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LA DIFFUSION__ENTRETIEN<br />
de Peter Watkins a été l’occasion de montrer aux exploitants<br />
que nous pouvions également distribuer un film sur support<br />
pellicule et que sortir des films en numérique n’était pas une<br />
“posture documentaire”, mais <strong>la</strong> simple manifestation d’un<br />
manque de moyens pour les faire “gonfler” en 35 mm. Par <strong>la</strong><br />
suite, ils nous ont souvent suivi sur des projets assez difficiles<br />
comme Désentubage cathodique (2005), documentaire en<br />
numérique qui a très bien été reçu par le public et qui continue<br />
à “marcher” dans les salles de cinéma.<br />
Projections : Pensez-vous que cette façon d’envisager <strong>la</strong> <strong>diffusion</strong><br />
ait un avenir <br />
CC : Aujourd’hui, les changements technologiques en cours mettent<br />
en péril toute cette dynamique de <strong>diffusion</strong> à l’économie fragile constituée<br />
autour des petits films documentaires réalisés en numérique.<br />
Pour l’instant peu de salles avec lesquelles nous col<strong>la</strong>borons ont adopté<br />
les nouvelles normes technologiques, mais ce<strong>la</strong> risque d’aller très vite.<br />
Projections : Les salles vont devoir s’équiper avec des projecteurs<br />
2K si elles veulent continuer à faire ce type de projections. Aurezvous<br />
les moyens de vous adapter <br />
C.C. : Si cette nouvelle norme s’impose, nous n’aurons probablement<br />
pas les moyens de nous y conformer.<br />
Projections : La re-sortie d’Edvard Munch a-t-elle eu d’autres<br />
conséquences pour <strong>la</strong> coopérative <br />
CC : Récemment j’ai reçu une invitation pour l’exposition “La lumière<br />
nuit” de Valère Novarina, dont le titre traduit assez bien les multiples<br />
conséquences de cette couverture journalistique. La trop grande visibilité<br />
médiatique a littéralement “brouillé” <strong>la</strong> perception des enjeux. Il<br />
y a eu une énorme médiatisation autour de l’Auteur Watkins, et peu<br />
d’intérêt pour sa façon d’envisager le cinéma et le propos de son film.<br />
Ce traitement médiatique n’a pas convenu au cinéaste. Son entourage<br />
nous a reproché de l’avoir mal contrôlé, ce qui fut à l’origine du conflit<br />
avec <strong>la</strong> famille Watkins très préjudiciable pour l’équilibre économique<br />
de <strong>la</strong> structure.<br />
Projections : Ne croyez-vous pas qu’avec ce film, et <strong>la</strong> manière de<br />
le diffuser, Co-errances soit sortie de son champ d’action Quel<br />
était le projet de <strong>la</strong> coopérative Envisagiez-vous en assurant <strong>la</strong><br />
promotion de ce film culturellement “porteur” d’échapper à <strong>la</strong><br />
marginalité sociale <br />
CC : Pour l’équipe de Co-errances, <strong>la</strong> <strong>diffusion</strong> de ce film n’était pas<br />
une fin en soi, elle ne faisait qu’initier un projet ambitieux à mener<br />
sur le long terme. Par <strong>la</strong> suite, nous souhaitions sortir La Commune<br />
dans sa version longue et travailler à <strong>la</strong> <strong>diffusion</strong> de l’ensemble de <strong>la</strong><br />
filmographie du cinéaste. C’est ainsi que parallèlement à <strong>la</strong> re-sortie<br />
de Munch, nous avions déjà commencé à envisager <strong>la</strong> distribution de<br />
son film Le Voyage, long métrage inédit de 14 heures. La rupture avec<br />
Peter Watkins a mis un terme à ce vaste projet.<br />
Nous étions animés par <strong>la</strong> volonté de rendre culturellement visibles<br />
certaines œuvres cantonnées à <strong>la</strong> marge, par le désir de présenter de<br />
riches imaginaires totalement invisibles.<br />
Projections : Il est toujours difficile de faire “exister” <strong>la</strong> marge sans<br />
être condamné à <strong>la</strong> marginalité. La question n’est-elle pas aussi de<br />
savoir quels contenus peuvent être considérés comme alternatifs <br />
Il n’y a pas forcément adéquation entre une démarche de <strong>diffusion</strong><br />
alternative et contenus alternatifs. Par exemple, qualifieriezvous<br />
les documentaires de Pierre Carles d’alternatifs <br />
CC : Savoir si les films de Pierre Carles sont alternatifs ou pas importe<br />
peu. Pour nous, ce documentariste fait partie de cette communauté de<br />
gens à <strong>la</strong>quelle nous avons essayé de nous associer, dont le travail s’attache<br />
à mettre en évidence un certain nombre de réalités politiques et<br />
sociales. La découverte de son documentaire Pas vu, pas pris (1998) a<br />
constitué un moment important dans mon propre itinéraire. Dans un<br />
contexte d’offensive contre les médias, sa <strong>diffusion</strong> a coïncidé avec <strong>la</strong><br />
publication de l’ouvrage Les nouveaux chiens de garde (1997) de<br />
Serge Halimi. Autant de rencontres qui ont participé à m’ouvrir les<br />
yeux sur un certain nombre d’enjeux médiatiques et m’ont décidé à<br />
m’impliquer dans le champ de <strong>la</strong> <strong>diffusion</strong> culturelle.<br />
Projections : Pourquoi Co-errances ne diffuse pas dans les magasins<br />
de <strong>la</strong> FNAC <br />
CC : Il s’agit de défendre les petits éditeurs et les petits lieux de <strong>diffusion</strong>.<br />
Depuis l’origine, nous tentons de rendre visible tous lieux défendant<br />
<strong>la</strong> diversité éditoriale, d’inviter le maximum de gens à les découvrir et<br />
à les soutenir. Cette démarche ne vise pas à imposer une pensée gauchiste<br />
au reste du monde, nous voulons simplement rappeler que si<br />
nous ne sommes pas vigi<strong>la</strong>nts, il n’y aura plus aucune p<strong>la</strong>ce pour les<br />
petits éditeurs et les formes de pensées alternatives au sein de l’espace<br />
public.<br />
Aujourd’hui, <strong>la</strong> situation est devenue si préoccupante que le monde<br />
de l’édition avançant le concept de “bibliodiversité” affirme que son<br />
existence est en danger. Nous courons effectivement le risque que<br />
tous les lieux de <strong>diffusion</strong> se ressemblent et nous imposent les<br />
mêmes contenus, une “pensée unique”.<br />
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR DAVID MATARASSO ET JEAN-MARC GÉNUITE<br />
PROPOS RETRANSCRITS PAR JEAN-MARC GÉNUITE<br />
Contacts Co-errances : www.co-errances.org<br />
Pas assez de volume de Vincent Glenn<br />
actions cinéma / audiovisuel projections / 15