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Fr-20-07-2013 - Algérie news quotidien national d'information

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Kiosque inter<strong>national</strong> dclg<br />

é<br />

a a<br />

Analyses &<br />

Décryptages<br />

e<br />

15<br />

Afghanistan :<br />

un QG flambant neuf<br />

qui ne sert à rien<br />

Rajiv Chandrasekaran, The<br />

Washington Post<br />

Une grande<br />

inertie<br />

Un nouveau<br />

quartier général de<br />

l'armée américaine<br />

symbolise le<br />

gouffre financier<br />

qu'a constitué la<br />

guerre en<br />

Afghanistan.<br />

Décidée en <strong>20</strong>09, sa<br />

construction a été<br />

poursuivie malgré<br />

le retrait annoncé<br />

des troupes<br />

américaines.<br />

américaine<br />

s’est fait construire<br />

un quartier général<br />

L’armée<br />

de 6 000 m2 au beau<br />

milieu des sables et du paysage<br />

lunaire du sud-ouest de<br />

l’Afghanistan, équipé de tous les<br />

outils nécessaires à la conduite de<br />

la guerre moderne. Un immense<br />

centre d’opérations aménagé en<br />

amphithéâtre, une salle de projection<br />

pour les briefings, des<br />

bureaux spacieux, de beaux fauteuils,<br />

un puissant système de climatisation…<br />

Rien ne manque<br />

– si ce n'est les<br />

hommes.<br />

La bâtisse sans fenêtres de<br />

deux étages, plus grande qu’un<br />

terrain de football, a été achevée<br />

cette année pour 34 millions de<br />

dollars [26,5 millions d’euros].<br />

Mais voilà : l’armée américaine<br />

n’a aucune intention de l’occuper.<br />

Les commandants en poste dans<br />

la zone, qui avaient déjà prévenu<br />

il y a trois ans qu’ils n’en avaient<br />

aucun besoin, sont à présent en<br />

train de retirer leurs forces et ne<br />

voient aucune raison de s’y installer.<br />

Dans l’esprit de beaucoup<br />

d’officiers supérieurs, ce siège<br />

inutilisé en est venu à symboliser<br />

le coût effarant de l’impéritie des<br />

gestionnaires du Pentagone. A<br />

l’heure où les soldats américains<br />

plient bagage et s’apprêtent à rentrer<br />

chez eux, des entreprises<br />

payées par le gouvernement des<br />

Etats-Unis apportent la dernière<br />

touche à des projets dont plus<br />

personne ne veut ou arrêtent des<br />

chantiers qui ont déjà englouti<br />

plusieurs millions de dollars.<br />

Gouffre financier<br />

Dans la province de Kandahar,<br />

l’armée américaine vient d’achever<br />

la construction d’une installation<br />

de 45 millions de dollars<br />

conçue pour réparer les véhicules<br />

blindés et autres matériels complexes.<br />

Cet espace est désormais<br />

utilisé comme base de tri du<br />

matériel destiné à être réembarqué<br />

pour les Etats-Unis.<br />

L’année dernière, dans le nord<br />

de l’Afghanistan, le département<br />

d’Etat a renoncé à occuper un<br />

grand bâtiment dans lequel il<br />

comptait établir un consulat.<br />

Après avoir investi plus de 80 millions<br />

de dollars [61 millions d’euros]<br />

et signé un bail de dix ans, les<br />

autorités ont jugé que le lieu était<br />

trop vulnérable aux attaques.<br />

Mais, pour certains officiers supérieurs,<br />

ce QG surdimensionné est<br />

bien le gouffre financier le plus<br />

emblématique d’une guerre qui a<br />

déjà laissé dans son sillage toute<br />

une série de projets coûteux, inopérants<br />

et inutiles, financés par le<br />

contribuable américain. Cette<br />

masse imposante dressée au cœur<br />

du camp Leatherneck, dans la<br />

province de l’Helmand [dans le<br />

sud de l'Afghanistan], est devenue<br />

la cible des plaisanteries des marines<br />

en garnison et un cas d’école<br />

pour les hauts responsables en<br />

poste à Kaboul et à Washington.<br />

Des<br />

avertissements<br />

ignorés<br />

Il y a trois ans, le commandant<br />

en chef des marines dans<br />

l’Helmand avait adressé un rapport<br />

au QG américain de Kaboul<br />

pour expliquer qu’il était superflu<br />

de construire cette nouvelle structure.<br />

Mais, à en croire de hauts<br />

responsables de l’armée qui<br />

connaissent bien le dossier, les<br />

fonctionnaires chargés de lancer<br />

des avis d’appels d’offres pour les<br />

projets de construction ont fait la<br />

sourde oreille. Les aménagements<br />

du bâtiment ont également<br />

inquiété les officiers supérieurs.<br />

Un général deux étoiles des marines<br />

qui a visité le bâtiment<br />

affirme qu’“aucun autre QG des<br />

marines au monde n’est mieux<br />

équipé”. A lui seul, renchérit un<br />

général deux étoiles de l’armée de<br />

terre, le centre des opérations est<br />

aussi grand que ceux du Centcom<br />

[le commandement des forces<br />

américaines au Moyen-Orient et<br />

en Asie centrale] ou du quartier<br />

général des puissances alliées en<br />

Europe. “On se demande vraiment<br />

ce qui leur est passé par la<br />

tête, s’insurge-t-il. Rien n’a jamais<br />

justifié que l’on construise quelque<br />

chose d’aussi extravagant.”<br />

Dans un courrier adressé à Chuck<br />

Hagel, ministre de la Défense,<br />

l’inspecteur général spécial pour<br />

la reconstruction de l’Afghanistan<br />

John F. Sopko jugeait qu’il s’agissait<br />

du "bâtiment le mieux<br />

construit qu['il ait] jamais vu lors<br />

de [ses] déplacements en<br />

Afghanistan”. “Malheureusement,<br />

poursuivait-il, il est inutilisé,<br />

inoccupé et n'aura sans doute<br />

jamais l'usage qu’on lui destinait.<br />

C’est un exemple des problèmes<br />

propres aux chantiers militaires<br />

dans leur ensemble – une fois<br />

qu’ils sont lancés, il est très difficile<br />

de les arrêter.” Le projet de<br />

QG a vu le jour en <strong>20</strong>09, à l’époque<br />

où le président Obama avait<br />

décidé d’envoyer des renforts<br />

dans le sud de l’Afghanistan afin<br />

de repousser les insurgés talibans.<br />

Les planificateurs de l’armée en<br />

Caroline du Sud et au Pentagone<br />

ont estimé que Camp<br />

Leatherneck, où les marines<br />

avaient choisi d’établir leur base<br />

dans le sud du pays, avait besoin<br />

d’un centre de commandement et<br />

de contrôle perfectionné. Lorsque<br />

les officiers supérieurs du corps<br />

des marines dans l’Helmand ont<br />

entendu parler de ce projet, ils s’y<br />

sont opposés. Le commandant de<br />

l’époque, le général de division<br />

Richard P. Mills, trouvait que son<br />

QG en contreplaqué faisait tout à<br />

fait l’affaire et l’a clairement fait<br />

savoir à ses supérieurs à Kaboul.<br />

Son avis ne fut pas écouté. L’étatmajor<br />

de Kaboul a dressé le cahier<br />

des charges du bâtiment et<br />

demandé au service de la soustraitance<br />

de l’US Air Force de<br />

trouver une entreprise privée<br />

pour le construire. C’est une<br />

société britannique, AMEC Earth<br />

and Environnement, qui a remporté<br />

le contrat. Elle a débuté les<br />

travaux en novembre <strong>20</strong>11.<br />

Entre-temps, Obama avait<br />

annoncé la fin de l’envoi des renforts,<br />

et le gros du retrait portait<br />

sur les troupes stationnées dans<br />

l’Helmand.<br />

En <strong>20</strong>12, tandis que les effectifs<br />

de marines dans le sud-ouest<br />

du pays passaient de <strong>20</strong> 000 hommes<br />

à 7 000, les ouvriers posaient<br />

les fondations, montaient les<br />

poutres et installaient l’électricité.<br />

Le bâtiment était conçu pour<br />

accueillir environ 1 500 employés.<br />

Il y a actuellement moins de 400<br />

employés de l’état-major sur la<br />

base.<br />

Même après qu’Obama a<br />

décidé de retirer 34 000 soldats<br />

supplémentaires cette année, les<br />

travaux ont continué d’aller bon<br />

train : on a installé des box. Les<br />

fauteuils de cinéma sont arrivés.<br />

L’entrepreneur a effectué des<br />

modifications pour résoudre des<br />

problèmes sur les sorties de<br />

secours. Il a fallu attendre ce printemps<br />

pour qu’enfin des généraux<br />

américains à Kaboul interrompent<br />

le chantier. Cette décision est<br />

survenue juste avant que l’Etat<br />

américain n’injecte quelques millions<br />

supplémentaires pour informatiser<br />

l’immeuble, mais pas<br />

assez tôt pour annuler les livraisons<br />

de mobilier.<br />

“C’est extrêmement embarrassant”,<br />

concède le général de l’armée<br />

de terre.<br />

Bientôt démoli ?<br />

Dans sa lettre à Chuck Hagel,<br />

John Sopko a demandé au<br />

Pentagone d'identifier “tous les<br />

faits qui ont conduit à atteindre la<br />

somme faramineuse de 34 millions<br />

de dollars, ainsi que des<br />

mesures pour empêcher que cela<br />

ne se reproduise”. L’armée américaine,<br />

qui a ouvert une enquête<br />

officielle sur les décisions qui ont<br />

débouché sur l’appel d’offres,<br />

pense soit démolir le bâtiment,<br />

soit l’offrir à l’armée afghane. Si<br />

la seconde option paraît séduisante,<br />

les responsables américains<br />

doutent que les Afghans puissent<br />

entretenir la structure. Ses systèmes<br />

de chauffage et de climatisation<br />

complexes consomment en<br />

effet beaucoup d’électricité, ce<br />

qui obligerait à dépenser de grosses<br />

sommes en carburant pour<br />

faire tourner les groupes électrogènes.<br />

De plus, l’installation électrique<br />

est prévue pour des appareils<br />

en 110 volts, alors que les<br />

Afghans utilisent du 2<strong>20</strong> volts. Les<br />

autorités rappellent par ailleurs<br />

que l’armée américaine a récemment<br />

construit un nouveau QG<br />

sur la base afghane qui jouxte<br />

Leatherneck.<br />

“Aucune des deux solutions<br />

proposées n’est satisfaisante”,<br />

déplore Sopko. Après s’être entretenu<br />

avec des cadres de l’armée, il<br />

pense que l’une des options semble<br />

avoir la cote : “Le bâtiment va<br />

sans doute être démoli.”<br />

ALGERIE NEWS Samedi <strong>20</strong> juillet <strong>20</strong>13

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