> lois <strong>et</strong> d’étudier l’eff<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> ces lois sur la propagation acoustique (niveau sonore,<br />
temps <strong>de</strong> réverbération).<br />
Après avoir mis en évi<strong>de</strong>nce d’éventuels eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la<br />
réflexion diffuse sur la propagation du bruit en faça<strong>de</strong>,<br />
l’étu<strong>de</strong> s’interroge sur les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te même réflexion<br />
diffuse sur la perception. Les efforts portent ensuite sur la<br />
formulation <strong>de</strong> lois <strong>de</strong> réflexion <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s urbaines,<br />
lesquelles sont enfin intégrées à un outil prévisionnel, au<br />
moins sous la forme d’un prototype.<br />
Réflexion diffuse <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s : eff<strong>et</strong> acoustique<br />
Dans le principe, il s’agit <strong>de</strong> simuler, dans une rue,<br />
différentes conditions <strong>de</strong> réflexion, pour ensuite calculer <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>sonores</strong> ou <strong>de</strong>s temps <strong>de</strong> réverbération. Pour ce<br />
faire, <strong>de</strong>ux approches <strong>de</strong> modélisation complémentaires ont<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s réflexions diffuses sur la propagation<br />
<strong>de</strong> l’énergie sonore<br />
Des différences notables apparaissent entre les différentes<br />
lois <strong>de</strong> réflexion testées : les temps <strong>de</strong> réverbérations (TR)<br />
obtenus après calcul varient dans une proportion <strong>de</strong> 1 à 6<br />
(TR=0,5 s pour la loi <strong>de</strong> réflexion dite “uniforme” [première<br />
courbe en partant du bas dans le graphe ci-<strong>de</strong>ssus] ; TR=3 s<br />
pour la loi <strong>de</strong> réflexion spéculaire [première courbe en<br />
partant du haut dans le graphe ci-<strong>de</strong>ssus]). L’examen <strong>de</strong>s<br />
courbes d’atténuation sonore aboutit aux mêmes<br />
constatations, les différences entre niveaux <strong>sonores</strong> pouvant<br />
atteindre 5 décibels.<br />
Conclusions ? La métho<strong>de</strong> BEM <strong>et</strong> la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>s particules<br />
<strong>sonores</strong> indiquent toutes <strong>de</strong>ux que les conditions <strong>de</strong><br />
réflexions peuvent induire <strong>de</strong>s différences <strong>de</strong> niveaux<br />
<strong>sonores</strong> comprises entre 5 <strong>et</strong> 10 dB (voire même 15 dans<br />
certains cas), <strong>et</strong> se traduire par <strong>de</strong>s différences <strong>de</strong><br />
réverbération loin d’être négligeables, variant <strong>de</strong> un à six.<br />
Ceci confirme qu’un outil prévisionnel se voulant réaliste ne<br />
peut s’affranchir <strong>de</strong>s lois <strong>de</strong> réflexion. Autre enseignement :<br />
par le seul choix <strong>de</strong>s caractéristiques architecturales <strong>de</strong>s<br />
faça<strong>de</strong>s, il est possible d’influer sur les caractéristiques<br />
acoustiques d’une rue.<br />
Réflexion diffuse <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s : eff<strong>et</strong> sur la perception<br />
L’eff<strong>et</strong> acoustique <strong>de</strong>s réflexions diffuses étant établi, il<br />
s’agit ensuite <strong>de</strong> s’intéresser à l’influence <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong><br />
réflexion sur la perception. C<strong>et</strong>te <strong>de</strong>uxième phase du proj<strong>et</strong><br />
fait tout d’abord appel à <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> catégorisation<br />
libre pour vérifier l’existence d’un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Les<br />
enregistrements <strong>sonores</strong> proposés à l’écoute correspon<strong>de</strong>nt<br />
à différentes configurations <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> <strong>et</strong> à différents types<br />
<strong>de</strong> rues. On propose aux personnes se prêtant au test <strong>de</strong><br />
“classer” librement les enregistrements, afin <strong>de</strong> vérifier<br />
ultérieurement si les regroupements correspon<strong>de</strong>nt ou non à<br />
<strong>de</strong>s caractéristiques communes <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Puis, la<br />
validation <strong>de</strong>s critères r<strong>et</strong>enus s’effectue au moyen <strong>de</strong><br />
questionnaires basés sur <strong>de</strong>s échelles sémantiques. Par <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s d’enquête par questionnaire, on vérifie enfin si les<br />
critères r<strong>et</strong>enus lors <strong>de</strong>s tests en laboratoire sont toujours<br />
valables in situ. À ce sta<strong>de</strong>, les autres aspects pouvant<br />
influer sur la perception, tels que les aspects visuels,<br />
pourraient être pris en compte.<br />
Formulation <strong>de</strong> lois <strong>de</strong> réflexion<br />
Le troisième acte <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> ambitionne <strong>de</strong> caractériser<br />
<strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s type au moyen <strong>de</strong> lois <strong>de</strong> réflexion, afin <strong>de</strong><br />
constituer en quelque sorte une base <strong>de</strong> données<br />
architecturales pouvant être intégrées ultérieurement à un<br />
outil prévisionnel. Les lois sont établies sur la base <strong>de</strong><br />
mesures in situ ou <strong>de</strong> mesures sur maqu<strong>et</strong>tes, <strong>de</strong><br />
modélisations mathématiques <strong>et</strong> numériques, d’analyse<br />
fractale <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> potentialité <strong>de</strong> diffusion ou encore<br />
<strong>de</strong> comparaisons croisées. Il est <strong>de</strong> plus prévu <strong>de</strong> recourir à<br />
la photogrammétrie pour mieux prendre en compte la<br />
morphologie réelle <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. L’analyse<br />
photogrammétrique perm<strong>et</strong>, à partir <strong>de</strong> prises <strong>de</strong> vue d’une<br />
faça<strong>de</strong>, <strong>de</strong> reconstituer une maqu<strong>et</strong>te numérique <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
faça<strong>de</strong>, exploitable à différentes échelles.<br />
Intégration <strong>de</strong>s lois dans un outil opérationnel<br />
L’objectif final du proj<strong>et</strong> est d’intégrer les lois <strong>de</strong> réflexion<br />
obtenues dans un outil d’acoustique prévisionnelle tel que<br />
Mithra (CSTB), afin <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> résultats d’une précision<br />
bien plus poussée. Les résultats accumulés au gré <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
étu<strong>de</strong> serviront également à la constitution d’une base <strong>de</strong><br />
données architecturales perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> relier formes<br />
urbaines <strong>et</strong> potentialité <strong>de</strong> diffusion.<br />
Estimateur <strong>de</strong> la sonie <strong>de</strong> sons non stationnaires<br />
Jérémy Marozeau (Genesis)<br />
Ce proj<strong>et</strong> est une collaboration entre le laboratoire <strong>de</strong><br />
mécanique <strong>et</strong> d’acoustique du CNRS <strong>et</strong> la société Genesis.<br />
Préambule : la sonie en <strong>de</strong>ux mots<br />
Quel intérêt y a-t-il à étudier la sonie ? Par définition, la<br />
sonie correspond à l’intensité subjective d'un son qui fait<br />
dire que le son est fort ou faible. C<strong>et</strong>te notion compte parmi<br />
les facteurs clé pouvant influer sur la manifestation <strong>de</strong> la<br />
gêne <strong>et</strong>, partant, constitue un marqueur possible <strong>de</strong><br />
l’évaluation <strong>de</strong> la qualité sonore. Qualité perceptive oblige,<br />
la sonie ne peut être mesurée que par <strong>de</strong>s expériences<br />
psycho-acoustiques au cours <strong>de</strong>squelles il est <strong>de</strong>mandé au<br />
suj<strong>et</strong> d’évaluer, directement ou indirectement, la sonie d’un<br />
son. Ces expériences somme toute assez lour<strong>de</strong>s ont mené<br />
les chercheurs à créer <strong>de</strong>s modèles, ou <strong>de</strong>s estimateurs,<br />
conçus pour prédire le jugement. Étu<strong>de</strong>s à l’appui, on a<br />
montré que la sonie dépend avant tout <strong>de</strong> la pression du<br />
signal, mais aussi <strong>de</strong> la fréquence <strong>et</strong> <strong>de</strong> la durée du signal.<br />
Parmi les différents estimateurs rapportés dans la<br />
littérature, celui proposé par Zwicker dans les années 50 fait<br />
aujourd’hui office <strong>de</strong> norme, mais il n’est pas du tout<br />
adapté aux sons non stationnaires. D’où la vocation <strong>de</strong> ce<br />
proj<strong>et</strong> : élaborer un estimateur <strong>de</strong> sonie mieux approprié<br />
aux sons non stationnaires <strong>et</strong>, particulièrement, aux sons<br />
impulsifs.<br />
Rétrospective du proj<strong>et</strong><br />
Proposer un nouvel estimateur est une chose, en prouver la<br />
pertinence en est une autre. Encore faut-il avoir, au<br />
préalable, dressé un état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong>s estimateurs déjà<br />
existants. Mais avant <strong>de</strong> pouvoir clamer la solidité d’un<br />
nouvel estimateur, celui doit avoir passé toute une série<br />
d’épreuves. Telle est la vocation <strong>de</strong>s expériences psychoacoustiques<br />
menées durant la <strong>de</strong>uxième phase du proj<strong>et</strong>, au<br />
cours <strong>de</strong>squelles différents types <strong>de</strong> stimuli, soit<br />
synthétiques, soit naturels, ont été recrutés. Mais avant <strong>de</strong><br />
lancer c<strong>et</strong>te gran<strong>de</strong> campagne d’expériences psychoacoustiques,<br />
une étape préalable s’imposait, à savoir une<br />
étu<strong>de</strong> méthodologique <strong>de</strong>stinée à définir la métho<strong>de</strong> la<br />
mieux adaptée pour trouver la sonie <strong>de</strong>s sons impulsionnels.<br />
De ces quatre étapes, Jérémy Marozeau a choisi <strong>de</strong><br />
s’appesantir plus spécifiquement sur la troisième,<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s estimateurs existants.<br />
Panorama <strong>de</strong>s estimateurs <strong>de</strong> sonie existants<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 59
Dans c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>, le choix a porté sur <strong>de</strong>s estimateurs<br />
capables <strong>de</strong> calculer le niveau sonore en dB. Eu égard aux<br />
indices européens qui ont émergé ces <strong>de</strong>rniers temps, c<strong>et</strong>te<br />
particularité est en eff<strong>et</strong> avantageuse. Quel est le principe<br />
d’élaboration <strong>de</strong> tels estimateurs <strong>de</strong> type signal ? Le son<br />
passe tout d’abord à travers l’un <strong>de</strong>s trois filtres A, B <strong>et</strong> C<br />
correspondant aux trois courbes isosoniques (niveaux 40 dB,<br />
70 dB <strong>et</strong> 100 dB). Puis, l’énergie <strong>de</strong> ce son est calculée, avec<br />
trois options <strong>de</strong> temps d’intégration possibles : Slow<br />
(constante <strong>de</strong> 1 secon<strong>de</strong>), Fast (125 millisecon<strong>de</strong>s) <strong>et</strong><br />
Impulse (35 millisecon<strong>de</strong>s). Afin <strong>de</strong> représenter<br />
graphiquement le niveau sonore en fonction du temps, c’est<br />
le logarithme <strong>de</strong> l’énergie obtenue qui est considéré. Pour<br />
attribuer à ce son un niveau fixe, on fait alors le choix d’un<br />
point caractéristique <strong>de</strong> la courbe (moyenne, niveau<br />
équivalent, maximum, …). Ici, c’est le niveau maximum qui<br />
a été r<strong>et</strong>enu.<br />
Un autre estimateur a également fait l’obj<strong>et</strong> d’une<br />
évaluation : l’estimateur normalisé ISO 532B proposé par<br />
Zwicker, principalement basé sur <strong>de</strong>s modèles perceptifs.<br />
Comment est-il élaboré ? À partir d’un son stationnaire, on<br />
effectue sa transformée <strong>de</strong> Fourier moyenne. L’énergie est<br />
ensuite regroupée par ban<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bark. Un coefficient A0,<br />
correspondant grosso modo à la réponse en fréquence <strong>de</strong><br />
l’oreille, est alors r<strong>et</strong>ranché. De cela, est extrait ce que<br />
Zwicker appelle la “sonie <strong>de</strong> cœur”, soit la sonie à<br />
l’intérieur d’une ban<strong>de</strong> due à l’énergie à l’intérieur même<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te ban<strong>de</strong>. À l’étape suivante, on extrait ce que<br />
Zwicker appelle la “sonie <strong>de</strong> flan”, soit la sonie à l’intérieur<br />
d’une ban<strong>de</strong> due à une ban<strong>de</strong> adjacente. En d’autres<br />
termes, la sonie <strong>de</strong> flan correspond à la composante prenant<br />
en compte le masquage fréquentiel. Enfin, pour obtenir une<br />
sonie unique, c’est l’intégrale <strong>de</strong> la courbe obtenue qui est<br />
considérée.<br />
Problème : la transformée <strong>de</strong> Fourier moyenne supprime<br />
toute prise en compte <strong>de</strong>s fluctuations temporelles. Or, qui<br />
dit son non stationnaire, dit fluctuations temporelles. C’est<br />
c<strong>et</strong>te carence du modèle initial qui a poussé Zwicker a<br />
proposer, en 1977, une amélioration reflétant c<strong>et</strong>te fois les<br />
fluctuations temporelles. À partir d’un son, l’évolution <strong>de</strong> la<br />
sonie en fonction du temps est calculée, à partir <strong>de</strong> la sonie<br />
<strong>de</strong> fenêtres temporelles espacées <strong>de</strong> ∆t. Divers filtres<br />
prennent également en considération le masquage temporel.<br />
Un point particulier <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te courbe est alors choisi. Ici,<br />
comme pour le niveau sonore, c’est le maximum <strong>de</strong> la<br />
courbe d’évolution <strong>de</strong> la sonie avec le temps qui est choisi.<br />
Protocole d’évaluation<br />
Face à la foule d’estimateurs existants, pour certains<br />
éminemment complexes, l’adoption d’un certain nombre <strong>de</strong><br />
critères d’évaluation s’impose. En premier lieu, dans le<br />
registre quantitatif, l’estimateur est éprouvé selon<br />
différentes expériences, avec <strong>de</strong>s stimuli <strong>et</strong> <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s<br />
différents. Ceci pour s’éviter le biais trop souvent r<strong>et</strong>rouvé<br />
dans la littérature, à savoir le manque “d’universalité” d’un<br />
estimateur uniquement testé à l’aune <strong>de</strong>s critères ayant<br />
servi à son élaboration.<br />
Au chapitre <strong>de</strong>s critères qualitatifs c<strong>et</strong>te fois, tout<br />
paramètre arbitraire est à proscrire. De plus, le protocole<br />
doit faire la part belle à une certaine pertinence perceptive<br />
<strong>et</strong> se montrer robuste vis-à-vis <strong>de</strong>s divers paramètres, tels<br />
que la fréquence d’échantillonnage.<br />
Quatre indicateurs ont, au final, été r<strong>et</strong>enus pour<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s estimateurs : M.A.R., Rmax, Rmean <strong>et</strong> Rstd.<br />
La façon la plus intuitive d’évaluer un estimateur donné est<br />
<strong>de</strong> prendre la valeur absolue <strong>de</strong> l’écart entre la mesure (le<br />
niveau d’isosonie estimé au cours d’une expérience psychoacoustique)<br />
<strong>et</strong> son calcul (le niveau d’isosonie calculé), puis<br />
<strong>de</strong> calculer une moyenne. C’est ce principe qui correspond à<br />
l’indicateur M.A.R. (pour Mean Absolute Residual).<br />
Cependant, c<strong>et</strong> indicateur présente l’inconvénient<br />
d’atténuer l’importance d’erreurs grossières. C’est la raison<br />
pour laquelle il faut également considérer l’indicateur RMax,<br />
qui correspond à la valeur absolue <strong>de</strong> l’erreur maximum.<br />
Enfin, afin <strong>de</strong> pouvoir rendre compte <strong>de</strong> l’éventualité d’une<br />
erreur systématique, il faut considérer la moyenne <strong>de</strong><br />
l’écart (Rmean) <strong>et</strong> l’écart type <strong>de</strong> l’erreur (Rstd).<br />
Résultats <strong>de</strong> l’évaluation<br />
Pour différents types <strong>de</strong> stimuli, cinq estimateurs ont été<br />
évalués selon les quatre indicateurs décrits précé<strong>de</strong>mment.<br />
Au nombre <strong>de</strong>s différents stimuli exploités, on trouve : <strong>de</strong>s<br />
sons purs à une fréquence <strong>de</strong> 1 kHz ; <strong>de</strong>s sons purs, <strong>de</strong><br />
fréquence comprise entre 125 Hz <strong>et</strong> 10,5 kHz, <strong>de</strong> durée<br />
comprise entre 10 <strong>et</strong> 500 ms, <strong>et</strong> <strong>de</strong> niveau compris entre 55<br />
<strong>et</strong> 95 dB ; <strong>de</strong>s bruits blancs <strong>de</strong> niveau 72,5 dB, <strong>de</strong> durée<br />
comprise entre 10 <strong>et</strong> 500 ms ; <strong>de</strong>s stimuli naturels<br />
stationnaires (sons <strong>de</strong> l’environnement) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s stimuli<br />
naturels non stationnaires (bruits <strong>de</strong> chantiers). Les cinq<br />
estimateurs évalués sont : le Max DBB Slow (estimateur en<br />
dB avec une fenêtre temporelle d’une secon<strong>de</strong>) ; le Max DBB<br />
Fast (fenêtre temporelle <strong>de</strong> 125 millisecon<strong>de</strong>s), le Max DBB<br />
Impulse (fenêtre temporelle <strong>de</strong> 35 millisecon<strong>de</strong>s) ; le<br />
modèle ISO S532B <strong>de</strong> Zwicker adapté à la sonie <strong>de</strong>s sons<br />
stationnaires ; le modèle <strong>de</strong> Zwicker <strong>de</strong> 1977 adapté à la<br />
sonie <strong>de</strong>s sons non stationnaires. Les trois pondérations A, B<br />
<strong>et</strong> C ont également été comparées.<br />
Conclusions<br />
Les niveaux pondérés A, B <strong>et</strong> C restent insuffisants pour<br />
estimer correctement la sonie <strong>de</strong>s sons naturels. Le<br />
temporel <strong>de</strong> Zwicker <strong>de</strong> 1977 estime correctement la sonie<br />
<strong>de</strong>s sons stationnaires mais le besoin d’un nouvel estimateur<br />
adapté aux sons impulsionnels est confirmé. C’est<br />
précisément l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière étape <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong>, qui<br />
est en cours.<br />
Bruit <strong>et</strong> vibration <strong>de</strong>s tramways : caractérisation <strong>de</strong>s sources <strong>et</strong> évaluation<br />
<strong>de</strong> la perception<br />
Thierry Legouis (SerdB)<br />
Ce proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> recherche est mené conjointement par cinq<br />
partenaires : SerdB, l’Inr<strong>et</strong>s, l’Ecole Centrale <strong>de</strong> Nantes, la<br />
société CDM (entreprise spécialisée notamment dans la<br />
fourniture <strong>de</strong> matériel pour la pose <strong>de</strong> voies anti-vibratiles)<br />
<strong>et</strong> la Société d’économie mixte <strong>de</strong>s transports <strong>de</strong> la<br />
agglomération nantaise (SEMITAN), qui gère le tramway<br />
nantais. L’étu<strong>de</strong> ayant démarré au début 2005, les résultats<br />
communiqués ici sont issus d’étu<strong>de</strong>s antérieures.<br />
L’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> est d’évaluer l’intérêt d’intégrer, dans<br />
les <strong>de</strong>scripteurs acoustiques <strong>de</strong> la gêne instantanée, la<br />
contribution <strong>de</strong>s différentes sources <strong>de</strong> bruit élémentaires<br />
que sont le roulement, la motorisation, les équipements<br />
électriques <strong>et</strong> le bruit solidien. Deuxième objectif <strong>de</strong> ce<br />
proj<strong>et</strong> résolument tourné vers l’opérationnel : formuler <strong>de</strong>s<br />
recommandations quant à l’usage <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>scripteurs pour<br />
les futurs exploitants.<br />
On déplore un manque criant <strong>de</strong> recommandations en<br />
matière d’étu<strong>de</strong>s d’impacts <strong>de</strong>s tramways. Ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
transport est pour l’heure traité comme une voie routière,<br />
c’est-à-dire sur un principe <strong>de</strong> bruit moyen intégré sur une<br />
pério<strong>de</strong> diurne (6h-22h) ou nocturne (22h-6h). Or, chacun<br />
sait que le bruit <strong>de</strong>s tramways, sans être un bruit purement<br />
impulsionnel, est d’apparition intermittente, qui se déroule<br />
sur 10 à 30 secon<strong>de</strong>s tout au plus. Face à l’incapacité <strong>de</strong>s<br />
indices moyens <strong>de</strong> caractériser c<strong>et</strong>te source particulière, il<br />
est apparu essentiel <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong> nouveaux indicateurs<br />
acoustiques (émergence lors du passage du premier « tram »<br />
du matin par exemple).<br />
Le bruit perçu à proximité d’une voie <strong>de</strong> tramway est<br />
constitué <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux composantes : le bruit aérien, émis<br />
directement dans l’air par le tramway, <strong>de</strong> spectre plutôt<br />
centré sur les fréquences médiums, assez comparable à un<br />
bruit routier ; le bruit solidien, qui se propage par la mise en<br />
vibration <strong>de</strong>s structures, <strong>et</strong> qui renforce les fréquences<br />
graves — à tel point qu’on le nomme “bruit <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>ment”.<br />
Il est souvent peu aisé <strong>de</strong> distinguer les contributions<br />
respectives <strong>de</strong> ces composantes dans le bruit du tramway<br />
perçu dans les habitations. C’est donc une <strong>de</strong>s ambitions <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> que <strong>de</strong> progresser dans la compréhension <strong>de</strong><br />
l’origine réelle <strong>de</strong>s différents types <strong>de</strong> bruit.<br />
Une fois le bruit émis, la morphologie urbaine influe<br />
gran<strong>de</strong>ment sur la propagation, sans oublier que le bruit<br />
perçu chez les riverains est, quant à lui, lié aux<br />
caractéristiques du bâtiment (notamment <strong>de</strong>s ouvertures).<br />
En d’autres termes, étudier le bruit à <strong>de</strong>ux mètres à<br />
l’extérieur <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s sans considérer l’isolement <strong>de</strong> cellesci<br />
<strong>et</strong> les caractéristiques du bâtiment, ne peut donner une<br />
idée satisfaisante du bruit perçu par les riverains <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
gêne éventuelle ressentie.<br />
Pour déterminer expérimentalement le bruit d’un tramway,<br />
les techniques d’antenne acoustique perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> simuler<br />
<strong>de</strong>s microphones directionnels visant en permanence les<br />
sources <strong>sonores</strong> du tramway, comme si le tramway était<br />
immobile. Ces techniques perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> déterminer, par<br />
exemple, l’influence <strong>de</strong> chaque bogie <strong>et</strong> <strong>de</strong> savoir si les<br />
bogies moteurs, situés aux extrémités, font plus <strong>de</strong> bruit que<br />
les bogies intermédiaires. Avec son approche à <strong>de</strong>ux<br />
dimensions, s’intéressant à la fois au bruit <strong>de</strong> roulement <strong>et</strong><br />
aux sources en toiture, c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> prom<strong>et</strong> <strong>de</strong> fournir <strong>de</strong><br />
précieux enseignements.<br />
Le vol<strong>et</strong> psychosociologique<br />
Le proj<strong>et</strong>, qui s’étend sur 24 mois, consistera dans un<br />
premier temps, sur 6 à 8 mois, à l’étu<strong>de</strong> in situ <strong>de</strong> la<br />
perception du tramway. Une enquête par questionnaire sera<br />
menée auprès <strong>de</strong> 300 à 500 riverains. Des mesures<br />
acoustiques, complétées par <strong>de</strong>s simulations, viendront<br />
compléter les données recueillies.<br />
Le vol<strong>et</strong> acoustique<br />
Le <strong>de</strong>uxième vol<strong>et</strong> du proj<strong>et</strong>, dans un registre plus physique,<br />
s’attachera à modéliser les phénomènes acoustiques en<br />
présence. Seront précisées la nature <strong>et</strong> les caractéristiques<br />
(puissance, directivité) <strong>de</strong>s bruits émis par le tramway<br />
susceptibles d’affecter les riverains. Pour déterminer le<br />
niveau <strong>de</strong>s sources liées aux roulements, il sera fait appel à<br />
une technique d’antenne microphonique. Jusqu’ici utilisée<br />
en mo<strong>de</strong> 1D seulement, c<strong>et</strong>te technique est ici étendue à<br />
<strong>de</strong>ux dimensions. Sera également mise à profit une<br />
technique <strong>de</strong> détermination <strong>de</strong> la puissance rayonnée à<br />
travers un <strong>de</strong>mi cylindre, en trois sites différents, afin <strong>de</strong><br />
caractériser la puissance <strong>et</strong> la directivité <strong>de</strong>s source <strong>sonores</strong>.<br />
Une fois ces travaux réalisés, <strong>de</strong>s modèles viendront étayer<br />
l’estimation du bruit du tramway en milieu urbain, dans une<br />
rue en U.<br />
Les sources <strong>sonores</strong> aériennes<br />
Parmi les sources <strong>sonores</strong> aériennes propres au tramway, le<br />
contact roue-rail tient évi<strong>de</strong>mment un rôle <strong>de</strong> premier plan,<br />
mais on ne négligera pas pour autant d’autres sources plus<br />
méconnues, comme les équipements <strong>de</strong> toiture tels que la<br />
climatisation, par exemple. Ces sources viennent se<br />
superposer, <strong>de</strong> manière plus ou moins perceptive, suivant la<br />
vitesse du tramway <strong>et</strong> l’endroit où se situe le récepteur.<br />
D’autres sources existent : bruits électriques, systèmes<br />
pneumatiques <strong>de</strong>s portes, cloch<strong>et</strong>te d’avertissement, voix<br />
humaines en station… Enfin, s’ajoutent aussi les appareils <strong>de</strong><br />
voies <strong>et</strong> les croisements, sources <strong>de</strong> bruit potentiellement<br />
très gênantes. Le bruit <strong>de</strong> roulement dépend bien sûr <strong>de</strong>s<br />
surfaces <strong>et</strong> <strong>de</strong>s rugosités entre le rail <strong>et</strong> la roue, mais<br />
également du type <strong>de</strong> revêtement (gazon, béton, enrobé,<br />
pavé, ballast), du type <strong>de</strong> pose <strong>de</strong> voies <strong>et</strong> du profil en long<br />
(montée ou <strong>de</strong>scente). Grâce à sa porosité, le ballast offre<br />
<strong>de</strong>s possibilités d’absorption représentant un gain <strong>de</strong> 2 à 3<br />
dB(A). Le gazon, en plus <strong>de</strong> son aspect esthétique très<br />
apprécié, perm<strong>et</strong> d’obtenir <strong>de</strong>s gains <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 4 à 5<br />
dB(A).<br />
Exemple <strong>de</strong> mesures par antenne 1D (document INRETS)<br />
Concernant maintenant l’influence <strong>de</strong> la vitesse sur le bruit,<br />
au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> 10 km/h, celui-ci suit une loi à peu près<br />
logarithmique : il est principalement dû au roulement. En<br />
revanche, en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te vitesse, le bruit diminue moins<br />
vite en raison <strong>de</strong> l’influence <strong>de</strong>s autres sources. D’où<br />
l’importance <strong>de</strong> prendre ces bruits en compte, à travers une<br />
étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> gêne <strong>et</strong> dans les modèles <strong>de</strong> simulations. Ce qui<br />
n’a encore jamais été fait.<br />
Le vol<strong>et</strong> vibrations<br />
L’objectif est <strong>de</strong> définir une méthodologie perm<strong>et</strong>tant<br />
d’estimer les vibrations <strong>et</strong> le bruit <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>ment émis au<br />
passage d’une rame dans une rue située à proximité d’une<br />
voie. Une tâche complexe qui nécessite plusieurs étapes. Il<br />
faut tout d’abord déterminer les efforts injectés dans le rail.<br />
Puis, déterminer comment ces efforts vibratoires transitent<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 61
à travers la plate-forme pour atteindre le sol ; différents<br />
types <strong>de</strong> pose <strong>de</strong> voie sont à envisager ici. Ensuite, vient le<br />
calcul <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> propagation. Enfin, on étudie le<br />
couplage entre le sol <strong>et</strong> le bâtiment, ainsi que la génération<br />
du bruit <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>ment.<br />
Pour aboutir à quelque chose <strong>de</strong> représentatif, il faudra sans<br />
doute développer un certain nombre <strong>de</strong> modèles. Pour<br />
l’heure, en revanche, rien ne perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> connaître le niveau<br />
<strong>de</strong> précision qui sera atteint au final.<br />
Les vibrations<br />
Pour faire bref, on distingue trois manières <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s<br />
voies. Avec la pose classique, le rail est fixé rigi<strong>de</strong>ment sur<br />
le sol par <strong>de</strong>s traverses, ce qui revient à une fixation directe<br />
dans le sol. La pose intermédiaire, dite à “-10 dBv”, consiste<br />
à intercaler un élément souple entre le rail <strong>et</strong> le sol. Que<br />
celui-ci se situe directement sous le rail ou sous la traverse,<br />
le gain avoisine les 10 dBv. La pause sur dalle flottante,<br />
enfin, repose sur le principe <strong>de</strong> la désolidarisation <strong>de</strong> la voie<br />
par rapport au sol : le rail est fixé rigi<strong>de</strong>ment sur une dalle<br />
lour<strong>de</strong>, massive, en béton armé, laquelle repose elle-même<br />
sur <strong>de</strong>s plots en élastomère. Le gain : 20 dBv.<br />
Dans le principe, le choix du type <strong>de</strong> pose dépend <strong>de</strong> la<br />
proximité <strong>de</strong>s bâtiments, les poses sophistiquées étant<br />
réservées aux cas les plus défavorables. Mais les règles<br />
guidant ces choix restent aujourd’hui extrêmement<br />
empiriques : à moins <strong>de</strong> 7 m d’une habitation, on utilise une<br />
dalle flottante ; entre 7 <strong>et</strong> 12 m, on adopte la pose<br />
intermédiaire ; au <strong>de</strong>là, on pose <strong>de</strong> manière classique. Ainsi,<br />
faute <strong>de</strong> modèle <strong>de</strong> prédiction ad hoc, on prend souvent trop<br />
<strong>de</strong> précautions, ce qui coûte cher à l’arrivée.<br />
De plus, le choix du type <strong>de</strong> pose <strong>de</strong> voie n’est pas sans<br />
conséquence sur le bruit aérien. En eff<strong>et</strong>, lorsqu’un rail est<br />
posé sur <strong>de</strong>s patins souples, les vibrations engendrées par le<br />
passage <strong>de</strong>s tramways se propagent plus longtemps <strong>et</strong> plus<br />
loin, ce qui augmente le bruit émis. A contrario, lorsque le<br />
rail est fixé rigi<strong>de</strong>ment, ce phénomène reste très limité <strong>et</strong> le<br />
bruit généré au passage diminue. Ce que l’on peut gagner<br />
d’un côté, on peut le perdre d’un autre.<br />
Synthèse<br />
Dernier acte <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong>, la synthèse tentera <strong>de</strong> répondre<br />
aux <strong>de</strong>ux objectifs déjà mentionnés : m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce les<br />
situations susceptibles <strong>de</strong> créer une gêne chez les riverains ;<br />
en déduire <strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong>vant perm<strong>et</strong>tre aux<br />
déci<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> mieux intégrer la composante bruit <strong>et</strong><br />
vibrations dans leurs décisions.<br />
Les phénomènes physiques à la base <strong>de</strong> la génération du<br />
bruit sont variés <strong>et</strong> complexes. Pour l’heure, les<br />
connaissances se résument à quelques tendances : à faible<br />
vitesse, les sources <strong>sonores</strong> situées en toiture sont les plus<br />
importantes ; à vitesse plus élevée, domine le bruit <strong>de</strong><br />
roulement ; le type <strong>de</strong> revêtement <strong>et</strong> le type <strong>de</strong> pose<br />
influent à la fois sur le bruit aérien <strong>et</strong> sur le bruit solidien.<br />
Débat<br />
Optimisation <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s : <strong>et</strong> l’absorption ?<br />
Le débat a tout d’abord permis <strong>de</strong> clarifier la portée <strong>de</strong><br />
l’étu<strong>de</strong> présentée par Judicaël Picaut sur la réflexion diffuse<br />
<strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Il faut tout d’abord gar<strong>de</strong>r à l’esprit que c<strong>et</strong>te<br />
étu<strong>de</strong> avait pour unique ambition d’explorer les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la<br />
réflexion diffuse. Dans le modèle, les faça<strong>de</strong>s sont<br />
constituées <strong>de</strong> béton <strong>et</strong> <strong>de</strong> vitres, excluant donc toute prise<br />
en compte du phénomène d’absorption. Bien entendu, dans<br />
une démarche d’optimisation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>, ce <strong>de</strong>rnier<br />
paramètre, qui influe sur la réverbération, doit être<br />
considéré. En tout état <strong>de</strong> cause, les résultats <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> sur<br />
la réflexion diffuse n’étaient pas, à la date <strong>de</strong> ces assises,<br />
directement exploitables par les architectes ou les<br />
urbanistes.<br />
À signaler, sur ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’influence <strong>de</strong>s géométries <strong>de</strong><br />
balcons sur la propagation sonore, un travail <strong>de</strong> thèse que<br />
l’on doit à Hany Hossam-el-Dien (Cerma) : ce travail s’est<br />
concentré sur les gains d’atténuation apportés par la<br />
géométrie <strong>de</strong>s balcons, notamment sur <strong>de</strong>s hauteur<br />
importantes, <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> dix étages.<br />
Pourquoi les efforts, sur le plan <strong>de</strong> l’architecture extérieure,<br />
portent-ils essentiellement sur la géométrie <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s, <strong>et</strong><br />
non pas sur leurs coefficients d’absorption ? Les matériaux<br />
absorbants <strong>de</strong> type fibreux ou poreux posent un véritable<br />
problème d’entr<strong>et</strong>ien <strong>et</strong> <strong>de</strong> dégradation. Les architectes<br />
savent bien que la pierre calcaire doit être rénovée tous les<br />
dix ans.<br />
Les témoignages ont confirmé que l’hypothèse <strong>de</strong> la<br />
réflexion diffuse, ou tout au moins une certaine forme <strong>de</strong><br />
diffusion, était ce qui convenait le mieux à la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong><br />
la réalité du “comportement sonore” <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s d’une rue,<br />
surtout dans les fréquences médiums <strong>et</strong> aigues.<br />
Les valeurs obtenues par J. Picaut au moyen <strong>de</strong> son modèle<br />
<strong>de</strong> réverbération ont montré une forte sensibilité aux<br />
différentes lois <strong>de</strong> réflexions testées. Une explication à<br />
cela : le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> calculs basé sur les particules <strong>sonores</strong> est<br />
fortement lié au nombre <strong>de</strong> particules qui sont insérées dans<br />
le milieu considéré. Fait important, pour s‘assurer <strong>de</strong> la<br />
validité <strong>de</strong>s résultats, un travail préliminaire d’optimisation<br />
<strong>de</strong>s paramètres du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> calcul (pas <strong>de</strong> temps, nombre <strong>de</strong><br />
mailles, nombre <strong>de</strong> particules) <strong>et</strong> <strong>de</strong> validation <strong>de</strong> ce co<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> calcul a été mené préalablement à l’exploitation du<br />
modèle. Les résultats préliminaires ont été comparés à <strong>de</strong>s<br />
données issues <strong>de</strong> la littérature basées sur l’utilisation<br />
d’autres outils <strong>de</strong> simulations.<br />
Propagation à gran<strong>de</strong> distance : où s’arrêter,<br />
tant en distance qu’en fréquence ?<br />
La présentation <strong>de</strong> Fabrice Junker sur la propagation à<br />
gran<strong>de</strong> distance a soulevé une question relative aux limites<br />
adoptées pour l’étu<strong>de</strong>, tant en distance — pourquoi 1<br />
km seulement ? — qu’en fréquence — pourquoi se limiter à<br />
50 Hz ? En eff<strong>et</strong>, dans le domaine éolien notamment, l’étu<strong>de</strong><br />
d’impact doit porter sur <strong>de</strong>s distances bien plus élevées <strong>et</strong><br />
tenir compte <strong>de</strong>s très basses fréquences. Comment donc se<br />
justifie ce seuil <strong>de</strong>s 1 km adopté par l’équipe <strong>de</strong> recherche ?<br />
Tout d’abord par le niveau <strong>de</strong> précision visé : au <strong>de</strong>là <strong>de</strong><br />
1000 mètres, les prévisions sont immanquablement<br />
entachées d’une forte variabilité. Ensuite, avec les<br />
équations paraboliques, qui dit plus gran<strong>de</strong> distance, dit<br />
augmentation <strong>de</strong>s tailles <strong>de</strong> maillage <strong>et</strong> <strong>de</strong>s temps <strong>de</strong><br />
calculs. En outre, l’un <strong>de</strong>s credo associé à c<strong>et</strong>te démarche,<br />
c’est qu’une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sensibilité jusqu’à 1000 m contribuera<br />
déjà largement à améliorer la connaissance du<br />
comportement d’un nombre substantiel <strong>de</strong> paramètres. Il ne<br />
faut pas non plus perdre <strong>de</strong> vue que l’un <strong>de</strong>s buts poursuivis<br />
à travers ce proj<strong>et</strong>, c’est aussi d’alimenter le travail mené<br />
par les comités <strong>de</strong> normalisation. Enfin, dans les très basses<br />
fréquences, 20 Hz par exemple, les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> sol <strong>et</strong> autres<br />
PAGE 62<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
éléments susceptibles <strong>de</strong> perturber la propagation sont bien<br />
moins prégnants. Dès lors, une approche plus élémentaire<br />
autorisera sans doute une estimation correcte à 20 Hz <strong>et</strong>,<br />
par exemple, 2 km. Et puis, s’agissant ici <strong>de</strong> prévisions en<br />
dB(A), les très basses fréquences sont n<strong>et</strong>tement atténuées<br />
par le filtre.<br />
Dans ce débat, on s’est ensuite interrogés sur la crédibilité<br />
d’une précision au décibel près, concernant les mesures in<br />
situ. Premier élément <strong>de</strong> réponse, les sources stables<br />
disponibles aujourd’hui, telles que celle utilisée sur le site<br />
<strong>de</strong> Lannemezan (étu<strong>de</strong> présentée par F. Junker), même sur<br />
une durée <strong>de</strong> trois semaines, sont précises à 1 ou 2 dB près.<br />
Deuxième élément à prendre en compte : grâce à <strong>de</strong>s micros<br />
<strong>de</strong> référence placés en champ proche <strong>de</strong> la source,<br />
d’éventuelles variations <strong>de</strong> la source peuvent être<br />
i<strong>de</strong>ntifiées <strong>et</strong> répercutées sur les autres capteurs. À<br />
Lannemezan, seules les conditions météo sont susceptibles<br />
d’occasionner <strong>de</strong>s écarts <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 15 ou 20 dB(A).<br />
À quand la sonie <strong>de</strong> Zwicker dans les étu<strong>de</strong>s<br />
d’impact ?<br />
Prenant appui sur la présentation <strong>de</strong> Jérémy Marozeau sur<br />
les estimateurs <strong>de</strong> sonie appliqués aux bruits non<br />
stationnaires, la discussion s’est ensuite attachée à rem<strong>et</strong>tre<br />
en cause l’hégémonie <strong>de</strong>s indicateurs <strong>de</strong> niveau moyen <strong>et</strong> du<br />
dB(A). À c<strong>et</strong> égard, la sonie pourrait constituer une <strong>de</strong>s voies<br />
possibles <strong>de</strong> recherche <strong>de</strong> nouveaux indicateurs qualitatifs.<br />
Le problème avec les indicateurs tels que le L Aeq , c’est qu’ils<br />
ne perm<strong>et</strong>tent pas <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> différence entre <strong>de</strong>ux sons <strong>de</strong><br />
nature différente. Prenons pour exemple un son pur <strong>et</strong> un<br />
bruit blanc, <strong>de</strong> même L Aeq : certains suj<strong>et</strong>s pourraient<br />
percevoir l’un <strong>de</strong> ces sons comme étant <strong>de</strong>ux fois, voire<br />
quatre fois plus fort, que l’autre. Quant au dB(A), il<br />
correspond à une pondération pour les niveaux faibles, <strong>de</strong><br />
l’ordre <strong>de</strong> 40 dB, alors quid <strong>de</strong> son sens pour <strong>de</strong>s niveaux<br />
voisins <strong>de</strong> 110 ou 120 dB ?<br />
C<strong>et</strong>te mise au point a servi <strong>de</strong> point <strong>de</strong> départ à une idée qui<br />
a semblé faire l’unanimité parmi l’assemblée : l’avantage<br />
qu’il y aurait, en matière <strong>de</strong> recherche sur le bruit, à<br />
accor<strong>de</strong>r davantage <strong>de</strong> place aux sciences sociales <strong>et</strong> aux<br />
sciences humaines. En eff<strong>et</strong>, pour ses tenants, ce<br />
renversement <strong>de</strong> perspective perm<strong>et</strong>trait <strong>de</strong> mieux explorer<br />
les déterminants <strong>de</strong> la gêne <strong>et</strong> constituerait un terrain<br />
propice à l’émergence d’indicateurs qualitatifs<br />
complémentaires <strong>de</strong>s critères acoustiques.<br />
Oui à l’incertitu<strong>de</strong>, mais à qui doit-elle<br />
profiter ?<br />
Si l’on pourrait être tentés <strong>de</strong> généraliser les mesures par<br />
ban<strong>de</strong>s d’octave à l’ensemble <strong>de</strong> la réglementation, certains<br />
considèrent que l’incertitu<strong>de</strong> associée à ce type <strong>de</strong> mesures<br />
par découpage fréquentiel, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 3 dB, risque <strong>de</strong><br />
compliquer passablement le contrôle <strong>de</strong> conformité. Pour<br />
d’autres, il faudrait au contraire ancrer l’incertitu<strong>de</strong> au<br />
cœur <strong>de</strong> l’acoustique, <strong>de</strong>s mesures, étu<strong>de</strong>s d’impact<br />
comprises. Ce qui, soit dit en passant, perm<strong>et</strong>trait <strong>de</strong><br />
dépasser le cadre restrictif du dB(A). Qui plus est, certains<br />
spécialistes n’hésitent pas à voir dans l’usage du dB(A) une<br />
manifestation <strong>de</strong> la réticence <strong>de</strong>s pouvoirs publics à<br />
considérer l’incertitu<strong>de</strong> <strong>et</strong> la controverse, notamment<br />
scientifique, comme un élément productif, tant<br />
politiquement que socialement. Mais la critique s’adresse<br />
aussi aux scientifiques : à eux <strong>de</strong> faire en sorte <strong>de</strong> dépasser<br />
leurs clivages particularistes, afin <strong>de</strong> favoriser<br />
l’interdisciplinarité.<br />
Approfondissant le débat, certains ont rappelé que seul le<br />
cumul <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux types d’incertitu<strong>de</strong>, statistique <strong>et</strong><br />
systématique, donnera accès à l’incertitu<strong>de</strong> réelle, <strong>de</strong><br />
terrain. Autrement dit, se borner à la seule incertitu<strong>de</strong> liée<br />
à la métrologie, s’en tenir aux 3 dB stipulés dans le texte<br />
officiel, c’est avoir une vision tronquée <strong>de</strong> la réalité. Mais il<br />
faut gra<strong>de</strong>r à l’esprit que les lois <strong>de</strong> la propagation <strong>de</strong><br />
l’énergie acoustique dépen<strong>de</strong>nt tellement <strong>de</strong>s conditions<br />
météorologiques qu’il est très difficile <strong>de</strong> les traduire au<br />
plan réglementaire en un texte d’une loyauté irréprochable.<br />
Le débat <strong>de</strong> l’incertitu<strong>de</strong> soulève donc le besoin <strong>de</strong> fournir<br />
<strong>de</strong>s efforts sur le plan technique, afin d’améliorer notre<br />
capacité à évaluer l’incertitu<strong>de</strong>. Mais certains ont aussi<br />
voulu voir dans ce débat une question <strong>de</strong> société. Dans la<br />
législation, peu importe qu’une incertitu<strong>de</strong> soit associée aux<br />
mesures, dès l’instant que la règle soit définie clairement.<br />
Mais, dès lors, il reste à préciser à qui, au faible ou au fort,<br />
au citoyen ou à la puissante industrie, l’incertitu<strong>de</strong> doit<br />
profiter. Et c’est à la société, <strong>et</strong> non aux acousticiens, <strong>de</strong><br />
désigner le faible.<br />
Pour ne prendre que l’exemple <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s d’octave, il<br />
semble que <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s s’imposent pour déterminer <strong>de</strong>s<br />
seuils <strong>de</strong> gêne potentielle réalistes. Alors que sont<br />
aujourd’hui appliqués <strong>de</strong>s seuils qui n’ont pour seule<br />
justification <strong>de</strong>s considérations physiques du doublement <strong>de</strong><br />
l’énergie.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 63
Atelier<br />
<strong>Nuisances</strong> <strong>sonores</strong> aéroportuaires<br />
Atelier animé par Monique Vern<strong>et</strong> (Acnusa)<br />
Introduction<br />
Monique Vern<strong>et</strong> (membre <strong>de</strong> l’Acnusa)<br />
Nous tâcherons, dans c<strong>et</strong> atelier, d’allouer un maximum <strong>de</strong><br />
temps à la discussion, puisque la vocation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te table<br />
ron<strong>de</strong> est bien d’abor<strong>de</strong>r ces différents thèmes sous la forme<br />
d’un débat le plus ouvert possible. La première présentation<br />
est proposée par Janine Le Floch-Fournier concernant les<br />
plans <strong>de</strong> gêne sonore <strong>et</strong> l’utilisation <strong>de</strong>s nouveaux<br />
indicateurs.<br />
Les plans <strong>de</strong> gêne sonore <strong>et</strong> l’utilisation <strong>de</strong>s nouveaux indicateurs<br />
Janine Le Floch-Fournier (Acnusa)<br />
Quand l’autorité <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong><br />
aéroportuaires (Acnusa) a recommandé que l’indice servant<br />
à la cartographie soit le L <strong>de</strong>n , intuitivement, nous nous<br />
attendions à que cela élargisse les zones du plan<br />
d’exposition au bruit (PEB). Fin 2004, les plans <strong>de</strong> gêne<br />
sonore (PGS) étant, pour la plupart, terminés, nous<br />
disposions <strong>de</strong>s éléments nécessaires pour établir une<br />
comparaison, pour chaque aéroport, entre le tracé du PEB,<br />
l’ancien <strong>et</strong> le nouveau tracé du PGS. Une première <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
a consisté à vouloir recalculer un indice psophique a<br />
posteriori, à l’ai<strong>de</strong> du logiciel INM, sur la base <strong>de</strong>s données<br />
<strong>de</strong> 2002-2003. Personne ne pouvant plus faire cela, nous<br />
avons entamé un autre travail, la comparaison <strong>de</strong>s données,<br />
pour chacune <strong>de</strong>s plateformes, ayant servi à bâtir le PGS<br />
avec l’indice psophique. Quelles étaient les données<br />
relatives aux avions, aux mouvements, aux utilisations <strong>de</strong><br />
pistes, qui ont servi <strong>de</strong> base au calcul <strong>de</strong> l’indice psophique<br />
en 2000 <strong>et</strong> quelles étaient ces mêmes données en 2002-<br />
2003 ? Une telle comparaison perm<strong>et</strong>tait d’observer à la fois<br />
l’eff<strong>et</strong> du L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> celui du niveau recommandé par l’autorité.<br />
Il est bien entendu que ce niveau n’est pas optimal : en<br />
eff<strong>et</strong>, dans certains cas, la zone 2 du PGS se confond avec la<br />
zone B du PEB, qui pourrait être plus élargie. C<strong>et</strong>te<br />
observation laisse à penser que, lorsque tous les PEB auront<br />
été adoptés, <strong>de</strong>s possibilités d’élargissement se<br />
présenteront. Le document que nous avons réalisé, qui<br />
présente les PGS <strong>de</strong>s dix principaux aéroports (sauf celui <strong>de</strong><br />
Nantes, qui a directement adopté le L <strong>de</strong>n , la comparaison<br />
n’avait donc aucune utilité), a donc une vocation<br />
pédagogique, c’est pour cela qu’il se présente sous forme<br />
d’un présentoir portatif. Il sera adressé à tous les titulaires<br />
<strong>de</strong>s commissions consultatives <strong>de</strong> l’environnement (CCE).<br />
Hormis les cas où l’utilisation <strong>de</strong>s infrastructures a été<br />
modifiée, — je pense à Bor<strong>de</strong>aux <strong>et</strong> à Strasbourg, qui ont<br />
connu une baisse très importante du trafic —, le nouveau<br />
PGS se traduit par un n<strong>et</strong> élargissement <strong>de</strong> l’emprise<br />
territoriale <strong>de</strong>s zones. Dans la conclusion <strong>de</strong> ce document,<br />
l’Acnusa rappelle que, sur le plan objectif <strong>de</strong> la<br />
problématique — la cartographie —, l’élargissement <strong>de</strong>s<br />
zones, entre 2000 <strong>et</strong> 2004, constitue un progrès. Même s’il<br />
faut reconnaître que les PGS élargis ne résolvent pas tout,<br />
ils sont la reconnaissance d’une nuisance subie <strong>et</strong> il est<br />
important que davantage <strong>de</strong> populations bénéficient d’une<br />
ai<strong>de</strong>. Ce dispositif ne constitue pas la panacée, certaines<br />
populations situées hors PGS subissent <strong>de</strong>s nuisances,<br />
d’autres critères doivent donc émerger.<br />
L'avis du Conseil supérieur d'hygiène publique <strong>de</strong> France<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier (Direction générale <strong>de</strong> la<br />
santé, ministère <strong>de</strong> la Santé <strong>et</strong> <strong>de</strong>s Solidarités)<br />
Nous assistons simultanément à une hausse du trafic aérien,<br />
à un accroissement <strong>de</strong> la population survolée <strong>et</strong> à une<br />
augmentation <strong>de</strong> la sensibilité du public aux nuisances<br />
<strong>sonores</strong>. Finalement, le bruit provenant <strong>de</strong>s aéronefs, le<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
uit subi <strong>de</strong> nuit surtout, pose <strong>de</strong>s questions en termes<br />
d’acceptation par les populations mais également en termes<br />
<strong>de</strong> santé publique. Le Conseil supérieur d'hygiène publique<br />
<strong>de</strong> France (CSHPF), instance consultative à caractère<br />
scientifique <strong>et</strong> technique placée auprès du ministre chargé<br />
<strong>de</strong> la santé, a donc souhaité ém<strong>et</strong>tre un avis relatif à la<br />
protection <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong>s personnes exposées au bruit <strong>de</strong>s<br />
avions.<br />
Quels sont les dangers du bruit <strong>de</strong>s avions pour les<br />
populations exposées ? En premier lieu, il faut s’intéresser à<br />
la gêne. Le graphique comparant la gêne occasionnée par la<br />
route, le train <strong>et</strong> les avions, graphique présenté ce matin<br />
par Jacques Lambert <strong>de</strong> l’Inr<strong>et</strong>s, montre qu’à niveau sonore<br />
égal, le trafic aérien est plus gênant que le trafic routier,<br />
qui est lui-même plus gênant que le trafic ferroviaire.<br />
Eff<strong>et</strong>s du bruit sur la santé : les pistes<br />
En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la gêne, on peut citer trois dangers, même s’il<br />
faut reconnaître que les étu<strong>de</strong>s ne vont pas toutes dans le<br />
même sens. Concernant les eff<strong>et</strong>s sur les performances<br />
scolaires, les résultats <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s ten<strong>de</strong>nt, en général, à<br />
montrer une diminution <strong>de</strong>s performances scolaires dans les<br />
écoles exposées au bruit. Par exemple, le Suédois Hygge<br />
montre que l’exposition au bruit <strong>de</strong>s avions est associée à <strong>de</strong><br />
plus faibles performances cognitives <strong>et</strong> que ces<br />
performances augmentent lorsque l’exposition au bruit<br />
disparaît. Les eff<strong>et</strong>s sur la santé mentale sont notamment<br />
établis sur la base <strong>de</strong>s statistiques <strong>de</strong> prescriptions <strong>de</strong><br />
médicaments à visée neuropsychiatrique. Mais toutes les<br />
étu<strong>de</strong>s ne sont pas statistiquement significatives. Quant aux<br />
eff<strong>et</strong>s sur le système cardio-vasculaire, <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, une<br />
étu<strong>de</strong> hollandaise notamment, ont montré un risque<br />
statistiquement significatif d’hypertension ; également, une<br />
étu<strong>de</strong> réalisée au moment du déménagement <strong>de</strong> l’aéroport<br />
<strong>de</strong> Munich, a montré <strong>de</strong>s variations significatives <strong>de</strong>s taux<br />
d’hormones chez les enfants.<br />
Les eff<strong>et</strong>s du bruit sur le sommeil<br />
J’en viens maintenant aux eff<strong>et</strong>s sur le sommeil, moment<br />
important qui nous est nécessaire pour récupérer <strong>de</strong><br />
l’épuisement momentané <strong>de</strong> nos capacités physiques <strong>et</strong><br />
mentales. Le bruit peut perturber le sommeil <strong>de</strong> plusieurs<br />
façons : en réduisant la durée totale du temps <strong>de</strong> sommeil,<br />
en jouant sur la latence d’endormissement, en provoquant<br />
<strong>de</strong>s réveils nocturnes prolongés ou bien en provoquant aux<br />
heures matinales un éveil prématuré non suivi<br />
d’endormissement. Les pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> début <strong>et</strong> <strong>de</strong> fin <strong>de</strong> nuit<br />
sont donc les plus fragiles. Si le temps <strong>de</strong> sommeil peut être<br />
perturbé dans certaines limites sans modification importante<br />
<strong>de</strong>s capacités individuelles, à plus long terme, lorsque les<br />
perturbations se répètent <strong>de</strong> manière chronique, les eff<strong>et</strong>s<br />
sont beaucoup plus critiques : fatigue chronique,<br />
somnolence, réduction <strong>de</strong> la motivation au travail, baisse<br />
<strong>de</strong>s performances, anxiété chronique, pertes <strong>de</strong> vigilance <strong>et</strong>,<br />
par conséquent, augmentation du risque d’acci<strong>de</strong>nts. Le<br />
bruit n’influe pas seulement sur la durée totale du sommeil,<br />
il a aussi <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur l’architecture du sommeil. Le<br />
sommeil est une succession <strong>de</strong> sta<strong>de</strong>s plus ou moins<br />
profonds, associés ou non au rêve. Si l’on considère<br />
l’hypnogramme d’une personne jeune qui bénéficie d’un bon<br />
sommeil, on distingue le “sommeil lent 1”, qui constitue une<br />
étape intermédiaire entre l’éveil <strong>et</strong> le vrai sommeil, les<br />
sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sommeil lent profond correspondant, eux, sur c<strong>et</strong><br />
hypnogramme, aux sta<strong>de</strong>s 3 <strong>et</strong> 4. Ces sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sommeil lent<br />
profonds interviennent notamment en début <strong>de</strong> nuit. Le<br />
sta<strong>de</strong> du sommeil paradoxal est un sta<strong>de</strong> important pour la<br />
récupération psychique du dormeur. Le bruit est donc<br />
susceptible d’entraîner une modification <strong>de</strong> l’architecture<br />
du sommeil, sans qu’il y ait forcément réveil <strong>et</strong> sans que le<br />
dormeur n’en ait conscience. L’examen <strong>de</strong> l’hypnogramme<br />
d’une personne en bonne santé soumise à un bruit d’alerte<br />
montre <strong>de</strong>s modifications <strong>de</strong> sta<strong>de</strong>s, souvent accompagnés<br />
<strong>de</strong> mouvements corporels, changements qui se produisent au<br />
détriment <strong>de</strong>s sta<strong>de</strong>s <strong>de</strong> sommeil les plus profonds <strong>et</strong> au<br />
bénéfice <strong>de</strong>s sta<strong>de</strong>s les plus légers, avec <strong>de</strong>s réveils. Fait<br />
important, l’habituation au bruit en pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> sommeil est<br />
réelle en termes <strong>de</strong> ressenti mais, en revanche, les fonctions<br />
physiologiques restent affectées par la répétition <strong>de</strong>s<br />
perturbations <strong>sonores</strong>.<br />
Démographie <strong>de</strong> la population exposée<br />
L’Acnusa a recensé 2 millions <strong>de</strong> personnes survolées à moins<br />
<strong>de</strong> 3000 mètres du fait <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux aéroports parisiens.<br />
Également, une étu<strong>de</strong> réalisée à proximité <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong><br />
Schiphol (Amsterdam) indique un impact sanitaire plus<br />
marqué dans la zone non réglementée, dû au fait que la<br />
population exposée y est plus importante. Ces informations<br />
incitent à s’intéresser à <strong>de</strong>s territoires dépassant le seul<br />
cadre <strong>de</strong>s zones <strong>de</strong>s PEB <strong>et</strong> <strong>de</strong>s PGS.<br />
L’avis du Conseil supérieur d'hygiène publique <strong>de</strong> France<br />
D’une part, le CSHPF préconise d’évaluer <strong>et</strong> <strong>de</strong> gérer la gêne<br />
au moyen <strong>de</strong> l’indice L <strong>de</strong>n , avec pour limite L <strong>de</strong>n < 60 dB(A).<br />
D’autre part, le conseil propose d’évaluer <strong>et</strong> <strong>de</strong> gérer la<br />
perturbation du sommeil au moyen <strong>de</strong> l’indice intégré<br />
L Aeq (22h-6h) — critère : L Aeq (22h-6h) < 55 dB(A) — associé à un<br />
indicateur évènementiel basé sur le niveau maximum L Amax, 1s<br />
— critère : moins <strong>de</strong> 10 évènements <strong>sonores</strong> par nuit <strong>de</strong><br />
L Amax,1s > 70 dB(A). Bien que c<strong>et</strong> indice évènementiel ne<br />
fasse pas l’unanimité, en préconisant son utilisation, le<br />
CSHPF rejoint la position défendue <strong>et</strong> par l’Acnusa <strong>et</strong> par<br />
l’OMS, à savoir l’utilisation du L Amax pour protéger le<br />
sommeil. Rappelons tout <strong>de</strong> même, comme cela a été dit<br />
précé<strong>de</strong>mment, que chaque État membre est libre <strong>de</strong> faire<br />
appel à un, ou plusieurs, indicateurs événementiels pour<br />
transposer la directive 2002/49/CE. Enfin, l’utilisation <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong> indicateur évènementiel est également justifiée par une<br />
étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> 2001 qui montre que les liens entre l’exposition au<br />
bruit <strong>de</strong>s avions <strong>et</strong> l’hypertension artérielle est mieux<br />
établie lorsque l’indicateur <strong>de</strong> bruit r<strong>et</strong>enu est le niveau<br />
sonore maximum au passage <strong>de</strong>s avions. Il convient aussi <strong>de</strong><br />
rappeler les autres recommandations émises par le CSHPF :<br />
la nécessité d’optimiser l’utilisation du ciel ; le besoin <strong>de</strong><br />
renforcer la protection au sol comme, par exemple,<br />
l’insonorisation <strong>de</strong>s bâtiments ; la nécessité d’affiner la<br />
connaissance <strong>de</strong> la situation sanitaire française résultant <strong>de</strong><br />
l’exposition au bruit <strong>de</strong>s avions. Pour m<strong>et</strong>tre en œuvre c<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>rnière recommandation, le ministère <strong>de</strong> la santé va<br />
élaborer un protocole afin <strong>de</strong> lancer, dès 2006, une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
cohorte.<br />
Débat<br />
L’Acnusa prône l’égalité entre PEB <strong>et</strong> PGS.<br />
Pourquoi ?<br />
Pour l’Acnusa, la vocation du PEB est d’indiquer les zones où<br />
l’on sait qu’il va y avoir du bruit, à l’avenir. Dans ces zones,<br />
mieux vaut, dès maintenant, avoir une démarche <strong>de</strong><br />
prévention, plutôt que d’attendre cinq, dix ou quinze ans<br />
que le bruit y ait atteint <strong>de</strong>s niveaux tels qu’il faille y<br />
insonoriser les logements. Mais cela <strong>de</strong>man<strong>de</strong> plus <strong>de</strong><br />
moyens. Toutefois, la zone D du PEB, elle, soulève un<br />
certain nombre d’interrogations. Dans c<strong>et</strong>te zone, qui est<br />
assez étendue, toute construction nouvelle répond, en<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 65
principe, à <strong>de</strong>s exigences d’isolation appropriées. Peut-être<br />
faudrait-il imaginer une quatrième zone du PGS dont les<br />
contours correspondraient à la zone D du PEB. Le problème,<br />
c’<strong>et</strong> que le PEB est établi sur la base d’un horizon lointain <strong>et</strong><br />
que le PGS, lui, traduit la situation sonore actuelle : à trop<br />
vouloir élargir le PGS, on risque d’avoir <strong>de</strong>s PGS plus étendus<br />
que les PEB, car ceux-ci tiennent compte du r<strong>et</strong>rait futur <strong>de</strong>s<br />
avions les plus bruyants. C’est la raison pour laquelle les<br />
Américains ne touchent plus aux contours <strong>de</strong> bruit ; cela fait<br />
dix ou quinze ans qu’ils travaillent avec la même<br />
cartographie L dn 55, qui tient compte <strong>de</strong> l’empreinte sonore<br />
<strong>de</strong>s avions du chapitre 2. Ils savent qu’une nouvelle<br />
cartographie ne pourrait que rétrécir les contours.<br />
Les vertus d’une étu<strong>de</strong> épidémiologique<br />
Monique Vern<strong>et</strong> : J’approuve votre différenciation entre<br />
pathologies induites, eff<strong>et</strong>s cardio-vasculaires en particulier,<br />
<strong>et</strong> les eff<strong>et</strong>s sur le sommeil, qui sont beaucoup mieux<br />
connus, quoique <strong>de</strong> façon très factuelle. On sait les<br />
répercussions du bruit sur le sommeil, mais on a moins <strong>de</strong><br />
certitu<strong>de</strong>s sur les conséquences sur la santé, à moyen <strong>et</strong><br />
long terme, <strong>de</strong>s perturbations du sommeil. Il est vrai qu’en<br />
matière <strong>de</strong> risques <strong>de</strong> pathologies cardio-vasculaires, on est<br />
moins avancés. Je me réjouis donc <strong>de</strong> votre proposition <strong>de</strong><br />
lancer une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> type épidémiologique par cohorte. Il se<br />
trouve que c’est également là un <strong>de</strong>s soucis <strong>de</strong> l’Acnusa :<br />
mener une étu<strong>de</strong> épidémiologique qui apporterait <strong>de</strong>s<br />
connaissances plus affirmées concernant les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong>s bruits<br />
<strong>de</strong>s avions sur la santé <strong>de</strong>s populations riveraines. Vous avez<br />
parlé aussi du partage <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> l’espace aérien,<br />
ce dont nous <strong>de</strong>vrions beaucoup parler tout au long <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
réunion.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Par optimisation <strong>de</strong> l’utilisation du ciel,<br />
le CHSPF comprend le contrôle du respect <strong>de</strong>s altitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
vols, <strong>de</strong>s manœuvres <strong>de</strong> décollage <strong>et</strong> d’atterrissage, le<br />
développement <strong>de</strong> l’intermodalité avec le réseau ferré, le<br />
renforcement <strong>de</strong>s conditions d’exploitation la nuit… ces<br />
recommandations restent très générales.<br />
Eff<strong>et</strong>s biologiques certains, eff<strong>et</strong>s sanitaires<br />
pas prouvés<br />
Guillaume Faburel : Juste une remarque. M. Grén<strong>et</strong>ier,<br />
dans son exposé, a parlé d’eff<strong>et</strong>s biologiques. Un eff<strong>et</strong><br />
biologique n’est pas forcément un eff<strong>et</strong> sanitaire <strong>et</strong> c’est là<br />
toute la difficulté que posent les eff<strong>et</strong>s du bruit sur la santé.<br />
L’on dispose <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>s sur le lien entre exposition au<br />
bruit — notamment aux bruits impulsionnels ou aux bruits<br />
émis <strong>de</strong> manière irrégulière — <strong>et</strong> un certain nombre d’eff<strong>et</strong>s<br />
biologiques tels que les phases du sommeil, la tension<br />
artérielle, le rythme cardiaque, les sécrétions hormonales. Il<br />
y a tout lieu <strong>de</strong> penser — mais on manque <strong>de</strong> preuves — que<br />
ces eff<strong>et</strong>s biologiques ont <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sanitaires en terme <strong>de</strong><br />
maladies chroniques ou aiguës. Depuis la plénière <strong>de</strong> ce<br />
matin <strong>et</strong> c<strong>et</strong> atelier maintenant, il est étonnant <strong>de</strong> constater<br />
que la notion <strong>de</strong> stress est absente du débat. Or, c’est pour<br />
moi un point absolument fondamental. Si le stress est une<br />
réaction physiologique normale, l’excès <strong>de</strong> stress, en<br />
revanche, a d’importants eff<strong>et</strong>s potentiels sur la santé.<br />
Enfin, selon le ressenti qu’un individu a <strong>de</strong>s décibels qu’il<br />
reçoit, les eff<strong>et</strong>s potentiels sur la santé peuvent être très<br />
différents. Le bruit doit donc être abordé <strong>de</strong> manière<br />
quantitative mais également avec une approche qualitative.<br />
Le bruit du bourdon d’une cathédrale située à 30 mètres<br />
faisant irruption dans l’espace sonore d’une chambre à<br />
coucher n’est pas forcément mal ressenti, mais quand la<br />
même irruption provient d’un avion, les eff<strong>et</strong>s sur la santé<br />
peuvent être très différents.<br />
Monique Vern<strong>et</strong> : Effectivement, la signification, les aspects<br />
qualitatifs <strong>et</strong> subjectifs, sont très importants à prendre en<br />
considération. Concernant les eff<strong>et</strong>s sur la santé, <strong>et</strong> non pas<br />
seulement les eff<strong>et</strong>s biologiques, le mystère reste encore<br />
bien gardé <strong>et</strong> c’est sûrement la question centrale <strong>de</strong>s cinq<br />
ou dix prochaines années : pouvoir apporter <strong>de</strong>s preuves<br />
tangibles <strong>de</strong> l’existence ou non d’eff<strong>et</strong>s sanitaires du bruit.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Comme l’a souligné le Dr Ritter, une<br />
modification <strong>de</strong> l’architecture du sommeil n’a pas <strong>de</strong><br />
conséquences immédiates. Cela dit, après plusieurs années<br />
<strong>de</strong> sommeil perturbé, on peut imaginer en revanche qu’il y<br />
ait <strong>de</strong>s conséquences, d’où l’idée d’une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> cohorte,<br />
d’un suivi sur plusieurs années.<br />
De la salle : Une expérience a été menée sur <strong>de</strong>s chats :<br />
placés au milieu d’une piscine, sur un bloc <strong>de</strong> polystyrène,<br />
ils ne pouvaient pas s’allonger, mais simplement rester<br />
assis ; ainsi totalement privés <strong>de</strong> sommeil paradoxal, ces<br />
chats sont morts dans un délai d’environ <strong>de</strong>ux semaines.<br />
On ne <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pas assez aux riverains ce<br />
qu’ils ressentent réellement<br />
Odile Salomé (Collectif contre les nuisances aériennes <strong>de</strong><br />
l’agglomération toulousaine) : Posez la question aux<br />
riverains. Eux savent ce qu’ils subissent. La perturbation du<br />
sommeil engendre un état <strong>de</strong> fatigue, <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong><br />
concentration, <strong>de</strong>s pathologies <strong>de</strong> type hypertension, <strong>de</strong>s<br />
troubles cardiaques. Cela aggrave toutes les pathologies<br />
existantes. Si quelqu’un est mala<strong>de</strong> <strong>et</strong> qu’il est renvoyé chez<br />
lui pour se reposer, il n’y a pas <strong>de</strong> repos possible sous les<br />
avions quand on vit à 6 km du point <strong>de</strong> décollage. Peut-être<br />
faut-il commencer par s’intéresser à ce que ressentent les<br />
riverains. Nous apprécions l’accueil qui nous est fait<br />
aujourd’hui mais cela reste rare. La réalité, c’est que nous<br />
sommes tous acteurs <strong>de</strong> la société <strong>et</strong> qu’il conviendrait que<br />
l’industrie du transport aérien se préoccupe davantage <strong>de</strong> ce<br />
qui se passe sous les avions. Il faudrait créer <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong><br />
riverains, à l’instar <strong>de</strong>s comités d’usagers. Et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r aux<br />
personnes qui vivent sous les avions ce qui les gêne le plus.<br />
Ce serait un moyen d’avancer mais cela ne semble pas dans<br />
l’air du temps.<br />
Monique Vern<strong>et</strong> : Il serait bon en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> prévoir un espace<br />
pour que les riverains <strong>de</strong>s aéroports donnent leur point <strong>de</strong><br />
vue, leur ressenti. Il en existe tout <strong>de</strong> même, mais peut-être<br />
sont-ils insuffisants, ou bien les structures existantes ne<br />
sont-elles pas bien utilisées suivant les endroits. La<br />
concertation constituera le thème central d’un certain<br />
nombre <strong>de</strong>s présentations qui vont suivre. On reparlera donc<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te question, mais c’est un point important.<br />
Janine Le Floch-Fournier : Une certaine forme <strong>de</strong> comités<br />
<strong>de</strong> riverains existe avec les commissions consultatives <strong>de</strong><br />
l’environnement (CCE). Par ailleurs, un certain nombre<br />
d’étu<strong>de</strong>s ont étudié la gêne ressentie. Je pense notamment<br />
à la gran<strong>de</strong> enquête <strong>de</strong> gêne lancée à l’initiative du<br />
ministère <strong>de</strong> l’environnement <strong>et</strong> du ministère <strong>de</strong>s transports,<br />
à travers laquelle le vécu <strong>de</strong>s populations riveraines d’Orly<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> Roissy a été sérieusement exploré.<br />
Monique Vern<strong>et</strong> : Certes, on a interrogé <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong><br />
milliers <strong>de</strong> personnes habitant près <strong>de</strong>s aéroports dans le<br />
mon<strong>de</strong> entier, mais cela ne signifie pas qu’il faille s’en<br />
arrêter là. Il reste encore bien <strong>de</strong>s points à éclaircir. Il<br />
semble évi<strong>de</strong>nt qu’une personne vivant autour d’un aéroport<br />
a un ressenti concernant la qualité <strong>de</strong> son sommeil, mais,<br />
pour le mé<strong>de</strong>cin, le lien avec <strong>de</strong>s pathologies connues n’est<br />
pas forcément évi<strong>de</strong>nt. Nous pressentons tous que <strong>de</strong>s liens<br />
doivent exister <strong>et</strong> ce sont ces liens qu’il faudrait établir <strong>de</strong><br />
façon formelle.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Ces maladies n’étant pas spécifiques <strong>de</strong><br />
l’exposition au bruit, le mé<strong>de</strong>cin n’a pas forcément le<br />
réflexe <strong>de</strong> poser la question à ses patients s’ils sont soumis à<br />
un environnement sonore bruyant.<br />
Guillaume Faburel : La remarque <strong>de</strong> Mme Salomé renvoie à<br />
<strong>de</strong>ux choses : c’est une chose que d’enquêter, au sens<br />
scientifique du terme, sur la gêne ressentie, c’en est une<br />
autre que d’intégrer le ressenti dans l’élaboration <strong>de</strong>s<br />
décisions. Les commissions consultatives <strong>de</strong> l’environnement<br />
sont <strong>de</strong>s dispositifs institutionnels nécessaires, qui visent, en<br />
théorie, à prendre en compte l’avis <strong>de</strong>s populations, mais ils<br />
ne me paraissent pas, en l’état, aptes à faire figurer la<br />
question du ressenti <strong>de</strong> la gêne au premier plan <strong>de</strong>s débats.<br />
Deuxième remarque : s’agissant <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong><br />
personnes enquêtées, évoquées par Mme Vern<strong>et</strong>, force est<br />
d’adm<strong>et</strong>tre, que la France est en r<strong>et</strong>ard sur la question.<br />
Contrairement à d’autres pays, tous les aéroports français<br />
n’ont pas fait l’obj<strong>et</strong> d’enquêtes <strong>de</strong> gêne. J’irai même plus<br />
loin : Orly <strong>et</strong> Roissy représentent 70% <strong>de</strong>s enquêtes <strong>de</strong> gêne<br />
qui ont été menées. Ce constat effectué, il serait erroné <strong>de</strong><br />
conclure que, dans le concert <strong>de</strong>s nations sur ce suj<strong>et</strong>, la<br />
France fait figure <strong>de</strong> bon élève. En France, les enquêtes ne<br />
constituent pas un moyen <strong>de</strong> portage institutionnel qui ai<strong>de</strong><br />
les pouvoirs publics à prendre <strong>de</strong>s décisions.<br />
Aéroport <strong>de</strong> Liège, aéroport <strong>de</strong> Charleroi : une approche globale garante<br />
d'une intégration harmonieuse <strong>de</strong>s aéroports<br />
Jean-Pierre Clairbois (A-Tech SA)<br />
Lorsque le CIDB m’a <strong>de</strong>mandé <strong>de</strong> présenter un article sur le<br />
vécu <strong>de</strong>s aéroports en Belgique, il était question <strong>de</strong><br />
présenter l’aéroport <strong>de</strong> Bruxelles. Il existe en Belgique <strong>de</strong>s<br />
aéroports pour lesquels la prise en compte <strong>de</strong><br />
l’environnement a été plutôt une réussite, pour lesquels il a<br />
été possible d’atteindre une situation compatible avec la<br />
gestion <strong>de</strong> l’aéroport <strong>et</strong> <strong>de</strong> son avenir. Je préfère donc<br />
parler <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux exemples positifs, à savoir les aéroports <strong>de</strong><br />
Liège <strong>et</strong> <strong>de</strong> Charleroi (Bruxelles sud).<br />
En Belgique, suivant les aéroports, les stratégies adoptées<br />
diffèrent. L’aéroport <strong>de</strong> Liège, situé à Biers<strong>et</strong>, se trouve en<br />
à 90 km <strong>de</strong> Bruxelles. Pour la protection <strong>de</strong><br />
l’environnement, on y a choisi <strong>de</strong> concentrer les trajectoires<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> compléter cela par <strong>de</strong>s actions au sol. À Bruxelles-Sud-<br />
Charleroi, aéroport situé à 40 km au sud <strong>de</strong> Bruxelles, on a<br />
également opté pour une concentration <strong>de</strong>s trajectoires <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s actions au sol. À l’aéroport <strong>de</strong> Bruxelles national, qui est<br />
situé à Zaventem, à 14 km <strong>de</strong> Bruxelles, on a, en revanche,<br />
choisi la dispersion <strong>de</strong>s trajectoires <strong>et</strong> fait actuellement<br />
l’impasse sur les actions au sol.<br />
Le cas <strong>de</strong> Liège-Biers<strong>et</strong><br />
L’aéroport <strong>de</strong> Liège est à l’origine un aéroport militaire, qui<br />
n’est ouvert au trafic civil que <strong>de</strong>puis 1976. En 1997, avec le<br />
développement du fr<strong>et</strong> nocturne, un nouveau type <strong>de</strong><br />
nuisance sonore a fait son apparition : une dizaine <strong>de</strong><br />
mouvements nocturnes tout d’abord, une quarantaine<br />
aujourd’hui. Il s’agit du hub <strong>de</strong> la société <strong>de</strong> fr<strong>et</strong> TNT, un<br />
très gros hub au niveau international.<br />
Quelle stratégie environnementale a été mise en place ?<br />
Tout d’abord, un état <strong>de</strong>s lieux a été réalisé. Ensuite, un<br />
choix stratégique très important a été arrêté : concentrer<br />
les routes, les optimiser, <strong>et</strong> agir au sol. L’optimisation <strong>de</strong>s<br />
routes, s’appuyant sur <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong>s habitations <strong>et</strong> sur le<br />
recensement <strong>de</strong>s populations, avait pour objectif <strong>de</strong> réduire<br />
le nombre d’habitations gênées. Différents scénarios <strong>de</strong><br />
survol ont été établis en tenant compte, bien sûr, <strong>de</strong>s<br />
contraintes <strong>de</strong> sécurité, <strong>de</strong> certains aspects pratiques <strong>et</strong><br />
économiques. Ont également été comparées différentes<br />
procédures à moindre bruit, toujours sous l’angle du nombre<br />
d’habitations gênées. Ce processus a <strong>de</strong>mandé une<br />
collaboration étroite <strong>de</strong> toutes les administrations, <strong>de</strong>s<br />
pilotes <strong>et</strong> <strong>de</strong>s acousticiens. Pour réaliser ces plans, en 1997,<br />
l’indice L dn a été choisi, pour adopter ensuite le L <strong>de</strong>n , en<br />
2004, afin <strong>de</strong> se conformer à la directive européenne.<br />
L’optimisation concertée <strong>de</strong>s routes a abouti à une décision<br />
politique. Qui plus est, le PEB (plan d’exposition au bruit à<br />
l’horizon 2013), <strong>et</strong> le plan <strong>de</strong> développement à long terme<br />
(PDLT, à l’horizon 2020), ont été arrêtés. Le PEB, qui est<br />
inclus dans le PDLT, est réévalué tous les 3 ans, jusqu’à ce<br />
qu’on atteigne les conditions <strong>de</strong> développement à long<br />
terme, si toutefois ces conditions sont atteintes un jour. Ces<br />
plans ont servi <strong>de</strong> support à une série d’actions au sol. Des<br />
règles d’urbanisme, bien entendu, <strong>et</strong> un plan <strong>de</strong> travaux<br />
d’insonorisation. Ce <strong>de</strong>rnier dispositif est assez complexe.<br />
Dans le principe, il s’agit <strong>de</strong> limiter le niveau <strong>de</strong> bruit<br />
maximum L Amax dans les pièces <strong>de</strong> nuit à 45 dB(A) <strong>et</strong> le L Amax<br />
à l’intérieur <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> jour à 55 dB(A). Les isolements<br />
nécessaires pour améliorer l’insonorisation sont définis.<br />
L’administration, à travers la cellule EDSI, m<strong>et</strong> en place le<br />
processus : elle confie à un couple formé d’un acousticien <strong>et</strong><br />
d’un architecte l’élaboration d’un plan d’insonorisation <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s entreprises agréées Qualisound 1 sont chargées <strong>de</strong> la<br />
réalisation. Mais ce n’est pas tout : si l’on définit un<br />
isolement, il faut aussi maîtriser les niveaux maximum <strong>et</strong>,<br />
pour cela, sont établies <strong>de</strong>s limites <strong>de</strong> bruit autorisé au sol.<br />
Les limites sont, <strong>de</strong> jour, <strong>de</strong> L Amax 93, 88 <strong>et</strong> 83 (zones B, C <strong>et</strong><br />
D respectivement) <strong>et</strong>, <strong>de</strong> nuit, <strong>de</strong> L Amax 87, 82 <strong>et</strong> 77 (zones<br />
B, C <strong>et</strong> D respectivement). C’est, selon moi, le point le plus<br />
contraignant du dispositif, mais il a son importance : seul le<br />
respect <strong>de</strong>s L Amax à l’extérieur <strong>de</strong>s habitations peut garantir<br />
le respect <strong>de</strong>s L Amax à l’intérieur. Pour cela, le réseau<br />
Diapason, doté <strong>de</strong> 16 stations permanentes <strong>de</strong> mesure,<br />
assure le contrôle permanent <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit au sol.<br />
Mais Diapason est plus qu’un simple réseau <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>de</strong> bruit. Il contrôle aussi les trajectoires, autorisant<br />
ainsi le contrôle <strong>et</strong> la gestion <strong>de</strong>s trafics ; il établit <strong>de</strong>s<br />
statistiques, ce qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> vérifier <strong>de</strong> manière<br />
interactive la véracité <strong>et</strong> la validité du PEB ; enfin, il perm<strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> mener <strong>de</strong>s opérations <strong>de</strong> communication telles que la<br />
gestion <strong>de</strong>s infractions <strong>et</strong> la gestion <strong>de</strong>s plaintes. De<br />
surcroît, <strong>de</strong>s filtres spécialement établis <strong>et</strong> validés<br />
perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> statuer, objectivement <strong>et</strong> avec tout le poids<br />
légal requis, sur la nature d’un événement sonore <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
dire : « ceci est un avion, ceci ne l’est pas ». En<br />
complément, <strong>de</strong>s mesures mobiles portant sur une durée <strong>de</strong><br />
quatorze jours sont réalisées afin <strong>de</strong> vérifier en différents<br />
quartiers la validité statistique du PEB. Tout ceci se fait<br />
dans le respect d’un principe d’égalité : si, d’aventure, les<br />
mesures au sol sont différentes <strong>de</strong>s valeurs calculées, ce<br />
sont les valeurs mesurées qui servent <strong>de</strong> référence.<br />
Toutes ces mesures démontrent le réel souci <strong>de</strong> bien<br />
protéger les riverains. Au cœur du réseau Diapason, le<br />
logiciel MAP-Aéro perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> centraliser les données issues<br />
<strong>de</strong>s stations <strong>de</strong> bruit, les données radar, les données météo,<br />
sous forme d’une base <strong>de</strong> données Oracle. C<strong>et</strong>te structure<br />
autorise différentes variantes <strong>de</strong> consultation <strong>de</strong>s données, y<br />
compris le web, moyennant <strong>de</strong>s droits spécifiques.<br />
1 Qualisound : formation à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s entrepreneurs leur perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> se<br />
familiariser avec les notions acoustiques <strong>et</strong> les travaux d'insonorisation<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 67
La stratégie globale mise en place pour l’aéroport <strong>de</strong> Liège a<br />
permis, dès le départ, <strong>de</strong> prendre en compte les inci<strong>de</strong>nces<br />
environnementales. Pour l’heure, force est <strong>de</strong> constater que<br />
c<strong>et</strong>te approche perm<strong>et</strong> un développement intégré <strong>de</strong><br />
l’aéroport, dont le trafic est en constant développement.<br />
Bien sûr, il y aura toujours <strong>de</strong>s plaintes, mais, c’est<br />
inévitable.<br />
Le cas <strong>de</strong> Bruxelles-Sud-Charleroi<br />
À Bruxelles-Sud-Charleroi, aéroport d’un autre type, puisque<br />
centré sur l’ouverture aux vols low cost (Ryanair<br />
essentiellement), la stratégie — concentration <strong>et</strong> actions au<br />
sol — est i<strong>de</strong>ntique à celle <strong>de</strong> Liège-Biers<strong>et</strong>. À c<strong>et</strong>te<br />
différence près du choix stratégique d’une utilisation <strong>de</strong> jour<br />
seulement. Sur la base <strong>de</strong> différents scénarios élaborés en<br />
collaboration avec l’aéroport, l’Administration, les pilotes <strong>et</strong><br />
les acousticiens, PEB, PDLT <strong>et</strong> actions ont été définis. Les<br />
actions au sol sont très similaires à celles <strong>de</strong> Liège-Biers<strong>et</strong>,<br />
sauf pour les contraintes d’insonorisation, qui se réfèrent à<br />
<strong>de</strong>s limites diurnes uniquement. Les principes sont les<br />
mêmes : contrôle du bruit autorisé au sol ; 16 sonomètres<br />
permanents dotés <strong>de</strong> filtres ; principe d’égalité appliqué,<br />
grâce à 250 mesures mobiles <strong>de</strong> quatorze jours.<br />
Tant pour les low cost à Charleroi, que pour le fr<strong>et</strong> nocturne<br />
à Liège, une véritable politique <strong>de</strong> gestion coordonnée<br />
perm<strong>et</strong> la continuité <strong>de</strong>s développements.<br />
Différentes implémentations <strong>de</strong> ce système sont en vigueur<br />
en France : à Toulouse-Blagnac (Sentinelle), Lyon (Constas),<br />
Bor<strong>de</strong>aux, Montpellier, ADP…<br />
Le cas <strong>de</strong> Bruxelles-National<br />
Le problème <strong>de</strong> Bruxelles-National, c’est que c’est un<br />
aéroport national mais que la Belgique est une entité<br />
fédérale, dont <strong>de</strong>ux régions importantes, la région flaman<strong>de</strong><br />
<strong>et</strong> la région Bruxelles-Capitale, sont concernées par les<br />
nuisances. Les décisions politiques dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> trois<br />
niveaux administratifs différents : le fédéral, la région<br />
flaman<strong>de</strong> <strong>et</strong> la région Bruxelles-Capitale. La croissance du<br />
trafic <strong>et</strong> l’extension souhaitée par DHL pour son hub <strong>de</strong> fr<strong>et</strong><br />
ont conduit à différentes analyses. La décision politique a<br />
été <strong>de</strong> disperser les trajectoires, sans actions au sol sur<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s zones survolées. L’évaluation est en cours,<br />
mais cela complique considérablement le contrôle aérien,<br />
beaucoup <strong>de</strong> nouvelles zones sont survolées, la polémique<br />
est virulente. Malheureusement, cela entraîne aussi <strong>de</strong>s<br />
problèmes <strong>de</strong> sécurité puisque la répartition homogène sur<br />
toutes les pistes <strong>et</strong> sur toutes les directions <strong>de</strong>s vols sont<br />
parfois contradictoires avec les conditions <strong>de</strong> sécurité <strong>de</strong><br />
vol. Toujours est-il que DHL a renoncé à son proj<strong>et</strong><br />
d’extension <strong>et</strong> va quitter Zaventem. D’un point <strong>de</strong> vue<br />
économique, c’est très grave.<br />
Conclusions<br />
Seule une approche globale perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> contrôler <strong>et</strong> <strong>de</strong> gérer<br />
les nuisances <strong>sonores</strong> autour d’un aéroport. Cela passe par<br />
une concentration <strong>de</strong>s trajectoires optimisée,<br />
l’établissement <strong>de</strong> PEB adaptés <strong>et</strong> la vérification<br />
permanente <strong>de</strong> leur validité, <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> protection <strong>et</strong><br />
d’insonorisation au sol, le contrôle <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit le<br />
plus exhaustif possible <strong>et</strong> une communication transparente.<br />
L’approche à <strong>de</strong>scente continue<br />
Jean-Pierre Desbenoit (Direction <strong>de</strong> la<br />
navigation aérienne, DGAC).<br />
Je vais parler <strong>de</strong> l’une <strong>de</strong>s procédures aéronautiques qui<br />
peut perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> diminuer la charge environnementale : la<br />
fameuse approche à <strong>de</strong>scente continue. La <strong>de</strong>scente<br />
continue est un concept consistant à améliorer le profil <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>scente dans la phase d’approche en supprimant les paliers<br />
<strong>de</strong>puis le vol en croisière jusqu’à la piste. Autrement dit, on<br />
fait en sorte d’éviter que <strong>de</strong>s avions volent trop bas, trop<br />
loin <strong>de</strong>s aéroports. Aujourd’hui, il arrive en eff<strong>et</strong> que <strong>de</strong>s<br />
avions en approche volent à 600 ou 900 m d’altitu<strong>de</strong>, à <strong>de</strong>s<br />
distances <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 20, 30, 40, 50, voire<br />
même 80 km, sans que c<strong>et</strong>te situation correspon<strong>de</strong> à aucun<br />
besoin opérationnel.<br />
Sur ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’approche à <strong>de</strong>scente continue, nous<br />
traversons une pério<strong>de</strong> charnière : <strong>de</strong> nombreuses<br />
expérimentations ont eu lieu au niveau local en France, en<br />
Europe <strong>et</strong> aux États-Unis ; tout au plus ont-elles porté sur<br />
quelques vols, durant une, cinq ou dix nuits… mais le<br />
passage d’une théorie expérimentale à la réalité<br />
opérationnelle se heurte notamment aux normes<br />
internationales établies par l’OACI. Pour pouvoir être mise<br />
en œuvre <strong>de</strong> manière plus systématique, il faudrait que<br />
c<strong>et</strong>te procédure fasse l’obj<strong>et</strong> d’une norme internationale.<br />
Or, on souffre d’une absence <strong>de</strong> définition réglementaire <strong>de</strong><br />
la <strong>de</strong>scente continue. Pire encore, il n’existe même aucune<br />
définition reconnue par tous, chaque pays ayant sa propre<br />
définition. Un exemple ? Pour un Anglais, un avion qui<br />
observe un pallier pendant 5 km fait une <strong>de</strong>scente continue.<br />
Quand on expérimente ce type <strong>de</strong> procédure, effectivement,<br />
un avion peut effectuer une <strong>de</strong>scente continue du niveau <strong>de</strong><br />
croisière (FL 350, soit 10 000 m environ) jusqu’à la piste sans<br />
aucun palier en suivant un angle <strong>de</strong> 2° puis <strong>de</strong> 4°. Le gain<br />
est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5 dB dans une zone située entre 20 <strong>et</strong> 50<br />
km du seuil <strong>de</strong> piste. C<strong>et</strong>te valeur <strong>de</strong> 20 km, il faut<br />
absolument la r<strong>et</strong>enir : pour les populations vivant à moins<br />
<strong>de</strong> 20 km <strong>de</strong>s aéroports dans l’axe <strong>de</strong>s pistes, la <strong>de</strong>scente<br />
continue n’amène strictement rien.<br />
La réalité opérationnelle, c’est la réglementation. On veut,<br />
en approche finale, utiliser une pente <strong>de</strong> 4 <strong>de</strong>grés ? Pas <strong>de</strong><br />
chance, la réglementation internationale fixe à 3 <strong>de</strong>grés la<br />
pente maximale. On veut s’affranchir <strong>de</strong>s paliers ? La<br />
réglementation internationale impose, pour intercepter un<br />
axe <strong>de</strong> piste ILS, un segment d’interception — un palier donc<br />
—, d’au moins 5 à 6 km. Ensuite, qui fait quoi dans c<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>scente continue ? Qui est responsable <strong>de</strong> l’espacement ?<br />
Le contrôleur. Qui est responsable <strong>de</strong> la conduite <strong>de</strong> vol ? Le<br />
pilote. Il va donc falloir être très clair sur le “qui fait quoi”.<br />
La définition choisie par la France pour la <strong>de</strong>scente continue<br />
est résolument calée sur la responsabilité du contrôle aérien<br />
ainsi que sur le type <strong>et</strong> le volume <strong>de</strong> trafic. Il est évi<strong>de</strong>nt<br />
qu’on n’a pas la même marge <strong>de</strong> manœuvre quand on doit<br />
gérer un vol isolé la nuit <strong>et</strong> lorsque l’on doit traiter 120<br />
mouvements programmés, comme c’est le cas sur certains<br />
aéroports.<br />
La France a formulé <strong>de</strong>ux définitions, correspondant à <strong>de</strong>ux<br />
types <strong>de</strong> procédures : la <strong>de</strong>scente lisse <strong>et</strong> la <strong>de</strong>scente<br />
continue. Ce qui signifie que la <strong>de</strong>scente continue<br />
universelle, unique solution <strong>de</strong> tous les maux <strong>de</strong>s avions en<br />
approche, n’existe pas. En revanche, plusieurs types <strong>de</strong><br />
procédures peuvent exister.<br />
La <strong>de</strong>scente lisse<br />
Prenons l’exemple d’un avion volant à une altitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
3300 m. Le contrôleur autorise l’avion à <strong>de</strong>scendre au niveau<br />
80 (2400 m). En réalité, lorsque le contrôleur donne c<strong>et</strong>te<br />
clairance <strong>de</strong> <strong>de</strong>scente, il a complètement résolu son conflit,<br />
ce qui signifie que l’espacement <strong>de</strong>s avions entre eux est<br />
PAGE 68<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
assuré <strong>et</strong> qu’aucun autre avion ne se trouve entre ces <strong>de</strong>ux<br />
niveaux <strong>de</strong> vol. À partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong> instant, la manière avec<br />
laquelle le pilote fait <strong>de</strong>scendre son appareil n’a aucune<br />
importance pour le contrôleur. La <strong>de</strong>scente lisse concerne<br />
donc l’approche initiale : après clairance <strong>de</strong> <strong>de</strong>scente<br />
délivrée par le contrôleur, le pilote respecte une pente <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>scente publiée <strong>et</strong> recommandée <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5% (les<br />
avions sont quand même construits pour <strong>de</strong>scendre selon<br />
c<strong>et</strong>te pente).<br />
Une expérimentation <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scente lisse a été menée à<br />
Roissy pour les arrivées face à l’est en provenance du sudouest<br />
: pente recommandée <strong>de</strong> 5 %, engagement pris <strong>de</strong><br />
respecter une altitu<strong>de</strong> minimale <strong>de</strong> 2000 m dans le travers<br />
<strong>de</strong> Thoiry. Avant la publication, 30% <strong>de</strong>s vols se situaient en<br />
<strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> 2000 m ; après la publication, 2% seulement<br />
franchissaient le travers <strong>de</strong> Thoiry à moins <strong>de</strong> 2000 m. Grâce<br />
aux informations aéronautiques, on peut clairement<br />
i<strong>de</strong>ntifier les avions qui ne respectent pas le critère <strong>de</strong>s<br />
2000 m. Par exemple, <strong>de</strong>ux avions, qui, en plein cœur <strong>de</strong><br />
nuit, n’avaient pas respecté la procédure, n’avaient aucun<br />
besoin opérationnel ni raison <strong>de</strong> sécurité pour se trouver à<br />
ces altitu<strong>de</strong>s à c<strong>et</strong>te heure là. C<strong>et</strong>te observation a motivé<br />
une action auprès <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux compagnies aériennes<br />
concernées, pour que l’intégration <strong>de</strong> la pente soit bien<br />
mentionnée dans les manuels d’exploitation <strong>de</strong> ces<br />
compagnies aériennes <strong>et</strong> suivie par les pilotes. Au total, un<br />
gain <strong>de</strong> 300 m en altitu<strong>de</strong> moyenne a été atteint. Quels<br />
enseignements tirer <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te expérimentation ? Des<br />
publications effectives, <strong>de</strong>s résultats très encourageants,<br />
une faisabilité <strong>de</strong> jour comme <strong>de</strong> nuit, aucun impact sur la<br />
charge <strong>de</strong> travail <strong>de</strong>s contrôleurs (quand le contrôleur a<br />
donné sa clairance, le problème <strong>de</strong> conflit est résolu).<br />
La <strong>de</strong>scente continue<br />
Pour expliquer le principe <strong>de</strong> la procédure <strong>de</strong> <strong>de</strong>scente<br />
continue, je vais m’appuyer sur l’expérimentation qui a été<br />
menée à Louisville (USA), qui n’est autre que la procédure<br />
qui va être certifiée par la FAA courant 2005, <strong>de</strong> nuit<br />
uniquement. L’appareil est situé au niveau 110 (à 3300 m),<br />
le contrôleur délivre l’équivalence d’une clairance<br />
d’atterrissage. Pour ce faire, le contrôleur doit séquencer<br />
les avions dès c<strong>et</strong> endroit, soit à une trentaine <strong>de</strong> kilomètres<br />
du touché <strong>de</strong>s roues. La responsabilité du contrôleur est <strong>de</strong><br />
s’assurer qu’à aucun moment les avions ne soient inférieurs<br />
à la norme minimale <strong>de</strong> séparation tout au long <strong>de</strong> la<br />
<strong>de</strong>scente. L’expérimentation a montré qu’une séparation<br />
entre avions <strong>de</strong> 10 à 15 miles nautiques au niveau 110<br />
perm<strong>et</strong>tait <strong>de</strong> garantir avec quasi-certitu<strong>de</strong> que les avions<br />
ne <strong>de</strong>scendront en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> la norme minimale <strong>de</strong> 3 à 5<br />
nautiques tout au long <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scente. À partir <strong>de</strong> c<strong>et</strong><br />
instant, le pilote conduit son vol à sa convenance. Avec<br />
c<strong>et</strong>te procédure, il faut remarquer que cela équivaut, au<br />
niveau 110 (3300 m), à multiplier la norme minimale <strong>de</strong><br />
séparation par cinq, soit tout au plus une dizaine d’arrivées<br />
par heure. Autrement dit, la <strong>de</strong>scente continue n’est<br />
compatible qu’avec les situations <strong>de</strong> très faible trafic, soit la<br />
nuit essentiellement. Autre point éminemment important :<br />
pour appliquer c<strong>et</strong>te procédure, il faut recourir aux<br />
techniques mo<strong>de</strong>rnes <strong>de</strong> navigation ; ce qui signifie que,<br />
certes, les avions sont plus hauts, mais il n’y a plus aucune<br />
dispersion. En eff<strong>et</strong>, la totalité <strong>de</strong>s vols en Rnav passent par<br />
une ban<strong>de</strong> dont la largeur n’excè<strong>de</strong> pas 1 km : les<br />
habitations qui se trouvent sous c<strong>et</strong>te trajectoire sont donc<br />
survolées par l’intégralité <strong>de</strong>s vols.<br />
Deux expérimentations sont en cours. À Marseille le travail<br />
sur simulateur a été effectué <strong>et</strong>, fin décembre 2004, quatre<br />
vols avaient été réalisés selon c<strong>et</strong>te procédure. L’étape<br />
suivante consiste, après <strong>de</strong> nouveaux vols, à tirer les<br />
conséquences du point <strong>de</strong> vue du contrôle aérien, pour une<br />
généralisation <strong>de</strong> l’expérimentation afin d’en mesurer les<br />
gains effectifs. Seule une expérimentation portant sur un<br />
volume <strong>de</strong> trafic important a valeur d’évaluation. À<br />
Marseille, au niveau <strong>de</strong>s collines <strong>de</strong> l’Estaque, c<strong>et</strong>te<br />
procédure perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> gagner 300 m en approche initiale <strong>et</strong><br />
150 m en intermédiaire. Effectivement, à c<strong>et</strong> endroit, les<br />
avions survolent les habitations à <strong>de</strong>s altitu<strong>de</strong>s très basses.<br />
Une autre expérimentation <strong>de</strong>vait être menée à Charles-<strong>de</strong>-<br />
Gaulle, <strong>de</strong> nuit, pour les arrivées du sud-est en configuration<br />
face à l’ouest.<br />
C<strong>et</strong>te acception <strong>de</strong> l’approche à <strong>de</strong>scente continue apparaît<br />
donc comme complexe <strong>de</strong> mise en œuvre. C<strong>et</strong>te procédure<br />
exerce un fort impact sur le contrôle aérien, dans la mesure<br />
où la séparation, qui est à la charge du contrôleur, est cinq<br />
fois supérieure à la séparation minimale.<br />
Conclusions<br />
Avec la <strong>de</strong>scente lisse, l’amélioration est indiscutable <strong>et</strong> la<br />
mise en œuvre à généraliser. Cela <strong>de</strong>vrait se faire<br />
progressivement dans le courant <strong>de</strong> l’année 2005. La<br />
<strong>de</strong>scente continue constitue une voie d’espoir pour les<br />
mouvements <strong>de</strong> nuit, sauf, <strong>et</strong> il faut le dire clairement, pour<br />
ceux qui seraient situés juste sous le trait, qui seront<br />
survolés par tous les avions. Mais la mise en œuvre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
procédure est beaucoup plus complexe. Enfin, le travail <strong>de</strong><br />
normalisation au niveau international doit être poursuivi.<br />
Débat<br />
Les chiffres pour Charleroi <strong>et</strong> Liège ?<br />
Michel Transy (Acenas, association <strong>de</strong> riverains <strong>de</strong><br />
l’aéroport <strong>de</strong> Lyon) : M. Clairbois nous a présenté trois<br />
aéroports. Quel est le nombre <strong>de</strong> mouvements sur chacun <strong>de</strong><br />
ces aéroports <strong>et</strong> quels sont les chiffres <strong>de</strong> populations<br />
impactées autour <strong>de</strong> ces aéroports ? Quel développement<br />
prévoyez-vous à terme, puisque vous avez parlé <strong>de</strong> plans <strong>de</strong><br />
développement pour ces aéroports ? Avez-vous chiffré les<br />
mesures d’insonorisation qui ont été mises en œuvre ? Ontelles<br />
été réalisées à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s riverains ou tout ceci a-<br />
t-il été envisagé <strong>de</strong> manière globale ? A-t-on fait un bilan <strong>de</strong><br />
l’avantage économique <strong>et</strong> <strong>de</strong>s coûts environnementaux <strong>de</strong><br />
l’aéroport ?<br />
Jean-Pierre Clairbois : À Charleroi <strong>et</strong> à Liège, les décisions<br />
ont été prises sur <strong>de</strong> grands principes stratégiques. L’idée<br />
était <strong>de</strong> réduire au maximum le nombre d’habitations<br />
gênées au sol. Les différents scénarios ont minimisé ce<br />
nombre d’habitations. Bien évi<strong>de</strong>mment, les plans<br />
d’insonorisation sont coûteux. Pour la région <strong>de</strong> Bruxelles-<br />
Capitale les estimations s’étaient avérées colossales parce<br />
que la dispersion sur la ville <strong>de</strong> Bruxelles concerne 500 000<br />
personnes. Le point <strong>de</strong> départ est réellement politique.<br />
Veut-on minimiser le nombre <strong>de</strong> personnes gênées ? Si oui,<br />
avec quelle stratégie ? Ensuite, on se donne les moyens<br />
financiers pour appliquer c<strong>et</strong>te stratégie. Actuellement, je<br />
pense que 13 000 habitations environ sont concernées par<br />
l’insonorisation aux alentours <strong>de</strong> Liège-Biers<strong>et</strong>, 8 000 environ<br />
à Charleroi. Et les coûts ne sont pas forcément<br />
proportionnels au nombre <strong>de</strong> maisons.<br />
Pour le nombre <strong>de</strong> mouvements, le trafic 2003 sur l’aéroport<br />
<strong>de</strong> Liège était <strong>de</strong> 35 000 mouvements ; à l’aéroport <strong>de</strong><br />
Charleroi, on compte 60 000 mouvements au total, vols<br />
d’entraînements compris, mais l’activité purement<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 69
commerciale est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 19 000 mouvements. En<br />
terme <strong>de</strong> budg<strong>et</strong> alloué à l’insonorisation, la région wallonne<br />
envisage à la fois <strong>de</strong>s acquisitions <strong>et</strong> <strong>de</strong>s insonorisations.<br />
Pour les <strong>de</strong>ux aéroports, le budg<strong>et</strong> prévu pour insonoriser <strong>et</strong><br />
acquérir l’ensemble <strong>de</strong>s immeubles concernés représente<br />
une enveloppe <strong>de</strong> 350 millions d’euros.<br />
Michel Transy: La répartition <strong>de</strong> l’activité aérienne entre<br />
trois aéroports correspond-elle à un choix stratégique, ou<br />
s’agit-il d’un héritage historique ?<br />
Jean-Pierre Clairbois : La Belgique est un pays<br />
suffisamment p<strong>et</strong>it pour que l’aéroport national soit<br />
Bruxelles. Toutefois, cela n’empêche pas <strong>de</strong> développer <strong>de</strong>s<br />
aéroports régionaux, tels que Liège <strong>et</strong> Charleroi. Liège a été<br />
développé pour accueillir une activité <strong>de</strong> fr<strong>et</strong> nocturne. C<strong>et</strong><br />
aéroport a connu un développement économique assez<br />
sensationnel par la venue <strong>de</strong> TNT <strong>et</strong> d’autres compagnies <strong>de</strong><br />
fr<strong>et</strong>. La Région a décidé ce type <strong>de</strong> développement pour c<strong>et</strong><br />
aéroport. Pour Charleroi, le choix correspond aux<br />
compagnies low cost ; Ryanair, par exemple, n’atterrit<br />
jamais sur les aéroports nationaux. Quoi qu’il en soit, il est<br />
certain que l’aéroport <strong>de</strong> Zaventem sera un jour saturé, <strong>et</strong><br />
qu’il va falloir se tourner vers d’autres aéroports. Mais les<br />
autorités politiques ont aussi envisagé d’autres<br />
implantations que celles <strong>de</strong> Liège <strong>et</strong> Charleroi. D’autres<br />
aéroports existent, à Osten<strong>de</strong>, à Anvers-Deurne ; la Flandre<br />
compte d’autres aéroports régionaux, plus p<strong>et</strong>its, aux<br />
vocations bien spécifiques.<br />
Descente lisse, <strong>de</strong>scente continue : quelques<br />
éclaircissements<br />
De la salle : En somme, <strong>de</strong>scente lisse ou <strong>de</strong>scente continue<br />
se traduisent par un rétrécissement du volume <strong>de</strong> protection<br />
environnementale, en quelque sorte, puisque tous les avions<br />
sont concentrés dans un volume défini.<br />
Jean-Pierre Desbenoit : La <strong>de</strong>scente lisse, en perm<strong>et</strong>tant<br />
que les avions <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt là où ils sont, mais en ayant un<br />
plan <strong>de</strong> <strong>de</strong>scente beaucoup plus lisse, évite que les avions<br />
soient trop bas, trop tôt, mais l’on reste dans le volume<br />
existant du guidage radar actuel. En revanche, la <strong>de</strong>scente<br />
continue, elle, concentre les trajectoires.<br />
Frédéric Launay (médiateur pour les riverains, aéroport<br />
<strong>de</strong> Lyon) : Pour faire une <strong>de</strong>scente continue, faut-il<br />
absolument faire appel à la Rnav ? Pour les équipages, une<br />
qualification spéciale sera-t-elle attribuée aux équipages ?<br />
Intercepter un ILS en <strong>de</strong>scente n’est pas forcément évi<strong>de</strong>nt.<br />
Jean-Pierre Desbenoit : Pour simplifier, avec la <strong>de</strong>scente<br />
continue, la navigation se fait par satellite, grâce à<br />
l’équipement <strong>de</strong> bord FMS. C’est donc essentiellement <strong>de</strong> la<br />
Rnav. Tout ceci s’inscrit dans une politique européenne<br />
selon laquelle la quasi-totalité <strong>de</strong>s avions, pour pouvoir<br />
atterrir sur les aéroports européens importants, doivent être<br />
équipés <strong>de</strong> systèmes Rnav <strong>et</strong> P-Rnav (P pour “précision”). Ce<br />
n’est donc pas un élément susceptible <strong>de</strong> r<strong>et</strong>ar<strong>de</strong>r la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> procédure.<br />
La conduite du vol est à la charge du pilote. Il appartient<br />
donc à la compagnie aérienne <strong>de</strong> définir la façon dont ses<br />
pilotes vont gérer c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>scente. Pour l’heure, pilotes,<br />
compagnies <strong>et</strong> organismes <strong>de</strong> contrôle en vol veulent un<br />
segment d’interception <strong>de</strong> l’ILS qui comporte quand même<br />
un p<strong>et</strong>it palier. J’ai quelque peu versé dans l’ironie en citant<br />
les 5 km <strong>de</strong>s Anglais, mais, comme par hasard, ce palier aura<br />
une longueur voisine <strong>de</strong> 5 km.<br />
Émile Thorez (base aérienne militaire 115 d’Orange) : Le<br />
débat d’aujourd’hui porte essentiellement sur l’aviation<br />
civile <strong>et</strong> commerciale, mais le problème posé par l’aviation<br />
militaire est tout aussi complexe <strong>et</strong> quelque peu marginalisé<br />
par le fait que les pouvoirs publics ne souhaitent pas, ou<br />
n’ont pas décidé, jusqu’à présent, d’engager la moindre<br />
action <strong>de</strong> quelque nature que ce soit en faveur <strong>de</strong>s riverains<br />
<strong>de</strong> ces bases militaires. Quand j’entends parler <strong>de</strong><br />
populations survolées à <strong>de</strong>s distances portant sur 30 ou<br />
50 km, il faut savoir que pour la base d’Orange, par<br />
exemple, les premières habitations se situent à 350 m <strong>de</strong> la<br />
piste, que le village situé dans l’axe <strong>de</strong> la piste sud est à<br />
moins <strong>de</strong> 2000 m du bout <strong>de</strong> piste. Autrement dit, l’impact<br />
sonore <strong>de</strong> l’aviation militaire est peut-être beaucoup moins<br />
étendu en termes <strong>de</strong> population, mais beaucoup plus fort en<br />
termes <strong>de</strong> niveau <strong>de</strong> bruit. À ce suj<strong>et</strong>, bien que nous ayons<br />
travaillé pendant plusieurs années pour aboutir à la<br />
signature d’une charte avec l’État <strong>et</strong> l’armée <strong>de</strong> l’air, nous<br />
n’avons pas encore réussi à convaincre les pouvoirs publics<br />
<strong>de</strong> dépasser le sta<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mesures techniques éventuellement<br />
prises par l’armée <strong>de</strong> l’air pour abor<strong>de</strong>r ce problème<br />
spécifique. Quelles sont les actions envisagées par les<br />
pouvoirs publics pour protéger les populations les plus<br />
concernées par ces nuisances, en particulier celles qui sont à<br />
l’intérieur <strong>de</strong>s zones A <strong>et</strong> B <strong>de</strong>s plans d’exposition au bruit ?<br />
Sur ce suj<strong>et</strong>, les <strong>de</strong>ux exposés que nous venons d’entendre<br />
peuvent nous ai<strong>de</strong>r à faire <strong>de</strong>s propositions, notamment,<br />
auprès <strong>de</strong> la commission mixte défense <strong>et</strong> environnement,<br />
qui est supposée faire <strong>de</strong>s propositions aux pouvoirs publics<br />
pour prendre en compte les problèmes <strong>de</strong> ces riverains.<br />
Chantal Deman<strong>de</strong>r (Collectif contre les nuisances aériennes<br />
<strong>de</strong> l’agglomération toulousaine) : Je trouve abusif <strong>de</strong><br />
présenter l’insonorisation comme la panacée universelle. Au<br />
voisinage <strong>de</strong>s aéroports du sud, contrairement à Liège, on<br />
ouvre les fenêtres six mois par an. Quand les aéroports sont<br />
trop urbanisés <strong>et</strong> que l’optimisation <strong>de</strong>s procédures<br />
aéronautiques ne perm<strong>et</strong> pas <strong>de</strong> minimiser le nombre<br />
d’habitations survolées, que faut-il faire ?<br />
Jean-Pierre Clairbois : L’aéroport <strong>de</strong> Toulouse est<br />
particulièrement enclavé dans la ville, en eff<strong>et</strong>. En trente<br />
secon<strong>de</strong>s, je n’ai pas <strong>de</strong> réponse pratique à proposer. Pour<br />
l’aéroport <strong>de</strong> Bruxelles-National, qui est très mal situé par<br />
rapport à la ville <strong>de</strong> Bruxelles, à 14 km seulement, nous<br />
avons étudié <strong>de</strong>s alternatives telles que l’ouverture d’une<br />
quatrième piste. Il est apparu qu’avec une bonne gestion,<br />
compatible avec les conditions <strong>de</strong> vols, il y avait moyen <strong>de</strong><br />
réduire les nuisances : dès que les avions quittaient la piste,<br />
ils s’orientaient au nord-ouest pour éviter la ville. C<strong>et</strong>te<br />
procédure avait d’ailleurs été imposée par la Région<br />
Bruxelles-Capitale jusqu’au moment où la région flaman<strong>de</strong> a<br />
obligé à la dispersion. À Toulouse, je ne sais pas si le<br />
dégagement <strong>de</strong> la piste offre suffisamment <strong>de</strong> marge <strong>de</strong><br />
manœuvre.<br />
De la salle : Le cas <strong>de</strong> Bruxelles-Zaventem est tout à fait<br />
exemplaire : ce ne sont pas les gestionnaires <strong>de</strong> l’aéroport<br />
qui ont décidé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s procédures d’atterrissage ou <strong>de</strong><br />
décollage en parapluie, dispersées, c’est un juge qui, à la<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s riverains, a tranché <strong>et</strong> a invoqué le principe<br />
d’égalité <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s citoyens. Dès lors,<br />
chaque centimètre carré du territoire <strong>de</strong>vait recevoir la<br />
même quantité <strong>de</strong> nuisance. Un jugement qui a évi<strong>de</strong>mment<br />
étonné beaucoup <strong>de</strong> responsables politiques <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
gestionnaires d’aéroports. La conséquence <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
dispersion, <strong>de</strong> c<strong>et</strong> “arrosage” du plus grand nombre, c’est<br />
qu’il est <strong>de</strong>venu impossible d’entreprendre une quelconque<br />
action au sol. On ne sait plus rien gérer, on ne sait plus<br />
inventer <strong>de</strong>s normes particulières <strong>de</strong> coefficient<br />
d’atténuation. Ce cas là est intéressant : c’est la justice,<br />
saisie par un comité <strong>de</strong> quartier, qui en a décidé ainsi.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Les plans <strong>et</strong> actions possibles autour <strong>de</strong>s aéroports<br />
Didier Cattenoz (Mission bruit, ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable)<br />
Je vais commencer par un état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> la lutte contre le<br />
bruit <strong>de</strong>s avions, un dispositif qui s’articule autour <strong>de</strong> cinq<br />
principaux axes : la diminution du bruit <strong>de</strong>s aéronefs, par le<br />
biais <strong>de</strong>s chapitres OACI, l’optimisation <strong>de</strong>s trajectoires <strong>et</strong> le<br />
contrôle <strong>de</strong>s règles d’exploitation, la maîtrise <strong>de</strong><br />
l’urbanisme, par les PEB, l’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation <strong>et</strong>, enfin,<br />
le développement <strong>de</strong> la concertation, par le biais <strong>de</strong>s CCE <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> l’Acnusa.<br />
Le cadre réglementaire<br />
Deux directives s’appliquent directement au bruit <strong>de</strong>s avions<br />
<strong>et</strong> ont trait à la question que j’abor<strong>de</strong> aujourd’hui : la<br />
2002/30/CE, qui consiste à établir <strong>de</strong>s règles pour<br />
l’introduction <strong>de</strong> nouvelles restrictions d’exploitation autour<br />
<strong>de</strong>s aérodromes ; la 2002/49/CE, qui nécessite d’établir <strong>de</strong>s<br />
cartes <strong>et</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>de</strong>s plans d’action.<br />
Un autre progrès, qui remonte à l’année 2004, concerne<br />
l’obligation d’enquête publique pour toute modification<br />
permanente <strong>de</strong> la circulation aérienne en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong><br />
1981 m.<br />
La directive 2002/30/CE a pour but d’encadrer<br />
l’introduction <strong>de</strong> restrictions d’exploitation. Elle se fon<strong>de</strong><br />
sur “l’approche équilibrée” définie par l’OACI, selon<br />
laquelle il convient <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s du rapport<br />
coût-bénéfice chaque fois qu’on envisage d’introduire une<br />
nouvelle restriction. Autre élément à prendre en compte :<br />
les avions <strong>de</strong> chapitre 4 ne peuvent être concernés par ces<br />
restrictions. Le décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> transposition vise les “aérodromes<br />
Acnusa”, c’est-à-dire les plateformes <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 20 000<br />
mouvements annuels d’aéronefs <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 20 tonnes. Ces<br />
points constituent donc le cadre <strong>de</strong>s plans d’actions<br />
possibles autour <strong>de</strong>s aérodromes.<br />
Dans le cadre <strong>de</strong> la directive 2002/49/CE, les plans <strong>de</strong><br />
prévention du bruit dans l’environnement intègrent les<br />
actions déjà mises en place <strong>et</strong> proposent <strong>de</strong> nouvelles<br />
mesures à m<strong>et</strong>tre en œuvre. Il faut souligner que la<br />
directive exige que le public participe activement à la<br />
rédaction <strong>de</strong>s plans d’action, pas simplement à travers une<br />
consultation, mais par un véritable processus <strong>de</strong><br />
concertation. Pour l’heure, il est prévu <strong>de</strong> réaliser une<br />
enquête publique allégée, sans commissaire enquêteur, pour<br />
la rédaction <strong>de</strong>s plans d’exposition au bruit, <strong>et</strong> d’informer le<br />
public sur le contenu final <strong>de</strong>s plans d’action, afin que les<br />
riverains sachent si les mesures <strong>de</strong>mandées lors <strong>de</strong> la<br />
rédaction du plan d’action ont été r<strong>et</strong>enues ou non.<br />
Quels sont les aérodromes concernés par la directive<br />
2002/49/CE ? Les “grands aéroports” <strong>et</strong> les aéroports en<br />
agglomérations. Un “grand aéroport” est un aéroport civil<br />
qui compte au moins 50 000 mouvements annuels, hormis les<br />
vols d’entraînements d’avions légers. Au passage, précisons<br />
qu’à l’heure actuelle, on ne sait pas comptabiliser ces vols<br />
d’entraînements <strong>de</strong> l’aviation légère, ce qui complique le<br />
recensement <strong>de</strong>s aérodromes concernés par la directive.<br />
Les plans <strong>de</strong> prévention du bruit doivent lister “qui fait<br />
quoi ?”, analyser les coûts <strong>et</strong> les avantages, établir les<br />
budg<strong>et</strong>s nécessaires. Sont compétents, pour la rédaction, les<br />
communes ou, dans les agglomérations, les établissements<br />
publics <strong>de</strong> coopération intercommunale ayant la compétence<br />
“bruit”, ou, pour les gran<strong>de</strong>s infrastructures, le représentant<br />
<strong>de</strong> l’État. L’autorité qui élabore le plan s’assure au<br />
préalable <strong>de</strong> l’accord <strong>de</strong>s autorités ou organismes<br />
compétents pour déci<strong>de</strong>r <strong>et</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre les mesures<br />
qu’il recense. En France, seul le ministre chargé <strong>de</strong>s<br />
Transports est compétent pour prendre <strong>de</strong>s restrictions<br />
d’exploitation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s restrictions d’usage.<br />
Quant aux mesures proprement dites, elles ne concernent<br />
que les actions prises au niveau d’un aéroport, par<br />
opposition à <strong>de</strong>s mesures prises à l’échelon national ou<br />
européen. Par exemple, la remontée <strong>de</strong> l’altitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
transition à 18 000 pieds ne se résoudra pas au niveau d’un<br />
aéroport. Des exemples d’actions sur certains aéroports<br />
pourraient être généralisés (l’aéroport le plus avancé en la<br />
matière est Roissy-Charles-<strong>de</strong>-Gaulle). Ces nouvelles actions<br />
seront introduites en fonction <strong>de</strong>s enjeux locaux.<br />
Les actions possibles<br />
Des efforts considérables ont été effectués sur les<br />
motorisations, certains pensent que les gains ne doivent plus<br />
être attendus, ne peuvent plus être atteints par<br />
l’amélioration <strong>de</strong> la motorisation. Lors <strong>de</strong> la journée<br />
technique organisée par l’Inr<strong>et</strong>s le 30 septembre 2004, un<br />
chercheur qui modélise les trajectoires a annoncé qu’on<br />
pouvait atteindre <strong>de</strong>s gains <strong>de</strong> 5 à 7 dB au passage, au point<br />
<strong>de</strong> vue mathématique en tous cas. Que peut-on faire autour<br />
<strong>de</strong> chaque aérodrome concerné par la directive, ainsi, bien<br />
évi<strong>de</strong>mment, que pour ceux non concernés par la directive ?<br />
Il est possible <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en place <strong>de</strong>s <strong>de</strong>scentes progressives<br />
— <strong>de</strong>scentes continues <strong>et</strong> <strong>de</strong>scentes lisses —, comme l’a<br />
montré M. Desbenoit à l’instant. Il conviendrait d’examiner<br />
la généralisation <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> procédures. Il conviendrait<br />
également d’examiner l’application à d’autres aéroports <strong>de</strong>s<br />
volumes <strong>de</strong> protection environnementale (VPE) mis en place<br />
dans les aéroports parisiens. Par exemple, A Marseille,<br />
l’échec du proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> VPE (en fait un “mur”), en raison d’un<br />
désaccord en CCE, est assez dommageable. Autre possibilité,<br />
généraliser les mesures <strong>de</strong> restriction appliquées à Roissy-<br />
CDG au titre <strong>de</strong>s arrêtés du 6 novembre 2003 : entre [0h-5h],<br />
suppression <strong>de</strong>s créneaux abandonnés par les transporteurs ;<br />
plafonnement <strong>de</strong>s créneaux entre [0h-5h] à 22 500 par an ;<br />
entre [0h-5h], interdiction <strong>de</strong> décoller sans attribution d’un<br />
créneau horaire dans c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>. Par ailleurs, certaines<br />
collectivités locales ont mis en place leurs propres dispositifs<br />
d’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation. Une telle expérience locale a été<br />
menée au niveau <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong> M<strong>et</strong>z-Nancy-Lorraine ;<br />
autour <strong>de</strong> Vatry, <strong>de</strong>s insonorisations ont eu lieu <strong>et</strong>, semble-til,<br />
<strong>de</strong>s collectivités locales vont intervenir pour ai<strong>de</strong>r à<br />
insonoriser les riverains <strong>de</strong> Toulouse-Blagnac.<br />
Dans les zones où une décote immobilière “bruit” est<br />
avérée, on peut envisager <strong>de</strong> développer les possibilités <strong>de</strong><br />
rachat, ou d’instaurer un système <strong>de</strong> compensation lors <strong>de</strong>s<br />
reventes (une réflexion est en cours sur ce suj<strong>et</strong> à Lyon-<br />
Saint-Exupéry). Une autre mesure intéressante concerne<br />
l’indicateur global mesuré/pondéré introduit à Roissy-CDG.<br />
Huit stations <strong>de</strong> mesure enregistrent chaque passage<br />
d’avion. Les niveaux <strong>de</strong> bruit sont cumulés sur une année <strong>et</strong><br />
le résultat est comparé à une référence (la dose <strong>de</strong> bruit<br />
moyenne reçue en 1999, 2000 <strong>et</strong> 2001).<br />
Qui plus est, <strong>de</strong> nouvelles restrictions pourraient être mises<br />
en place, selon les procédures habituelles, dans le cadre <strong>de</strong><br />
“l’approche équilibrée” pour les grands aéroports. On<br />
pourrait par exemple imaginer d’interdire les avions <strong>de</strong><br />
chapitre 3 <strong>de</strong> nuit dès 2007 ou 2008. Ou d’améliorer les<br />
outils <strong>de</strong> communication avec les riverains, par exemple en<br />
produisant <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> fréquences <strong>de</strong> survol, ou en<br />
généralisant le système Vitrail (visualisation <strong>de</strong>s trajectoires<br />
en quasi-temps réel). Dans le même ordre d’idée, il serait<br />
bon <strong>de</strong> généraliser les dispositifs <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 71
suivi <strong>de</strong>s trajectoires, sur les aéroports Acnusa, comme cela<br />
a été fait à Montpellier, ou <strong>de</strong> généraliser les structures <strong>de</strong><br />
traitement <strong>de</strong> plaintes par un médiateur. Et, enfin,<br />
d’expérimenter <strong>de</strong>s indicateurs complémentaires, pour<br />
prendre en compte le nombre <strong>de</strong> mouvements dans le<br />
diagnostic <strong>de</strong> l’environnement sonore autour <strong>de</strong>s<br />
aérodromes. On a vu l’échec <strong>de</strong> la dispersion <strong>de</strong>s<br />
trajectoires, ce qui renforce la doctrine <strong>de</strong>s VPE : il s’agit<br />
avant tout <strong>de</strong> savoir où sont les avions pour éventuellement<br />
sanctionner. Savoir où sont les avions, cela concerne surtout<br />
les zones éloignées <strong>de</strong>s aéroports, puisque, à proximité, les<br />
avions survolent toujours les mêmes zones. De surcroît, loin<br />
<strong>de</strong>s aéroports, la dispersion <strong>de</strong>s trajectoires exclut d’emblée<br />
les optimisations <strong>de</strong> trajectoires pour minimiser le nombre<br />
<strong>de</strong> personnes survolées. Ce serait en tous cas très difficile à<br />
m<strong>et</strong>tre en place pour les contrôleurs.<br />
Débat<br />
Qui arbitre l’analyse coûts-avantages ?<br />
De la salle : Vous m<strong>et</strong>tez en balance les coûts <strong>et</strong> les<br />
avantages. Qui déci<strong>de</strong> que c’est un avantage, qui déci<strong>de</strong> que<br />
c’est un coût, qui arbitre les choix pour formuler un plan <strong>de</strong><br />
prévention ?<br />
Didier Cattenoz : Tous les domaines se rencontrent : les<br />
domaines environnementaux, socioéconomiques. C’est une<br />
question qui reste à définir, je le reconnais. La rédaction du<br />
plan nécessite d’étudier le rapport coût/bénéfice <strong>et</strong> <strong>de</strong> faire<br />
participer le public. Les riverains pourront toujours<br />
critiquer, au moins en théorie, l’emploi <strong>de</strong> ce rapport.<br />
Guillaume Faburel : L’approche équilibrée nous vient <strong>de</strong>s<br />
Américains. La logique <strong>de</strong> l’analyse coûts-avantages, soyons<br />
clairs, ne concerne que les compagnies aériennes. Exemple :<br />
que coûte pour la compagnie l’introduction d’une restriction<br />
d’exploitation <strong>de</strong> 0h00 à 5h00 ? En France, c’est encore une<br />
approche nouvelle. On a réussi à faire passer nos arrêtés <strong>de</strong><br />
restrictions d’exploitation avant que la directive n’impose<br />
l’approche équilibrée. Astucieusement, à Roissy-CDG, le<br />
service <strong>de</strong>s bases aériennes a réussi à faire passer les<br />
discussions tenues dans le cadre <strong>de</strong> la CCE pour <strong>de</strong><br />
l’approche équilibrée. Derrière l’approche équilibrée, se<br />
cache le développement du transport aérien.<br />
Janine Le Floch-Fournier : Je souhaiterais intervenir pour<br />
préciser que c’est à l’issue d’une étu<strong>de</strong> “approche<br />
équilibrée” qu’ont été mises en place un ensemble <strong>de</strong><br />
mesures <strong>de</strong> restriction d’exploitation sur Roissy, qui sont<br />
très fortes. Un rapport d’une cinquantaine <strong>de</strong> pages,<br />
présenté à la CCE, m<strong>et</strong> en balance le gain environnemental,<br />
par exemple, le nombre <strong>de</strong> riverains concernés par tel<br />
niveau <strong>de</strong> bruit, <strong>et</strong> le coût économique. Il s’agit, à ma<br />
connaissance, <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong>s premiers rapports réalisé en<br />
Europe selon les préceptes <strong>de</strong> l’approche équilibrée. La<br />
directive européenne “approche équilibrée” précise<br />
exactement, dans son annexe, tout ce qui doit être étudié :<br />
situation “au fil <strong>de</strong> l’eau”, comparaison <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te situation<br />
avec <strong>de</strong>s scénarios, plus ou moins délicats, qui allaient<br />
jusqu’à l’instauration d’un couvre-feu. Le gain<br />
environnemental est évalué en nombre <strong>de</strong> personnes<br />
survolées <strong>et</strong> mis en balance avec le coût économique.<br />
Guillaume Faburel : Premièrement, approche équilibrée <strong>et</strong><br />
analyse coûts-avantages ne sont pas synonymes. La balanced<br />
approach <strong>de</strong>s Américains est une émanation du<br />
développement durable, <strong>et</strong> le rapport coûts/avantages est<br />
l’un <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong> l’approche<br />
équilibrée, ou intégrée. Deuxièmement, le rapport coûtsavantages<br />
participe <strong>de</strong> la logique <strong>de</strong>s compagnies aériennes<br />
mais, aux États-Unis, les coûts d’insonorisation sont plus<br />
importants qu’ici puisque les zones bénéficiaires y sont<br />
légèrement plus étendues. Qui plus est, ils pratiquent le<br />
rachat <strong>de</strong> logements. Des coûts qui pèsent sur les rapports<br />
coûts/avantages. Enfin, une évaluation utile, qui viendrait<br />
rééquilibrer la colonne <strong>de</strong>s coûts, serait <strong>de</strong> chiffrer le coût<br />
<strong>de</strong> la gêne. Grosso modo, en se basant notamment sur le<br />
phénomène <strong>de</strong> dépréciation immobilière, le coût <strong>de</strong> la gêne<br />
est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 100 à 300 euros par an. À l’étranger, on<br />
mène beaucoup d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> monétarisation <strong>de</strong>s coûts<br />
environnementaux ; en France, très peu. Cela participe <strong>de</strong><br />
ce r<strong>et</strong>ard <strong>de</strong>s pouvoirs publics français sur ces questions. La<br />
gêne n’est pas le seul coût à intégrer dans l’équation coûts<br />
<strong>et</strong> avantages, mais c’est un élément qui vient abon<strong>de</strong>r le<br />
rapport coûts/bénéfices.<br />
Insonoriser les logements <strong>de</strong>s riverains : une importante réforme du<br />
dispositif<br />
Hélène Bastianelli (Service <strong>de</strong>s bases<br />
aériennes, DGAC)<br />
Je vais vous parler du dispositif mis en place en France pour<br />
ai<strong>de</strong>r les riverains à insonoriser leurs logements <strong>et</strong>, en<br />
particulier, <strong>de</strong> l’importante réforme intervenue <strong>de</strong>puis 2002.<br />
Ce dispositif a été mis en place au niveau national par la loi<br />
bruit <strong>de</strong> décembre 1992. Il faut rappeler que Aéroports <strong>de</strong><br />
Paris avait pris l’initiative, <strong>de</strong> manière individuelle, <strong>de</strong><br />
m<strong>et</strong>tre en place un tel dispositif auparavant. Ce dispositif<br />
concerne les dix principales plateformes aéroportuaires<br />
françaises, celles qui réalisent 20 000 mouvements <strong>de</strong> plus<br />
<strong>de</strong> 20 tonnes par an. Le principe est donc d’accor<strong>de</strong>r aux<br />
propriétaires une ai<strong>de</strong> financière <strong>de</strong>stinée à effectuer <strong>de</strong>s<br />
travaux d’isolation acoustique <strong>de</strong> leur logement. La prise en<br />
charge est en général <strong>de</strong> 80% du coût <strong>de</strong> l’insonorisation du<br />
logement, participation pouvant atteindre 90% ou 100% selon<br />
les conditions <strong>de</strong> ressources. Deux conditions : le logement<br />
doit être inclus dans le plan <strong>de</strong> gêne sonore <strong>et</strong> doit avoir été<br />
construit avant l’adoption du plan d’exposition au bruit. Une<br />
nécessité <strong>de</strong> réformer ce dispositif est apparue récemment<br />
puisque le montant financier n’était pas suffisant <strong>et</strong> que <strong>de</strong>s<br />
délais d’attente très importants concernaient tous les<br />
aéroports. C<strong>et</strong>te réforme, qui se déroule en plusieurs<br />
phases, est toujours en cours. La première phase a consisté<br />
à augmenter le nombre d’ayants droit ; la secon<strong>de</strong> phase à<br />
augmenter les ressources financières afin d’adapter le<br />
budg<strong>et</strong> au nombre accru d’ayants droit. La gestion du<br />
dispositif a été transférée aux exploitants <strong>de</strong>s aéroports en<br />
lieu <strong>et</strong> place <strong>de</strong> l’A<strong>de</strong>me, pour plus <strong>de</strong> proximité <strong>et</strong>, dès<br />
maintenant, <strong>de</strong>s améliorations opérationnelles sont prévues.<br />
La première phase <strong>de</strong> la réforme, la révision <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong><br />
gêne sonore, a fait passer le nombre <strong>de</strong> logements<br />
bénéficiaires <strong>de</strong> 68 000 logements à plus <strong>de</strong> 141 000<br />
aujourd’hui. En 2004, 3000 logements ont bénéficié <strong>de</strong><br />
l’ai<strong>de</strong>, ce qui constitue une large augmentation par rapport<br />
PAGE 72<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
à l’année précé<strong>de</strong>nte. Pour faire face à c<strong>et</strong>te augmentation<br />
<strong>de</strong>s besoins, la décision du 25 juill<strong>et</strong> 2002 a permis<br />
d’augmenter les ressources. Les taux unitaires <strong>de</strong> la taxe<br />
générale sur les activités polluantes, qui finançaient c<strong>et</strong>te<br />
ai<strong>de</strong>, ont été multipliés par <strong>de</strong>ux (loi <strong>de</strong> finance rectificative<br />
2002). Par la suite, le plan bruit lancé le 6 octobre 2003 a<br />
confirmé l’augmentation du montant <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> ; une somme<br />
<strong>de</strong> 55 millions d’euros a été annoncée. La loi <strong>de</strong> finance<br />
rectificative <strong>de</strong> 2003 a pérennisé les ressources en créant<br />
une nouvelle taxe : la taxe sur les nuisances <strong>sonores</strong><br />
aéroportuaires (TNSA), taxe entièrement affectée à l’ai<strong>de</strong> à<br />
l’insonorisation, qui est venue remplacer la taxe générale<br />
sur les activités polluantes. Pour un aéroport donné, le<br />
montant rapporté, fonction notamment du nombre <strong>de</strong><br />
mouvements, est affecté en totalité au dispositif d’ai<strong>de</strong> à<br />
l’insonorisation <strong>de</strong>s riverains <strong>de</strong> c<strong>et</strong> aéroport, <strong>et</strong> le taux <strong>de</strong><br />
base est fixé pour chaque aéroport. Environ 30 millions<br />
d’euros ont été <strong>de</strong> la sorte engagés en 2004, ce qui<br />
représente une importante hausse <strong>de</strong>s moyens financiers,<br />
qui étaient <strong>de</strong> 17 millions d’euros environ l’année<br />
précé<strong>de</strong>nte. Par la loi <strong>de</strong> finance rectificative <strong>de</strong> 2004, il a<br />
été décidé <strong>de</strong> donner la possibilité aux personnes publiques<br />
<strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s emprunts dans le but d’accélérer<br />
l’insonorisation <strong>de</strong>s riverains, ces emprunts étant<br />
remboursés par le produit <strong>de</strong> la taxe, à concurrence <strong>de</strong> la<br />
moitié <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te taxe par année. Il est espéré que c<strong>et</strong>te<br />
disposition perm<strong>et</strong>tra d’accélérer notablement le rythme<br />
d’insonorisation <strong>de</strong>s logements. Non seulement la taxe a été<br />
largement augmentée <strong>de</strong>puis 2002, avec <strong>de</strong>s taux unitaires<br />
multipliés par <strong>de</strong>ux, mais, également, les coefficients <strong>de</strong><br />
modulation ont été élargis, multipliés par dix pour les vols<br />
nocturnes (au lieu <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux auparavant), tandis que les<br />
coefficients correspondant aux catégories acoustiques ont<br />
été réévalués pour tenir compte <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnisation <strong>de</strong> la<br />
flotte. Pour la fixation du taux <strong>de</strong> base, lors <strong>de</strong> la loi <strong>de</strong><br />
finance rectificative <strong>de</strong> 2004, il a été estimé que les<br />
compagnies aériennes avaient fourni un effort financier<br />
suffisant <strong>et</strong> qu’on ne pouvait pas leur en <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r<br />
davantage pour le moment. En d’autres termes, les taux <strong>de</strong><br />
la taxe applicable aux compagnies aériennes restent fixés au<br />
montant maximum prévu à l’origine, c’est-à-dire 22 euros<br />
par vol pour Roissy-CDG <strong>et</strong> Orly, 8 euros par vol pour les<br />
autres aéroports. Cependant, pour tenir compte <strong>de</strong> la<br />
spécificité <strong>de</strong> certains aéroports, Strasbourg, dont les<br />
besoins sont inférieurs à ce que prévoyait la taxe, est passé<br />
<strong>de</strong> 8 à 0,5€ <strong>et</strong> Toulouse, dont les besoins sont importants,<br />
est passé <strong>de</strong> 8 à 22 €.<br />
Par ailleurs, le transfert <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong>s dossiers d’ai<strong>de</strong> aux<br />
gestionnaires d’aéroport, en lieu <strong>et</strong> place <strong>de</strong> l’A<strong>de</strong>me, s’est<br />
déroulé dans <strong>de</strong> bonnes conditions <strong>de</strong> collaboration entre<br />
l’A<strong>de</strong>me <strong>et</strong> les exploitants. Nous avons accordé beaucoup<br />
d’attention sur ce point qui cristallisait <strong>de</strong> nombreuses<br />
craintes <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s riverains. Sans oublier que le rôle <strong>de</strong><br />
la CCAR 1 a également été renforcé : celle-ci doit maintenant<br />
donner un avis conforme avant d’accor<strong>de</strong>r une insonorisation<br />
à un logement. Le rôle <strong>de</strong> l’exploitant <strong>de</strong> l’aéroport est<br />
d’assurer le secrétariat <strong>de</strong> la CCAR, d’instruire les dossiers,<br />
<strong>de</strong> verser les ai<strong>de</strong>s aux proj<strong>et</strong>s r<strong>et</strong>enus par la CCAR <strong>et</strong> son<br />
rôle se borne à celui là, c’est la CCAR qui déci<strong>de</strong> en <strong>de</strong>rnier<br />
lieu. La DGAC, pour sa part, assure un suivi annuel. Elle<br />
transm<strong>et</strong>tra annuellement au Conseil national du bruit (CNB)<br />
<strong>et</strong> au ministère <strong>de</strong> l’Écologie le nombre <strong>de</strong> dossiers traités <strong>et</strong><br />
le bilan annuel <strong>de</strong> la taxe.<br />
Des progrès sont encore attendus puisque, dans une<br />
prochaine phase, il est question d’améliorer encore la<br />
gestion opérationnelle du dispositif à tous les niveaux. On<br />
attend (début 2005) les résultats d’un groupe <strong>de</strong> travail qui<br />
a associé les exploitants d’aéroports — forts <strong>de</strong> leur année<br />
d’expérience <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong>s dossiers —, le ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie, l’Acnusa, le CNB, la direction générale <strong>de</strong><br />
l’urbanisme (DGUHC) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s experts techniques. Les<br />
conclusions porteront sur l’accompagnement <strong>de</strong>s riverains<br />
dans les démarches administratives, la simplification du<br />
dispositif — il faut reconnaître qu’il est actuellement<br />
particulièrement complexe. Autres objectifs : inciter à la<br />
réalisation d’opérations groupées, qui sont sources<br />
d’économies, fixer <strong>de</strong> nouvelles normes d’isolation,<br />
maîtriser les coûts. Une possibilité d’économies, qui n’a pas<br />
encore été arrêtée, pourrait consister à faire payer<br />
directement le diagnostic par un expert choisi par<br />
l’exploitant <strong>de</strong> l’aéroport, plutôt qu’un expert indépendant.<br />
Tout ceci participe d’une logique <strong>de</strong> recherche d’économies<br />
d’échelles <strong>et</strong> <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s travaux,<br />
disposition qui n’est pas prévue par le dispositif actuel. Il<br />
serait aussi question <strong>de</strong> renforcer davantage encore le rôle<br />
<strong>de</strong>s CCAR. Peut-être y aura-t-il encore d’autres phases <strong>de</strong><br />
réforme ; ce dispositif est en perpétuelle évolution <strong>de</strong>puis<br />
quelques années <strong>et</strong> les riverains, les élus <strong>et</strong> l’Acnusa sont<br />
invités à nous faire toutes les suggestions possibles pour en<br />
améliorer encore l’efficacité.<br />
1 CCAR : Commission consultative d’ai<strong>de</strong> aux riverains<br />
Les ai<strong>de</strong>s accordées par l'Agence régionale <strong>de</strong> l'environnement en Lorraine<br />
Céline Dunand (Agence régionale <strong>de</strong><br />
l’environnement en Lorraine)<br />
L’Agence régionale <strong>de</strong> l’environnement en Lorraine (AREL)<br />
est une association qui a été créée à l’initiative du conseil<br />
régional pour animer l’ensemble <strong>de</strong> la politique<br />
d’environnement sur la région <strong>et</strong> qui a été désignée<br />
opérateur technique <strong>de</strong> la Région pour le programme<br />
d’isolation acoustique <strong>de</strong>s habitations riveraines <strong>de</strong><br />
l’aéroport M<strong>et</strong>z-Nancy-Lorraine.<br />
L’aéroport M<strong>et</strong>z-Nancy-Lorraine (MNL), créé en 1991, est la<br />
propriété <strong>de</strong> la Région. C’est une infrastructure qui occupe<br />
une emprise <strong>de</strong> 230 hectares chevauchant le territoire <strong>de</strong><br />
cinq communes. L’aéroport est co-géré par les CCI <strong>de</strong><br />
Moselle <strong>et</strong> <strong>de</strong> Meurthe-<strong>et</strong>-Moselle, au travers du groupement<br />
intercellulaire <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong> Lorraine. La<br />
plateforme compte une seule piste d’une longueur <strong>de</strong> 2500<br />
m avec, à terme, une volonté <strong>de</strong> l’allonger à 3050 m. En<br />
2004, l’aéroport représentait 300 emplois directement liés à<br />
son activité. En 2003, l’aéroport MNL se situait au vingttroisième<br />
rang <strong>de</strong>s aéroports <strong>de</strong> province pour le trafic <strong>de</strong><br />
passagers, au neuvième rang <strong>de</strong>s aéroports <strong>de</strong> province en<br />
matière <strong>de</strong> vols charters <strong>et</strong> au cinquième rang <strong>de</strong>s aéroports<br />
<strong>de</strong> Province en matière <strong>de</strong> fr<strong>et</strong>. Néanmoins, suite à l’arrêt<br />
d’Air Lib, l’activité passagers a enregistré une baisse<br />
notable. Depuis 2000, le fr<strong>et</strong> a également connu une forte<br />
baisse d’activité, avec, tout d’abord, l’arrêt du fr<strong>et</strong> postal<br />
puis, le redéploiement <strong>de</strong> l’activité fr<strong>et</strong> <strong>de</strong> DHL (transfert du<br />
pré-tri vers Bruxelles, une seule liaison quotidienne<br />
conservée sur sept initialement).<br />
Historiquement, ce programme d’ai<strong>de</strong> à l’isolation<br />
acoustique <strong>de</strong>s habitations riveraines <strong>de</strong> l’aéroport est venu<br />
d’une démarche initiée à l’automne 2001 par une<br />
association <strong>de</strong> riverains, soutenue par <strong>de</strong>s élus. Principal<br />
motif <strong>de</strong> plainte, les vols <strong>de</strong> nuit liés à l’activité <strong>de</strong> DHL. À<br />
la suite d’une rencontre avec le prési<strong>de</strong>nt du conseil<br />
régional, les principes <strong>de</strong> l’intervention ont été actés (en<br />
juin 2002) <strong>et</strong> le règlement particulier adopté (en septembre<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 73
2002). Ce règlement est basé sur les modalités mises en<br />
œuvre par l’État dans les dix plus grands aéroports français.<br />
La règle d’antériorité appliquée consiste à ne faire<br />
bénéficier <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> que les habitations dont le permis <strong>de</strong><br />
construire a été délivré avant le 31 décembre 2001.<br />
Pourquoi c<strong>et</strong>te date ? Il se trouve qu’un plan provisoire<br />
d’exposition au bruit a été acté en juin 2001, d’où c<strong>et</strong>te<br />
date limite <strong>de</strong> fin 2001. Concernant le périmètre<br />
d’éligibilité, sont concernées toutes les communes dont au<br />
moins une partie du territoire urbanisé est traversé par la<br />
zone d’indice psophique 72. Dès l’instant qu’une partie <strong>de</strong> la<br />
commune est traversée par c<strong>et</strong>te zone, tout le territoire <strong>de</strong><br />
la commune est éligible à l’ai<strong>de</strong>.<br />
Le déroulement <strong>de</strong> la procédure est assez classique. Un<br />
diagnostic est obligatoirement effectué avant travaux. Huit<br />
bureaux d’étu<strong>de</strong>s se sont engagés sur le cahier <strong>de</strong>s charges<br />
mis en place par la Région : celui-ci exige un isolement<br />
minimum aux bruits extérieurs <strong>de</strong> 35 dB, <strong>et</strong> une amélioration<br />
<strong>de</strong> l’isolation acoustique d’au moins 5 dB. L’ai<strong>de</strong> allouée<br />
couvre 80% du montant du diagnostic acoustique <strong>et</strong> 80% <strong>de</strong>s<br />
travaux, pourcentage pouvant être porté à 90% pour les<br />
foyers non imposables <strong>et</strong> à 100% pour les personnes non<br />
imposables ayant une invalidité à plus <strong>de</strong> 80%. À noter<br />
qu’une p<strong>et</strong>ite dérogation a été pratiquée par rapport aux<br />
principes financiers habituels du conseil régional : les<br />
travaux peuvent être subventionnés sur présentation <strong>de</strong><br />
factures non acquittées, ce qui perm<strong>et</strong> aux riverains <strong>de</strong> ne<br />
pas avoir à avancer l’argent. Dans le logement individuel, le<br />
montant <strong>de</strong>s travaux est plafonné à 2897 euros par pièce<br />
principale <strong>et</strong> 1067 euros pour la cuisine. Dix communes sont<br />
concernées autour <strong>de</strong> l’aéroport. Compte tenu <strong>de</strong> l’intensité<br />
<strong>de</strong>s nuisances constatées, l’intervention régionale se portera<br />
prioritairement sur les cinq communes situées en zone <strong>de</strong><br />
priorité 1 (<strong>de</strong>ux zones <strong>de</strong> priorité, 1 <strong>et</strong> 2, ont été définies).<br />
À l’heure actuelle, en ce qui concerne le diagnostic<br />
acoustique, toutes les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s sont traitées. Pour les<br />
travaux, la zone <strong>de</strong> priorité 1 est traitée en premier, les<br />
autres dossiers étant mis en attente jusqu’à ce que la<br />
première vague <strong>de</strong> dossiers <strong>de</strong> priorité 1 soit instruite.<br />
L’agence régionale, qui est l’opérateur technique, joue un<br />
rôle d’accompagnement <strong>de</strong>s riverains dans les démarches <strong>de</strong><br />
dépôt <strong>de</strong> dossier <strong>et</strong> <strong>de</strong> contrôle <strong>de</strong> la recevabilité <strong>de</strong>s<br />
dossiers pour le diagnostic acoustique. L’AREL contrôle la<br />
recevabilité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> dossiers d’ai<strong>de</strong>. Le dossier est<br />
présenté une première fois en commission permanente du<br />
conseil régional pour décision sur l’ai<strong>de</strong> pour le diagnostic. À<br />
la suite du diagnostic, les entreprises produisent <strong>de</strong>s <strong>de</strong>vis<br />
détaillés pour tous les travaux conformément au rapport du<br />
diagnostic. Les dossiers sont présentés, pour avis, au comité<br />
<strong>de</strong> suivi (constitué <strong>de</strong>s dix maires <strong>de</strong>s communes concernées,<br />
d’une représentante du Groupement <strong>de</strong> défense <strong>de</strong>s<br />
riverains <strong>de</strong> l’aéroport, d’un représentant <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> la<br />
Région <strong>et</strong> du vice-prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> Région en charge <strong>de</strong>s<br />
infrastructures) puis, pour décision, à la Commission<br />
permanente du conseil régional. À l’issue <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière,<br />
la notification <strong>de</strong> la décision d’ai<strong>de</strong> aux travaux est adressée<br />
par courrier. Le délai <strong>de</strong> réalisation <strong>de</strong>s travaux est <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
ans. À la fin <strong>de</strong>s travaux, les factures sont r<strong>et</strong>ournées à<br />
l’AREL. Un contrôle <strong>de</strong> l’exécution effective <strong>de</strong>s travaux<br />
peut être effectué avant le versement <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>. Le Conseil<br />
Régional rembourse à hauteur <strong>de</strong> 80 % <strong>de</strong>s dépenses<br />
acceptées <strong>et</strong> dans la limite <strong>de</strong>s plafonds définis.<br />
Le programme d’isolation acoustique a réellement<br />
commencé début 2003. En eff<strong>et</strong>, après le vote du règlement<br />
d’intervention en septembre 2002, <strong>de</strong>s réunions publiques se<br />
sont tenues dans les communes. Potentiellement, sur la base<br />
du recensement <strong>de</strong> 1999, 865 habitations seraient<br />
concernées par le dispositif d’ai<strong>de</strong>. À l’heure actuelle, 468<br />
riverains ont entamé une démarche auprès <strong>de</strong> l’AREL. Il<br />
s’agit en majorité <strong>de</strong> logements individuels. Un total <strong>de</strong> 327<br />
diagnostics ont été réalisés <strong>et</strong>, pour 95 habitations, les<br />
travaux sont achevés. Soit un avancement qui s’établit, pour<br />
les <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s reçues, à 54% du programme <strong>et</strong>, pour les<br />
travaux réalisés, à 11%. Côté subventions, 2 947 000 euros<br />
ont été attribués par le conseil régional. C<strong>et</strong>te somme se<br />
répartit entre 305 diagnostics acoustiques remboursés<br />
(187 747 euros) <strong>et</strong> 199 dossiers présentés pour les travaux,<br />
pour une subvention <strong>de</strong> 2 759 929 euros. Les 95 habitations<br />
isolées acoustiquement représentent une subvention <strong>de</strong><br />
1 149 675 euros.<br />
Initialement, le programme <strong>de</strong>vait durer quatre ans environ<br />
<strong>et</strong> la Région avait estimé un budg<strong>et</strong> total <strong>de</strong> 6 à 7 millions<br />
d’euros. Le bilan après <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> programme montre que<br />
la moitié <strong>de</strong>s riverains ont entamé une démarche pour<br />
pouvoir bénéficier <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong>, mais que 95 habitations<br />
seulement ont été traitées. La totalité <strong>de</strong> l’opération<br />
<strong>de</strong>vrait donc durer plus <strong>de</strong> quatre ans. En revanche, les<br />
r<strong>et</strong>ours indiquent <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> satisfaction élevés chez les<br />
riverains pour qui les travaux sont terminés.<br />
Débat<br />
Fonds d’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation insuffisant à<br />
Toulouse<br />
Chantal Deman<strong>de</strong>r (Collectif contre les nuisances aériennes<br />
<strong>de</strong> l’agglomération toulousaine) : Il me semble qu’il y a une<br />
inégalité <strong>de</strong> traitement du citoyen <strong>de</strong>vant la loi. Mieux vaut<br />
habiter en Lorraine qu’à Toulouse. En eff<strong>et</strong>, l’Acnusa a<br />
estimé à 148 millions d’euros le budg<strong>et</strong> nécessaire pour<br />
insonoriser l’ensemble <strong>de</strong>s habitations incluses dans le PGS.<br />
En neuf ans, 22 millions d’euros seulement ont été<br />
dépensés. Deux millions ont été accordés c<strong>et</strong>te année. Le<br />
calcul est simple : au rythme actuel, il faudra 75 ans pour<br />
traiter l’actuel PGS <strong>de</strong> Toulouse-Blagnac. Dès lors, si la loi<br />
développée par la DGAC est bonne pour les aéroports<br />
parisiens, bonne pour l’ensemble <strong>de</strong>s aéroports <strong>de</strong> province,<br />
force est <strong>de</strong> constater qu’elle est catastrophique pour<br />
Toulouse. Quant à la solution <strong>de</strong> l’emprunt, ma voisine va<br />
vous dire tout le bien qu’elle pense <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te solution.<br />
Odile Salomé (Collectif contre les nuisances aériennes <strong>de</strong><br />
l’agglomération toulousaine) : Le conseil régional propose<br />
aujourd’hui d’abon<strong>de</strong>r à hauteur <strong>de</strong> 40 millions le fond<br />
d’ai<strong>de</strong> en remboursant c<strong>et</strong> emprunt à hauteur <strong>de</strong> la moitié<br />
<strong>de</strong> la taxe. Ils vont donc m<strong>et</strong>tre à disposition 40 millions<br />
d’euros alors qu’il en faudrait 140, sans compter que, en<br />
zone A du PEB, ils feraient mieux <strong>de</strong> proposer le rachat <strong>de</strong>s<br />
habitations, car les conditions <strong>de</strong> vie y sont inacceptables.<br />
Mieux vaudrait emprunter 140 millions <strong>et</strong> affecter toute la<br />
taxe au remboursement. Le problème, c’est que la taxe ne<br />
perm<strong>et</strong>tra jamais <strong>de</strong> rembourser <strong>de</strong> telles annuités. Ou alors<br />
il faudrait emprunter sur 100 ans, mais cela ne me semble<br />
pas raisonnable <strong>de</strong> laisser un tel ca<strong>de</strong>au à nos enfants. Si<br />
l’aéroport <strong>de</strong> Toulouse-Blagnac est trop nuisant au point que<br />
la taxe collectée ne suffit pas, d’un taux <strong>de</strong> base <strong>de</strong> 22<br />
euros, peut-être faut-il passer à 44, à 55, à 70 euros… à un<br />
taux qui reflète réellement le nombre <strong>de</strong> personnes qui<br />
subissent les nuisances. On ne <strong>de</strong>vrait pas avoir le droit <strong>de</strong><br />
survoler <strong>de</strong>s personnes dont les habitations ne sont pas<br />
insonorisées. L’insonorisation <strong>de</strong>vrait se faire préalablement<br />
PAGE 74<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
à l’extension <strong>de</strong>s PGS <strong>et</strong> <strong>de</strong>s PEB, <strong>et</strong> non pas a posteriori.<br />
Cela <strong>de</strong>vrait se faire au moment où les survols sont imposés<br />
aux gens.<br />
De la salle : Je voudrais corriger une erreur commise<br />
plusieurs fois aujourd’hui. En 2002, l’enveloppe dépensée<br />
pour l’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation a été <strong>de</strong> 34 millions d’euros, <strong>et</strong><br />
non <strong>de</strong> 17 millions, comme cela a été dit. L’A<strong>de</strong>me avait en<br />
eff<strong>et</strong> collecté 17 millions, mais le ministère <strong>de</strong><br />
l’Environnement avait abondé à hauteur <strong>de</strong> 17 millions<br />
également. Ainsi, vous considérez comme une avancée<br />
importante le fait <strong>de</strong> passer <strong>de</strong> 34 millions en 2002 à 30<br />
millions en 2003. Il est vrai que les 30 millions <strong>de</strong> 2003 sont<br />
bel <strong>et</strong> bien collectés, payés par les compagnies aériennes.<br />
On nous annonce 55 millions pour l’année suivante, mais,<br />
comme il n’y a plus <strong>de</strong> péréquation, les aéroports dont la<br />
population survolée est importante <strong>et</strong> dont le trafic est<br />
important, sans être contributifs, sont très pénalisés.<br />
La gestion <strong>de</strong>s nuisances <strong>et</strong> <strong>de</strong>s plaintes associées<br />
Lionel Lassagne (aéroport Lyon-Saint-Exupéry)<br />
Je livre ici un r<strong>et</strong>our d’expériences <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong>s<br />
nuisances à l’aéroport <strong>de</strong> Lyon. Il n’y a pas qu’en Belgique<br />
où le contexte institutionnel <strong>de</strong>s aéroports est compliqué. Il<br />
suffit pour s’en convaincre <strong>de</strong> considérer le cas <strong>de</strong> Lyon-<br />
Saint-Exupéry. Le gestionnaire, la Chambre <strong>de</strong> commerce <strong>et</strong><br />
d’industrie <strong>de</strong> Lyon, se r<strong>et</strong>rouve au milieu d’une multitu<strong>de</strong><br />
d’intérêts pas forcément convergents : l’État (l’autorité<br />
concédante, qui est représentée sur la plateforme), les<br />
compagnies, la clientèle <strong>de</strong>s compagnies, les associations <strong>de</strong><br />
riverains, les riverains, les élus locaux <strong>et</strong> les élus régionaux.<br />
La Commission consultative <strong>de</strong> l’environnement est donc le<br />
lieu où ces différents intérêts tentent <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s<br />
éléments <strong>de</strong> convergence. Pour ce faire, la CCI dispose <strong>de</strong><br />
trois modalités d’action privilégiées : l’information,<br />
l’explication <strong>et</strong> la concertation.<br />
En matière d’information, la Chambre <strong>de</strong> commerce publie<br />
un certain nombre <strong>de</strong> supports. Le principal d’entre eux est<br />
le journal Dialogue. À noter qu’il est prochainement prévu<br />
<strong>de</strong> réserver un droit <strong>de</strong> réponse aux associations, sous forme<br />
d’une tribune libre intégrée à Dialogue, où les riverains<br />
auront une totale liberté éditoriale. Au chapitre <strong>de</strong><br />
l’explication, il faut citer l’espace d’information dédié où un<br />
médiateur renseigne les riverains sur les niveaux <strong>sonores</strong> <strong>et</strong><br />
les trajectoires. Ce médiateur est rémunéré par la Chambre<br />
<strong>de</strong> commerce pour apporter <strong>de</strong>s réponses aux riverains à<br />
partir du système Constas, système <strong>de</strong> surveillance qui m<strong>et</strong><br />
en relation les trajectoires <strong>et</strong> les niveaux <strong>de</strong> bruit au<br />
voisinage <strong>de</strong> l’aéroport. Le vol<strong>et</strong> consacré à la concertation,<br />
contrairement à ce qui a pu être dit précé<strong>de</strong>mment, est<br />
d’abord d’ordre institutionnel, la CCE, <strong>et</strong> son appendice, le<br />
comité permanent, étant sous la responsabilité <strong>de</strong> l’État. Ce<br />
sont <strong>de</strong>s lieux pour lesquels <strong>de</strong>s efforts ont été consacrés,<br />
contrairement à une certaine époque où, hélas, <strong>de</strong>s<br />
problèmes s’étaient fait jour. La CCE est un lieu où l’on<br />
discute véritablement <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l’aéroport — en<br />
présentant, autant que faire se peut, les étu<strong>de</strong>s d’impact,<br />
notamment d’impact économique — <strong>et</strong> où l’on se m<strong>et</strong><br />
d’accord sur un certain nombre d’actions.<br />
Sur le plan <strong>de</strong>s mesures opérationnelles, la CCI a désormais<br />
la compétence <strong>de</strong> la gestion du dispositif d’ai<strong>de</strong> à<br />
l’insonorisation. Nous étions, il y an un an <strong>et</strong> <strong>de</strong>mi, le seul<br />
aéroport, avec ADP, à être favorables à c<strong>et</strong>te réforme <strong>de</strong><br />
l’ai<strong>de</strong> à l’insonorisation. Nous souhaitions en eff<strong>et</strong> gérer<br />
localement c<strong>et</strong>te ai<strong>de</strong> <strong>et</strong> n’étions pas totalement satisfaits<br />
du dispositif <strong>de</strong> l’A<strong>de</strong>me. Comme beaucoup d’aéroports,<br />
nous avons mis en place un service dédié qui, je crois, est<br />
déjà plus satisfaisant. Pour continuer à aller dans ce sens,<br />
un plan <strong>de</strong> charge a été adopté. En plus <strong>de</strong>s ai<strong>de</strong>s à<br />
l’insonorisation, <strong>de</strong>s restrictions opérationnelles sont<br />
appliquées, notamment la nuit pour les aéronefs les plus<br />
bruyants du chapitre 3, dans un premier temps <strong>de</strong> 23h30 à<br />
6h15 <strong>et</strong>, prochainement, <strong>de</strong> 22h00 à 6h00. Ce sont <strong>de</strong>s<br />
mesures parfois jugées minimalistes par les riverains, élus <strong>et</strong><br />
associations <strong>et</strong> je comprends ce point <strong>de</strong> vue. Pour nous<br />
professionnels, ce n’est pas toujours simple <strong>de</strong> faire<br />
approuver ces mesures par les compagnies <strong>et</strong> <strong>de</strong> les m<strong>et</strong>tre<br />
en application. Pour la précé<strong>de</strong>nte restriction, DHL ayant<br />
signifié son désaccord — « Si vous ne respectez pas les<br />
principes <strong>de</strong> l’approche équilibrée, nous attaquerons<br />
l’arrêté du ministre en justice » —, nous avions trouvé un<br />
compromis avec DHL, au terme duquel la compagnie <strong>de</strong> fr<strong>et</strong><br />
express avait procédé au remplacement <strong>de</strong> ses appareils par<br />
<strong>de</strong>s modèles moins bruyants. Des procédures <strong>de</strong> moindre<br />
bruit sont aussi en place : pentes <strong>de</strong> montées, interdiction<br />
<strong>de</strong>s approches à vue <strong>et</strong>, prochainement, volumes <strong>de</strong><br />
protection environnementale (VPE). L’angle d’ouverture du<br />
cône <strong>et</strong> son positionnement dans l’espace seront arrêtés<br />
dans le cadre d’un comité <strong>de</strong> suivi avec les associations <strong>de</strong><br />
riverains <strong>et</strong> les élus locaux.<br />
Le troisième axe <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s nuisances<br />
<strong>sonores</strong> à Lyon-Saint-Exupéry concerne la préservation <strong>de</strong><br />
l’avenir. Ce vol<strong>et</strong> important repose notamment sur un<br />
document essentiel : le PEB. Quoiqu’on en dise, ce<br />
document d’urbanisme évite in fine que <strong>de</strong>s populations<br />
nouvelles viennent s’installer, que <strong>de</strong>s élus accor<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s<br />
permis <strong>de</strong> construire dans <strong>de</strong>s zones fortement impactées<br />
par le bruit actuellement, mais aussi dans un horizon <strong>de</strong><br />
vingt ou trente ans. Malgré ses limites, c<strong>et</strong> exercice préserve<br />
le développement <strong>de</strong> l’infrastructure. Par ailleurs, nous<br />
avons pris l’engagement que la gêne sonore la nuit baisse.<br />
Cela correspond à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> évi<strong>de</strong>mment très forte <strong>de</strong> la<br />
part <strong>de</strong>s associations <strong>de</strong> riverains, <strong>et</strong> nous sommes bien<br />
conscients que l’avenir <strong>de</strong> l’aéroport Saint-Exupéry ne se<br />
fera pas entre 22h00 <strong>et</strong> 6h00. Ce ne serait ni réaliste en<br />
termes <strong>de</strong> clientèle, ni réaliste vis-à-vis du territoire. Des<br />
procédures, relevant tant <strong>de</strong> la navigation aérienne que <strong>de</strong><br />
l’étalement <strong>de</strong>s vols durant la journée, <strong>de</strong>vraient perm<strong>et</strong>tre<br />
<strong>de</strong> réduire c<strong>et</strong>te nuisance la nuit. Nous rapporterons<br />
régulièrement en CCE <strong>de</strong>s évolutions que nous aurons mises<br />
au point en concertation avec les acteurs locaux.<br />
Côté recherche “fondamentale”, nous sommes partenaires<br />
du proj<strong>et</strong> Teria, un proj<strong>et</strong> européen <strong>de</strong> recherche qui vise à<br />
m<strong>et</strong>tre au point <strong>de</strong>s fenêtres antibruit, appuyé sur le<br />
principe du contrôle actif du bruit, qui perm<strong>et</strong>trait d’ouvrir<br />
les fenêtres sans laisser rentrer le bruit. Qui plus est, nous<br />
avons encouragé la création d’un observatoire <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore, puisque, nous, Chambre <strong>de</strong><br />
commerce, ne disposons pas forcément <strong>de</strong>s ressources en<br />
interne pour engager <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s approfondies sur <strong>de</strong> tels<br />
suj<strong>et</strong>s. M. Vall<strong>et</strong>, qui est le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> c<strong>et</strong> observatoire,<br />
vous en fera un rapi<strong>de</strong> exposé dans un instant. Voici donc,<br />
brossé brièvement, les axes d’action <strong>de</strong> la gestion <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong> sur l’aéroport Lyon-Saint-Exupéry.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 75
Débat<br />
Zoom sur l’aéroport Lyon-Saint-Exupéry<br />
Michel Transy (Acenas) : Une remarque : M. Lassagne a<br />
oublié <strong>de</strong> dire que le PEB prévoit la création d’un <strong>de</strong>uxième<br />
aéroport plus à l’ouest, avec <strong>de</strong>ux pistes supplémentaires<br />
dans une zone qui est fortement urbanisée. Deuxièmement,<br />
pour ce qui concerne les vols <strong>de</strong> nuit vous n’avez pas<br />
accepté formellement d’engager les productions. Ce que<br />
nous avions <strong>de</strong>mandé, c’est ce qui se pratique à Roissy-CDG,<br />
à savoir <strong>de</strong> supprimer chaque créneau abandonné par une<br />
compagnie. On nous a répondu qu’il n’était pas possible, à<br />
Lyon, <strong>de</strong> modifier les créneaux. Pourquoi Roissy-CDG est-il le<br />
seul aéroport qui utilise le principe <strong>de</strong>s créneaux ? Pour<br />
finir, à combien <strong>de</strong> mouvements annuels en sommes-nous,<br />
alors que le système Constas n’est doté que <strong>de</strong> six stations<br />
<strong>de</strong> mesure ? Car, nous venons <strong>de</strong> voir qu’en Belgique, on est<br />
capable <strong>de</strong> déployer 16 stations <strong>de</strong> mesure pour 35 000<br />
mouvements. L’entrée en vigueur du VPE, c’est pour 2007 ?<br />
Lionel Lassagne : Je vais essayer <strong>de</strong> répondre à toutes ces<br />
questions une par une. D’ailleurs, vous en avez oublié une,<br />
qui a trait à la fameuse étu<strong>de</strong> sur la possibilité <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en<br />
place un fond <strong>de</strong> garantie ? Lorsque l’État nous a intégré à<br />
un groupe <strong>de</strong> travail dans le cadre <strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> à<br />
l’insonorisation, nous avons <strong>de</strong>mandé à la Caisse <strong>de</strong>s dépôts<br />
<strong>et</strong> consignations <strong>de</strong> réaliser une telle étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> faisabilité<br />
juridique. Dans notre vision, il conviendrait <strong>de</strong> laisser la<br />
possibilité à la Commission consultative d'ai<strong>de</strong> aux riverains<br />
(CCAR), d’une part, d’insonoriser, comme elle le fait<br />
aujourd’hui, <strong>et</strong>, d’autre part, <strong>de</strong> garantir, sous sa<br />
responsabilité, une éventuelle dépréciation du prix d’un<br />
logement situé dans le PGS. Il est regr<strong>et</strong>table que c<strong>et</strong>te idée<br />
neuve n’ait pas été r<strong>et</strong>enue. Il me semble que l’aéroport <strong>de</strong><br />
Nice, qui s’était intéressé à un dispositif similaire, adapté au<br />
cas <strong>de</strong> l’achat d’un logement, aurait aussi souhaité octroyer<br />
davantage <strong>de</strong> souplesse à la CCAR. Également, concernant le<br />
trait du PGS, il est dommage qu’on ne nous ait pas accordé,<br />
au moment <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réforme, plus <strong>de</strong> souplesse. Espérons<br />
que le dispositif pourra continuer à évoluer.<br />
Concernant les troisième <strong>et</strong> quatrième pistes, il est, en<br />
eff<strong>et</strong>, prévu une extension du doubl<strong>et</strong> <strong>de</strong> pistes <strong>de</strong><br />
l’aéroport Lyon-Saint-Exupéry, avec un troisième terminal <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>ux nouvelles pistes. Dès l’ouverture <strong>de</strong> l’aéroport, le choix<br />
du site avait pris ce schéma en compte. Le PEB tient compte<br />
<strong>de</strong> ces pistes qui n’existent pas encore. Malheureusement,<br />
vous avez raison sur ce point, le PEB n’a pas toujours été<br />
respecté : ces zones se sont urbanisées <strong>et</strong> <strong>de</strong>s permis <strong>de</strong><br />
construire ont été accordés dans les zones <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong>s<br />
futures pistes. Dans quelques années, au moment <strong>de</strong> prendre<br />
la décision d’une troisième piste, nous verrons quel<br />
traitement l’État souhaitera réserver aux riverains qui se<br />
sont installés dans ces futures zones <strong>de</strong> bruit. Pour l’instant,<br />
charge à nous <strong>de</strong> gérer la situation présente.<br />
J’en viens aux vols <strong>de</strong> nuit. À Roissy, qui compte 200 vols<br />
nocturnes, la non réaffectation <strong>de</strong>s créneaux est <strong>de</strong> mise. À<br />
l’époque <strong>de</strong> votre <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’appliquer c<strong>et</strong>te mesure, nous<br />
avions à Lyon une vingtaine <strong>de</strong> vols <strong>de</strong> nuit, c’est pourquoi<br />
nous avons préféré une approche plutôt “lyono-lyonnaise”<br />
du problème <strong>de</strong>s vols <strong>de</strong> nuit, <strong>et</strong> non l’application <strong>de</strong><br />
mesures adaptées à <strong>de</strong>s aéroports sans commune mesure<br />
avec Lyon-Saint-Exupéry. C’était votre position, ce n’était<br />
pas la nôtre. Nous avons trouvé un point <strong>de</strong> convergence qui<br />
consiste à s’engager dans un processus <strong>de</strong> baisse du niveau<br />
<strong>de</strong> la gêne la nuit. Et c<strong>et</strong> engagement se fera en<br />
concertation avec les associations, dans le cadre du comité<br />
<strong>de</strong> suivi. Nous vous ferons <strong>de</strong>s propositions, après avoir<br />
interrogé les compagnies pour savoir quels dispositifs<br />
crédibles l’on pourra proposer. Ensuite, vous aurez toute<br />
liberté <strong>de</strong> parole <strong>et</strong> vous jugerez <strong>de</strong>s avancées.<br />
Concernant le nombre <strong>de</strong> mouvements <strong>et</strong> le nombre <strong>de</strong><br />
capteurs <strong>de</strong> Constas, nous en avons déjà parlé <strong>et</strong> je ne suis<br />
pas certain que ce soit une règle inscrite dans le marbre que<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>voir forcément calquer le nombre <strong>de</strong> capteurs sur le<br />
nombre <strong>de</strong> mouvements. Nous en sommes actuellement à un<br />
peu moins <strong>de</strong> 120 000 mouvements annuels. Nous avons la<br />
chance <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r une station mobile, avec un ingénieur<br />
Inr<strong>et</strong>s qui a <strong>de</strong>s places à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Si, un jour, vous nous<br />
dites que cela vous semble absolument indispensable<br />
d’ajouter un ou <strong>de</strong>ux capteurs ici ou là <strong>et</strong> que<br />
l’observatoire, dans lequel vous siégez, se prononce<br />
également dans ce sens, nous achèterons d’autres capteurs.<br />
Personnellement, je ne vois pas trop ce que cela peut<br />
apporter <strong>et</strong> il ne faudrait pas que cela se fasse aux dépens<br />
<strong>de</strong> la station mobile.<br />
De la salle : Nous venons <strong>de</strong> voir qu’en Lorraine, dès<br />
l’instant qu’une commune est touchée, c’est toute la<br />
commune qui est insonorisée.<br />
Lionel Lassagne : Cela relève <strong>de</strong> la souplesse dont je parlais<br />
à l’instant. Il n’est pas incohérent que l’État ait voulu<br />
m<strong>et</strong>tre en place une règle. En CCAR, nous sommes<br />
régulièrement les témoins <strong>de</strong> c<strong>et</strong> arbitrage difficile<br />
concernant les habitations juste en <strong>de</strong>hors du PGS. Mais, à<br />
mon sens, le vrai débat <strong>de</strong>meure le montant <strong>de</strong> l’enveloppe<br />
financière. Il ne faut pas oublier que nous n’avons pas<br />
encore achevé d’insonoriser les logements se trouvant à<br />
l’intérieur du périmètre. Il en va <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s indices<br />
servant à l’élaboration du PGS : d’autres indices pourraient<br />
<strong>de</strong>ssiner une enveloppe bien plus étendue. Il me semble<br />
qu’il est préférable d’insonoriser en priorité les logements<br />
situés dans l’actuelle enveloppe, car, par définition, ils sont<br />
plus impactés que ceux qui se situent à 300 m du trait. Et<br />
pour vali<strong>de</strong>r ou non l’enveloppe du PGS, la station mobile<br />
nous perm<strong>et</strong>tra <strong>de</strong> savoir si les niveaux correspon<strong>de</strong>nt à<br />
l’indice calculé.<br />
Présentation <strong>de</strong> l'observatoire <strong>de</strong> l'environnement sonore <strong>de</strong> l'aéroport <strong>de</strong><br />
Lyon-Saint-Exupéry (O<strong>de</strong>sa)<br />
Michel Vall<strong>et</strong> (Aedifice)<br />
L’observatoire <strong>de</strong> l’environnement sonore <strong>de</strong> l’aéroport <strong>de</strong><br />
Lyon, constitué en milieu d’année 2004, est né d’une<br />
rencontre entre l’intérêt <strong>de</strong>s chercheurs pour les<br />
intéressantes données produites par le réseau <strong>de</strong> mesure<br />
Constas <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> la Chambre <strong>de</strong> commerce, qui souhaite<br />
développer la gestion <strong>de</strong> l’environnement sonore autour <strong>de</strong><br />
l’aéroport.<br />
À partir d’un programme 01dB, Constas produit <strong>de</strong>s données<br />
publiées dans un bull<strong>et</strong>in trimestriel. Y sont reproduits les<br />
niveaux L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L Amax pour tous les sites bénéficiant d’une<br />
station <strong>de</strong> mesure permanente, ainsi que <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> la<br />
station mobile, moyennant l’intervention d’un acousticien<br />
<strong>de</strong> l’Inr<strong>et</strong>s. Cela signifie que, déjà, l’on se préoccupe <strong>de</strong>s<br />
événements <strong>sonores</strong>, notamment la nuit. À mon sens,<br />
l’aéroport doit s’en tenir à la publication <strong>de</strong> ces données<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
utes. Il est préférable que ce ne soit pas l’aéroport qui<br />
interprète ces données <strong>et</strong> tienne le sempiternel discours du<br />
type : « le trafic a augmenté <strong>et</strong>, pourtant, les niveaux sont<br />
à peine plus élevés ou même à la baisse ». C’est plutôt le<br />
rôle d’une autorité indépendante <strong>et</strong> locale, comme O<strong>de</strong>sa <strong>et</strong><br />
son équipe <strong>de</strong> spécialistes compétents.<br />
Dans un premier temps, nous nous proposons <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s<br />
exploitations complémentaires <strong>de</strong>s données issues du réseau<br />
<strong>de</strong> mesure permanent Constas. Il s’agit d’encourager<br />
l’aéroport à produire <strong>de</strong>s publications techniques <strong>et</strong><br />
scientifiques <strong>et</strong>, si les moyens sont disponibles, <strong>de</strong> faire<br />
réaliser d’autres étu<strong>de</strong>s sur le bruit. Le choix <strong>de</strong> ces étu<strong>de</strong>s<br />
peut résulter d’une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> provenant <strong>de</strong> la CCI, <strong>de</strong>s<br />
riverains ou <strong>de</strong>s élus locaux. L’une <strong>de</strong> ces étu<strong>de</strong>s a été<br />
confirmée très récemment : elle consistera à étudier la<br />
correspondance entre les mesures réalisées <strong>et</strong> les périmètres<br />
<strong>de</strong>s zones <strong>de</strong> bruit établies par le calcul (par le service<br />
technique <strong>de</strong>s bases aériennes). D’autres étu<strong>de</strong>s pourront<br />
également s’intéresser à <strong>de</strong>s thèmes nouveaux gardant un<br />
intérêt local (santé, économie, dépréciation immobilière). Il<br />
y aurait avantage à réaliser une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la relation entre la<br />
dispersion <strong>de</strong>s altitu<strong>de</strong>s d’atterrissage <strong>et</strong> les niveaux <strong>de</strong><br />
bruit, afin <strong>de</strong> vérifier l’éventuel bénéfice d’un contrôle plus<br />
strict <strong>de</strong>s approches. Pour ce faire, il conviendra <strong>de</strong><br />
rapprocher les niveaux instantanés maximum L Amax avec les<br />
trajectoires <strong>et</strong> les hauteurs <strong>de</strong> vols, données fournies par la<br />
direction générale <strong>de</strong> l’aviation civile.<br />
Au groupe initial constitué <strong>de</strong> scientifiques sont venus<br />
s’ajouter les riverains <strong>et</strong> les élus intéressés pour prendre<br />
part à l’observatoire. Tout ceci se fait donc dans la<br />
transparence. Le conseil scientifique est composé d’un<br />
acousticien, d’économiste <strong>de</strong>s transports, d’une spécialiste<br />
<strong>de</strong> l’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> la documentation sur le bruit, d’un<br />
psychologue <strong>et</strong> d’un mé<strong>de</strong>cin. Acoucité, le CIDB, le CSTB,<br />
l’Inr<strong>et</strong>s, l’INSA <strong>et</strong> la Ville <strong>de</strong> Lyon sont donc représentés. Le<br />
Dr Ritter, <strong>de</strong> la Communauté urbaine <strong>de</strong> Lyon a proposé <strong>de</strong><br />
confier à un thésard en mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong> suivre les publications<br />
récentes en matière <strong>de</strong> relations entre bruit <strong>de</strong>s avions <strong>et</strong><br />
santé. Côté ressources, pour assurer l’indépendance <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te association, il conviendra <strong>de</strong> faire appel aux gran<strong>de</strong>s<br />
collectivités locales, à l’Acnusa, aux ministères, à la DGAC<br />
ou à la Commission européenne. Charge à nous <strong>de</strong> proposer<br />
<strong>de</strong>s choses intéressantes.<br />
Le programme d’étu<strong>de</strong>s pour la pério<strong>de</strong> 2005-2007 comprend<br />
donc une cartographie du cumul <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong><br />
subies par les riverains, une cartographie <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong><br />
bruit mesurés au sol, afin <strong>de</strong> vérifier la validité <strong>de</strong>s zones <strong>de</strong><br />
bruit du PGS, ainsi qu’une étu<strong>de</strong> préliminaire relative à la<br />
mise en place d’un observatoire <strong>de</strong>s coûts <strong>de</strong>s transactions<br />
immobilières (zones bruit – zones témoin).<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 77
Avertissement<br />
Atelier<br />
Programme européen Harmonoise : les métho<strong>de</strong>s<br />
harmonisées <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong> l'exposition au bruit<br />
dans le cadre <strong>de</strong> la directive européenne<br />
De mauvaises conditions techniques n’ont pas permis d’exploiter l’enregistrement audio réalisé durant c<strong>et</strong> atelier. A la date<br />
<strong>de</strong> ces Quatrièmes assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore, le proj<strong>et</strong> Harmonoise était arrivé son terme,<br />
techniquement tout du moins. En conséquence, le texte que nous proposons ci-<strong>de</strong>ssous est une synthèse du troisième rapport<br />
d’avancement rédigé par le CSTB fin septembre 2005. Nous présentons nos excuses aux différents intervenants <strong>de</strong> l’atelier du<br />
18 janvier 2005 : Michel Bérenger (LCPC), Francis Besnard (S<strong>et</strong>ra), Jérôme Defrance (CSTB), Pierre-Etienne Gautier (SNCF),<br />
Dick Van Maercke (CSTB) <strong>et</strong> Paul <strong>de</strong> Vos (AEE), ainsi qu’à Jacques Roland (CSTB), l’animateur <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier.<br />
Introduction<br />
La directive européenne relative à l’évaluation <strong>et</strong> à la<br />
gestion du bruit dans l’environnement (2002/49/CE), pour<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong>, donne la préférence au<br />
calcul plutôt qu’à la mesure, tout en reconnaissant le<br />
manque <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s unifiées, collectivement acceptées <strong>et</strong><br />
suffisamment fiables. Pour la première étape <strong>de</strong><br />
présentation <strong>de</strong> cartes stratégiques du bruit, en 2007, les<br />
Etats membres sont autorisés, sous certaines conditions, à<br />
utiliser leurs métho<strong>de</strong>s nationales respectives ou, à défaut,<br />
sont tenus d’appliquer <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s intérimaires prescrites<br />
par la Commission. Pour la secon<strong>de</strong> étape prévue en 2012, la<br />
directive <strong>de</strong>man<strong>de</strong> toutefois que soient développées <strong>et</strong><br />
appliquées <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision unifiées. Le proj<strong>et</strong><br />
Harmonoise vise la préparation <strong>et</strong> le développement <strong>de</strong><br />
telles métho<strong>de</strong>s harmonisées perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> répondre à ces<br />
exigences. En intégrant <strong>de</strong>s avancées scientifiques<br />
significatives <strong>et</strong> en dépassant les métho<strong>de</strong>s existantes en<br />
termes <strong>de</strong> précision, <strong>de</strong> fiabilité <strong>et</strong> <strong>de</strong> domaine<br />
d’application, le proj<strong>et</strong> vise une large acceptation <strong>de</strong>s<br />
nouvelles métho<strong>de</strong>s, autant par la communauté scientifique<br />
que par les utilisateurs futurs. Dans les limites budgétaires<br />
imposées, le proj<strong>et</strong> a restreint ses investigations aux bruits<br />
<strong>de</strong>s transports routiers <strong>et</strong> ferroviaires.<br />
Ce proj<strong>et</strong> est co-financé par la Commission Européenne,<br />
dans le cadre du 5ème PCRD <strong>et</strong> par la Mission bruit du<br />
ministère <strong>de</strong> l’Ecologie <strong>et</strong> du développement durable. Le<br />
pilotage <strong>de</strong> ce proj<strong>et</strong> a été confié à Paul De Vos. Initié il y a<br />
quatre ans environ, ce proj<strong>et</strong> est pratiquement achevé, sur<br />
le plan technique tout du moins.<br />
Composition du consortium Harmonoise<br />
Le proj<strong>et</strong> Harmonoise a été réalisé par un consortium <strong>de</strong> dixneuf<br />
partenaires venant <strong>de</strong> neuf pays <strong>de</strong> l’Union. Un<br />
vingtième partenaire (Sintef) a rejoint le consortium en<br />
cours <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> a participé à ces travaux sur financement<br />
national. La taille <strong>et</strong> la composition géographique du<br />
consortium ont permis un accès privilégié aux connaissances<br />
existantes en matière <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>s nationales. En<br />
particulier, le proj<strong>et</strong> a pu m<strong>et</strong>tre à profit les expériences<br />
récentes <strong>de</strong> ses partenaires français (NMPB) <strong>et</strong> scandinaves<br />
(Nord 2000) impliqués dans la mise au point <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
prévisionnelles dans leurs pays respectifs.<br />
Les vingt partenaires :<br />
• AEA Technology Rail BV (Pays-Bas)<br />
• N<strong>et</strong>herlands Organisation for Applied Scientific Research<br />
(TNO, Pays-Bas)<br />
• Sveriges Provnings-och Forskningsinstitut Aktiebolag<br />
(Suè<strong>de</strong>)<br />
• DGMR, Consulting Engineers (Pays-Bas)<br />
• DeBakom Gesellschaft für sensorische Messtechnik mbH<br />
(Allemagne)<br />
• Deutsche Bahn AG (Allemagne)<br />
• Deutsches Zentrum für Luft- und Raumfahrt e.V.<br />
(Allemagne)<br />
• M+P raadgeven<strong>de</strong> ingenieurs bv (Pays-Bas)<br />
• Transport Research Laboratory (Royaume-Uni)<br />
• SNCF (France)<br />
• CSTB (France)<br />
• Laboratoire Central <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées (LCPC, France)<br />
• Autostra<strong>de</strong> per l’Italia (Italie)<br />
• Agenzia Regionale per la Protezione Ambientale <strong>de</strong>lla<br />
Toscana (ARPAT, Italie)<br />
• Danish Electronics, Light and Acoustics (DELTA, Danemark)<br />
• Kil<strong>de</strong> Akustikk AS (Norvège)<br />
• VTI Statens väg- och transportforskningsinstitut (Suè<strong>de</strong>)<br />
• TUG Politechnica Gdansk (Pologne)<br />
• Joint Research <strong>Centre</strong>, Institute for Health and Consumer<br />
Protection (JRC, Italie)<br />
• Sintef group (Norvège)<br />
Harmonoise : <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s unifiées pour la cartographie stratégique<br />
Le proj<strong>et</strong> Harmonoise a produit <strong>de</strong> nouvelles métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
prédiction du bruit dû aux infrastructures routières <strong>et</strong><br />
ferroviaires. Les métho<strong>de</strong>s développées perm<strong>et</strong>tent<br />
l’expression <strong>de</strong>s niveaux d’exposition sous forme <strong>de</strong>s<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
indicateurs unifiés L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night , en accord avec l’application<br />
<strong>de</strong> la directive européenne 2002/49/CE, mais avec une plus<br />
gran<strong>de</strong> fiabilité <strong>et</strong> une plus gran<strong>de</strong> flexibilité que les<br />
métho<strong>de</strong>s intérimaires recommandées par la directive pour<br />
la mise en œuvre <strong>de</strong> la cartographie stratégique en 2007. Il<br />
est prévu que ces nouvelles métho<strong>de</strong>s servent <strong>de</strong> base aux<br />
métho<strong>de</strong>s harmonisées pour la production <strong>de</strong>s cartographies<br />
stratégiques par l’ensemble <strong>de</strong>s Etats membres <strong>de</strong> l’Union<br />
européenne à partir <strong>de</strong> 2012. Une avancée significative a été<br />
réalisée en basant les nouvelles métho<strong>de</strong>s sur une simulation<br />
physique <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s météorologiques sur la propagation du<br />
son. Sous réserve que les variations météorologiques locales<br />
entrent dans le cadre <strong>de</strong> la classification météorologique<br />
étudiée, les nouvelles métho<strong>de</strong>s se prêtent à une application<br />
uniformisée sous les différentes conditions climatologiques<br />
rencontrées à travers l’Europe.<br />
Les métho<strong>de</strong>s introduisent une séparation claire entre la<br />
<strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s émissions <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la<br />
propagation. La <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s émissions <strong>sonores</strong> fait<br />
intervenir <strong>de</strong>s mécanismes physiques spécifiques à chaque<br />
famille <strong>de</strong> sources alors que le module <strong>de</strong> propagation est<br />
générique <strong>et</strong> s’applique à tout type <strong>de</strong> source <strong>de</strong> bruit. Dans<br />
le proj<strong>et</strong> Harmonoise, ce principe a été mis en œuvre pour<br />
les seuls bruits <strong>de</strong>s infrastructures routières <strong>et</strong> ferroviaires,<br />
mais le modèle développé peut être étendu, en principe, à<br />
d’autres sources <strong>de</strong> bruit. En particulier, les résultats du<br />
proj<strong>et</strong> seront utilisés dans le proj<strong>et</strong> Imagine où leur<br />
application sera étendue au bruit d’origine industrielle <strong>et</strong><br />
aux bruits <strong>de</strong>s aéronefs.<br />
La propagation du bruit a été modélisée en utilisant <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s numériques dites « <strong>de</strong> référence », basées<br />
directement sur la <strong>de</strong>scription physique <strong>de</strong>s phénomènes.<br />
Les métho<strong>de</strong>s numériques ont permis <strong>de</strong> développer <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
vali<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s dites « d’ingénierie », plus rapi<strong>de</strong>s <strong>et</strong><br />
par conséquent plus adaptées à une utilisation pragmatique.<br />
Dans les <strong>de</strong>ux métho<strong>de</strong>s, la complexité du problème a été<br />
ramenée à une configuration <strong>de</strong> propagation « point-àpoint<br />
», entre un point source <strong>et</strong> un point récepteur sous <strong>de</strong>s<br />
conditions météorologiques typiques ou spécifiques. Le<br />
couplage <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> source avec l’un <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong><br />
propagation perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> prédire la variation <strong>de</strong>s niveaux<br />
<strong>sonores</strong> en fonction d’une classification <strong>de</strong>s situations<br />
météorologiques. La prévision <strong>de</strong>s indicateurs L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night<br />
prend en compte la variation <strong>de</strong>s conditions météorologiques<br />
sur une base annuelle.<br />
Pendant le proj<strong>et</strong>, <strong>de</strong>s données expérimentales ont été<br />
collectées sur différents sites à travers l’Europe. Ces<br />
mesures ont permis <strong>de</strong> démontrer la validité <strong>de</strong>s modèles<br />
prévisionnels <strong>et</strong>, en particulier <strong>de</strong> démontrer la faisabilité <strong>et</strong><br />
la pertinence d’une classification météorologique<br />
uniformisée. Comparé aux métho<strong>de</strong>s prévisionnelles<br />
existantes, le proj<strong>et</strong> Harmonoise a introduit non seulement<br />
une plus gran<strong>de</strong> harmonisation mais aussi une plus gran<strong>de</strong><br />
flexibilité. La précision <strong>de</strong>s nouvelles métho<strong>de</strong>s dépend en<br />
gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> la précision <strong>et</strong> du niveau <strong>de</strong> détail <strong>de</strong>s<br />
données d’entrée. Ainsi, le modèle proposé perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
moduler les efforts <strong>de</strong> modélisation en fonction du résultat<br />
visé. Une approche plus globale utilisant <strong>de</strong>s données<br />
d’entrée simplifiées peut être jugée suffisante pour une<br />
cartographie à gran<strong>de</strong> échelle. Une telle modélisation peut<br />
par ailleurs être complétée par une modélisation plus fine,<br />
plus adaptée à l’élaboration <strong>de</strong> plans d’action ou aux étu<strong>de</strong>s<br />
d’impact à l’échelle locale.<br />
Les objectifs du proj<strong>et</strong> Harmonoise<br />
Objectifs quantifiés<br />
Dans sa proposition, le proj<strong>et</strong> Harmonoise a affiché<br />
l’ambition d’atteindre les niveaux <strong>de</strong> précision suivants,<br />
exprimés sous forme d’écart quadratique moyen par rapport<br />
à <strong>de</strong>s moyennes en dB(A) :<br />
- inférieur à 1 dB(A) pour <strong>de</strong>s distances <strong>de</strong><br />
propagation jusqu’à 100 m <strong>et</strong> pour un récepteur en<br />
vue directe <strong>de</strong> la source ;<br />
- inférieur à 2 dB(A) pour <strong>de</strong>s distances <strong>de</strong><br />
propagation jusqu’à 1000 m au <strong>de</strong>ssus d’un terrain<br />
relativement plat <strong>et</strong> dégagé ;<br />
- inférieur à 5 dB(A) pour <strong>de</strong>s distances <strong>de</strong><br />
propagation jusqu’à 1000 m au <strong>de</strong>ssus d’un terrain<br />
acci<strong>de</strong>nté ;<br />
- inférieur à 5 dB(A) en milieu urbain, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la<br />
première ligne <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s exposées.<br />
Plutôt que <strong>de</strong> privilégier la facilité d’emploi ou la limitation<br />
du temps <strong>de</strong> calcul, dans les critères r<strong>et</strong>enus pour la mise au<br />
point <strong>de</strong>s nouvelles métho<strong>de</strong>s, l’équipe a délibérément<br />
privilégié la généralité, la flexibilité <strong>et</strong> l’élargissement du<br />
domaine d’application par rapport aux métho<strong>de</strong>s existantes.<br />
De fait, eu égard aux évolutions <strong>de</strong> la puissance <strong>de</strong> calcul <strong>et</strong><br />
à l’ergonomie croissante <strong>de</strong>s logiciels d’application, suivant<br />
le principe que « qui peut le plus peut le moins », les<br />
modèles ont été développés en prenant en compte autant<br />
que possible la complexité <strong>de</strong>s problèmes traités <strong>et</strong> en se<br />
basant sur les progrès scientifiques les plus récents <strong>et</strong> les<br />
plus significatifs dans le domaine. Parallèlement, <strong>de</strong>s<br />
conseils ont été ébauchés pour la mise en œuvre<br />
opérationnelle <strong>de</strong>s nouvelles métho<strong>de</strong>s, se basant sur la<br />
réduction <strong>de</strong>s données d’entrée nécessaires <strong>et</strong>, le cas<br />
échéant, sur l’utilisation <strong>de</strong> valeurs par défaut. Des<br />
améliorations <strong>et</strong> principes <strong>de</strong> modélisation menant à une<br />
performance accrue ont été i<strong>de</strong>ntifiés tout au long du<br />
proj<strong>et</strong>.<br />
Vers une plus gran<strong>de</strong> précision<br />
La précision <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> proposée est en gran<strong>de</strong> partie<br />
subordonnée à la qualité <strong>de</strong>s données d’entrée : l’utilisation<br />
<strong>de</strong> valeurs moyennes ou, le cas échant, <strong>de</strong> valeurs par<br />
défaut, affecte la précision <strong>de</strong>s prédictions. Par le passé,<br />
différentes métho<strong>de</strong>s ont été préconisées en fonction <strong>de</strong> la<br />
précision visée. Le proj<strong>et</strong> Harmonoise vise une<br />
uniformisation <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s en déplaçant le choix du niveau<br />
<strong>de</strong> la précision <strong>de</strong>s entrants, laissant ainsi aux utilisateurs<br />
une plus gran<strong>de</strong> souplesse pour trouver un compromis<br />
acceptable entre précision visée <strong>et</strong> efforts requis pour la<br />
mise au point du modèle <strong>de</strong> données.<br />
L’équipe proj<strong>et</strong> estime qu’il est nécessaire <strong>de</strong> développer<br />
<strong>de</strong>s recommandations <strong>et</strong> <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s pratiques afin d’adapter<br />
le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> précision <strong>de</strong>s données d’entrée à l’objectif visé<br />
ou au cadre réglementaire dans lequel s’effectue la<br />
modélisation. Des autorités compétentes (au plan local,<br />
régional, national ou européen) peuvent par exemple viser<br />
un niveau <strong>de</strong> précision plus ambitieux pour une étu<strong>de</strong><br />
d’impact (où les niveaux <strong>sonores</strong> calculés ont un impact<br />
significatif sur le prix <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong> protection<br />
préconisées) que pour l’élaboration d’une cartographie<br />
stratégique (où, étant donné le caractère global <strong>de</strong><br />
l’évaluation, une précision plus faible peut être admise sur<br />
<strong>de</strong>s résultats individuels).<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 79
Par exemple, concernant le revêtement <strong>de</strong> chaussée, le<br />
modèle développé par le proj<strong>et</strong> Harmonoise introduit un<br />
facteur correctif perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> prendre en compte l’eff<strong>et</strong><br />
du revêtement sur le bruit <strong>de</strong> roulement. Un certain nombre<br />
<strong>de</strong> revêtements classiques ont été caractérisés pendant le<br />
proj<strong>et</strong>, mais il est peu probable que ces données<br />
correspon<strong>de</strong>nt exactement à une situation donnée. Afin<br />
d’atteindre le <strong>de</strong>gré maximal <strong>de</strong> précision, le proj<strong>et</strong> propose<br />
plusieurs techniques <strong>de</strong> mesures in situ perm<strong>et</strong>tant<br />
d’évaluer le terme correctif approprié à introduire dans la<br />
modélisation. Dans le cadre d’une cartographie stratégique<br />
visant à estimer l’exposition au bruit sur un échantillon<br />
suffisamment grand <strong>de</strong> la population, il peut être suffisant<br />
<strong>de</strong> caractériser les revêtements <strong>de</strong> chaussée en moyenne sur<br />
l’ensemble du réseau routier concerné. Pour la préparation<br />
<strong>de</strong> plans d’action, il peut être en revanche plus approprié<br />
d’évaluer les caractéristiques exactes <strong>de</strong> chaque section <strong>de</strong><br />
voie (par exemple en utilisant la métho<strong>de</strong> CPX, ou close<br />
proximity m<strong>et</strong>hod) afin <strong>de</strong> quantifier plus précisément les<br />
objectifs à atteindre, <strong>de</strong> comparer <strong>de</strong>s solutions<br />
alternatives, d’estimer le coût <strong>de</strong> l’opération ou d’en<br />
optimiser le rapport coût/bénéfices.<br />
Précision <strong>et</strong> reproductibilité<br />
L’ambition d’une plus gran<strong>de</strong> précision a été le seul critère<br />
r<strong>et</strong>enu par la Commission comme indicateur du succès du<br />
proj<strong>et</strong>. Dans ce contexte, le mot « précision » est à prendre<br />
au sens scientifique du terme, soit le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> conformité<br />
d’une valeur calculée par rapport à sa valeur « vraie ».<br />
C<strong>et</strong>te préférence <strong>de</strong> la Commission pour une approche<br />
« scientifique » du problème contraste avec les<br />
préoccupations <strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong>s autorités compétentes<br />
interrogés au cours du proj<strong>et</strong>. Pour ces <strong>de</strong>rniers, la<br />
cohérence <strong>de</strong>s résultats produits prime sur leur exactitu<strong>de</strong>,<br />
la reproductibilité <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s l’emporte sur leur<br />
précision. Même si les nouveaux résultats sont, a priori, plus<br />
en accord avec la réalité physique, un grand nombre d’entre<br />
eux ont exprimé la crainte que les nouvelles métho<strong>de</strong>s<br />
donnent <strong>de</strong>s résultats différents <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s existantes.<br />
Prise en compte <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s météorologiques<br />
Les eff<strong>et</strong>s météorologiques ont une influence primordiale sur<br />
la propagation du son <strong>et</strong> viennent en secon<strong>de</strong> position, à<br />
quasi égalité avec la divergence géométrique, dans la<br />
propagation <strong>de</strong> l’énergie sonore à gran<strong>de</strong> distance. Les<br />
indicateurs harmonisés L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night tels qu’introduits dans la<br />
directive sont définis à partir <strong>de</strong>s moyennes annuelles <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>sonores</strong> équivalents sur trois pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la journée<br />
(« jour », « soirée » <strong>et</strong> « nuit »). Ce découpage basé sur le<br />
cycle typique <strong>de</strong>s activités humaines ne correspond pas<br />
forcément à <strong>de</strong>s conditions homogènes d’émission <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
propagation du bruit. De fait, pour une même pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
journée, les conditions <strong>de</strong> propagation, fonction du vent, <strong>de</strong><br />
la température <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’ensoleillement, peuvent varier <strong>de</strong><br />
manière importante d’une région d’Europe à une autre. Les<br />
métho<strong>de</strong>s existantes ne décrivent que peu, ou pas, ces<br />
variations <strong>et</strong> recourent alors à <strong>de</strong>s termes correctifs ad hoc<br />
afin <strong>de</strong> corriger les eff<strong>et</strong>s locaux. Pour une adaptation plus<br />
aisée aux spécificités climatologiques locales, la nouvelle<br />
métho<strong>de</strong> accor<strong>de</strong> une importance majeure à une prise en<br />
compte plus « physique » <strong>de</strong>s phénomènes météorologiques.<br />
A plus courte distance, les eff<strong>et</strong>s météorologiques sont<br />
moins prononcés <strong>et</strong> l’atténuation est en majeure partie<br />
déterminée par les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> sol, que les modèles<br />
analytiques <strong>et</strong> expérimentaux existants décrivent avec une<br />
gran<strong>de</strong> précision. L’absorption dans l’air, qui, aux<br />
fréquences élevées, atténue <strong>de</strong> façon non négligeable les<br />
sons, fait l’obj<strong>et</strong> d’une norme internationale (ISO 9613). Le<br />
proj<strong>et</strong> Harmonoise n’a pas eu l’intention d’améliorer ces<br />
modèles.<br />
Les phénomènes <strong>de</strong> diffraction par les écrans ont également<br />
reçu une attention particulière. Les interactions entre la<br />
diffraction, les réflexions sur le sol <strong>et</strong> la stratification<br />
atmosphérique sont modélisées par une combinaison <strong>de</strong><br />
différents modèles partiels. Le couplage <strong>de</strong>s modèles étant<br />
basé, une fois <strong>de</strong> plus, sur les lois physiques.<br />
Modélisation séparée <strong>de</strong>s émissions <strong>et</strong> <strong>de</strong> la propagation<br />
La politique <strong>de</strong> lutte contre le bruit <strong>de</strong> l’Union européenne<br />
se base sur <strong>de</strong>ux approches complémentaires : d’une part,<br />
l’évaluation <strong>de</strong> la situation existante <strong>et</strong> une forte incitation<br />
<strong>de</strong>s autorités locales à m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>de</strong>s plans d’action ;<br />
d’autre part, un contrôle plus strict <strong>et</strong> une limitation plus<br />
sévère <strong>de</strong>s valeurs d’émission pour un nombre croissant <strong>de</strong><br />
sources <strong>de</strong> bruit. En proposant un modèle générique basé sur<br />
une séparation claire entre l’émission <strong>et</strong> la propagation, le<br />
proj<strong>et</strong> Harmonoise perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> clarifier les liens entre ces<br />
approches <strong>et</strong> d’évaluer plus finement l’efficacité <strong>de</strong>s<br />
mesures prises à différents niveaux. De nouveaux modèles<br />
<strong>de</strong> propagation ont été développés <strong>et</strong> validés dans le cadre<br />
<strong>de</strong>s bruits d’origine routière <strong>et</strong> ferroviaire. La nature<br />
générique <strong>de</strong> ces métho<strong>de</strong>s perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> les étendre aisément<br />
aux autres sources <strong>de</strong> bruit dans l’environnement. Le proj<strong>et</strong><br />
Imagine 1 , présenté au 6 ème PCRD, vise l’extension <strong>de</strong> ces<br />
métho<strong>de</strong>s aux spécificités du bruit <strong>de</strong>s avions <strong>et</strong> du bruit <strong>de</strong>s<br />
activités industrielles. Dans le principe, il s’agit <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre<br />
en adéquation <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> propagation pour <strong>de</strong>s sources<br />
plus élevées <strong>et</strong> <strong>de</strong> s’assurer <strong>de</strong> la compatibilité <strong>de</strong>s modèles<br />
<strong>de</strong>s sources concernées avec le modèle générique développé<br />
par le proj<strong>et</strong> Harmonoise.<br />
1 www.imagine-project.org<br />
Modélisation physique <strong>de</strong> la propagation du<br />
son<br />
Le proj<strong>et</strong> Harmonoise a cherché en priorité l’amélioration<br />
<strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la propagation en milieu dégagé.<br />
L’équipe proj<strong>et</strong> a jugé que, dans les limites <strong>de</strong> temps <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
budg<strong>et</strong>, il était irréaliste <strong>de</strong> produire puis <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r une<br />
métho<strong>de</strong> prévisionnelle spécifiquement applicable aux<br />
milieux urbains <strong>de</strong>nses <strong>et</strong> complexes <strong>et</strong> ayant une précision<br />
aussi élevée qu’en propagation libre. Toutefois, les modèles<br />
développés étant basés sur une <strong>de</strong>scription physique <strong>de</strong> la<br />
propagation, rien ne s’oppose à leur application dans <strong>de</strong>s<br />
situations complexes. C<strong>et</strong>te extension <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> reste<br />
toutefois subordonnée à une caractérisation adéquate <strong>de</strong>s<br />
profils météorologiques dans <strong>de</strong> telles situations complexes.<br />
D’autres phénomènes, tels que la turbulence atmosphérique<br />
ou la diffusion par les arbres, ont une influence secondaire<br />
sur la propagation du son. Ces phénomènes n’ont pas r<strong>et</strong>enu<br />
l’attention du proj<strong>et</strong> présent mais peuvent sans gran<strong>de</strong><br />
difficulté être intégrés dans le schéma proposé.<br />
Modélisation physique <strong>de</strong>s émissions <strong>sonores</strong><br />
La majorité <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s nationales sont basées sur une<br />
caractérisation globale <strong>de</strong>s émissions <strong>sonores</strong>, résultant le<br />
plus souvent <strong>de</strong> larges campagnes <strong>de</strong> mesure. Ces résultats<br />
empiriques sont difficilement transposables à d’autres<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
conditions que celles ayant permis leur obtention. Résultat :<br />
<strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> référence incompatibles qui empêchent la<br />
comparaison <strong>et</strong> l’uniformisation <strong>de</strong>s différents modèles<br />
nationaux. Qui plus est, en cas d’évolution technologique<br />
majeure, l’ensemble <strong>de</strong> la procédure doit être révisée.<br />
Dans le proj<strong>et</strong> Harmonoise, chaque source est découpée en<br />
sources élémentaires ayant chacune un mécanisme propre<br />
<strong>de</strong> génération <strong>de</strong> bruit. Dans la perspective <strong>de</strong> la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong>s plans d’actions, c<strong>et</strong>te approche offre un avantage<br />
indéniable : il sera alors possible d’évaluer, à moindre<br />
effort, les eff<strong>et</strong>s <strong>et</strong> l’efficacité <strong>de</strong>s différentes actions<br />
envisageables <strong>et</strong> ceci séparément pour chaque composant<br />
entrant dans la génération <strong>et</strong> la propagation du bruit, sans<br />
pour autant négliger les interactions complexes entre les<br />
composants.<br />
Considérons l’exemple du bruit d’origine ferroviaire. Il se<br />
décompose en bruit <strong>de</strong> roulement, bruit <strong>de</strong> traction <strong>et</strong> bruit<br />
d’origine aérodynamique. Une maintenance contrôlée <strong>de</strong>s<br />
rails peut perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> réduire le bruit <strong>de</strong> roulement, qui<br />
est déterminé par la rugosité combinée du rail <strong>et</strong> <strong>de</strong>s roues.<br />
Mais ceci ne vaut que pour les roues relativement lisses.<br />
D’où la difficulté à évaluer l’efficacité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te mesure<br />
particulière sans prendre en compte les autres paramètres<br />
du problème. Le modèle <strong>de</strong> sources proposé par le proj<strong>et</strong><br />
Harmonoise rend c<strong>et</strong>te évaluation aisée <strong>et</strong> rapi<strong>de</strong>, non<br />
seulement pour un train particulier (ce que l’on aurait pu<br />
obtenir à moindre coût par une mesure acoustique<br />
spécifique) mais pour l’ensemble du trafic sur la ligne<br />
concernée. Le modèle perm<strong>et</strong> également l’évaluation <strong>de</strong>s<br />
actions conjointes telles que la maintenance du rail <strong>et</strong> le<br />
remplacement <strong>de</strong> certains types <strong>de</strong> roues. A partir d’une<br />
telle évaluation, il <strong>de</strong>vient possible d’optimiser <strong>de</strong>s plans<br />
d’actions en termes <strong>de</strong> coûts (investissement global) <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
bénéfices (réduction du nombre <strong>de</strong> personnes gênées).<br />
Principes <strong>de</strong> fonctionnement <strong>de</strong> Harmonoise<br />
Par le passé, plusieurs métho<strong>de</strong>s ont été qualifiées<br />
« d’intégrées », dans le sens où elles étaient basées sur un<br />
p<strong>et</strong>it nombre <strong>de</strong> formules simplifiées, obtenues par<br />
intégration explicite <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s phénomènes étudiés.<br />
Ces métho<strong>de</strong>s visaient avant tout une exploitation<br />
simplifiée, masquant la complexité réelle <strong>de</strong>s problèmes, se<br />
prêtant bien aux calculs manuels ou sur calculatrice. Dans le<br />
contexte du proj<strong>et</strong> Harmonoise, le terme « modèle intégré »<br />
désigne, au contraire, une approche modulaire. La métho<strong>de</strong><br />
d’ingénierie intègre la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la source sous forme<br />
d’un modèle indépendant, qu’il partage avec les métho<strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong> référence. Comme dans les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence, la<br />
propagation est décrite dans un module indépendant.<br />
Deux modèles <strong>de</strong> propagation<br />
En principe, les modèles <strong>de</strong> référence <strong>et</strong> le modèle<br />
d’ingénierie partagent la même <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la source ; <strong>de</strong><br />
légères différences étant liées à la prise en compte <strong>de</strong>s<br />
conditions météorologiques. La principale différence entre<br />
les <strong>de</strong>ux approches se situe au niveau <strong>de</strong> la modélisation <strong>de</strong>s<br />
eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> propagation. La métho<strong>de</strong> d’ingénierie vise un outil<br />
opérationnel pour l’utilisation à gran<strong>de</strong> échelle <strong>et</strong> favorise<br />
<strong>de</strong> ce fait <strong>de</strong>s calculs rapi<strong>de</strong>s au détriment d’une incertitu<strong>de</strong><br />
plus gran<strong>de</strong> ; les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence fournissent un outil<br />
complexe <strong>de</strong> haute précision, à l’usage d’experts,<br />
perm<strong>et</strong>tant une calibration <strong>et</strong> une validation rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s approchées, éliminant <strong>de</strong> ce fait le recours<br />
systématique à <strong>de</strong> larges (<strong>et</strong> coûteuses) campagnes <strong>de</strong><br />
mesure. La campagne <strong>de</strong> mesures effectuée dans le cadre du<br />
proj<strong>et</strong> Harmonoise visait en premier lieu la validation<br />
expérimentale <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s numériques. A son tour, le<br />
modèle <strong>de</strong> propagation dans la métho<strong>de</strong> d’ingénierie a été<br />
développé <strong>et</strong> validé en prenant en compte les avancées <strong>et</strong><br />
les résultats <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence. Les incertitu<strong>de</strong>s<br />
dues aux approximations ont été évaluées systématiquement<br />
par comparaison avec les résultats numériques.<br />
Les principaux modules du modèle<br />
d’ingénierie :<br />
• <strong>de</strong>scription d’un véhicule isolé : distribution spectrale du<br />
niveau <strong>de</strong> puissance <strong>et</strong> directivité en fonction <strong>de</strong>s<br />
paramètres <strong>de</strong> fonctionnement ;<br />
• transformation d’un flot <strong>de</strong> véhicules en une ligne <strong>de</strong><br />
source équivalente ; le niveau <strong>de</strong> puissance équivalent prend<br />
en compte, <strong>de</strong> manière statistique, la composition du flot <strong>et</strong><br />
la variabilité <strong>de</strong>s paramètres <strong>de</strong> fonctionnement ;<br />
• recherche <strong>de</strong>s chemins <strong>de</strong> propagation entre l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s éléments source <strong>et</strong> un récepteur donné, y compris <strong>de</strong>s<br />
chemins réfléchis sur les obstacles verticaux (murs, écrans<br />
<strong>et</strong> bâtiments) ;<br />
• modélisation <strong>de</strong> la propagation dans un chemin <strong>de</strong><br />
propagation en prenant en compte la diffraction (multiple)<br />
par les obstacles (écrans, bâtiments, terrain naturel) <strong>et</strong> les<br />
réflexions sur le sol sous <strong>de</strong>s conditions météorologiques<br />
représentatives ;<br />
• classification <strong>de</strong>s conditions météorologiques dans un<br />
nombre limité <strong>de</strong> situations typiques <strong>et</strong> représentatives ;<br />
• calcul <strong>de</strong>s indicateurs L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night , effectué à partir <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>sonores</strong> partiels obtenus sous différentes conditions<br />
météorologiques représentatives, pondérés suivant leur<br />
fréquence d’occurrence sur une année « moyenne » en<br />
termes climatologiques.<br />
Les résultats obtenus par le proj<strong>et</strong> Harmonoise<br />
Des métho<strong>de</strong>s applicables aux plans d’actions<br />
Le modèle générique décrit l’émission sonore <strong>de</strong>s véhicules<br />
routiers ou ferroviaires sous forme d’un nombre limité <strong>de</strong><br />
sources ponctuelles. Chaque source élémentaire peut être<br />
définie à partir <strong>de</strong>s caractéristiques <strong>de</strong> l’infrastructure (par<br />
exemple, le revêtement <strong>de</strong> chaussée), <strong>de</strong>s caractéristiques<br />
du véhicule (par exemple, le nombre d’essieux <strong>et</strong> le type <strong>de</strong><br />
pneus) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> fonctionnement (par exemple :<br />
la vitesse, l’accélération, le rapport <strong>de</strong> boîte). Chaque<br />
source ponctuelle, caractérisée par un spectre <strong>de</strong> puissance<br />
acoustique en tiers d’octaves <strong>et</strong> par une directivité<br />
spécifique, représente un mécanisme particulier <strong>de</strong><br />
génération <strong>de</strong> bruit. Par exemple, dans l’émission sonore<br />
d’un véhicule routier, bruit <strong>de</strong> traction <strong>et</strong> bruit <strong>de</strong><br />
roulement sont considérés distinctement. Une telle<br />
<strong>de</strong>scription fine présente l’avantage d’une adaptation plus<br />
aisée du modèle aux différences régionales <strong>et</strong> aux évolutions<br />
futures du parc roulant. De surcroît, elle perm<strong>et</strong> une<br />
estimation plus réaliste <strong>et</strong> plus efficace <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong>s<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 81
différentes mesures <strong>de</strong> réduction du bruit à l’émission (par<br />
exemple : la réduction <strong>de</strong> la vitesse, la mise en œuvre d’un<br />
revêtement <strong>de</strong> chaussée silencieux ou l’introduction <strong>de</strong><br />
nouveaux types <strong>de</strong> pneumatiques). Un tel pouvoir <strong>de</strong><br />
prévision est particulièrement utile lorsque l’efficacité <strong>de</strong><br />
telles mesures peut varier fortement d’une situation à une<br />
autre.<br />
Des métho<strong>de</strong>s validées<br />
Le proj<strong>et</strong> a passé en revue la quasi-totalité <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
scientifiques existantes <strong>de</strong> simulation <strong>de</strong> la propagation du<br />
son. Après avoir évalué leurs domaines d’application <strong>et</strong> leurs<br />
performances respectives, un ensemble cohérent <strong>de</strong><br />
« métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence » fiables pour la prévision <strong>de</strong>s<br />
indicateurs L <strong>de</strong>n <strong>et</strong> L night a été r<strong>et</strong>enu. L’utilisation <strong>de</strong> telles<br />
métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong>s efforts <strong>de</strong> calcul importants, leur<br />
application a toutefois été limitée à <strong>de</strong>s situations<br />
relativement simples. Les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence ont<br />
largement contribué à la mise au point <strong>et</strong> à la validation <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s simplifiées. Des résultats expérimentaux ont été<br />
collectés pendant plusieurs semaines sur différents sites en<br />
Europe. Une base <strong>de</strong> données perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> stocker<br />
conjointement les résultats <strong>de</strong>s mesures acoustiques <strong>et</strong> les<br />
données météorologiques a été développée spécifiquement<br />
pour les besoins du proj<strong>et</strong>. Il est prévu que c<strong>et</strong>te base <strong>de</strong><br />
données puisse être complétée <strong>et</strong> exploitée au-<strong>de</strong>là du<br />
proj<strong>et</strong>. Les résultats <strong>de</strong>s campagnes <strong>de</strong> mesures ont permis<br />
la validation expérimentale tant <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong> référence<br />
que du modèle d’ingénierie. En règle générale, une bonne<br />
corrélation a été observée entre les résultats <strong>de</strong>s simulations<br />
<strong>et</strong> les mesures. L’analyse <strong>de</strong>s quelques cas <strong>de</strong> divergence a<br />
permis <strong>de</strong> formuler <strong>de</strong>s recommandations tant pour la mise<br />
au point <strong>de</strong> techniques <strong>de</strong> mesure adaptées que pour<br />
l’amélioration <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s prévisionnelles.<br />
Dissémination <strong>et</strong> acceptation<br />
Tout au long du proj<strong>et</strong>, une communication intensive a été<br />
menée à <strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s principaux intéressés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
représentants <strong>de</strong>s utilisateurs potentiels. La communauté<br />
scientifique a été informée à l’occasion <strong>de</strong> conférences <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> séminaires, en particulier par l’organisation <strong>de</strong> sessions<br />
dédiées à l’occasion <strong>de</strong>s congrès EuroNoise (Naples,<br />
septembre 2003) <strong>et</strong> InterNoise (Prague, août 2004) <strong>et</strong> par la<br />
tenue d’une conférence dédiée à la fin du proj<strong>et</strong> (Rho<strong>de</strong>s,<br />
octobre 2004). Des contacts réguliers ont eu lieu avec les<br />
représentants <strong>de</strong> la Commission (DG-ENV), avec le groupe <strong>de</strong><br />
travail WG-AEN (Assessment of the Exposure to Noise) <strong>et</strong><br />
avec <strong>de</strong>s correspondants nationaux responsables <strong>de</strong> la mise<br />
en œuvre <strong>de</strong> la directive européenne. Un site web dédié<br />
(www.harmonoise.org) <strong>et</strong> une l<strong>et</strong>tre d’information<br />
électronique envoyée tout les trois mois aux différents<br />
groupes d’utilisateurs a permis une plus large promotion du<br />
proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses résultats. Afin <strong>de</strong> favoriser l’intégration <strong>de</strong>s<br />
nouvelles métho<strong>de</strong>s dans les produits logiciels dédiés à la<br />
cartographie du bruit, une implémentation numérique du<br />
module <strong>de</strong> propagation a été développée <strong>et</strong> diffusée<br />
gratuitement auprès <strong>de</strong>s intéressés qui en ont fait la<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>.<br />
Harmonisation <strong>et</strong> normalisation<br />
Sur le plan technique, le proj<strong>et</strong> a produit un ensemble <strong>de</strong><br />
métho<strong>de</strong>s <strong>et</strong> <strong>de</strong> règles pour la prévision <strong>de</strong> l’émission <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
la propagation du bruit dans l’environnement. La plupart <strong>de</strong><br />
ces résultats ont été implémentés sous forme d’algorithmes<br />
numériques <strong>et</strong> <strong>de</strong> bases <strong>de</strong> données. La flexibilité <strong>de</strong> la<br />
métho<strong>de</strong> perm<strong>et</strong> son adaptation aux spécificités régionales<br />
ou nationales, par exemple par l’introduction <strong>de</strong> nouveaux<br />
types <strong>de</strong> véhicules dans la base <strong>de</strong> données. Le modèle<br />
développé correspond à une exigence d’harmonisation <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s prévisionnelles inscrite dans la directive<br />
européenne 2002/49/CE. Le proj<strong>et</strong> Harmonoise a produit<br />
une base soli<strong>de</strong> pour l’implémentation <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
unifiées dans le cadre <strong>de</strong>s cartographies stratégiques au-<strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> l’horizon 2007. L’implémentation <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra toutefois une certaine volonté politique qui<br />
dépasse le cadre du présent proj<strong>et</strong>. Un processus <strong>de</strong><br />
normalisation pourrait accélérer l’acceptation <strong>et</strong><br />
l’introduction <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te nouvelle métho<strong>de</strong>.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Atelier<br />
Confort acoustique dans les bâtiments - Maîtrise <strong>de</strong>s maillons <strong>de</strong><br />
la chaîne <strong>de</strong> l’acoustique dans les logements <strong>et</strong> le tertiaire, en neuf<br />
<strong>et</strong> en réhabilitation : prévision, produits, mise en œuvre, mesure <strong>et</strong><br />
contrôle<br />
Atelier animé par Mathias Meisser (Conseil national du bruit)<br />
Avec la participation <strong>de</strong> : Jacques Daliphard (Bouygues Bâtiments) - Christiane Flageoll<strong>et</strong> Saadna (PUCA) - Aline<br />
Gaulupeau (Bureau Veritas) - Philippe Guignouard (Lasa, GIac) - Alain Roussel (Saint-Gobain Glass France)<br />
- Ghislain Pinçon (FFB) - Francis Bénichou (Lafarge Plâtres) - Michel Villot (CSTB)<br />
Introduction<br />
Mathias Meisser (Conseil national du bruit)<br />
<strong>de</strong> couvrir à la fois l’acoustique <strong>de</strong>s logements <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s<br />
bâtiments tertiaires, que ce soit dans les bâtiments neufs <strong>et</strong><br />
dans les bâtiments existants.<br />
Nous traiterons tout d’abord du cas <strong>de</strong>s constructions<br />
neuves, puis <strong>de</strong> l’ancien, sous l’angle <strong>de</strong>s prévisions, <strong>de</strong>s<br />
caractéristiques <strong>de</strong>s produits, <strong>de</strong> la mise en œuvre, <strong>de</strong>s<br />
mesures <strong>et</strong> <strong>de</strong>s contrôles. De la prévision au contrôle, c<strong>et</strong>te<br />
chaîne <strong>de</strong> responsabilités suit une logique d’obligation <strong>de</strong><br />
résultat. C<strong>et</strong>te particularité <strong>de</strong> la réglementation française,<br />
qui veut que ce soit aux constructeurs <strong>de</strong> prévoir les<br />
dispositions à prendre pour satisfaire ce résultat, qui veut<br />
qu’un contrôle après travaux puisse être diligenté,<br />
correspond à une situation assez singulière en Europe. En<br />
Allemagne, par exemple, les normes 4109 précisent l’indice<br />
d’affaiblissement acoustique R W qu’une paroi doit atteindre.<br />
En France, on recherche d’abord le R W qu’il faudra<br />
atteindre.<br />
C<strong>et</strong> atelier a pour thème les problèmes d’acoustique du<br />
bâtiment, domaine extrêmement vaste, puisqu’il va s’agir<br />
Nous avons voulu, dans c<strong>et</strong> atelier, privilégier le dialogue, le<br />
débat. Aussi, trois intervenants seulement interviendront<br />
sous forme <strong>de</strong> présentation avec diaporama.<br />
Les prévisions en acoustique dans les logements <strong>et</strong> dans les zones tertiaires<br />
pour les bâtiments neufs<br />
Pascal Ozouf (BPB Placo) : Il n’y a pas qu’en France que<br />
l’obligation <strong>de</strong> résultat existe. L’Espagne <strong>et</strong> le Portugal se<br />
sont inspirés <strong>de</strong> notre réglementation acoustique <strong>et</strong> ont<br />
adopté les mêmes indices. Ils ont même adopté le fameux<br />
L nAT qui fixe les exigences vis-à-vis <strong>de</strong>s bruits d’équipements.<br />
En Angl<strong>et</strong>erre, il est vrai, les <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> réglementation<br />
coexistent : une exigence <strong>de</strong> résultat, avec l’isolement<br />
acoustique D n (D nT,A,tr quand <strong>de</strong> bonnes performances à<br />
basses fréquences sont recherchées) ; une réglementation,<br />
appelée la “partie E”, qui regroupe les exigences sur les<br />
produits, à l’instar <strong>de</strong> ce qui est pratiqué dans les pays<br />
d’Europe <strong>de</strong> l’Est. En revanche, il s’agit <strong>de</strong> « R’ ». On<br />
r<strong>et</strong>rouve <strong>de</strong>s performances sur les produits, <strong>et</strong> non pas sur le<br />
bâti.<br />
Prévisions <strong>de</strong>s performances : influence <strong>de</strong>s<br />
normes européennes<br />
Mathias Meisser : Pendant longtemps, en matière <strong>de</strong><br />
prévision, ont été utilisées <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s simplifiées,<br />
d’ailleurs parfois encore utilisées. Les calculs <strong>de</strong> la<br />
performance acoustique <strong>de</strong>s bâtiments à partir <strong>de</strong> la<br />
performance <strong>de</strong>s éléments donnaient <strong>de</strong>s résultats assez<br />
corrects lorsque les constructions correspondantes étaient<br />
du même type que celles qui avaient permis <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre au<br />
point ces métho<strong>de</strong>s. Les normes NF EN 12354, parties 1 à 6,<br />
ont constitué une avancée notable dans les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
prévision. La partie 1 concerne l’isolement aux bruits<br />
aériens entre locaux, la partie 2 l’isolation aux bruits <strong>de</strong><br />
choc, la partie 3 l’isolation aux bruits extérieurs, la partie 4<br />
l’isolation aux bruits intérieurs perçus à l’extérieur, la partie<br />
5, qui est encore en proj<strong>et</strong>, concerne les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
prévision <strong>de</strong>s bruits d’équipement sur site, la partie 6, enfin,<br />
s’adresse à la correction acoustique <strong>de</strong>s locaux. Ce sont <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s mises au point au niveau européen par une<br />
commission d’acousticiens émérites issus <strong>de</strong> nombreux<br />
laboratoires européens.<br />
Bien qu’il soit possible d’utiliser ces métho<strong>de</strong>s sans logiciel<br />
<strong>de</strong> calcul dédié, c’est-à-dire réaliser les calculs à la main, ce<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 83
sont <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s qui ont favorisé l’émergence <strong>de</strong> systèmes<br />
informatisés perm<strong>et</strong>tant d’automatiser quelque peu les<br />
calculs. L’évolution s’est faite vers <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s bien plus<br />
complexes mais plus précises.<br />
Michel Villot : La norme européenne a obligé la France à<br />
modifier certains paramètres pour que les résultats soient<br />
cohérents avec les produits français. Le gros <strong>de</strong> ce travail <strong>de</strong><br />
calage avait été réalisé, vers 1995, à l’occasion <strong>de</strong><br />
l’adoption <strong>de</strong> la nouvelle réglementation acoustique. Grosso<br />
modo, l’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la précision était <strong>de</strong> 1 à 2 dB.<br />
Mais il faut gar<strong>de</strong>r à l’esprit que certains paramètres <strong>de</strong> la<br />
norme, qui étaient donnés à titre informatif, mais qui<br />
étaient basés sur d’autres types <strong>de</strong> constructions, avaient<br />
dus être modifiés. Suivant les types <strong>de</strong> constructions,<br />
l’ajustement <strong>de</strong> certains paramètres peut parfois s’imposer.<br />
Mathias Meisser : Ces normes se présentent <strong>de</strong> la manière<br />
suivante : une première partie donne la métho<strong>de</strong> utile, soit<br />
les formules à appliquer ; une partie informative donne un<br />
certain nombre <strong>de</strong> précisions, comme par exemple le cas<br />
précis <strong>de</strong>s coefficients d’affaiblissement aux jonctions. J’ai<br />
toujours considéré que c<strong>et</strong>te problématique avait tout<br />
<strong>de</strong> « l’art <strong>de</strong> faire passer une courbe par trois points ». En<br />
tout état <strong>de</strong> cause, ces prévisions ne donnent que <strong>de</strong>s<br />
isolements estimés, dont la précision est bien loin du<br />
dixième <strong>de</strong> décibel près.<br />
La limite <strong>de</strong> l’uniformisation européenne : les<br />
indices d’affaiblissement aux jonctions<br />
Philippe Guignouard : Cela signifie-t-il que, suivant le pays<br />
européen dans lequel on se trouve, les logiciels dédiés à<br />
l’application <strong>de</strong> ces normes européennes peuvent aboutir à<br />
<strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> prévision différents ? En eff<strong>et</strong>, si j’ai bien<br />
compris, on a adapté certains coefficients pour arriver à <strong>de</strong>s<br />
résultats conformes aux matériaux utilisés en France.<br />
Obtient-on les mêmes résultats avec Acoubat <strong>et</strong> avec<br />
Bastian, par exemple ?<br />
Michel Villot : Quelques précisions s’imposent. Côté données<br />
d’entrée, les données relatives aux produits, qui sont<br />
mesurées en laboratoire, sont <strong>de</strong>s données qu’on ne maîtrise<br />
pas. En revanche, certaines données, assez peu nombreuses,<br />
sont liées au type <strong>de</strong> construction. C’est le cas <strong>de</strong>s indices<br />
d’affaiblissement aux jonctions, coefficients qui, dans la<br />
norme européenne, sont donnés sous la forme d’abaques. Il<br />
faut reconnaître que ces abaques sont <strong>de</strong>s courbes<br />
théoriques fortement inspirées <strong>de</strong>s données expérimentales<br />
issues <strong>de</strong> l’institut <strong>de</strong> recherche néerlandais TNO. Du coup,<br />
ces abaques sont liés à un type <strong>de</strong> construction. En<br />
l’occurrence, les indices d’affaiblissement <strong>de</strong> jonction <strong>de</strong><br />
parois <strong>de</strong> bétons mesurés sur site par le CSTB se sont révélés<br />
être en grand décalage avec les abaques. À force <strong>de</strong><br />
constater c<strong>et</strong>te erreur systématique <strong>de</strong> 1 ou 2 dB, nous<br />
avons corrigé les abaques afin <strong>de</strong> mieux “coller” aux<br />
spécificités <strong>de</strong>s constructions françaises.<br />
Mathias Meisser : Je vais ménager l’humilité du CSTB en<br />
tentant <strong>de</strong> répondre, puisque Acoubat est distribué par le<br />
CSTB. Dans Acoubat, toute l’annexe informative a été revue,<br />
grâce à <strong>de</strong> nombreuses mesures expérimentales. Bastian<br />
correspond davantage à la stricte application <strong>de</strong> la norme<br />
européenne <strong>et</strong> <strong>de</strong> ses annexes informatives. Une étu<strong>de</strong><br />
comparative menée en Suisse, pays neutre par excellence, a<br />
révélé que, dans bien <strong>de</strong>s cas, Acoubat donnait <strong>de</strong>s résultats<br />
bien meilleurs que les autres logiciels. La raison à cela : le<br />
fait que Acoubat ait été complété par <strong>de</strong>s mesures,<br />
contrairement à une stricte application <strong>de</strong> la norme, son<br />
vol<strong>et</strong> informatif compris. Il me semble que c’est dans c<strong>et</strong>te<br />
voie qu’il faut aller, <strong>et</strong> que le travail n’est pas forcément<br />
fini, qu’il reste peut-être <strong>de</strong>s jonctions à calculer, à<br />
remesurer.<br />
Michel Villot : Toute c<strong>et</strong>te démarche avait permis <strong>de</strong><br />
montrer qu’il importe que l’utilisateur d’une métho<strong>de</strong><br />
donnée acquière <strong>de</strong> l’expérience dans l’interprétation <strong>de</strong>s<br />
résultats <strong>de</strong> prévision, afin <strong>de</strong> savoir quelle marge <strong>de</strong><br />
sécurité prendre afin <strong>de</strong> garantir ses résultats. C’est un peu<br />
à l’utilisateur <strong>de</strong> se fixer c<strong>et</strong>te marge <strong>de</strong> sécurité, au gré <strong>de</strong>s<br />
calculs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s mesures qu’il a pu réaliser par le passé. Un<br />
ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur raisonnable pour c<strong>et</strong>te marge <strong>de</strong> sécurité<br />
me semble avoisiner les 1,5 ou 2,5 dB.<br />
Philippe Guignouard : De quel recul dispose-t-on concernant<br />
la différence entre les coefficients adaptés à la construction<br />
française <strong>et</strong> ceux directement tirés <strong>de</strong>s abaques <strong>de</strong> l’annexe<br />
informative <strong>de</strong> la norme ? Si j’ai un bâtiment à construire en<br />
Allemagne ou en Hollan<strong>de</strong> <strong>et</strong> que j’utilise Acoubat, quelle<br />
marge <strong>de</strong> sécurité dois-je observer ?<br />
Michel Villot : Concernant l’Allemagne, c’est relativement<br />
facile, dans la mesure où les constructions en béton sont<br />
assez similaires aux nôtres. En revanche, en Espagne, avec<br />
<strong>de</strong>s planchers très épais <strong>de</strong> type poutrelles hourdis <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
cloisons ou séparatifs en brique, la gran<strong>de</strong> majorité <strong>de</strong>s<br />
bâtiments n’a pas c<strong>et</strong>te homogénéité. L’application <strong>de</strong> telles<br />
métho<strong>de</strong>s à ces constructions exige une gran<strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce.<br />
Francis Bénichou : Pour faire partie, avec Jacques<br />
Daliphard <strong>et</strong> Aline Gaulupeau, du groupe <strong>de</strong>s experts<br />
acoustiques auprès <strong>de</strong> Qualitel, il me semble que les<br />
discussions au sein <strong>de</strong> ce groupe indiquent qu’Acoubat<br />
apporte une moins bonne précision sur les bruits <strong>de</strong> chocs<br />
que sur les bruits aériens. Il ne faut pas perdre <strong>de</strong> vue que le<br />
comportement aux bruits <strong>de</strong> choc reste difficile à modéliser.<br />
Michel Villot : Les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision européennes<br />
marchent bien, en particulier, pour le neuf <strong>et</strong> pour <strong>de</strong>s<br />
configurations relativement simples. La métho<strong>de</strong> Qualitel,<br />
qui se rapproche <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
prévisionnelles européennes, apporte en plus la prévision <strong>de</strong><br />
configurations très particulières. Par exemple, Qualitel<br />
prévoit le cas <strong>de</strong> courts-circuits acoustiques entre <strong>de</strong>ux<br />
logements au niveau <strong>de</strong>s combles, ou celui <strong>de</strong> jonctions mal<br />
définies car relevant <strong>de</strong> structures particulières, dans<br />
l’ancien notamment. Ce travail réalisé au sein du label<br />
Qualitel mériterait, au moins pour les cas très pratiques,<br />
d’être intégré aux métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision européennes.<br />
Pascal Ozouf : Est-il prévu <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à une révision <strong>de</strong>s<br />
textes sur les fameux indices d’affaiblissement <strong>de</strong> jonction<br />
K ij , les abaques ?<br />
Michel Villot : Au niveau européen, il existe un site Intern<strong>et</strong><br />
sur lequel les experts <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail européens<br />
peuvent faire remonter les éventuelles critiques concernant<br />
les normes. Lorsque les critiques ou les compléments<br />
atteignent un niveau suffisant, une norme peut être mise en<br />
révision. La norme dont on parle n’a pas fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
remontées suffisantes pour qu’elle soit remise en question<br />
ou modifiée, mais c’est un processus évolutif.<br />
Structures à ossature légère : nécessité d’une<br />
métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> prévision spécifique, d’exemples<br />
<strong>de</strong> solutions<br />
Pascal Ozouf : Pour avoir travaillé au CSTB, je crois savoir<br />
que certaines évolutions s’imposeraient dans les exemples<br />
<strong>de</strong> solutions. Je pense notamment aux structures à ossature<br />
bois, pour lesquelles on ne dispose d’aucune information, vu<br />
la complexité <strong>de</strong>s montages entre les parties séparatives.<br />
Avec le développement du marché <strong>de</strong> la réhabilitation, il<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
faut impérativement que c<strong>et</strong>te normalisation évolue, car la<br />
prévision est importante dans ce domaine. Sur la question <strong>de</strong><br />
l’évolution <strong>de</strong>s normes “K ij ”, nous, industriels, nous<br />
efforçons <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s solutions, mais il faut que ces<br />
solutions répon<strong>de</strong>nt à un besoin réel au niveau du marché.<br />
Je pense notamment au proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> maison ossature bois, par<br />
exemple.<br />
Michel Villot : Sur ce suj<strong>et</strong>, je serai beaucoup plus négatif.<br />
Les normes sur les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévisions existent, mais<br />
elles ne sont valables que pour les constructions lour<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
type béton. La métho<strong>de</strong> peut prendre en compte un<br />
séparatif léger <strong>et</strong> <strong>de</strong>s transmissions latérales par les parois<br />
lour<strong>de</strong>s, mais son fon<strong>de</strong>ment repose sur un principe qui n’est<br />
pas applicable aux structures légères à ossatures. Tout ce<br />
qui est mis en jeux dans la métho<strong>de</strong> prévisionnelle actuelle<br />
suppose que les champs <strong>sonores</strong> soient diffus <strong>et</strong> homogènes,<br />
<strong>et</strong> que les champs vibratoires qui parcourent les parois, eux<br />
aussi, soient diffus <strong>et</strong> homogènes. Pour la construction<br />
lour<strong>de</strong>, ces conditions sont vérifiées dans une certaine plage<br />
<strong>de</strong> fréquences. Avec les constructions à ossature, bois ou<br />
métal, d’une part, ce sont les champs directs qui sont<br />
dominants (il n’y a plus <strong>de</strong> champ réverbéré) ; d’autre part,<br />
ce sont <strong>de</strong>s éléments qui sont n<strong>et</strong>tement plus amortis que le<br />
béton, si bien que le principe au cœur <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> ne<br />
s’applique plus. Autrement dit, l’« Acoubat construction<br />
légère » n’est pas pour <strong>de</strong>main. Nous y travaillons, mais<br />
c’est un travail <strong>de</strong> longue haleine, car la métho<strong>de</strong> ellemême<br />
est remise en cause. J’ai fait remonter une<br />
proposition au niveau européen visant à préciser que la<br />
métho<strong>de</strong> ne s’applique pas aux bâtiments à ossature légère.<br />
Il faut mentionner que l’A<strong>de</strong>me <strong>et</strong> le CSTB cofinancent une<br />
étu<strong>de</strong> visant à trouver <strong>de</strong>s solutions spécifiques <strong>de</strong>s<br />
constructions à ossature bois. Il ne s’agit pas encore d’une<br />
métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> prévision, mais <strong>de</strong> la formulation d’exemples <strong>de</strong><br />
solutions. Nous testons aussi une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> prévision qui<br />
apporterait <strong>de</strong>s estimations satisfaisantes pour les<br />
transmissions directes <strong>et</strong> les transmissions latérales. Les<br />
exemples <strong>de</strong> solutions <strong>de</strong>vraient être complétés par une<br />
page sur les ossatures bois d’ici la fin 2005.<br />
Philippe Guignouard : Vous précisiez, M. Meisser, que les<br />
métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision, relativement complexes,<br />
nécessitaient <strong>de</strong>s outils informatiques. Acoubat <strong>et</strong> Bastian<br />
mis à part, existe-t-il actuellement sur le marché d’autres<br />
logiciels qui aient fait leurs preuves <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong><br />
répondre à l’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te norme ?<br />
Michel Villot : Pas à ma connaissance.<br />
Guy Cap<strong>de</strong>ville (Gamba Acoustique & Associés) : Nous<br />
avons développé une application dédiée au calcul <strong>de</strong> l’indice<br />
d’affaiblissement acoustique tel que l’on pourrait le mesurer<br />
en laboratoire, <strong>de</strong> la performance intrinsèque à la paroi,<br />
indépendamment <strong>de</strong> son environnement. C’est un outil à<br />
utiliser en amont <strong>de</strong> Acoubat ou Bastian. Mais, il ne prend<br />
pas encore en compte la problématique <strong>de</strong> la transmission<br />
latérale.<br />
Thierry Legouis : Comment savoir exactement le domaine<br />
d’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong> outil <strong>de</strong> prévision ? Est-ce qu’une<br />
double paroi quelconque, une triple, relève <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
problématique là, <strong>et</strong> quelle précision peut-on alors en<br />
attendre ?<br />
Guy Cap<strong>de</strong>ville : Pour moi, il n’y a pas que l’outil qui<br />
conditionne la précision : jouent successivement la précision<br />
<strong>de</strong> mesure <strong>de</strong>s données entrantes, la façon d’appréhen<strong>de</strong>r<br />
ces données <strong>et</strong> le “calage” du modèle par rapport aux<br />
mesures. La précision <strong>de</strong> mes prévisions varie suivant le type<br />
<strong>de</strong> paroi — pour certaines on a plus d’expérience, <strong>de</strong> r<strong>et</strong>ours<br />
<strong>de</strong> la part d’autres utilisateurs. Il faut bien gar<strong>de</strong>r à l’esprit<br />
qu’on peut avoir un modèle faux avec <strong>de</strong>s paramètres<br />
d’entrées faux <strong>et</strong> <strong>de</strong>s résultats justes. Sabine en est un<br />
exemple fameux. Nous savons tous qu’un outil, on peut lui<br />
faire dire ce qu’on veut. L’objectif <strong>de</strong>meure avant tout <strong>de</strong><br />
prendre <strong>de</strong>s hypothèses <strong>de</strong> calculs réalistes <strong>et</strong>, si l’on sort du<br />
domaine <strong>de</strong> validité <strong>de</strong> l’outil, certes <strong>de</strong> manipuler les<br />
paramètres, mais en suivant une logique physique. Pour ma<br />
part, 95% <strong>de</strong> mes résultats se situent dans une fourch<strong>et</strong>te <strong>de</strong><br />
± 5 dB, <strong>et</strong> 70% dans une fourch<strong>et</strong>te <strong>de</strong> ± 3 dB. Quand je<br />
dimensionne mes ouvrages, je considère ces incertitu<strong>de</strong>s là.<br />
Là où la précision est la meilleure, c’est en relatif, lorsqu’on<br />
recherche l’influence d’un paramètre sur le résultat<br />
acoustique.<br />
Michel Villot : Concernant ce modèle, quelle est la part <strong>de</strong><br />
la modélisation physique <strong>et</strong> celle <strong>de</strong> l’empirisme, <strong>de</strong><br />
l’étalonnage expérimental ?<br />
Guy Cap<strong>de</strong>ville : C’est une combinaison <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux, mais leurs<br />
influences respectives varient avec le type <strong>de</strong> paroi. Ce<br />
modèle s’applique aux parois simples, multicouches,<br />
feuill<strong>et</strong>ées, aux parois doubles <strong>et</strong> triples. Dans chaque<br />
module, <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> parois peuvent être modélisés : la<br />
plaque simple ou les matériaux poreux <strong>et</strong>, dans chaque<br />
module, la part <strong>de</strong> théorie <strong>et</strong> d’empirisme a été ajustée à<br />
force <strong>de</strong> comparaison entre calculs <strong>et</strong> mesure. Nous avons<br />
par ailleurs introduit un paramètre, résolument empirique<br />
c<strong>et</strong>te fois, qui caractérise la solidarisation, la rigidité <strong>de</strong> la<br />
liaison mécanique, entre <strong>de</strong>ux parements. Il tient<br />
notamment en compte du fait que ce soit un système à<br />
ossature, <strong>de</strong> la rigidité <strong>de</strong> l’ossature, du nombre <strong>de</strong> vis <strong>et</strong> du<br />
couple <strong>de</strong> serrage <strong>de</strong>s vis.<br />
Perspectives d’avenir en matière <strong>de</strong> prévision <strong>et</strong> <strong>de</strong> caractérisation en<br />
laboratoire<br />
Michel Villot (CSTB)<br />
Les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision <strong>et</strong> les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />
caractérisation en laboratoire font l’obj<strong>et</strong> d’un effort<br />
d’uniformisation au niveau européen. Des groupes d’experts<br />
travaillent à l’élaboration <strong>de</strong> ces normes. J’ai choisi quatre<br />
proj<strong>et</strong>s récents <strong>de</strong> normalisation pour illustrer c<strong>et</strong>te<br />
situation.<br />
Le premier <strong>de</strong> ces proj<strong>et</strong>s concerne l’approche ISO, au<br />
niveau international, concernant le bruit <strong>de</strong> la pluie. Le<br />
<strong>de</strong>uxième proj<strong>et</strong> porte sur la prévision <strong>de</strong>s bruits<br />
d’équipements sur site. Le troisième correspond à la mesure<br />
en laboratoire <strong>de</strong>s transmissions latérales. Le quatrième,<br />
complémentaire au second, concerne la caractérisation <strong>de</strong>s<br />
équipements <strong>de</strong>s bâtiments.<br />
Le CSTB a joué un rôle assez prépondérant dans<br />
l’élaboration <strong>de</strong> la norme ISO se rapportant au bruit <strong>de</strong><br />
pluie ; il en est d’ailleurs le rédacteur. Le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> norme<br />
reprend un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> système <strong>de</strong> génération artificielle <strong>de</strong><br />
pluie calibrée mis au point au CSTB. Le système consiste en<br />
une plaque comportant <strong>de</strong>s trous calibrés à travers laquelle<br />
<strong>de</strong>s gouttes d’eau tombent. C<strong>et</strong>te pluie calibrée, qui va être<br />
normalisée, perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> tester différents matériaux, vitrages<br />
notamment, vis-à-vis du bruit <strong>de</strong> pluie, un peu à la manière<br />
d’une machine à chocs perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> tester les<br />
performances aux bruits d’impact d’un revêtement <strong>de</strong> sol.<br />
Ce proj<strong>et</strong>, qui a été soumis à enquête fin 2004, <strong>de</strong>vrait<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 85
aboutir en 2005. Apparemment, cela correspond à un<br />
besoin, car, avant que la norme ne sorte, les premiers<br />
clients se sont déjà manifestés (Velux pour les fenêtres <strong>de</strong><br />
toit, Saint-Gobain-Vitrages côté automobile).<br />
Le CSTB est l'animateur du groupe européen <strong>de</strong><br />
normalisation travaillant sur la caractérisation <strong>de</strong>s<br />
équipements en laboratoire <strong>et</strong> membre actif d'un <strong>de</strong>uxième<br />
groupe européen travaillant sur la prévision <strong>de</strong>s bruits<br />
d'équipement sur site. Les bruits <strong>de</strong>s équipements restent un<br />
suj<strong>et</strong> assez complexe : ils ém<strong>et</strong>tent <strong>de</strong>s bruits aériens,<br />
caractérisés par une puissance acoustique ; ils transm<strong>et</strong>tent<br />
également <strong>de</strong>s vibrations à la structure <strong>et</strong> sont ainsi<br />
générateurs d’une puissance structurelle. Une norme a été<br />
soumise à enquête interne (auprès <strong>de</strong>s experts européens)<br />
fin 2004. Si tout va bien, la norme <strong>de</strong>vrait être soumise à<br />
enquête à l’échelon <strong>de</strong>s nations. Là aussi, le besoin semble<br />
important. Je mentionnerai, en particulier, l’exemple <strong>de</strong>s<br />
baignoires à brassage, qui sont <strong>de</strong>s équipements assez<br />
bruyants, tant en bruit aérien qu’en bruit solidien ; les<br />
fabricants <strong>de</strong> ces baignoires, qui atten<strong>de</strong>nt la sortie <strong>de</strong> la<br />
norme pour améliorer leur produit, ont déjà fait réaliser <strong>de</strong>s<br />
mesures <strong>et</strong> soutiennent financièrement le proj<strong>et</strong>, à travers<br />
l’Association française <strong>de</strong>s industries <strong>de</strong> la baignoire (AFIB)<br />
notamment. De même, les fabricants <strong>de</strong> broyeurs sanitaires<br />
n’ont pas attendu que la norme sorte pour faire <strong>de</strong>s essais.<br />
Au laboratoire, on caractérise l’équipement par sa puissance<br />
acoustique <strong>et</strong> par sa puissance structurale, puis, le groupe<br />
<strong>de</strong> travail élabore une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> prévision <strong>de</strong>s bruits<br />
d’équipements sur site. Côté données entrantes, la métho<strong>de</strong><br />
fait appel aux mesures en laboratoire. L’estimation du bruit<br />
sur site, elle, reprend la métho<strong>de</strong> européenne <strong>et</strong> ses parties<br />
1 à 6. Pour les transmissions solidiennes par les structures,<br />
on introduit une puissance qui caractérise l’équipement <strong>et</strong>,<br />
en appliquant la partie 5 <strong>de</strong> la norme, on estime le bruit<br />
solidien généré. Début 2006, on peut espérer disposer d’un<br />
certain nombre d’équipements qui pourront être introduits<br />
dans le logiciel Acoubat. L’attente <strong>de</strong>s constructeurs pour un<br />
tel outil est forte : ils souhaitent en eff<strong>et</strong> prévoir le<br />
comportement in situ <strong>de</strong> leur produit.<br />
Concernant les mesures en laboratoire <strong>de</strong> transmission <strong>de</strong>s<br />
vibrations aux jonctions, on notera qu’un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> norme<br />
précise les modalités <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong>s indices<br />
d’affaiblissement aux jonctions. De fait, on ne peut pas<br />
toujours tout calculer <strong>et</strong> certaines jonctions particulières<br />
exigent <strong>de</strong>s mesures. Ce proj<strong>et</strong> a également été soumis à<br />
enquête fin 2004. Dans le sillage <strong>de</strong> la RT2000 <strong>et</strong>,<br />
maintenant, <strong>de</strong> la RT2005, est apparue l’obligation <strong>de</strong><br />
traiter les jonctions entre dalles <strong>et</strong> faça<strong>de</strong>. Or les rupteurs<br />
thermiques ont pour eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> modifier les transmissions<br />
acoustiques latérales. Il fallait donc une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> mesure<br />
<strong>de</strong>s modifications sur les transmissions aux jonctions.<br />
Débat<br />
Normes <strong>de</strong> prévision, normes <strong>de</strong> mesure :<br />
chronologie confuse…<br />
Mathias Meisser : En ce qui concerne les transmissions <strong>de</strong>s<br />
bruits solidiens dus aux équipements, les transmissions<br />
horizontales ou diagonales reprennent les valeurs<br />
d’isolement vibratoire aux jonctions utilisées pour les bruits<br />
aériens ?<br />
Michel Villot : Tout a fait.<br />
De la salle : Sont aujourd’hui disponibles <strong>de</strong>s résultats<br />
d’essais réalisés à Grenoble sur différents types <strong>de</strong> parois <strong>de</strong><br />
gaines, pour un équipement <strong>de</strong> référence, un tuyau<br />
d’évacuation en PVC <strong>de</strong> diamètre 100, avec une excitation<br />
<strong>de</strong> nature aérienne. Les réflexions en cours portent sur<br />
l’inci<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s transmissions solidiennes, plus précisément,<br />
<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> fixation <strong>de</strong> tuyauterie, notamment, au niveau<br />
<strong>de</strong>s cou<strong>de</strong>s. Il semblerait qu’on souffre d’un manque <strong>de</strong><br />
prévision pour ces cas <strong>de</strong> figures. Envisagez-vous, à plus ou<br />
moins brève échéance, d’étendre Acoubat à ce domaine <strong>de</strong>s<br />
gaines techniques ?<br />
Michel Villot : La réponse est oui. C’est un oubli <strong>de</strong> ma part,<br />
j’ai mentionné les baignoires à brassage, mais l’on va plus<br />
loin, la norme <strong>de</strong> mesure du bruit <strong>de</strong>s conduits d’évacuation<br />
d’eau existe. Elle donne à la fois le bruit aérien rayonné <strong>et</strong><br />
le bruit transmis aux structures. C<strong>et</strong>te norme peut donc être<br />
mise en application dans un logiciel tel qu’Acoubat. Nous<br />
avons caractérisé les gaines en laboratoire sous forme <strong>de</strong><br />
pertes par insertion <strong>et</strong> l’on peut imaginer proposer<br />
différents types <strong>de</strong> gaines <strong>et</strong> simuler les eff<strong>et</strong>s, en<br />
particulier, sur le bruit aérien rayonné.<br />
Mathias Meisser : M. Villot, dans votre exposé vous avez<br />
mentionné l’existence d’une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> mesures pour les<br />
transmissions latérales. En résumé, il y a une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
mesures pour les bruits d’équipements, <strong>de</strong> la puissance<br />
structurelle notamment. Ces métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mesures vont<br />
sortir, alors que les normes <strong>de</strong> prévisions sont pratiquement<br />
achevées. Ce n’est pas <strong>de</strong> votre faute, mais j’y vois là une<br />
certaine incompatibilité. Autre exemple : la norme <strong>de</strong><br />
prévision <strong>de</strong>s isolements entre locaux, qui existe <strong>de</strong>puis<br />
longtemps déjà, fait appel aux transmissions par les<br />
jonctions, les K ij , alors que la métho<strong>de</strong> officielle <strong>de</strong> mesure<br />
<strong>de</strong>s K ij n’existe pas.<br />
Michel Villot : Il est vrai que la norme <strong>de</strong> prévision <strong>de</strong>s<br />
isolements existe alors que la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> mesure <strong>de</strong>s K ij en<br />
est encore à l’état <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> norme. Pour les bruits<br />
d’équipements, en revanche, c’est plus homogène, puisque<br />
tout est à l’état <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>.<br />
Mesure du bruit <strong>de</strong> pluie : quelles conditions ?<br />
De la salle : Au suj<strong>et</strong> du bruit <strong>de</strong> pluie, quel est l’ordre <strong>de</strong><br />
gran<strong>de</strong>ur du débit ? S’agit-il du débit <strong>de</strong> pluie standard<br />
utilisé en plan péri-sanitaire dans le DTU ? Enfin, quelle est<br />
la hauteur <strong>de</strong> chute, car cela joue un rôle dans la vitesse<br />
limite <strong>de</strong>s gouttes ?<br />
Michel Villot : Tout est défini par la norme ISO : le débit, le<br />
diamètres moyen <strong>de</strong>s gouttes, la vitesse <strong>de</strong> chute au<br />
moment <strong>de</strong> l’impact. Il faut effectivement une hauteur <strong>de</strong><br />
chute qui correspon<strong>de</strong> à c<strong>et</strong>te vitesse d’impact. La gran<strong>de</strong>ur<br />
mesurée est un niveau d’intensité acoustique rayonné par<br />
l’élément testé. Le débit choisi correspond à une pluie<br />
intense, <strong>de</strong>s débits extrêmes plutôt peu fréquents. La norme<br />
ne perm<strong>et</strong> pas d’extrapoler d’un débit à un autre, mais,<br />
nous y mentionnons <strong>de</strong>s publications <strong>de</strong> la littérature qui<br />
présentent <strong>de</strong>s modèles perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> passer d’un débit à<br />
un autre.<br />
Chaudières sur parois minces : problème,<br />
jusqu’à nouvel ordre<br />
Jean-Marc Piasco : Il existe pour les chaudières une norme<br />
qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> calculer la puissance aérienne <strong>de</strong>s chaudières.<br />
Va-t-il va falloir prendre en compte aussi le bruit structurel<br />
que peut faire une chaudière quand elle est fixée sur un mur<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
léger par exemple ? Dans certains cas, la pompe peut<br />
générer <strong>de</strong>s vibrations si la chaudière est, par exemple,<br />
fixée sur une paroi assez légère. Il est possible <strong>de</strong> trouver<br />
<strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> découplage <strong>de</strong> la chaudière pour la fixation<br />
sur la paroi.<br />
Michel Villot : Tout dépend <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong> ces poses<br />
structurales. Il est évi<strong>de</strong>nt que, dans le cas d’une fixation<br />
standard qui ne laisserait pratiquement rien passer, il ne<br />
serait pas nécessaire <strong>de</strong> mesurer. Mais je tiens à préciser<br />
que le proj<strong>et</strong> actuel <strong>de</strong> norme est limité à <strong>de</strong>s poses sur<br />
parois relativement lour<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 100 kg/m 2 , même<br />
si les limites d’application sont en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te valeur. La<br />
norme <strong>de</strong> caractérisation sur <strong>de</strong>s parois légères, beaucoup<br />
plus difficile, se fera dans un <strong>de</strong>uxième temps. La métho<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> prévision, justement, précise comment adapter les<br />
résultats à <strong>de</strong>s parois plus minces, <strong>et</strong> prévient également<br />
qu’il ne faut aller trop bas.<br />
Mathias Meisser : La logique voudrait que l’on s’arrête à 150<br />
kg/m 2 . En eff<strong>et</strong>, si l’on considère le comportement <strong>de</strong> la<br />
paroi aux bruits aériens, la frontière entre une paroi lour<strong>de</strong><br />
<strong>et</strong> une paroi légère se situe à 150 kg/m 2 . L’avantage d’une<br />
telle norme correspondant à <strong>de</strong>s fixations sur parois<br />
relativement lour<strong>de</strong>s est d’inciter, lors <strong>de</strong> la conception, à<br />
ne pas placer ces matériaux sur <strong>de</strong>s parois plus légères. En<br />
attendant qu’on en sache plus.<br />
La caractérisation acoustique <strong>de</strong>s produits<br />
Quelle précision pour les caractéristiques <strong>de</strong>s<br />
produits ?<br />
Mathias Meisser : L’intervention <strong>de</strong> M. Villot a servi <strong>de</strong><br />
transition entre la prévision <strong>et</strong> la mesure <strong>de</strong>s<br />
caractéristiques qui servent <strong>de</strong> données d’entrée aux<br />
métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prévision. D’ailleurs, dans le principe, les<br />
normes <strong>de</strong> prévision ne sont autres que le passage <strong>de</strong>s<br />
caractéristiques <strong>de</strong>s produits vers les caractéristiques <strong>de</strong>s<br />
bâtiments. Pour caractériser les produits, on effectue donc<br />
<strong>de</strong>s tests en laboratoire, mais pas seulement, <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
statistiques existent également — je pense à la loi <strong>de</strong> masse<br />
qui est souvent utilisée. Les mesures en laboratoires portent<br />
sur <strong>de</strong>s éléments dont on connaît un certain nombre <strong>de</strong><br />
caractéristiques. Une paroi en béton <strong>de</strong> 16 cm, par exemple,<br />
aura, en laboratoire, un indice d’affaiblissement acoustique<br />
R W +C voisin <strong>de</strong> 56 dB. Mais, sur site, dans un bâtiment en<br />
fonction, c<strong>et</strong>te valeur connaît une certaine dispersion qui<br />
n’est pas maîtrisée.<br />
Michel Villot : Pour passer du laboratoire aux conditions in<br />
situ, on dispose tout <strong>de</strong> même <strong>de</strong> certains moyens <strong>de</strong><br />
maîtriser l’incertitu<strong>de</strong>. Par exemple, quand on teste une<br />
paroi en laboratoire, on mesure son temps <strong>de</strong> réverbération<br />
structurale, qui traduit les écoulements d’énergie <strong>de</strong> la<br />
paroi sur sa structure réceptrice. Sur site, le temps <strong>de</strong><br />
réverbération structurale mesuré in situ perm<strong>et</strong> également<br />
d’effectuer <strong>de</strong>s corrections.<br />
Mathias Meisser : Certes, mais la valeur laboratoire, compte<br />
tenu <strong>de</strong> tous ces éléments annexes, avec quelle précision<br />
est-elle connue ?<br />
Michel Villot : Cela dépend du laboratoire, du type <strong>de</strong><br />
produit, beaucoup d’éléments entrent en jeu.<br />
Mathias Meisser : J’ai toujours été étonné par le fait que les<br />
normes <strong>de</strong> mesure en laboratoire ou in situ ne font pas<br />
intervenir la notion d’incertitu<strong>de</strong> sur le résultat. Or, on n’est<br />
jamais certains d’avoir le bon résultat au décibel près. Qui<br />
plus est, compte tenu <strong>de</strong>s arrondis, un indice R W +C <strong>de</strong> 56 dB,<br />
ce peut aussi bien être 55,5 dB que 56,4 dB. Ces fameux<br />
arrondis sont eux aussi facteurs d’une incertitu<strong>de</strong>, qui,<br />
ajoutée à l’incertitu<strong>de</strong> sur les mesures, se traduit par une<br />
incertitu<strong>de</strong> globale qui est <strong>de</strong> l’ordre du décibel. Au final,<br />
les résultats <strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong> prévision s’en ressentent. Le<br />
reproche que je ferais aux normes <strong>de</strong> mesure, c’est qu’elles<br />
ne précisent pas les données d’incertitu<strong>de</strong>.<br />
De la salle : À l’époque du passage du R rose au R W +C, on s’est<br />
aperçus que, suivant le laboratoire, qu’il soit français,<br />
allemand ou anglais, on avait parfois 1 dB d’écart sur le<br />
terme correctif, celui-ci n’étant pas fixé dans la norme.<br />
Suivant la métho<strong>de</strong> mathématique, on n’obtenait pas le<br />
même résultat <strong>et</strong> on se r<strong>et</strong>rouvait avec 1 dB d’écart.<br />
Michel Villot : J’en profite pour élargir la question <strong>de</strong><br />
l’incertitu<strong>de</strong>. M. Meisser souligne la nécessité <strong>de</strong> pouvoir<br />
connaître l’incertitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mesures <strong>de</strong>s performances<br />
acoustiques. À ce problème, s’ajoute celui <strong>de</strong> la limite <strong>de</strong><br />
validité <strong>de</strong>s résultats, qui est fonction <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong><br />
mise en œuvre. Un exemple : les doublages sont testés en<br />
laboratoire sur <strong>de</strong>s parois d’épaisseurs bien déterminées. Il<br />
conviendrait <strong>de</strong> connaître dans quelle gamme d’épaisseurs<br />
<strong>de</strong> paroi la performance mesurée du doublage est encore<br />
valable. Cela vaut aussi pour les revêtements <strong>de</strong> sols<br />
flottants. Connaissant c<strong>et</strong>te fourch<strong>et</strong>te d’épaisseur, si on est<br />
en <strong>de</strong>hors, soit on remesure, mais cela risque <strong>de</strong> coûter<br />
cher, soit on conçoit un modèle qui donne la correction à<br />
apporter en fonction <strong>de</strong> l’épaisseur.<br />
Les cloisons en plaque <strong>de</strong> plâtre sur ossature métallique : limitation <strong>de</strong> la<br />
transmission par l’ossature<br />
Francis Bénichou (Lafarge Plâtres)<br />
Le comportement acoustique <strong>de</strong>s cloisons en plaque <strong>de</strong><br />
plâtre sur ossature métallique est bien connu <strong>de</strong>puis un<br />
certain nombre d’années. On peut classer ces systèmes en<br />
<strong>de</strong>ux, voire trois, catégories : les cloisons en plaques <strong>de</strong><br />
plâtre sur simple ossature (plaques vissées <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre<br />
d’une même ossature avec, ou sans, laine minérale) ; les<br />
cloisons acoustiques composées <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux contre cloisons<br />
indépendantes, ceci pour éviter les liaisons entre les<br />
parements opposés ; les systèmes <strong>de</strong> cloisons séparatives <strong>de</strong><br />
gran<strong>de</strong> hauteur, pourvus <strong>de</strong> liaisons acoustiques, l’objectif<br />
étant <strong>de</strong> réaliser un compromis entre comportement<br />
mécanique <strong>et</strong> performances acoustiques. Depuis trente ou<br />
quarante ans que les cloisons en plaque <strong>de</strong> plâtre existent, il<br />
restait un domaine qui n’avait pas été exploré <strong>de</strong> façon<br />
suffisamment approfondie : celui <strong>de</strong> la limitation <strong>de</strong> la<br />
transmission acoustique par l’ossature elle-même. Ces<br />
ossatures sont généralement <strong>de</strong>s profils en C, la plupart du<br />
temps en tôle mince d’acier galvanisé. La question pour<br />
nous était la suivante : y a-t-il ou non la place pour une<br />
nouvelle catégorie <strong>de</strong> cloisons, intermédiaire entre les<br />
cloisons <strong>de</strong> distribution à simple ossature <strong>et</strong> les cloisons<br />
séparatives à double ossature ? Les prescripteurs nous<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 87
éclament en eff<strong>et</strong> souvent l’impossible : la cloison la plus<br />
économique possible, mais <strong>de</strong> même performance<br />
acoustique que <strong>de</strong>s cloisons beaucoup plus chères. Nous nous<br />
sommes donc fixés un double objectif : d’une part,<br />
développer une variante économique à la cloison à doubles<br />
parements <strong>de</strong> référence, c’est-à-dire la “traditionnelle”<br />
cloison 98/48 1 (quatre plaques BA13, posées <strong>de</strong> part <strong>et</strong><br />
d’autres d’une ossature <strong>de</strong> 48 mm avec laine minérale) ;<br />
d’autre part, optimiser la performance acoustique en la<br />
rapprochant <strong>de</strong>s performances acoustiques <strong>de</strong>s parois<br />
séparatives à double ossature. L’intérêt économique est<br />
évi<strong>de</strong>nt : comme il y a une seule ossature à m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre, le prix fourni posé est intermédiaire entre les<br />
cloisons <strong>de</strong> distributions traditionnelles <strong>et</strong> les cloisons<br />
séparatives.<br />
Voyons les ordres <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s performances acoustiques<br />
conventionnelles <strong>de</strong>s différents types <strong>de</strong> cloisons existantes.<br />
Les cloison <strong>de</strong> distribution à simple parement <strong>et</strong> mono<br />
ossature : une 120/90 (plaque <strong>de</strong> BA15 <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre<br />
d’une ossature en 90 garnie <strong>de</strong> laine minérale) offre un RA,<br />
ou R W + C, <strong>de</strong> 44 dB ; une 98/62 (même type <strong>de</strong> cloison mais<br />
avec une BA18 <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre d’une ossature <strong>de</strong> 62 mm),<br />
a une performance acoustique <strong>de</strong> 45 dB. C’était quasiment<br />
le maximum <strong>de</strong> ce que les industriels <strong>de</strong> la plaque <strong>de</strong> plâtre<br />
pouvaient proposer en système à simple parement <strong>et</strong> simple<br />
ossature. Les cloisons <strong>de</strong> distribution à parements doubles<br />
sur mono ossature : la 98/48 offre un RA <strong>de</strong> 47 dB (c<strong>et</strong>te<br />
valeur est peut-être en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong> la réalité, c’est le résultat<br />
d’essais croisés entre le CSTB <strong>et</strong> le CEBTP réalisés entre<br />
1995 <strong>et</strong> 1997) ; en utilisant l’ossature courante la plus large,<br />
une ossature <strong>de</strong> 90 mm, avec le même montage, on obtient<br />
un RA <strong>de</strong> 51 dB. Les cloisons séparatives à parements<br />
doubles, qui intègrent les mêmes parements que dans la<br />
génération précé<strong>de</strong>nte, mais, c<strong>et</strong>te fois-ci, sur double<br />
ossature indépendante : <strong>de</strong>s essais acoustiques croisés<br />
réalisés en laboratoire sur une cloison <strong>de</strong> 160 avec <strong>de</strong> la<br />
laine minérale <strong>de</strong> 45 offre un RA <strong>de</strong> 61 dB.<br />
Avant l’arrivée <strong>de</strong>s montants acoustiques, tel était le<br />
panorama <strong>de</strong> la cloison sur ossature. Si nous nous sommes<br />
intéressés aux montants acoustiques, c’est bien sûr parce<br />
que l’on en avait déjà vu apparaître sur le marché. Nous<br />
avons testé ces premières ossatures, <strong>et</strong> les autres industriels<br />
en ont probablement fait autant. Leurs performances<br />
acoustiques n’étaient pas négligeables, mais ce qui nous a<br />
semblé leur manquer, c’est un comportement mécanique <strong>et</strong><br />
un comportement au feu qui soit en cohérence avec ces<br />
hautes exigences acoustiques. Pour réduire l’énergie<br />
acoustique transmise aux parements, il nous a semblé, cela<br />
relève du bon sens, qu’il fallait à la fois allonger le parcours<br />
<strong>et</strong> assouplir le profilé. D’où un travail sur la forme<br />
géométrique <strong>de</strong> l’âme du profilé <strong>et</strong> sur la réduction du<br />
linéaire <strong>de</strong> liaison entre les ailes <strong>de</strong>s montants, qui s’est<br />
traduit par <strong>de</strong>s découpes dans l’âme. Toute la difficulté a<br />
consisté à définir une forme géométrique <strong>et</strong> <strong>de</strong>s découpes<br />
“acoustiques” qui aient un bon comportement mécanique <strong>et</strong><br />
un bon comportement au feu. A ce sta<strong>de</strong> du développement,<br />
il s’est vite avéré qu’il n’y avait pas d’intérêt à utiliser un<br />
montant acoustique dès lors qu’il n’y avait pas d’absorbant<br />
dans la cavité — en disant cela, je fais plaisir à Saint-Gobain-<br />
Isover. La raison à cela ? Essentiellement, parce qu’en<br />
l’absence <strong>de</strong> laine minérale, la transmission aérienne directe<br />
est prépondérante, par rapport à la transmission par<br />
l’ossature. Après six prototypes différents, nous sommes<br />
arrivés à un modèle compatible avec les autres exigences.<br />
1 Le premier nombre donne l'épaisseur totale <strong>de</strong> la cloison en millimètres, le<br />
second celle <strong>de</strong> l'ossature<br />
Quels en sont les résultats ? Une 98/62, soit une plaque <strong>de</strong><br />
BA18 <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre d’une ossature acoustique <strong>de</strong> 62,<br />
apporte une performance <strong>de</strong> 48 dB. L’objectif que l’on<br />
s’était fixé, à savoir une performance acoustique<br />
équivalente à celle d’une cloison 98/48 à double parement,<br />
a été atteint. Je prends soin <strong>de</strong> préciser qu’il s’agit là d’une<br />
performance acoustique globale. Un système mono<br />
parement en BA18 n’a pas les mêmes fréquences critiques<br />
qu’un système double parement en BA13, on le verra plus<br />
loin.<br />
Par la suite, nous avons intégré ce même profilé dans un<br />
système bi-plaque composé, c<strong>et</strong>te fois-ci, d’une BA18 <strong>et</strong><br />
d’une BA13. Une campagne d’essais au CSTB réalisée en<br />
2004 a révélé pour ce système un RA <strong>de</strong> 53 dB, soit, <strong>de</strong><br />
nouveau, 3 dB <strong>de</strong> plus que la même cloison à ossature<br />
classique évaluée dans le même laboratoire. Ce qui confirme<br />
que, pour c<strong>et</strong>te plage <strong>de</strong> performances, ce montant<br />
acoustique apporte un complément d’affaiblissement <strong>de</strong> 3<br />
dB.<br />
La comparaison <strong>de</strong>s spectres sur ces différentes cloisons est,<br />
elle aussi, riche d’enseignements. Entre <strong>de</strong>s systèmes<br />
similaires différant par la nature <strong>de</strong>s montants — classiques<br />
ou acoustiques —, la pente plus importante pour le montant<br />
acoustique confirme que le niveau <strong>de</strong> découplage entre les<br />
<strong>de</strong>ux parements a bien été amélioré. Aucune modification<br />
n’a été apportée à la fréquence critique <strong>de</strong>s plaques, mais la<br />
chute <strong>de</strong>s performances à c<strong>et</strong>te fréquence critique a été<br />
réduite <strong>de</strong> 3 dB.<br />
Nous avons également comparé c<strong>et</strong>te cloison 98/62 dB<br />
(98/62 à montants acoustiques) à une cloison fictive, une<br />
cloison séparative sans aucune liaison entre les parements.<br />
Pour ce faire, nous avons eu recours au logiciel <strong>de</strong> prévision<br />
Acoustiff. La comparaison <strong>de</strong> la pente du spectre <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
cloison fictive avec celui <strong>de</strong> la 98/62 dB témoigne <strong>de</strong><br />
l’efficacité du découplage apporté par ces montants.<br />
Revenons à l’analyse <strong>de</strong>s spectres <strong>de</strong> la 98/62 dB <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
cloison <strong>de</strong> référence, la 98/48 avec double parement (<strong>de</strong>ux<br />
plaques <strong>de</strong> BA13 <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autre <strong>de</strong> l’ossature, soit quatre<br />
plaques en tout). Les comportements sont extrêmement<br />
proches jusqu’à 1000 Hz. Au-<strong>de</strong>là, les comportement assez<br />
différents tiennent essentiellement aux fréquences<br />
critiques : 3150 Hz pour la BA13 <strong>et</strong> 2000 Hz pour la BA18. De<br />
ce fait, la 98/48 est nécessairement plus performante que la<br />
98/62 dB dans les fréquences élevées alors que la 98/62 dB<br />
est globalement au moins aussi performante (RA 48 contre<br />
47 dB). A c<strong>et</strong> égard, il convient <strong>de</strong> rappeler que la<br />
réglementation acoustique <strong>de</strong>s locaux hospitaliers <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
un isolement global <strong>de</strong> 42 dB entre chambres.<br />
Pour finir, intéressons-nous à la double pose. Nous avons<br />
comparé une 123/62 mesurée au CSTB — RA <strong>de</strong> 50 dB — avec<br />
la 123/62 dB, soit la même cloison mais équipée d’un<br />
montant acoustique : le RA est <strong>de</strong> 53 dB. Fait intéressant, le<br />
fait d’avoir croisé une plaque BA18 <strong>et</strong> une plaque BA 13 a<br />
tendance à niveler les pertes au niveau <strong>de</strong>s fréquences<br />
critiques.<br />
Pour conclure, à côté <strong>de</strong>s systèmes aux performances<br />
acoustiques n<strong>et</strong>tement plus importantes mais également<br />
n<strong>et</strong>tement plus coûteux, le système que nous avons<br />
développé a l’avantage, pour un surcoût très réduit, <strong>de</strong><br />
majorer significativement la performance acoustique <strong>de</strong> ces<br />
cloisons sans comprom<strong>et</strong>tre leur comportement aux chocs,<br />
leur rai<strong>de</strong>ur mécanique <strong>et</strong> leur résistance au feu.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Débat<br />
Montants acoustiques : les preuves d’une<br />
moindre transmission par l’ossature<br />
Michel Villot : Le montant étant ajouré, y a-t-il également<br />
une performance en termes <strong>de</strong> pont thermique ?<br />
Francis Bénichou : Nous n’avons pas exploité c<strong>et</strong> aspect,<br />
car le marché visé est celui <strong>de</strong> l’hospitalier <strong>et</strong> <strong>de</strong> la cloison<br />
<strong>de</strong> 123 du scolaire, en séparatif essentiellement. Il n’y a pas<br />
d’exigences thermiques en séparatif entre chambres ou<br />
entre salles <strong>de</strong> classes. Mais il est vrai que cela pourrait faire<br />
l’obj<strong>et</strong> d’une exploitation comme séparatif entre locaux<br />
chauffés <strong>et</strong> non chauffés.<br />
Mathias Meisser : La question <strong>de</strong> Michel Villot <strong>et</strong> l’exposé <strong>de</strong><br />
Francis Bénichou montrent bien qu’il ne faut pas s’intéresser<br />
qu’à l’acoustique : résistance mécanique, résistance au feu,<br />
thermique <strong>et</strong> acoustique sont à traiter ensemble.<br />
Une question : Dans les fréquences graves, notamment, il<br />
n’y a qu’à 100 hertz qu’il y ait un gain pour la première<br />
paroi que vous avez présentée <strong>et</strong> cela m’inquiète un peu.<br />
Quelle est la sensibilité <strong>de</strong>s autres fréquences sur le résultat<br />
global ?<br />
Cyril Deman<strong>et</strong> : Je travaille au laboratoire d’acoustique <strong>de</strong><br />
Lafarge Plâtres. Ce produit a été développé dans un<br />
laboratoire <strong>de</strong> Lafarge, mais tous les résultats qui vous ont<br />
été présentés sont issus d’autres laboratoires. Cela fait<br />
longtemps que nous préférons travailler par comparaison à<br />
une référence. Et c<strong>et</strong> écart <strong>de</strong> 3 décibels au niveau <strong>de</strong> la<br />
fréquence 100 Hz a été observé chez Lafarge Plâtres, au<br />
CSTB <strong>et</strong> au CEBTP. Par ailleurs, ce n’est pas une étu<strong>de</strong><br />
expérimentale, il y a <strong>de</strong> la recherche théorique <strong>de</strong>rrière tout<br />
ceci. Il reste encore <strong>de</strong>s choses à explorer, mais nous savons<br />
à peu près où nous allons.<br />
Mathias Meisser : Ce qui est intéressant, en eff<strong>et</strong>, c’est <strong>de</strong><br />
savoir que trois laboratoires différents ont observé le même<br />
eff<strong>et</strong>.<br />
Aline Gaulupeau : Vous avez dit avoir trois chantiers <strong>de</strong><br />
référence. Avez-vous réalisé <strong>de</strong>s mesures sur ces chantiers<br />
<strong>et</strong>, in situ, r<strong>et</strong>rouvez-vous les 3 dB d’écart sur l’isolement ?<br />
Francis Bénichou : Oui, pour tout dire, ce développement a<br />
été mené dans le cadre d’une opération particulière à<br />
Strasbourg, pour laquelle le maître d’ouvrage voulait<br />
impérativement une cloison plus performante. Il voulait la<br />
98/48 au prix <strong>de</strong> la 98/62. Pour lui démontrer que nous<br />
jouions le jeu, <strong>de</strong>ux “cellules témoin” — il ne s’agissait pas<br />
exactement d’un chantier — ont été montées aux environs<br />
<strong>de</strong> Strasbourg : l’une avec la 98/62 dB <strong>et</strong> l’autre avec la<br />
98/62 <strong>de</strong> référence. Les mesures sur site ont bien révélé ces<br />
3 dB d’écart. Ensuite, on a effectivement procédé à une<br />
mesure sur le chantier <strong>de</strong> l’hôpital <strong>de</strong> Hautepierre à<br />
Strasbourg. Là, on n’a pas pu effectuer la comparaison entre<br />
98/62 <strong>et</strong> 98/62 dB, mais l’isolement in situ en inci<strong>de</strong>nce<br />
neutre obtenu, 44 dB environ, nous fait penser qu’on<br />
n’aurait jamais obtenu une telle performance avec une<br />
98/62 classique.<br />
Maurice Auffr<strong>et</strong> : L’amélioration <strong>de</strong> 3 dB existe-t-elle<br />
indépendamment du mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> calcul : anciens indices ou<br />
nouveaux indices ? Autrement dit, c<strong>et</strong> écart <strong>de</strong> 3 dB, le<br />
r<strong>et</strong>rouve-t-on aussi quand on fait le calcul avec l’indice en<br />
R rose ? À travers c<strong>et</strong>te question, je me <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si les<br />
nouveaux indices européens vont conduire à <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong><br />
développement différents <strong>de</strong> ceux réalisés auparavant. Et je<br />
reviens sur la remarque <strong>de</strong> Mathias Meisser sur l’isolement<br />
observé dans les basses fréquences : désormais, c’est le<br />
nombre <strong>de</strong> points sur la courbe qui compte, qu’ils soient en<br />
bas, en haut ou au milieu.<br />
Mathias Meisser : Attention, quand on travaille en RA, R W +C,<br />
cela revient à travailler comme avant, en R exprimé en<br />
dB(A) bruit rose ; en enlevant uniquement la valeur à 4000<br />
Hz, qui ici ne joue pas.<br />
Maurice Auffr<strong>et</strong>: Trouve-t-on la même chose en R rose ancien<br />
indice ? La question est importante : on s’est aperçu, par<br />
exemple, que la conception <strong>de</strong>s doubles vitrages avec<br />
parements feuill<strong>et</strong>és suit une logique <strong>de</strong> développement<br />
différente <strong>de</strong> celle adoptée du temps où les anciens indices<br />
étaient en vigueur. Ce n’est pas tout à fait la même chose<br />
<strong>de</strong> travailler sur du R rose que <strong>de</strong> travailler sur du RA.<br />
Francis Bénichou : Vérification faite, le gain est <strong>de</strong> 4 dB(A)<br />
entre la 98/62 <strong>et</strong> la 98/62 dB <strong>et</strong> <strong>de</strong> 3 dB(A) entre la 123/62<br />
<strong>et</strong> la 123/62 dB. Pour répondre à votre question, le calcul en<br />
dB(A) ne change donc rien à ces écarts.<br />
Réhabilitation acoustique : prévision, caractérisation, mise en œuvre…<br />
Christiane Flageoll<strong>et</strong>-Saadna : L’action du<br />
PUCA en matière <strong>de</strong> confort sonore<br />
Le Plan urbanisme construction architecture (PUCA), un<br />
service <strong>de</strong> la Direction générale <strong>de</strong> l'urbanisme, <strong>de</strong> l'habitat<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> la construction (DGUHC) du ministère <strong>de</strong><br />
l’Équipement, développe <strong>de</strong>s programmes <strong>de</strong> recherche<br />
incitative, <strong>de</strong>s actions d'expérimentation <strong>et</strong> apporte son<br />
soutien à l'innovation <strong>et</strong> à la valorisation scientifique <strong>et</strong><br />
technique dans les domaines <strong>de</strong> l'aménagement <strong>de</strong>s<br />
territoires, <strong>de</strong> l'habitat, <strong>de</strong> la conception architecturale <strong>et</strong><br />
urbaine <strong>et</strong> <strong>de</strong> la construction.<br />
Le PUCA travaille <strong>de</strong>puis cinq ans sur la question du confort<br />
sonore. J’emploie volontairement ce terme <strong>de</strong> “confort<br />
sonore”, car il rend compte d’un positionnement prenant en<br />
compte l’usage <strong>de</strong>s habitants <strong>et</strong> leur propre perception du<br />
bruit comme leviers d’innovation technique. Ce fil<br />
conducteur nous a mené dans plusieurs directions. Avec la<br />
DGUHC <strong>et</strong> l’Anah, nous avons mené une expérimentation<br />
dans l’habitat existant, chantier expérimental dont<br />
l’objectif était l’information <strong>et</strong> la formation envers les<br />
professionnels, les artisans, les architectes. Il s’agissait aussi<br />
d’inciter les professionnels à travailler ensemble <strong>et</strong> non pas<br />
chacun <strong>de</strong> façon séparée. Dans un immeuble à réhabiliter,<br />
une journée a été consacrée à <strong>de</strong>s démonstrations <strong>et</strong> à <strong>de</strong>s<br />
exemples d’interventions dans l’habitat existant. Tous les<br />
artisans intervenant dans un bâtiment, même s’ils ne sont<br />
pas directement concernés par l’isolation acoustique,<br />
<strong>de</strong>vraient être sensibilisés à l’impact éventuel <strong>de</strong> leurs<br />
pratiques sur les questions d’acoustique. C<strong>et</strong>te démarche a<br />
donné lieu à un ouvrage financé par le PUCA qui a été<br />
récompensé par un Décibel d’or en 2004. Rédigé par<br />
Christine Simonin-Adam, “Acoustique <strong>et</strong> réhabilitation -<br />
Améliorer le confort sonore dans l'habitat existant” est un<br />
ouvrage très compl<strong>et</strong> <strong>et</strong> très détaillé. Il propose <strong>de</strong>ux axes<br />
d’entrée : les moyens <strong>de</strong> ne pas détériorer l’acoustique d’un<br />
bâtiment existant quand on réalise <strong>de</strong>s travaux ; les<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 89
solutions, simples <strong>et</strong> pas forcément coûteuses, pour<br />
améliorer l’acoustique d’un habitat existant. Le PUCA<br />
souhaitait que c<strong>et</strong> ouvrage soit prioritairement <strong>de</strong>stiné aux<br />
architectes, qui — je le dis d’autant plus facilement que je<br />
suis moi-même architecte —, sont insuffisamment<br />
sensibilisés à la question <strong>de</strong> la gêne due au bruit. Les<br />
particuliers peuvent également y puiser <strong>de</strong> précieuses<br />
informations.<br />
Nous avons également contribué à l’élaboration d’un “Gui<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> diagnostic sur la perception du bruit dans l'habitat<br />
social”, <strong>de</strong>stiné aux maîtres d’ouvrages <strong>de</strong> l’habitat social.<br />
Deux parties dans c<strong>et</strong> ouvrage : le gui<strong>de</strong> proprement dit <strong>et</strong><br />
une <strong>de</strong>uxième partie présentant la métho<strong>de</strong> ayant servi à<br />
son élaboration.<br />
Nous souhaitions aller plus loin, élargir la réflexion. Aussi, en<br />
2000, avons-nous lancé une consultation <strong>de</strong> recherche que<br />
nous avons intitulée — <strong>de</strong> façon peut-être un peu<br />
provocatrice — Construire avec les sons. Il s’agissait là<br />
encore <strong>de</strong> prendre en compte le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s habitants<br />
en matière <strong>de</strong> qualité sonore, mais il s’agissait aussi d’une<br />
tentative <strong>de</strong> présenter les sons dans l’architecture sous leur<br />
dimension positive. La conception architecturale ou<br />
urbanistique prend en compte la lumière comme une donnée<br />
<strong>de</strong> conception architecturale, mais qu’en est-il <strong>de</strong>s sons ?<br />
C<strong>et</strong>te consultation a soulevé bien entendu la question <strong>de</strong> la<br />
complexité <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong> la gêne due au bruit, c’està-dire<br />
<strong>de</strong>s dimensions psychologiques, physiologiques, mais<br />
aussi culturelles, du bruit. C<strong>et</strong>te dimension a une<br />
importance capitale. Elle ne touche pas seulement les<br />
quartiers sensibles. Parmi les proj<strong>et</strong>s ayant participé à c<strong>et</strong>te<br />
consultation, six recherches françaises ont été sélectionnées<br />
<strong>et</strong> serviront <strong>de</strong> support à un colloque européen en mars<br />
2005. Qui plus est, quatre experts étrangers, représentant le<br />
Canada, pionnier dans ce domaine, la Suè<strong>de</strong>, l’Italie <strong>et</strong> la<br />
Gran<strong>de</strong>-Br<strong>et</strong>agne, viendront présenter les démarches<br />
spécifiques à leurs pays.<br />
Débat<br />
Le diagnostic acoustique pour qualifier<br />
l’existant : trop rare<br />
Mathias Meisser : Toujours concernant l’existant,<br />
M. Daliphard, vous qui représentez la partie entreprises,<br />
quelle est votre vision ?<br />
Jacques Daliphard : Quand on cherche à répondre à un<br />
appel d’offre sur un proj<strong>et</strong> d’existant, je parle ici surtout<br />
d’habitat, d’habitat francilien précisément, l’on prend un<br />
marteau <strong>et</strong> un burin <strong>et</strong> l’on essaye <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s trous dans<br />
les planchers <strong>et</strong> dans les murs pour estimer la qualité <strong>de</strong><br />
l’existant, les principes <strong>de</strong> construction. Pour les planchers :<br />
les poutres sont-elles en bois ou en métal ? y a-t-il <strong>de</strong>s<br />
hourdis ? s’il y a un parqu<strong>et</strong>, comment est-il tenu ? Pour les<br />
murs : quelle est leur nature, leur épaisseur ? Ensuite, on<br />
s’appuie sur <strong>de</strong>s grilles à travers <strong>de</strong>squelles on s’efforce <strong>de</strong><br />
qualifier les performances acoustiques <strong>de</strong> l’existant :<br />
isolement vertical ; isolement horizontal, à quelques<br />
décibels près. Malheureusement, il n’y a pas d’argent pour<br />
le diagnostic acoustique. Après, il faut essayer <strong>de</strong> freiner un<br />
peu les ar<strong>de</strong>urs du maître d’ouvrage, qui en veut toujours<br />
plus. Au minimum, on préserve les qualités <strong>de</strong> l’existant, on<br />
s’interdit <strong>de</strong> les dégra<strong>de</strong>r. Mais l’équilibre entre les<br />
finances, les décibels <strong>et</strong> les possibilités techniques est assez<br />
difficile à trouver. Il arrive même qu’on ne puisse pas<br />
obtenir d’amélioration, même en y m<strong>et</strong>tant le prix. Je<br />
mense au cas d’un logement situé au-<strong>de</strong>ssus d’une banque,<br />
où il fallait obtenir un isolement <strong>de</strong> 58 dB. Mais ce n’était<br />
pas possible sans intervenir dans la banque, ce qui n’a pu se<br />
faire.<br />
La grosse difficulté tient au fait que, dans la majorité <strong>de</strong>s<br />
cas, on ne peut qualifier l’existant. Il nous arrive, quand<br />
cela est possible, <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s mesures d’isolement aux<br />
bruits aériens ou aux bruits <strong>de</strong> chocs. En fonction <strong>de</strong>s<br />
exigences du maître d’ouvrage, on tente alors <strong>de</strong> se<br />
rapprocher <strong>de</strong>s exigences du neuf, du règlement <strong>de</strong> juin<br />
1999, ou <strong>de</strong> celles du règlement <strong>de</strong> juin 1969.<br />
Ghislain Pinçon : Ce dont Jacques Daliphard fait état ici<br />
correspond au quotidien d’une gran<strong>de</strong> entreprise du<br />
bâtiment, qui dispose <strong>de</strong> l’équipement <strong>et</strong> <strong>de</strong>s compétences<br />
en acoustique. Ce n’est malheureusement pas le cas <strong>de</strong> bien<br />
<strong>de</strong>s p<strong>et</strong>ites d’entreprises du bâtiment. Effectivement, il est<br />
très difficile <strong>de</strong> convaincre les maîtres d’ouvrage d’allouer<br />
un budg<strong>et</strong> au diagnostic acoustique, même en présence d’un<br />
problème particulier d’acoustique. Le maître d’ouvrage<br />
voudrait que l’entrepreneur lui chiffre les travaux avant<br />
même <strong>de</strong> connaître la nature <strong>et</strong> l’ampleur <strong>de</strong>s travaux qui<br />
doivent être réalisés.<br />
Mathias Meisser : M. Daliphard a souligné une autre<br />
difficulté pour les entrepreneurs : quels sont les objectifs à<br />
atteindre ou pouvant être atteints ? Il faut déplorer<br />
qu’aucun texte ne précise les objectifs d’isolement qu’il<br />
serait raisonnable <strong>de</strong> se fixer. En augmentant, en 1994 (puis<br />
en 1999 avec les indices européens), les exigences<br />
applicables à l’habitat neuf, alors qu’il n’existait rien pour<br />
l’existant, on a creusé l’écart entre l’existant <strong>et</strong> le neuf.<br />
Tout en insistant, par ailleurs, sur le fait que ces exigences<br />
concernant le neuf correspon<strong>de</strong>nt à un minimum <strong>de</strong> qualité<br />
acoustique, <strong>et</strong> non à un confort du logement. Le minimum<br />
pour le neuf <strong>de</strong>vrait être aussi le minimum pour l’existant.<br />
Ghislain Pinçon : Je crois que les exigences acoustiques<br />
dans le neuf ne correspon<strong>de</strong>nt pas tout à fait à un minimum.<br />
C’est plutôt un compromis technico-économique. Dans<br />
l’ancien, se pose le même problème, à savoir trouver le bon<br />
compromis technico-économique qui, c<strong>et</strong>te fois, est propre à<br />
chaque opération. Cela relève précisément <strong>de</strong><br />
l’investissement “en matière grise” que l’on est prêts à<br />
consentir au départ. On évalue la performance <strong>de</strong> l’existant,<br />
puis, compte tenu <strong>de</strong>s techniques disponibles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
caractéristiques du bâti, on fixe un objectif qui perm<strong>et</strong><br />
d’aller assez loin sans que cela coûte trop cher. Si une<br />
réglementation venait fixer <strong>de</strong>s exigences pour l’existant,<br />
cela poserait parfois d’énormes problèmes : quelquefois, 2<br />
décibels <strong>de</strong> mieux suffisent à faire grimper la facture <strong>de</strong> 30%<br />
ou 50%.<br />
Mathias Meisser : J’entends bien ce raisonnement. Mais, n’y<br />
aurait-il pas <strong>de</strong>s cas où l’existant mériterait d’être<br />
amélioré ? Il est regr<strong>et</strong>table que Mme Soulier 1 n’ait pu venir,<br />
car nous aurions pu l’interroger sur la faisabilité d’un texte<br />
cadre, pas nécessairement une réglementation, mais qui<br />
aurait valeur <strong>de</strong> “recommandation officielle”, qui fixerait<br />
<strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong> base <strong>et</strong> qui faciliteraient les relations avec les<br />
maîtres d’ouvrage.<br />
Christiane Flageoll<strong>et</strong>-Saadna : Vous soulevez là un<br />
problème pour lequel il est difficile d’apporter une réponse.<br />
1 Anne-Marie Soulier est chargée <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> à la DGUHC (ministère <strong>de</strong><br />
l’Équipement)<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Est-ce que cela mérite d’être réhabilité ? Quand on pose<br />
c<strong>et</strong>te question, on n’est pas loin <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r s’il ne vaut<br />
pas mieux démolir. Qu’en est-il <strong>de</strong>s habitants, que<br />
souhaitent-ils, que <strong>de</strong>viennent-ils ? D’où l’importance,<br />
d’ailleurs, quand on fait <strong>de</strong>s diagnostics <strong>de</strong> la gêne due au<br />
bruit, <strong>de</strong> prendre en compte la perception <strong>de</strong>s habitants.<br />
Ghislain Pinçon : Un élément <strong>de</strong> réponse est à trouver dans<br />
la loi Solidarité renouvellement urbain (SRU), conçue pour<br />
éliminer les logements les plus insalubres. C<strong>et</strong>te loi précise<br />
un certain nombre <strong>de</strong> critères perm<strong>et</strong>tant d’éliminer les<br />
logements les plus défavorisés, mais aucun critère<br />
d’acoustique n’y figure. On a jugé que l’acoustique n’était<br />
pas un enjeu prioritaire. Alors qu’on connaît <strong>de</strong> nombreux<br />
exemples <strong>de</strong> logements impropres à leur <strong>de</strong>stination pour<br />
cause d’isolation acoustique insuffisante.<br />
Jacques Daliphard : Je souhaiterais insister aussi sur le fait<br />
que, dans certains endroits, notamment à Paris, il n’est pas<br />
question <strong>de</strong> démolir : coefficient d’occupation <strong>de</strong>s sols<br />
oblige, si vous démolissez, vous ne pourrez reconstruire que<br />
trois fois moins <strong>de</strong> planchers. C’est ainsi qu’on réhabilite <strong>de</strong>s<br />
immeubles avec <strong>de</strong>s murs en pans <strong>de</strong> bois <strong>et</strong> <strong>de</strong>s planchers<br />
légers, <strong>de</strong>s poutrelles bois, dans <strong>de</strong>s appartements qui vont<br />
se vendre 6000 euros du m 2 . Un <strong>de</strong>rnier point, assez<br />
important : en réhabilitation, il faut essayer <strong>de</strong> ne pas trop<br />
isoler en faça<strong>de</strong> ; 35 dB, c’est bien, 38, c’est un grand<br />
maximum, en cas <strong>de</strong> contraintes du type boulevard<br />
périphérique ou autoroute. De toute façon, il faut gar<strong>de</strong>r le<br />
dormant <strong>de</strong>s menuiseries existant <strong>et</strong> y adapter un dormant<br />
neuf. En réhabilitation, aller “chatouiller” les murs serait<br />
pire encore que <strong>de</strong> laisser le dormant existant. En matière<br />
<strong>de</strong> bruit aérien, il faut voir ce que l’on peut faire ; côté<br />
bruits <strong>de</strong> chocs, on ne peut pas faire n’importe quoi, enfin,<br />
il faut se poser la question <strong>de</strong>s bruits d’équipement. On n’a<br />
pas toujours le loisir d’intervenir comme il le faudrait. Le<br />
tuyau <strong>de</strong>s WC passe parfois chez le voisin n’importe<br />
comment. Cela relève <strong>de</strong> la recherche d’un compromis, en<br />
essayant <strong>de</strong> gérer tous les apports <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> ne pas trop<br />
isoler l’un pour faire émerger l’autre, le bruit d’équipement<br />
par exemple.<br />
Philippe Guignouard : Jacques Daliphard a souligné les<br />
difficultés <strong>de</strong> mise en œuvre liées à un objectif d’isolation<br />
<strong>de</strong> faça<strong>de</strong> trop poussé. C’est un <strong>de</strong>s aspects <strong>de</strong> la question.<br />
Ce qui me semble fondamental, c’est la cohérence <strong>de</strong> tous<br />
les objectifs acoustiques qu’on se fixe pour un bâtiment. Si<br />
l’on isole trop la faça<strong>de</strong>, il faudra fortement isoler vis-à-vis<br />
<strong>de</strong>s bruits intérieurs, <strong>de</strong>s bruits d’impact <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bruits<br />
d’équipement. On n’a alors plus <strong>de</strong> solution, en particulier si<br />
l’on conserve les planchers. Il faut donc réfléchir, à l’échelle<br />
<strong>de</strong> l’ensemble du bâtiment, à <strong>de</strong>s objectifs cohérents <strong>et</strong><br />
réalistes prenant en compte les éléments du bâtiment à<br />
conserver. Plutôt que <strong>de</strong> préciser <strong>de</strong>s valeurs, le texte cadre<br />
dont vous parliez pourrait inclure ce type d’avertissement.<br />
Enfin, certes, les p<strong>et</strong>its entrepreneurs n’ont pas tous<br />
l’ampleur financière <strong>de</strong> possé<strong>de</strong>r, en interne, <strong>de</strong>s<br />
compétences en acoustique, mais c’est toute la raison<br />
d’être <strong>de</strong>s compétences externes.<br />
Jacques Daliphard : C’était bien le sens <strong>de</strong> mon propos : les<br />
maîtres d’ouvrage rechignent à faire appel à un bureau<br />
d’étu<strong>de</strong>s, disons-le carrément, avant <strong>de</strong> confier <strong>de</strong>s travaux.<br />
Philippe Guignouard : Méfions-nous <strong>de</strong> la définition<br />
d’objectifs, car c<strong>et</strong>te logique n’est pas toujours synonyme<br />
d’amélioration. Prenez l’exemple <strong>de</strong>s bureaux : aucune<br />
réglementation ne s’applique, pourtant, en quinze ans, les<br />
cahiers <strong>de</strong>s charge <strong>de</strong>s maîtres d’ouvrage sont passés <strong>de</strong> 25 à<br />
30 dB d’isolement entre bureaux à un minimum <strong>de</strong> 38 dB. En<br />
vingt ans, on a n<strong>et</strong>tement plus amélioré l’acoustique <strong>de</strong>s<br />
bureaux que celle <strong>de</strong>s logements. Il est vrai que l’on m<strong>et</strong><br />
beaucoup plus d’argent dans les bureaux.<br />
Aline Gaulupeau : Il me semble malgré tout qu’il y aurait<br />
avantage à convaincre les maîtres d’ouvrage du bien-fondé<br />
d’un diagnostic précis <strong>de</strong> l’existant. D’une part, le<br />
diagnostic peut révéler que la performance acoustique du<br />
bâtiment existant est satisfaisante ; d’autre part, cela<br />
perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> fixer <strong>de</strong>s objectifs réalistes, donc d’estimer la<br />
faisabilité <strong>et</strong> <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s économies sur le coût <strong>de</strong>s<br />
travaux. Faire appel à un bureau d’étu<strong>de</strong> en acoustique, à<br />
mon avis, se traduit par <strong>de</strong>s économies réalisées sur le coût<br />
du chantier <strong>de</strong> réhabilitation <strong>et</strong>, certainement, sur la qualité<br />
du résultat final.<br />
Jacques Daliphard : Il faudra déployer <strong>de</strong>s trésors <strong>de</strong><br />
persuasion car je connais <strong>de</strong>s entreprises qui ne font même<br />
pas apparaître les étu<strong>de</strong>s sur le <strong>de</strong>vis, car le maître<br />
d’ouvrage n’en veut pas. On noie les étu<strong>de</strong>s dans le prix <strong>de</strong>s<br />
travaux. Je pense que Lafarge connaît ça.<br />
Pascal Ozouf : Je voudrais juste rebondir sur les propos <strong>de</strong><br />
Philippe Guignouard <strong>et</strong> sa conclusion qu’il n’y avait pas <strong>de</strong><br />
solution en réhabilitation. Sachez qu’il en existe <strong>de</strong><br />
relativement simples <strong>et</strong> peu coûteuses. Preuve en est<br />
l’opération “1000 logements”, une expérience menée par les<br />
ministères <strong>et</strong> certains laboratoires : même si, par rapport à<br />
l’objectif initial, la conclusion est plutôt mitigée, il existe<br />
<strong>de</strong>s solutions qui font appel à <strong>de</strong>s structures relativement<br />
faibles en épaisseur mais néanmoins performantes en<br />
acoustique. Un exemple : Placosilence.<br />
Mathias Meisser : Il y a toujours <strong>de</strong>s solutions.<br />
Maurice Auffr<strong>et</strong> : Pour en revenir au renforcement <strong>de</strong>s<br />
performances acoustiques <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s, je crois qu’il faut<br />
aussi penser au problème du renouvellement <strong>de</strong> l’air. Un<br />
appartement isolé acoustiquement, c’est un appartement<br />
étanche en faça<strong>de</strong>, étanche au niveau <strong>de</strong>s portes palières,<br />
étanche partout. Sans apport d’air neuf, on va au <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s<br />
problèmes. Et ménager <strong>de</strong>s entrées d’air ne suffit pas : l’air<br />
est fainéant, il ne suffit pas <strong>de</strong> faire un trou dans une faça<strong>de</strong><br />
pour que l’air rentre. Il faut une VMC ou un extracteur, mais<br />
alors, attention aux problèmes <strong>de</strong> con<strong>de</strong>nsation<br />
superficielle. Ce phénomène peut entraîner <strong>de</strong>s dégâts<br />
collatéraux très importants <strong>et</strong> aboutir à une <strong>de</strong>struction<br />
d’une partie du bâtiment.<br />
Quel <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong>s résultats en<br />
réhabilitation ?<br />
Michel Villot : J’ai bien compris qu’il fallait être très<br />
mo<strong>de</strong>ste sur les objectifs en ce qui concerne la<br />
réhabilitation, <strong>et</strong> que, souvent, aucun diagnostic n’était<br />
réalisé. On a évoqué précé<strong>de</strong>mment, concernant le neuf, le<br />
problème <strong>de</strong>s domaines d’application <strong>de</strong>s produits, <strong>de</strong> la<br />
difficulté à garantir telle performance sur tel support. En<br />
réhabilitation, c’est encore pire : on y rencontre <strong>de</strong>s<br />
supports <strong>de</strong> toute nature. Quel <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> maîtrise atteint-on<br />
en réhabilitation ? Est-ce qu’on n’a pas fréquemment <strong>de</strong>s<br />
surprises ?<br />
De la salle : On rencontre en eff<strong>et</strong> tous les cas <strong>de</strong> figure. Si<br />
bien que si l’on ne sait pas exactement <strong>de</strong> quoi est fait<br />
l’existant… D’autant que les surprises peuvent être <strong>de</strong><br />
taille : il m’est arrivé <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s parpaings <strong>de</strong><br />
pouzzolane au premier étage, <strong>de</strong>s briques creuses au<br />
<strong>de</strong>uxième <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pans <strong>de</strong> bois au troisième. Il faut donc<br />
vraiment aller fouiller. En acoustique, si l’on se contente<br />
d’enlever le parqu<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> remplir avec du béton <strong>de</strong><br />
polystyrène, c’est certain, on dégra<strong>de</strong> les performances.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 91
Mathias Meisser : La question <strong>de</strong> Michel Villot peut être<br />
prolongée. À supposer qu’on ait fait le bon diagnostic <strong>de</strong>s<br />
structures, est-ce qu’on sait améliorer <strong>et</strong> atteindre un<br />
résultat ? Je crois pouvoir dire que, pour répondre, il faut<br />
distinguer <strong>de</strong>ux grands types <strong>de</strong> bâtiments : d’une part, les<br />
bâtiments que je qualifierais d’homogènes <strong>et</strong> lourds, en<br />
maçonnerie, mais cela peut être <strong>de</strong>s poutrelles hourdis ;<br />
d’autre part, la batterie <strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong> type ancien, à<br />
solives <strong>de</strong> bois ou <strong>de</strong> métal. Pour le bâtiment homogène, on<br />
arrivera à apprécier un objectif qu’on arrivera, à peu près, à<br />
tenir. Car l’on intervient alors dans un cadre qui s’apparente<br />
à celui du neuf. En revanche, dans l’ancien, l’évaluation <strong>de</strong><br />
l’objectif sera moins précise, à cause <strong>de</strong>s transmissions<br />
latérales, qui sont très mal connues. Elles sont<br />
heureusement souvent relativement faibles, grâce à<br />
l’hétérogénéité <strong>de</strong>s matériaux, qui crée <strong>de</strong>s pertes à chaque<br />
interface entre produits. En raisonnant en isolements, un<br />
peu comme on applique les formules <strong>de</strong> renforcement,<br />
m<strong>et</strong>tons, aux indices d’affaiblissement acoustique <strong>de</strong>s<br />
parois, on obtient aussi <strong>de</strong>s résultats relativement corrects.<br />
Il n’en reste pas moins que la garantie <strong>de</strong> résultats est<br />
beaucoup plus dangereuse. Or souvent, on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux<br />
entreprises, aux constructeurs, <strong>de</strong> garantir leurs résultats.<br />
Jacques Daliphard : On arrive à s’affranchir quelque peu <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te obligation <strong>de</strong> résultat, en vertu du fait qu’il est<br />
difficile <strong>de</strong> garantir un résultat précis. On se situera plutôt<br />
dans une logique consistant à se rapprocher <strong>de</strong> la<br />
réglementation <strong>de</strong> 1969 ou <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> 1999.<br />
Francis Bénichou : Je ne voudrais pas que l’on termine sur<br />
une note trop pessimiste quant à l’amélioration <strong>de</strong> l’habitat<br />
existant. Nous sommes tout <strong>de</strong> même quelques-uns à avoir<br />
connu <strong>de</strong>s expériences d’opérations <strong>de</strong> réhabilitation dans<br />
<strong>de</strong>s habitats, effectivement non homogènes en termes <strong>de</strong><br />
structure, qui se sont avérés satisfaisantes. Bien sûr, la<br />
prévision est plus difficile. J’ai à l’esprit au moins une<br />
opération, menée à Charleville, avec <strong>de</strong>s planchers<br />
totalement hétérogènes d’un niveau à l’autre. Nous avons<br />
finalement adopté une solution <strong>de</strong> renforcement somme<br />
toute classique — plaque <strong>de</strong> plâtre sur ossature <strong>et</strong> laine<br />
minérale —, qui a donné <strong>de</strong>s résultats en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong>s 51 dB(A)<br />
<strong>de</strong> la réglementation <strong>de</strong> 1969, mais qui a apporté une<br />
amélioration <strong>de</strong> 7 à 8 dB par rapport à l’état initial, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
performances <strong>de</strong> 48 à 49 dB. En réhabilitation, les solutions<br />
existent, mais la prescription, surtout sur un habitat non<br />
homogène est un exercice plus difficile. Il ne faut pas être<br />
pessimiste, mais très pru<strong>de</strong>nt.<br />
Ghislain Pinçon : Je crois que non seulement la prescription<br />
est plus difficile, mais également, tout au long <strong>de</strong>s travaux,<br />
il importe que le bureau d’étu<strong>de</strong>s, l’entreprise <strong>de</strong> mise en<br />
œuvre <strong>et</strong> la maîtrise d’œuvre échangent en permanence.<br />
Cela nécessite une organisation un tant soit peu différente<br />
du fonctionnement habituel d’un chantier.<br />
Aline Gaulupeau : En réhabilitation, très souvent, un<br />
diagnostic est nécessaire. Il arrive fréquemment que les<br />
maîtres d’ouvrage se tournent vers nous, bureau <strong>de</strong><br />
contrôle, <strong>et</strong> nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt d’assurer pour eux une mission<br />
d’acoustique. Nous leur répondons qu’il faudrait faire un<br />
diagnostic, mais quand ils se tournent vers nous, les<br />
différentes entreprises qui sont intervenues ont déjà fait<br />
plein <strong>de</strong> trous, <strong>et</strong> il est trop tard pour faire un diagnostic. Je<br />
persiste à dire que, sans diagnostic, on ne peut non<br />
seulement rien garantir mais on ne peut même pas se fixer<br />
d’objectif. On va donc à l’aventure. Il faudrait que le maître<br />
d’ouvrage sache précisément ce pour quoi il réhabilite.<br />
Souvent, la réhabilitation n’a pas pour obj<strong>et</strong> d’améliorer le<br />
confort acoustique. On s’en tient alors à ne pas détériorer<br />
les performances. Cela mérite quand même un diagnostic.<br />
Ghislain Pinçon : Jusqu’à présent, l’acoustique, aux yeux<br />
<strong>de</strong>s maîtres d’ouvrage, ce n’est pas très “ven<strong>de</strong>ur”. Comme<br />
ils ne ven<strong>de</strong>nt pas l’acoustique à leurs clients, ils restent<br />
très frileux.<br />
Mathias Meisser : Attention à c<strong>et</strong>te notion : ce n’est peutêtre<br />
pas très ven<strong>de</strong>ur, mais cela peut s’avérer très<br />
dévastateur. Combien d’exemples d’opérations <strong>de</strong><br />
réhabilitation totale qui se terminent <strong>de</strong>vant les tribunaux.<br />
Or, l’examen <strong>de</strong> la jurispru<strong>de</strong>nce en matière <strong>de</strong> contentieux<br />
après réhabilitation indique que les juges condamnent les<br />
performances trop éloignées <strong>de</strong> celles du neuf, n’offrant pas<br />
un confort acoustique suffisant. Même en l’absence <strong>de</strong><br />
réglementation.<br />
Ghislain Pinçon : C<strong>et</strong>te jurispru<strong>de</strong>nce n’est pas encore<br />
suffisante pour servir d’exemple.<br />
Mathias Meisser : En cas <strong>de</strong> litige, les juges se basent sur la<br />
réglementation du neuf en vigueur lors <strong>de</strong> la construction <strong>de</strong><br />
l’immeuble.<br />
Ghislain Pinçon : C’est à ce titre, en eff<strong>et</strong>, qu’un texte<br />
d’encadrement, circulaire ou recommandation, aurait un<br />
intérêt, à l’instar <strong>de</strong> ce qui se fait dans d’autres domaines<br />
tels que la sécurité incendie ou la sécurité électrique. Un<br />
texte qui donnerait <strong>de</strong>s conseils <strong>et</strong> qui informerait les<br />
maîtres d’ouvrage que, même en l’absence <strong>de</strong><br />
réglementation, il y a lieu <strong>de</strong> se préoccuper <strong>de</strong> l’acoustique.<br />
Les vitrages isolants en rénovation <strong>et</strong> réhabilitation <strong>de</strong> logements<br />
Alain Roussel (Saint-Gobain Glass France)<br />
Une feuille <strong>de</strong> verre <strong>de</strong> 1 mm d’épaisseur pèse 2,5 kg par<br />
mètre carré. Un vitrage <strong>de</strong> 4 mm pèse donc 10 kg/m 2 . Quand<br />
on fait appel à la loi <strong>de</strong> masse, on utilise <strong>de</strong>s verres<br />
beaucoup plus épais, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 mm, ce qui équivaut à<br />
25 kg/m 2 . Ce sont <strong>de</strong>s solutions lour<strong>de</strong>s, certes efficaces<br />
contre le bruit, mais qui n’isolent pas du froid en tant que<br />
simple vitrage. Quand la température est <strong>de</strong> 0°C <strong>de</strong>hors, il<br />
faut savoir que la température intérieure d’un vitrage simple<br />
dans une pièce chauffée à 20°C, qu’il ait 4 ou 10 mm<br />
d’épaisseur, est <strong>de</strong> 5°C. Une dépense inutile <strong>de</strong> chauffage <strong>et</strong><br />
un manque <strong>de</strong> confort qui nécessitent <strong>de</strong> mieux isoler. En<br />
montant <strong>de</strong>ux verres <strong>de</strong> 4 mm en vitrage isolant, il est<br />
possible d’améliorer <strong>de</strong> façon simple la résistance<br />
thermique. Les compositions verrières les plus couramment<br />
utilisées en double vitrage associent donc 2 feuilles <strong>de</strong> verre<br />
<strong>de</strong> 4 mm, séparées par un espace d’air, <strong>de</strong> 6 mm dans les<br />
années 70, <strong>de</strong> 12 mm dans les années 90 <strong>et</strong> <strong>de</strong> 16 mm<br />
aujourd’hui. Parallèlement à l’augmentation <strong>de</strong> la lame<br />
d’air, la performance thermique <strong>de</strong>s doubles vitrages a été<br />
augmentée très sensiblement par l’usage <strong>de</strong> verre à couche<br />
peu émissive. Mais toutes ses améliorations thermiques sont<br />
sans eff<strong>et</strong> sur la performance acoustique <strong>de</strong>s doubles<br />
vitrages. Chacun sait qu’un vitrage 4/12/4 ou 4/6/4 a<br />
sensiblement la même efficacité acoustique qu’un vitrage<br />
monolithique <strong>de</strong> 4 mm. Pour améliorer leur performance<br />
acoustique on a traditionnellement recours à <strong>de</strong>s vitrages<br />
asymétriques. Typiquement, on choisit pour l’un <strong>de</strong>s verres<br />
une épaisseur <strong>de</strong> 10 mm. On passe donc d’un vitrage 4/16/4<br />
qui pèse 20 kg/m 2 à un vitrage 4/10/10 qui, lui, pèse 35<br />
kg/m 2 , soit une augmentation <strong>de</strong> 15 kg au mètre carrée, ce<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
qui n’est pas négligeable pour sa mise en œuvre <strong>et</strong> son<br />
transport. Au passage pour rester dans la largeur <strong>de</strong> feuillure<br />
<strong>de</strong> 24 mm on réduit l’épaisseur <strong>de</strong> la lame d’air ce qui<br />
diminue la performance thermique.<br />
On l’a vu, l’objectif en rénovation pour un isolement <strong>de</strong><br />
faça<strong>de</strong> classique est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 35 dB. Mais les produits<br />
monolithiques asymétriques perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> tels isolements<br />
sont lourds. Pour associer performances thermiques <strong>de</strong>s<br />
verres peu émissifs <strong>et</strong> performances acoustiques renforcées,<br />
un <strong>de</strong>s verres sera un verre feuill<strong>et</strong>é avec en son cœur un<br />
film <strong>de</strong> butyral <strong>de</strong> polyvinyle acoustique. Ce nouveau verre<br />
feuill<strong>et</strong>é, le Stadip Silence, comparé à un vitrage feuill<strong>et</strong>é<br />
classique, offre un gain <strong>de</strong> 3 à 5 dB dans une composition<br />
analogue. Les propriétés <strong>de</strong> “cœur amortisseur” <strong>de</strong> ce<br />
butyral <strong>de</strong> polyvinyle spécial ont été mises à profit dans la<br />
conception d’un vitrage allégé, un “2+2”, qui offre <strong>de</strong>s<br />
performances acoustiques élevées <strong>et</strong> une épaisseur très<br />
réduite. Ce principe <strong>de</strong> limitation <strong>de</strong> la masse <strong>de</strong> verre<br />
propre au Stadip silence a été intégrée dans une gamme <strong>de</strong><br />
produits appelée “Climacomfort”. Il s’agit d’un nouveau<br />
double vitrage à isolation thermique <strong>et</strong> acoustique renforcée<br />
qui est compatible avec les conditions particulières <strong>de</strong> la<br />
réhabilitation <strong>de</strong> logements en centre-ville, là où les<br />
conditions d’accès, soit en terme <strong>de</strong> services <strong>de</strong> transports,<br />
soit en terme <strong>de</strong> personnel, sont difficiles. Qui plus est,<br />
accé<strong>de</strong>r au logement dans un cadre <strong>de</strong> rénovation, c’est<br />
également ne pas « expulser » le locataire ou le propriétaire<br />
tout en réalisant très rapi<strong>de</strong>ment les travaux. Pour s’adapter<br />
à une feuillure <strong>de</strong> menuiserie standard <strong>de</strong> 24 mm, il a fallu<br />
recourir à un verre feuill<strong>et</strong>é Stadip Silence <strong>de</strong> type 22.1,<br />
associé à une lame d’air <strong>de</strong> 16 mm <strong>et</strong> à une feuille <strong>de</strong> verre<br />
<strong>de</strong> 4 mm. Résultat : un poids très allégé <strong>de</strong> 20 kg/m 2 , une<br />
feuillure <strong>de</strong> 24 mm <strong>et</strong> la possibilité d’y intégrer une couche<br />
à isolation thermique renforcée, répondant à la nouvelle<br />
appellation <strong>de</strong>s vitrages à isolation renforcée (VIR) exigée<br />
par la RT 2000. En associant <strong>de</strong> l’air ou <strong>de</strong> l’argon, ce<br />
vitrage 4/16/4 atteint un coefficient U <strong>de</strong> 1,1 W/(m².K)<br />
(avec l’argon).<br />
L’examen <strong>de</strong>s courbes selon les fréquences normatives<br />
montre que, dans les fréquences hautes, les creux ont été<br />
très rapi<strong>de</strong>ment comblés par la présence du Stadip Silence.<br />
Même en 22.1, hormis quelques pointes dans les basses<br />
fréquences, la performance globale <strong>de</strong> la fenêtre perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
justifier d’un R W <strong>de</strong> 38 dB. L’on obtient un gain <strong>de</strong> 4 à 5 dB<br />
par rapport à un vitrage classique. Côté économies<br />
d’énergie, ce vitrage apporte aussi plus <strong>de</strong> confort, car la<br />
présence du verre Planitherm Futur N limite les déperditions<br />
thermiques. On supprime ainsi la paroi froi<strong>de</strong>. Enfin, ce<br />
vitrage 4/16/4 est bien sûr plus léger. Une expérience a<br />
d’ailleurs été menée en centre-ville afin <strong>de</strong> vérifier la<br />
compatibilité <strong>de</strong> ces vitrages légers avec <strong>de</strong>s conditions<br />
d’accès difficiles. Il s’agit d’un chantier <strong>de</strong> réhabilitation <strong>de</strong><br />
200 fenêtres dans <strong>de</strong>s logements occupés n’offrant, pour<br />
tout accès aux étages, que <strong>de</strong>s escaliers en colimaçon.<br />
L’économie <strong>de</strong> poids, au niveau <strong>de</strong> la manutention sur<br />
chantier, a été estimée à 3,5 tonnes. Climacomfort<br />
constitue donc une solution simple <strong>de</strong> rénovation allégée qui<br />
perm<strong>et</strong> <strong>de</strong>s renforcements acoustiques <strong>et</strong> thermiques <strong>de</strong> bon<br />
niveau correspondant aux isolements <strong>de</strong> faça<strong>de</strong> en<br />
réhabilitation les plus couramment <strong>de</strong>mandés.<br />
Débat<br />
En réhabilitation, attention aux performances<br />
<strong>de</strong>s autres accessoires <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> (entrées<br />
d’air, coffres <strong>de</strong> vol<strong>et</strong>s roulants)<br />
Mathias Meisser : Nous avons pu apprécier l’effort réalisé<br />
dans le domaine <strong>de</strong>s vitrages pour alléger tout en obtenant<br />
les mêmes performances. Les poids importants <strong>de</strong>s vitrages,<br />
dans l’existant, constituent un réel problème <strong>et</strong> ces produits<br />
me semblent une bonne avancée en la matière.<br />
Thierry Legouis : Avez-vous décliné c<strong>et</strong>te gamme pour <strong>de</strong>s<br />
épaisseurs supérieures ?<br />
Alain Roussel : Nous avons pour proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> décliner ce double<br />
vitrage mince acoustique dans d’autres compositions qui<br />
perm<strong>et</strong>traient d’atteindre <strong>de</strong> plus hauts niveaux, pour <strong>de</strong> la<br />
réhabilitation <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>s <strong>de</strong> bâtiments exposés à <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>de</strong> bruits très élevés. Aujourd’hui, nos laboratoires<br />
d’acoustique réalisent <strong>de</strong>s essais supplémentaires sur <strong>de</strong>s<br />
compositions, toujours asymétriques, mais en intégrant <strong>de</strong>ux<br />
faces Stadip Silence.<br />
Thierry Legouis: Que dire du coût, par comparaison à <strong>de</strong>s<br />
fenêtres <strong>de</strong> performance égale ?<br />
Alain Roussel : Nous avons réalisé une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> prix avec un<br />
partenaire, qui a révélé un écart <strong>de</strong> 1 euro sur la fenêtre<br />
fournie, à l’avantage du monolithique. Donc, pour un euro<br />
<strong>de</strong> plus, vous remplacez la feuille <strong>de</strong> verre <strong>de</strong> 10 mm par du<br />
Stadip Silence 22.1.<br />
Maurice Auffr<strong>et</strong> : Il reste à dire quelques mots sur le<br />
problème <strong>de</strong> la pose. Une fenêtre qui, en laboratoire, offre<br />
un isolement <strong>de</strong> 35 dB, compte tenu <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> mise<br />
en œuvre que rencontrent certains poseurs — je ne parle ni<br />
<strong>de</strong>s entrées d’air ni <strong>de</strong>s coffres <strong>de</strong> vol<strong>et</strong> roulant —, peut très<br />
bien, au final, ne pas répondre aux attentes du client.<br />
Deuxième remarque : je m’interroge sur l’intérêt, en<br />
réhabilitation, <strong>de</strong> proposer <strong>de</strong>s vitrages qui offrent <strong>de</strong>s<br />
performances très élevées, car poser un vitrage <strong>de</strong> 35 dB(A)<br />
en réhabilitation c’est immédiatement se poser le problème<br />
<strong>de</strong> l’entrée d’air <strong>et</strong> du coffre <strong>de</strong> vol<strong>et</strong> roulant : sait-on faire<br />
<strong>de</strong>s entrées d’air suffisamment performantes pour, en<br />
réhabilitation, dépasser les 35 dB(A) d’isolement sur site ?<br />
Alain Roussel : Non, pas vraiment.<br />
Maurice Auffr<strong>et</strong>: Les coffres <strong>de</strong> vol<strong>et</strong> roulant posent <strong>de</strong> plus<br />
en plus <strong>de</strong> problèmes. Très souvent, ils sont constitués d’une<br />
structure en plastique mince qui offre <strong>de</strong>s performances<br />
insuffisantes. Souvent assemblés sur place, parfois<br />
maladroitement, les coffres <strong>de</strong> vol<strong>et</strong> roulant, en<br />
réhabilitation, sont posés au ras du plafond, ce qui interdit<br />
tout accès à la partie supérieure pour la m<strong>et</strong>tre en<br />
étanchéité. L’on se trouve donc souvent dans la situation où<br />
les performances <strong>de</strong>s produits proposés sont redondantes, <strong>et</strong><br />
où les autres accessoires <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> ne perm<strong>et</strong>tent pas <strong>de</strong><br />
compléter les performances <strong>de</strong> l’ouvrage. Dans <strong>de</strong> telles<br />
circonstances, il ne sert à rien <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre <strong>de</strong>s<br />
vitrages très performants.<br />
Alain Roussel: Ce que vous soulevez, en eff<strong>et</strong>, c’est la<br />
nécessité d’une analyse <strong>de</strong>s besoins du chantier. Ce que vous<br />
dites est vrai : dans la finalité, il y a toujours une dérive du<br />
résultat optimum <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’objectif à atteindre en terme <strong>de</strong><br />
réhabilitation. Mais il existe aujourd’hui beaucoup <strong>de</strong><br />
produits, <strong>et</strong> la mise en œuvre n’est pas toujours qualifiée<br />
pour les poser. Des cahiers <strong>de</strong>s charges sont définis pour la<br />
mise en œuvre <strong>et</strong>, parfois, ces mises en œuvre ne sont pas<br />
suivies.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 93
J’ai par ailleurs quelques éléments à communiquer sur le<br />
suj<strong>et</strong> du bruit <strong>de</strong> la pluie sur les verrières. L’impact <strong>de</strong> la<br />
pluie ou <strong>de</strong> la grêle sur les vérandas, chez les particuliers ou<br />
dans <strong>de</strong>s édifices publics, est une source <strong>de</strong> nuisances<br />
acoustiques qui peuvent être préjudiciables à l’utilisation du<br />
bâtiment. Avec les polycarbonates, en simples vitrages,<br />
même feuill<strong>et</strong>és, les nuisances acoustiques sont<br />
relativement importantes. Nous avons réalisé <strong>de</strong>s essais. Une<br />
feuille <strong>de</strong> polycarbonate a une transmission sonore <strong>de</strong> 71<br />
dB(A) ; un verre Stadip 44.2 ordinaire, lui, transm<strong>et</strong> 53<br />
dB(A). Un vitrage isolant classique, c’est-à-dire un<br />
6/12/44.2, sans option silence, transm<strong>et</strong> 52 dB(A) <strong>et</strong> un<br />
Stadip Silence intégré à la place du 44.2 classique perm<strong>et</strong><br />
d’atteindre 46 dB(A), soit un gain <strong>de</strong> 6 dB par rapport à une<br />
composition vitrée classique. Et un monument <strong>de</strong> différence<br />
avec le polycarbonate.<br />
Mathias Meisser : Je voudrais intervenir <strong>et</strong> ce sera là ma<br />
conclusion. Nous avons survolé un certain nombre <strong>de</strong> suj<strong>et</strong>s,<br />
il n’était pas question d’abor<strong>de</strong>r tous les problèmes <strong>de</strong><br />
l’acoustique <strong>de</strong>s constructions, <strong>et</strong> montré que les prévisions<br />
semblaient plus faciles à réaliser dans le neuf que dans<br />
l’existant, les caractéristiques dans l’existant étant moins<br />
bien connues. Quant aux produits, on connaît leurs<br />
caractéristiques, avec une incertitu<strong>de</strong> associée. Viennent<br />
ensuite la mise en œuvre <strong>et</strong> la mesure <strong>de</strong> réception.<br />
Finalement, entre la prévision <strong>et</strong> la mesure <strong>de</strong> contrôle,<br />
c’est une chaîne complète qui fera la différence à l’arrivée,<br />
une différence liée aux incertitu<strong>de</strong>s globales <strong>de</strong> l’ensemble.<br />
Je ne suis pas tout à fait d’accord avec M. Auffr<strong>et</strong> <strong>et</strong> M.<br />
Roussel, lorsqu’ils m<strong>et</strong>tent en cause la seule mise en œuvre,<br />
quand le résultat escompté n’est pas au ren<strong>de</strong>z-vous. La<br />
mise en œuvre est souvent en cause mais elle n’est pas la<br />
seule : la prévision, notamment dans l’ancien, entre en ligne<br />
<strong>de</strong> compte, la connaissance <strong>de</strong>s produits, la mesure <strong>de</strong><br />
contrôle également.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Atelier<br />
Bruits <strong>et</strong> vie quotidienne<br />
Atelier animé par Philippe Ritter (Ville <strong>de</strong> Lyon)<br />
Introduction<br />
Dr Philippe Ritter (Ville <strong>de</strong> Lyon)<br />
les difficultés d’application <strong>de</strong> la réglementation, il n’a pas<br />
été mis en évi<strong>de</strong>nce que les personnes avaient du mal à<br />
trouver les textes.<br />
Par contre, ce qui est important c’est que c<strong>et</strong>te<br />
réglementation soit judicieuse, adaptée à la situation,<br />
applicable <strong>et</strong> qu’il se trouve suffisamment <strong>de</strong> personnels,<br />
qu’ils soient <strong>de</strong> l’État, <strong>de</strong>s collectivités territoriales ou<br />
autres, en capacité d’appliquer la réglementation, c’est-àdire<br />
suffisamment nombreux, suffisamment motivés <strong>et</strong><br />
suffisamment compétents.<br />
C<strong>et</strong>te table ron<strong>de</strong> accueille quatre représentants <strong>de</strong> l’État :<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier, pour le ministère chargé <strong>de</strong> la santé,<br />
Emmanuel Bert, pour le ministère chargé <strong>de</strong> l’écologie <strong>et</strong> du<br />
développement durable, Marc Esmenjaud, pour la DDASS <strong>de</strong><br />
l’Isère, Jacky Levecq, pour la DDASS <strong>de</strong> Savoie, <strong>et</strong> René<br />
Gamba, directeur d’un bureau d’étu<strong>de</strong>s acoustiques à<br />
Toulouse.<br />
Le représentant <strong>de</strong> l’Afsse, l’Agence française <strong>de</strong> sécurité<br />
sanitaire environnementale, nous a dit qu’il trouvait que la<br />
réglementation était trop dispersée <strong>et</strong>, qu’à ses yeux,<br />
c’était un motif <strong>de</strong> mauvais traitement du problème. Je me<br />
perm<strong>et</strong>trai <strong>de</strong> ne pas partager du tout son point <strong>de</strong> vue. Je<br />
ne crois pas, qu’en l’espèce, la réglementation soit trop<br />
dispersée : est-il scandaleux que la réglementation sur<br />
l’urbanisme soit dans le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’urbanisme, que la<br />
réglementation sur la construction soit dans le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
construction, que la réglementation sur la circulation<br />
routière soit dans le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la route <strong>et</strong> la réglementation<br />
sur la santé dans le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé ? En soit, il n’y a là rien<br />
<strong>de</strong> pénalisant, l’essentiel étant que ceux qui sont chargés<br />
d’appliquer la réglementation, la trouvent ; or, dans le<br />
rapport que j’ai réalisé pour le Conseil national du bruit sur<br />
Et puis enfin, aussi intelligent que soit le législateur, il faut<br />
que c<strong>et</strong>te réglementation soit dynamique, qu’elle soit<br />
capable <strong>de</strong> s’adapter aux changements <strong>de</strong> la société, aux<br />
progrès <strong>de</strong> la technologie <strong>et</strong> <strong>de</strong>s sciences <strong>et</strong> qu’elle soit<br />
capable <strong>de</strong> prendre en compte <strong>de</strong>s phénomènes émergents<br />
qui, par définition, ne pouvaient pas être traités jusque là.<br />
C’est ce que nous allons voir dans c<strong>et</strong>te table ron<strong>de</strong>. Nous<br />
aurons une intervention <strong>de</strong> Nicolas Grén<strong>et</strong>ier sur le décr<strong>et</strong><br />
concernant les bruits <strong>de</strong> voisinage, puis une intervention<br />
d’Emmanuel Bert sur le décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1998 relatif aux lieux<br />
musicaux.<br />
Le décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1995 me paraît relever <strong>de</strong> l’adaptation <strong>de</strong> la loi<br />
à l’évolution <strong>de</strong>s connaissances <strong>et</strong> <strong>de</strong> la société, le décr<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
1998, quant à lui, <strong>de</strong> la formalisation réglementaire dans un<br />
domaine qui n’est jusqu’à présent pas couvert, je veux<br />
parler <strong>de</strong> la musique en plein air. Et puis, c<strong>et</strong>te<br />
réglementation, judicieuse ou pas, doit être appliquée. Pour<br />
qu’elle soit efficacement appliquée, il convient que<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s services administratifs conjuguent leurs<br />
efforts pour éviter les doublons, pour harmoniser leur<br />
interprétation <strong>de</strong>s textes <strong>et</strong> pour définir <strong>de</strong>s priorités dans<br />
l’application <strong>de</strong> la loi. C’est le rôle <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétences, qui sont une relative nouveauté sur le plan<br />
administratif, dont Messieurs Esmenjaud <strong>et</strong> Levecq nous<br />
parlerons. Et puis, concernant les problèmes émergents,<br />
nous parlerons avec M. Gamba <strong>de</strong>s éoliennes qu’on trouvait<br />
il y a vingt ans à l’arrière <strong>de</strong>s voiliers <strong>de</strong> croisière au long<br />
cours pour produire un peu d’électricité à bord. Aujourd’hui,<br />
elles sont à l’intérieur <strong>de</strong>s terres pour produire <strong>de</strong><br />
l’électricité pour les sé<strong>de</strong>ntaires, mais elles n’ont pas la<br />
même dimension ni la même production sonore.<br />
Évolution du décr<strong>et</strong> du 18 avril 1995 sur les bruits <strong>de</strong> voisinage<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier (Direction générale <strong>de</strong> la<br />
santé, ministère <strong>de</strong> la Santé <strong>et</strong> <strong>de</strong>s Solidarités)<br />
L’évolution du décr<strong>et</strong> sur les bruits <strong>de</strong> voisinage est liée en<br />
eff<strong>et</strong> à l’évolution <strong>de</strong> la société mais également à<br />
l’évolution <strong>de</strong>s matériels <strong>de</strong> relevé acoustique, qui<br />
perm<strong>et</strong>tent maintenant <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s mesures beaucoup plus<br />
précises.<br />
Pour refaire rapi<strong>de</strong>ment l’historique, en mars 2000, le<br />
prési<strong>de</strong>nt du Conseil national du bruit (CNB) installait un<br />
groupe <strong>de</strong> travail dont l’objectif visait à améliorer le<br />
dispositif <strong>de</strong> lutte contre les bruits <strong>de</strong> voisinage, tant sur le<br />
plan <strong>de</strong> la prévention que sur le plan du traitement <strong>de</strong>s<br />
plaintes. La prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> ce groupe a été confiée au<br />
Dr Ritter <strong>et</strong> ce groupe <strong>de</strong> travail a abouti à un rapport<br />
comportant 40 propositions d’actions concrètes. Après<br />
approbation <strong>de</strong> ce rapport par l’assemblée plénière du CNB,<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 95
la Direction générale <strong>de</strong> la santé a été sollicitée pour<br />
procé<strong>de</strong>r à la modification <strong>de</strong> la réglementation en vigueur<br />
<strong>et</strong> donc intégrer certaines <strong>de</strong> ces propositions.<br />
Comment définir les bruits <strong>de</strong> voisinage ? Selon la<br />
jurispru<strong>de</strong>nce, les bruits <strong>de</strong> voisinage font partie <strong>de</strong>s<br />
troubles anormaux <strong>de</strong> voisinage. Selon le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé<br />
publique, ce sont <strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> nature à porter atteinte à la<br />
tranquillité du voisinage ou à la santé <strong>de</strong> l’homme par leur<br />
durée, leur répétition ou leur intensité. Quasiment tous les<br />
bruits peuvent entrer dans c<strong>et</strong>te catégorie, si bien qu’on a<br />
donc décidé <strong>de</strong> définir les bruits <strong>de</strong> voisinage par la<br />
négative. L’article R.1336-6 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique<br />
stipule que ce sont en fait les bruits qui ne font pas partie<br />
d’une réglementation spécifique. Donc, les bruits <strong>de</strong><br />
voisinage sont en fait tous les bruits sauf les bruits perçus<br />
sur les lieux <strong>de</strong> travail, les bruits <strong>de</strong>s infrastructures <strong>de</strong><br />
transports terrestres <strong>et</strong> <strong>de</strong>s véhicules qui circulent, les bruits<br />
provenant <strong>de</strong>s aéronefs, les bruits provenant <strong>de</strong>s activités <strong>et</strong><br />
installations particulières <strong>de</strong> la défense nationale, les bruits<br />
<strong>de</strong>s installations classées pour la protection <strong>de</strong><br />
l’environnement, les bruits <strong>de</strong>s mines <strong>et</strong> <strong>de</strong>s carrières.<br />
Finalement, dans c<strong>et</strong>te catégorie, on trouve : les bruits <strong>de</strong> la<br />
télévision, les discothèques, les éoliennes, les stands <strong>de</strong><br />
tirs… La liste est quasiment infinie mais le co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé<br />
publique a permis <strong>de</strong> classifier ces bruits en trois catégories.<br />
Tout d’abord, les bruits dits domestiques ou bruits <strong>de</strong><br />
comportement, pour lesquels la recherche <strong>et</strong> la constatation<br />
<strong>de</strong> l’infraction ne nécessitent pas <strong>de</strong> mesure acoustique<br />
puisque ce sont <strong>de</strong>s bruits par nature imprévisibles. Ce sont<br />
<strong>de</strong>s bruits qui, par l’un <strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> durée, d’intensité ou<br />
<strong>de</strong> répétition, peuvent porter atteinte à la santé publique.<br />
Ensuite, les bruits <strong>de</strong>s activités professionnelles ou <strong>de</strong>s<br />
activités sportives, culturelles ou <strong>de</strong> loisirs, organisés <strong>de</strong><br />
façon habituelle. Pour la recherche <strong>et</strong> la constatation <strong>de</strong><br />
l’infraction, on utilise le critère d’émergence c’est-à-dire la<br />
différence entre le bruit ambiant comportant le bruit<br />
incriminé <strong>et</strong> le bruit ambiant sans le bruit qui fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
la plainte ; l’émergence ne doit pas dépasser 3 dB la nuit <strong>et</strong><br />
5 dB le jour. À ces valeurs s’ajoute un terme correctif qui<br />
est fonction <strong>de</strong> la durée totale d’apparition du bruit.<br />
Enfin, les bruits <strong>de</strong>s chantiers pour lesquels les critères<br />
r<strong>et</strong>enus pour caractériser une infraction sont le non-respect<br />
<strong>de</strong>s conditions d’utilisation ou d’exploitation <strong>de</strong>s matériels,<br />
l’absence <strong>de</strong> précaution appropriée pour limiter ce bruit ou<br />
bien un comportement anormalement bruyant.<br />
Par ailleurs, d’autres réglementations se superposent à c<strong>et</strong>te<br />
réglementation sur les bruits <strong>de</strong> voisinage, notamment<br />
l’article R.623-2 du co<strong>de</strong> pénal, qui concerne les bruits ou<br />
tapages injurieux ou nocturnes.<br />
De nombreux agents sont chargés du contrôle : les agents <strong>de</strong><br />
police judiciaire, les agents <strong>de</strong>s services chargés <strong>de</strong><br />
l’environnement, <strong>de</strong> l’agriculture, <strong>de</strong> l’industrie, <strong>de</strong><br />
l’équipement, <strong>de</strong>s transports, <strong>de</strong> la mer, <strong>de</strong> la santé, <strong>de</strong> la<br />
jeunesse <strong>et</strong> <strong>de</strong>s sports, les agents <strong>de</strong>s douanes, les<br />
inspecteurs <strong>de</strong>s installations classées <strong>et</strong>, également, les<br />
agents <strong>de</strong>s collectivités territoriales. C<strong>et</strong>te dispersion <strong>de</strong> la<br />
réglementation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s agents chargés du contrôle a rendu<br />
difficile la réalisation <strong>de</strong> statistiques précises concernant les<br />
plaintes. Le Dr Hugel, du Service communal d’hygiène <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
santé (SCHS) <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Strasbourg, a réalisé une enquête<br />
en 2000 concernant 118 SCHS qui couvraient 9,6 millions<br />
d’habitants. Sur les 7271 plaintes enregistrées, les bruits <strong>de</strong><br />
comportement représentent un gros tiers ; ensuite, ce sont<br />
les établissements recevant du public pour 19%, les activités<br />
artisanales <strong>et</strong> commerciales pour 15% <strong>et</strong> les bruits<br />
d’équipements pour 13%.<br />
Souvent ces plaintes sont inscrites dans un problème qui<br />
dépasse largement celui <strong>de</strong> la nuisance sonore. Il est donc<br />
préférable <strong>de</strong> privilégier la pacification <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong><br />
voisinage par la mise en œuvre <strong>de</strong> mesures alternatives. Par<br />
exemple, la médiation, plutôt que l’obtention d’une<br />
sanction pénale, qui risquerait d’envenimer la situation <strong>et</strong><br />
les relations futures entre les habitants.<br />
Quelques évolutions <strong>de</strong> ce décr<strong>et</strong> ont été envisagées. Tout<br />
d’abord, combler le vi<strong>de</strong> réglementaire actuel <strong>de</strong>s nuisances<br />
<strong>sonores</strong> provoquées à l’intérieur <strong>de</strong>s locaux <strong>de</strong> travail par<br />
<strong>de</strong>s activités extérieures. Dans le cas, par exemple, du bruit<br />
provenant d’un local <strong>de</strong> travail bruyant <strong>et</strong> reçu dans un local<br />
<strong>de</strong> travail calme (constituant une entité juridique distincte),<br />
ce bruit ne fait actuellement pas l’obj<strong>et</strong> d’une<br />
réglementation <strong>et</strong>, là, nous souhaiterions réglementer. Nous<br />
avons reçu sur ce suj<strong>et</strong> l’accord <strong>de</strong> la Direction <strong>de</strong>s relations<br />
du travail.<br />
Ensuite, nous souhaitons introduire la possibilité, en tant<br />
que <strong>de</strong> besoin, <strong>de</strong> mesures acoustiques par ban<strong>de</strong>s d’octave.<br />
Ce point correspond à une mesure forte du rapport du<br />
Dr Ritter <strong>et</strong> l’objectif est donc <strong>de</strong> prendre en compte les<br />
nuisances provoquées par <strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> faible intensité<br />
globale mais dont une plage <strong>de</strong> fréquence réduite émerge<br />
suffisamment pour être audible <strong>et</strong> gênante. On vise<br />
notamment les basses fréquences provenant <strong>de</strong>s bruits<br />
d’équipement tels que, par exemple, les ventilateurs.<br />
Une autre évolution, qui provient aussi du rapport Ritter,<br />
consisterait à abaisser à 27 dB (actuellement on est à 30 dB)<br />
le niveau minimal <strong>de</strong> bruit ambiant en <strong>de</strong>ssous duquel<br />
l’infraction n’est pas constatée. Le rapport Ritter proposait<br />
25 dB <strong>et</strong>, finalement, pour <strong>de</strong>s raisons métrologiques, entre<br />
autres, la valeur <strong>de</strong> 27 dB semble un bon compromis.<br />
Pourquoi c<strong>et</strong>te évolution ? Il s’agit d’éviter que les<br />
personnes soient gênées par un bruit faiblement émergent<br />
mais toutefois audible dans <strong>de</strong>s zones très calmes.<br />
Une autre évolution, émanant encore du rapport Ritter, est<br />
d’abaisser les termes correctifs <strong>de</strong>s émergences admissibles<br />
pour les bruits <strong>de</strong> faible durée. Il s’agit <strong>de</strong> mieux prendre en<br />
compte les nuisances provoquées par <strong>de</strong>s bruits émis peu<br />
souvent mais qui peuvent être gênants notamment lorsqu’ils<br />
sont subis <strong>de</strong> nuit <strong>et</strong> peuvent donc provoquer <strong>de</strong>s éveils. Un<br />
bruit d’impact qui réveille au cours <strong>de</strong> la nuit peut avoir <strong>de</strong>s<br />
conséquences néfastes sur le sommeil.<br />
Une autre proposition est <strong>de</strong> perm<strong>et</strong>tre aux autorités<br />
administratives compétentes <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s mesures<br />
administratives pouvant aller jusqu’à la suspension<br />
d’activité avec consignation <strong>de</strong> fonds. L’objectif est <strong>de</strong> faire<br />
cesser rapi<strong>de</strong>ment les nuisances <strong>et</strong>, partant, le risque pour<br />
la santé. C<strong>et</strong>te mesure serait aussi plus dissuasive que <strong>de</strong>s<br />
sanctions pénales, à savoir <strong>de</strong>s contraventions.<br />
Enfin, une <strong>de</strong>rnière proposition, provenant toujours du<br />
rapport Ritter, pour les bruits provenant <strong>de</strong>s activités <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
chantiers, l’idée est <strong>de</strong> renforcer les sanctions pénales en<br />
faisant passer les contraventions <strong>de</strong> la troisième classe (450<br />
euros au plus) à la cinquième classe (1500 euros au plus). Là,<br />
évi<strong>de</strong>mment, l’objectif est la dissuasion par <strong>de</strong>s sanctions<br />
plus sévères.<br />
Ces propositions <strong>de</strong> modifications ont quelque difficulté à<br />
aboutir car les bruits <strong>de</strong> voisinage constituent un thème<br />
sensible. Tout le mon<strong>de</strong> a été confronté au moins une fois<br />
dans sa vie à un problème <strong>de</strong> bruit <strong>de</strong> voisinage, tout le<br />
mon<strong>de</strong> a donc une opinion sur le suj<strong>et</strong> <strong>et</strong> veut s’exprimer.<br />
Cela concerne beaucoup <strong>de</strong> ministères, <strong>et</strong> le travail<br />
interministériel à effectuer est important. Il y a bien sûr <strong>de</strong>s<br />
intérêts divergents entre, par exemple, <strong>de</strong>s riverains qui<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
aspirent à une meilleure qualité <strong>de</strong> leur environnement<br />
sonore <strong>et</strong> les responsables <strong>de</strong>s activités industrielles ou<br />
culturelles qui, pour certaines, par leur nature, entraînent<br />
nécessairement <strong>de</strong>s nuisances. Le consensus est difficile à<br />
obtenir. Nous nous heurtons particulièrement au traitement<br />
réglementaire à donner à certaines activités à caractère<br />
festif, pour lesquelles on sait par avance qu’elles ne<br />
pourront respecter les émergences réglementaires. Dès lors,<br />
si le texte n’introduit pas un peu <strong>de</strong> souplesse, toutes ces<br />
activités seront en infraction. Or, on sait très bien qu’elles<br />
ne seront pas sanctionnées car on ne peut évi<strong>de</strong>mment pas<br />
interdire toutes les manifestations à caractère festif. C<strong>et</strong>te<br />
application du décr<strong>et</strong> qui ne serait que partielle affaiblirait<br />
considérablement la globalité du décr<strong>et</strong> <strong>et</strong> n’irait pas dans<br />
le sens <strong>de</strong> la tranquillité du voisinage <strong>et</strong> <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong><br />
l’homme.<br />
Débat<br />
A quand le nouveau décr<strong>et</strong> ?<br />
Chantal Laroche (Université d’Ottawa) : Je ne connais pas<br />
très bien les réglementations françaises mais je suis curieuse<br />
d’en apprendre d’avantage sur les évolutions envisagées. À<br />
quel sta<strong>de</strong> en êtes vous <strong>de</strong> vos discussions ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Le rapport Ritter a été élaboré en 2001,<br />
puis présenté au ministre en 2002. Il a fallu quelques mois<br />
pour élaborer les <strong>de</strong>ux premières versions du décr<strong>et</strong> puis, au<br />
niveau interministériel, nous avons rencontré un problème<br />
<strong>de</strong> désaccord sur un point particulier. J’ai bon espoir que la<br />
situation se débloque dans les prochains mois.<br />
Chantal Laroche : Le contenu du document est-il public ?<br />
Est-ce qu’il circule publiquement ou bien la discussion n’a-telle<br />
lieu qu’au niveau ministériel ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Non, le proj<strong>et</strong> se discute notamment au<br />
sein du Conseil national du bruit qui est une instance<br />
consultative placée auprès du ministre chargé <strong>de</strong><br />
l’environnement, ouverte sur la société civile. Les<br />
associations y sont représentées ainsi que les professionnels<br />
<strong>de</strong> l’acoustique <strong>et</strong> tous les secteurs <strong>de</strong> l’économie concernés<br />
par le domaine du bruit. Donc, le proj<strong>et</strong> a beaucoup circulé<br />
mais il n’est pas encore diffusable au grand public.<br />
Philippe Ritter : Sur le contenu du proj<strong>et</strong>, je crois pouvoir<br />
dire qu’il y a un assez large consensus, y compris <strong>de</strong> la part<br />
<strong>de</strong> la société civile. Par contre, il reste <strong>de</strong>s problèmes<br />
purement juridiques à résoudre.<br />
Chantal Laroche : Quel est le point <strong>de</strong> blocage ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : C’est justement le statut à donner à<br />
certaines manifestations à caractère festif qui ne sont pas<br />
permanentes, qui ont lieu plusieurs fois dans l’année <strong>et</strong> qui<br />
entraînent <strong>de</strong>s nuisances pour les riverains.<br />
Philippe Ritter : Sur le plan juridique, il n’est pas évi<strong>de</strong>nt<br />
<strong>de</strong> promulguer un texte qui procure le calme à l’ensemble<br />
<strong>de</strong> nos concitoyens, qui les protègent contre <strong>de</strong>s nuisances<br />
<strong>sonores</strong> tout en perm<strong>et</strong>tant le feu d’artifice du 14 juill<strong>et</strong>, la<br />
Fête <strong>de</strong> la musique du 21 juin <strong>et</strong> les festivités du 31<br />
décembre. C’est difficile <strong>de</strong> trouver la formulation juridique<br />
qui perm<strong>et</strong> tout <strong>et</strong> son contraire.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : C’est vraiment un problème <strong>de</strong><br />
formulation juridique mais, en <strong>de</strong>hors du 14 juill<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
Fête <strong>de</strong> la musique, il y a d’autres activités comme, par<br />
exemple, les festivals tels que les Francofolies <strong>de</strong> la<br />
Rochelle, qui doivent trouver un statut adéquat dans ce<br />
décr<strong>et</strong>.<br />
Philippe Ritter : Chaque ville en France a sa fête <strong>et</strong><br />
l’objectif n’est pas <strong>de</strong> supprimer toutes les fêtes en France<br />
mais <strong>de</strong> les autoriser sans que se produisent <strong>de</strong>s dérapages<br />
qui empêchent tout le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> dormir.<br />
Denis Engelvin (DDASS <strong>de</strong> la Loire) : Si, sur quelques points,<br />
l’évolution du décr<strong>et</strong> provoque <strong>de</strong>s problèmes, il ne faudrait<br />
pas pour autant empêcher toute évolution <strong>de</strong> ce texte. Il me<br />
semble que certains points relativement importants peuvent<br />
être aménagés <strong>et</strong> apporter une solution intéressante aux<br />
services <strong>de</strong> l’État en charge <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> la<br />
réglementation.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : C’est peut-être la solution vers laquelle<br />
nous allons nous orienter.<br />
Fabrice Junker (EDF) : Avant <strong>de</strong> proposer ces fameuses<br />
contraintes supplémentaires, notamment en ce qui concerne<br />
les émergences par ban<strong>de</strong>s d’octave, l’abaissement <strong>de</strong>s<br />
seuils… avez-vous évalué l’inci<strong>de</strong>nce sur <strong>de</strong>s activités du<br />
type <strong>de</strong> celles qui nous intéressent, c’est-à-dire la<br />
distribution <strong>de</strong> l’électricité ? Je pense, par exemple, aux<br />
transformateurs…<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Oui, en ce qui concerne les<br />
transformateurs <strong>et</strong> les lignes haute tension, j’ai rencontré<br />
les services du ministère <strong>de</strong> l’Industrie <strong>et</strong> nous avons discuté<br />
<strong>de</strong> ces questions. Il n’y a pas encore <strong>de</strong> position clairement<br />
établie pour savoir comment ces problèmes vont être pris en<br />
compte, mais nous en avons bien conscience.<br />
Philippe Ritter : Nous sommes ravis <strong>de</strong> l’activisme d’EDF au<br />
moment où le décr<strong>et</strong> est entièrement bouclé mais on aurait<br />
préféré qu’ils se manifestassent un peu plus tôt, au cours <strong>de</strong><br />
l’élaboration dudit décr<strong>et</strong> ! Il n’est nullement dans<br />
l’intention <strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
représentants <strong>de</strong> l’environnement <strong>de</strong> priver le pays <strong>de</strong><br />
distribution électrique : <strong>et</strong> nous avons toute confiance dans<br />
la compétence d’EDF pour distribuer le courant dans <strong>de</strong><br />
bonnes conditions environnementales !<br />
De la salle : Sur c<strong>et</strong> aspect fréquentiel, on s’oriente donc<br />
forcément vers la prise en compte d’émergences par ban<strong>de</strong>s<br />
d’octave, c’est pratiquement entériné ?<br />
Philippe Ritter : Le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> modification <strong>de</strong> décr<strong>et</strong><br />
comporte une mention importante : il est indiqué « en tant<br />
que <strong>de</strong> besoin ». C’est donc fonction <strong>de</strong>s situations.<br />
Les limites du « tout juridique »<br />
Dominique François (pôle <strong>de</strong> compétence <strong>de</strong> la Dordogne) :<br />
J’ai bien entendu le Dr Ritter dire qu’il n’est pas question <strong>de</strong><br />
tout interdire partout par un décr<strong>et</strong> qui réglementerait <strong>de</strong><br />
plus en plus sévèrement les activités <strong>de</strong> nos villes. Il est<br />
certain que, d’un consensus général, le 1 er janvier, la Fête<br />
<strong>de</strong> la musique, la Fête nationale <strong>et</strong> le 31 décembre sont <strong>de</strong>s<br />
jours dits « <strong>de</strong> réjouissances nationales » qui jouissent d’une<br />
acceptation globale pour le bruit. Mais pour les fêtes qui<br />
sont traditionnelles comme les fêtes <strong>de</strong> Bayonne ou les<br />
Francofolies <strong>de</strong> la Rochelle, est-ce que le premier magistrat<br />
<strong>de</strong> la commune n’est pas le seul à savoir où est la limite<br />
entre ce qui est traditionnel <strong>et</strong> ce qui ne l’est pas ?<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 97
Philippe Ritter : Je vais vous répondre en tant que prési<strong>de</strong>nt<br />
<strong>de</strong> l’Association nationale <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins directeurs <strong>de</strong>s<br />
services communaux d’hygiène <strong>et</strong> <strong>de</strong> santé <strong>et</strong> je ne veux<br />
mêler personne d’autre à ma réponse. Il y a un certain<br />
nombre <strong>de</strong> domaines dans lesquels il ne faut pas trop<br />
légiférer, <strong>et</strong> chercher à résoudre par un texte l’alpha <strong>et</strong><br />
l’oméga <strong>de</strong> toutes les situations pouvant se présenter<br />
partout. C’est une trop gran<strong>de</strong> ambition à mon avis <strong>et</strong> je<br />
crois que, jusqu’à présent le 14 juill<strong>et</strong>, la Fête <strong>de</strong> la<br />
musique, le 31 décembre <strong>et</strong> puis, les corridas <strong>de</strong> Nîmes, les<br />
Francofolies, le Printemps <strong>de</strong> Bourges, les Nuits <strong>sonores</strong> à<br />
Lyon…, ne créent pas <strong>de</strong> problème. À Lyon, on ne se mêle<br />
pas le 21 juin <strong>de</strong> vouloir réglementer l’émission <strong>de</strong> musique<br />
dans les rues ou ailleurs <strong>et</strong>, finalement, il n’y a pas <strong>de</strong><br />
conflit, il n’y a pas <strong>de</strong> procès, pas <strong>de</strong> jurispru<strong>de</strong>nce, cela<br />
veut dire qu’il n’y a pas <strong>de</strong> problème. Les juristes disent que<br />
c’est juridiquement inconcevable <strong>et</strong> qu’il faut pouvoir tout<br />
prévoir. Moi, je suis mé<strong>de</strong>cin, je ne suis pas juriste, je<br />
respecte leur discours mais je dis que, <strong>de</strong> temps en temps, il<br />
faut savoir faire <strong>de</strong>s choix. C’est une raison <strong>de</strong> blocage mais<br />
on va essayer <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te situation <strong>de</strong> manière<br />
satisfaisante.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Pour ce qui est <strong>de</strong> la compétence <strong>de</strong>s<br />
maires, c’est vrai que les bruits <strong>de</strong> voisinage constituent une<br />
nuisance <strong>de</strong> proximité <strong>et</strong> qu’ils sont en première ligne.<br />
D’ailleurs, le législateur leur a donné compétence en<br />
matière <strong>de</strong> police <strong>de</strong> la tranquillité.<br />
Éric Marchal (bureau d’étu<strong>de</strong> EMA) : Étant donné que les<br />
nouvelles mesures pourraient amener à rem<strong>et</strong>tre en question<br />
la production d’énergie éolienne, est-ce qu’il est prévu <strong>de</strong><br />
faire glisser justement ce type d’installation vers <strong>de</strong>s<br />
installations classées ?<br />
Emmanuel Bert : Clairement non. On est dans un cadre <strong>de</strong><br />
simplification <strong>de</strong> la nomenclature <strong>de</strong>s installations classées,<br />
il n’est pas question <strong>de</strong> créer une nouvelle rubrique. Donc,<br />
on ne va pas inclure les éoliennes dans la législation<br />
spécifique <strong>de</strong>s installations classées.<br />
Éric Marchal : Il n’est pas prévu <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r à un<br />
aménagement du décr<strong>et</strong> ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Le problème a été posé clairement par<br />
la fédération <strong>de</strong> l’énergie éolienne. Nous sommes donc<br />
avertis <strong>de</strong>s problèmes, mais nous n’avons pas encore trouvé<br />
<strong>de</strong> solution.<br />
René Gamba : Je voudrais rebondir sur le débat <strong>de</strong> la loi <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> son application. Je ne veux pas prendre parti sur les<br />
options qui sont en discussion <strong>et</strong> qui, effectivement,<br />
renvoient à <strong>de</strong>s difficultés d’ordre technique. Mais je voulais<br />
réagir sur l’affirmation « à l’heure actuelle le 31 décembre<br />
ou le 14 juill<strong>et</strong> ne posent pas <strong>de</strong> problème ». L’expérience<br />
m’a montré que, quand une loi est publiée, avec force<br />
publicité, nécessaire à la faire connaître <strong>de</strong> tous, chacun<br />
s’en empare. Je ne serais donc pas étonné, si jamais il y<br />
avait une maladresse <strong>de</strong> rédaction, que le 14 juill<strong>et</strong> ou le 31<br />
décembre finissent par poser problème. Si l’on est unanimes<br />
à dire qu’il ne faudrait pas que ça pose problème, il faut<br />
effectivement que le texte le prévoie.<br />
Emmanuel Bert : Je vais répondre d’une façon très stricte là<br />
encore. La réglementation telle qu’elle existe actuellement<br />
ne prévoit pas la possibilité <strong>de</strong> faire du bruit le 14 juill<strong>et</strong> ou<br />
le 31 décembre. Il n’y a pas, dans la réglementation<br />
française actuelle, la possibilité <strong>de</strong> déroger aux dispositions.<br />
Donc, c’est une tradition non écrite.<br />
René Gamba : Mais c’est une tradition non écrite pour<br />
laquelle il n’y a pas <strong>de</strong> projecteur braqué <strong>et</strong> pour laquelle,<br />
effectivement, il y a tradition d’absence <strong>de</strong> plainte. On peut<br />
supposer qu’un tribunal qui serait interpellé considérerait,<br />
probablement, la chose avec un minimum <strong>de</strong> bienveillance.<br />
Dès lors qu’il y aura un coup <strong>de</strong> projecteur sur un<br />
changement réglementaire, il faudra faire attention à la<br />
manière dont on éclairera, car, alors, la chose sera regardée<br />
<strong>et</strong> vue.<br />
Philippe Ritter : Il faut savoir ne pas résoudre un problème<br />
qui n’existe pas au risque d’en créer un qui va exister.<br />
Évolution du décr<strong>et</strong> du 15 décembre 1998 sur les lieux musicaux <strong>et</strong><br />
réflexion sur la diffusion <strong>de</strong> musique en plein air<br />
Emmanuel Bert (Mission bruit, ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable)<br />
Je vais vous parler du décr<strong>et</strong> relatif aux établissements<br />
recevant du public <strong>et</strong> diffusant à titre habituel <strong>de</strong> la<br />
musique amplifiée, à savoir le décr<strong>et</strong> du 15 décembre 1998<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> ses éventuelles évolutions.<br />
Le même jour, étaient publiés un arrêté d’application du<br />
décr<strong>et</strong>, comportant une annexe relative aux limiteurs <strong>de</strong><br />
pression acoustique, <strong>et</strong> une circulaire explicative. C<strong>et</strong>te<br />
<strong>de</strong>rnière précise notamment que le terme « à titre<br />
habituel » signifie une moyenne d’une diffusion musicale<br />
amplifiée par mois. Il s’agit bien d’une moyenne. La<br />
circulaire précise que, lorsque l’on n’a pas une moyenne<br />
mensuelle d’une diffusion musicale, mais que l’on a une<br />
diffusion musicale concentrée sur une saison, on est<br />
également concerné par le régime « à titre habituel » ; ce<br />
qui signifie qu’un établissement peut avoir 11 diffusions<br />
musicales amplifiées dans l’année <strong>et</strong> être concerné par le<br />
décr<strong>et</strong>.<br />
Le champ d’application <strong>de</strong> ce décr<strong>et</strong> concerne les<br />
discothèques, salles <strong>de</strong> concert, pianos bar, karaokés, mais<br />
aussi les salles polyvalentes, qu’elles soient publiques ou<br />
privées. Sont exclus les établissements ou les locaux<br />
réservés exclusivement à l’enseignement <strong>de</strong> la musique <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la danse. Dans les locaux réservés à l’enseignement, on<br />
considère qu’un local <strong>de</strong> répétition musicale est un local<br />
réservé à l’enseignement, donc, il est exclu, mais par la voie<br />
<strong>de</strong> circulaire ; la même circulaire a considéré que les<br />
cinémas n’étaient pas visés par le décr<strong>et</strong>. Il s’agit d’une<br />
circulaire donc l’application est laissée d’une part, à<br />
l’appréciation <strong>de</strong> l’agent en charge du dossier, d’autre part,<br />
à celle <strong>de</strong>s juges éventuellement. L’exploitant d’un<br />
établissement visé par le décr<strong>et</strong> a <strong>de</strong>s obligations vis-à-vis<br />
<strong>de</strong> sa clientèle. Premièrement, le niveau sonore continu<br />
équivalent pondéré A sur une durée comprise entre 10 <strong>et</strong> 15<br />
minutes glissantes ne doit pas excé<strong>de</strong>r 105 dB(A). C’est<br />
vraiment le niveau maximum mais on peut être amené à<br />
abaisser c<strong>et</strong>te valeur. Par ailleurs, il y a un niveau <strong>de</strong><br />
pression crête qui est fixé à 120 dB. D’emblée, il y a une<br />
incompatibilité entre ces <strong>de</strong>ux valeurs, qui est source <strong>de</strong>s<br />
problèmes soulevés par ce décr<strong>et</strong>. Vis-à-vis <strong>de</strong>s tiers, lorsque<br />
l’on ém<strong>et</strong> un niveau sonore <strong>de</strong> 99 dB par ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> fréquence<br />
centrée sur 125 à 4000 Hz — autrement dit, lorsque l’on<br />
ém<strong>et</strong> un bruit d’un niveau continu équivalent égal à 105<br />
dB(A) —, on doit avoir <strong>de</strong>s valeurs d’isolement telles que,<br />
premièrement, les émergences dans l’environnement en<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
niveau continu équivalent pondéré A soient conformes aux<br />
dispositions du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique, c’est-à-dire 3<br />
dB(A) la nuit ou 5 dB(A) le jour, plus, éventuellement, un<br />
terme correctif fonction <strong>de</strong> la durée cumulée d’apparition<br />
du bruit. De plus, lorsque le local est contigu, l’émergence<br />
par ban<strong>de</strong> d’octave centrée sur les octaves 125 à 4000 hertz<br />
ne doit pas dépasser 3 dB(A).<br />
Lorsque l’isolement <strong>de</strong> l’établissement est insuffisant pour<br />
pouvoir respecter ces émergences par ban<strong>de</strong> d’octave, dans<br />
ce cas là, on installe un limiteur <strong>de</strong> pression acoustique<br />
conforme au cahier <strong>de</strong>s charges annexé dans l’arrêté du 15<br />
décembre. C’est le seul cas où le limiteur est obligatoire. Ce<br />
cahier <strong>de</strong>s charges était un minimum en 1998. Depuis, il<br />
existe une norme française relative aux limiteurs<br />
(NFS 31 122). La réglementation française, pour l’instant, ne<br />
vise pas c<strong>et</strong>te norme, mais, si une évolution <strong>de</strong>vait advenir,<br />
c<strong>et</strong>te norme serait évi<strong>de</strong>mment visée. Pour les locaux non<br />
contigus, lorsqu’on ém<strong>et</strong> un niveau maximum <strong>de</strong> 105 dB(A),<br />
l’émergence doit être conforme aux dispositions du co<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
la santé publique. C’est-à-dire qu’on considère que, dans<br />
ces cas là, on a affaire à un bruit <strong>de</strong> voisinage.<br />
En ce qui concerne le limiteur <strong>de</strong> pression acoustique, la<br />
limitation se fait <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux façons différentes : soit par<br />
coupure <strong>de</strong> la sonorisation sur 10 secon<strong>de</strong>s avec une<br />
autorisation <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux coupures maximum dans la même<br />
heure, la troisième coupure dans la même heure <strong>de</strong>venant<br />
définitive <strong>et</strong> le système <strong>de</strong>vant être en principe réamorcé<br />
par l’installateur <strong>et</strong> non par le propriétaire <strong>de</strong><br />
l’établissement ; soit par le traitement du signal en continu,<br />
ce qu’on appelle le limiteur compresseur : on définit<br />
d’emblée un niveau sonore <strong>et</strong>, quoi qu’on fasse, on ne<br />
pourra pas pousser le potentiomètre au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> ce niveau.<br />
Pour le contrôle, l’exploitant doit pouvoir présenter un<br />
historique du fonctionnement du limiteur.<br />
Par ailleurs, tout propriétaire d’établissement est tenu <strong>de</strong><br />
faire établir une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
C<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> comprend notamment une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> l’état<br />
<strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong>s moyens nécessaires <strong>et</strong> suffisants pour limiter le<br />
bruit lorsque l’isolation est insuffisante. Lorsqu’on ne peut<br />
pas renforcer l’isolation, on installe un limiteur <strong>de</strong> pression<br />
avec un niveau <strong>de</strong> réglage conforme aux conditions<br />
d’exploitation. Autrement dit, si, dans un établissement, le<br />
niveau fixé est <strong>de</strong> 80 dB(A), on peut estimer que<br />
l’établissement n’est pas à même <strong>de</strong> diffuser <strong>de</strong> la musique<br />
amplifiée. Lorsque l’établissement est contigu à un tiers, il<br />
doit en plus y avoir un certificat d’isolement acoustique<br />
élaboré par un organisme agréé pour la mesure du bruit en<br />
milieu <strong>de</strong> travail. Lorsqu’il y a une modification dans<br />
l’établissement, il doit y avoir une mise à jour <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
l’impact sonore. <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong> doit être mise à disposition<br />
<strong>de</strong>s agents <strong>de</strong> contrôle mentionnés dans l’article L.571-18 du<br />
co<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’environnement, notamment, les agents <strong>de</strong>s SCHS,<br />
<strong>de</strong>s DDASS, les agents <strong>de</strong> police judiciaire, les officiers <strong>de</strong><br />
police judiciaire….<br />
Le certificat d’isolement acoustique n’est en aucun cas un<br />
certificat <strong>de</strong> conformité, mais un simple document attestant<br />
que l’organisme a mesuré les isolements. Il ne garantit pas<br />
que les isolements soient conformes aux dispositions du<br />
décr<strong>et</strong>.<br />
Pour ce qui est <strong>de</strong>s infractions, le non-respect <strong>de</strong>s 105 dB(A)<br />
à l’intérieur <strong>de</strong> l’établissement, le dépassement <strong>de</strong>s<br />
émergences par ban<strong>de</strong> d’octave, l’absence d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
l’impact <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>, engendrent <strong>de</strong>s pénalités <strong>de</strong><br />
1500 euros, multipliées par <strong>de</strong>ux en cas <strong>de</strong> récidive, avec<br />
possibilité <strong>de</strong> confiscation du matériel <strong>de</strong> sonorisation. Les<br />
personnes morales étant pénalement responsables, le co<strong>de</strong><br />
pénal prévoit que les amen<strong>de</strong>s encourues soient multipliées<br />
par cinq par rapport à une personne physique. Il peut y avoir<br />
en plus <strong>de</strong>s sanctions administratives qui sont la consignation<br />
<strong>de</strong> fonds, la réalisation <strong>de</strong> travaux d’office, la suspension<br />
d’activité, ces mesures pouvant être cumulées.<br />
Quelles sont les difficultés rencontrées dans la mise en<br />
application <strong>de</strong> ce décr<strong>et</strong> ? Tout d’abord, le ministère chargé<br />
du travail va supprimer en 2006 l’agrément <strong>de</strong>s organismes<br />
chargés <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> la mesure pour passer à une procédure<br />
<strong>de</strong> certification Cofrac. Or, ces organismes agréés étaient<br />
également ceux qui pouvaient réaliser les certificats<br />
d’isolement acoustique. Par ailleurs, le décr<strong>et</strong> ne s’applique<br />
qu’aux établissements clos <strong>et</strong> il n’existe pas <strong>de</strong> texte pour la<br />
musique amplifiée (ou non amplifiée) en plein air. Ensuite, il<br />
y a une incohérence entre le niveau continu équivalent<br />
pondéré A <strong>et</strong> le niveau <strong>de</strong> pression crête. Enfin, <strong>de</strong>rnier<br />
point, les sanctions pénales sont différentes selon<br />
l’implantation <strong>de</strong> l’établissement : si l’établissement est<br />
contigu à un tiers, les sanctions pénales encourues sont une<br />
amen<strong>de</strong> <strong>de</strong> 1500 euros (contravention <strong>de</strong> cinquième classe) ;<br />
si l’établissement n’est pas contigu, on est dans le domaine<br />
<strong>de</strong>s bruits <strong>de</strong> voisinage, avec une amen<strong>de</strong> <strong>de</strong> 450 euros<br />
seulement (contravention <strong>de</strong> troisième classe). Cela pose<br />
problème.<br />
Les modifications envisagées sont les suivantes : dans un<br />
premier temps, nous avions constitué un groupe <strong>de</strong> travail<br />
plénier. Mais compte tenu <strong>de</strong>s difficultés rencontrées, nous<br />
avons décidé <strong>de</strong> constituer quatre sous-groupes : eff<strong>et</strong>s sur<br />
l’audition <strong>de</strong> la musique amplifiée ; appréhension dans<br />
l’environnement <strong>de</strong> la musique émanant <strong>de</strong>s espaces clos ;<br />
musique en plein air ; sanctions <strong>et</strong> accompagnements.<br />
Tout d’abord, il s’agit d’élargir le champ d’application. Le<br />
groupe plénier souhaitait intégrer les locaux d’enseignement<br />
<strong>de</strong> musique <strong>et</strong> <strong>de</strong> danse car, c’est dans ces lieux que l’on<br />
commence l’apprentissage, l’éducation à la musique <strong>et</strong> à<br />
l’écoute. Si l’on apprend très vite aux jeunes que la musique<br />
peut, à fort niveau sonore, détruire l’audition <strong>et</strong>, d’autre<br />
part, déranger le voisinage, on pourra s’éviter par la suite<br />
<strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> surdité <strong>et</strong> <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> voisinage.<br />
La <strong>de</strong>uxième modification envisagée est la mise en<br />
cohérence du niveau continu équivalent <strong>et</strong> du niveau <strong>de</strong><br />
pression crête. Je ne donne pas <strong>de</strong> valeur parce que cela fait<br />
l’obj<strong>et</strong> d’âpres discussions.<br />
La troisième modification envisagée, est la prise en<br />
considération <strong>de</strong>s évolutions éventuelles du décr<strong>et</strong> relatif<br />
aux bruits <strong>de</strong> voisinage. Donc, nos <strong>de</strong>ux groupes <strong>de</strong> travail<br />
sont intimement liés.<br />
Débat<br />
Coupure définitive <strong>de</strong> la sonorisation : <strong>de</strong>s<br />
aménagements souhaitables<br />
Philippe Marconi (société Performas, fabricant <strong>de</strong><br />
limiteurs) : Il y a un aspect qu’il me semblerait intéressant<br />
<strong>de</strong> revoir aussi, c’est la coupure définitive en cas <strong>de</strong><br />
dépassement <strong>de</strong>ux fois dans l’heure. Après cinq ans<br />
d’application, on constate que c’est une clause qui est très<br />
rarement utilisée parce qu’il est très rare qu’un installateur<br />
se déplace pour rem<strong>et</strong>tre un limiteur en route. C’est<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 99
presque une incitation à détourner le limiteur, parce que si<br />
l’on imagine un mariage ou une manifestation quelconque où<br />
il y a eu <strong>de</strong>ux dépassements dans l’heure <strong>et</strong> que l’ém<strong>et</strong>teur<br />
a coupé la sonorisation, si on peut pas rem<strong>et</strong>tre en route la<br />
sonorisation on va créer <strong>de</strong>s nuisances supplémentaires.<br />
Emmanuel Bert : Normalement, un limiteur est là pour ne<br />
pas fonctionner, pour ne pas se déclencher, c’est une simple<br />
garantie. Il ne <strong>de</strong>vrait donc pas se déclencher trois fois dans<br />
la même heure. Effectivement, il est très rare que ce soit<br />
l’installateur qui réamorce un système après une coupure<br />
dite définitive, mais le fait que l’utilisateur puisse<br />
réamorcer lui-même est une clause <strong>de</strong> non-conformité aux<br />
dispositions du décr<strong>et</strong>.<br />
Philippe Marconi : Dans le cas que je cite, le limiteur n’est<br />
pas remis en service tout simplement parce que<br />
l’installateur ne s’est pas déplacé. Le limiteur est bien<br />
conforme mais le fait qu’on arrête définitivement la<br />
sonorisation au bout <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux coupures provoque le<br />
détournement du limiteur : on branche la sono à côté <strong>et</strong> on<br />
crée <strong>de</strong>s nuisances qui ne sont plus contrôlées par le<br />
limiteur. C’est donc bien pire.<br />
Emmanuel Bert : En théorie, un limiteur qui coupe <strong>de</strong>vrait<br />
être asservi à toutes les prises sans exception <strong>de</strong><br />
l’établissement dans lequel il est installé.<br />
Philippe Marconi : Je vous livre <strong>de</strong>s réflexions qui<br />
reviennent du terrain, qui ne relèvent pas <strong>de</strong> la théorie.<br />
Emmanuel Bert : C’est bien compris. Nous allons en eff<strong>et</strong><br />
réfléchir à d’autres moyens <strong>de</strong> garantie. Il faut quand même<br />
préserver, d’une part, la tranquillité <strong>de</strong>s riverains, <strong>de</strong> ces<br />
établissements ou <strong>de</strong> ces lieux où on ém<strong>et</strong> <strong>de</strong> la musique <strong>et</strong>,<br />
d’autre part, pouvoir garantir effectivement la « jouissance<br />
paisible » du lieu.<br />
Philippe Ritter : Est-il techniquement concevable <strong>de</strong><br />
produire un limiteur qui coupe dix secon<strong>de</strong>s au premier<br />
dépassement, une minute au <strong>de</strong>uxième, dix minutes au<br />
troisième <strong>et</strong> une heure au quatrième ?<br />
Philippe Marconi : Oui techniquement, c’est possible. Cela<br />
pourrait faire partie <strong>de</strong>s mesures à envisager,<br />
effectivement.<br />
De la suppression <strong>de</strong> l’agrément <strong>de</strong>s<br />
organismes habilités à réaliser le mesurage du<br />
bruit en milieu <strong>de</strong> travail ?<br />
Frédéric Delafosse (Acouphen environnement) : Quelle est<br />
la date <strong>de</strong> la suppression prochaine <strong>de</strong> l’agrément <strong>de</strong>s<br />
organismes habilités à réaliser le mesurage du bruit en<br />
milieu <strong>de</strong> travail ?<br />
Emmanuel Bert : À partir du 1 er janvier 2006, il n’y aura<br />
plus <strong>de</strong> nouvel agrément dispensé par le ministère chargé du<br />
travail, mais il existera encore pendant <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong>s<br />
organismes agréés, puisque certains agréments sont donnés<br />
pour trois ans.<br />
Philippe Ritter : Il y a une tendance lour<strong>de</strong> au niveau<br />
européen à considérer que les procédures d’habilitation qui<br />
sont délivrées par un gouvernement ou une autorité<br />
administrative quelconque, <strong>et</strong> qui distinguent un opérateur<br />
particulier, doivent respecter un certain nombre<br />
d’obligations qui sont celles, notamment, <strong>de</strong> l’assurance<br />
qualité <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’accréditation par <strong>de</strong>s organismes<br />
accréditeurs. En l’occurrence, le Cofrac, lorsqu’il délivre<br />
une accréditation à un organisme, certifie que l’opérateur<br />
travaille dans <strong>de</strong>s conditions qui sont précisées, qu’il dit ce<br />
qu’il fait <strong>et</strong> qu’il fait ce qu’il dit. Cela n’a plus rien à voir<br />
avec une autorisation par un ministère.<br />
Émile Perrier (Association <strong>de</strong> défense <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong><br />
troubles <strong>de</strong> voisinage) : Quelle est l’autorité administrative<br />
responsable, in fine, <strong>de</strong> l’application réelle du décr<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
1998 ?<br />
Emmanuel Bert : L’autorité administrative compétente en<br />
matière <strong>de</strong> lieux musicaux, dans le cadre du décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1998,<br />
c’est le préf<strong>et</strong>. Ceci étant, l’autorité municipale peut<br />
exercer une police judiciaire. Donc, un maire peut dresser<br />
un procès verbal à l’encontre d’un établissement qui ne<br />
serait pas en conformité avec le décr<strong>et</strong>. Rien n’empêche un<br />
maire <strong>de</strong> déléguer <strong>de</strong>s agents au sein <strong>de</strong> sa commune pour le<br />
faire mais, la police administrative, c’est le préf<strong>et</strong>.<br />
Le décr<strong>et</strong> Lieux musicaux : quel accueil parmi<br />
la profession ?<br />
Chantal Laroche : Le décr<strong>et</strong> a-t-il été bien accepté ? Y a-t-il<br />
eu diminution <strong>de</strong> la fréquentation <strong>de</strong>s discothèques, <strong>de</strong>s<br />
bars, une diminution <strong>de</strong>s plaintes <strong>de</strong> voisinage ? Et la limite<br />
<strong>de</strong> 105 dB(A) a-t-elle été fixée en fonction du dommage à<br />
l’audition <strong>de</strong>s travailleurs à l’intérieur <strong>de</strong> ces lieux là, ou<br />
<strong>de</strong>s clients ?<br />
Emmanuel Bert : La profession a eu peur au départ mais<br />
s’est rapi<strong>de</strong>ment aperçue que ce n’était pas une trop forte<br />
contrainte, puisqu’on peut constater que la plupart <strong>de</strong>s<br />
discothèques ém<strong>et</strong>tent à moins <strong>de</strong> 100 dB.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : La valeur <strong>de</strong> 105 dB était vraiment un<br />
compromis entre ce que <strong>de</strong>mandaient les exploitants <strong>et</strong> les<br />
hygiénistes, qui trouvaient ce niveau très élevé. Ce niveau a<br />
eu le mérite d’avoir un rôle pédagogique vis-à-vis <strong>de</strong>s<br />
exploitants qui savent maintenant que la musique à haut<br />
niveau sonore peut avoir <strong>de</strong>s conséquences sur l’audition.<br />
Philippe Ritter : La profession a fait usage <strong>de</strong> toutes ses<br />
capacités <strong>de</strong> lobbying pour lutter contre l’application <strong>de</strong> ce<br />
texte. Puis, constatant que le décr<strong>et</strong> n’empêchait pas<br />
l’exercice <strong>de</strong> la profession, <strong>et</strong> pouvait même la faciliter,<br />
puisque, à partir d’un moment où un établissement est<br />
déclaré conforme à un texte, son insertion dans le tissu<br />
social en est favorisée, la situation s’est régularisée. Aucune<br />
baisse <strong>de</strong> fréquentation, aucune protestation <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />
clients n’a été enregistrée.<br />
Catherine Rétoré (Agence régionale pour l’environnement<br />
Provence-Alpes-Côte-d’Azur) : Pour quels motifs, juridiques<br />
ou techniques, les cinémas sont-ils exclus ?<br />
Emmanuel Bert : L’exclusion <strong>de</strong>s cinémas est mentionnée<br />
uniquement dans la circulaire, qui n’est pas un texte<br />
réglementaire. Donc, rien n’empêche une personne <strong>de</strong><br />
constituer une plainte à l’encontre d’un cinéma <strong>et</strong> d’aller<br />
porter l’affaire <strong>de</strong>vant une juridiction pénale. C’est le<br />
ministère <strong>de</strong> la Culture qui, en 1998, a souhaité exclure les<br />
cinémas mais, a priori, il ne s’opposerait plus à leur prise en<br />
compte si l’on modifiait le texte.<br />
Daniel Mothié (pôle <strong>de</strong> compétence bruit du Rhône) : En<br />
quoi la norme apporte-t-elle un plus par rapport au cahier<br />
<strong>de</strong>s charges <strong>de</strong> l’arrêté, dans la mesure où, pour l’instant,<br />
on ne peut pas imposer à quelqu’un <strong>de</strong> poser un limiteur<br />
conforme à la norme ?<br />
Emmanuel Bert : La norme, en l’état actuel, est un peu plus<br />
complète que le cahier <strong>de</strong>s charges. Dans sa stricte<br />
application, il est vrai, le décr<strong>et</strong> ne prévoit pas la possibilité<br />
d’imposer un limiteur conforme à la norme. Une norme reste<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
un texte d’application volontaire. Dès lors, rien n’empêche<br />
les réglementations locales édictées par les préf<strong>et</strong>s d’exiger<br />
que les établissements soient équipés <strong>de</strong> limiteurs<br />
conformes aux dispositions <strong>de</strong> la norme. La norme offre un<br />
<strong>de</strong>uxième avantage sur l’annexe technique <strong>de</strong> l’arrêté :<br />
celui d’interdire la solution du limiteur dès lors que le gain à<br />
obtenir est supérieur à 10 dB.<br />
Dominique François : Pour témoigner, à notre cousine<br />
canadienne notamment, <strong>de</strong> mon expérience <strong>de</strong> la gestion<br />
<strong>de</strong>s lieux musicaux dans un département du sud-ouest, je<br />
confirme, comme M. Ritter l’a signalé, que ce texte a été<br />
perçu par la profession, initialement, comme une entrave à<br />
leur activité. Toutefois, je diviserais, grosso modo, les lieux<br />
musicaux en <strong>de</strong>ux catégories. En distinguant, d’une part, les<br />
professionnels <strong>de</strong> la nuit, qui ont un chiffre d’affaires, du<br />
personnel, qui ont investi <strong>de</strong>s sommes considérables pour<br />
créer un lieu <strong>de</strong> loisirs <strong>et</strong> qui, quand ils reçoivent une<br />
injonction <strong>de</strong> l’administration, y répon<strong>de</strong>nt. Décidés à<br />
investir les sommes nécessaires afin <strong>de</strong> diffuser <strong>de</strong> la<br />
musique correctement, ils arrivent à surnager, à <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s<br />
établissements reconnus <strong>et</strong> fréquentés. En bref, une frange<br />
<strong>de</strong> la profession qui, en principe, ne crée pas <strong>de</strong> problèmes<br />
sur ce suj<strong>et</strong>. D’autre part, une myria<strong>de</strong> <strong>de</strong> p<strong>et</strong>its<br />
établissements, <strong>de</strong> bars sonorisés, qui estiment que les<br />
niveaux <strong>sonores</strong> élevés attirent les clients. Ils sont<br />
relativement méconnus <strong>de</strong>s services administratifs <strong>de</strong> l’État,<br />
mais connus <strong>de</strong>s services communaux. En général, pour c<strong>et</strong>te<br />
catégorie d’exploitants, l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> contraintes acoustiques<br />
<strong>et</strong> les travaux d’insonorisation sont <strong>de</strong>s enjeux qui s’avèrent<br />
vite dissuasifs. Soit ils arrêtent <strong>de</strong> diffuser <strong>de</strong> la musique soit<br />
ils m<strong>et</strong>tent la clé sous la porte.<br />
Par ailleurs, aux dires <strong>de</strong> la police nationale <strong>et</strong> <strong>de</strong> la police<br />
municipale <strong>de</strong> ma ville, il semblerait que, <strong>de</strong>puis que nous<br />
avons entrepris une action sur les lieux musicaux <strong>et</strong>,<br />
notamment, sur les bars sonorisés, les jeunes ont un<br />
comportement sur la voie publique, à la sortie <strong>de</strong>s<br />
établissements, qui s’est beaucoup amélioré. Pourquoi ? Je<br />
laisse la réponse à votre sagacité.<br />
Intervention <strong>de</strong> la salle : Pour compléter les propos <strong>de</strong><br />
Dominique François, les gérants <strong>de</strong> discothèques voient d’un<br />
très mauvais œil les bars musicaux dits « à thème »,<br />
puisqu’ils sont apparentés à une discothèque sans en payer<br />
les taxes spécifiques. Et c’est souvent ce type<br />
d’établissements qui posent le plus <strong>de</strong> problèmes.<br />
Les bars musicaux dans le collimateur <strong>de</strong>s<br />
associations<br />
Émile Perrier : M. François vient <strong>de</strong> me couper un peu<br />
l’herbe sous le pied, puisque je voulais également parler <strong>de</strong><br />
ces nouveaux établissements qui doivent se conformer au<br />
décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1998, je veux parler <strong>de</strong>s bars musicaux, qui se<br />
sonorisent à un instant donné pour attirer <strong>de</strong> la clientèle, en<br />
méprisant ou en ignorant totalement la loi <strong>et</strong> les riverains.<br />
Leurs malheureux voisins doivent entreprendre <strong>de</strong>s<br />
démarches extrêmement longues — il faut en moyenne 18<br />
mois pour atteindre un premier objectif. Alors, ne serait-il<br />
pas possible <strong>de</strong> mieux informer ces caf<strong>et</strong>iers qui sonorisent<br />
leur établissement dans la plus totale ignorance <strong>de</strong> la loi ?<br />
Emmanuel Bert : Très concrètement, je pense qu’ils sont<br />
très bien informés <strong>de</strong> la réglementation. Et ils le sont si bien<br />
qu’ils savent que les contrôles sont peu fréquents. Ils<br />
« jouent la montre » mais, une fois dans le collimateur <strong>de</strong><br />
l’Administration, en règle générale, ils finissent par perdre.<br />
Donc, ce qu’il y a lieu <strong>de</strong> faire, c’est <strong>de</strong> rem<strong>et</strong>tre l’accent<br />
sur les sanctions afin <strong>de</strong> relancer la dynamique.<br />
Philippe Ritter : Je souhaiterais apporter un p<strong>et</strong>it bémol aux<br />
propos d’Emmanuel Bert. Il est vrai que certains « jouent la<br />
montre » face à l’Administration, se situant ainsi à la limite<br />
<strong>de</strong> l’honnêt<strong>et</strong>é, tout en restant très policés dans leurs<br />
propos. C’est un comportement très français. Il n’en reste<br />
pas moins qu’un certain nombre <strong>de</strong> ces bars musicaux sont<br />
<strong>de</strong> bonne foi quand ils estiment ne pas relever du décr<strong>et</strong> au<br />
motif qu’ils diffusent simplement <strong>de</strong> la musique d’ambiance.<br />
Des efforts <strong>de</strong> pédagogie s’imposent.<br />
S’agissant du traitement <strong>de</strong>s procès verbaux, la circulaire du<br />
18 octobre 2003 adressée aux procureurs généraux,<br />
procureurs <strong>de</strong> la République <strong>et</strong> magistrats du parqu<strong>et</strong> est<br />
extrêmement claire. En cas <strong>de</strong> parqu<strong>et</strong> peu réactif, <strong>de</strong><br />
procès-verbal sans suite, il ne faut pas hésiter à adresser un<br />
courrier à la chancellerie. Laquelle interrogera <strong>de</strong> manière<br />
hiérarchique <strong>et</strong> quasi disciplinaire le parqu<strong>et</strong>, ce qui doit se<br />
traduire par un n<strong>et</strong> changement dans le traitement <strong>de</strong>s<br />
plaintes.<br />
Emmanuel Bert : Je confirme que la Direction <strong>de</strong>s affaires<br />
criminelles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s grâces semble plutôt soucieuse du suivi <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te circulaire adressée aux procureurs.<br />
Philippe Ritter : L’exemple <strong>de</strong> Lyon est édifiant : les procèsverbaux,<br />
qui, il y a encore <strong>de</strong>ux ou trois ans, étaient<br />
constamment classés sans suite pour poursuite inopportune,<br />
sont désormais systématiquement instruits. Une<br />
condamnation accompagnée d’une amen<strong>de</strong> <strong>de</strong> 1000 euros a<br />
récemment été prononcée pour non-présentation <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong><br />
d’impact. La voie judiciaire est une voie, la ferm<strong>et</strong>ure<br />
administrative décidée par le préf<strong>et</strong> en est une autre, qui<br />
est également efficace.<br />
Emmanuel Bert : Mais, il faut ajouter qu’il n’y a pas <strong>de</strong><br />
cohérence sur le traitement par les préf<strong>et</strong>s <strong>de</strong> ces dossiers.<br />
Là encore, le rôle <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétences pourrait<br />
perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> réintroduire davantage d’harmonie dans le<br />
traitement <strong>de</strong>s dossiers.<br />
Revoir la limite <strong>de</strong>s 105 dB(A) à la baisse ?<br />
Francis Daliphard (mé<strong>de</strong>cin ORL) : Ma question n’a aucune<br />
malice. Votre proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> modification <strong>de</strong> décr<strong>et</strong> ambitionne<br />
notamment d’évaluer les eff<strong>et</strong>s sur l’audition <strong>de</strong> la musique<br />
amplifiée. Quels moyens comptez-vous vous donner ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Il y a trois pistes : limiter, surveiller,<br />
informer. Limiter, selon une valeur qui reste à définir ;<br />
exiger <strong>de</strong> l’exploitant qu’il surveille le niveau sonore ;<br />
informer sur les risques auditifs, sur les niveaux <strong>sonores</strong><br />
susceptibles d’être atteints. Les éventuels problèmes<br />
d’audition <strong>de</strong>s personnels <strong>de</strong> discothèque peuvent constituer<br />
une source d’information. Nous comptons donc lancer une<br />
campagne d’évaluation <strong>de</strong> l’audition auprès <strong>de</strong> ces<br />
personnels.<br />
Monique Soyer (expert judiciaire) : Est-il actuellement<br />
envisagé, côté ministère, <strong>de</strong> baisser la limite <strong>de</strong> 105 dB(A) à,<br />
par exemple, 100 dB(A), par souci <strong>de</strong> protéger l’audition <strong>de</strong>s<br />
clients <strong>et</strong> du personnel, <strong>et</strong> protéger aussi le calme du<br />
voisinage ?<br />
Emmanuel Bert : Je vais vous apporter une partie <strong>de</strong> la<br />
réponse, M. Grén<strong>et</strong>ier la complètera. Il a été envisagé<br />
effectivement, lors <strong>de</strong> l’élaboration du premier proj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
décr<strong>et</strong>, <strong>et</strong> qui est maintenant défait, <strong>de</strong> baisser ce niveau <strong>de</strong><br />
105 à 100 dB(A), afin <strong>de</strong> se m<strong>et</strong>tre en adéquation avec le<br />
niveau <strong>de</strong> pression <strong>de</strong> crête.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Il n’y a eu, en la matière, aucune<br />
décision définitive <strong>de</strong> prise, mais l’abaissement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 101
valeur a suscité un mécontentement <strong>de</strong> la part <strong>de</strong> certains<br />
ministères <strong>et</strong> <strong>de</strong>s professionnels également. Donc, d’autres<br />
solutions pour diminuer le niveau sonore tout en gardant la<br />
valeur <strong>de</strong> 105 dB(A), qui feraient davantage consensus,<br />
pourraient être envisagées : cela consisterait à diminuer la<br />
durée d’intégration, qui est actuellement <strong>de</strong> 10 à 15 mn.<br />
Comment organiser la surveillance du niveau<br />
sonore ?<br />
De la salle : Je m’interroge beaucoup sur l’application <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te réglementation, notamment <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> 105 dB(A).<br />
Quel crédit peut-on apporter à un exploitant qui dispose<br />
d’un équipement <strong>de</strong> sonorisation suffisamment puissant pour<br />
ne pas respecter les 105 dB(A) <strong>et</strong> qui ne dispose pas <strong>de</strong><br />
sonomètre pour régler son système <strong>de</strong> sonorisation ? Y a-t-il<br />
eu <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> menées au niveau, notamment, du<br />
ministère <strong>de</strong> la Santé, sur les impacts auditifs liés à ces<br />
équipements <strong>de</strong> loisirs que sont les lieux musicaux ?<br />
Emmanuel Bert : Je l’ai déjà dit, mais je le répète : tout<br />
établissement diffusant <strong>de</strong> la musique amplifiée doit faire<br />
l’obj<strong>et</strong> d’une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’impact <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>.<br />
Donc, normalement, l’exploitant sait très bien si son<br />
matériel <strong>de</strong> sonorisation est susceptible <strong>de</strong> dépasser les 105<br />
dB(A). D’autre part, si les performances acoustiques du<br />
bâtiment ne l’autorisent pas à atteindre les 105 dB(A), il a<br />
obligation d’installer un limiteur.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Il est envisagé <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r à<br />
l’exploitant <strong>de</strong> contrôler lui-même le niveau sonore. Cela<br />
fait partie <strong>de</strong>s trois pistes que je viens <strong>de</strong> mentionner :<br />
limiter, surveiller — qu’il puisse se surveiller lui-même — <strong>et</strong><br />
informer.<br />
De la salle : Pour plus d’efficacité, ne faudrait-il pas<br />
envisager le renforcement <strong>de</strong>s moyens <strong>de</strong> certains services<br />
<strong>de</strong> l’État ?<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : C’est la question <strong>de</strong>s moyens<br />
effectivement.<br />
Philippe Ritter : Il est clair qu’une piste technique est la<br />
télésurveillance <strong>de</strong> ces installations par l’Administration, qui<br />
perm<strong>et</strong>trait <strong>de</strong> surveiller 40 établissements par nuit.<br />
Techniquement, c’est possible. L’administration n’en a pas<br />
encore les moyens, mais, d’ici une <strong>de</strong>mi-douzaine d’années,<br />
je suis persuadé que cela se fera.<br />
De la salle : Je dirais que, travaillant au ministère <strong>de</strong> la<br />
Santé, je suis très sensible à l’impact, aux eff<strong>et</strong>s auditifs <strong>de</strong><br />
ces équipements <strong>de</strong> loisirs. Il faut distinguer <strong>de</strong>ux aspects :<br />
le respect <strong>de</strong> l’environnement <strong>et</strong>, notamment, la prise en<br />
compte <strong>de</strong>s plaintes <strong>de</strong> voisinages qui peut avoir <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s<br />
sur la santé <strong>de</strong>s riverains, <strong>et</strong> les impacts auditifs, qui sont<br />
irréversibles, <strong>et</strong> qui me semblent plutôt inquiétants. D’où<br />
ma question : comment s’assurer <strong>de</strong> l’efficacité, du respect,<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réglementation ?<br />
Philippe Ritter : C’est une question <strong>de</strong> volonté politique,<br />
d’application <strong>de</strong> la loi. Je ne vise pas seulement l’État, mais<br />
également les maires <strong>et</strong> les moyens déployés pour appliquer<br />
la loi.<br />
De la salle : Mais ne serait-il pas plus simple d’imposer un<br />
limiteur <strong>de</strong> pression acoustique. Dans la perspective <strong>de</strong> la<br />
protection <strong>de</strong> l’environnement, <strong>de</strong>s riverains…<br />
Philippe Ritter : Les juristes vous répondront que la loi<br />
fixant une limite maximale à 105 dB(A) <strong>et</strong> 120 dB <strong>de</strong> crête,<br />
tous les citoyens <strong>de</strong> ce pays ayant été informés — puisque<br />
c<strong>et</strong>te norme est sortie au journal officiel <strong>de</strong> la République<br />
française —, il est <strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> chaque citoyen <strong>de</strong><br />
l’appliquer. En c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> simplification<br />
administrative <strong>et</strong> <strong>de</strong> « réduction <strong>de</strong> voilure » <strong>de</strong> l’État, un<br />
texte qui imposerait un dispositif serait à coup sûr r<strong>et</strong>oqué<br />
par le Conseil d’État.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Le limiteur ne constitue pas la panacée<br />
puisque, apparemment, il est très facile <strong>de</strong> contourner ce<br />
dispositif.<br />
Philippe Ritter : Très facile en eff<strong>et</strong>. Il semble que certains<br />
mauvais gestionnaires d’établissements nocturnes aient<br />
trouvé le moyen technique <strong>de</strong> dépasser la limite autorisée<br />
malgré la présence du limiteur. Une piste actuellement<br />
explorée par l’Administration est <strong>de</strong> trouver les moyens <strong>de</strong><br />
dépister <strong>et</strong> <strong>de</strong> prouver ces frau<strong>de</strong>s, qui une fois mises en<br />
évi<strong>de</strong>nce, se traduiront par une ferm<strong>et</strong>ure administrative <strong>de</strong><br />
l’établissement. Quand une dizaine <strong>de</strong> ces établissements<br />
auront été fermés, la communication circulant relativement<br />
bien dans c<strong>et</strong>te profession, on peut espérer que les choses<br />
s’améliorent.<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : D’autres pistes sont également<br />
envisagées comme, par exemple, l’enregistrement <strong>de</strong>s<br />
niveaux <strong>sonores</strong> sur une pério<strong>de</strong>. Le contrôle par<br />
l’Administration s’en trouverait gran<strong>de</strong>ment facilité.<br />
Relance <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétence Bruit<br />
Marc Esmenjaud (DDASS <strong>de</strong> l’Isère)<br />
Les pôles <strong>de</strong> compétences bruit : à quoi servent-ils, où en<br />
sommes nous <strong>et</strong> où allons-nous ? Jacky Levecq <strong>et</strong> moi<br />
intervenons sur ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la relance <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétences bruit, au titre d’une mission <strong>de</strong> coordination<br />
<strong>de</strong> ces instances que nous a confiée la Direction générale <strong>de</strong><br />
la santé.<br />
Un pôle <strong>de</strong> compétences est une organisation<br />
interministérielle entre les services déconcentrés <strong>de</strong> l’État,<br />
à l’échelon d’un département, sous l’autorité du préf<strong>et</strong>. Les<br />
problèmes <strong>de</strong> bruit liés à l’urbanisme sont<br />
préférentiellement du ressort <strong>de</strong>s organismes relevant <strong>de</strong><br />
l’urbanisme, le bruit <strong>de</strong>s engins circulant sur les routes est,<br />
<strong>de</strong> manière prépondérante, du ressort <strong>de</strong> la police ou <strong>de</strong> la<br />
gendarmerie… <strong>de</strong> nombreux acteurs s’occupent<br />
légitimement <strong>de</strong> problèmes <strong>de</strong> bruit. En revanche, côté<br />
récepteur, ce sont <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s sur sa santé qui sont en cause,<br />
d’où la nécessité <strong>de</strong> donner une unité, à m<strong>et</strong>tre en synergie,<br />
à gagner <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s d’échelle sur la mise en œuvre <strong>de</strong>s<br />
politiques, bref, à optimiser l’action <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> l’État<br />
sur ce domaine éminemment diffus, hétérogène, qu’est le<br />
bruit. Voilà pour la philosophie <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétences.<br />
Jacky Levecq vous présente maintenant l’état <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong><br />
quelques années d’expérience <strong>de</strong> ces instances.<br />
Jacky Levecq (DDASS <strong>de</strong> Savoie)<br />
L’ensemble <strong>de</strong>s données relatives aux pôles <strong>de</strong> compétences<br />
que je présente ici sont issues <strong>de</strong> l’application web<br />
GestaBruit, un outil conçu <strong>et</strong> réalisé par le ministère <strong>de</strong> la<br />
Santé, qui vise trois objectifs : renseigner les<br />
administrations centrales sur les moyens humains <strong>et</strong><br />
matériels qui sont affectés à la problématique du bruit par<br />
le ministère chargé <strong>de</strong> la santé ; mesurer la productivité <strong>de</strong>s<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
services déconcentrés <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétences en<br />
terme <strong>de</strong> documentation <strong>et</strong> <strong>de</strong> formation ; recenser les<br />
personnes ressources sur l’ensemble du territoire.<br />
Quels sont les points positifs à porter au crédit <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétences ? Ce sont <strong>de</strong>s outils opérationnels efficaces qui<br />
s’inscrivent d’ores <strong>et</strong> déjà dans le dispositif institutionnel <strong>de</strong><br />
lutte contre le bruit. Le rapport <strong>et</strong> l’avis du Conseil<br />
économique <strong>et</strong> social sur Le bruit <strong>et</strong> la ville publié en 1998,<br />
auquel Jean-Pierre Gualezzi, ici présent, avait gran<strong>de</strong>ment<br />
contribué, souligne la pertinence <strong>de</strong> ces instances <strong>et</strong> invite à<br />
leur développement. Ces structures nouvelles ont bénéficié<br />
d’une liberté d’initiative qui a permis l’expérimentation <strong>de</strong><br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> fonctionnement <strong>et</strong> d’actions parfois innovants, <strong>et</strong><br />
souvent pertinents. Toutefois, ce contexte relativement<br />
imprécis a aussi ses travers : certains animateurs <strong>de</strong> pôle ont<br />
fait part <strong>de</strong> leur isolement, certains aujourd’hui encore ne<br />
sont pas parvenus à constituer une véritable autorité<br />
fonctionnelle. Si l’on ajoute l’absence <strong>de</strong> formation<br />
spécifique à la fonction d’animation, qui est une fonction<br />
nouvelle, une légitimité parfois contestée dans certains<br />
départements, une motivation inégale <strong>de</strong>s services<br />
partenaires <strong>et</strong>, surtout, un déficit d’effectif dédié à<br />
l’animation <strong>de</strong> ces pôles, le bilan se distingue avant tout par<br />
les performances inégales <strong>de</strong>s pôles, d’un département à<br />
l’autre.<br />
Nous avons mené une étu<strong>de</strong> comparative <strong>de</strong> la situation <strong>de</strong>s<br />
pôles au 1 er janvier 2001 <strong>et</strong> celle relevée au 1 er janvier 2005.<br />
En 2001, tous les pôles, à c<strong>et</strong>te époque, étaient pilotés par<br />
les Directions départementales <strong>de</strong>s affaires sanitaires <strong>et</strong><br />
sociales (DDASS), à l’exception <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> la Ville <strong>de</strong> Paris,<br />
où le pilotage était assuré par la préfecture <strong>de</strong> police, <strong>et</strong><br />
celui du Val d’Oise, qui était piloté par la Direction<br />
départementale <strong>de</strong> la sécurité publique, <strong>et</strong> qui l’est<br />
toujours. Le fait que ces pôles soient en gran<strong>de</strong> majorité<br />
pilotés par <strong>de</strong>s DDASS tient à plusieurs raisons.<br />
Historiquement, les services santé-environnement sont,<br />
<strong>de</strong>puis les années 80, engagés dans la lutte contre le bruit,<br />
notamment dans le traitement <strong>de</strong>s plaintes pour bruits <strong>de</strong><br />
voisinage ; ils ont développé à ce titre <strong>de</strong>s compétences en<br />
métrologie acoustique <strong>de</strong> l’environnement, <strong>de</strong>s compétences<br />
dans l’écoute <strong>et</strong> la gestion <strong>de</strong>s conflits ; enfin, ils sont en<br />
quelque sorte <strong>de</strong>venus <strong>de</strong>s centres ressources pour le conseil<br />
auprès <strong>de</strong>s communes, les opérations <strong>de</strong> sensibilisation <strong>et</strong> la<br />
formation <strong>de</strong>s différents publics, qu’ils soient scolaires, élus<br />
ou agents <strong>de</strong> l’État. Finalement, une circulaire, en 1995 a<br />
déclenché une dynamique importante au niveau <strong>de</strong>s DDASS,<br />
<strong>et</strong> <strong>de</strong> nombreux agents ont fait <strong>de</strong>s propositions aux préf<strong>et</strong>s<br />
<strong>de</strong> création <strong>de</strong> ces nouvelles instances. Les départements du<br />
sud-est <strong>et</strong> <strong>de</strong> la région Rhône-Alpes, ainsi que les<br />
départements d’Outre-mer, sont particulièrement bien dotés<br />
en pôles <strong>de</strong> compétence bruit. Il faut reconnaître que le<br />
développement relativement rapi<strong>de</strong> <strong>et</strong> important <strong>de</strong>s pôles<br />
<strong>de</strong> compétences <strong>de</strong>puis 1996 doit être pondéré par un <strong>de</strong>gré<br />
d’investissement excessivement variable d’un département<br />
à un autre. En eff<strong>et</strong>, les équivalents temps plein<br />
(exclusivement) consacrés à l’animation <strong>de</strong> ces structures<br />
varient <strong>de</strong> 0,1, soit une <strong>de</strong>mi-journée par semaine, à un<br />
équivalent temps plein, soit une personne travaillant<br />
quasiment à plein temps. La moyenne se situe autour <strong>de</strong> 0,3.<br />
La situation <strong>de</strong>s pôles au 1 er janvier 2005 s’établit <strong>de</strong> la<br />
manière suivante : 45 pôles créés, 8 pôles en cours <strong>de</strong><br />
création <strong>et</strong> 47 départements non pourvus. De 2001 à 2005,<br />
seuls 5 pôles supplémentaires ont été créés. Qui plus est,<br />
<strong>de</strong>ux pôles <strong>de</strong> compétences qui étaient en cours <strong>de</strong> création<br />
en 2001 ne se sont pas finalisés, si bien que par rapport à<br />
2001, le bilan au 1 er janvier 2005 <strong>de</strong>s pôles créés <strong>et</strong> en cours<br />
<strong>de</strong> création est inférieur à celui du 1 er janvier 2001 (qui était<br />
<strong>de</strong> 40 pôles créés, 15 en cours <strong>de</strong> création <strong>et</strong> 45 non<br />
pourvus).<br />
Je voudrais revenir sur les résultats du groupe <strong>de</strong> travail du<br />
Conseil national du bruit (CNB) sur les pôles <strong>de</strong><br />
compétences, afin <strong>de</strong> présenter les suites réservées à ces<br />
recommandations. Rappelons que les dispositions du décr<strong>et</strong><br />
du 6 juill<strong>et</strong> 2000 relatives au CNB prévoyaient que c<strong>et</strong>te<br />
instance pouvait, <strong>de</strong> sa propre initiative <strong>et</strong> après en avoir<br />
informé le ministre chargé <strong>de</strong> l’environnement, examiner<br />
toute question relative à l’amélioration <strong>de</strong> l’environnement<br />
sonore <strong>et</strong> proposer <strong>de</strong>s mesures propres à prévenir les<br />
nuisances <strong>sonores</strong> ou à en réduire les eff<strong>et</strong>s. Dans le cadre<br />
<strong>de</strong> ces nouvelles dispositions, Jean-Pierre Gualezzi avait<br />
proposé au prési<strong>de</strong>nt du CNB <strong>de</strong> constituer un groupe <strong>de</strong><br />
travail sur les pôles <strong>de</strong> compétences, auquel j’avais<br />
participé. La tâche qui était dévolue à ce groupe était<br />
double : d’une part, proposer <strong>de</strong>s solutions à même <strong>de</strong><br />
conforter les pôles existants ; d’autre part, faciliter la<br />
constitution <strong>et</strong> la mise en œuvre <strong>de</strong> nouveaux pôles pour<br />
couvrir l’ensemble <strong>de</strong>s départements. Il me semble même<br />
que le ministère <strong>de</strong> l’environnement s’était engagé, en<br />
1998, en faveur d’un élargissement à l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
départements. Ce groupe s’est réuni à plusieurs reprises en<br />
2000 <strong>et</strong> son rapport a été entériné par une assemblée<br />
plénière c<strong>et</strong>te même année. D’un avis général, il fallait une<br />
impulsion nationale qui érige la lutte contre le bruit au rang<br />
<strong>de</strong> priorité du gouvernement <strong>et</strong> les pôles <strong>de</strong> compétences<br />
départementaux comme un outil essentiel <strong>de</strong> mise en œuvre<br />
<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te politique. Ce rapport, estimé indispensable <strong>et</strong><br />
urgent, s’est concrétisé par une information aux préf<strong>et</strong>s <strong>et</strong><br />
aux chefs <strong>de</strong>s services déconcentrés <strong>de</strong>stinée à expliquer la<br />
démarche <strong>et</strong> à les mobiliser. Pour ce qui concerne le<br />
renforcement <strong>de</strong>s effectifs, ce groupe <strong>de</strong> travail avait fixé<br />
l’investissement minimum à 0,5 équivalent temps plein<br />
consacré à l’animation. Voilà ce qui avait été envisagé pour<br />
que le pôle tourne dans <strong>de</strong> bonnes conditions.<br />
Où en est-on, début 2005, en matière d’effectifs dédiés à<br />
l’animation <strong>de</strong>s pôles ? Aucun département n’a atteint<br />
l’objectif minimum <strong>de</strong> 0,5 équivalent temps plein. Pour<br />
savoir si c<strong>et</strong>te tendance est uniquement liée aux pôles <strong>de</strong><br />
compétences, ou s’il s’agit d’une tendance plus générale,<br />
nous avons étudié les équivalents temps plein consacrés au<br />
bruit dans les DDASS, en ne r<strong>et</strong>enant que les missions qui<br />
relèvent spécifiquement du ministère <strong>de</strong> la Santé, donc hors<br />
animation <strong>de</strong> pôle <strong>de</strong> compétences. On r<strong>et</strong>iendra que, dans<br />
les DDASS, 32 équivalents temps plein sont consacrés au<br />
bruit, mais que c<strong>et</strong>te masse d’équivalent temps plein au 1 er<br />
janvier 2005 est en diminution <strong>de</strong> 2 équivalents temps plein<br />
par rapport à la situation au 1 er janvier 2001. Pour résumer,<br />
malgré les 5 pôles créés entre 2001 <strong>et</strong> 2005, le temps<br />
consacré à l’animation <strong>de</strong>s pôles a, proportionnellement,<br />
baissé. Comme l’activité bruit <strong>de</strong>s DDASS est également en<br />
baisse, on peut conclure que c’est bien le manque d’effectif<br />
qui reste la raison prépondérante <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te stagnation <strong>de</strong>s<br />
pôles <strong>de</strong> compétence bruit. Ces tendances reflètent la<br />
politique générale <strong>de</strong> réduction du nombre <strong>de</strong>s<br />
fonctionnaires <strong>et</strong> du recentrage <strong>de</strong>s ministères sur leurs<br />
missions spécifiques. Voilà pour c<strong>et</strong>te question <strong>de</strong>s effectifs,<br />
que le groupe <strong>de</strong> travail du CNB avait placé en tête <strong>de</strong>s<br />
priorités.<br />
Sur le plan <strong>de</strong> l’information, une brochure d’information<br />
intitulée « Pôles <strong>de</strong> compétence bruit : un outil local <strong>de</strong><br />
coopération interservices » a été transmise aux préf<strong>et</strong>s <strong>et</strong><br />
aux chefs <strong>de</strong>s services déconcentrés en septembre 2000. Ce<br />
document a également été diffusé à l’occasion <strong>de</strong> la journée<br />
d’étu<strong>de</strong> du 12 octobre 2000, organisée par la Délégation<br />
interministérielle à la réforme <strong>de</strong> l’État, sur le thème <strong>de</strong> la<br />
coopération interservices au niveau territorial. Marc<br />
Esmenjaud, intervenant lors <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te journée pour le pôle<br />
bruit <strong>de</strong> l’Isère, avait diffusé la brochure à 250 cadres <strong>de</strong>s<br />
services déconcentrés <strong>de</strong> l’État, <strong>de</strong>s préf<strong>et</strong>s, <strong>de</strong>s secrétaires<br />
généraux <strong>et</strong> <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> services déconcentrés.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 103
L’information est donc un aspect <strong>de</strong>s recommandations du<br />
CNB qui a été bien suivi.<br />
Tout bien considéré, ces pôles sont peu nombreux, plutôt<br />
mal lotis en termes <strong>de</strong> ressources humaines <strong>et</strong>, pourtant,<br />
côté productivité, ils affichent <strong>de</strong>s résultats plutôt flatteurs,<br />
comparativement au peu d’équivalents temps pleins qui<br />
leurs sont consacrés. Une récente extraction <strong>de</strong> la base <strong>de</strong><br />
données révèle que 73 % <strong>de</strong>s documents <strong>de</strong> communication à<br />
<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s élus ou du grand public, <strong>de</strong>s dossiers<br />
thématiques tels que le gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong> bruit réalisé par la<br />
DDASS <strong>de</strong> l’Isère, sont produits par <strong>de</strong>s départements qui<br />
sont pourvus <strong>de</strong> pôles <strong>de</strong> compétences. Actuellement, un<br />
tiers <strong>de</strong> ces documents sont mutualisables via <strong>de</strong>s réseaux<br />
professionnels. Côté formations, 85 % <strong>de</strong>s formations sont le<br />
fait <strong>de</strong> départements pourvus <strong>de</strong> pôles <strong>de</strong> compétences.<br />
Actuellement, une majorité <strong>de</strong> ces formations <strong>de</strong>stinées aux<br />
agents communaux sont organisées en collaboration avec les<br />
CNFPT, dans le cadre <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong>s décr<strong>et</strong>s <strong>de</strong> 1995 <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> 1998.<br />
Les pôles <strong>de</strong> compétences bruit sont encore actuellement<br />
<strong>de</strong>s instances en quête d’effectifs. La création ou le<br />
renforcement <strong>de</strong>s pôles existants relève essentiellement <strong>de</strong><br />
décisions organisationnelles <strong>et</strong> nécessite également la<br />
mobilisation <strong>de</strong> moyens nouveaux, adaptés à l’animation <strong>de</strong>s<br />
politiques publiques à caractère spécifiquement<br />
interministériel. Ce sont <strong>de</strong>s fonctions nouvelles, pour<br />
lesquelles les équivalents temps plein nécessaires à<br />
l’animation <strong>de</strong> ces pôles avaient été estimés au minimum à<br />
0,5 équivalent temps plein. C<strong>et</strong>te valeur a été entérinée à<br />
plusieurs reprises <strong>et</strong>, sauf erreur, la circulaire sur les pôles<br />
<strong>de</strong> compétences qui vient d’être diffusée dans les services<br />
déconcentrés fixe aussi c<strong>et</strong>te valeur <strong>de</strong> 0,5 équivalent temps<br />
plein. Dans un premier temps, à titre <strong>de</strong> rattrapage, pour<br />
consoli<strong>de</strong>r l’action <strong>de</strong>s pôles créés ou en cours <strong>de</strong> création,<br />
il y aura lieu <strong>de</strong> prévoir 17 équivalents temps plein<br />
d’animation <strong>et</strong> 13 équivalents temps plein <strong>de</strong> secrétariat<br />
administratif. À brève échéance, pour perm<strong>et</strong>tre la création<br />
<strong>de</strong>s pôles dans l’ensemble <strong>de</strong>s départements, ce qui était<br />
prévu, il faudrait pourvoir 22 équivalents temps plein<br />
supplémentaires.<br />
Quels sont les scénarios <strong>de</strong> relance envisageables ? Dans le<br />
contexte <strong>de</strong> la « réduction <strong>de</strong> voilure » <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> l'État<br />
évoquée précé<strong>de</strong>mment, la piste consistant à renforcer les<br />
effectifs existants n’a pas vraiment produit les eff<strong>et</strong>s<br />
escomptés. Quant à la piste du redéploiement, qui<br />
correspondrait à solliciter d’autres services déconcentrés <strong>de</strong><br />
l’État que les seuls services du ministère <strong>de</strong> la Santé, elle a<br />
été explorée, par le groupe <strong>de</strong> travail du CNB notamment.<br />
La préfecture <strong>de</strong> police <strong>de</strong> Paris <strong>et</strong> le département du Val<br />
d’Oise mis à part, force est <strong>de</strong> constater que le pilotage <strong>de</strong>s<br />
pôles par d’autres services déconcentrés, pour soulager<br />
l’effort déjà important du ministère <strong>de</strong> la Santé, n’a pas du<br />
tout produit ses eff<strong>et</strong>s. Peut-être faudrait-il créer, dans le<br />
cadre <strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> l’État, <strong>de</strong>s fonctions administratives<br />
adaptées aux pratiques transversales nouvelles, <strong>de</strong> type<br />
animation, développement, par exemple, en les dotant <strong>de</strong><br />
moyens nécessaires. De fait, on imagine aisément qu’un chef<br />
<strong>de</strong> service déconcentré ne souhaite pas affaiblir les forces<br />
vives travaillant sur <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s prioritaires pour ce service. À<br />
une certaine époque, il avait par ailleurs été imaginé <strong>de</strong><br />
transférer l’ensemble <strong>de</strong>s postes d’animation sur le budg<strong>et</strong><br />
du ministère chargé <strong>de</strong> l’aménagement du territoire,<br />
moyennant un pilotage fonctionnel <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier, la gestion<br />
<strong>de</strong>s effectifs restant assurée par le ministère <strong>de</strong> la Santé. Ce<br />
sont <strong>de</strong>s pistes qui n’ont pas progressé.<br />
Avant <strong>de</strong> laisser Marc Esmenjaud abor<strong>de</strong>r le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’intégration <strong>et</strong> <strong>de</strong>s problèmes d’accueil <strong>de</strong>s services<br />
communaux d’hygiène <strong>et</strong> <strong>de</strong> santé au sein <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétences, je terminerai en soulignant que ce bilan<br />
plutôt négatif a été dressé à la lumière <strong>de</strong> données précises<br />
<strong>et</strong> objectives qui méritent une réflexion.<br />
Marc Esmenjaud (DDASS <strong>de</strong> l’Isère)<br />
Le bilan présenté par Jacky Levecq est effectivement assez<br />
pessimiste. Parler <strong>de</strong> relance <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétences,<br />
dans un contexte où l’on peut douter <strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong>s<br />
effectifs nécessaires à un fonctionnement optimal <strong>de</strong> ce<br />
genre <strong>de</strong> structures, peut sembler déplacé. Pourtant,<br />
plusieurs raisons justifient la nécessité d’une relance <strong>de</strong> ces<br />
structures. Première <strong>de</strong> ces raisons, le contexte<br />
réglementaire, c’est-à-dire le cadre <strong>de</strong> l’action <strong>de</strong> l’État<br />
dans le domaine du bruit, qui a connu une évolution très<br />
importante. Nous avons été mobilisés, par le passé, par <strong>de</strong>s<br />
évolutions réglementaires fortes, telles que le décr<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
1998 <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> 1995, ou, dans le domaine routier, le<br />
classement sonore <strong>de</strong>s voies. Deuxième raison, <strong>de</strong>puis un an,<br />
nous sommes soumis à une série <strong>de</strong> textes qui lancent un<br />
certain nombre <strong>de</strong> dynamiques auxquelles nous allons <strong>de</strong>voir<br />
répondre. La loi <strong>de</strong> santé publique, tout en restant dans un<br />
registre très général, place la réduction <strong>de</strong> l’exposition <strong>de</strong>s<br />
populations au bruit parmi les objectifs prioritaires <strong>de</strong> la<br />
Nation en matière <strong>de</strong> santé publique. Le plan national<br />
d’action contre le bruit répertorie une série <strong>de</strong> mesures<br />
concrètes pour agir sur le domaine <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>. Un<br />
certain nombre <strong>de</strong> ces mesures, <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce,<br />
relèvent, pour leur mise en œuvre à l’échelon du<br />
département, d’une action interministérielle. C’est le cas,<br />
par exemple, <strong>de</strong> l’amélioration <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> contrôle <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> sanction, qui concerne les services <strong>de</strong> la réglementation<br />
en préfecture, les services <strong>de</strong>s DDASS (pour améliorer<br />
l’articulation avec les communes), la police, la gendarmerie<br />
<strong>et</strong> la justice. Le plan national santé environnement lancé en<br />
juin 2004 fixe <strong>de</strong>ux objectifs en matière <strong>de</strong> bruit. Le premier<br />
consiste à protéger les adolescents <strong>de</strong>s risques dus à la<br />
musique amplifiée. Outre l’application du décr<strong>et</strong> <strong>de</strong> 1998, il<br />
y a un travail <strong>de</strong> sensibilisation à mener avec les services <strong>de</strong><br />
santé scolaire, avec les communes, sur c<strong>et</strong>te problématique.<br />
Il est certain qu’il ne revient pas aux seules DDASS <strong>de</strong><br />
s’emparer <strong>de</strong> ce problème ; il va falloir développer <strong>de</strong>s<br />
synergies, s’appuyer sur d’autres services <strong>et</strong>, là encore,<br />
travailler ensemble sur c<strong>et</strong> objectif. Le plan national santé<br />
environnement vise également l’amélioration <strong>de</strong> la qualité<br />
acoustique <strong>de</strong>s bâtiments accueillant <strong>de</strong> jeunes enfants. Le<br />
ministère chargé <strong>de</strong> la santé <strong>et</strong> celui chargé <strong>de</strong><br />
l’environnement ont <strong>de</strong>s objectifs communs sur c<strong>et</strong>te<br />
thématique. Là encore, les pôles <strong>de</strong> compétences peuvent<br />
avoir un rôle à jouer. La circulaire <strong>de</strong> mission DDASS <strong>et</strong><br />
DRASS, qui s’adresse donc au pré carré <strong>de</strong>s services<br />
extérieurs du ministère <strong>de</strong> la Santé, suggère, entre autres<br />
missions à vocation bruit, d’améliorer les connaissances sur<br />
l’exposition au bruit <strong>de</strong>s populations. C<strong>et</strong>te recommandation<br />
implique <strong>de</strong> pouvoir exploiter les résultats <strong>de</strong>s mesures<br />
produites par <strong>de</strong>s partenaires extérieurs. Ceci requiert,<br />
d’une part, <strong>de</strong> travailler avec ces partenaires pour avoir<br />
connaissance <strong>de</strong> leurs résultats <strong>et</strong> les exploiter, <strong>et</strong>, d’autre<br />
part, <strong>de</strong> définir <strong>et</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en œuvre avec les partenaires<br />
une stratégie <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong>s plaintes. Typiquement, il s’agit<br />
là d’un travail <strong>de</strong> pôle <strong>de</strong> compétence. La circulaire<br />
interministérielle DGS/DPPR incite, quant à elle, à faire<br />
prendre en compte la problématique du bruit dans les<br />
documents d’urbanisme <strong>et</strong> les proj<strong>et</strong>s d’aménagements. Là<br />
encore, coopération <strong>et</strong> synergie sont <strong>de</strong> mise. Parmi ces<br />
actions prioritaires, définies par le ministère sous forme<br />
d’objectifs pour ses services, figure la participation à la<br />
définition <strong>et</strong> à la mise en œuvre d’une coordination<br />
interservices, la participation ou le pilotage <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétence bruit. Les pôles font donc manifestement partie<br />
<strong>de</strong>s objectifs du ministère <strong>de</strong> la Santé. Quant à la directive<br />
européenne, qui vise à améliorer la connaissance <strong>de</strong>s<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
problématiques <strong>de</strong> bruit sur un territoire <strong>et</strong> l’exposition <strong>de</strong>s<br />
populations au bruit, les échéances sont certes un peu plus<br />
lointaines, mais, pour l’appliquer, les pôles <strong>de</strong> compétence<br />
auront une certaine expertise à apporter aux communes <strong>et</strong><br />
communautés urbaines, qui sont directement concernées par<br />
l’établissement <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques. Je<br />
terminerai par le rapport <strong>de</strong> l’Afsse, présenté par Gilles<br />
Dixsaut lors <strong>de</strong> la séance plénière consacrée à la santé. Les<br />
experts y formulent la recommandation que, pour<br />
l’ensemble <strong>de</strong> ces démarches telles que, par exemple, la<br />
prise en compte du bruit dans l’examen <strong>de</strong>s permis <strong>de</strong><br />
construire, les élus pourraient avoir recours aux pôles <strong>de</strong><br />
compétences bruit, dont les moyens d’action doivent être<br />
élargis.<br />
Face à un domaine aussi hétérogène que le bruit, il faut<br />
regrouper les compétences <strong>et</strong> les niveaux d’action pour<br />
pouvoir travailler ensemble. J’ai précisé au début <strong>de</strong> mon<br />
intervention que l’organisation <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétences<br />
relevait essentiellement <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> l’État mais, <strong>de</strong><br />
toute évi<strong>de</strong>nce, les services communaux doivent être<br />
associés à c<strong>et</strong>te dynamique. La récente circulaire du<br />
ministère <strong>de</strong> la Santé, entre autres pistes <strong>de</strong> relance <strong>de</strong>s<br />
pôles <strong>de</strong> compétence, insiste sur la nécessité d’associer les<br />
communes, les services communaux d’hygiène <strong>et</strong> <strong>de</strong> santé.<br />
Rien d’étonnant à cela, car ce sont là nos partenaires<br />
privilégiés en matière d’application <strong>de</strong> la réglementation sur<br />
la santé publique. Mais l’on peut aussi s’interroger sur la<br />
place à donner aux établissements publics <strong>de</strong> coopération<br />
intercommunale (EPCI) qui, pour certains, ont la possibilité<br />
d’investir <strong>de</strong>s compétences en matière d’environnement.<br />
Dans le cadre <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> la directive européenne,<br />
les EPCI sont peut-être une porte d’entrée pertinente. Se<br />
pose en eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> manière récurrente la question <strong>de</strong><br />
« l’échelle normale » pour travailler sur les problématiques<br />
<strong>de</strong> bruit, en particulier, l’instruction <strong>de</strong>s plaintes avec<br />
mesure acoustique. Le personnel <strong>de</strong>s DDASS ne suffisant plus<br />
à la tâche, les possibilités <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong>s plaintes par les<br />
polices intercommunales dans les grosses agglomérations<br />
sont à explorer. Au niveau <strong>de</strong>s communes également, outre<br />
les SCHS, il existe un certain nombre <strong>de</strong> services dédiés à<br />
l’urbanisme, à la vie scolaire, à la culture, qui peuvent être<br />
concernés par la problématique du bruit <strong>et</strong> qui pourraient<br />
être associés aux travaux du pôle. Je citerai l’exemple <strong>de</strong><br />
l’action en matière d’urbanisme que nous menons <strong>de</strong>puis<br />
une dizaine d’années au sein du pôle <strong>de</strong> compétence bruit<br />
<strong>de</strong> l’Isère. Les techniciens <strong>de</strong> terrain <strong>de</strong>s services<br />
d’urbanisme nous ont apporté un éclairage tout à fait<br />
pertinent sur l’évolution <strong>de</strong> ce genre <strong>de</strong> situations. Le besoin<br />
existe, les difficultés liées aux effectifs sont manifestes,<br />
mais, si l’on veut avancer, il faut se lancer.<br />
Débat<br />
Philippe Ritter : Avant <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r la parole à Jean-Pierre<br />
Gualezzi, je voudrais rappeler la qualité du gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong><br />
bruit réalisé par le pôle <strong>de</strong> compétence bruit <strong>de</strong> l’Isère. Ce<br />
document tout à fait remarquable mérite d’être signalé à<br />
l’attention <strong>de</strong> tous.<br />
La réforme <strong>de</strong> l’Etat : une opportunité pour<br />
les pôles <strong>de</strong> compétence ?<br />
Jean-Pierre Gualezzi : Concernant le bilan <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétence, ce que Jacky Levecq n’a pas dit, c’est qu’il y a<br />
eu <strong>de</strong>s promesses, à l’intérieur du groupe <strong>de</strong> travail, qui<br />
n’ont pas été tenues. Je pense notamment à la promesse du<br />
ministère <strong>de</strong> l’Équipement <strong>de</strong> désigner trois animateurs. Sur<br />
ce point, en janvier 2005, le bilan est nul. C’est regr<strong>et</strong>table,<br />
mais c’est ainsi.<br />
Deuxièmement, concernant l’avenir, je considère<br />
qu’aujourd’hui une double opportunité se présente à nous.<br />
Comme Marc Esmenjaud l’a souligné, les pôles <strong>de</strong><br />
compétence pourraient se voir confier un certain nombre <strong>de</strong><br />
responsabilités liées à l’application <strong>de</strong> la directive,<br />
notamment, fournir <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s aux maires <strong>et</strong> aux<br />
responsables <strong>de</strong>s collectivités territoriales concernées. La<br />
<strong>de</strong>uxième opportunité, c’est la relance <strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong><br />
l’État. La circulaire du premier ministre <strong>de</strong> novembre 2004<br />
relance la réforme <strong>de</strong> l’État sur la base <strong>de</strong><br />
« l’interministérialité » ; elle charge les préf<strong>et</strong>s <strong>de</strong> définir<br />
leurs besoins pour favoriser la synergie entre les différents<br />
services déconcentrés <strong>de</strong> l’État, au niveau départemental ou<br />
régional. Les filières verticales, ministère par ministère,<br />
laissent place à une redistribution <strong>de</strong>s tâches, <strong>de</strong>s services,<br />
<strong>de</strong>s effectifs, à partir <strong>de</strong>s missions. Or, les pôles <strong>de</strong><br />
compétence bruit ont fait leur preuve, ils ont montré qu’ils<br />
pouvaient être pilotes en matière <strong>de</strong> synergie entre services<br />
dans un département. Il faut donc le faire savoir. Il faut <strong>de</strong>s<br />
expérimentations, au terme <strong>de</strong>squelles s’offriront <strong>de</strong>s<br />
possibilités <strong>de</strong> généralisation <strong>de</strong>s expériences réussies. Le<br />
problème ? Ce sont les préf<strong>et</strong>s qui sont chargés <strong>de</strong> définir<br />
leurs besoins en liaison avec les chefs <strong>de</strong>s services<br />
déconcentrés <strong>de</strong> leur ressort. Comment faire savoir aux<br />
préf<strong>et</strong>s l’intérêt qu’ils auraient à stimuler la multiplication<br />
<strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétence bruit départementaux ? La tâche<br />
n’est pas simple, elle suppose, d’une part, un lobbying<br />
direct, au niveau local, <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s pôles déjà créés, mais<br />
également, pour les 47 départements non encore pourvus,<br />
une action au niveau <strong>de</strong>s ministères. Le ministère <strong>de</strong> la<br />
Santé peut-il faire quelque chose ? Le ministère chargé <strong>de</strong> la<br />
réforme <strong>de</strong> l’État peut-il être saisi ? Le ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable peut-il faire<br />
quelque chose ? Je pense que oui, mais il faut les convaincre<br />
du bienfait <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te démarche. Il faut recruter d’autres<br />
lobbies, comme l’association <strong>de</strong>s maires <strong>de</strong> France. Bonne<br />
chance !<br />
Nicolas Grén<strong>et</strong>ier : Les ministères en charge <strong>de</strong> l’écologie <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> la santé ont diffusé le 13 décembre 2004 une circulaire<br />
sur les pôles <strong>de</strong> compétences. L’information est donc passée<br />
chez les préf<strong>et</strong>s. C<strong>et</strong>te circulaire <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aussi une<br />
coordination régionale <strong>de</strong>s pôles d’une même région, ainsi<br />
qu’une implication <strong>de</strong>s DRASS <strong>et</strong> <strong>de</strong>s DIREN.<br />
Ne pas s’arrêter au seul critère <strong>de</strong> la création<br />
pour l’évaluation <strong>de</strong>s pôles : certaines DDASS<br />
sont aussi productives que certains pôles<br />
Dominique Sarda (Direction régionale <strong>de</strong> l’environnement<br />
Languedoc-Roussillon) : J’ai écouté avec attention les<br />
chiffres présentés sur les pôles <strong>de</strong> compétence <strong>et</strong> je les ai<br />
appliqués aux départements <strong>de</strong> ma Région. Je voudrais lever<br />
une confusion, ce me semble, entre postes créés <strong>et</strong> postes<br />
qui fonctionnent. En eff<strong>et</strong>, j’ai noté qu’il y avait <strong>de</strong>s pôles<br />
effectivement créés qui ne fonctionnent absolument pas <strong>et</strong><br />
d’autres, soi disant non créés, qui produisent <strong>de</strong>s choses.<br />
Est-ce que, pour vous, pôle créé signifie qu’une l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong><br />
mission a été signée par le préf<strong>et</strong> ?<br />
Marc Esmenjaud : Un pôle légalement créé, effectivement,<br />
est un pôle qui dispose d’une l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> mission du préf<strong>et</strong>,<br />
avec un nombre <strong>de</strong> missions à réaliser <strong>et</strong> <strong>de</strong>s services<br />
affectés pour remplir ces missions.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 105
Dominique Sarda : Pour moi, c<strong>et</strong>te analyse ne correspond<br />
pas à la réalité. Une p<strong>et</strong>ite suggestion : pourquoi ne pas<br />
baser l’analyse sur le fonctionnement, moyennant <strong>de</strong>s<br />
critères appropriés, <strong>et</strong> non considérer le seul critère <strong>de</strong> la<br />
création ?<br />
Marc Esmenjaud : Vous soulevez là l’un <strong>de</strong>s objectifs <strong>de</strong> la<br />
circulaire adressée par la Santé <strong>et</strong> l’Écologie aux préf<strong>et</strong>s.<br />
Elle est accompagnée d’un questionnaire, à soum<strong>et</strong>tre aux<br />
services extérieurs, sur le fonctionnement <strong>de</strong>s pôles, qui<br />
<strong>de</strong>vrait perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> dresser un bilan plus proche <strong>de</strong> la<br />
réalité. A-t-on affaire à quelque chose qui marche ou à une<br />
coquille vi<strong>de</strong> ? Les données exploitées par Jacky Levecq ont<br />
aussi leur intérêt : dans la mesure où elles sont issues <strong>de</strong> la<br />
base <strong>de</strong> données, elles correspon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s réalités<br />
recueillies sur le terrain.<br />
Dominique Sarda : C’est d’accord, mais je voulais souligner<br />
la nécessité <strong>de</strong> distinguer création <strong>et</strong> fonctionnement. Par<br />
ailleurs, il est bien attendu <strong>de</strong>s DIREN une collaboration, une<br />
co-animation ?<br />
Jacky Levecq : Au niveau <strong>de</strong>s DIREN, ce qui est attendu, ce<br />
n’est pas une co-animation, mais une participation plus<br />
conséquente, notamment, l’élaboration <strong>de</strong> bilans <strong>de</strong>s<br />
actions <strong>de</strong> lutte contre le bruit. Figurent par exemple dans<br />
la circulaire l’incitation à produire <strong>de</strong>s bilans sur les actions<br />
judiciaires menées, à l’échelon <strong>de</strong> la Région, <strong>et</strong> les suites<br />
apportées. Il revient donc aux DIREN la charge <strong>de</strong> centraliser<br />
<strong>de</strong>s informations collectées auprès <strong>de</strong>s départements <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
faire remonter ces informations aux administrations<br />
centrales, les ministères <strong>de</strong> la Santé <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’Écologie, via les<br />
<strong>de</strong>ux coordonnateurs <strong>de</strong> pôles.<br />
Clés <strong>de</strong> la performance d’un pôle ?<br />
Marc Esmenjaud : Pour compléter c<strong>et</strong>te question <strong>de</strong>s<br />
investissements <strong>de</strong>s pôles, l’examen détaillé <strong>de</strong>s chiffres<br />
globaux présentés à l’instant révèle que, sur 43 pôles, une<br />
quinzaine seulement répon<strong>de</strong>nt réellement aux objectifs qui<br />
leurs ont été fixés. Sur ces 15 pôles là, il y a une corrélation<br />
directe entre les équivalents temps plein directement<br />
consacrés à l’animation <strong>de</strong>s pôles <strong>et</strong> les résultats obtenus<br />
par ces pôles. Ce qui n’empêche pas que je sois tout à fait<br />
d’accord que certaines DDASS sont aussi productives que<br />
certains pôles. Beaucoup <strong>de</strong> DDASS travaillent dans le<br />
domaine <strong>de</strong> la sensibilisation, sont capables <strong>de</strong> faire un<br />
excellent travail sans avoir une étiqu<strong>et</strong>te <strong>de</strong> pôle. Mais,<br />
quand on examine ces DDASS là, sur les 32 équivalents temps<br />
plein consacrés au bruit, il y a une corrélation directe entre<br />
l’équivalent temps plein qui est <strong>de</strong>stiné par l’agent à sa<br />
fonction <strong>et</strong> les résultats qu’il obtient. Dans c<strong>et</strong>te assemblée,<br />
sont présents plusieurs animateurs <strong>de</strong> pôles. Les équivalents<br />
temps plein qu’ils consacrent sont largement au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la<br />
moyenne nationale.<br />
De la salle : Une réflexion issue du terrain. Pour animer un<br />
pôle <strong>de</strong> compétences, il faut quelque chose qui fasse<br />
avancer, disons, qui donne <strong>de</strong> l’énergie <strong>et</strong> du temps : c’est<br />
la motivation. Après quelques années d’animation,<br />
l’observation que nous en faisons est la suivante : si la<br />
motivation <strong>de</strong> l’animateur s’arrête, tout s’arrête. Dans le<br />
domaine du bruit, comme dans d’autres domaines, vous<br />
trouverez <strong>de</strong>s gens passionnés <strong>et</strong>, c’est vrai, l’organisation<br />
transversale a ceci <strong>de</strong> considérable qu’elle conduit à<br />
prendre <strong>de</strong>s décisions ou <strong>de</strong>s avis <strong>de</strong> manière collégiale. Il y<br />
a une légitimité à proposer à <strong>de</strong>s préf<strong>et</strong>s ou à <strong>de</strong>s déci<strong>de</strong>urs<br />
<strong>de</strong>s décisions collégiales, marquées du sceau <strong>de</strong> la tolérance<br />
<strong>et</strong> du consensus. Mais si, pour une raison ou une autre,<br />
l’animateur marque le pas, la machine s’arrête.<br />
Benoît Joseph (animateur du pôle <strong>de</strong> compétence bruit du<br />
département <strong>de</strong>s Ar<strong>de</strong>nnes) : Pour entr<strong>et</strong>enir la motivation<br />
<strong>et</strong> favoriser la coordination, il était question d’organiser une<br />
journée nationale <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong> compétence bruit, le 1 er<br />
février 2005. C<strong>et</strong>te journée est-elle maintenue ?<br />
Réponse <strong>de</strong> la salle : C<strong>et</strong>te journée est maintenue,<br />
l’information est passée à plusieurs reprises sur le réseau<br />
d’échange interne au ministère, le programme a été envoyé<br />
par messagerie à toutes les DDASS <strong>et</strong> les DRASS.<br />
Réponse <strong>de</strong> la salle: Pour les DIREN, c’est en cours. Les<br />
DIREN sont invitées bien sûr. Cela se tiendra le 1 er février à<br />
la Direction générale <strong>de</strong> la santé.<br />
Solange Walter (DRASS d’Alsace) : Notre situation est un peu<br />
atypique. À la DRASS d’Alsace, nous avons quelque peu<br />
mutualisé nos moyens avec la DDASS du Bas-Rhin, si bien que<br />
c’est moi qui anime le pôle <strong>de</strong> compétences pour le<br />
département du Bas-Rhin. J’aurais plusieurs remarques à<br />
faire. D’une part, quand Jacky Levecq parle <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
équivalents temps plein <strong>de</strong> moins par rapport à 2001, je<br />
pense que cela n’est pas très significatif, dans la mesure où<br />
l’évaluation du temps consacré est assez imprécise. Entre<br />
0,1 <strong>et</strong> 0,2 équivalent temps plein, la distinction est ténue.<br />
Deuxième remarque, je crois qu’il ne faut pas trop attendre<br />
<strong>de</strong> la réforme <strong>de</strong> l’État. C’est le préf<strong>et</strong> qui va déci<strong>de</strong>r <strong>de</strong><br />
l’organisation <strong>de</strong>s services <strong>et</strong> plusieurs scénarios sont<br />
envisagés pour chaque direction départementale. Des<br />
regroupements auront lieux dans les départements, où<br />
chaque service n’aura plus la masse critique pour exister.<br />
C’est là le but premier <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te réforme. La DDASS du Bas-<br />
Rhin reste une DDASS importante, elle <strong>de</strong>vrait rester telle<br />
qu’elle est. Dans d’autres départements, une fois que les<br />
personnels chargés du RMI ou <strong>de</strong>s personnes âgées seront<br />
partis, cela accentuera davantage encore la pénurie <strong>de</strong><br />
fonctionnaires. La loi organique relative aux lois <strong>de</strong> finances<br />
(LOLF) va figer le nombre <strong>de</strong> postes, puisque ceux qui ne<br />
sont pas pourvus, fongibilité asymétrique oblige, seront<br />
perdus. C’est plutôt dans ce cadre là que les services, plutôt<br />
en état <strong>de</strong> pénurie, vont être regroupés dans les p<strong>et</strong>its<br />
départements. À mon sens, cela ne <strong>de</strong>vrait pas avoir <strong>de</strong><br />
r<strong>et</strong>ombées en termes « d’interministérialité ». Concernant la<br />
motivation <strong>de</strong>s pôles, dans le Haut-Rhin, un pôle ne tournait<br />
pas bien, faute <strong>de</strong> motivation. C’est l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pôles qui<br />
ont été supprimés entre 2001 <strong>et</strong> 2005, qui ont existé<br />
plusieurs années sur le papier, sans tourner. Je m’occupe du<br />
Bas-Rhin, je pourrais aussi m’occuper du Haut-Rhin, dans le<br />
cadre <strong>de</strong> la mutualisation. Mais, en tant qu’animateur <strong>de</strong><br />
pôles, je ne sens pas une forte motivation <strong>de</strong> mes<br />
partenaires <strong>de</strong>s autres ministères. Qui plus est, nous avons<br />
juxtaposé nos compétences, mais nous avons <strong>de</strong>s difficultés<br />
à traiter les dossiers en commun. Bien sûr, nous avons,<br />
comme tout le mon<strong>de</strong>, établi un « Qui fait quoi ? ». C’est<br />
motivant, mais après, c’est difficile.<br />
Jacky Levecq : Effectivement, sur le plan opérationnel,<br />
c’est difficile. Nous ne sommes pas forcément censés<br />
susciter une motivation plus gran<strong>de</strong> chez les partenaires,<br />
mais, au moins, harmoniser les décisions. Mon département<br />
est traversé par quelques infrastructures <strong>de</strong> transport très<br />
lour<strong>de</strong>s. Sur ces gros dossiers, la synergie fonctionne<br />
relativement bien, nous y jouons un rôle très important, car<br />
nous sommes les seuls garants <strong>de</strong>s enjeux <strong>de</strong> la santé<br />
publique. Nous amenons <strong>de</strong>s réflexions, par exemple, sur les<br />
critères <strong>de</strong> multi-exposition <strong>de</strong>s populations, sur la prise en<br />
compte <strong>de</strong>s différents critères <strong>de</strong> bruit, qu’il s’agisse du<br />
bruit <strong>de</strong>s transports ou <strong>de</strong> celui <strong>de</strong>s usines. À ce titre, nous<br />
sommes relativement écoutés <strong>et</strong> entendus. Par exemple,<br />
avec Philippe Michal, ici présent, qui s’occupe <strong>de</strong>s services<br />
techniques <strong>de</strong> la ville d’Aix-les-Bains, nous travaillons<br />
régulièrement sur <strong>de</strong>s dossiers en commun. Notre valeur<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
ajoutée, c’est l’apport du groupe. Certes c<strong>et</strong> apport est<br />
difficilement quantifiable, quand il s’agit <strong>de</strong> l’évaluer sur<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s missions propres à chaque ministère. Il<br />
n’empêche que ces dossiers avancent, <strong>et</strong> dans <strong>de</strong> meilleures<br />
conditions. J’en suis profondément convaincu.<br />
Marc Esmenjaud : Je souhaiterais apporter une autre<br />
précision. On a coutume <strong>de</strong> considérer que le pôle <strong>de</strong><br />
compétences bruit doit s’occuper <strong>de</strong> tous les problèmes <strong>de</strong><br />
bruit. Au départ, il est vrai, la plupart <strong>de</strong>s pôles <strong>de</strong><br />
compétences se sont contentés d’i<strong>de</strong>ntifier les rôles <strong>de</strong>s<br />
différents services en matière <strong>de</strong> bruit. Pourtant, l’un <strong>de</strong>s<br />
objectifs <strong>de</strong> la l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> mission consiste à cerner un certain<br />
nombre d’actions phares ponctuelles, <strong>et</strong> à mobiliser les<br />
ressources sur ces actions. Par exemple, sur mon<br />
département, les maires ont exprimé une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> forte en<br />
matière <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux-roues. Le service <strong>de</strong> la concurrence <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
consommation va pouvoir aller s’intéresser à la situation <strong>de</strong>s<br />
reven<strong>de</strong>urs, en coordination avec la police, la gendarmerie,<br />
les mairies <strong>et</strong> la DDASS, au titre <strong>de</strong> l’animation. C’est un<br />
exemple d’action à faire figurer dans la l<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> mission, en<br />
y associant un planning prévisionnel <strong>de</strong> réalisation.<br />
Le pôle <strong>de</strong> compétences bruit <strong>de</strong> l’Isère s’était fixé comme<br />
objectif <strong>de</strong> s’occuper <strong>de</strong> la problématique <strong>de</strong> la prise en<br />
compte du bruit <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’urbanisme. Nous disposions, avec la<br />
DDE, d’une certaine expérience dans ce domaine. Nous<br />
avons donc mis en place un groupe <strong>de</strong> travail, associé<br />
quelques communes, finalisé une première démarche sur le<br />
permis <strong>de</strong> construire, puis, une <strong>de</strong>uxième sur les PLU, qui<br />
s’est concrétisée par le gui<strong>de</strong> PLU <strong>et</strong> bruit, qui peut être<br />
repris dans les autres départements. Nous avons aussi<br />
travaillé avec la DRIRE, pour les réponses que ses services<br />
avaient à apporter sur les sources <strong>de</strong> bruit. Nous avons donc<br />
mis en place une démarche qui a bénéficié <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
dynamique <strong>de</strong> pôle.<br />
L’une <strong>de</strong>s clés <strong>de</strong> relance éventuelles peut rési<strong>de</strong>r dans<br />
l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> quelques actions phares. Le pôle <strong>de</strong><br />
l’Isère tourne essentiellement autour <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong><br />
bruit <strong>et</strong> d’urbanisme, les autres domaines, il faut l’avouer,<br />
sont un peu en sommeil. Il faut nous, nous aussi, relancer le<br />
pôle. Nous avons interrogé les élus du département pour<br />
connaître leurs attentes en matière d’action <strong>de</strong> l’État sur le<br />
bruit. Première surprise : le taux <strong>de</strong> réponse, après une<br />
seule relance, est <strong>de</strong> 80%. Un tel taux <strong>de</strong> réponse sur un<br />
questionnaire administratif indique qu’il y a une réelle<br />
sensibilité, une <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Nous comptons nous appuyer sur<br />
la légitimité <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> r<strong>et</strong>our pour tenir le discours<br />
suivant : voilà les attentes <strong>de</strong>s maires ; pour répondre à ce<br />
besoin, il est nécessaire <strong>de</strong> faire collaborer un certain<br />
nombre <strong>de</strong> services <strong>de</strong> l’État.<br />
Maîtrise du bruit <strong>de</strong>s éoliennes<br />
René Gamba (Gamba Acoustique & Associés)<br />
Les éoliennes sont au cœur <strong>de</strong> la problématique du<br />
développement durable. Leur but est <strong>de</strong> produire <strong>de</strong><br />
l’énergie qui ne provoque pas <strong>de</strong> pollution mais ce mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
production d’énergie rencontre <strong>de</strong>s oppositions diverses,<br />
liées au paysage <strong>et</strong> au bruit pour l’essentiel. Le bruit,<br />
domaine éminemment subjectif <strong>et</strong> discutable, constitue<br />
donc l’un <strong>de</strong>s principaux points <strong>de</strong> fixation <strong>de</strong> la querelle.<br />
Les autres enjeux, tels que les atteintes aux oiseaux, aux<br />
champignons ou autres espèces rares, sont bien moins<br />
polémiques, car plus facilement objectivables. Cela oblige<br />
les investisseurs à déplacer leurs proj<strong>et</strong>s au gré <strong>de</strong>s traj<strong>et</strong>s<br />
<strong>de</strong> migration.<br />
La part <strong>de</strong>s énergies renouvelables dans le mon<strong>de</strong> s’établit à<br />
seulement 6% <strong>de</strong> la production énergétique mondiale. La<br />
directive européenne <strong>de</strong> 2000 précise que la part <strong>de</strong><br />
l’électricité d’origine renouvelable passe, <strong>de</strong> 1998 à 2010,<br />
<strong>de</strong> 14,2% à 22,1% en Europe, <strong>de</strong> 15,0% à 21,0% en France.<br />
C<strong>et</strong> objectif s’est traduit en France par le programme Éole<br />
2005, qui doit être poursuivi par un autre programme, dont<br />
l’objectif, à l’horizon 2005, est <strong>de</strong> 500 mégawatts (MW)<br />
installés, <strong>et</strong> <strong>de</strong> 6000 MW installés à l’horizon 2010.<br />
Aujourd’hui, début 2005, seulement 350 MW sont installés.<br />
Pourtant, la France dispose <strong>de</strong> l’un <strong>de</strong>s premiers potentiels<br />
éoliens en Europe. L’Allemagne est, <strong>de</strong> loin, le premier<br />
producteur européen, suivi par l’Espagne <strong>et</strong> par le<br />
Danemark. La France, elle, n’en est qu’au début. En ce<br />
domaine, à tous points <strong>de</strong> vue, la France a encore tout à<br />
apprendre <strong>et</strong> tout à discuter.<br />
Le développement d’un proj<strong>et</strong> éolien est infiniment plus<br />
compliqué que ce qu’un regard extérieur pourrait laisser<br />
imaginer. Les étu<strong>de</strong>s préalables sont relativement lour<strong>de</strong>s :<br />
elles doivent tenir compte <strong>de</strong>s traj<strong>et</strong>s migratoires, <strong>de</strong> la<br />
faune, <strong>de</strong> la flore, du paysage, du bruit, <strong>de</strong> la rentabilité<br />
économique du proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong>s possibilités <strong>de</strong> raccor<strong>de</strong>ment<br />
au réseau électrique. Ce <strong>de</strong>rnier point n’est pas anodin : le<br />
réseau est <strong>de</strong>nse là où la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> population est <strong>de</strong>nse,<br />
c’est-à-dire là où il est difficile d’implanter <strong>de</strong>s éoliennes.<br />
Ce qui explique la tendance à implanter <strong>de</strong>s éoliennes dans<br />
<strong>de</strong>s semi déserts.<br />
Concernant l’étu<strong>de</strong> d’impact acoustique, j’ai envie <strong>de</strong> me<br />
risquer à une taquinerie : dans un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> bâtiment,<br />
d’infrastructure ou d’installation industrielle, la difficulté,<br />
pour l’acousticien, consiste à réussir à s’imposer comme un<br />
interlocuteur écouté <strong>et</strong> <strong>de</strong>mandé ; dans le domaine <strong>de</strong><br />
l’éolien, je peux témoigner que l’acousticien est très vite<br />
passé <strong>de</strong> la non-existence à l’incontournable. Les<br />
développeurs, en eff<strong>et</strong>, se sont rendu compte que le bruit y<br />
joue un rôle considérable, que les populations alentours,<br />
quand elles se situent dans l’opposition, s’appuient<br />
fortement sur l’argument sonore <strong>et</strong> l’argument paysager<br />
pour essayer <strong>de</strong> contrer les proj<strong>et</strong>s.<br />
Quand on s’implique dans un proj<strong>et</strong> éolien, on s’aperçoit<br />
très vite qu’une bonne partie <strong>de</strong>s connaissances acquises en<br />
matière d’étu<strong>de</strong>s d’impact sont à j<strong>et</strong>er aux oubli<strong>et</strong>tes.<br />
Pourquoi la problématique est-elle si différente ? La<br />
propagation du bruit à gran<strong>de</strong> distance est éminemment<br />
variable avec les conditions atmosphériques : pour faire<br />
simple, elle peut varier dans une proportion d’une vingtaine<br />
<strong>de</strong> décibels suivant la direction du vent, que l’on soit le jour<br />
ou la nuit ou que le ciel soit couvert ou non. Évi<strong>de</strong>mment,<br />
ce propos reste aussi valable pour le bruit résiduel<br />
provenant <strong>de</strong>s différentes sources avoisinantes — autoroute,<br />
usine — qui, souvent, sont assez éloignées. Autre<br />
particularité du bruit <strong>de</strong>s éoliennes, l’étu<strong>de</strong> d’impact d’une<br />
éolienne n’a pas <strong>de</strong> sens sans vent, puisqu’une éolienne ne<br />
tourne que lorsqu’il y a du vent ! Celui-ci a <strong>de</strong>ux types<br />
d’eff<strong>et</strong>s sur la mesure du bruit résiduel : d’une part, un<br />
« impact métrologique », dû au souffle du vent sur le micro<br />
du sonomètre ; d’autre part, un « impact aérodynamique »<br />
dû au bruit du vent sur les obstacles variés — lignes<br />
électriques, pylônes, végétation —, qui fait varier le bruit<br />
résiduel au gré <strong>de</strong> la vitesse <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’orientation du vent. Par<br />
conséquent, l’émergence, la différence entre le bruit total<br />
<strong>et</strong> le bruit résiduel, connaît <strong>de</strong>s variations encore plus<br />
marquées que pour les autres types <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s. Enfin, autre<br />
aspect singulier <strong>de</strong>s éoliennes, contrairement à la quasi<br />
totalité <strong>de</strong>s autres sources <strong>de</strong> bruit faisant l’obj<strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong>s<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 107
d’impact, il n’y a pas <strong>de</strong> solution <strong>de</strong> rattrapage — capot,<br />
silencieux, mur anti-bruit —, en cas d’erreur.<br />
Par ailleurs, l’examen <strong>de</strong>s courbes reliant la gêne <strong>et</strong><br />
l’émergence indique qu’une installation démarrant avec 3<br />
dB d’émergence se traduira par un indice <strong>de</strong> gêne faible,<br />
tandis qu’une installation qui démarrerait avec 15 dB<br />
d’émergence correspondrait à un indice <strong>de</strong> gêne très élevé,<br />
soit une majorité d’individus gênés. Qui plus est, si l’on<br />
ramenait le niveau sonore à ce qui aurait été tolérable au<br />
départ, chose impossible avec une éolienne, la gêne serait<br />
tout aussi forte. Pourquoi ? Pas parce qu’il s’agit<br />
d’éoliennes, mais parce que c’est le mécanisme <strong>de</strong><br />
l’apprentissage <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’exaspération qui joue ici, qui fait que<br />
l’on n’entend pas du bruit, mais <strong>de</strong> l’information. Quand<br />
l’information sonore nous rappelle quelque chose <strong>de</strong><br />
souhaité, ce n’est pas perçu comme du bruit ; quand cela<br />
nous rappelle une chose qui n’est pas souhaitée, cela<br />
<strong>de</strong>vient du bruit <strong>et</strong> c’est gênant.<br />
Côté réglementation, c’est l’arrêté du 18 avril 1995 qui<br />
s’applique, à savoir le respect <strong>de</strong>s 3 dB(A) d’émergence la<br />
nuit <strong>et</strong> <strong>de</strong> 5 dB(A) le jour. Comme mentionné précé<strong>de</strong>mment<br />
dans c<strong>et</strong> atelier, la principale évolution réglementaire<br />
envisagée consisterait à baisser le seuil d’infraction <strong>de</strong> 30<br />
dB(A) à 27 dB(A). L’évolution normative en cours est censée<br />
aboutir à une norme spécifique du mesurage en présence <strong>de</strong><br />
vent. De fait, la norme NF S 31-010, comme toutes les autres<br />
normes <strong>de</strong> mesurage du bruit dans l’environnement, prévoit<br />
que les mesures s’effectuent sans vent, ce qui est normal,<br />
puisque le vent perturbe les mesures. À noter qu’un Gui<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> d’impact sur l’environnement <strong>de</strong>s parcs éoliens<br />
vient d’être finalisé par le ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong><br />
l’A<strong>de</strong>me. Disponible en ligne, il propose une démarche<br />
générale <strong>et</strong> une méthodologie <strong>de</strong> mise en œuvre <strong>de</strong>s<br />
évaluations environnementales.<br />
Concernant le diagnostic du site, l’approche est à la fois<br />
analogue <strong>et</strong> différente <strong>de</strong>s autres mesures en limite <strong>de</strong><br />
voisinage. Puisque les niveaux <strong>sonores</strong> sont gran<strong>de</strong>ment<br />
tributaires du vent, il convient d’implanter <strong>de</strong>s<br />
anémomètres, afin <strong>de</strong> pouvoir établir <strong>de</strong>s corrélations entre<br />
le niveau <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> la force du vent. Le vent étant variable<br />
à la fois en direction <strong>et</strong> en intensité, il n’est pas possible <strong>de</strong><br />
se contenter <strong>de</strong> mesurer <strong>de</strong>ux L Aeq, 8h , l’un avec le bruit <strong>de</strong><br />
l’éolienne, l’autre sans, <strong>et</strong> <strong>de</strong> comparer ces <strong>de</strong>ux valeurs.<br />
Dans le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> norme évoqué à l’instant, l’indicateur à<br />
prendre en compte est suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> débat. Le choix <strong>de</strong>vrait se<br />
porter sur une échelle <strong>de</strong> temps <strong>de</strong> 10 minutes, en<br />
considérant soit le L Aeq,10 mn , recalculé à partir du L 50, 10 mn .<br />
Le L Aeq,10 mn « brut » <strong>et</strong> celui recalculé à partir du L 50, 10 mn<br />
sont d’ailleurs souvent assez proches. Pour une vitesse <strong>de</strong><br />
vent donnée, le niveau sonore équivalent moyenné sur une<br />
pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> 10 minutes peut varier <strong>de</strong> 15 dB. D’où l’idée <strong>de</strong><br />
considérer la droite <strong>de</strong> régression, afin <strong>de</strong> ne pas considérer<br />
une valeur ni trop sous-estimée, ni trop surestimée.<br />
Il reste néanmoins quelques pièges à éviter. Notamment, il<br />
faut tenir compte du bruit résiduel régénéré par le vent,<br />
comme le bruit dans les arbres. Si l’on ne tenait pas compte<br />
<strong>de</strong> ce phénomène, peu <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s pourraient passer.<br />
Rappelons que le bruit résiduel varie avec les conditions<br />
météorologiques <strong>et</strong> la direction du vent. Enfin, chose qui<br />
n’est pas évi<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> prime abord, plusieurs mesures<br />
réalisées, sur le même site, pour <strong>de</strong>s régimes <strong>de</strong> vent<br />
différents (vitesse ou direction), montrent <strong>de</strong>s régressions<br />
qui peuvent correspondre à un écart <strong>de</strong> niveau sonore <strong>de</strong><br />
l’ordre <strong>de</strong> 10 dB. Il faut aussi gar<strong>de</strong>r à l’esprit que le vent<br />
peut souffler fort sur le site d’implantation <strong>de</strong> l’éolienne <strong>et</strong><br />
être nul au point <strong>de</strong> mesure. Une raison à cela : dans les<br />
choix d’implantation, pour les sites éoliens, on recherche le<br />
vent maximum, quand, pour les habitations, on recherche<br />
généralement les sites abrités. Joue également le fait qu’on<br />
mesure, par convention, la force du vent à 10 mètres <strong>de</strong><br />
haut, alors que les mesures du bruit résiduel dans le<br />
voisinage sont plutôt effectuées, classiquement, à 1,5 m du<br />
sol. Or, l’écoulement sur le sol du vent qui souffle n’a rien<br />
d’homogène : la formation d’une couche limite provenant <strong>de</strong><br />
la viscosité <strong>de</strong> l’air fait que les molécules d’air qui sont<br />
contre le sol ne bougent pratiquement pas ; les molécules<br />
situées juste au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te couche s’en trouvent<br />
ralenties ; celles qui se trouvent encore au-<strong>de</strong>ssus sont<br />
également ralenties, mais légèrement moins, puisque les<br />
molécules sous-jacentes sont en mouvement. On parcoure<br />
ainsi, verticalement, une zone <strong>de</strong> couches où le vent évolue<br />
assez rapi<strong>de</strong>ment. Dès lors, à proximité du sol, il y a<br />
forcément moins <strong>de</strong> vent qu’à 10, 20 ou 30 mètres <strong>de</strong> haut.<br />
Ainsi, dans bien <strong>de</strong>s cas, le seul fait <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s mesures à<br />
plus faible altitu<strong>de</strong> que celle <strong>de</strong>s éoliennes perm<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
satisfaire l’exigence d’une vitesse <strong>de</strong> vent sur le microphone<br />
suffisamment faible.<br />
Quelques remarques sur les distances, qui ont leur<br />
importance. Les sites d’implantation font généralement<br />
plusieurs kilomètres <strong>de</strong> long — 10 éoliennes éloignées d’au<br />
moins 200 m les unes <strong>de</strong>s autres s’éten<strong>de</strong>nt sur 2 km au<br />
minimum — ; quant au voisinage, on s’intéresse couramment<br />
à une zone comprise entre 500 <strong>et</strong> 1500 mètres du site<br />
éolien. Cela fait donc un carré <strong>de</strong> 3 km <strong>de</strong> côté à analyser.<br />
Prenons un exemple <strong>de</strong> configuration tout à fait plausible :<br />
au niveau <strong>de</strong> l’éolienne, une vitesse du vent <strong>de</strong> 6 mètres par<br />
secon<strong>de</strong>, sur le site <strong>de</strong> mesure, un vent <strong>de</strong> 0,5 mètre par<br />
secon<strong>de</strong>. Dans <strong>de</strong> telles circonstances, le niveau <strong>de</strong> bruit<br />
dans les arbres est très faible mais l’éolienne, elle, tourne,<br />
si bien qu’il peut très bien y avoir une émergence. En<br />
revanche, en cas <strong>de</strong> vent assez fort, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 mètres<br />
par secon<strong>de</strong>, qui ne faiblit pas, le vent peut très bien<br />
souffler avec une vitesse <strong>de</strong> 6 m/s sur le micro du<br />
sonomètre, à côté <strong>de</strong>s habitations. Dans c<strong>et</strong>te situation, il y<br />
aura toujours le bruit du vent dans les feuilles — je parle <strong>de</strong>s<br />
feuilles parce que, traditionnellement, c’est le cas le plus<br />
fréquent mais cela peut être autre chose. Pour résumer,<br />
suivant la direction du vent, suivant sa force, les conditions<br />
peuvent connaître <strong>de</strong>s variations assez difficiles à prévoir.<br />
Je ne vous ferai pas l’insulte <strong>de</strong> vous rappeler la courbure<br />
<strong>de</strong>s rayons liée aux gradients <strong>de</strong> célérité <strong>et</strong> <strong>de</strong> propagation,<br />
gradient lui-même lié aux gradients <strong>de</strong> vitesse <strong>de</strong> vent <strong>et</strong><br />
aux gradients <strong>de</strong> températures quand on s’éloigne du sol.<br />
Dans la mesure où l’on s’intéresse à <strong>de</strong>s distances tout à fait<br />
conséquentes, ne pas prendre en compte ces phénomènes,<br />
c’est passer à côté <strong>de</strong> la réalité <strong>de</strong>s choses.<br />
Pour s’en convaincre, il suffit <strong>de</strong> considérer quelques cas<br />
simples. En cas <strong>de</strong> très forte atténuation — une belle<br />
journée ensoleillée avec un vent contraire qui souffle <strong>de</strong><br />
l’habitation vers l’éolienne —, le rayon sonore monte vers le<br />
ciel, <strong>et</strong> l’atténuation atteint 10, 15 ou 20 dB comme par un<br />
eff<strong>et</strong> d’écran. Considérons maintenant une ligne d’éoliennes<br />
d’une vingtaine d’unités, étendue sur une ligne <strong>de</strong> crête <strong>de</strong><br />
4 ou 5 km <strong>de</strong> long, qui arrose une vallée, <strong>de</strong> dimensions à<br />
peu près équivalentes. En cas <strong>de</strong> conditions météo<br />
favorables à la propagation, le vent « porte le bruit », grâce<br />
à la courbure <strong>de</strong>s rayons qui fait « franchir » la crête, ce qui<br />
se traduit par davantage <strong>de</strong> bruit rayonné que dans <strong>de</strong>s<br />
conditions <strong>de</strong> vent homogènes.<br />
Tous ces phénomènes sont autant <strong>de</strong> contraintes qui<br />
s’ajoutent lorsqu’il s’agit <strong>de</strong> réaliser les mesures : il ne faut<br />
pas qu’il y ait trop <strong>de</strong> vent, mais il faut qu’il y en ait<br />
suffisamment dans la direction souhaitée, il ne faut pas qu’il<br />
pleuve trop fort... tant <strong>et</strong> si bien que se pose la question <strong>de</strong><br />
la représentativité <strong>de</strong>s mesures réalisées dans <strong>de</strong>s situations<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
qu’on n’a pas forcément choisies, <strong>et</strong> se pose la question <strong>de</strong><br />
la modélisation. Sur c<strong>et</strong> aspect <strong>de</strong> la modélisation, <strong>de</strong>s<br />
algorithmes <strong>de</strong> calcul perm<strong>et</strong>tent aujourd’hui <strong>de</strong> prendre en<br />
compte tous ces paramètres évoqués à l’instant. En règle<br />
générale, on aboutit à <strong>de</strong>s émergences <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 7 à 10<br />
dB, ce qui signe l’abandon du proj<strong>et</strong>. Au prix d’heures <strong>de</strong><br />
discussion passées à expliquer la situation.<br />
Bien évi<strong>de</strong>mment, on peut envisager d’installer <strong>de</strong>s<br />
machines moins bruyantes. Sur ce point, je voudrais attirer<br />
votre attention sur un aspect très simple mais auquel on ne<br />
pense pas forcément. Considérons l’exemple <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
machines <strong>de</strong> puissance acoustique différant seulement <strong>de</strong> 2<br />
dB(A), l’une faisant 105 dB(A), l’autre 103 dB(A).<br />
Curieusement, il se trouve que ces <strong>de</strong>ux machines sont<br />
différentes, elles n’ont pas le même spectre. De ce fait,<br />
dans bien <strong>de</strong>s cas, il y a une inversion <strong>de</strong> hiérarchie entre la<br />
puissance acoustique <strong>et</strong> le niveau reçu : dans un tel cas, la<br />
machine la moins bruyante au point <strong>de</strong> réception est celle<br />
<strong>de</strong> plus gran<strong>de</strong> puissance acoustique. Ce n’est bien sûr pas<br />
systématique, cela dépend <strong>de</strong>s spectres <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’atténuation<br />
due à la distance <strong>et</strong> au terrain.<br />
Autrement dit, l’optimisation d’un proj<strong>et</strong> d’éolien<br />
représente à chaque fois une charge <strong>de</strong> travail très<br />
conséquente. Tout doit être re-modélisé. Il n’est pas<br />
possible <strong>de</strong> se contenter <strong>de</strong> choisir la machine la moins<br />
bruyante. Il faut prendre la machine qui rayonne le moins <strong>de</strong><br />
bruit au point <strong>de</strong> réception, dans les conditions <strong>de</strong><br />
propagation les plus critiques. Malgré cela, en règle<br />
générale, suivant qu’il s’agit du vent dominant <strong>de</strong> secteur 1,<br />
ou le vent dominant <strong>de</strong> secteur 2, suivant qu’on s’intéresse<br />
à la maison X ou à la maison Y, les émergences se situent<br />
dans une fourch<strong>et</strong>te <strong>de</strong> 1 à 5 dB. De nuit, ces 5 dB ne<br />
passeront pas, d’autant qu’il faut compter avec les<br />
incertitu<strong>de</strong>s sur l’évaluation du résiduel <strong>et</strong> l’incertitu<strong>de</strong> sur<br />
les calculs. En principe, l’optimisation d’un proj<strong>et</strong><br />
d’éoliennes se sol<strong>de</strong> par une recommandation consistant à<br />
condamner le fonctionnement <strong>de</strong>s machines pour une<br />
direction <strong>et</strong> une plage <strong>de</strong> vitesse <strong>de</strong> vent données, <strong>et</strong> pour<br />
une plage horaire donnée. En règle générale, cela concerne<br />
les <strong>de</strong>ux ou trois machines les plus proches du riverain<br />
exposé.<br />
Les plages <strong>de</strong> vent les plus critiques pour l’émergence du<br />
bruit <strong>de</strong>s éoliennes, se situent dans l’intervalle [4 m/s-<br />
6 m/s] au niveau <strong>de</strong> la machine elle-même (soit plutôt 3 à 5<br />
m/s à 10 mètres <strong>de</strong> haut). En <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> 3 à 4 m/s, en<br />
principe, une éolienne ne tourne pas. Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> 6 m/s, en<br />
règle générale, le bruit résiduel « re-généré » par le vent<br />
dans la végétation commence à prendre le pas <strong>de</strong> manière<br />
significative sur le bruit <strong>de</strong> l’éolienne. Entre 3 <strong>et</strong> 5 m/s à 10<br />
mètres <strong>de</strong> haut, se pose l’essentiel <strong>de</strong>s problèmes : les<br />
machines tournent, produisent presque le même bruit que si<br />
le vent était plus fort ; en revanche, le phénomène <strong>de</strong> « regénération<br />
» du bruit <strong>de</strong> la végétation à proximité <strong>de</strong>s<br />
habitations n’est pas encore suffisant.<br />
Dans <strong>de</strong> tels cas, quand on a choisi le meilleur modèle <strong>de</strong><br />
machine, quand on a légèrement déplacé les machines pour<br />
optimiser leur impact sur l’environnement — la marge <strong>de</strong><br />
manœuvre est très faible car le bruit n’est pas le seul<br />
paramètre en cause —, il reste la possibilité d’arrêter les<br />
machines lorsque le vent n’est pas suffisamment fort. (Un<br />
propos qui ne serait, bien entendu pas recevable pour un<br />
site où le vent n’est jamais fort.) Condamner le<br />
fonctionnement d’un parc <strong>de</strong> machines pour les<br />
configurations <strong>de</strong> vent, où, <strong>de</strong> toute façon, il ne produit pas<br />
beaucoup, ne ruine pas forcément la validité économique du<br />
proj<strong>et</strong>. Cela perm<strong>et</strong> même <strong>de</strong> le rendre acceptable aussi<br />
bien administrativement, qu’humainement.<br />
Débat<br />
Les avantages d’une gestion du parc par <strong>de</strong>s<br />
arrêts d’activité à certaines pério<strong>de</strong>s<br />
Philippe Ritter : Une question d’ignorant total sur le bruit<br />
<strong>de</strong>s éoliennes : arrêter une éolienne, ça consiste à<br />
positionner les pales <strong>de</strong> telle façon qu’elles ne contrarient<br />
pas le vent ? Également, dans une éolienne mo<strong>de</strong>rne, qu’estce<br />
qui fait du bruit, la machinerie ou le bruit aérodynamique<br />
du vent dans les pales ?<br />
René Gamba : Traditionnellement, on distingue trois<br />
ensembles <strong>de</strong> sources <strong>de</strong> bruit, perceptibles à l’oreille quand<br />
on se situe à côté d’une machine. Le bruit <strong>de</strong> sifflement en<br />
bout <strong>de</strong> pales — c’est en bout <strong>de</strong> pales que la vitesse <strong>de</strong><br />
rotation est la plus gran<strong>de</strong> — est le bruit aérodynamique que<br />
l’on perçoit parfaitement, y compris à gran<strong>de</strong> distance. Le<br />
bruit <strong>de</strong> cisaillement, occasionné par la traînée <strong>de</strong> la pale au<br />
passage <strong>de</strong>vant le pylône, a également une signature assez<br />
caractéristique — un flop, flop, flop à la ca<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> passage<br />
<strong>de</strong>s pales. Enfin, le bruit mécanique <strong>de</strong> la nacelle provient<br />
<strong>de</strong>s engrenages <strong>de</strong> la machine tournante. Avec les éoliennes<br />
<strong>de</strong> première génération, quelque peu rustiques, c’était le<br />
bruit <strong>de</strong> nacelle qui dominait. Les efforts <strong>de</strong>s constructeurs<br />
aidant, c<strong>et</strong>te composante <strong>de</strong> bruit a été n<strong>et</strong>tement réduite.<br />
En revanche, le bruit aérodynamique a, dès l’origine, été<br />
relativement bien réduit, dans la mesure où une pâle, pour<br />
bien prendre le vent, doit être bien profilée pour minimiser<br />
les turbulences <strong>et</strong> les décrochements. À l’heure actuelle, on<br />
entre dans la zone où l’on atteint les limites <strong>de</strong>s progrès<br />
techniques au sens <strong>de</strong> l’insonorisation classique <strong>de</strong> la<br />
machine. C’est la raison pour laquelle j’ai d’emblée orienté<br />
le débat sur la gestion du parc par <strong>de</strong>s arrêts éventuels à<br />
certaines pério<strong>de</strong>s.<br />
Afin <strong>de</strong> mieux se faire une idée <strong>de</strong> la distribution <strong>de</strong>s<br />
vitesses <strong>et</strong> <strong>de</strong>s directions du vent, on peut construire une<br />
rose <strong>de</strong>s vents à partir <strong>de</strong>s observations météorologiques<br />
faites dans une région donnée. Je ne vous en ai pas<br />
présenté, mais il faut savoir que certaines contrées, y<br />
compris en France, ont une rose <strong>de</strong>s vents très ron<strong>de</strong>, quand<br />
d’autres ont <strong>de</strong>s roses <strong>de</strong>s vents très marquées, comportant<br />
<strong>de</strong>ux lobes correspondant à <strong>de</strong>ux vents dominants. La<br />
réglementation doit être respectée partout, chaque jour <strong>de</strong><br />
l’année. Mais il est évi<strong>de</strong>nt qu’en cas <strong>de</strong> probabilité <strong>de</strong> 1%<br />
d’une direction <strong>de</strong> vent pénalisante à une vitesse donnée,<br />
vous ne discutez pas <strong>de</strong> la vie ou <strong>de</strong> la mort du proj<strong>et</strong>, vous<br />
discutez d’un aménagement qui perm<strong>et</strong>te <strong>de</strong> rendre les<br />
choses plus harmonieuses, moins risquées <strong>et</strong> moins<br />
conflictuelles. Autrement dit, le développeur ne court pas le<br />
risque <strong>de</strong> faire subir une gêne au voisinage pour économiser<br />
<strong>de</strong>s bouts <strong>de</strong> chan<strong>de</strong>lle en n’arrêtant pas la machine ces<br />
jours-là.<br />
Qui plus est, il faut compter avec « l’apprentissage » que<br />
j’ai évoqué quelques instants plus tôt. Si vous démarrez un<br />
proj<strong>et</strong> performant sur le plan <strong>de</strong> l’acoustique, vous<br />
n’éviterez pas les opposants, mais ils finiront par s’habituer,<br />
par se lasser. Ce propos n’est pas malhonnête. Autour d’une<br />
usine en activité <strong>de</strong>puis 150 ans, malgré <strong>de</strong>s émergences<br />
classiquement comprises entre 8 <strong>et</strong> 15 dB, les plaintes sont<br />
inexistantes, car les bruits <strong>de</strong> l’usine font partie du paysage<br />
sonore. C’est aussi le cas <strong>de</strong>s établissements diffusant <strong>de</strong> la<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 109
musique amplifiée, c’est aussi le cas <strong>de</strong>s éoliennes. Quand<br />
vous introduisez un proj<strong>et</strong> dans une zone d’habitat existant,<br />
grosso modo, la moitié, les trois quarts, les neuf dixièmes <strong>de</strong><br />
la population, suivant la sociologie <strong>de</strong> l’habitat, sont en<br />
faveur du proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> font bien peu <strong>de</strong> cas <strong>de</strong> l’émergence ;<br />
concernant la partie <strong>de</strong> la population qui s’oppose au proj<strong>et</strong>,<br />
dès lors qu’elle pourra soupçonner que le proj<strong>et</strong> existe — si<br />
elle le voit ou si elle l’entend, même à la limite <strong>de</strong><br />
l’audibilité —, elle aura un comportement hostile <strong>et</strong> agressif<br />
vis-à-vis du proj<strong>et</strong>. Le problème <strong>de</strong>s éoliennes, c’est qu’elles<br />
sont implantées à la campagne. Or, à la campagne, une<br />
partie <strong>de</strong> la population y est venue pour y trouver le calme.<br />
Contrairement aux autochtones, qui vivent avec un minimum<br />
<strong>de</strong> bruit, les néo-ruraux ne supportent pas qu’on leur<br />
« barbouille leur carte postale », ce qui est compréhensible.<br />
Ils y poursuivent un mythe irréalisable, mais, compte tenu<br />
notamment <strong>de</strong>s traj<strong>et</strong>s importants qu’ils doivent effectuer<br />
pour s’y rendre, que ce soit en rési<strong>de</strong>nce secondaire ou<br />
principale, leur aspiration à profiter du calme <strong>et</strong> du paysage<br />
du lieu qu’ils ont choisi est légitime. C<strong>et</strong>te situation ne vaut<br />
pas que pour les éoliennes, mais, avec les éoliennes, elle<br />
touche à la caricature. Il ne s’agit donc pas <strong>de</strong> malhonnêt<strong>et</strong>é<br />
intellectuelle, mais <strong>de</strong> stratégie avisée, que <strong>de</strong> favoriser,<br />
par le biais <strong>de</strong> l’apprentissage progressif, l’intégration <strong>de</strong><br />
l’équipement dans son paysage <strong>et</strong> son environnement<br />
sonore, tout en restant, bien sûr, parfaitement<br />
réglementaire, cela va <strong>de</strong> soi.<br />
Que peut-on attendre <strong>de</strong>s parcs éoliens offshore<br />
?<br />
Philippe Ritter : Le nombre <strong>de</strong> déserts en France étant<br />
réduit, le plateau continental étant ce qu’il est, ne pourraiton<br />
pas construire <strong>de</strong>s champs d’éoliennes au large <strong>de</strong>s côtes,<br />
<strong>et</strong> d’ailleurs en exploiter le potentiel touristique en<br />
proposant <strong>de</strong>s excursions en mer pour les visiter ?<br />
René Gamba : C’est une question qui a été abordée, entre<br />
autres, dans les pays nordiques. Les étu<strong>de</strong>s qui ont été<br />
menées sont tout à fait éloquentes <strong>et</strong> je profite <strong>de</strong><br />
l’occasion qui m’est donnée ici pour faire une mise en gar<strong>de</strong><br />
contre ce semi-fantasme : les proj<strong>et</strong>s offshore sont une voie<br />
parmi d’autres, mais qui nécessite au moins autant <strong>de</strong><br />
précautions, d’optimisation <strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong>s que les proj<strong>et</strong>s<br />
terrestres. Trois raisons à cela. Tout d’abord, les proj<strong>et</strong>s<br />
offshore, en principe, sont implantés à <strong>de</strong>s distances<br />
comprises entre 2 km <strong>et</strong> quelques centaines <strong>de</strong> mètres du<br />
rivage, en limite du plateau continental, afin <strong>de</strong> ne pas avoir<br />
à <strong>de</strong>scendre trop profond mais suffisamment loin du rivage,<br />
sinon cela ne servirait à rien <strong>de</strong> prendre la peine <strong>de</strong> les<br />
implanter en mer. Ensuite, en règle générale, ce genre <strong>de</strong><br />
proj<strong>et</strong>s ne se limite pas à cinq ou dix machines, mais en<br />
concentre plutôt une centaine ; forcément, le niveau sonore<br />
est en proportion. Enfin, compte tenu <strong>de</strong>s gradients <strong>de</strong><br />
température rencontrés en mer, l’immense majorité du<br />
temps, pour une source qui est installée au large, les on<strong>de</strong>s<br />
<strong>sonores</strong> sont renvoyées vers la mer, qui est quasi<br />
parfaitement réfléchissante. La propagation du bruit n’y est<br />
donc pas sphérique mais cylindrique. Par conséquent, la<br />
décroissance <strong>de</strong> l’énergie sonore n’y est pas <strong>de</strong> 6 décibels<br />
par doublement <strong>de</strong> distance, comme c’est le cas pour toute<br />
source ponctuelle, mais <strong>de</strong> seulement 3 décibels par<br />
doublement <strong>de</strong> distance. Entre ces <strong>de</strong>ux régimes<br />
d’atténuation, l’écart <strong>de</strong> niveau sonore à terre peut être <strong>de</strong><br />
l’ordre <strong>de</strong> 20 décibels. Indépendamment <strong>de</strong>s problèmes<br />
techniques que suscitent les implantations offshore, la<br />
solution miracle qui consisterait à ne plus implanter les<br />
parcs éoliens qu’en mer, n’est pas une solution miracle.<br />
Sur les proj<strong>et</strong>s d’implantation <strong>de</strong> parcs éoliens, l’acousticien<br />
dispose d’un marge <strong>de</strong> manœuvre assez restreinte pour<br />
trouver un compromis : d’un côté, il doit protéger le<br />
voisinage, pour respecter la réglementation <strong>et</strong> se prémunir<br />
ainsi du risque <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir assumer le coût exorbitant d’un<br />
éventuel arrêt <strong>de</strong> l’exploitation prononcé par un juge ; <strong>de</strong><br />
l’autre côté, il doit composer avec la logique du<br />
développeur, qui risque <strong>de</strong> ne pas vous passer comman<strong>de</strong> si<br />
vous envisagez <strong>de</strong> considérer les pires conditions <strong>de</strong><br />
propagation dans la future étu<strong>de</strong> d’impact. D’où l’intérêt <strong>de</strong><br />
prendre le temps pour analyser les conditions d’occurrence<br />
<strong>de</strong>s situations où l’émergence dépasse, <strong>de</strong> manière<br />
prévisible, le seuil réglementaire. Dans ces configurations <strong>de</strong><br />
vent, qui, le plus souvent, ne représentent qu’un faible<br />
pourcentage du temps, il est tout à fait envisageable <strong>de</strong> ne<br />
pas faire tourner les machines, car le manque à gagner est<br />
relativement faible.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Atelier<br />
Cartographie <strong>et</strong> surveillance du bruit urbain<br />
Atelier animé par Daniel Pillant (<strong>Centre</strong> d'étu<strong>de</strong> sur les réseaux, les transports, l'urbanisme<br />
<strong>et</strong> les constructions publiques)<br />
Introduction<br />
Daniel Pillant (Certu)<br />
C<strong>et</strong> atelier va s’articuler en <strong>de</strong>ux temps. Tout d’abord, une<br />
présentation <strong>de</strong>s outils <strong>et</strong> <strong>de</strong> la méthodologie propres à la<br />
cartographie. Dans un <strong>de</strong>uxième temps, nous abor<strong>de</strong>rons le<br />
vol<strong>et</strong> communication, concertation <strong>et</strong> surveillance.<br />
La directive européenne ayant été largement abordée<br />
durant ces assises, <strong>de</strong> même que la cartographie, je<br />
m’abstiendrai d’en faire une présentation générale. Dans<br />
l’ordre <strong>de</strong>s interventions <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te première partie, Nathalie<br />
Fürst présentera la démarche d’élaboration d’un gui<strong>de</strong><br />
européen <strong>de</strong> la cartographie, ainsi qu’un proj<strong>et</strong> similaire<br />
consacré à la France. On notera avec intérêt que ce groupe<br />
européen s’intéresse au coût <strong>de</strong>s cartographies <strong>et</strong> à la<br />
facilité d’utilisation <strong>de</strong>s outils dédiés à leur élaboration.<br />
Nous verrons qu’un certain nombre <strong>de</strong> points font encore<br />
débat, en particulier l’appréciation <strong>de</strong>s zones calmes.<br />
Le proj<strong>et</strong> GIpSynoise sera ensuite présenté par Julie Vall<strong>et</strong><br />
<strong>et</strong> Bruno Vincent. Puis, Francis Besnard dressera le bilan<br />
d’une approche cartographique en milieu interurbain.<br />
Présentation du gui<strong>de</strong> européen <strong>de</strong> bonne pratique <strong>de</strong> la cartographie<br />
Nathalie Fürst (membre du groupe européen<br />
“Évaluation <strong>de</strong> l’exposition au bruit”)<br />
J’interviens ici en ma qualité <strong>de</strong> membre du groupe <strong>de</strong><br />
travail européen sur l’évaluation <strong>de</strong> l’exposition au bruit<br />
(WG-AEN), groupe <strong>de</strong> travail mis en place par la Commission<br />
européenne pour l’assister dans l’accompagnement <strong>de</strong> la<br />
directive 2002/49/CE. Il comprend <strong>de</strong>s participants issus <strong>de</strong><br />
huit pays européens, géographiquement bien répartis du<br />
nord au sud <strong>de</strong> l’Europe, ce qui présente l’intérêt d’une<br />
représentation équilibrée <strong>de</strong>s différentes pratiques <strong>et</strong><br />
réglementations rencontrées en Europe. Participent à ce<br />
groupe <strong>de</strong>s personnalités venant d’horizons professionnels<br />
différents, aux sensibilités <strong>et</strong> aux intérêts complémentaires.<br />
S’y côtoient donc <strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong>s collectivités, avec<br />
les villes <strong>de</strong> Birmingham, Bruxelles, Madrid ou Dublin, <strong>de</strong>s<br />
représentants <strong>de</strong>s ministères, avec les ministères <strong>de</strong><br />
l’environnement allemands <strong>et</strong> grecs, <strong>de</strong>s organismes<br />
techniques ou <strong>de</strong> recherche, comme le Certu <strong>et</strong> ses<br />
homologues portugais, belges <strong>et</strong> danois.<br />
Les actions du WG-AEN<br />
La mission <strong>de</strong> ce groupe <strong>de</strong> travail ? Produire <strong>de</strong>s<br />
recommandations techniques, <strong>de</strong> la documentation, pour<br />
ai<strong>de</strong>r la mise en œuvre <strong>de</strong> la directive sur l’évaluation <strong>et</strong> la<br />
gestion du bruit ambiant. Par le passé, en août 2003, les<br />
travaux du groupe s’étaient traduits par la production <strong>de</strong><br />
recommandations ayant permis d’élaborer les lignes<br />
directrices pour la mise en œuvre <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
intermédiaires. Aujourd’hui, les activités du groupe sont<br />
multiples.<br />
Tout d’abord, l’élaboration d’un gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique <strong>de</strong><br />
la cartographie. Après une première version finalisée en<br />
2003, l’année 2004 a été consacrée au recueil <strong>de</strong><br />
commentaires en vue <strong>de</strong> la publication, en 2005, d’une<br />
version finalisée <strong>et</strong> complétée du document.<br />
La <strong>de</strong>uxième tâche à laquelle s’attelle le WG-AEN<br />
correspond au suivi, pour le compte <strong>de</strong> la Commission, <strong>et</strong> à<br />
la production d’avis techniques sur les proj<strong>et</strong>s Harmonoise<br />
<strong>et</strong> Imagine financés par la Commission. Concernant<br />
Harmonoise, à presque un mois <strong>de</strong> l’achèvement technique<br />
du proj<strong>et</strong>, les membres du groupe n’ont eu qu’une seule<br />
occasion d’échanger avec les experts du proj<strong>et</strong>, ce qui est<br />
un peu tard pour vraiment influer sur le proj<strong>et</strong>. C<strong>et</strong> échange<br />
nous a néanmoins permis <strong>de</strong> recueillir <strong>de</strong>s éléments<br />
intéressants <strong>et</strong>, surtout, <strong>de</strong> poser les bases d’une<br />
collaboration plus efficace avec le proj<strong>et</strong> Imagine. Lancé en<br />
décembre 2003, Imagine s’achèvera en décembre 2006 <strong>et</strong><br />
vise à produire une métho<strong>de</strong> commune pour la prévision du<br />
bruit aérien <strong>et</strong> du bruit <strong>de</strong>s industries. D’ores <strong>et</strong> déjà, <strong>de</strong>s<br />
réunions <strong>de</strong> travail régulières <strong>et</strong> plus structurées sont<br />
planifiées.<br />
Le groupe travaille aussi à la production <strong>de</strong><br />
recommandations sur les données à transm<strong>et</strong>tre à la<br />
Commission. L’objectif : finaliser un questionnaire, sur<br />
support papier ou informatique, <strong>de</strong>stiné à définir la façon<br />
dont les pays membres doivent r<strong>et</strong>ranscrire les données à la<br />
Commission. Ce travail vise aussi à faciliter la collecte, la<br />
mise en forme <strong>et</strong> l’exploitation <strong>de</strong> ces données par la<br />
Commission. Des conclusions <strong>de</strong>vraient être utilisables en<br />
milieu d’année <strong>et</strong> perm<strong>et</strong>tre l’élaboration <strong>de</strong> ce<br />
questionnaire d’ici la fin <strong>de</strong> l’année 2005.<br />
L’élaboration d’orientations pour la définition <strong>et</strong><br />
l’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s zones calmes figure également au menu<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 111
du groupe WG-AEN. En eff<strong>et</strong>, la directive <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
recenser les zones calmes, en agglomération notamment,<br />
pour limiter l’augmentation du bruit dans ces zones. Mais<br />
elle ne donne qu’une définition assez sommaire <strong>de</strong> ces zones<br />
calmes (délimitation <strong>de</strong> la zone fixée par l’autorité<br />
compétente, valeur <strong>de</strong> l’indicateur <strong>de</strong> bruit approprié à ne<br />
pas dépasser fixée par l’État membre). Le groupe a donc<br />
pour mission <strong>de</strong> publier <strong>de</strong>s recommandations sur la façon <strong>de</strong><br />
les définir <strong>et</strong> <strong>de</strong> les évaluer.<br />
Le groupe est également impliqué dans une action, déjà<br />
programmée en 2004 mais qui n’a pas pu se faire pour <strong>de</strong>s<br />
raisons financières essentiellement, qui consiste à formuler<br />
<strong>de</strong>s indications pour évaluer la qualité <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong><br />
cartographie du bruit. C<strong>et</strong>te action sera menée en 2005 sur<br />
la base, notamment, d’un document que m<strong>et</strong> en place le<br />
ministère allemand en vue <strong>de</strong> la certification <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong><br />
prévision du bruit en Allemagne. Ce document <strong>de</strong>vrait être<br />
assez rapi<strong>de</strong>ment mis à disposition du groupe <strong>de</strong> travail, qui<br />
en tirera <strong>de</strong>s recommandations.<br />
Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique <strong>de</strong> la cartographie : présentation<br />
Ce gui<strong>de</strong> est un outil d’ai<strong>de</strong> pour les États Membres <strong>et</strong> les<br />
autorités compétentes en charge <strong>de</strong> la réalisation <strong>de</strong>s cartes<br />
<strong>de</strong> bruit stratégiques. Ce document est à la disposition <strong>de</strong>s<br />
autorités <strong>et</strong> <strong>de</strong>s États membres. Il n’a, a priori, aucun<br />
caractère d’obligation. Ce document s’appliquera à la<br />
première série <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques, avec pour<br />
horizon l’année 2007. Pour la <strong>de</strong>uxième série, il est prévu<br />
qu’une métho<strong>de</strong> commune soit mise à disposition <strong>de</strong>s États.<br />
Deux possibilités : soit le présent gui<strong>de</strong> sera adapté à c<strong>et</strong>te<br />
nouvelle métho<strong>de</strong>, soit un nouveau gui<strong>de</strong>, complémentaire<br />
<strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> commune, si elle est disponible à c<strong>et</strong>te date,<br />
sera réalisé.<br />
Dans toute entreprise d’élaboration d’un gui<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
recommandations, il est une question qui se pose<br />
constamment : quel niveau <strong>de</strong> détail faut-il adopter, à quel<br />
niveau <strong>de</strong> recommandation doit-on s’arrêter ? L’objectif <strong>de</strong><br />
faire d’un tel document un outil opérationnel reste<br />
essentiel, mais les particularités locales doivent aussi<br />
pouvoir être prises en compte. Il convient à la fois que les<br />
autorités chargées <strong>de</strong> la mise en œuvre <strong>de</strong>s cartes ne soient<br />
pas trop limitées, <strong>et</strong> que les recommandations soient<br />
suffisamment détaillées pour être applicables. Comme je le<br />
disais précé<strong>de</strong>mment, une première version publiée en<br />
décembre 2003 est disponible sur le site <strong>de</strong> la commission<br />
européenne, c’est un document public. Ce “premier j<strong>et</strong>” a<br />
été soumis durant l’année 2004 aux États membres <strong>et</strong> aux<br />
organismes ou collectivités, afin <strong>de</strong> récolter leurs réactions,<br />
leurs attentes, les carences éventuelles <strong>de</strong> ce document. À<br />
partir <strong>de</strong> ces informations, le document sera enrichi au cours<br />
<strong>de</strong> l’année 2005.<br />
Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique : le contenu<br />
Le contenu du gui<strong>de</strong> est basé sur une étu<strong>de</strong> financée par le<br />
gouvernement britannique <strong>et</strong> réalisée en 2002 <strong>et</strong> 2003 par<br />
un bureau d’étu<strong>de</strong> allemand. La première partie <strong>de</strong> ce<br />
travail avait consisté à enquêter, auprès <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
États membres <strong>et</strong> d’un certain nombre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s villes,<br />
afin <strong>de</strong> répertorier leurs attentes vis-à-vis <strong>de</strong> la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong> la directive, leurs besoins en termes <strong>de</strong><br />
méthodologie <strong>et</strong> les difficultés pressenties. Dans une<br />
secon<strong>de</strong> partie, au vu <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te enquête, <strong>de</strong>s outils avaient<br />
été proposés afin <strong>de</strong> répondre aux attentes <strong>de</strong>s collectivités.<br />
Le gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique suit le même principe : une<br />
première partie liste les points importants à prendre en<br />
compte <strong>et</strong> les suj<strong>et</strong>s difficiles à traiter i<strong>de</strong>ntifiés à l’issue du<br />
questionnaire, puis, <strong>de</strong>s solutions techniques sont proposées.<br />
Ce gui<strong>de</strong> porte sur un domaine très particulier <strong>de</strong> la<br />
réalisation <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques. Il tente <strong>de</strong><br />
répondre aux questions suivantes : Quelles sont les données<br />
nécessaires ? Comment se les procurer ? Que faire si l’on ne<br />
dispose pas <strong>de</strong> ces données ? Parmi les grands thèmes<br />
abordés, les différentes données d’entrée font l’obj<strong>et</strong> d’une<br />
vaste revue <strong>de</strong> détail. Les données <strong>de</strong> trafic, tout d’abord :<br />
elles incluent la vitesse, le débit, le type <strong>de</strong> véhicules, leur<br />
allure. Concernant la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s sites, il est précisé la<br />
démarche à suivre lorsqu’on ne dispose pas <strong>de</strong>s données<br />
topographiques, si l’on peut simplifier en prenant<br />
l’hypothèse d’un sol plat. Pour les hypothèses<br />
météorologiques : sont-elles nécessaires ? Si oui, comment<br />
obtenir <strong>de</strong>s valeurs détaillées ? En l’absence <strong>de</strong> données<br />
météo, comment prendre en compte ce paramètre ? Sont<br />
également abordés les aspects ayant trait au bâti : faut-il<br />
faire intervenir la hauteur du bâti ? Comment l’approximer si<br />
on ne connaît pas la hauteur du bâti ? Enfin, ce panorama<br />
<strong>de</strong>s données d’entrée se termine par les données <strong>de</strong><br />
population, élément très important, puisque les cartes <strong>de</strong><br />
bruit stratégiques doivent évaluer les populations exposées,<br />
mais données difficiles à obtenir <strong>de</strong> façon détaillée.<br />
Le gui<strong>de</strong> couvre ensuite le domaine <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
d’évaluation. Quelles sont les surfaces à cartographier ?<br />
Faut-il se limiter à la surface administrative, pour les<br />
gran<strong>de</strong>s agglomérations notamment ? Faut-il considérer<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s sources susceptibles d’impacter c<strong>et</strong>te<br />
surface administrative, auquel cas on peut être amenés à<br />
cartographier un peu plus que l’agglomération ? C<strong>et</strong>te partie<br />
traite également <strong>de</strong> la localisation <strong>de</strong>s points récepteurs.<br />
Les indicateurs préconisés par la directive n’étant pas ceux<br />
couramment utilisés en France pour les niveaux en faça<strong>de</strong>,<br />
la notion d’« indicateurs en champ libre » est explicitée <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong>s indications sont données sur la façon <strong>de</strong> prendre en<br />
compte ces indicateurs. À signaler toutefois que les avis<br />
divergent sur l’interprétation <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te définition, <strong>et</strong> que la<br />
mise en pratique <strong>de</strong> ces indicateurs en champ libre n’est pas<br />
simple.<br />
La partie du gui<strong>de</strong> consacrée aux outils propose un co<strong>de</strong><br />
d’évaluation <strong>de</strong>s outils basé sur trois paramètres : facilité<br />
d’utilisation, précision <strong>et</strong> coût. Ces trois critères perm<strong>et</strong>tent<br />
<strong>de</strong> choisir les outils en fonction <strong>de</strong>s moyens dont on dispose,<br />
<strong>de</strong> la précision recherchée <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’importance qu’on accor<strong>de</strong><br />
à la facilité d’utilisation. Tel outil est-il facile à m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre ? Lorsque <strong>de</strong>s données détaillées sont <strong>de</strong>mandées,<br />
est-ce difficile à m<strong>et</strong>tre en œuvre ? Exemple : sera qualifié<br />
<strong>de</strong> simple un outil qui se contenterait <strong>de</strong> recourir à <strong>de</strong>s<br />
valeurs par défaut. Il importe également d’estimer la<br />
précision : en eff<strong>et</strong>, plus les données utilisées sont précises,<br />
plus les résultats à afficher seront, eux aussi, précis. Bien<br />
souvent, plus les données utilisées seront détaillées, plus le<br />
coût sera élevé.<br />
Considérons l’exemple <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> comptage <strong>de</strong>s débits <strong>de</strong><br />
trafic. Différentes métho<strong>de</strong>s d’évaluation du trafic sont<br />
comparées, sous l’angle <strong>de</strong> leur complexité, <strong>de</strong> leur<br />
précision <strong>et</strong> <strong>de</strong> leur coût. On pourra envisager un comptage<br />
distinguant chacune <strong>de</strong>s trois pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la directive (jour,<br />
soirée, nuit), afin notamment <strong>de</strong> pouvoir évaluer le L <strong>de</strong>n .<br />
L’estimation peut aussi consister à sélectionner <strong>de</strong>s routes<br />
type, à compter le trafic pour ces routes, puis à extrapoler à<br />
tous les types <strong>de</strong> routes <strong>de</strong> même typologie. On pourra<br />
préférer l’utilisation <strong>de</strong> valeurs statistiques élaborées par<br />
<strong>de</strong>s instances officielles à partir d’une observation du<br />
réseau, ou encore l’utilisation <strong>de</strong> valeurs statistiques non<br />
officielles mais ayant été déterminées par une autorité<br />
locale. Enfin, tout simplement, considérer <strong>de</strong>s valeurs par<br />
défaut en fonction <strong>de</strong> la typologie routière proposée dans le<br />
gui<strong>de</strong>. Par ailleurs, chaque État membre est libre <strong>de</strong><br />
proposer ses valeurs nationales.<br />
PAGE 112<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Les points qui font débat<br />
Parmi les points abordés dans le gui<strong>de</strong>, un certain nombre<br />
doivent encore faire l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> discussions mais, bien<br />
évi<strong>de</strong>mment, dans la version 2005 du document, ces points<br />
auront trouvé réponse. Il s’agit, d’une part, <strong>de</strong> préciser ce<br />
qu’on entend par « la faça<strong>de</strong> la plus exposée ». Les cartes<br />
<strong>de</strong> bruit stratégiques doivent être évaluées sur la faça<strong>de</strong> la<br />
plus exposée <strong>de</strong>s bâtiments, mais la directive en donne une<br />
définition plutôt géométrique, à savoir « la faça<strong>de</strong> qui, au<br />
regard <strong>de</strong> l’infrastructure, est la plus proche <strong>de</strong> celle-ci ».<br />
Or, le groupe <strong>de</strong> travail a jugé qu’une définition acoustique<br />
serait plus adaptée <strong>et</strong> qu’il convenait <strong>de</strong> prendre la faça<strong>de</strong><br />
réellement exposée au niveau sonore le plus élevé. Le<br />
<strong>de</strong>uxième point <strong>de</strong> discussion concerne la localisation <strong>de</strong>s<br />
points d’évaluation. Que dit la directive ? Il faut évaluer les<br />
niveaux <strong>sonores</strong> sur la faça<strong>de</strong> la plus exposée en vue <strong>de</strong><br />
déterminer la population exposée par plages <strong>de</strong> niveaux<br />
<strong>sonores</strong>. Pour déterminer les faça<strong>de</strong>s calmes, il faut évaluer<br />
les niveaux <strong>sonores</strong> à 2 mètres en avant <strong>de</strong>s faça<strong>de</strong>s. Pour<br />
évaluer les superficies <strong>de</strong>s espaces exposés, il faut évaluer<br />
les niveaux <strong>sonores</strong> en champ libre dans l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
espaces, indépendamment <strong>de</strong>s bâtiments. Autrement dit, si<br />
l’on s’en tient à la stricte lecture <strong>de</strong> la directive, pour<br />
évaluer le niveau sonore en chacun <strong>de</strong> ces points, il faut<br />
réaliser trois séries <strong>de</strong> calculs. Le groupe <strong>de</strong> travail, pour sa<br />
part, recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne faire qu’une seule série <strong>de</strong> calculs,<br />
mais en prenant en compte toutes les réflexions, pour<br />
l’évaluation <strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong> sur les faça<strong>de</strong>s les plus<br />
exposées <strong>et</strong> pour évaluer les niveaux à 2 m ; le groupe<br />
préconise enfin <strong>de</strong> r<strong>et</strong>irer 3 dB pour correspondre à un<br />
niveau sonore en champ libre <strong>et</strong> ainsi se conformer à<br />
l’indicateur L <strong>de</strong>n <strong>de</strong>mandé.<br />
On est aussi en plein débat sur l’estimation <strong>de</strong>s populations.<br />
Les populations sont réparties dans les bâtiments, lesquels<br />
occupent une superficie <strong>et</strong> un volume en trois dimensions.<br />
La directive <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’évaluer les niveaux <strong>sonores</strong> à<br />
laquelle la population est exposée. L’ennui, c’est qu’elle<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne considérer qu’un seul point récepteur, situé<br />
sur la faça<strong>de</strong> la plus exposée d’un bâtiment, à 4 m <strong>de</strong><br />
hauteur. Comment affecte-t-on une population à un<br />
récepteur unique, sachant que le bruit se propage dans<br />
l’espace ? Sur ce point, le groupe <strong>de</strong> travail suggère <strong>de</strong><br />
déterminer <strong>de</strong>s ratios <strong>de</strong> population par m 2 , ou d’utiliser <strong>de</strong>s<br />
ratios officiels <strong>de</strong> population par m 2 , puis d’appliquer ces<br />
ratios à la surface estimée <strong>de</strong> chaque bâtiment multipliée<br />
par le nombre d’étages.<br />
Un autre point <strong>de</strong> la directive qui est remis en question <strong>et</strong><br />
qui, c<strong>et</strong>te fois-ci, ne bénéficie pas encore <strong>de</strong><br />
recommandations, concerne les zones calmes. C’est un suj<strong>et</strong><br />
difficile qui a donné lieu à un premier rapport en 2003<br />
réalisé par un bureau d’étu<strong>de</strong> britannique. Faute <strong>de</strong><br />
définitions satisfaisantes émanant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te étu<strong>de</strong>, il a été<br />
décidé <strong>de</strong> réaliser un bilan <strong>de</strong>s pratiques en matière <strong>de</strong><br />
définition <strong>et</strong> d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s zones calmes dans les pays<br />
ayant mis en œuvre c<strong>et</strong>te notion. Pour compléter ce travail,<br />
en 2004, une réunion entre le groupe WG-AEN <strong>et</strong> le groupe<br />
Santé <strong>et</strong> aspects socioéconomiques (WG-H & SEA) a permis<br />
d’élargir notre point <strong>de</strong> vue à <strong>de</strong>s considérations davantage<br />
teintées d’aspects socioéconomiques. Des idées<br />
intéressantes sont apparues <strong>et</strong> seront probablement reprises<br />
dans les recommandations que produira le groupe, mais,<br />
pour l’instant, aucune définition n’a émergé. Tout porte à<br />
croire que l’on s’oriente vers plusieurs définitions : l’une<br />
basée sur l’acoustique <strong>et</strong> l’autre sur l’usage <strong>de</strong>s espaces.<br />
Pour la définition acoustique, se posent notamment<br />
quelques interrogations. Faut-il recomman<strong>de</strong>r l’usage <strong>de</strong><br />
l’indicateur L <strong>de</strong>n ? Faut-il distinguer les trois pério<strong>de</strong>s — jour,<br />
soirée, nuit —, qui correspondraient à une occupation réelle<br />
<strong>de</strong> ces zones calmes ? Faut-il préconiser l’utilisation <strong>de</strong><br />
niveaux <strong>sonores</strong> absolus ? Ou plutôt recomman<strong>de</strong>r une<br />
émergence sonore par rapport au bruit ambiant, avec un<br />
dépassement <strong>de</strong> certains seuils pendant certaines pério<strong>de</strong>s ?<br />
Toutes ces questions restent encore en suspens.<br />
État d’avancement <strong>de</strong>s travaux<br />
Où en est le gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique ? Les travaux<br />
s’appuient d’ores <strong>et</strong> déjà sur l’enquête lancée en 2004. Une<br />
nouvelle étu<strong>de</strong>, lancée en octobre 2004 <strong>et</strong> dont<br />
l’achèvement est prévu pour février 2005, vise à compléter<br />
le gui<strong>de</strong>, d’une part, par <strong>de</strong> nouveaux outils couvrant les<br />
domaines non encore pris en compte <strong>et</strong>, d’autre part, à<br />
quantifier l’impact <strong>de</strong>s solutions proposées. L’idée consiste<br />
à évaluer la précision <strong>de</strong>s données d’entrée au moyen <strong>de</strong><br />
valeurs chiffrées, <strong>et</strong> non <strong>de</strong> simples signes +++ <strong>et</strong> ---.<br />
Parmi les éléments envisagés dans la nouvelle version du<br />
gui<strong>de</strong>, figurent <strong>de</strong>s outils relatifs à la prise en compte <strong>de</strong>s<br />
revêtements <strong>de</strong> chaussée. Il s’agit <strong>de</strong> préciser quelles sont<br />
les hypothèses à prendre quand on ne connaît pas les<br />
revêtements <strong>de</strong> chaussée, quand on connaît mal la<br />
topographie <strong>de</strong>s sites, quand on ne sait pas estimer les<br />
hauteurs d’écrans à proximité <strong>de</strong>s infrastructures ou quand<br />
on ne connaît pas précisément la pente <strong>de</strong> l’infrastructure<br />
étudiée. De fait, tous ces éléments influent sensiblement sur<br />
la propagation.<br />
Quel impact en France d’un tel document ?<br />
L’utilisation <strong>de</strong> ce gui<strong>de</strong> dans les différents Etats membres<br />
ne sera pas obligatoire. Néanmoins, il est envisagé d’adapter<br />
ce gui<strong>de</strong> européen au contexte national français, en y<br />
convoquant les données <strong>et</strong> recommandations dont on dispose<br />
sur les spécificités françaises. C<strong>et</strong>te adaptation serait<br />
intégrée dans un Gui<strong>de</strong> méthodologique pour la réalisation<br />
<strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit stratégiques commandité par le<br />
ministère <strong>de</strong> l’Ecologie <strong>et</strong> du Développement durable.<br />
Destiné essentiellement aux collectivités locales, ce gui<strong>de</strong><br />
aura une portée large puisqu’il intègrera non seulement la<br />
prise en compte <strong>de</strong>s données d’entrée <strong>de</strong>s modèles mais<br />
également les métho<strong>de</strong>s envisageables, les outils disponibles<br />
pour m<strong>et</strong>tre en œuvre ces métho<strong>de</strong>s, <strong>et</strong> les<br />
recommandations sur la façon <strong>de</strong> produire les cartes. Tout<br />
ceci pour savoir répondre à la question suivante : quelles<br />
cartes fait-on, pour quels usages, comment les présente-t-on<br />
au public <strong>et</strong> comment les utilise-t-on pour élaborer les plans<br />
d’action ? Enfin, ce gui<strong>de</strong> sera complété par la présentation<br />
<strong>de</strong> quelques expériences existantes en France ou en Europe.<br />
Pour 2005, est donc prévue une nouvelle version du gui<strong>de</strong><br />
européen ; une première version du gui<strong>de</strong> français est<br />
prévue pour 2006.<br />
Le programme européen GIpSynoise : complémentarité entre calculs <strong>et</strong><br />
mesures ; stratégie <strong>de</strong> communication pour les cartographies du bruit<br />
Julie Vall<strong>et</strong> (Grand Lyon)<br />
Je suis en charge, au sein <strong>de</strong> la Communauté urbaine <strong>de</strong><br />
Lyon, du proj<strong>et</strong> GIpSynoise <strong>et</strong> <strong>de</strong> la cartographie du bruit sur<br />
l’agglomération lyonnaise. Sont également associés à ce<br />
proj<strong>et</strong> GIpSynoise, Jacques Lambert, <strong>de</strong> l’Inr<strong>et</strong>s, Christine<br />
Aujard, <strong>de</strong> la société 01dB-Métravib, Bruno Vincent, qui<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 113
interviendra dans un instant, ainsi que <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> mes<br />
collègues, Pierre Crépeaux <strong>et</strong> Anne Lesvignes.<br />
Nous présenterons tout d’abord le proj<strong>et</strong> GIpSynoise,<br />
préciserons ensuite quelles sont les complémentarités<br />
pouvant être apportées à nos calculs <strong>et</strong> nous interrogerons<br />
enfin sur l’exploitation <strong>de</strong> ces cartographies du bruit, tant<br />
vis-à-vis du public que <strong>de</strong>s agglomérations.<br />
Objectifs <strong>et</strong> moyens du Grand Lyon<br />
Pour améliorer l’environnement sonore <strong>de</strong>s populations du<br />
Grand Lyon, la communauté urbaine mène une stratégie<br />
s’articulant selon <strong>de</strong>ux axes : réduire <strong>et</strong> prévenir les<br />
nuisances <strong>sonores</strong> ; promouvoir le patrimoine sonore existant<br />
<strong>et</strong> le préserver. En termes d’outils, c<strong>et</strong>te démarche s’appuie<br />
d’abord sur <strong>de</strong>s diagnostics acoustiques <strong>de</strong> quartier, une<br />
approche patrimoniale confiée à Acoucité <strong>et</strong> regroupée sous<br />
le sigle DAQUAR. La partie modélisation <strong>et</strong> calculs, quant à<br />
elle, relève du programme européen GIpSynoise. Son but :<br />
réaliser un outil d’ai<strong>de</strong> à l’établissement <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit<br />
<strong>de</strong>mandées par la directive européenne. La <strong>de</strong>rnière<br />
batterie d’outils, enfin, concerne la mesure : le Grand Lyon<br />
est en passe <strong>de</strong> se doter d’un observatoire permanent <strong>de</strong><br />
mesure du bruit, avec, à terme, 30 points <strong>de</strong> mesure<br />
environ. À travers ces outils, la communauté urbaine <strong>de</strong><br />
Lyon entend planifier <strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> prévention <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> réduction du bruit, afin d’intégrer le bruit aux outils<br />
trans-services <strong>de</strong> planification <strong>et</strong> <strong>de</strong> programmation (SCoT,<br />
PDU, PLU, PLH, OPAH).<br />
Le proj<strong>et</strong> GIpSynoise<br />
GIpSynoise est un système d’information géographique (SIG)<br />
qui a la particularité d’intégrer les aspects psychologiques<br />
<strong>de</strong> la perception du bruit, tels que la gêne sonore ou les<br />
perturbations du sommeil. Bien entendu, l’acoustique<br />
environnementale est aussi prise en compte, d’où le suffixe<br />
noise. C’est un proj<strong>et</strong> sur trois ans doté d’un budg<strong>et</strong> assez<br />
conséquent (1,3 millions d’euros). Les financeurs ? L’Europe,<br />
dans le cadre <strong>de</strong> Life Environment, <strong>et</strong> le ministère <strong>de</strong><br />
l’Écologie <strong>et</strong> du Développement durable.<br />
Structure du proj<strong>et</strong> <strong>et</strong> partenaires<br />
Le Grand Lyon est le chef <strong>de</strong> file du proj<strong>et</strong>, qui s’articule<br />
autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux comités. Un comité technique, dirigé par la<br />
société 01dB-M<strong>et</strong>ravib <strong>et</strong> composé <strong>de</strong> la fondation Forth<br />
(Université <strong>de</strong> Crète), un institut <strong>de</strong> recherche spécialisé<br />
dans les systèmes d’information géographique, <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’Inr<strong>et</strong>s, qui apporte son expertise sur les indicateurs <strong>de</strong> la<br />
nuisance sonore <strong>et</strong> sur la perception <strong>de</strong>s cartes par la<br />
population. Le comité opérationnel, quant à lui, animé par<br />
Acoucité, regroupe 14 villes ou agglomérations<br />
européennes : Barcelone <strong>et</strong> Huelva (Espagne), Porto<br />
(Portugal), Prague (République tchèque), Szeged (Hongrie),<br />
les communautés urbaines <strong>de</strong> Lille, Bor<strong>de</strong>aux <strong>et</strong> Nantes, les<br />
communautés d’agglomérations d’Angers, Montbéliard <strong>et</strong><br />
Nice, <strong>et</strong> les Villes <strong>de</strong> Saint-Étienne <strong>et</strong> Boulogne-Billancourt.<br />
Si cinq pays sont représentés, le poids <strong>de</strong>s villes françaises<br />
est assez important. La taille diversifiée <strong>de</strong> ces villes est un<br />
point intéressant <strong>de</strong> ce panel européen.<br />
Architecture technique <strong>de</strong> l’outil<br />
L’outil GIpSynoise intègre la version 8.3 du SIG ArcView, qui<br />
est développé par la société Esri. Les calculs acoustiques se<br />
déroulent au niveau du logiciel CadnaA, développé par la<br />
société DataKustik. L’interface <strong>de</strong> l’utilisateur est constituée<br />
du SIG ArcView <strong>et</strong> <strong>de</strong> menus supplémentaires spécifiques à<br />
GIpSynoise. Les données SIG <strong>de</strong> l’agglomération, ainsi que<br />
d’autres données qui n’y seraient pas présentes, nécessitent<br />
tout d’abord d’être converties au format requis par<br />
GIpSynoise. C’est ce niveau du processus qui soulève le plus<br />
<strong>de</strong> questions. Les données manquantes suscitent pour nous<br />
le même type d’interrogations que celles rencontrées par le<br />
groupe européen WG-AEN. Shapefile, un format classique<br />
d’échange entre SIG, perm<strong>et</strong> ensuite d’intégrer les données<br />
sous ArcView. Rappelons au passage les différentes couches<br />
d’informations gérées au sein d’un SIG : topographie au sol,<br />
géométrie <strong>de</strong> l’implantation <strong>de</strong>s rues <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bâtiments,<br />
données <strong>de</strong> population, données <strong>de</strong> trafic <strong>et</strong> d’autres types<br />
<strong>de</strong> données encore. CadnaA exploite alors toutes ces<br />
informations — cela peut prendre un temps assez<br />
conséquent, selon la taille <strong>de</strong> l’agglomération <strong>et</strong> la précision<br />
<strong>de</strong>s résultats — <strong>et</strong> renvoie la couche d’information<br />
acoustique à ArcView.<br />
Les données <strong>de</strong> sortie<br />
Tout ce processus aboutit, bien sûr, à <strong>de</strong>s cartes. Citons, par<br />
exemple, les cartes horizontales, représentant le niveau <strong>de</strong><br />
bruit à 4 mètres <strong>de</strong> hauteur, conformément à la directive ;<br />
les cartes <strong>de</strong> conflits, représentant les zones où certains<br />
seuils <strong>de</strong> bruit sont dépassés ; les cartes <strong>de</strong> population<br />
exposées. L’application fournit également <strong>de</strong>s tableaux,<br />
utiles pour comparer les situations entre elles ou <strong>de</strong>s sites<br />
entre eux. Enfin, l’application ambitionne aussi <strong>de</strong> proposer<br />
<strong>de</strong>s plans d’action, mais c<strong>et</strong> aspect <strong>de</strong> l’application est<br />
encore au sta<strong>de</strong> du développement. Sur ce suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s plans<br />
d’action, il reste notamment à préciser quels indicateurs<br />
prendre en compte <strong>et</strong> comment exploiter les possibilités du<br />
SIG pour gérer les priorités dans les plans d’action <strong>et</strong> pouvoir<br />
justifier ces actions.<br />
Malgré tout, la simulation numérique a ses limites : elle<br />
implique <strong>de</strong>s estimations, <strong>de</strong>s interpolations qui nécessitent<br />
d’être complétées par <strong>de</strong>s mesures sur site.<br />
Bruno Vincent (Acoucité)<br />
Je suis directeur d’Acoucité, l’observatoire <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore sous convention avec la<br />
communauté urbaine <strong>de</strong> Lyon. Acoucité est également un<br />
pôle <strong>de</strong> compétence où l’on r<strong>et</strong>rouve le Certu, le CSTB <strong>et</strong><br />
l’Inr<strong>et</strong>s.<br />
Points forts, points faibles d’une cartographie calculée<br />
Quels sont les principaux points à m<strong>et</strong>tre au crédit d’une<br />
cartographie sonore calculée ? La couverture totale <strong>de</strong><br />
l’agglomération, la présentation intuitive <strong>de</strong>s cartes, le<br />
caractère “objectif” <strong>de</strong>s simulations dans le temps <strong>et</strong> dans<br />
l’espace. Au chapitre <strong>de</strong>s reproches, on r<strong>et</strong>iendra que <strong>de</strong><br />
telles cartographies ne sont que le refl<strong>et</strong> <strong>de</strong> valeurs<br />
moyennes, qu’elles n’offrent que peu <strong>de</strong> variabilité<br />
temporelle, une prise en compte limitée <strong>de</strong>s paramètres<br />
météorologiques <strong>et</strong> une confiance relative <strong>de</strong> la population<br />
vis-à-vis <strong>de</strong> la simulation “pure”. Ces cartes apportent donc<br />
une vision synthétique <strong>et</strong> constituent en cela <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong><br />
planification, mais elles ne perm<strong>et</strong>tent pas d’appréhen<strong>de</strong>r<br />
<strong>de</strong> manière satisfaisante le caractère variable, temporel <strong>et</strong><br />
environnemental du bruit.<br />
Les limites <strong>de</strong> la simulation<br />
Une carte <strong>de</strong> bruit calculée est en quelque sorte un état <strong>de</strong>s<br />
lieux obtenu à partir <strong>de</strong> paramètres moyens choisis <strong>de</strong><br />
manière arbitraire : valeurs <strong>de</strong> trafics moyens issues <strong>de</strong><br />
comptages, excluant la contribution <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux-roues,<br />
contribution du trafic poids lourds souvent estimée, vitesses<br />
rarement mesurées, sans prise en compte <strong>de</strong> la variabilité<br />
<strong>de</strong>s comportements, météo standard, valeurs d’émissions<br />
<strong>sonores</strong> élémentaires moyennes d’un véhicule, toutes ces<br />
données n’offrent pas forcément les plus hautes garanties <strong>de</strong><br />
représentativité <strong>de</strong> la réalité. Dès lors, les enseignements à<br />
tirer <strong>de</strong>s simulations sont davantage à trouver du côté <strong>de</strong>s<br />
écarts que <strong>de</strong>s valeurs absolues.<br />
Un exemple : le Grand Lyon mesure <strong>de</strong>puis plusieurs années<br />
les niveaux <strong>de</strong> bruit en quelques points <strong>de</strong> l’agglomération<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
lyonnaise ; certains lundis, ces mesures révèlent <strong>de</strong>s<br />
amplitu<strong>de</strong>s étonnantes entre le jour <strong>et</strong> la nuit, <strong>de</strong> presque<br />
12 dB, alors que certains samedis, c<strong>et</strong> écart jour-nuit est à<br />
peine <strong>de</strong> 3 dB. On imagine bien, sur le plan <strong>de</strong> la perception,<br />
toute la variabilité <strong>de</strong> l’environnement sonore à laquelle<br />
peut être confronté un habitant d’un site <strong>de</strong> ce type.<br />
Pourtant, une cartographie basée sur <strong>de</strong>s données <strong>de</strong> trafic<br />
moyen ne restituera qu’un indice moyen. C’st la raison pour<br />
laquelle le Grand Lyon a pris la décision <strong>de</strong> se doter d’un<br />
observatoire métrologique permanent.<br />
Vali<strong>de</strong>r <strong>et</strong> renforcer la légitimité <strong>et</strong> la précision <strong>de</strong>s<br />
calculs par la mesure<br />
Un tel observatoire présente plusieurs avantages. Il perm<strong>et</strong> :<br />
<strong>de</strong> rendre compte <strong>de</strong> la variabilité temporelle <strong>et</strong><br />
contextuelle du bruit ; d’évaluer <strong>et</strong> d’envisager <strong>de</strong>s solutions<br />
aux bruits événementiels <strong>de</strong> type trafic ou chantier ; <strong>de</strong><br />
mener une exploitation épidémiologique, par le couplage,<br />
notamment, sur certains sites <strong>de</strong> l’agglomération, avec le<br />
réseau Coparly d’observation permanente <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong><br />
l’air à Lyon ; d’adopter une démarche “patrimoniale”<br />
consistant à suivre le bruit <strong>de</strong> fond <strong>et</strong> les ambiances <strong>sonores</strong><br />
sur le très long terme, afin <strong>de</strong> décrire l’existant <strong>et</strong> <strong>de</strong> le<br />
sauvegar<strong>de</strong>r ; <strong>de</strong> faciliter l’information <strong>et</strong> la communication<br />
avec le public, puisque nombre d’étu<strong>de</strong>s le disent plus<br />
sensible <strong>et</strong> confiant dans la mesure que dans le calcul.<br />
Les points <strong>de</strong> mesure r<strong>et</strong>enus se répartissent en trois<br />
familles. Les mesures permanentes sont réservées à <strong>de</strong>s<br />
zones urbaines dites “représentatives” : zones très<br />
dégradées (situations critiques), zones conflictuelles, zones<br />
sensibles (écoles, hôpitaux…), réserves <strong>de</strong> silence, zones<br />
calmes, parcs, lieux emblématiques. La <strong>de</strong>uxième famille<br />
correspond à <strong>de</strong>s mesures réalisées sur le long terme, en<br />
amont <strong>de</strong> proj<strong>et</strong>s d’aménagement ? Enfin, les mesures à<br />
court terme, sur une ou plusieurs semaines, s’adresseront à<br />
<strong>de</strong>s circonstances plus évènementielles : chantier,<br />
événement festif, ou expériences (journée sans voiture,<br />
zone « 30 », <strong>et</strong>c.).<br />
Reste évi<strong>de</strong>mment à définir l’articulation entre les données<br />
issues du proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> cartographie conforme à la directive<br />
européenne <strong>et</strong> celles fournies par le proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> réseau<br />
permanent <strong>de</strong> mesures du bruit.<br />
Les attentes du grand public en matière <strong>de</strong> cartographie<br />
du bruit<br />
Je vais présenter maintenant les résultats du vol<strong>et</strong><br />
communication du proj<strong>et</strong> GIpSynoise, qui a été<br />
principalement mené par l’Inr<strong>et</strong>s (je m’exprime ici en<br />
remplacement <strong>de</strong> Jacques Lambert, qui n’a pu être présent<br />
aujourd’hui).<br />
Il y a au moins trois bonnes questions à se poser quand on<br />
souhaite informer au moyen <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong> bruit : sur quoi<br />
veut-on communiquer ? comment se faire comprendre ? avec<br />
quelle crédibilité ? Pour progresser sur ces questions, l’Inr<strong>et</strong>s<br />
s’est interrogé sur la nature, la présentation, la qualité <strong>et</strong><br />
les modalités <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong>s informations liées aux cartes<br />
<strong>de</strong> bruit stratégiques. Afin <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> décrypter les<br />
principales attentes du public, une enquête auprès <strong>de</strong><br />
citadins du Grand Lyon a été menée. Les entr<strong>et</strong>iens ont<br />
porté sur le contenu <strong>de</strong>s cartes, leur présentation,<br />
l’accessibilité à l’information, l’utilité <strong>de</strong>s cartes <strong>et</strong> les<br />
impacts <strong>de</strong> la publication <strong>de</strong>s cartes. Malgré une faible<br />
connaissance <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> supports, l’échantillon interrogé<br />
exprime un intérêt fort pour ce type d’information. Les<br />
résultats <strong>de</strong> l’enquête expriment une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> sociale forte<br />
pour : <strong>de</strong>s cartes à zones dynamiques, incluant les plans<br />
d’actions ; <strong>de</strong>s cartes parlantes, claires <strong>et</strong> ludiques,<br />
comportant un nombre limité <strong>de</strong> couleurs mais <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s<br />
explicatives précises <strong>et</strong> un lien avec les eff<strong>et</strong>s du bruit sur la<br />
santé ; <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> bruit exprimés à l’échelle <strong>de</strong> la ville,<br />
du quartier <strong>et</strong> <strong>de</strong> la rue ; <strong>de</strong>s cartes du bruit <strong>de</strong>s transports<br />
mais aussi <strong>de</strong> l’industrie <strong>et</strong> <strong>de</strong>s travaux publics ; <strong>de</strong>s cartes<br />
distinguant le jour, la soirée <strong>et</strong> la nuit.<br />
Autre enseignement <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te enquête, Intern<strong>et</strong> est pressenti<br />
comme un bon support, mais <strong>de</strong>s documents papiers en<br />
mairie, voire même en agence immobilière, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s bornes<br />
interactives dans les bâtiments administratifs, seraient<br />
également appréciés. Il apparaît aussi que les personnes<br />
interrogées envisagent <strong>de</strong> fon<strong>de</strong>r leurs choix d’habitation <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> loisirs sur ces cartes <strong>de</strong> bruit. Enfin, <strong>de</strong>rnier<br />
élément, les personnes enquêtées soulignent l’impact d’une<br />
cartographie du bruit sur le marché immobilier local <strong>et</strong> sur<br />
l’augmentation <strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> conscience du public, en tant<br />
qu’outil <strong>de</strong> pression sur les autorités locales.<br />
Julie Vall<strong>et</strong><br />
Quelles sont donc les gran<strong>de</strong>s étapes <strong>de</strong> l’évaluation <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
gestion du bruit dans l’environnement, au sens <strong>de</strong> la<br />
directive ? Tout d’abord, évaluer la situation présente, en<br />
i<strong>de</strong>ntifiant notamment les zones calmes à protéger <strong>et</strong> les<br />
zones bruyantes à forte population. Puis, définir les<br />
scénarios, par <strong>de</strong>s simulations d’actions <strong>de</strong> prévention <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
résorption <strong>de</strong>s zones bruyantes à forte population. Définir<br />
ensuite les plans d’action, en hiérarchisant les actions. À ce<br />
sta<strong>de</strong>, la concertation s’impose : celle-ci suppose la<br />
présentation au public <strong>de</strong>s zones bruyantes à traiter <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
scénarios d’action envisagés. Après prise en compte <strong>de</strong>s<br />
remarques du public, on réalise <strong>de</strong>s documents “partagés”<br />
<strong>de</strong> planification à un horizon <strong>de</strong> cinq ans. Enfin, si possible,<br />
il serait intéressant <strong>de</strong> réévaluer les actions pour<br />
éventuellement les faire repasser par les étapes du<br />
processus, s’il y a besoin <strong>de</strong> les compléter.<br />
Conclusions<br />
La démarche du Grand Lyon est résolument ancrée dans<br />
l’association simultanée <strong>de</strong>s mesures <strong>et</strong> du calcul. Un<br />
constat : la gestion du bruit urbain nécessite une<br />
coopération renforcée entre services (acousticiens,<br />
urbanistes, informaticiens, déplacement, communication). À<br />
Lyon, la communication sera programmée très en amont afin<br />
que la population soit prête à tirer parti <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit<br />
lorsque celles-ci seront diffusées.<br />
Une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> cartographie simplifiée adaptée à l’interurbain<br />
Francis Besnard (Service d’étu<strong>de</strong>s techniques<br />
<strong>de</strong>s routes <strong>et</strong> autoroutes)<br />
Les villes n’ont pas l’exclusivité <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong>. En<br />
milieu rural, le long <strong>de</strong>s axes interurbains, le bruit est,<br />
hélas, bien présent. Mais, par rapport au milieu urbain, le<br />
problème est plus simple parce que la source est bien<br />
i<strong>de</strong>ntifiée. Cela offre <strong>de</strong>s possibilités d’imaginer <strong>de</strong>s<br />
approches spécifiques, dans la dimension transversale.<br />
Définition <strong>de</strong>s grands axes routiers<br />
Au sens <strong>de</strong> la directive <strong>de</strong> juin 2002, un grand axe routier est<br />
une route régionale, nationale ou internationale dont le<br />
trafic annuel est supérieur à 3 millions <strong>de</strong> véhicules. Ce qui<br />
représente une moyenne <strong>de</strong> 8200 véhicules par jour, ou <strong>de</strong> 8<br />
véhicules par minute en journée, soit l’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong><br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 115
trafic d’une route moyenne. L’ordonnance <strong>de</strong> transposition<br />
<strong>de</strong> novembre 2004, par rapport à la définition <strong>de</strong> la<br />
directive, a introduit une modification du critère <strong>de</strong><br />
qualification <strong>de</strong>s axes : seul le critère du seuil <strong>de</strong> trafic est<br />
conservé, celui <strong>de</strong> la fonctionnalité — qui distinguait les<br />
routes régionales, nationales <strong>et</strong> internationales — étant<br />
abandonné. D’un côté, cela apporte une simplification : on<br />
s’affranchit ainsi <strong>de</strong> la nécessité <strong>de</strong> définir, en France, ce<br />
qu’est une route régionale ; mais, <strong>de</strong> l’autre, la<br />
conséquence est qu’une route relativement locale sur le<br />
plan, disons, fonctionnel, mais qui dépasse les 8200<br />
véhicules/jour, <strong>de</strong>vra être cartographiée. Autre<br />
conséquence : dans une agglomération <strong>de</strong> 99 000 habitants<br />
qui, normalement, n’est pas concernée par les cartes <strong>de</strong><br />
bruit stratégiques, si une avenue dépasse les 8200<br />
véhicules/jour, une carte spécifique pour c<strong>et</strong>te avenue<br />
<strong>de</strong>vra être établie.<br />
Le linéaire concerné<br />
Pour les routes nationales, on peut dire qu’environ la moitié<br />
du linéaire dépasse le seuil <strong>de</strong> trafic <strong>de</strong> 8200 véhicules/jour.<br />
Pour les autoroutes, 90% <strong>de</strong>s 10 000 km <strong>de</strong> linéaire<br />
autoroutier sont concernés. En revanche, pour les routes<br />
départementales (RD) <strong>et</strong> les voies communales (VC), on est,<br />
pour l’heure, incapables d’estimer le linéaire concerné par<br />
ce seuil <strong>de</strong> trafic. Le pourcentage est certainement assez<br />
faible, mais quelques pourcents <strong>de</strong> 360 000 km (RD) ou<br />
610 000 km (VC) ne sont pas forcément négligeables. Pour le<br />
réseau routier national, le linéaire à cartographier atteint<br />
donc 23 000 km. Pour les routes départementales, une<br />
hypothèse <strong>de</strong> 3% du linéaire représenterait 10 000 km<br />
environ. Quant aux voies communales, l’estimation est par<br />
trop hasar<strong>de</strong>use.<br />
Intéressons-nous maintenant à la distance transversale à<br />
l’axe routier sur laquelle la cartographie doit porter. La<br />
carte doit représenter les zones exposées à un niveau sonore<br />
L <strong>de</strong>n supérieur à 55 dB(A). Sur site dégagé, dans certains cas<br />
<strong>de</strong> trafic élevé, ce niveau peut être atteint à 600 m <strong>de</strong> l'axe<br />
routier. Par conséquent, pour les sites dont on ne connaît<br />
pas a priori la topographie, le recueil <strong>de</strong> données <strong>de</strong>vra<br />
porter sur une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong> ordre <strong>de</strong> chaque côté <strong>de</strong> la<br />
route. Si l’on applique c<strong>et</strong>te valeur aux 23 000 km<br />
d’autoroutes <strong>et</strong> <strong>de</strong> routes nationales, on aboutit à une<br />
superficie maximum à cartographier <strong>de</strong> 25 000 km 2 . Même si<br />
c<strong>et</strong>te zone ne doit pas nécessairement être étudiée<br />
finement, la collecte <strong>de</strong> données sur une telle zone<br />
représente pour le moins un travail conséquent.<br />
Démarche préconisée par la directive<br />
Pour réaliser ce travail, lorsque l’État membre ne dispose<br />
pas <strong>de</strong> métho<strong>de</strong> nationale approuvée, la directive<br />
recomman<strong>de</strong> <strong>de</strong> recourir à la métho<strong>de</strong> NMPB-Routes-96, la<br />
métho<strong>de</strong> française développée pour les étu<strong>de</strong>s d’impact <strong>de</strong><br />
proj<strong>et</strong>s d’infrastructures <strong>et</strong> le dimensionnement <strong>de</strong><br />
protections acoustiques. L’avantage <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> est sa<br />
précision, son inconvénient, sa complexité (temps <strong>de</strong> calculs<br />
importants, nécessité d’une <strong>de</strong>scription très détaillée <strong>de</strong>s<br />
sites). Recueillir <strong>de</strong>s données très détaillées prend du temps<br />
<strong>et</strong> coûte cher. Qui plus est, <strong>de</strong> telles données ne sont pas<br />
toujours disponibles. Le traitement <strong>de</strong>s données est lourd <strong>et</strong><br />
très onéreux même lorsqu'une <strong>de</strong>scription détaillée <strong>de</strong>s sites<br />
est disponible. On peut certes appliquer la NMPB-Routes sans<br />
données d’entrée détaillées, mais alors, à quoi bon utiliser<br />
un outil complexe ? Certes, les systèmes <strong>de</strong> bases <strong>de</strong><br />
données géographiques se répan<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> plus en plus, mais,<br />
malheureusement, elles sont moins répandues pour le milieu<br />
rural que pour le milieu urbain. Même si les prévisions sont<br />
optimistes, il faut s’attendre à ce que l’objectif d’une<br />
couverture <strong>de</strong> l’ensemble du territoire français pour 2007 ne<br />
soit pas atteint.<br />
Rappels <strong>de</strong> la directive sur le contenu <strong>de</strong>s cartes<br />
Tout d’abord, la directive <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s calculs à<br />
4 m au-<strong>de</strong>ssus du sol <strong>et</strong> <strong>de</strong> caractériser chaque bâtiment par<br />
le niveau sonore <strong>de</strong> la faça<strong>de</strong> la plus exposée. Il ne s’agit ni<br />
<strong>de</strong> donner le niveau sonore à chaque fenêtre, ni en faça<strong>de</strong><br />
arrière du bâtiment, ni au dixième étage, quand celui-ci<br />
comporte dix étages, mais <strong>de</strong> représenter l’exposition au<br />
bruit <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s habitants du bâtiment par un seul<br />
point d’évaluation. Un raccourci réducteur mais nécessaire,<br />
compte tenu du linéaire important à traiter. D’autant que<br />
les cartes stratégiques, telles qu’elles sont définies dès le<br />
premier article <strong>de</strong> la directive, visent trois objectifs<br />
principaux : informer la population <strong>de</strong> l’existence <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’exposition <strong>de</strong> la population ;<br />
fournir à la Commission une base pour établir <strong>de</strong>s<br />
propositions d’action <strong>de</strong> l’Union européenne ; fournir aux<br />
autorités locales une base pour l’établissement <strong>de</strong>s plans<br />
d’action. Or, quelle est la démarche usuelle d’élaboration<br />
d’un plan d’action, adoptée notamment par les<br />
observatoires du bruit ? On réalise en premier lieu un<br />
diagnostic, afin d’i<strong>de</strong>ntifier les situations répondant aux<br />
critères d’intervention préalablement fixés (seuil <strong>de</strong> niveau<br />
sonore, type <strong>de</strong> population, type d’activité). On définit<br />
ensuite <strong>de</strong>s priorités d’intervention, car, naturellement,<br />
tous les sites i<strong>de</strong>ntifiés ne peuvent être traités d’un coup.<br />
Pour c<strong>et</strong>te première étape, une métho<strong>de</strong> simplifiée suffit.<br />
Dans un <strong>de</strong>uxième temps, pour les situations répondant aux<br />
priorités, les mesures techniques à appliquer sont définies,<br />
en ayant là recours à une précision relevant <strong>de</strong> la démarche<br />
<strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> d’impact. En d’autres termes, ce n’est que dans<br />
un <strong>de</strong>uxième temps que <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s précises sont requises. À<br />
l’étape n°1, une métho<strong>de</strong> simplifiée, non seulement suffit,<br />
mais est nécessaire, pour alléger les coûts d’étu<strong>de</strong>.<br />
Étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> faisabilité d’une métho<strong>de</strong> simplifiée <strong>de</strong><br />
cartographie du bruit <strong>de</strong>s routes interurbaines<br />
Ce constat effectué, le S<strong>et</strong>ra a engagé une étu<strong>de</strong>, à laquelle<br />
participent un certain nombre <strong>de</strong> centres d'étu<strong>de</strong>s<br />
techniques <strong>de</strong> l'Équipement (CETE <strong>de</strong> l'Est, <strong>de</strong> Lyon,<br />
Méditerranée, Nord-Picardie, du Sud-Ouest). L’objectif ?<br />
Tester l’intérêt <strong>de</strong> diverses sources <strong>de</strong> données disponibles,<br />
<strong>de</strong> sources <strong>de</strong> données géographiques notamment <strong>et</strong>,<br />
surtout, évaluer la faisabilité d’une métho<strong>de</strong> simplifiée <strong>de</strong><br />
cartographie <strong>de</strong>s routes interurbaines qui pourrait être<br />
utilisée en l'absence <strong>de</strong> données <strong>de</strong> site détaillées, ou<br />
lorsque <strong>de</strong>s données détaillées sont disponibles mais que<br />
leur traitement est jugé trop lourd. C<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> <strong>de</strong>vrait<br />
bien entendu conserver un niveau <strong>de</strong> précision acceptable.<br />
La démarche a consisté à considérer une douzaine <strong>de</strong> sites,<br />
chacun d’une longueur moyenne <strong>de</strong> 1,5 km, ayant fait<br />
l’obj<strong>et</strong> d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s CETE. Pour chacun <strong>de</strong>s sites,<br />
une <strong>de</strong>scription précise, s’appuyant sur <strong>de</strong>s relevés<br />
géométriques <strong>et</strong> topographiques, était disponible. Dans le<br />
choix <strong>de</strong>s sites, l’on a recherché une gran<strong>de</strong> variété<br />
typologique, tant du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la topographie que du<br />
type <strong>de</strong> bâti, <strong>de</strong> la <strong>de</strong>nsité, du profil en travers <strong>de</strong> la route<br />
ou <strong>de</strong> la présence d’écrans acoustiques.<br />
Dans une première phase, <strong>de</strong>s cartes strictement conformes<br />
à la directive ont été établies, en appliquant la métho<strong>de</strong><br />
NMPB-Routes-96. Les calculs n’ont pas été directement<br />
réalisés en L <strong>de</strong>n , mais en niveau équivalent L Aeq , moyennant<br />
donc une équivalence grossière, mais, l’idée étant <strong>de</strong> tester<br />
une faisabilité, il n’importait pas tant <strong>de</strong> travailler<br />
directement sur les L <strong>de</strong>n . Pour chacun <strong>de</strong>s sites, ont été<br />
évaluées les surfaces <strong>de</strong> L <strong>de</strong>n dépassant les seuils fixés par la<br />
directive, soit 55, 65 <strong>et</strong> 75 dB. Le nombre <strong>de</strong> bâtiments<br />
exposés a également été déterminé, par classe <strong>de</strong> 5 dB.<br />
L’idée était <strong>de</strong> fixer <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> référence, auxquels<br />
pourraient ensuite être comparée l’information obtenue au<br />
moyen <strong>de</strong> diverses métho<strong>de</strong>s simplifiées.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
Le <strong>de</strong>uxième vol<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> s’est attaché à tester diverses<br />
sources <strong>de</strong> données <strong>et</strong>, surtout, à appliquer plusieurs<br />
variantes <strong>de</strong> métho<strong>de</strong> simplifiée, afin d’obtenir <strong>de</strong>s résultats<br />
(superficies <strong>et</strong> nombre <strong>de</strong> bâtiments par isophone <strong>de</strong> 5 dB) à<br />
comparer aux résultats <strong>de</strong> référence. L’accent a été mis sur<br />
une métho<strong>de</strong> simplifiée particulière se fondant sur <strong>de</strong>s<br />
profils-type <strong>de</strong> site définis à partir <strong>de</strong> trois paramètres<br />
seulement : le profil en travers <strong>de</strong> la route, les protections<br />
en bordure <strong>et</strong> la pente du terrain. Pour le profil en travers,<br />
cinq cas différents ont été considérés : <strong>de</strong>ux hauteurs <strong>de</strong><br />
remblai, <strong>de</strong>ux profon<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> déblai <strong>et</strong> une route au niveau<br />
du terrain naturel. Trois cas <strong>de</strong> protections (écran, butte) en<br />
bordure <strong>de</strong> route ont été envisagés : hauteur 3 m, hauteur 5<br />
m, ou absence <strong>de</strong> protection. Quant à la pente du terrain<br />
naturel, un terrain montant, <strong>de</strong>scendant ou plan a été<br />
considéré, correspondant à quatre possibilités différentes.<br />
La combinaison <strong>de</strong> toutes ces possibilités aboutit à 60<br />
profils-types différents (5 × 3 × 4), pour lesquels une route<br />
infiniment longue a été modélisée (profil constant dans la<br />
direction <strong>de</strong> la route). Un ensemble <strong>de</strong> récepteurs, placés à<br />
4 m <strong>de</strong> hauteur, conformément à la directive, ont été<br />
répartis, entre 10 m <strong>et</strong> 1200 m <strong>de</strong> distance, au droit<br />
<strong>de</strong>squels l’on a calculé l’atténuation en propagation <strong>de</strong><br />
l’énergie sonore, au moyen <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> NMPB-Routes-96.<br />
Les résultats obtenus pour chacun <strong>de</strong>s profils-types ont<br />
ensuite alimenté une base <strong>de</strong> données perm<strong>et</strong>tant à un<br />
opérateur <strong>de</strong> choisir le profil le plus adapté au site<br />
considéré : sol montant d’un côté, <strong>de</strong>scendant <strong>de</strong> l’autre,<br />
présence <strong>de</strong> protections acoustiques, <strong>et</strong>c. Sur un tronçon<br />
considéré comme relativement homogène du point <strong>de</strong> vue<br />
<strong>de</strong>s trois paramètres, l’application calcule alors l’émission<br />
sonore L W/m <strong>de</strong> la route <strong>et</strong> la distance correspondant aux<br />
isophones recherchés (L <strong>de</strong>n 55 <strong>et</strong> 65 dB).<br />
D’aucuns jugeront que nous n’avons rien inventé, qu’il s’agit<br />
ici ni plus ni moins d’une variante du Gui<strong>de</strong> du bruit <strong>de</strong>s<br />
transports terrestres publié en 1980, quand le Certu<br />
s’appelait encore le C<strong>et</strong>ur. Ce n’est pas faux, à ceci près<br />
que l’on profite ici <strong>de</strong>s outils informatiques, <strong>et</strong> qu’il n’est<br />
pas certain que le Gui<strong>de</strong> du bruit considère 60 cas<br />
différents. Qui plus est, nous espérons aller plus loin que ces<br />
seuls soixante cas. Il n’y a rien d’étonnant à ce que notre<br />
approche, en eff<strong>et</strong>, ne soit pas si éloignée <strong>de</strong> l’esprit du<br />
Gui<strong>de</strong> du bruit, car notre métho<strong>de</strong> correspond à un niveau<br />
<strong>de</strong> détail comparable à celui que s’était fixé le C<strong>et</strong>ur pour<br />
son gui<strong>de</strong>.<br />
Résultats provisoires<br />
Sur huit sites, les erreurs sur les superficies calculées ont<br />
été évaluées. L’erreur globale sur l’ensemble <strong>de</strong>s sites est<br />
<strong>de</strong> 2% pour l’isophone 65 dB <strong>et</strong> <strong>de</strong> 0% pour l’isophone 55 dB.<br />
L’erreur maximale (en valeur absolue) sur l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
sites, le paramètre réellement révélateur <strong>de</strong> la pertinence<br />
<strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>, est <strong>de</strong> 16% pour l’isophone 65 dB <strong>et</strong> <strong>de</strong> 35%<br />
pour l’isophone 55 dB. Autrement dit, si la distance réelle<br />
<strong>de</strong> l’isophone 55 est <strong>de</strong> 300 mètres, sur quelques sites, il<br />
existe un risque que la distance à la source <strong>de</strong> c<strong>et</strong> isophone<br />
soit estimée à 200 m ou à 400 m. Certes, cela manque <strong>de</strong><br />
précision, mais il faut gar<strong>de</strong>r à l’esprit qu’une incertitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
35% sur la distance équivaut à 2 dB environ en termes <strong>de</strong><br />
niveau sonore. Et l’écart moyen assez faible observé pour<br />
l’isophone 65 nous perm<strong>et</strong> d’être optimistes. D’autant qu’il<br />
ne s’agit là que d’une version provisoire <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te approche.<br />
Les sources d’erreur<br />
Ces écarts sont, au premier chef, liés à l’insuffisante<br />
représentativité du profil type choisi par rapport au site<br />
traité. Une piste d’amélioration pourrait consister à<br />
compléter l’éventail <strong>de</strong> profils types, qui pourrait passer à<br />
90 profils. Une autre idée serait <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r par<br />
interpolation entre les profils types encadrant le site traité.<br />
Par exemple, pour un site en déblai <strong>de</strong> 3 m, pourquoi ne pas<br />
considérer une sorte <strong>de</strong> moyenne, intermédiaire entre un<br />
déblai <strong>de</strong> 2 m <strong>et</strong> un déblai <strong>de</strong> 4 m ? Une <strong>de</strong>uxième<br />
explication pour ces écarts est à trouver du côté <strong>de</strong> l’eff<strong>et</strong><br />
du bâti sur la propagation sonore, que nous n’avons pas pris<br />
en compte. Comme il n’est pas envisageable d’ajouter un<br />
quatrième paramètre, ce qui compliquerait trop la métho<strong>de</strong>,<br />
il nous faut étudier un correctif simple pour une meilleure<br />
précision prenant en compte le bâti. Troisième source<br />
d’erreur : les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> bord. Nous raisonnons à profil en<br />
travers constant sur un tronçon <strong>de</strong> plusieurs centaines <strong>de</strong><br />
mètres, voire plusieurs kilomètres, si cela semble<br />
raisonnable. Or, l’on passe d’un tronçon à un autre <strong>de</strong><br />
manière discontinue, alors que la réalité est plus lissée.<br />
Fatalement, ces eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> bord se traduisent localement par<br />
<strong>de</strong>s imprécisions. Mais, rappelons-le, il s’agit surtout <strong>de</strong><br />
produire <strong>de</strong>s informations à une échelle globale perm<strong>et</strong>tant<br />
d’i<strong>de</strong>ntifier les zones à problèmes, <strong>et</strong> non <strong>de</strong> prévoir à coup<br />
sûr le niveau sonore en faça<strong>de</strong> d’un bâtiment donné.<br />
Conclusions<br />
La cartographie stratégique, pour les grands axes routiers<br />
concernés par la directive, concerne un linéaire<br />
relativement élevé. Il est <strong>de</strong> 23 000 km pour le réseau<br />
national ; pour les voies départementales <strong>et</strong> communales, ce<br />
linéaire n’a pas encore été estimé. Notre démarche<br />
participe d’un sentiment que la métho<strong>de</strong> NMPB-Routes-96<br />
est trop lour<strong>de</strong> pour traiter la majorité <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit<br />
stratégiques. Il n’est pas exclu <strong>de</strong> l’appliquer sur les sites<br />
considérés comme les plus complexes, mais tout porte à<br />
croire que ces cas difficiles ne représentent qu’un faible<br />
pourcentage du réseau routier. Le bilan <strong>de</strong> l’expérience<br />
menée par le S<strong>et</strong>ra est encourageant : il est possible <strong>de</strong><br />
développer une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> calcul simplifiée, globalement<br />
pertinente (erreur moyenne proche <strong>de</strong> zéro sur un grand<br />
nombre <strong>de</strong> sites) <strong>et</strong> localement pertinente (erreur<br />
acceptable sur quelques kilomètres <strong>de</strong> linéaire), susceptible<br />
<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce les zones à traiter dans le cadre <strong>de</strong>s<br />
plans d'action. En revanche, c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> n’a absolument<br />
pas vocation à remplacer la métho<strong>de</strong> NMPB pour les étu<strong>de</strong>s<br />
d’impact.<br />
Débat<br />
Des conséquences <strong>de</strong> données moins<br />
détaillées sur la précision <strong>de</strong>s cartes<br />
Daniel Pillant : À travers ces présentations, nous avons donc<br />
abordé trois niveaux d’appréhension <strong>de</strong> la directive : la<br />
démarche dictée par l’instance européenne, les pratiques<br />
<strong>de</strong>s collectivités locales <strong>et</strong> la cartographie <strong>de</strong>s<br />
infrastructures. Ces différentes interventions soulignent à<br />
quel point la démarche <strong>de</strong> réalisation d’une cartographie ne<br />
saurait s’affranchir d’une question essentielle : pourquoi<br />
établit-on <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit ? Julie Vall<strong>et</strong> <strong>et</strong> Bruno Vincent<br />
y ont répondu : pour mener <strong>de</strong>s plans d’actions, pour<br />
prendre en compte la notion <strong>de</strong> bruit dans les outils <strong>de</strong><br />
planification. J’ai également trouvé intéressantes les cartes<br />
<strong>de</strong> conflits proposées par l’outil GIpSynoise.<br />
Michel Vall<strong>et</strong> : Ma question s’adresse à Nathalie Fürst, qui a<br />
souligné les sources d’imprécision <strong>et</strong> les difficultés<br />
inhérentes à la collecte <strong>de</strong>s données d’entrées. D’une part,<br />
vous n’avez pas abordé le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong>s logiciels <strong>et</strong>, d’autre<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 117
part, vous avez évoqué une étu<strong>de</strong> menée par votre groupe<br />
<strong>de</strong> travail à l’issue <strong>de</strong> laquelle l’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong><br />
précision sera connu. C<strong>et</strong>te précision sera-t-elle <strong>de</strong> l’ordre<br />
<strong>de</strong> 1 dB, <strong>de</strong> 3 dB ou plus ?<br />
Nathalie Fürst : Les outils ne perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en<br />
œuvre que <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s. Ce sur quoi le groupe <strong>de</strong> travail<br />
est amené à se pencher, c’est justement sur les données<br />
d’entrée <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s. Une fois les bonnes données<br />
d’entrée collectées, peu importe l’outil utilisé pour<br />
programmer ces métho<strong>de</strong>s. Notre objectif n’est pas non plus<br />
<strong>de</strong> concevoir une métho<strong>de</strong>, ni <strong>de</strong> s’inquiéter <strong>de</strong> sa précision.<br />
L’objectif <strong>de</strong>s travaux en cours est <strong>de</strong> prévoir les<br />
répercussions du type <strong>de</strong> données utilisées sur la pertinence<br />
<strong>de</strong> l’évaluation <strong>de</strong>s niveaux <strong>sonores</strong>. Prenons un exemple :<br />
conformément aux métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> référence préconisées par<br />
l’actuelle directive — dont fait partie, pour le domaine<br />
routier, la NMPB-96 —, les comptages <strong>de</strong> trafic par pério<strong>de</strong><br />
(jour, soirée <strong>et</strong> nuit) sont les données les plus détaillées qui<br />
soient. En cela, les plages <strong>de</strong> niveaux <strong>sonores</strong> <strong>et</strong> la<br />
population exposée correspondant à ces données détaillées<br />
constituent l’évaluation <strong>de</strong> référence, l’étalon <strong>de</strong> fiabilité<br />
maximale <strong>de</strong>s résultats, en quelque sorte. Des données <strong>de</strong><br />
trafic basées sur <strong>de</strong>s formules statistiques, moins précises<br />
donc, auront, quant à elles, toutes les chances d’être<br />
décalées <strong>de</strong> quelques dizaines <strong>de</strong> mètres par rapport aux<br />
plages <strong>de</strong> référence, <strong>de</strong> même pour la population exposée,<br />
qui accusera un décalage en pourcents par rapport à la<br />
valeur <strong>de</strong> référence. Le but <strong>de</strong> notre démarche est <strong>de</strong><br />
pouvoir prédire c<strong>et</strong> écart <strong>de</strong> qualité par rapport à un étalon<br />
<strong>de</strong> fiabilité maximale correspondant à <strong>de</strong>s données plus<br />
précises.<br />
Métho<strong>de</strong>s complexes avec données simplifiées<br />
contre métho<strong>de</strong> simplifiée<br />
Jean-Pierre Clairbois (A-Tech, Bruxelles) : M. Besnard,<br />
votre exposé me réjouit car vous apportez la confirmation<br />
que, <strong>de</strong>puis vingt ans, l’on fait <strong>de</strong>s choses intelligentes. La<br />
métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> zoom est une métho<strong>de</strong> d’ingénierie qui<br />
s’applique d’office sur <strong>de</strong>s cas complexes <strong>et</strong> <strong>de</strong> gran<strong>de</strong><br />
envergure. Je suis donc satisfait d’apprendre cela. Ma<br />
question : l’Europe est-elle réceptive à ce type <strong>de</strong> métho<strong>de</strong><br />
simplifiée ? Avez-vous une idée du gain entre l’application<br />
<strong>de</strong> votre métho<strong>de</strong> simplifiée <strong>et</strong> l’utilisation simplifiée d’une<br />
métho<strong>de</strong> compliquée ? À mon sens, une fois la NMPB acquise,<br />
payée, y rentrer <strong>de</strong>s données simplifiées ne coûte pas<br />
beaucoup plus cher que <strong>de</strong> rentrer <strong>de</strong>s données dans une<br />
métho<strong>de</strong> simplifiée.<br />
Francis Besnard : Je ne saurai répondre sur la réceptivité <strong>de</strong><br />
l’Europe. Pensez-vous à la Commission européenne ou au<br />
groupe <strong>de</strong> travail européen sur l’évaluation <strong>de</strong> l’exposition<br />
au bruit ? Je pense que ce <strong>de</strong>rnier est réceptif à notre<br />
approche, bien qu’il ne soit pas certain que le groupe, dans<br />
son ensemble, ait abordé ce suj<strong>et</strong>. Rappelons que le groupe<br />
<strong>de</strong> travail auquel participe Nathalie Fürst se concentre<br />
essentiellement, au moins jusqu’à présent, sur les<br />
agglomérations, sans doute parce qu’il faut traiter les<br />
problèmes les uns après les autres. Je n’ai pas le sentiment<br />
que la Commission européenne ait prêté une oreille à ce<br />
genre <strong>de</strong> démarches. Mais ce n’est qu’une impression.<br />
Vaut-il mieux une métho<strong>de</strong> simplifiée ou une métho<strong>de</strong><br />
complexe appliquée à <strong>de</strong>s données simplifiées ? Cela dépend<br />
<strong>de</strong> ce qu’on entend par données simplifiées. Si vous utilisez<br />
votre logiciel favori, que vous saisissez une infrastructure <strong>de</strong><br />
2 km <strong>de</strong> long avec un profil en travers constant, un écran<br />
étendu sur les 2 km, cela ne vous prendra pas beaucoup <strong>de</strong><br />
temps, ne vous coûtera pas très cher <strong>et</strong> les résultats seront<br />
les mêmes, pourvu que l’on applique la même métho<strong>de</strong>.<br />
Quoi qu’il en soit, même si vous disposez <strong>de</strong> toutes les<br />
données nécessaires, pour passer <strong>de</strong> la base <strong>de</strong> données<br />
géographiques aux traitements <strong>et</strong> aux calculs acoustiques,<br />
<strong>de</strong>s étapes <strong>de</strong> n<strong>et</strong>toyage <strong>et</strong> <strong>de</strong> saisie, très consommatrices<br />
en temps, sont nécessaires. A l’arrivée, une précision à 0,5<br />
dB près sera peut-être un peu cher payée. D’où l’intérêt<br />
d’une métho<strong>de</strong> pouvant servir <strong>de</strong> gui<strong>de</strong> dans le choix <strong>de</strong>s<br />
paramètres, que le recours à <strong>de</strong>s données simplifiées soit un<br />
choix ou une obligation. Car, bien souvent, pour toute<br />
données géographiques, on ne dispose que <strong>de</strong> la carte au<br />
1/25000. Or, la <strong>de</strong>scription minimale du site dépend <strong>de</strong>s<br />
données géographiques disponibles. Notre démarche trouve<br />
aussi un intérêt pour ceux qui souhaitent absolument utiliser<br />
leur logiciel : elle peut leur perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> s’apercevoir que<br />
faire varier tel paramètre <strong>de</strong> quelques pourcents, comme<br />
par exemple la pente du terrain, n’apportera pas <strong>de</strong> gain<br />
appréciable en précision. Cela dit, nous n’avons pas<br />
spécifiquement mené d’essais visant à comparer les temps<br />
<strong>de</strong> saisie <strong>et</strong> <strong>de</strong> traitement. Cela pourrait présenter un<br />
intérêt. Nous proposons une métho<strong>de</strong> simplifiée, à comparer<br />
avec une démarche plus complexe faisant appel à <strong>de</strong>s<br />
données plus complexes. Même si la démarche que vous<br />
proposez est tout aussi intéressante, je ne pense pas qu’on<br />
ait fait ce travail pour rien non plus.<br />
Jean-Marc Abramowitch (Sc<strong>et</strong>auroute) : Je voudrais<br />
prolonger la question <strong>de</strong> M. Clairbois : je suis sensible aux<br />
efforts entrepris pour simplifier la métho<strong>de</strong>, je comprends<br />
que la NMPB puisse être considérée comme trop compliquée<br />
pour le premier registre d’évaluation, <strong>et</strong> j’ai bien noté que<br />
l’on se dirige vers <strong>de</strong>s cartographies ne prenant en compte<br />
que <strong>de</strong>s conditions météorologiques standard. Pourtant,<br />
hier, se tenait l’atelier consacré au programme européen<br />
Harmonoise, où l’on a évoqué <strong>de</strong>s approches beaucoup<br />
moins simplistes : 21 profils météorologiques, mesures<br />
d’impédance <strong>de</strong> sol, courbure <strong>de</strong> rayon sonore, <strong>de</strong>ux classes<br />
<strong>de</strong> poids lourds <strong>et</strong> d’autres critères encore <strong>de</strong><br />
perfectionnement <strong>de</strong>s modèles. WG-AEN, le groupe <strong>de</strong><br />
travail européen sur l’évaluation <strong>de</strong> l’exposition au bruit, est<br />
chargé <strong>de</strong> définir les cartes. Quant au programme<br />
Harmonoise, il travaille sur les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> calcul <strong>de</strong> ces<br />
cartes. Il semble que ces <strong>de</strong>ux communautés, WG-AEN <strong>et</strong><br />
Harmonoise, ne vivent pas sur la même planète, que leurs<br />
objectifs soient totalement incompatibles. C’est à se<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si ces <strong>de</strong>ux groupes se sont jamais concertés. Tout<br />
ceci me semble totalement surréaliste.<br />
Nathalie Fürst : Le travail <strong>de</strong> réalisation du gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne<br />
pratique ne vise que la production <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit<br />
stratégiques à l’horizon 2007. Le travail accompli dans le<br />
cadre du proj<strong>et</strong> Harmonoise ambitionne, quant à lui, <strong>de</strong><br />
concevoir une métho<strong>de</strong> commune d’établissement <strong>de</strong>s cartes<br />
qui seront produites à l’horizon 2012. Ce ne sont donc pas<br />
les mêmes enjeux techniques. Par ailleurs, j’ai précisé dans<br />
ma présentation qu’il n’y avait pas eu, hélas, <strong>de</strong> travail en<br />
commun entre le WG-AEN <strong>et</strong> Harmonoise, que la seule<br />
réunion que nous ayons pu avoir avec les membres du groupe<br />
Harmonoise s’était tenue au mois d’octobre (2004), alors<br />
que le travail technique s’était achevé en novembre. Par<br />
conséquent, il ne leur a pas été matériellement possible <strong>de</strong><br />
prendre en compte nos recommandations, notamment celles<br />
ayant trait à la réalité du terrain, qui veut que les données<br />
disponibles pour réaliser les cartes sont bien éloignées <strong>de</strong>s<br />
21 profils <strong>de</strong> trafics, <strong>de</strong>s 15 catégories <strong>de</strong> véhicules <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
tous les perfectionnements apportés dans le cadre<br />
d’Harmonoise. Il semble qu’il y ait là un besoin d’échanges<br />
afin <strong>de</strong> s’efforcer <strong>de</strong> faire coïnci<strong>de</strong>r l’outil très détaillé<br />
conçu dans le cadre d’Harmonoise <strong>et</strong> la réalité <strong>de</strong>s données<br />
du terrain. C’est au modèle <strong>de</strong> s’adapter aux données<br />
disponibles <strong>et</strong> non l’inverse car, sinon, soit les collectivités<br />
concernées <strong>de</strong>vront y m<strong>et</strong>tre <strong>de</strong>s moyens exorbitants, soit<br />
elles n’établiront pas <strong>de</strong> cartes car elles ne pourront obtenir<br />
les données <strong>de</strong>mandées dans <strong>de</strong>s conditions décentes.<br />
PAGE 118<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
À quoi bon cartographier les champs <strong>de</strong><br />
b<strong>et</strong>teraves ?<br />
Jean-Pierre Clairbois : Je voudrais proposer une métho<strong>de</strong><br />
encore plus simple que la vôtre : quand on a 200 km<br />
d’autoroute à étudier <strong>et</strong> que ce tronçon ne comporte que<br />
trois zones d’habitations, il est ridicule <strong>de</strong> vouloir étudier<br />
chacun <strong>de</strong>s 200 kilomètres. La métho<strong>de</strong> la plus rudimentaire<br />
qu’on ait utilisé <strong>de</strong>puis vingt ans, c’est la métho<strong>de</strong> du<br />
corridor : elle consiste à tracer un couloir <strong>de</strong> 600 mètres <strong>de</strong><br />
part <strong>et</strong> d’autres du tronçon <strong>de</strong> 200 km, à repérer les<br />
habitations situées dans le couloir, <strong>et</strong> à n’appliquer une<br />
métho<strong>de</strong> détaillée qu’aux zones comportant <strong>de</strong>s habitations.<br />
Il semble qu’il faudrait avoir l’autorisation <strong>de</strong> l’Europe pour<br />
ne pas avoir à réaliser <strong>de</strong> cartes dans <strong>de</strong>s zones exemptes<br />
d’habitations, dans une frange, par exemple, <strong>de</strong> 1 km <strong>de</strong><br />
part <strong>et</strong> d’autres d’une autoroute.<br />
Francis Besnard : Je ne peux qu’adhérer à c<strong>et</strong>te vision <strong>de</strong>s<br />
choses. Malheureusement, la directive exige <strong>de</strong> dénombrer<br />
les personnes <strong>et</strong> les logements exposés, mais également<br />
d’évaluer les surfaces exposées à un L <strong>de</strong>n supérieur à 55 dB.<br />
Quand bien même ce sont <strong>de</strong>s champs <strong>de</strong> b<strong>et</strong>teraves que<br />
vous avez cartographiés, il faut donner les superficies <strong>de</strong>s<br />
champs <strong>de</strong> b<strong>et</strong>teraves. C’est une logique qui m’échappe,<br />
mais les politiques l’ont adoptée.<br />
Précisions sur GIpSynoise<br />
Michel Vall<strong>et</strong> : On voit bien poindre la complexité, en rase<br />
campagne, avec ce qu’a présenté le S<strong>et</strong>ra. En ville, on<br />
suppose, qu’avec GIpSynoise, on n’échappera pas non plus à<br />
la complexité. Peut-on imaginer qu’une gran<strong>de</strong> collectivité<br />
resserre suffisamment ses services pour qu’ils contribuent<br />
ultérieurement à utiliser la même méthodologie<br />
d’établissement <strong>de</strong>s cartes pour évaluer les actions qui<br />
seraient envisagées par les politiques ? Autrement dit, peuton<br />
vraiment abandonner la précision du résultat au profit<br />
d’une approche consistant uniquement à comparer la même<br />
situation à <strong>de</strong>s années différentes ?<br />
Julie Vall<strong>et</strong> : Oui, c’est exactement ce que disait Francis<br />
Besnard : quand la cartographie est assez peu précise,<br />
l’objectif est <strong>de</strong> raisonner sur <strong>de</strong>s écarts. Nous proposons <strong>de</strong><br />
comparer <strong>de</strong>s scénarios entre eux : pour une zone donnée,<br />
avec un problème donné, nous proposons <strong>de</strong> réaliser <strong>de</strong>s<br />
simulations à gran<strong>de</strong> échelle. Il ne s’agit pas <strong>de</strong> simuler le<br />
bruit <strong>de</strong>vant chaque fenêtre, mais <strong>de</strong> pouvoir choisir entre<br />
plusieurs scénarios, plusieurs possibilités d’actions <strong>et</strong><br />
éventuellement, <strong>de</strong> les combiner. Ensuite, ce sont les<br />
écarts, les gains, qui serviront <strong>de</strong> levier pour la validation<br />
politique.<br />
Philippe Woloszyn (Cerma) : Dans GIpSynoise, il y a<br />
“noise”, mais il y a aussi “psy”. Or, la composante<br />
psychologique, la psychologie environnementale, semble peu<br />
visible dans le proj<strong>et</strong> GIpSynoise.<br />
Julie Vall<strong>et</strong> : La psychologie environnementale interviendra<br />
dans le choix <strong>de</strong>s indicateurs considérés pour établir les<br />
cartographies, dans les critères <strong>de</strong> choix <strong>et</strong> <strong>de</strong> comparaison.<br />
Je pense à la gêne sonore, aux perturbations du sommeil, à<br />
la population exposée. On peut aussi imaginer que l’outil SIG<br />
offrira la liberté d’appliquer d’autres couches <strong>de</strong> données <strong>de</strong><br />
nature sociale, <strong>de</strong> typage <strong>de</strong> zone, <strong>de</strong> typage <strong>de</strong> quartier.<br />
Jean-Laurent Simons (Institut bruxellois <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong><br />
l’environnement) : Ma question concerne également<br />
GIpSynoise. Quelle est la différence entre le logiciel <strong>de</strong><br />
prévision <strong>de</strong>s expositions acoustiques IMMI <strong>et</strong> GIpSynoise.<br />
Quels en sont les avantages <strong>et</strong> inconvénients ? Pourquoi avoir<br />
développé un logiciel alors que d’autres existent déjà ?<br />
Julie Vall<strong>et</strong> : Nous n’avons pas développé un nouveau<br />
logiciel. GIpSynoise s’appuie sur le moteur <strong>de</strong> calcul du bruit<br />
CadnaA, qui, il est vrai, est un concurrent d’IMMI. Ils servent<br />
les mêmes fonctions, mais il fallait bien choisir. Le<br />
partenaire technique est 01dB-M<strong>et</strong>ravib.<br />
Nécessité d’un banc d’essai <strong>de</strong>s logiciels<br />
intégrés <strong>de</strong> cartographie<br />
Sylvianne Boub<strong>et</strong> (mairie <strong>de</strong> Toulouse, urbanisme <strong>et</strong><br />
environnement) : Je pensais que le Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> bonne pratique<br />
<strong>de</strong> cartographie présenté par Nathalie Fürst comporterait un<br />
comparatif <strong>de</strong>s différents logiciels présents sur le marché.<br />
Mes connaissances s’arrêtent à la norme NF S 31-131 <strong>de</strong><br />
prévision du bruit <strong>de</strong>s transports terrestres, un <strong>de</strong>scriptif<br />
technique <strong>de</strong>s logiciels au moins aussi complexe que tous les<br />
détails présentés lors <strong>de</strong> l’atelier Harmonoise. Il serait<br />
appréciable <strong>de</strong> connaître les critères importants à prendre<br />
en compte dans le choix d’un logiciel.<br />
Nathalie Fürst : Il est prévu <strong>de</strong> publier <strong>de</strong>ux documents : le<br />
Gui<strong>de</strong> européen sur les bonnes pratiques <strong>de</strong> cartographie,<br />
qui s’intéresse quasiment exclusivement aux données<br />
d’entrée ; un document à vocation française c<strong>et</strong>te fois-ci,<br />
qui comprendra, effectivement, une partie consacrée aux<br />
outils disponibles pour réaliser les cartes <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong>, en<br />
particulier, <strong>de</strong>s éléments d’appréciation <strong>de</strong> ces logiciels. Ces<br />
éléments seront tirés d’une étu<strong>de</strong> réalisée par le CETE <strong>de</strong><br />
Lyon <strong>et</strong> financée par le ministère <strong>de</strong> l’Écologie <strong>et</strong> du<br />
Développement durable, qui vise justement à répertorier les<br />
outils existants <strong>et</strong> à évaluer s’ils sont adaptés à la mise en<br />
œuvre <strong>de</strong> la cartographie.<br />
À l’heure actuelle, il n’existe pas <strong>de</strong> dispositif <strong>de</strong><br />
certification <strong>de</strong>s outils. En France, la norme NF S 31-131,<br />
que vous avez citée, perm<strong>et</strong> à chaque maître d’ouvrage ou<br />
utilisateur d’exiger du diffuseur un dossier <strong>de</strong> présentation<br />
<strong>de</strong> ses logiciels dans lequel un certain nombre <strong>de</strong> critères<br />
doivent être décrits <strong>et</strong> explicités. Le Certu a également<br />
publié un catalogue <strong>de</strong>s logiciels <strong>de</strong> prévision du bruit<br />
existants sur le marché, panorama où figurent <strong>de</strong>s<br />
informations sur les métho<strong>de</strong>s mises en œuvre dans ces<br />
outils <strong>et</strong> leurs domaines d’application. Mais les informations<br />
contenues dans ce catalogue restent déclaratives <strong>et</strong> sont<br />
sous la responsabilité <strong>de</strong>s diffuseurs <strong>et</strong> <strong>de</strong>s fabricants<br />
d’écrans. Par conséquent, en France, il n’existe pas, à ce<br />
jour, <strong>de</strong> banc d’essai s’étant préoccupé d’évaluer <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
comparer les outils <strong>de</strong> cartographie.<br />
Évaluation du linéaire concerné par la<br />
directive : <strong>et</strong> le classement sonore ? Et les<br />
observatoires du bruit ?<br />
Laurent Droin (Acouphen environnement) : Pour répondre à<br />
Mme Boub<strong>et</strong>, je souhaiterais préciser qu’il existe un salon où<br />
les logiciels du marché sont présents, où vous pouvez obtenir<br />
<strong>de</strong>s démonstrations, mais ce n’est pas un avis comparatif.<br />
Une question pour Francis Besnard : pourquoi ne peut-on pas<br />
évaluer le linéaire <strong>de</strong> routes départementales <strong>et</strong> <strong>de</strong> voies<br />
communales concerné en France par la directive, alors que<br />
toutes ces voies sont supposées avoir été classées ?<br />
Francis Besnard : Parce qu’aucune centralisation <strong>de</strong>s<br />
données <strong>de</strong> trafics <strong>de</strong> ces voies n’a été effectuée pour<br />
l’instant. Quant aux données <strong>de</strong> classement, il y a <strong>de</strong>s<br />
intentions <strong>de</strong> centralisation mais, pour l’instant, cela n’a pas<br />
été fait <strong>et</strong> le classement sonore n’est malheureusement pas<br />
achevé. Enfin, <strong>de</strong>rnière raison, le classement sonore ne se<br />
base pas sur les mêmes seuils <strong>de</strong> trafic. Certes, <strong>de</strong>s<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 119
parallèles pourraient être tentés, en considérant un ou <strong>de</strong>ux<br />
départements, une ou <strong>de</strong>ux agglomérations, <strong>et</strong> en<br />
extrapolant à l’échelle <strong>de</strong> la France entière, mais la<br />
représentativité d’un tel raisonnement n’est pas évi<strong>de</strong>nte.<br />
D’un département à l’autre, les routes départementales<br />
peuvent présenter <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> fréquentation n<strong>et</strong>tement<br />
différents.<br />
Christine Arras (Acouphen) : Il serait dommage <strong>de</strong> ne pas<br />
tirer parti <strong>de</strong>s travaux menés dans les observatoires<br />
départementaux du bruit. Car ils ont <strong>de</strong>s préoccupations<br />
communes avec les collectivités chargées d’élaborer les<br />
cartes <strong>de</strong> bruit : même s’ils ne s’intéressent qu’aux axes très<br />
bruyants — les seuils considérés ne <strong>de</strong>scen<strong>de</strong>nt pas en <strong>de</strong>çà<br />
<strong>de</strong> 65 dB — ils utilisent les mêmes données <strong>de</strong> trafic <strong>et</strong><br />
appliquent <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s voisines <strong>de</strong> celle présentée par<br />
Francis Besnard. Les empreintes correspondantes ne sont pas<br />
<strong>de</strong> 600 mètres <strong>de</strong> part <strong>et</strong> d’autres <strong>de</strong> l’infrastructure, mais<br />
elles sont <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 300 mètres. En cas <strong>de</strong> topographies<br />
complexes, ils ont recours à <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s faisant appel à<br />
<strong>de</strong>s abaques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s profils type.<br />
Francis Besnard : Pour les routes interurbaines, il faudra<br />
établir ce lien, c’est évi<strong>de</strong>nt. Reste à imaginer les modalités<br />
<strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> toutes ces données. Mais avant cela, il<br />
faut que nous sachions quel type <strong>de</strong> cartes <strong>de</strong> bruit<br />
stratégiques nous voulons réaliser. Si la logique est similaire,<br />
la différence principale, loin d’être négligeable, rési<strong>de</strong> dans<br />
les distances concernées, qui sont liées aux seuils plus<br />
faibles <strong>de</strong> la directive. Ce sont ces seuils qui nous amènent à<br />
faire appel à une métho<strong>de</strong>, certes simplifiée, mais<br />
néanmoins plus complexe que celle utilisée par les<br />
observatoires du bruit. Nous prenons en compte la pente du<br />
terrain <strong>et</strong> le profil en travers <strong>de</strong> la route alors que les<br />
observatoires commencent par faire <strong>de</strong>s empreintes <strong>sonores</strong><br />
sur la base d’un cas standard.<br />
Nathalie Fürst : En tout état <strong>de</strong> cause, la démarche <strong>de</strong>s<br />
observatoires vise <strong>de</strong>s échéances plus courtes. Leurs plans<br />
d’action doivent être mis en œuvre avant ceux <strong>de</strong> la<br />
directive. Par ailleurs, sur un plan organisationnel, les<br />
structures <strong>et</strong> le travail en commun qui accompagnent la<br />
mise en place <strong>de</strong>s observatoires doivent aussi bénéficier à la<br />
mise en œuvre <strong>de</strong> la directive. Différents maîtres d’ouvrage<br />
auront à travailler ensemble, notamment, pour la mise en<br />
commun <strong>de</strong>s données. Donc, outre l’aspect technique, c<strong>et</strong>te<br />
organisation, c<strong>et</strong>te cohésion autour d’un même proj<strong>et</strong>, me<br />
semblent importantes à pérenniser.<br />
Daniel Pillant : Oui, en clair, le travail accompli par les<br />
observatoires ne sera pas perdu, il <strong>de</strong>vrait apporter sa<br />
contribution à la publication <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit<br />
stratégiques.<br />
Abordons maintenant la <strong>de</strong>uxième partie <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier,<br />
consacrée aux observatoires <strong>et</strong> à la surveillance. Mais avant<br />
cela, arrêtons-nous sur les enjeux <strong>de</strong> la concertation <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
communication avec le public.<br />
La concertation avec le public<br />
Laurent Droin (Acouphen Environnement)<br />
Acouphen Environnement est une société d’ingénierie<br />
conseil spécialisée dans le management <strong>de</strong> l’environnement<br />
sonore pour l’industrie <strong>et</strong> les collectivités.<br />
Je vais introduire c<strong>et</strong>te thématique <strong>de</strong> la concertation en<br />
l’abordant sous l’angle <strong>de</strong> la communication.<br />
Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’obligation réglementaire, la concertation<br />
recouvre <strong>de</strong>s intérêts stratégiques. Parmi ceux-ci, le fait<br />
d’impliquer les acteurs locaux dès le processus <strong>de</strong> diagnostic<br />
est une tactique classique perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> couper court à la<br />
posture consistant à refuser un proj<strong>et</strong> au prétexte <strong>de</strong> ne pas<br />
y avoir été associé. La concertation est un moyen <strong>de</strong> faire<br />
remonter <strong>de</strong>s informations utiles du « terrain », afin<br />
d’objectiver <strong>et</strong> <strong>de</strong> relativiser les situations. Ce <strong>de</strong>rnier point<br />
est capital : par la mesure notamment, on s’efforce<br />
d’objectiver <strong>de</strong>s débats souvent très subjectifs. C’est une<br />
façon <strong>de</strong> limiter les risques <strong>de</strong> blocage <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> d’en<br />
faciliter l’acceptation. La concertation perm<strong>et</strong> alors <strong>de</strong><br />
vali<strong>de</strong>r les choix d’actions par l’ensemble <strong>de</strong>s acteurs, avant<br />
que celles-ci soient entreprises.<br />
Place <strong>de</strong> la concertation dans la cartographie <strong>et</strong> la<br />
surveillance acoustique<br />
Pour illustrer la place particulière que tient la concertation<br />
par rapport aux <strong>de</strong>ux outils principaux qui font l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> c<strong>et</strong><br />
atelier, on peut représenter l’ensemble <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
problématique au moyen <strong>de</strong> trois axes formant un repère<br />
orthonormé : un axe correspondant aux activités <strong>et</strong> aux<br />
sources <strong>de</strong> bruit ; un axe représentant le territoire <strong>et</strong> la<br />
population ; un <strong>de</strong>rnier axe correspondant à la dimension<br />
temporelle, au temps.<br />
Dans le plan défini par les axes activités/sources <strong>et</strong><br />
territoire/population, le principal moyen d’action n’est<br />
autre que la cartographie. Des cartes, à l’échelle <strong>de</strong> grands<br />
territoires, représentant les sources <strong>de</strong> bruit <strong>et</strong> leurs eff<strong>et</strong>s,<br />
offrent une interprétation <strong>de</strong> données globales. C<strong>et</strong>te notion<br />
d’interprétation est essentielle : une carte <strong>de</strong> bruit n’est<br />
donc pas une photographie, comme on l’entend parfois. La<br />
vocation d’une cartographie est donc principalement<br />
informative, décisionnelle (au sens <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> à la décision) <strong>et</strong><br />
prospective, puisqu’elle sert d’appui à l’élaboration <strong>de</strong><br />
scénarios d’actions.<br />
Dans le plan formé par les axes activités/sources <strong>et</strong> temps,<br />
l’outil le plus pertinent est la surveillance acoustique qui,<br />
précisément, donne l’évolution dans le temps <strong>de</strong><br />
l’information. Qu’elle soit continue ou discontinue, la<br />
mesure <strong>de</strong>s ambiances <strong>sonores</strong> contribue à élaborer un<br />
référentiel <strong>de</strong> données objectives, dont l’usage est<br />
principalement pédagogique. C’est un fait avéré, le public<br />
comprend mieux les mesures que les modèles. La<br />
surveillance a aussi un rôle d’argumentaire <strong>et</strong>, plus<br />
précisément, un usage <strong>de</strong> responsabilisation. A l’instar <strong>de</strong>s<br />
radars placés le long <strong>de</strong>s routes, la mesure du bruit en<br />
continu perm<strong>et</strong> une surveillance qui a souvent son efficacité<br />
en termes <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s.<br />
Le plan défini par l’axe territoire/population <strong>et</strong> l’axe du<br />
temps est le règne <strong>de</strong> la concertation, registre plus<br />
qualitatif reposant sur le recueil <strong>et</strong> le partage<br />
d’informations, le débat.<br />
Cartographie, surveillance <strong>et</strong> concertation sont donc les trois<br />
leviers à mobiliser avec, bien évi<strong>de</strong>mment, <strong>de</strong>s niveaux<br />
d’utilisation adaptés au cas par cas, pour définir in fine <strong>de</strong>s<br />
plans d’action optimisés, validés par <strong>de</strong>s outils techniques <strong>et</strong><br />
par les personnes concernées.<br />
Modalités <strong>et</strong> outils <strong>de</strong> concertation<br />
Au cœur <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong> concertation, se trouve le débat<br />
public, avec un objectif d’information <strong>et</strong> d’action autour <strong>de</strong><br />
c<strong>et</strong>te finalité. Nous venons d’évoquer les moyens<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
quantitatifs que sont la mesure, la surveillance <strong>et</strong> la<br />
cartographie. La réunion publique, les comités <strong>de</strong> pilotage<br />
sont <strong>de</strong>s moyens plus qualitatifs. Le fonctionnement par<br />
comité <strong>de</strong> pilotage, sur une durée limitée ou <strong>de</strong> manière<br />
permanente, se prête bien à l’établissement <strong>de</strong> diagnostics,<br />
étayés par <strong>de</strong>s cartographies. Parmi les outils envisageables,<br />
on citera les enquêtes (d’utilité publique en cas <strong>de</strong> proj<strong>et</strong><br />
conséquent), les questionnaires, les expositions,<br />
l’information par voie <strong>de</strong> presse ou par Intern<strong>et</strong> <strong>et</strong> les<br />
observatoires du bruit, qui sont <strong>de</strong>s outils <strong>de</strong> concertation<br />
pertinents.<br />
Tous ces outils peuvent être mis en œuvre pour nourrir le<br />
débat public <strong>et</strong> porter l’information, mais sans un effort <strong>de</strong><br />
communication fourni par l’ensemble <strong>de</strong>s acteurs, aucun <strong>de</strong><br />
ces outils ne pourra remplir son rôle. De fait, la finalité <strong>de</strong><br />
toutes ces modalités <strong>de</strong> concertation, le débat <strong>de</strong> fond,<br />
reste souvent centré sur la pédagogie.<br />
Les enjeux <strong>de</strong> la communication<br />
Parmi les nombreuses vertus <strong>de</strong> la communication, j’en<br />
développerai trois. Tout d’abord, la communication incite à<br />
la prise en considération <strong>de</strong> l’environnement sonore au bon<br />
moment, le plus tôt possible donc, <strong>et</strong> à la bonne échelle<br />
(pays, région, département, agglomération, quartier, rue…).<br />
Deuxième bénéfice, la communication facilite le consensus<br />
sur les proj<strong>et</strong>s. Enfin, la communication perm<strong>et</strong> aussi <strong>de</strong><br />
valoriser les actions <strong>de</strong> progrès. Ce <strong>de</strong>rnier point a son<br />
importance : l’amélioration, ou la préservation, <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore a une valeur ; c’est c<strong>et</strong>te valeur sur<br />
laquelle il est important <strong>de</strong> communiquer <strong>et</strong> pas uniquement<br />
sur le coût du bruit. Pour illustrer ceci, je prendrai un<br />
exemple. Vous pouvez gagner quelques décibels en réalisant<br />
<strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> réduction du bruit ; votre gain, objectif, se<br />
traduit par quelques pourcents <strong>de</strong> personnes gênées en<br />
moins. D’un autre côté, avec le même gain en décibels, mais<br />
en vous appuyant sur une bonne communication, vous<br />
gagnerez quelques décibels, mais subjectifs c<strong>et</strong>te fois ;<br />
votre gain s’exprime alors en pourcentage <strong>de</strong> plaignants. C<strong>et</strong><br />
exemple quelque peu caricatural vient illustrer le fait que le<br />
taux <strong>de</strong> satisfaction globale est proportionnel au gain en<br />
décibels multiplié par la valorisation <strong>et</strong> les explications qui<br />
accompagnent ce gain. Dans c<strong>et</strong>te équation, apparaît bien le<br />
produit <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux termes : si l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux est nul, le résultat<br />
est nul. C<strong>et</strong>te logique est au cœur <strong>de</strong> la démarche <strong>de</strong><br />
concertation.<br />
Les freins à la communication<br />
Sans intention d’exhaustivité, mais plus pour lancer le<br />
débat, voyons quelques-uns <strong>de</strong>s freins à la communication.<br />
Le coût, le temps <strong>et</strong> la logistique sont à citer en premier<br />
lieu : organiser <strong>de</strong>s réunions avec <strong>de</strong> multiples acteurs n’a<br />
rien <strong>de</strong> simple. Un autre aspect, peut-être un peu<br />
provocateur, tient au fait que la démarche communicante<br />
ne fait pas partie <strong>de</strong> la tradition <strong>de</strong>s ingénieurs, qui ne sont<br />
pas réellement formés à c<strong>et</strong> exercice. Cela s’apprend sur le<br />
terrain. Autre point, fondamental, qui revient<br />
systématiquement : la crainte d’engendrer <strong>de</strong>s attentes, <strong>de</strong><br />
déclencher <strong>de</strong>s hypersensibilités sur les questions <strong>de</strong>s risques<br />
sur la santé, <strong>de</strong>s risques économiques, <strong>de</strong> dépréciation<br />
immobilière notamment, voire <strong>de</strong>s contentieux. Il faut<br />
m<strong>et</strong>tre en balance le risque <strong>de</strong> susciter <strong>de</strong>s plaintes <strong>et</strong> les<br />
bienfaits <strong>de</strong>s actions. Les incertitu<strong>de</strong>s sur le r<strong>et</strong>our sur<br />
investissement sont un autre frein fréquemment évoqué :<br />
communiquer coûte parfois cher <strong>et</strong> l’on ne sait pas ce que<br />
cela va rapporter ; en revanche, il faut aussi évaluer ce que<br />
l’absence <strong>de</strong> communication risque <strong>de</strong> coûter...<br />
Le frein majeur se situe probablement dans les difficultés <strong>de</strong><br />
la pédagogie sur le thème du bruit. Attention aux pièges <strong>de</strong>s<br />
décibels, aux indicateurs complexes, notamment aux<br />
indicateurs dosimétriques, qui sont très difficiles à expliquer<br />
à un public non connaisseur. Et puis, face à un suj<strong>et</strong><br />
éminemment subjectif, sur lequel les ressentis individuels<br />
sont forts, la sensibilité du public <strong>et</strong> le besoin <strong>de</strong><br />
comprendre compliquent l’exercice <strong>de</strong> pédagogie. Il en va<br />
<strong>de</strong> même <strong>de</strong>s contradictions entre souhaits légitimes<br />
d’intimité <strong>et</strong> <strong>de</strong> relations sociales. D’autant que l’aspect non<br />
linéaire <strong>de</strong> la relation entre bruit <strong>et</strong> gêne, ou <strong>de</strong> la relation<br />
entre dose <strong>et</strong> réponse, ajoute à la complexité <strong>de</strong> la posture.<br />
Pour prendre un exemple bien connu, quand on implante un<br />
tramway en centre-ville, le niveau <strong>de</strong> bruit du trafic routier<br />
baisse localement, ce qui peut se traduire par une<br />
émergence du bruit du tramway <strong>et</strong> occasionner davantage<br />
<strong>de</strong> plaintes, malgré l’amélioration « quantitative » <strong>de</strong><br />
l’ambiance sonore locale. C’est un cas lié à « l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
masque » du bruit qui vaut également pour d’autres<br />
contextes.<br />
Un autre frein tient à la forte transversalité politique, à la<br />
dilution <strong>de</strong>s responsabilités, même si la transposition <strong>de</strong> la<br />
directive <strong>de</strong>vrait clarifier les responsabilités en matière <strong>de</strong><br />
bruit. A mentionner également, la complexité inhérente aux<br />
spécificités <strong>de</strong>s diverses sources <strong>de</strong> bruit, aux contextes<br />
différents, complexité qui se r<strong>et</strong>rouve dans l’interprétation<br />
<strong>de</strong>s textes réglementaires, qui évoluent souvent, ce qui ne<br />
facilite évi<strong>de</strong>mment pas la communication. De plus,<br />
comparativement à d’autres formes <strong>de</strong> pollution<br />
environnementale, le bruit est une nuisance qui se propage<br />
relativement peu : excepté peut être pour le bruit <strong>de</strong>s<br />
avions, les problèmes sont assez localisés <strong>et</strong> leur traitement<br />
nécessite <strong>de</strong>s adaptations aux spécificités locales, au cas par<br />
cas. Ces difficultés peuvent engendrer, on le comprend,<br />
certaines réticences à s’engager dans un plan <strong>de</strong> prévention<br />
<strong>de</strong> bruit dans l’environnement à l’échelle d’un territoire.<br />
Ajoutons enfin le fait que l’on pense souvent — évi<strong>de</strong>mment<br />
à tort — qu’il sera toujours possible <strong>de</strong> s’occuper <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore lorsque les problèmes <strong>de</strong> bruit<br />
apparaîtront, puisque <strong>de</strong>s solutions curatives existent. C<strong>et</strong>te<br />
illusion <strong>de</strong> facilité nuit <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce à la motivation <strong>de</strong>s<br />
collectivités à communiquer en amont sur le suj<strong>et</strong>.<br />
Des pistes pour faciliter la communication<br />
Ni exhaustives, ni universelles, les quelques pistes que je<br />
propose ici sont plus <strong>de</strong>s suj<strong>et</strong>s <strong>de</strong> réflexion qui pourront<br />
contribuer à nourrir le débat dans la suite <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier.<br />
Tout d’abord, <strong>et</strong> c’est l’expert judiciaire en acoustique qui<br />
s’exprime c<strong>et</strong>te fois, il convient <strong>de</strong> s’appuyer sur la<br />
réglementation <strong>et</strong> non pas <strong>de</strong> se r<strong>et</strong>rancher <strong>de</strong>rrière elle. En<br />
eff<strong>et</strong>, en cas <strong>de</strong> litige, aux yeux <strong>de</strong>s tribunaux, la conformité<br />
n’est pas une garantie expresse <strong>de</strong> tranquillité, si bien que<br />
le jugement porte plutôt sur la gêne.<br />
Dans le contexte d’un proj<strong>et</strong>, il est opportun <strong>de</strong> désigner<br />
une “personne ressource” : on mobilisera par exemple un<br />
« numéro vert » ou on s’appuiera sur un « observatoire »,<br />
une ressource pertinente à l’échelon local. Autre élément à<br />
gar<strong>de</strong>r à l’esprit, il faut communiquer “juste ce qu’il faut”.<br />
Entre le matraquage, rare dans ce domaine, <strong>et</strong> l’absence <strong>de</strong><br />
communication, source <strong>de</strong> rumeurs ou <strong>de</strong> désinformation, se<br />
trouve le bon compromis. Bien sûr, on s’attachera à<br />
vulgariser le vocabulaire technique, à démystifier autant que<br />
possible, à expliquer le principe du niveau équivalent L Aeq ,<br />
<strong>de</strong>s indicateurs normalisés. Le L Aeq est souvent critiqué en<br />
tant qu’indicateur <strong>de</strong> gêne, mais il <strong>de</strong>meure un indicateur<br />
souvent pertinent : il faut bien insister sur le fait qu’il ne<br />
s’agit pas d’une simple « moyenne » — ce dont, fort<br />
justement, le public ne veut pas —, mais d’une gran<strong>de</strong>ur qui<br />
accor<strong>de</strong> un poids très important aux niveaux les plus forts.<br />
Concernant le L <strong>de</strong>n , nous disposons pour l’heure <strong>de</strong> peu <strong>de</strong><br />
r<strong>et</strong>ours sur les difficultés rencontrées dans son explication. Il<br />
semble néanmoins que le seul fait <strong>de</strong> préciser, sans<br />
forcément montrer la formule, que les sensibilités propres<br />
<strong>de</strong> la soirée <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nuit sont affectées <strong>de</strong> « pénalités » <strong>de</strong> 5<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 121
<strong>et</strong> 10 dB respectivement, contribue à ce que c<strong>et</strong> indicateur<br />
soit relativement bien perçu. Le discours sur les indicateurs<br />
ne doit pas évacuer la discussion sur la gêne, qui est<br />
incontournable. Les facteurs psycho-acoustiques, la<br />
pertinence <strong>de</strong>s indicateurs doivent donc appartenir au<br />
débat, mais on évitera en revanche les comparaisons<br />
douteuses avec certaines situations bruyantes. J’ai participé<br />
à <strong>de</strong>s réunions publiques où certains intervenants se sont<br />
risqués à indiquer, par exemple, qu’un train passant <strong>de</strong>vant<br />
une maison ne fait pas plus <strong>de</strong> bruit qu’un bébé qui pleure...<br />
Posture choquante qui, évi<strong>de</strong>mment, passe très mal, même<br />
si la comparaison est vraie sur le plan physique.<br />
Côté supports d’information, on privilégiera<br />
avantageusement le recours à <strong>de</strong>s supports à vision générale<br />
traitant aussi d’autres nuisances que le bruit, <strong>et</strong>, à l’inverse,<br />
il peut aussi y avoir un intérêt à personnaliser l’information,<br />
à apprécier les contextes particuliers. Sur le plan du<br />
discours, on évitera la confusion technique, la distance<br />
technocratique, ce qui requiert un effort notable <strong>de</strong><br />
pédagogie. Autre conseil : i<strong>de</strong>ntifier les interlocuteurs<br />
privilégiés, les lea<strong>de</strong>rs. Au risque <strong>de</strong> se voir taxer <strong>de</strong><br />
démagogie, il faut reconnaître qu’il vaut mieux s’adresser<br />
aux porte-parole d’un groupe. A ce titre, les observatoires<br />
locaux peuvent contribuer à faciliter les échanges. Que fautil<br />
d’autre ? De la diplomatie : maîtrises technique <strong>et</strong><br />
juridique sont insuffisantes sans une bonne dose <strong>de</strong> capacité<br />
d’écoute. D’une manière générale, on évitera le registre<br />
relationnel consistant à opposer le coupable à sa victime ou<br />
le bruiteur au bruité, postures qui conduisent en général au<br />
conflit. On anticipera par ailleurs toute contestation<br />
potentielle d’ordre technique en veillant à la rigueur<br />
d’exécution <strong>de</strong>s tâches techniques (respect <strong>de</strong>s normes,<br />
traçabilité <strong>de</strong> l’information). Ceci vaut pour la cartographie<br />
comme pour la mesure. Les “r<strong>et</strong>ours <strong>de</strong> flamme” sur <strong>de</strong>s<br />
détails techniques qui auraient été quelque peu simplifiés<br />
sont fréquents. Les simulations <strong>sonores</strong> <strong>de</strong> situations sorties<br />
<strong>de</strong> leur contexte sont un point sur lequel j’invite à observer<br />
la plus gran<strong>de</strong> pru<strong>de</strong>nce. La simulation « audio » peut être<br />
un complément d’information profitable dans certains cas,<br />
par exemple pour illustrer une amélioration relative, plus<br />
rarement pour décrire une situation virtuelle. Il est souvent<br />
préférable d’organiser une visite réelle sur un terrain préselectionné<br />
en fonction <strong>de</strong> ce que l’on veut « faire<br />
écouter ».<br />
Il faudra aussi assurer un suivi continu <strong>de</strong> l’information. Les<br />
outils <strong>de</strong> surveillance ou <strong>de</strong> reporting <strong>de</strong> données en temps<br />
réel peuvent contribuer à assurer un suivi continu <strong>de</strong><br />
l’information objective. Concernant la cartographie, il faut<br />
privilégier <strong>de</strong>s supports graphiques adaptés. A l’instar <strong>de</strong><br />
GIpSynoise, on s’orientera vers <strong>de</strong>s supports cartographiques<br />
variés <strong>et</strong> résolument ciblés sur chaque problématique, en<br />
s’interdisant la facilité <strong>de</strong> la seule carte <strong>de</strong> bruit pleine <strong>de</strong><br />
couleurs qui peut laisser libre cours à <strong>de</strong> nombreuses<br />
interprétations, voire à <strong>de</strong>s utilisations détournées. Le<br />
recours à <strong>de</strong>s supports multimédia <strong>et</strong> interactifs, y compris<br />
l’Intern<strong>et</strong>, peut être très efficace ; notamment pour faciliter<br />
le partage <strong>de</strong>s connaissances, dans un domaine où il n’y a,<br />
hélas, pas <strong>de</strong> règles universelles.<br />
La mise en place d’un observatoire du bruit, l’exemple du Val <strong>de</strong> Marne<br />
Piotr Gaudibert (Observatoire <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore du Val-<strong>de</strong>-Marne)<br />
Le département du Val-<strong>de</strong>-Marne est très bien « servi » en<br />
matière <strong>de</strong> bruit, qu’il s’agisse <strong>de</strong>s infrastructures <strong>de</strong><br />
transport terrestre ou <strong>de</strong>s activités aéroportuaires. Une<br />
enquête menée auprès <strong>de</strong> la population val-<strong>de</strong>-marnaise en<br />
2000 a placé le bruit au premier rang <strong>de</strong>s sources <strong>de</strong> gêne.<br />
Le conseil général développe, <strong>de</strong>puis 2000, une politique <strong>de</strong><br />
lutte contre le bruit qui repose sur plusieurs axes : une<br />
charte <strong>de</strong> l’environnement, la création d’un observatoire <strong>de</strong>s<br />
nuisances <strong>sonores</strong> (l’association ODES 94 que je représente<br />
aujourd’hui) <strong>et</strong> le financement d’étu<strong>de</strong>s sur le bruit ferré <strong>et</strong><br />
aérien ; la mise en place <strong>de</strong> protections acoustiques pour<br />
limiter les nuisances causées par les transports terrestres<br />
(voies ferrées, autoroutières) ; une ai<strong>de</strong> financière aux<br />
bailleurs sociaux qui réalisent <strong>de</strong>s travaux d‘isolation<br />
acoustique dans les logements anciens. Le CG94 s’est aussi<br />
fixé pour objectif <strong>de</strong> privilégier l’information du public.<br />
D’ailleurs, la vocation première <strong>de</strong> l’observatoire <strong>de</strong><br />
l’environnement sonore est <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre à disposition du public<br />
<strong>de</strong> la documentation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s informations à caractère local.<br />
Notre rayonnement départemental nous place dans un cadre<br />
privilégié pour interagir avec les communes, la DDASS, <strong>et</strong><br />
l’ensemble <strong>de</strong>s acteurs départementaux <strong>de</strong> la lutte contre le<br />
bruit. Nous avons ainsi édité un annuaire départemental <strong>de</strong>s<br />
acteurs <strong>de</strong> l’environnement sonore, <strong>et</strong> nous appuyons sur<br />
d’autres outils, comme un site Intern<strong>et</strong>. L’observatoire est<br />
bien entendu largement sollicité pour apporter une<br />
information relative aux problèmes <strong>de</strong> bruits <strong>de</strong> voisinage.<br />
Ce qui m’amène à parler <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> mission <strong>de</strong> l’O<strong>de</strong>s,<br />
qui n’est autre que la concertation. Nous avons par exemple<br />
mené une première expérience intéressante à travers la<br />
mise en place d’un groupe <strong>de</strong> travail sur le bruit <strong>de</strong>s avions.<br />
Il s’agissait, à l'occasion <strong>de</strong> la révision du plan <strong>de</strong> gêne<br />
sonore (PGS), d’engager un dialogue, sur une problématique<br />
précise, entre les autorités responsables <strong>de</strong> la plateforme<br />
aéroportuaire d'Orly <strong>et</strong> les riverains (communes <strong>et</strong><br />
associations). À l’issue d’une campagne <strong>de</strong> mesures<br />
orchestrée en concertation avec les riverains concernés, <strong>et</strong><br />
confiée à Laurent Droin, ici présent, la démarche a permis<br />
<strong>de</strong> déduire quelques éléments concr<strong>et</strong>s <strong>de</strong> nature à<br />
alimenter le débat relatif à la pertinence <strong>de</strong>s limites du PGS.<br />
Outre l’intérêt <strong>de</strong>s résultats, ce qui mérite d’être souligné,<br />
c’est que <strong>de</strong>s associations <strong>de</strong> riverains <strong>et</strong> <strong>de</strong>s représentants<br />
du laboratoire d’Aéroports <strong>de</strong> Paris se sont réunis pour<br />
discuter <strong>et</strong> échanger autour d’une problématique commune,<br />
<strong>et</strong> ce dans un vrai climat <strong>de</strong> concertation, facilité, je le<br />
crois, par la présence <strong>de</strong> l’observatoire. Nous envisageons<br />
d’élargir ce type d’expérience au bruit routier ou au bruit<br />
ferroviaire.<br />
Le troisième pan <strong>de</strong> l’activité <strong>de</strong> l’O<strong>de</strong>s correspond à son<br />
statut d’observatoire. Le principe d’une cartographie<br />
départementale est actuellement étudié par le conseil<br />
général. Son utilisation serait partagée avec l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
communes du département, l’O<strong>de</strong>s servant, justement, <strong>de</strong><br />
lieu <strong>de</strong> partage.<br />
Enfin, l’O<strong>de</strong>s a aussi pour mission <strong>de</strong> relayer les actions<br />
menées par les services publics ou les sociétés privées, <strong>de</strong><br />
faire connaître les recherches menées par les laboratoires,<br />
en s’adressant, c<strong>et</strong>te fois-ci, non plus au grand public, mais<br />
aux collectivités. Il nous semble important en eff<strong>et</strong> que<br />
soient valorisées certaines innovations technologiques,<br />
certains matériaux perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong> lutter contre le bruit.<br />
L’O<strong>de</strong>s 94 est une structure unique en son genre, ce qu’on<br />
peut regr<strong>et</strong>ter. Dans le contexte particulier <strong>de</strong> la création<br />
<strong>de</strong> BruitParif, une structure régionale, nous avons toujours<br />
l’espoir <strong>de</strong> voir se créer une fédération d’observatoires<br />
départementaux, c<strong>et</strong>te échelle géographique nous semblant<br />
pertinente pour l’établissement d’une cartographie du bruit.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
La concertation sur le bruit<br />
Jean-Marc Abramowitch (Sc<strong>et</strong>auroute)<br />
En tant qu’acousticien responsable <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s acoustiques<br />
au sein <strong>de</strong> Sc<strong>et</strong>auroute, l’un <strong>de</strong>s rôles qui me sont impartis,<br />
c’est <strong>de</strong> communiquer sur les proj<strong>et</strong>s dont la maîtrise<br />
d’œuvre nous est confiée, dans le domaine particulier qui<br />
est le mien, à savoir les infrastructures <strong>de</strong> transports<br />
linéaires. Il m’a été <strong>de</strong>mandé, dans le cadre <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atelier,<br />
<strong>de</strong> livrer en quelque sorte un bilan, <strong>de</strong> tirer une morale, <strong>de</strong><br />
vingt années <strong>de</strong> concertation avec le public.<br />
Le bruit n’est pas le seul enjeu.<br />
Dans l'Ouest <strong>de</strong> la France, Sc<strong>et</strong>auroute a du reprendre la<br />
communication avec les riverains d'un proj<strong>et</strong> autoroutier qui<br />
avait déjà connu un premier maître d'œuvre <strong>et</strong> une première<br />
concertation. Celle-ci s'était mal passée, le concessionnaire<br />
a changé, le maître d'œuvre également. Nous nous sommes<br />
donc lancés dans une nouvelle concertation. Concertation<br />
est un bien grand mot, mais la plupart du temps, nous nous<br />
bornons à faire <strong>de</strong> l’information. Car, pour se concerter, il<br />
faut être <strong>de</strong>ux. Si les riverains cherchent à être <strong>de</strong>ux autour<br />
<strong>de</strong> la table, c’est parce qu’ils ne se satisfont pas <strong>de</strong>s<br />
conditions d’information, qu’ils essaient d’aller plus loin. Et<br />
c’est là qu’il arrive que le processus bloque. Un autre<br />
problème auquel nous, acousticiens, sommes confrontés,<br />
c’est le peu <strong>de</strong> <strong>de</strong>grés <strong>de</strong> liberté dont nous disposons sur la<br />
manière <strong>de</strong> négocier avec les riverains sur le thème du bruit.<br />
Notre outil <strong>de</strong> base pour la concertation consiste en une vue<br />
en plan <strong>et</strong> un profil en long <strong>de</strong> l’infrastructure. Dans<br />
l’exemple que j'utilise pour illustrer mon propos, la présence<br />
d’un unique ouvrage hydraulique suffit à régir l’ensemble <strong>de</strong><br />
la géométrie du profil, pentes <strong>et</strong> courbures, <strong>de</strong> ce tronçon.<br />
Pourquoi ? Parce que, entre autres contraintes, la loi sur<br />
l’eau impose que l’infrastructure routière soit totalement<br />
transparente vis-à-vis du passage <strong>de</strong> l’eau. En d’autres<br />
termes, l’eau doit passer dans les terrains comme si<br />
l’infrastructure n’existait pas. Or, si l’on ne peut jouer sur<br />
le profil, alors que, chaque fois que possible, nous<br />
préconisons d’abaisser légèrement les profils en long, <strong>de</strong><br />
travailler sur les pentes <strong>et</strong> <strong>de</strong> jouer sur les eff<strong>et</strong>s <strong>de</strong> sol<br />
plutôt que d’introduire <strong>de</strong>s ouvrages constituant une<br />
intrusion visuelle forte, nous perdons là un pan important <strong>de</strong><br />
notre champ d’action. La seule marge <strong>de</strong> négociation<br />
restante va porter sur le choix d’une protection transparente<br />
ou opaque. Car si l’on replace le débat sur l’intrusion<br />
visuelle, sur le thème du paysage, on r<strong>et</strong>ombe sur les<br />
systèmes <strong>de</strong> buttes, <strong>de</strong> vallonnement, <strong>de</strong> profils en travers<br />
<strong>et</strong> nous tournons en rond. Une séance <strong>de</strong> concertation pour<br />
un proj<strong>et</strong> routier ne réunit pas que <strong>de</strong>s acousticiens, mais<br />
<strong>de</strong>s experts en faune, en pisciculture, en hydraulique <strong>et</strong><br />
d’autres spécialités encore. Notre proj<strong>et</strong> autoroutier a été<br />
bloqué pendant une année entière à cause d’une espèce<br />
protégée <strong>de</strong> scarabée, le pique-prune. Au cours d’une<br />
réunion <strong>de</strong> concertation avec l’ancien concessionnaire, une<br />
association <strong>de</strong> défense a réussi à démontrer que le<br />
morcellement du territoire lié au tracé autoroutier serait<br />
préjudiciable à l’habitat du pique-prune, non sur la preuve<br />
<strong>de</strong> sa présence, mais sur la possibilité que le pique-prune<br />
soit présent. C<strong>et</strong> exemple illustre bien la complexité <strong>de</strong><br />
l’aménagement d’une infrastructure <strong>et</strong> le peu <strong>de</strong> moyens<br />
dont nous disposons pour répondre aux attentes du public.<br />
Une concertation à sens unique, qui se limite le plus<br />
souvent à <strong>de</strong> l’information<br />
La principale difficulté que nous rencontrons dans notre<br />
pratique <strong>de</strong> la concertation, c’est dans le traitement <strong>de</strong>s<br />
objections à l’information que nous produisons, <strong>de</strong>s<br />
réactions face à nos tableaux <strong>de</strong> bord. Récemment, avec un<br />
maître d’ouvrage, au cours d’une séance <strong>de</strong> concertation,<br />
nous avons présenté, un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> résorption <strong>de</strong> points noirs<br />
du bruit. Deux heures durant, un maire, un député-maire <strong>et</strong><br />
un sénateur-maire représentant les trois communes<br />
concernées nous ont menacés, invectivés, au motif que le<br />
proj<strong>et</strong> était trop lent, trop p<strong>et</strong>it, <strong>et</strong>c. Lors du débriefing qui<br />
a suivi, nous étions plutôt satisfaits, compte tenu du fait que<br />
nous avions, finalement, évité le pire. Je cite c<strong>et</strong> exemple<br />
pour illustrer le fait que nous faisons plus <strong>de</strong> l’information<br />
que <strong>de</strong> la concertation, ou alors <strong>de</strong> la concertation à sens<br />
unique. La qualité <strong>de</strong> l’information produite en réaction aux<br />
objections importe relativement peu. Ce qui compte dans le<br />
processus d’information, c’est le fond <strong>et</strong> la forme <strong>de</strong> notre<br />
propos, la véracité <strong>et</strong> la crédibilité <strong>de</strong> notre discours ; en<br />
revanche, par la force <strong>de</strong>s choses, nous sommes<br />
malheureusement amenés à moins prendre en compte les<br />
objections <strong>et</strong> à ne pas jouer le jeu <strong>de</strong> la concertation.<br />
Vulgariser <strong>et</strong> dépassionner le débat<br />
Malgré tout, passé ce constat défaitiste, il y a quand même<br />
quelques points encourageants. Sur le plan <strong>de</strong> la<br />
vulgarisation <strong>de</strong>s connaissances, les acousticiens savent<br />
maintenant parler du bruit sans mentionner les décibels. A<br />
noter néanmoins que la simplification n’est pas compatible<br />
avec tous les contextes. Pour le proj<strong>et</strong> précé<strong>de</strong>nt, pour 128<br />
km <strong>de</strong> linéaire, 46 réunions <strong>de</strong> concertations, réparties sur<br />
six mois, ne réunissant jamais plus <strong>de</strong> 20 personnes, ont été<br />
nécessaires. Nous choisissons nos interlocuteurs, les<br />
rencontrons sur <strong>de</strong>s lieux les plus proches <strong>de</strong> leur habitation,<br />
dans les fermes, dans les annexes <strong>de</strong> mairies, <strong>et</strong> nous<br />
multiplions les contacts, nous efforçons <strong>de</strong> les personnaliser.<br />
A tel point qu’il arrive que nous tissions <strong>de</strong>s liens qui<br />
confinent à l’amitié avec les représentants <strong>de</strong>s associations.<br />
Une certaine connivence finit par se forger à force <strong>de</strong><br />
séances <strong>de</strong> concertation, ce qui optimise la communication,<br />
fait baisser le niveau d’agressivité <strong>de</strong>s riverains. Il est en<br />
eff<strong>et</strong> primordial <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> désamorcer les frustrations,<br />
facteur d’agressivité. Un exemple : la coordination Drôme-<br />
Vaucluse d’associations <strong>de</strong> riverains du TGV Méditerranée,<br />
sachant que le programme servant au calcul <strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong><br />
bruit équivalents avait été conçu par le CSTB, avait donné<br />
une définition édifiante du L Aeq : « Vous prenez un ingénieur<br />
du CSTB, vous le m<strong>et</strong>tez dans un fauteuil, vous lui donnez<br />
un immense coup <strong>de</strong> poing. N’ayez crainte, c’est<br />
exactement comme si vous lui aviez caressé la figure durant<br />
toute une journée ».<br />
La concertation sur les cartes stratégiques, il est vrai, ne<br />
<strong>de</strong>vrait pas susciter <strong>de</strong> tels problèmes d’agressivité chez les<br />
populations concernées.<br />
De l’utilité <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong> vue aériennes, <strong>de</strong>s vues 3D<br />
Il faut, à mon sens, encourager l’utilisation <strong>de</strong> moyens <strong>de</strong><br />
représentation graphique perm<strong>et</strong>tant au riverain <strong>de</strong> repérer<br />
à coup sûr son habitation, tels que les photos aériennes. Et<br />
ce même sur un linéaire <strong>de</strong> 128 kilomètres. Certes, nous<br />
disposons <strong>de</strong>s planches <strong>de</strong> type Mithra perm<strong>et</strong>tant <strong>de</strong><br />
comparer les niveaux <strong>de</strong> bruit “avant-après”. Mais nous nous<br />
efforçons d’y recourir le moins possible, car nous nous<br />
heurtons alors à la difficulté <strong>de</strong> faire adm<strong>et</strong>tre le progrès<br />
réel d’un gain <strong>de</strong> 2 décibels après protection. On sait en<br />
eff<strong>et</strong> que c’est à partir d’un écart <strong>de</strong> 2 dB que les individus<br />
commencent à exprimer <strong>de</strong> la satisfaction. C’est pourquoi,<br />
plutôt que <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> décibels, il peut s’avérer judicieux<br />
d’exprimer les résultats en nombre <strong>de</strong> fenêtres qui restent<br />
exposées à <strong>de</strong>s niveaux trop importants.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 123
Les simulateurs <strong>de</strong> paysage sonore <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt en eff<strong>et</strong> à<br />
être utilisés <strong>de</strong> façon appropriée. Il ne faut les utiliser que<br />
dans <strong>de</strong>s situations où le bruit existe déjà : il est impensable<br />
d’imaginer faire écouter son futur environnement sonore à<br />
un riverain qui a 40 dB aujourd’hui <strong>et</strong> qui, <strong>de</strong>main, aura<br />
“seulement” 55 dB la nuit. En revanche, sur <strong>de</strong>s sites points<br />
noirs du bruit, par exemple, les simulateurs "avant-après"<br />
fonctionnent bien. Enfin, les cartes en trois dimensions<br />
seront l’outil majeur <strong>de</strong> communication en matière <strong>de</strong><br />
cartographie européenne. Seule la tridimensionnalité<br />
perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> déterminer les ratios <strong>de</strong> population. Sans elle, on<br />
ne pourra appliquer la directive 2002/49/CE. Qui plus est, il<br />
existe maintenant <strong>de</strong>s logiciels qui perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong><br />
transformer ces données 3 D en vidéos.<br />
Des plans d’action vraiment concertés<br />
Pour ne pas rester sur le constat frustrant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te<br />
information “déguisée” en concertation, nous avons<br />
imaginé, avec quelques partenaires, d’instiller un peu<br />
d’utopie dans l’environnement. Nous avons ainsi déposé un<br />
dossier <strong>de</strong> candidature pour un financement Life, avec le<br />
conseil général <strong>de</strong> Seine-Saint-Denis comme chef <strong>de</strong> file,<br />
Prague, Lisbonne <strong>et</strong> Bruxelles comme villes pilotes, <strong>et</strong> le<br />
CIDB <strong>et</strong> 01dB-Métravib comme partenaires. Que proposonsnous<br />
? D’inverser le processus habituel <strong>de</strong> l’information.<br />
Qu’il s’agisse d’un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> linéaire routier, ou <strong>de</strong><br />
l’aménagement d’un carrefour en centre-ville, les calculs <strong>de</strong><br />
modélisation, d’étu<strong>de</strong> d’impact, sont longs. Tant <strong>et</strong> si bien<br />
que, lorsque les acousticiens chargés <strong>de</strong> la maîtrise d’œuvre<br />
viennent présenter le proj<strong>et</strong> aux riverains, hermétiques à<br />
l’idée d’en reprendre pour six mois <strong>de</strong> calculs, ils restent<br />
arc-boutés sur leur proj<strong>et</strong>. La marge <strong>de</strong> manœuvre <strong>de</strong><br />
concertation est alors considérablement réduite. C’est<br />
pourquoi nous proposons une autre logique <strong>de</strong><br />
fonctionnement, qui peut se résumer par le déroulement<br />
suivant : créer <strong>de</strong> l’information ; rassembler les acteurs ;<br />
m<strong>et</strong>tre l’information à disposition <strong>de</strong> tous ; vulgariser<br />
l’information ; ai<strong>de</strong>r à l’apparition <strong>de</strong> solutions ;<br />
transm<strong>et</strong>tre le résultat au maître d’œuvre.<br />
En d’autres termes, l’approche consiste à constituer <strong>de</strong>s<br />
p<strong>et</strong>its groupes <strong>de</strong> travail composés <strong>de</strong> représentants <strong>de</strong><br />
riverains <strong>et</strong> éventuellement d’un élu local, puis, à former<br />
ces groupes à l’acoustique, <strong>et</strong> à leur m<strong>et</strong>tre à disposition les<br />
cartes européennes. Les cartes ne sont qu’une indication<br />
pour l’élaboration <strong>de</strong>s plans d’action. Ce sont <strong>de</strong>s valeurs<br />
figées dans le temps. En cela, elles ne constituent que <strong>de</strong>s<br />
pistes possibles d’action. La où la démarche correspond<br />
vraiment à <strong>de</strong> la concertation, c’est lorsqu’on <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux<br />
riverains <strong>de</strong> réfléchir, <strong>de</strong> désigner les sites où <strong>de</strong>s mesures<br />
acoustiques complémentaires leur semblent légitimes, afin<br />
<strong>de</strong> compléter les cartes. Après cela, on forme les riverains,<br />
au moyen d’outils experts. Il existe plusieurs <strong>de</strong> ces outils,<br />
le laboratoire <strong>de</strong>s Ponts <strong>et</strong> Chaussées <strong>de</strong> Blois, avec<br />
M. Mériel, en avait concrétisé un. Finalement, ce sont les<br />
groupes <strong>de</strong> travail qui définissent les solutions qui sont<br />
ensuite confiées aux techniciens <strong>de</strong>s services centraux ou<br />
délocalisés en charge <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s.<br />
Le principe <strong>de</strong> participation<br />
Pierre Schmeltz (Association <strong>de</strong>s acousticiens<br />
<strong>de</strong> l’environnement)<br />
Aujourd’hui, <strong>de</strong> plus en plus, le citoyen a le désir <strong>de</strong><br />
participer aux processus décisionnels, d’être associé à toutes<br />
décisions susceptibles d’avoir une inci<strong>de</strong>nce sur son<br />
environnement. En matière d’environnement, faut-il le<br />
rappeler, le cinquième grand principe est le principe <strong>de</strong><br />
participation-information, duquel découlent toutes les<br />
notions <strong>de</strong> débat public, <strong>de</strong> concertation <strong>et</strong> d’information.<br />
Qui plus est, ce que veut le citoyen, c’est d’être rassuré sur<br />
son avenir. Il veut donc être associé aux décisions très en<br />
amont <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s. Mais là se pose la question <strong>de</strong> définir c<strong>et</strong><br />
amont. Quand commencer à associer le grand public aux<br />
décisions ? Question difficile. Soit les pouvoirs publics s’y<br />
prennent très tôt <strong>et</strong> on leur reproche un manque <strong>de</strong><br />
précision, soit ils ont déjà une ébauche <strong>de</strong> proj<strong>et</strong> abouti, <strong>et</strong><br />
on leur reproche alors d’avoir trop fermé la porte aux<br />
propositions.<br />
En matière <strong>de</strong> débat public, <strong>de</strong> concertation, il est essentiel<br />
<strong>de</strong> se m<strong>et</strong>tre dans la peau du public. Ceci réclame que nous<br />
changions nos pratiques, car le principe <strong>de</strong> participation<br />
implique un processus <strong>de</strong> co-décision. Or, la co-décision<br />
relève d’une culture que tous, élus ou fonctionnaires, ne<br />
sont pas prêts à adopter. Dans un passé récent, les routes ou<br />
les autoroutes étaient construites “à l’avancement”, <strong>et</strong> cela<br />
fonctionnait. Aujourd’hui, les proj<strong>et</strong>s rencontrent davantage<br />
d’oppositions, en particulier à cause d’une méfiance<br />
grandissante du public envers les déci<strong>de</strong>urs, <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’émergence d’une volonté d’être associés aux décisions. Les<br />
découpages administratifs — les proj<strong>et</strong>s sont souvent scindés<br />
d’une région à une autre, voire d’un département à un autre<br />
—, les processus d’approbation sont <strong>de</strong> plus en plus lourds.<br />
La création d’une roca<strong>de</strong>, par exemple, se traduit par une<br />
transformation complète du processus <strong>de</strong> circulation <strong>de</strong><br />
toute une aire géographique. Or, trop souvent, le processus<br />
<strong>de</strong> concertation n’implique que les populations concernées<br />
au premier chef. Si bien que d’autres, découvrant un beau<br />
jour qu’ils subissent les répercussions du proj<strong>et</strong>, mécontents<br />
<strong>de</strong> ne pas avoir été associés à la démarche assez tôt,<br />
entament une contestation. C’est une opposition qui relève<br />
davantage du principe, du processus, que du proj<strong>et</strong> en luimême.<br />
Avant tout, ce qui est contesté, dans les proj<strong>et</strong>s<br />
routiers, c’est l’incompréhension liée à l’usage systématique<br />
<strong>de</strong> l’outil informatique, qui rend les résultats contestables.<br />
Il faut donc se m<strong>et</strong>tre à la place du public <strong>et</strong> faire un effort<br />
<strong>de</strong> lisibilité <strong>de</strong>s données. Par ailleurs, il convient aussi<br />
d’accepter, parmi les options possibles, celle qui<br />
consisterait à ne rien faire. La participation, c’est aussi<br />
savoir renoncer à un proj<strong>et</strong>. Car, quand la population<br />
conteste un proj<strong>et</strong>, c’est peut-être parce que le proj<strong>et</strong> n’est<br />
pas bon, ou n’est pas mûr.<br />
Il y a un droit désormais imprescriptible vis-à-vis du citoyen,<br />
en vertu duquel le maître d’ouvrage doit prendre toutes les<br />
dispositions pour respecter ce droit. Quel est le texte qui<br />
porte en germe l’ensemble <strong>de</strong> ce processus ? La convention<br />
d’Aarhus sur l'accès à l'information, la participation du<br />
public au processus décisionnel <strong>et</strong> l'accès à la justice en<br />
matière d'environnement, qui a été approuvée en 1998 <strong>et</strong><br />
ratifiée par la France au début <strong>de</strong>s années 2000. À première<br />
vue, c<strong>et</strong>te convention ne s’applique qu’aux grands proj<strong>et</strong>s<br />
industriels <strong>et</strong> aux grands proj<strong>et</strong>s routiers, mais en réalité,<br />
elle s’applique à tout. Dès lors qu’une réglementation locale<br />
impose une étu<strong>de</strong> d’impact ou la participation du public, on<br />
tombe sous le coup <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te charte.<br />
Autre conséquence importante <strong>de</strong> la convention d’Aarhus, il<br />
faut informer le public <strong>de</strong> son droit à contestation <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
moyens juridiques qui sont à sa disposition. Ensuite, figure<br />
également une obligation <strong>de</strong> moyens — <strong>de</strong> fournir tous les<br />
documents que l’on possè<strong>de</strong> sous quelle que forme que ce<br />
soit, les documents secr<strong>et</strong> défense exceptés —, <strong>et</strong> une<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
obligation <strong>de</strong> délai <strong>de</strong> réponse minimum. Il faut également<br />
mentionner l’obligation <strong>de</strong> débat, Sans oublier une<br />
obligation importante, celle <strong>de</strong> motiver toutes les décisions.<br />
Je vous laisse imaginer la difficulté qu’il y a à expliciter<br />
l’utilité publique d’un proj<strong>et</strong>, surtout quand on va faire fi <strong>de</strong><br />
la contestation. Conclusion ? Il faut bien gar<strong>de</strong>r à l’esprit,<br />
qu’à l’avenir, les maîtres d’ouvrage vont avoir à expliquer<br />
<strong>de</strong> plus en plus leurs décisions en matière d’aménagement.<br />
Débat<br />
Comment diffuser les résultats <strong>de</strong>s cartes ?<br />
Catherine Serve : Je souhaiterais faire remonter à nos<br />
ministères l’information suivante. Nous finalisons<br />
actuellement <strong>de</strong>s gui<strong>de</strong>s d’ai<strong>de</strong> à l’établissement <strong>de</strong>s cartes<br />
en milieu urbain, <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s simplifiées adaptées à<br />
l’interurbain, mais aucun groupe <strong>de</strong> travail n’a été mis en<br />
place pour, d’une part, réfléchir à la diffusion dans le<br />
domaine public <strong>de</strong>s informations qui vont découler <strong>de</strong><br />
l’application <strong>de</strong> la directive, <strong>et</strong>, d’autre part, définir les<br />
modalités pratiques <strong>de</strong> concertation <strong>et</strong> <strong>de</strong> participation du<br />
public. Nous, les ingénieurs chargés <strong>de</strong> la gestion du bruit,<br />
n’avons pas appris à faire <strong>de</strong> la communication, ni à faire <strong>de</strong><br />
la concertation. C’est sans doute une lacune dans notre<br />
formation, mais nous ne sommes pas prêts à assumer toutes<br />
ces responsabilités sans recommandations ministérielles.<br />
Daniel Pillant : Nous n’avons pas abordé le suj<strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
surveillance. Que fait-on <strong>de</strong>s résultats ? Quelles sont les<br />
suites, quels plans d’action ? Ce suj<strong>et</strong> pourrait faire l’obj<strong>et</strong><br />
d’un colloque à lui seul.<br />
Quel statut juridique pour les cartes ?<br />
Richard Durang (laboratoire <strong>de</strong> l’Est parisien) : J’aurais<br />
souhaité avoir une précision sur le statut juridique <strong>de</strong>s<br />
cartes <strong>de</strong> bruit, étant donné qu’elles sont établies avec <strong>de</strong>s<br />
indicateurs qui, pour le moment ne font pas partie <strong>de</strong> la<br />
réglementation ? Également, quels sont les recours possibles<br />
<strong>de</strong>s particuliers vis-à-vis <strong>de</strong> ces cartes stratégiques ?<br />
Jean-Marc Abramowitch : Il n’y aura pas <strong>de</strong> recours parce<br />
que les cartes ne sont pas opposables aux tiers.<br />
Didier Cattenoz (ministère <strong>de</strong> l’Écologie) : Je confirme : les<br />
cartes ne seront pas opposables ; elles seront entièrement<br />
<strong>de</strong> la responsabilité <strong>de</strong> ceux qui les élaborent. Ce qui signifie<br />
qu’une personne qui n’est pas d’accord avec une carte<br />
n’aura pas beaucoup <strong>de</strong> recours possibles à faire valoir.<br />
Daniel Pillant : On attend donc l’évolution du droit <strong>et</strong> <strong>de</strong> la<br />
jurispru<strong>de</strong>nce sur ce suj<strong>et</strong> précis.<br />
Didier Cattenoz : La stratégie <strong>de</strong> la Commission européenne<br />
est, tout <strong>de</strong> même, que toutes ces informations <strong>de</strong>viennent<br />
un jour <strong>de</strong>scriptives. La première phase est une phase<br />
d’entraînement : on commence, on voit ce que l’on peut<br />
faire <strong>et</strong> puis l’on fait évoluer le dispositif.<br />
Laurent Droin : À ma connaissance, les cartes <strong>de</strong> bruit<br />
stratégiques sont un outil d’investigation technique pour les<br />
experts, qu’il convient d’exploiter <strong>et</strong> <strong>de</strong> transformer en<br />
outils d’ai<strong>de</strong> à la décision pour les déci<strong>de</strong>urs. La directive<br />
n’exige pas la publication <strong>de</strong>s cartes <strong>de</strong> bruit, elle exige <strong>de</strong><br />
publier l’information, sous forme <strong>de</strong> tableaux,<br />
d’histogrammes, <strong>de</strong> camemberts ou autre. Selon ma<br />
compréhension <strong>de</strong> la directive, la carte <strong>de</strong> bruit, au sens du<br />
résultat d’un calcul, est un outil d’investigation<br />
intermédiaire.<br />
Catherine Serve : C’est faux, la directive précise qu’il n’est<br />
pas obligatoire <strong>de</strong> produire <strong>de</strong> carte <strong>de</strong> bruit en tant que<br />
résultat, mais une <strong>de</strong>s annexes stipule bien, pour les<br />
agglomérations, qu’une cartographie du bruit doit être<br />
publiée. Même s’il faut attendre la mise à jour <strong>de</strong><br />
l’ordonnance <strong>de</strong> transposition, tout semble indiquer que les<br />
cartes <strong>de</strong> bruit seront reconnues par les décr<strong>et</strong>s <strong>et</strong> arrêtés<br />
qui suivront l’ordonnance. Elles ne seront en revanche pas<br />
incluses dans la loi bruit. Cela ne simplifie pas, comme je le<br />
disais à l’instant, notre travail d’information <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
concertation. C’est là où <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> nous serait utile. Mais, les<br />
cartes <strong>de</strong> bruit, au moins en agglomération, doivent être<br />
publiées.<br />
La concertation : le bruit n’est pas le seul<br />
enjeu en cause<br />
Pierre Schmeltz : Je souhaitais ajouter un mot sur<br />
l’obligation <strong>de</strong> résultat, que les acousticiens connaissent<br />
bien. Dans le domaine <strong>de</strong> la concertation, on est prisonniers<br />
<strong>de</strong>s promesses que l’on fait. La Direction <strong>de</strong>s routes avait<br />
d’ailleurs mis en place <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong> suivi afin d’évaluer la<br />
réalisation <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s promesses. Dans un proj<strong>et</strong>, il<br />
est difficile d’isoler une obligation environnementale<br />
particulière, tant les enjeux sont multiples : loi sur l’eau,<br />
protection <strong>de</strong> la faune <strong>et</strong> <strong>de</strong> la flore, déch<strong>et</strong>s, bruit. Malgré<br />
c<strong>et</strong>te complexité, il ne faut pas m<strong>et</strong>tre en avant la<br />
réglementation, mais il ne faut pas non plus opposer le seul<br />
coût pour refuser une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> formulée par les riverains. Il<br />
n’est qu’à considérer l’exemple du Val <strong>de</strong> Saône, où, après<br />
la mise en service du TGV Paris-Lyon, la SNCF a dû m<strong>et</strong>tre<br />
en œuvre le proj<strong>et</strong> qu’elle avait refusé aux riverains, cinq<br />
ou sept ans auparavant, au motif que le proj<strong>et</strong> était trop<br />
cher. L’argument “ça coûte trop cher” est un argument<br />
massue que l’on reçoit en général par eff<strong>et</strong> boomerang !<br />
Sylvianne Boub<strong>et</strong> : Au niveau <strong>de</strong> la concertation sur le<br />
proj<strong>et</strong> évoqué par M. Abramowitch, y a-t-il eu beaucoup <strong>de</strong><br />
modifications <strong>de</strong>mandées par les riverains par rapport au<br />
proj<strong>et</strong> initial ?<br />
Jean-Marc Abramowitch : Oui, mais il ne faut pas imaginer<br />
que ces modifications sont intervenues sur un seul thème. Je<br />
veux dire en cela qu’il n’a pas été question d’implanter un<br />
mur <strong>de</strong> 3 mètres là où 2 mètres suffisaient. En réalité, les<br />
mesures d’accompagnement ont circulé d’un domaine à<br />
l’autre : en caricaturant quelque peu, l’on a échangé un<br />
sentier <strong>de</strong> randonnée contre un remembrement, un<br />
remembrement contre une butte, une butte contre la<br />
protection d’une p<strong>et</strong>ite fleur. Cela pose d’ailleurs le<br />
problème du dialogue entre les différents spécialistes, <strong>de</strong><br />
l’arbitrage entre les différents enjeux d’environnement. Ce<br />
qui a permis au proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> passer, sans guillem<strong>et</strong>s, c’est la<br />
capacité <strong>de</strong>s personnes en charge <strong>de</strong> la (<strong>de</strong>uxième)<br />
concertation à organiser <strong>de</strong>s “échanges <strong>de</strong> bons procédés”<br />
entre les différentes disciplines, soit le paysage, le bruit <strong>et</strong><br />
l’eau. Un élément clé également : le remembrement, qui<br />
est indissociable <strong>de</strong>s proj<strong>et</strong>s d’infrastructure linéaire, a été<br />
réalisé au moment <strong>de</strong> la concertation. Nous avons pour cela<br />
obligé les ingénieurs <strong>de</strong>s domaines en charge du<br />
remembrement à assister aux 48 réunions <strong>de</strong> concertation.<br />
Cela n’a pas plus à tout le mon<strong>de</strong>, mais c<strong>et</strong>te permanence<br />
<strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s interlocuteurs a été capitale.<br />
Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005 PAGE 125
Allocution <strong>de</strong> clôture<br />
François Leleu, maire adjoint d'Avignon, chargé <strong>de</strong> l'environnement<br />
Ma conclusion est celle d’un élu local. Je constate que la<br />
problématique <strong>de</strong>s nuisances <strong>sonores</strong> est désormais<br />
considérée non seulement sous son versant environnemental<br />
mais <strong>de</strong> plus en plus sous celui <strong>de</strong> la protection <strong>de</strong> la santé.<br />
Vue sous c<strong>et</strong> angle <strong>de</strong> la santé publique, la problématique du<br />
bruit <strong>de</strong>vrait faire partie intégrante <strong>de</strong> toute politique<br />
environnementale digne <strong>de</strong> ce nom. Je m’adresse ici à un<br />
public <strong>de</strong> convaincus, mais vous savez les résistances qu’il y<br />
a à se donner les moyens d’améliorer l’environnement <strong>de</strong><br />
nos concitoyens. Or, à l’heure actuelle, la protection <strong>de</strong> la<br />
santé me semble l’enjeu le plus à même <strong>de</strong> faire évoluer les<br />
mentalités. Par ailleurs, il semble aussi que <strong>de</strong>ux leviers<br />
puissants, au niveau local, peuvent être actionnés afin<br />
d’intégrer la problématique du bruit en amont, au niveau<br />
<strong>de</strong>s investissements. Car, pour prendre l’exemple <strong>de</strong> la<br />
nouvelle ligne du TGV sud-est, malgré les efforts déployés<br />
par RFF <strong>et</strong> SNCF, il n’en reste pas moins que <strong>de</strong>s riverains,<br />
du jour au len<strong>de</strong>main, se sont r<strong>et</strong>rouvés avec une voie<br />
nouvelle qui a complètement modifié leur environnement.<br />
Le premier <strong>de</strong> ces leviers, me semble-t-il, est à trouver du<br />
côté <strong>de</strong>s plans <strong>de</strong> déplacements urbains. Sur ce suj<strong>et</strong>, je<br />
m’associe aux intervenants qui ont tenu à préciser que ces<br />
plans ne <strong>de</strong>vaient pas servir à déplacer les problèmes <strong>de</strong><br />
bruit d’une zone à une autre, mais qu’il s’agissait <strong>de</strong> réels<br />
plans <strong>de</strong> réduction <strong>de</strong> la circulation. J’en parle en<br />
connaissance <strong>de</strong> cause, puisque la communauté<br />
d’agglomération d’Avignon révise actuellement son PDU. Ces<br />
exemples me font hélas constater que nous avons pris un<br />
certain r<strong>et</strong>ard par rapport à certaines villes faisant figure <strong>de</strong><br />
précurseurs. Le PDU doit donc contribuer à ce que le<br />
transfert modal s’effectue <strong>de</strong> la voiture individuelle vers les<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> transports alternatifs au sens large.<br />
Le <strong>de</strong>uxième levier me semble être le plan local<br />
d’urbanisme <strong>et</strong> la démarche <strong>de</strong> Haute qualité<br />
environnementale. En tenant compte <strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong>s<br />
zones à urbaniser dans un contexte environnemental<br />
favorable, en se souciant <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s matériaux utilisés<br />
dans les constructions, on fait <strong>de</strong> la vraie prévention pour<br />
une vraie qualité <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s citoyens. J’ai pu constater avec<br />
satisfaction qu’un certain nombre d’entreprises françaises —<br />
l’une d’entre elles a d’ailleurs installé son siège social en<br />
Avignon, c’est Lafarge, sans vouloir leur faire <strong>de</strong> publicité —<br />
fournissent d’importants efforts dans le domaine <strong>de</strong><br />
l’amélioration <strong>de</strong> la qualité acoustique <strong>de</strong> l’habitat.<br />
Mon souhait serait que, progressivement, les adjoints à<br />
l’environnement <strong>de</strong>viennent inutiles. Constatant avec<br />
bonheur à quel point la prise en compte <strong>de</strong>s données<br />
environnementales imprègne progressivement toutes les<br />
décisions, je crois c<strong>et</strong>te tendance inexorable. À tel point<br />
qu’on peut imaginer, qu’un jour, le ministère chargé <strong>de</strong><br />
l’environnement n’ait plus d’utilité. Alors, qu’à l’heure<br />
actuelle, il est encore trop souvent perçu comme un<br />
empêcheur <strong>de</strong> tourner en rond.<br />
En attendant ce jour-là, qui n’est malheureusement pas<br />
encore venu, je clôture ce colloque en souhaitant que votre<br />
séjour avignonnais vous ait pleinement satisfait, en espérant<br />
que vous ayez pu goûter la quiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la ville d’Avignon <strong>et</strong><br />
en vous remerciant pour votre présence fort nombreuse qui<br />
fut un honneur pour notre ville.<br />
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Actes <strong>de</strong>s 4 es Assises <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 <strong>et</strong> 20 janvier 2005
L’organisation <strong>de</strong>s 4 es assises nationales <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> l’environnement<br />
sonore, ainsi que l’édition <strong>de</strong>s actes, a été confiée au :<br />
<strong>Centre</strong> d’information <strong>et</strong> <strong>de</strong> documentation sur le bruit<br />
12-14 rue Jules Bourdais – 75017 Paris<br />
tél : 01 47 64 64 64 – fax : 01 47 64 64 63<br />
cidb@cidb.org – www.bruit.fr<br />
Transcription, réécriture, traduction : Philippe Strauss<br />
Directeur <strong>de</strong> la publication : Jean-Clau<strong>de</strong> Antonini<br />
Dépôt légal : 3 e trimestre 2005<br />
ISSN : 0755 4397<br />
Impression : Delcambre