Nuisances sonores aéroportuaires - Centre d'information et de ...

Séance plénière
Des politiques nationales fondées sur
l'analyse des coûts et bénéfices
Séance présidée par François Leleu, maire adjoint d’Avignon, chargé de l’environnement
Modérateur : Jean-Pierre Gualezzi, vice-Président du CIDB
Stratégie globale de maîtrise du bruit routier au Danemark
Brian Kristensen (Danish environmental
agency)
La stratégie de maîtrise du bruit routier menée au Danemark
depuis 2003 est résolument ancrée dans une approche de
“rentabilité” des actions. Prenant appui sur une estimation
du coût de la réduction du bruit, cette initiative exerce une
analyse socioéconomique afin de déduire les outils de
réduction du bruit routier présentant le meilleur rapport
coût/efficacité.
Le contexte
Ces vingt dernières années, le volume du trafic routier n’a
pas été réduit au Danemark. Les progrès les plus marquants
en bordure des habitations existantes ont été le fait du
réseau routier national. Lors de la construction de nouvelles
routes, ou l’extension de routes existantes en zone urbaine,
des ressources substantielles ont été allouées à la réduction
du bruit, typiquement, à hauteur de 10% du coût de
l’infrastructure ou des travaux d’extension. Ces efforts
déployés par les pouvoirs publics durant ces 15 ou 20
dernières années ont permis qu’aucun nouveau logement
nouvellement construit ne soit exposé à un niveau sonore
excédant 55 dB(A) : en effet, aucune zone résidentielle
nouvelle ne peut être construite là où le bruit routier
dépasse ce seuil. Ainsi, depuis les années 80, 300 000
logements ont été construits en prenant en compte les
nuisances sonores. Grâce à ces mesures, l’ampleur du
problème a pu être stabilisé, mais 700 000 logements
restent exposés à des niveaux sonores excédant 55 dB(A), et
150 000 d’entre eux sont même exposés à des niveaux
excédant 65 dB(A). Plus de 90 % des habitations exposées au
bruit routier sont situées le long de routes municipales.
Face à ce constat, le gouvernement danois a lancé en 2003
une stratégie nationale de réduction du bruit, qui a vu le
jour grâce aux efforts conjoints de six ministères, le
ministère de l’environnement s’étant chargé de recueillir et
de coordonner les différentes contributions. Dans un premier
temps, il s’est agi d’analyser les mesures pouvant être prises
pour traiter cette problématique. L’analyse a débouché sur
la formulation de dix initiatives spécifiques destinées à aider
les collectivités territoriales à organiser leurs efforts de
lutte contre le bruit, dans une démarche de maîtrise des
coûts.
Évaluation économique de la réduction du bruit
Selon l’OMS, l’exposition chronique au bruit du trafic routier
peut avoir des répercussions sur la santé, liées au stress
principalement. Dans le cadre de la stratégie de lutte contre
le bruit routier, une revue de la littérature internationale a
été commanditée afin de tenter d’évaluer le coût des effets
du bruit routier sur la santé. On ne dispose à l’heure
actuelle d’aucune preuve formelle d’un effet significatif du
bruit sur la santé, mais, néanmoins, les spécialistes
s’accordent pour admettre qu’il existe des relations entre le
bruit routier et l’incidence d’hypertension et de maladies
cardiovasculaires. Plusieurs facteurs interviennent bien
évidemment dans le développement de telles maladies, mais
la littérature rapporte que l’exposition au bruit routier peut
induire un risque accru de développer ces affections. Sur la
base de cette analyse, il a été estimé que entre 200 et 500
Danois meurent prématurément chaque année
d’hypertension ou de maladie cardiaque liée à une
exposition chronique au bruit du trafic routier. La
monétarisation du coût social annuel de ces 200 à 500 décès
prématurés est estimée à 0,5 milliard d’euros.
Pour évaluer le coût de la gêne, le gouvernement danois
s’est basé sur une étude des prix de l’immobilier menée au
printemps 2003 par l’Agence de protection de
l’environnement danoise. Cette étude indique que les biens
immobiliers subissent une décote de 1% pour chaque décibel
de trafic routier supplémentaire. À noter que ce chiffre
concerne les logements tant individuels que collectifs (tout
porte à croire que la décote pour les seuls logements
collectifs serait inférieure). À partir de cette estimation de
la dépréciation immobilière due au bruit routier, la valeur
monétaire annuelle attribuée à la gêne induite par le bruit
routier au Danemark a été estimée à 0,7 milliard d’euros.
Au total, le coût social annuel du bruit routier, tenant
compte à la fois des effets sur la santé et de la dépréciation
immobilière, est donc estimé à 1,2 milliard d’euros. Le coût
correspondant à l’inaction est donc conséquent.
Les mesures de réduction du bruit les plus rentables
Dans l’esprit d’efficacité économique insufflé par la
stratégie danoise de réduction du bruit, il importait que les
futures initiatives de réduction du bruit offrent le meilleur
rapport entre les sommes dépensées et les progrès
environnementaux accomplis. Une analyse coûts-avantages
des diverses solutions de réduction du bruit a donc été
entreprise. Les calculs des économistes révèlent que, dans
bien des cas, le coût des mesures de réduction du bruit reste
inférieur au bénéfice pour la communauté que constituent le
revalorisation des logements et la baisse des maladies et des
décès imputés à l’exposition au bruit.
Quelles sont donc les mesures de réduction du bruit les plus
rentables ? S’il est un enseignement à tirer de l’analyse
socioéconomique menée par le gouvernement danois, c’est
que c’est rentable de réduire le bruit ! En effet, la plupart
des outils, d’un point de vue socioéconomique, donnent un
résultat positif. Seules deux solutions sont à éviter :
l’utilisation généralisée des écrans acoustiques et des
limitations de vitesse.
Actes des 4 es Assises de la qualité de l’environnement sonore — Avignon — 18, 19 et 20 janvier 2005 PAGE 33