Revue Terra Nullius - Numéro pilote
Pierre angulaire de la revue Terra Nullius.
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À l’angoisse qu'oblige la liberté, efface-t-il son nom, sous les yeux du ciel abasourdi, et le<br />
recouvre-t-il de son limon, cette peau de cendre au souffle d'une explosion atomique.<br />
(p.26) « Le vent, libéré de ses pères, retombe en cendres roides jusqu’à s’abasourdir de silence. »<br />
Comment faire galoper sur un tel glacis le futur de nos enfants Que créer si nul ne vit plus<br />
après, ni le Je, ni l'Autre <br />
A quoi auront servi nos pères Le fils efface son nom, il l’efface oui, son propre nom, le nom du<br />
Fils et du Père, car le XX ème siècle a effacé le Fils.<br />
(p. 24) « Cette langue que l’on voudrait unique, je la pourfends parce que justement j’aime mon père. »<br />
La peur, les vertiges habitent le fils à nu. A l'extrême limite de la mort, dans ce vide, il est au fond<br />
de la liberté. Sous le poids de l'apocalypse, descend-il danser avec « Toi, fils tressés de lumière, aux<br />
hanches, rythme païen. » (p. 27)<br />
N’étant pas médecin légiste, il m’est malaisé d’exercer une analyse méthodique de l’écriture de<br />
Catherine Ysmal. Il semble tout de même qu’il ressort de ce style singulier, le sentiment<br />
incroyable de la nouveauté et d’un sens particulier de l’image. Je sortis de ce livre bouche bée et<br />
c’est à la pointe du stylo, par ce texte, qu’il me fallût chercher les raisons essentielles de ce<br />
mutisme. Sans doute avais-je devant moi un de ces livres magiques qui par l’action du langage<br />
poétique rend grâce au symbole et l’insémine à nouveau dans les anfractuosités de l’histoire, de<br />
ces livres virtuoses et vivants qui ne causent qu’un peu plus de vitalité et d’espérance aux morts et<br />
à ceux qui, dans le désespoir gris, craignent les flammes d’une hiérarchie réagencée, du retour<br />
d’un pouvoir fort, d’une politique des armes et de la guerre. Car quand advient l’effondrement du<br />
sommet, que peut faire le prince Orphelin découvrant dans les décombres la Bombe en héritage <br />
S’il est un Roi, il donne son corps, se couche sur la charge, et attend là qu’elle explose. Il attend<br />
dans le dépouillement, piétiné, craché, conspué par les faibles qui se gaussent et se vautrent<br />
devant le trône laissé vacant.<br />
Ce poème est le cri de désœuvrement du Prince couché, dont, sans nulle doute, chaque Européen<br />
est une cellule, une ramification, une idée sinon matérielle, métaphysique. Ici, la chair résonne<br />
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