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ARMOIRES ALSACIENNES - Revue des sciences sociales

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<strong>ARMOIRES</strong><br />

<strong>ALSACIENNES</strong><br />

Marie-Noële<br />

DENIS<br />

Chargée de recherche C.N.R.S.<br />

Laboratoire de sociologie Régionale.<br />

A Armoire à une porte 1834, région d'Obernai<br />

(Valff) : meuble en sapin polychrome<br />

avec serrure et fiches en fer. Corniche rectiligne,<br />

moulurée et décorée d'une frise<br />

peinte en crème. Faux montants arrondis<br />

décorés d'une étoile rouge et jaune et d'un<br />

panneau peint en rouge encadré de vert.<br />

Traverse supérieure décorée au centre d'une<br />

tulipe encadrée, de part et d'autre par les<br />

2 chiffres d'une date (1834). Porte droite,<br />

moulurée à deux panneaux droits décorés<br />

d'un losange à rebord bleu azur inscrit dans<br />

un carré, au centre un vase avec bouquet<br />

trilobé. L'armoire est coupée en deux dans<br />

le sens vertical, socle et corniche compris,<br />

et assemblée à clavettes.<br />

(1) Se rapporter pour la définition de ces termes<br />

à l'introduction de Jean Cuisenier.<br />

Biblio n ° J.<br />

(2) Georges Klein. Biblio n° 6 et 7.<br />

Plus que tout autre meuble traditionnel,<br />

l'armoire est étrangère au monde<br />

rural et s'inspire de modèles urbains.<br />

Elle n'apparaît à la campagne qu'au<br />

XVIII e<br />

siècle et se réfère aux chefsd'œuvre<br />

de maîtrise mis au point à<br />

Strasbourg, Colmar et dans les petites<br />

villes.<br />

Elle acquiert néanmoins une certaine<br />

originalité du fait de la mo<strong>des</strong>tie de sa<br />

facture, due, au moins jusqu'à la Révolution,<br />

au travail <strong>des</strong> menuisiers clan<strong>des</strong>tins<br />

et itinérants. Ceux-ci copient les<br />

chefs-d'ceuvres urbains mais utilisent<br />

<strong>des</strong> bois, <strong>des</strong> techniques structurales et<br />

décoratives plus économiques. Leur<br />

clientèle croît peu à peu avec le développement<br />

de l'aisance dans les campagnes.<br />

Le terme générique d'«armoire» désigne<br />

<strong>des</strong> meubles de genres (1) ou au<br />

moins d'usages différents. Nous ne<br />

retiendront dans cette étude que la <strong>des</strong>cription<br />

de l'armoire <strong>des</strong> pièces d'habitation,<br />

contenant du linge ou <strong>des</strong> vêtements,<br />

pour traiter plus tard de<br />

l'armoire de cuisine, souvent très spécifique<br />

(2), et d'autres meubles contenants<br />

liés à l'alimentation : armoire à<br />

lait, armoire à farine.<br />

I. La manière dont on fait<br />

les armoires.<br />

1. LE BOIS : l'armoire de ville, de tradition<br />

germanique, est en Alsace construite<br />

en sapin, plaqué de bois plus<br />

nobles et de marqueterie. Au XVIII e<br />

siècle, l'influence française impose les<br />

bois massif durs tels que le chêne, et<br />

surtout le noyer.<br />

A la campagne, jusqu'au milieu du<br />

XIX e<br />

siècle, le sapin subsiste. Il représente<br />

60,6 % du bois qui constitue les<br />

armoires (tableau n° 1). Puis vient le<br />

chêne, surtout vosgien (28,7 %), qui<br />

diminue d'importance au cours du siècle<br />

(28,7 à 12,2% de 1820 à 1850) au<br />

profit du noyer (8,8% à 24,5%).<br />

L'usage <strong>des</strong> bois fruitiers est résiduel et<br />

la campagne maintient, dans l'ensemble,<br />

une tradition de meubles mo<strong>des</strong>tes.<br />

Tableau n° 1 : le bois <strong>des</strong> armoires.<br />

sapin noyer chêne fruitier<br />

Total<br />

tôt % tôt % tôt % tôt %<br />

1820 80 47 58,8 7 8,8 23 28,7 3 3,7<br />

1850 90 56 62,2 22 24,5 11 12,2 1 1,1<br />

Total 170 103 60,6 29 17 34 20 4 2,4<br />

2. LA TECHNIQUE DU MONTAGE :<br />

les techniques de montage combinent à<br />

la fois les mo<strong>des</strong> typiquement alsaciennes<br />

et les usages français. Les portes<br />

sont généralement montées à panneaux,<br />

ajustés à rainures et languettes dans leur<br />

cadre. Le corps, démontable, est constitué<br />

de deux coffres debout, accolés,<br />

que l'on sépare et emboîte l'un dans<br />

l'autre pour le transport. Le dos se brise<br />

dans le sens de la hauteur, en deux par-


(3) Georges Klein, biblio n" 7.<br />

(4) Cf. Jean Cuisenier, biblio. n" 1.<br />

(5) Le terme «armoire» désigne en effet au 16 e<br />

siècle un meuble à 4 portes superposées 2<br />

à 2 à usages multiples qui se place en général<br />

dans les corridors et les entrées.<br />

(F. Lévy - Coblentz, biblio n ° 8). Ce type<br />

de meuble confirme les remarques de<br />

D. Gluck (biblio n° 4 et 5) et l'étymologie<br />

proposée par A. Tarbouriech du terme<br />

«limande» qui désigne l'armoire gersoise et<br />

serait dérivé de «allemande» (D. Gluck,<br />

biblio n" 5).<br />

<strong>des</strong> assemblées à rainures et languettes.<br />

Le plancher et le plafond se détachent<br />

aussi en deux parties maintenues par<br />

<strong>des</strong> clefs de bois ou «clavettes». En<br />

îapde, te Wip WmpWft M fôïïlu<br />

vertical ou «faux-montant» solidaire<br />

<strong>des</strong> flancs de l'armoire, faits de planches<br />

verticales ou de panneaux avec<br />

bâti, et assemblés en queue d'aronde ou<br />

cloués. Les cadres du socle et de la corniche<br />

peuvent être d'une seule pièce<br />

pour consolider l'ensemble par emboîtement,<br />

ou coupés en leur milieu.<br />

3. LES DÉCORS POLYCHROMES:<br />

Bon nombre d'armoires rurales restent<br />

fidèles au sapin, bois tendre et ligneux<br />

qui se prête mal aux sculptures complexes,<br />

aux placages trop coûteux.<br />

Aussi les décors sont-ils le plus souvent<br />

peints, à l'imitation de motifs<br />

urbains. Ils assortissent l'ensemble du<br />

mobilier de la mariée : coffre, chaises,<br />

armoire, buffet. Au XVII e<br />

siècle, il<br />

s'agit de <strong>des</strong>sins au pochoir, noir de<br />

fumée sur fond brun, ombré au sang de<br />

bœuf ; <strong>des</strong>sins géométriques mais aussi<br />

entrelacs, silhouettes animales et<br />

humaines qui reprennent les décors<br />

baroques. Au XVIII e<br />

siècle, apparaissent<br />

les armoires polychromes. Le fond<br />

est peint en vert, bleu ou brun, les moulures<br />

de la corniche et <strong>des</strong> panneaux<br />

soulignées de couleurs contrastées. Les<br />

panneaux eux-mêmes sont décorés de<br />

paysages naïfs, avec personnages, puis,<br />

plus tard, de vases fleuris.<br />

Dans le Sud, du fait dit-on de<br />

l'influence du Tyrol par l'intermédiaire<br />

de la maison <strong>des</strong> Habsbourg, les armoires<br />

sont peintes en bleu turquoise.<br />

Au XIX e<br />

siècle, on peu distinguer au<br />

moins le style dit «de Gottesheim» qui<br />

s'est répandu dans tout le pays de<br />

Hanau et entre Obermodern et<br />

Saverne(3). Les panneaux sont décorés<br />

de losanges peints en vert sur fond brun<br />

pommelé et garni au centre d'une<br />

rosace, puis d'un bouquet stylisé.<br />

L'ensemble est décoré de rinceaux<br />

blanc crème.<br />

Ces armoires peintes, fort répandues<br />

dans les musées, semblent par contre<br />

plutôt rares dans les intérieurs paysans.<br />

II. Les types.(4)<br />

Le terme «armoire» peut désigner <strong>des</strong><br />

meubles différents et il n'y a pas de rapport<br />

cohérent entre forme et fonction.<br />

Aussi notre typologie, pour être objective,<br />

se fondera-t-elle sur la forme et le<br />

système décoratif afférent. Les armoires<br />

rurales comportent en majorité deux<br />

battants et, de ce fait, sont qualifiées<br />

de «gran<strong>des</strong>».<br />

Tableau n° 2 : structure <strong>des</strong> armoires.<br />

Nombre de battants ou volets :<br />

1 b. 2 b. 3 b. 4 b. 2 tiroirs à clefs<br />

1820 19 37 2 4 11 14<br />

1850 9 46 — — 8 6<br />

Total 28 73 2 4 19 20<br />

peintes<br />

5<br />

7<br />

12<br />

brun<br />

verni<br />

gris<br />

bleu<br />

vert<br />

Il existe aussi de «petites armoires» à<br />

un battant qui ne se distinguent pas,<br />

sauf par leurs dimensions, <strong>des</strong> premières,<br />

et quelques armoires à quatre battants<br />

et deux corps superposés qui rappellent<br />

le chef-d'œuvre de maîtrise de<br />

Strasbourg au XVI e<br />

siècle (5). Dans<br />

l'ensemble, et malgré les chevauchements,<br />

les mélanges de styles et les<br />

retards <strong>des</strong> modèles ruraux, par rapport<br />

aux fabrications urbaines, il est possible<br />

d'élaborer une typologie <strong>des</strong> armoires<br />

rurales qui correspond, en gros, à<br />

leur émergence chronologique.<br />

A. Les armoires à colonnes : Bien que<br />

rares à la campagne, les armoires à 7,<br />

3 ou 2 colonnes existent au début du<br />

XVIII e<br />

siècle dans quelques familles<br />

fortunées du vignoble. De taille imposante<br />

(217 X 170 X 70 cm par exemple),<br />

elles se composent de trois parties :<br />

un socle en saillie qui repose sur 4 à 6<br />

pieds tournés et qui sert de<br />

-38-


support aux colonnes, un étage médian<br />

ouvrant à deux battants et une corniche<br />

souvent décorée au centre d'un cartouche<br />

portant la date de fabrication du<br />

meuble.<br />

© Armoire à 1 porte et 4 colonnes en sapin et<br />

marqueterie, datée de 1665 Ammerschwihr<br />

(Ht-Rhin). Col. particulière. Corniche rectiligne,<br />

moulurée, décorée. Faux-montants<br />

décorés de marqueterie géométrique et doublés<br />

de colonnes annelées à chapiteau dorique.<br />

Porte décorée d'une fenêtre à fronton<br />

sculpté de feuilles d'acanthes, colonnes<br />

annelées et appui. Socle avec tiroir. Pieds<br />

boules, entrée de serrure, poignées et fiches<br />

en fer.<br />

© Armoire à 3 colonnes en noyer et chêne<br />

datée de 1724. Ammerschwihr (Ht-Rhin)<br />

coll. particulière. Corniche rectiligne et<br />

moulurée décorée de fleurs et de cordelettes<br />

à glands sculptées. Montants doublés de<br />

colonnes annelées surmontées d'une pomme<br />

de pin. Portes droites à deux panneaux en<br />

ronce de noyer décorées de sculptures barroques<br />

en feuilles d'acanthe. Socle décoré<br />

et pieds boules. 240 x 145 x 060.<br />

© Détail du décor de l'armoire précédente.<br />

Date incrustée en marqueterie.<br />

©<br />

Le décor de l'armoire à 7 colonnes,<br />

chef-d'œuvre <strong>des</strong> menuisiers de Strasbourg,<br />

est inspiré de l'architecture. Très<br />

stéréotypé, il se compose de trois colonnes<br />

annelées qui cachent les montants<br />

et s'appuient sur le socle. Quatre autres,<br />

plus petites, cantonnent les fausses<br />

fenêtres qui décorent les deux battants.<br />

Celles-ci sont décorées d'un fronton et<br />

d'un appui sculptés de têtes d'anges et<br />

de motifs auriculaires. Têtes de lions,<br />

feuilles d'acanthe, <strong>des</strong>sins de marqueterie<br />

garnissent montants et traverses.<br />

Le corps de l'armoire est en sapin et les<br />

panneaux, les éléments du décor sont<br />

plaqués ou rapportés.<br />

L'armoire à trois colonnes, chefd'œuvre<br />

<strong>des</strong> menuisiers de Saverne,<br />

moins massive, est une version économique<br />

de la première. Les montants<br />

sont doublés de trois colonnes annelées<br />

ou torses, et chacun <strong>des</strong> deux battants<br />

décoré d'un panneau rectangulaire en<br />

©<br />

relief ou de fenêtres à crossettes. Un<br />

mo<strong>des</strong>te décor sculpté de fleurs et de<br />

fruits ponctue la corniche. L'armoire à<br />

deux colonnes latérales, encore plus<br />

simple, comporte souvent un décor<br />

peint sur les deux portes.<br />

-39-


sin». Les faux-montants décorés de<br />

pilastres ou d'une moulure circulaire<br />

rappellent les colonnes de modèles antérieurs.<br />

Le placage en noyer de ces<br />

armoires, contruites en sapin, représente<br />

une prouesse <strong>des</strong> techniques de<br />

presse et de collage.<br />

© Armoire à 3 colonnes en noyer du XVII e siècle.<br />

Ammerschwihr (Ht-Rhin) coll. particulière.<br />

Corniche rectiligne, moulurée, décorée<br />

de têtes d'anges et de grappes de fruits.<br />

Montants doublés de colonnes torses avec<br />

chapiteau dorique et décorés de cannelures<br />

sculptées. Portes à deux panneaux en coussin<br />

encadrés de cannelures. Socles avec cartouches<br />

en relief soulignés de cannelures. 6<br />

pieds boules. Entrées de serrure et fiches en<br />

fer. 230 x 202 x 065.<br />

© Armoire en chêne de la fin du XVII e siècle.<br />

Ammerschwihr (Ht-Rhin) Coll. particulière.<br />

Corniche rectiligne et moulurée en surplomb.<br />

Montants à angles droits avec moulure<br />

fortement dégagée imitant une colonne.<br />

Portes droites à panneaux moulurées décorés<br />

de coussins. Socle mouluré et pieds boules.<br />

Entrée de serrure en cuivre.<br />

© Armoire à 1 porte en sapin. Schillersdorf<br />

(Bas-Rhin) Coll. particulière. Corniche rectiligne<br />

et moulurée. Montants à moulure très<br />

incurvée imitant une colonne. Porte droite<br />

à 2 panneaux moulurés. Pieds chantournés.<br />

Entrée de serrure et fiches «queue de<br />

cochon» en fer.<br />

B. Les armoires à panneaux: Tout<br />

aussi somptueuses, elles ont succédé<br />

aux armoires à colonnes. Elles se caractérisent<br />

par un socle et une corniche<br />

profondément moulurés et deux panneaux<br />

décorés d'un motif à crossettes<br />

ou d'une forme en relief appelée «cous-<br />

©<br />

©<br />

C. L'armoire «française» du 18 e siècle :<br />

Dès le milieu du 18 e<br />

siècle, les paysans<br />

fortunés, attentifs aux changements <strong>des</strong><br />

mo<strong>des</strong> urbaines, adoptent les armoires<br />

de style Louis XV, introduites à Strasbourg<br />

et Colmar par les menuisiers<br />

français. De gran<strong>des</strong> dimensions (217 x<br />

163 x 54), et conçues en bois massif, en<br />

particulier en noyer, elles se distinguent<br />

<strong>des</strong> modèles précédents par une décoration<br />

plus discrète, rarement sculptée,<br />

mais plus souvent due à la forme <strong>des</strong><br />

panneaux et <strong>des</strong> moulures.<br />

Elles comportent une corniche et un<br />

socle moulurés, reposant sur quatre<br />

pieds tournés, deux portes à panneaux<br />

fermant sur un faux-dormant. Les ferrures<br />

en cuivre, à charnières visibles, en<br />

lacet, les serrures, du même métal, participent<br />

aussi à la décoration<br />

d'ensemble.<br />

-40-


B Armoire en sapin polychrome datée de<br />

1819. Musée d'Unterlinden, Colmar. Corniche<br />

cintrée en «chapeau de gendarme»<br />

moulurée, peinte en vert et rouge avec pilastre<br />

au sommet. Montants arrondis, moulurés<br />

et peints d'une frise de fleurs peintes en<br />

rouge, vert et beige. La traverse supérieure,<br />

cintrée porte une inscription peinte (Sigmund<br />

Ropp. Catharina Danhart, 1819). Les<br />

deux portes sont cintrées, à vrai dormant<br />

décoré d'une frise de fleurs peintes en rouge<br />

et vert sur fond beige. Ces portes ont trois<br />

panneaux, moulurés encadrés de vert et<br />

décorés de bouquets rouge et vert sur fond<br />

vert clair. Le panneau médian comporte <strong>des</strong><br />

croisillons peints en rouge sur fond beige.<br />

Les fiches en fer sont dites à «queue de<br />

cochon».<br />

B<br />

On peut distinguer les armoires à corniche<br />

rectiligne avec deux, trois ou plusieurs<br />

panneaux. Ceux-ci peuvent être<br />

droits, bastionnés ou compartimentés.<br />

Le panneau supérieur est souvent semichantourné.<br />

Les armoires à corniche<br />

chantournée dite «chapeau de gendarme»<br />

comportent aussi un panneau<br />

supérieur semi-chantourné qui épouse<br />

la courbe de la corniche. Quand il y a<br />

trois panneaux superposés, le panneau<br />

central, plus petit, peut être arrondi en<br />

cercle, ovale, rognon ou même en<br />

forme de cœur.<br />

® Armoire en chêne du XV1IP siècle. Obernai<br />

(Bas-Rhin) Coll. particulière. Corniche<br />

moulurée et cintrée en «chapeau de gendarme»<br />

terminée par <strong>des</strong> chapiteaux. Traverse<br />

sup. cintrée et moulurée. Montants<br />

arrondis et sculptés. Portes cintrées à deux<br />

panneaux aux coins arrondis. Dormant<br />

sculpté. Entrées de serrures et fiches en<br />

cuivre.<br />

® Détail du décor supérieur du dormant de<br />

l'armoire précédente. Tête de singe sculptée<br />

de stype baroque.<br />

© Armoire du XVIII e siècle en chêne. Haguenau<br />

(Bas-Rhin) Coll. particulière. Corniche<br />

moulurée et cintrée en «chapeau de gendarme»,<br />

terminée par <strong>des</strong> chapiteaux. Traverse<br />

sup. cintrée. Montants arrondis et<br />

moulurés. Portes cintrées à panneaux complexes.<br />

Dormant décoré. Pieds tournés. Serrures<br />

<strong>des</strong> portes et fiches en cuivre.<br />

®<br />

©<br />

-41-


Les armoires vosgiennes de ce type<br />

constituent une variante (6) car leur traverse<br />

inférieure est garnie de «deux<br />

tiroirs fermant à clef» (7) où l'on cache<br />

les trésors de la maison : Vijoux, dentelles,<br />

papiers de famille.<br />

D. L'armoire Louis-Philippe : Le XIX e<br />

siècle, plus prospère, voit se répandre<br />

à la campagne un modèle issu à la fois<br />

<strong>des</strong> derniers chefs-d'œuvre de l'Ancien<br />

Régime et <strong>des</strong> styles «Empire» et «Restauration».<br />

Il s'agit d'une armoire en<br />

bois dur, le plus souvent en noyer, à<br />

corniche droite, moulurée, à montants<br />

en pilastres coiffés d'un chapiteau, à<br />

deux battants garnis de deux ou trois<br />

panneaux droits décorés de ronce de<br />

noyer. Dans le pays de Hanau on<br />

trouve quelquefois, marquetée au<br />

milieu du panneau central, une étoile<br />

qui rappelle les décors polychromes.<br />

® Armoire en sapin de la fin du XVIII e siècle.<br />

Orbey (Ht Rhin). Musée paysan. Corniche<br />

rectiligne et moulurée. Montants<br />

chanfreinés et moulurés. Traverses droites.<br />

La traverse inférieure comporte deux<br />

tiroirs. Portes à 3 panneaux droits ou<br />

mixtes.<br />

L'armoire est coupée en deux dans le sens<br />

longitudinal et assemblée à clavettes.<br />

Entrées de serrure et fiches en fer forgé.<br />

Intérieur du même meuble. Armoire penderie<br />

d'un côté et armoire à linge avec étagères<br />

de l'autre.<br />

@<br />

Armoire en noyer de style Louis-Philippe.<br />

Schillersdorf (Bas-Rhin) Collection particulière.<br />

Corniche rectiligne moulurée avec<br />

chapiteaux. Socle symétrique. Montants<br />

arrondis. Portes droites à trois panneaux<br />

décorés de ronce de noyer. Entrées de serrure<br />

et fiches en cuivre.<br />

(6) Cf. Jean Cuisenier, bibtio n" I<br />

(7) Termes employés dans les actes notariés. ©<br />

-42-


Armoire en noyer décorée de marqueterie.<br />

XIX e<br />

siècle. Schillersdorf (Bas-Rhin)<br />

Coll. particulière. Corniche rectiligne<br />

moulurée, décorée de marqueterie et d'une<br />

frise sculptée de perles. Traverses rectilignes.<br />

Montants arrondis terminés par un<br />

pilastre. Portes droites garnies de trois<br />

panneaux décorés au centre d'étoiles en<br />

marqueterie. Socle et pieds boules. Ferrures<br />

<strong>des</strong> portes et fiches en fer.<br />

Armoire en noyer de Quatzenheim (Bas-<br />

Rhin) XIX e<br />

siècle. Corniche rectiligne et<br />

moulurée. Montants arrondis. 2 portes<br />

droites, moulurées, à faux-dormant, composées<br />

de 3 panneaux droits décorés de<br />

loupe de noyer. Ferrures en cuivre.<br />

(8) Cette étude quantitative a été réalisée à<br />

partir de l'analyse d'un échantillon de 154<br />

inventaires après décès, en 1820 et 1850,<br />

répartis dans 8 étu<strong>des</strong> notariales <strong>des</strong> différentes<br />

régions d'Alsace.<br />

(9) J.M. Boehler, biblio n° 2<br />

(10) Si l'on compare quand cela est possible les<br />

prix <strong>des</strong> meubles évalués par le notaire et<br />

leur coût effectif lors de ventes aux enchères,<br />

on se rend compte que l'homme de<br />

loi sous-estimait systématiquement la<br />

valeur <strong>des</strong> objets qu'il inventoriait.<br />

C<br />

III. L'armoire dans la<br />

maison. (8)<br />

1. Le nombre d'armoires dans la maison<br />

: Les armoires sont peu nombreuses<br />

à la campagne au XVIII e siècle (9).<br />

Au siècle suivant, les actes notariés en<br />

comptent 1,56 par famille et ce nombre<br />

n'évolue pas entre 1820 et 1850.<br />

Tableau n° 3 : nombre d'armoires par<br />

famille.<br />

Nbre d'armoires Nbre de famille Nbre moyen<br />

d'armoires<br />

par famille<br />

1820 108 67 1,6<br />

1850 126 83 1,5<br />

Total 234 150 1,56<br />

La plupart <strong>des</strong> ménages ont<br />

armoire (41,2 Vo)<br />

une<br />

Tableau n° 4 : nombre d'armoires par<br />

famille.<br />

familles avec nbre armoires:<br />

0 1 2 3 4 et +<br />

tôt % tôt 1 tôt 1 tôt % tôt 1<br />

1820 12 11,3 30 43,5 15 21,7 7 10,1 5 7,2<br />

1850 16 19,0 33 39,3 22 26,2 7 8,3 6 71<br />

Total 28 18,3 63 41,2 37 24,2 14 9,1 11 7,:<br />

nbre tôt,<br />

de<br />

familles<br />

153<br />

et leur nombre diminue au cours du siècle<br />

au profit de ceux qui en ont deux<br />

(21,7 à 26,2%). 18,3% <strong>des</strong> familles<br />

n'ont pas d'armoire du tout et ce pourcentage<br />

augmente au cours du XIX e<br />

siècle.<br />

Il s'agit en majorité de journaliers,<br />

de tisserands, d'artisans parmi les plus<br />

pauvres, dont la condition économique<br />

a dû se dégrader au cours de notre<br />

période d'observation.<br />

2. Le prix <strong>des</strong> armoires : Tel qu'il ressort<br />

de nos sources, pourtant dévalorisantes<br />

(10), il reste élevé : 14,2 frs en<br />

moyenne, et il augmente entre 1820 et<br />

1850.<br />

Tableau n° 5 : prix <strong>des</strong> armoires<br />

Date Nbre prix total prix moyen<br />

d'armoires<br />

1820 69 978,9 14,20<br />

1850 121 2450,5 20,25<br />

Total 190 3429,4 18,05


Mais la différence est extrême entre la<br />

vieille armoire en sapin, qualifiée de<br />

petite, et cotée à 0,70 frs ou 1 fr, et la<br />

grande armoire de noyer à deux battants,<br />

ferrures en cuivre jaune, fermant<br />

à clef, à 120 frs. L'armoire ordinaire<br />

en sapin à deux battants vaut le prix<br />

d'une table ou d'un lit complet. 23,5 %<br />

<strong>des</strong> armoires (et peut-être plus) sont<br />

qualifiées de vieilles, très vieilles, usées,<br />

mauvaises, par le notaire. Il s'agit d'une<br />

pièce de mobilier qui n'est pas forcément<br />

renouvelée dans le trousseau de<br />

la mariée, mais dont on hérite, que l'on<br />

transmet de mère en fille ou de grandmère<br />

à petite-fille (11). Elle se garde de<br />

plus en plus longtemps, surtout depuis<br />

que, dans une société en voie de prolétarisation,<br />

les meubles hérités mettent<br />

en valeur l'ancienne position sociale de<br />

la famille et son enracinement dans le<br />

village.<br />

bassin de cuivre, une passoire en ferblanc,<br />

un arrosoir, deux paires de boucles<br />

et un rasoir».<br />

En général le contenu vaut beaucoup<br />

plus que le contenant. Telle armoire<br />

d'un propriétaire-cultivateur anabaptiste<br />

<strong>des</strong> Vosges contient 243,50 frs de<br />

linge. L'armoire ci-<strong>des</strong>sus nommée est<br />

évaluée à 8 frs et contient 124,9 frs de<br />

linge, de vêtements et d'objets divers.<br />

4. La place de l'armoire dans la maison<br />

: L'armoire est l'un <strong>des</strong> meubles de<br />

mariage que l'on apporte dans la future<br />

demeure du couple la veille <strong>des</strong> noces.<br />

De ce fait, le nom de la mariée et la date<br />

de la cérémonie sont souvent inscrits le<br />

long de la corniche.<br />

@<br />

@<br />

Armoire de noyer datée de 1849. Schillersdorf<br />

(Bas-Rhin) Collection particulière.<br />

Corniche droite décorée de frises en marqueterie<br />

et sculptée, terminée par deux<br />

chapiteaux. Traverses droites, montants<br />

arrondis. Portes droites garnies de 3 panneaux<br />

décorés de ronce de noyer, pieds<br />

boules. Entrées de serrure de style directoire<br />

et fiches en fer.<br />

Détail du décor de l'armoire précédente.<br />

Décor de la corniche et inscription sur la<br />

traverse supérieure «Margareta Graf<br />

1849».<br />

(11) M.N. DENIS, biblio n" 3<br />

(12) Notre documentation est particulièrement<br />

réduite dans ce domaine, car les notaires<br />

alsaciens ont la fâcheuse habitude de classer<br />

les objets par catégorie: linge, ustensiles<br />

de cuisine, boiserie... etc., et non pas<br />

à l'emplacement où ils se trouvent. Il est<br />

donc difficile de déterminer le contenu <strong>des</strong><br />

meubles.<br />

3. L'utilisation de l'armoire: Toutes<br />

les armoires d'Alsace ne sont pas <strong>des</strong><br />

éléments de prestige et leur usage est<br />

parfois confondu avec celui d'autres<br />

«meubles contenants» tels que le coffre,<br />

la commode, et le buffet. Mais<br />

l'armoire est réservée plus généralement<br />

au rangement du linge et <strong>des</strong> vêtements.<br />

De plus, le terme d'«armoire», souvent<br />

générique pour l'ensemble de ces meubles,<br />

ne permet pas une identification<br />

précise. Il est difficile, dans un inventaire,<br />

de déterminer le genre d'une<br />

«armoire à quatre battants», d'une<br />

«armoire avec crédence» dont les structures<br />

s'apparentent communément à<br />

celles du buffet.<br />

Les usages permettent de distinguer<br />

l'armoire à linge avec «rayons» et<br />

l'armoire-penderie (12). Mais il existe<br />

<strong>des</strong> solutions mixtes : armoire à linge<br />

avec étagères d'un seul côté, armoirependerie<br />

à planche supérieure pour le<br />

linge, munie de crochets pour suspendre<br />

les vêtements. Il se rencontre même<br />

<strong>des</strong> «armoires fourre-tout» telle celle<br />

d'un maître d'école de Bosselshausen<br />

(Bas-Rhin) qui contient à la fois sa<br />

garde-rode, du linge de maison et «...<br />

3 assiettes, un plat, un pot d'étain, un<br />

©<br />

-44-


Son aspect prestigieux, sa valeur<br />

symbolique diminuent d'ailleurs au<br />

cours du siècle puisqu'elle se déplace du<br />

cadre ostentatoire de la salle commune<br />

vers les chambres.<br />

Tableau n° 6: emplacement <strong>des</strong><br />

armoires.<br />

salle chambres grenier total<br />

commune<br />

cave<br />

corridors<br />

tôt % tôt | tôt %<br />

1820 11 55 8 40 1 5 20<br />

1850 12 23,5 33 64,7 6 11,8 51<br />

Total 23 32,4 41 57,7 7 9,9 71<br />

Mais elle est rarement mise à l'écart<br />

dans les corridors, la cave ou le grenier.<br />

@<br />

se -m<br />

•<br />

5. Coffres et armoires : Le coffre date<br />

du Moyen-Age et s'est vu attribuer seul<br />

pendant longtemps toutes les fonctions<br />

de meuble contenant à la fois le linge,<br />

les vêtements, la vaisselle et les provisions,<br />

peu abondants il est vrai, jusqu'à<br />

la fin du XVII e<br />

siècle. Dès le début du<br />

XVIII e<br />

siècle, l'armoire, plus commode<br />

à utiliser, va le concurrencer * sans<br />

jamais l'éliminer tout à fait.<br />

@<br />

@<br />

Armoire en noyer date de 1855. Schillersdorf<br />

(Bas-Rhin) Collection particulière.<br />

Corniche rectiligne et moulurée. Montants<br />

à angle droit. Traverses droites. 2 portes<br />

à 3 panneaux droits décorés d'étoiles en<br />

marqueterie caractéristiques du pays de<br />

Hanau. L'armoire est coupée en deux dans<br />

le sens vertical et assemblée à clavettes.<br />

Ferrures <strong>des</strong> portes et fiches en fer. La traverse<br />

supérieure est décorée d'un cartouche<br />

en verre églomisé avec le nom de la<br />

mariée et la date du mariage.<br />

Armoire en poirier peint et panneaux de<br />

ronce de noyer datée de 1850. Schillersdorf<br />

(Bas-Rhin) Coll. particulière. Corniche<br />

droite, moulurée, décorée de chapiteaux.<br />

Traverses droites. Montants arrondis.<br />

Portes droites décorées de 3 panneaux<br />

en ronce de noyer.<br />

® Détail de l'inscription en verre églomisé<br />

fixée en cartouche sur la traverse supérieure<br />

de l'armoire précédente. «Ma...<br />

Mahler. 1850».<br />

(13) Bien que <strong>des</strong>tiné à n'être déplacé qu'une<br />

fois, le coffre de mariée, tout comme une<br />

malle de voyage, comporte deux poignées<br />

latérales et une serrure.<br />

En effet le coffre survivra jusqu'à la fin<br />

du XIX e<br />

siècle comme meuble contenant<br />

par excellence le trousseau de la<br />

mariée, mesure-étalon de celui-ci et<br />

symbole de la migration (13) de la jeune<br />

épouse. Ainsi, et la situation n'évolue<br />

pas de 1820 à 1850, chaque famille possède<br />

en moyenne 1,5 coffre et 1,6<br />

armoire.<br />

Tableau n° 7 : coffres et armoires 1820<br />

et 1850.<br />

°7o famille ayant:<br />

rien un seul élément 2 éléments pas de pas<br />

coffre ou ou + coffre d'armoires<br />

armoire<br />

2,6 23,2 74,2 29,8 17,2<br />

que <strong>des</strong> que <strong>des</strong> nombre moyen<br />

coffres armoires par famille<br />

coffres armoires<br />

14,6 27,2 1,5 1,6<br />

Mais l'armoire l'emporte si l'on considère<br />

les ensembles mobiliers car 27,2 °ïo<br />

<strong>des</strong> familles n'ont que <strong>des</strong> armoires et<br />

14,6 % que <strong>des</strong> coffres. 74,2 % possèdent<br />

les deux éléments réunis en un ou<br />

plusieurs exemplaires. Ainsi le monde<br />

-45-


Bibliographie.<br />

(1) Jean Cuisenier: introduction à la<br />

collection «Le mobilier régional<br />

français». Paris, Berger-Levrault,<br />

1983.<br />

(2) Jean-Michel Boehler : «Fortunes<br />

paysannes au XVIII e<br />

siècle: le<br />

témoignage <strong>des</strong> inventaires après<br />

décès de Schillersdorf». 1701-1789.<br />

Pays d'Alsace. Cahiers 135-136<br />

n° II-III, 1986.<br />

(3) Marie-Noële Denis : «Les intérieurs<br />

ruraux de Schillersdorf». Pays<br />

d'Alsace, Cahiers 135-136 n° II-III,<br />

1986.<br />

(4) Denise Gluck : «Construction de<br />

typologies - les armoires». Ethnologie<br />

française, tome 15 n° 3, juilsept.<br />

1985.<br />

(5) Denise Gluck : «La limande : genre,<br />

type ou sous-type?» Ethnologie<br />

française, tome 15 n° 3, juil-sept.<br />

1985.<br />

(6) Georges Klein : «Arts et Traditions<br />

populaires d'Alsace». Colmar,<br />

Alsatia, 1973.<br />

(7) Georges Klein : «Le mobilier<br />

polychrome en Alsace». Colmar,<br />

Alsatia, 1977.<br />

(8) Françoise Lévy-Coblentz : «L'art<br />

du meuble en Alsace». Tome I : du<br />

gothique au baroque. Strasbourg,<br />

Istra 1975. Tome II, Saint-Dié, le<br />

Chardon, 1985.<br />

(9) Suzanne Tardieu : «Le mobilier<br />

rural traditionnel français». Paris,<br />

Aubier, Flammarion 1976.<br />

rural paraît assez bien pourvu de meubles<br />

contenants pour éviter la promiscuité<br />

<strong>des</strong> différents types de linge ou de<br />

vêtements. Peu nombreux sont ceux qui<br />

n'en possèdent aucun ou seulement<br />

un spécimen (23,2 %). Il s'agit<br />

en général de familles les plus pauvres,<br />

parmi les artisans-maçons, tisserands,<br />

journaliers.<br />

Néanmoins, il semble que le coffre se<br />

soit trouvé quelque peu déclassé et<br />

réduit à protéger les réserves alimentaires<br />

: coffre à farine, à fruits secs, à lait,<br />

à luzerne, à grains, à légumes. Souvent<br />

qualifié de vieux, il occupe dans la maison<br />

les pièces <strong>des</strong>tinées à cet usage:<br />

grenier et chambres du premier étage.<br />

Tableau n° 8 : emplacement <strong>des</strong> coffres<br />

et <strong>des</strong> armoires au 19 e<br />

siècle.<br />

% dans coffre armoire<br />

poêle 7,7 31,4<br />

cuisine<br />

chambre<br />

1,1 0<br />

rez-de-chaussée 1,1 24,3<br />

chambre 1 er étage 35 34,3<br />

corridors 3,3 2,8<br />

grenier 35 2,8<br />

cave 3,3 2,8<br />

autres 3,3 1,4<br />

Tableau n° 9 : le bois <strong>des</strong> coffres et <strong>des</strong><br />

armoires au XIX e<br />

siècle.<br />

% en:<br />

sapin noyer chêne fruitier<br />

coffres 94,6 — — —<br />

armoires 60,6 17 20 2,4<br />

autre<br />

5,3<br />

0<br />

Majoritairement construit en sapin<br />

(94,6 °7o - tableau n° 9)<br />

Alors que l'armoire rurale est pour<br />

40 °7o en bois noble, il conserve, contrairement<br />

à cette dernière, un prix très<br />

modique (2,8 frs en moyenne - tableau<br />

n° 10)<br />

qui baisse au cours du siècle, et explique,<br />

parallèlement à l'armoire, la permanence<br />

de sa diffusion.<br />

Tableau n° 10 : le prix <strong>des</strong> coffres et <strong>des</strong><br />

armoires au XIX e<br />

siècle.<br />

I prix moyen <strong>des</strong> :<br />

I coffres i armoires<br />

1820 5,4 11,7<br />

1850<br />

Total<br />

2,7<br />

2,8<br />

20,3<br />

17,2<br />

Conclusion : Ainsi l'armoire de noyer<br />

ou de sapin, étroitement liée aux mo<strong>des</strong><br />

et techniques urbaines, n'est-elle apparue,<br />

dans les intérieurs ruraux alsaciens,<br />

et encore parmi les plus riches, qu'à<br />

partir du XVIII e<br />

siècle. Meuble coûteux,<br />

même dans ses interprétations les<br />

plus mo<strong>des</strong>tes, peu renouvelé, elle fait<br />

l'objet d'héritages successifs en ligne<br />

féminine, lors <strong>des</strong> mariages, dont elle<br />

ne constitue pas pour autant, comme<br />

le coffre, un élément indispensable.<br />

Armoire à linge ou armoire-penderie,<br />

elle abandonne, au cours du XIX e<br />

siècle,<br />

sa place ostentatoire dans la «salle<br />

commune» au profit d'une position<br />

plus fonctionnelle dans les chambres.<br />

Marie-Noële<br />

DENIS<br />

-46-

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