Revue Terra Nullius - Numéro pilote

Incandescent, il traverse les murs. 2
DU MOT VERS LA VOIX
Plus que les pirouettes, les liaisons absconses, plus que toutes ces danses absurdes,
parades, poses nostalgiques et profondes, plus que le matérialisme informe des logophiles
hermétistes, plus que toutes ces impostures, le bond ! – celui du mot vers la Voix, où le mot se
tend incantatoire dressé et magique contre l’instant, contre la nausée, contre l’insensible, contre
tout ce qui arrache à la vie, reprend – le bond qui court le temps long des proférations exaltées et
mystiques.
Car le poème est une lutte, tension vers la Voix, où l’image fronde. C’est une fronde qui
porte la Voix, qui porte la pierre, qui déchire le mur, qui déchire le jour, celle-là même qui le
transfigure.
Nul ne s’enfuit des flammes intarissables ; seule la rumeur de l’enfant joueur traverse le feu. 3
« La rumeur de l’enfant joueur » ou la Voix du frondeur creuse le sillon, ouvre le jour, le
jour qui le foulera à la nuque. Les poètes trouvent la Voix. Dans les cérémonies évoquées par
Campo ou dans les prières de Michon – cérémonies où « l’art confine à la métaphysique, sa pratique à
la prière. »
2 Cristina Campo, Les impardonnables, « Le parc aux cerfs ».
3 Arthur Yasmine, La Lyre du Rhapsode.
20