07.03.2015 Views

Fr-20-07-2013 - Algérie news quotidien national d'information

Fr-20-07-2013 - Algérie news quotidien national d'information

Fr-20-07-2013 - Algérie news quotidien national d'information

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

2 > A L A U N E<br />

LE LIEN<br />

Yacine Chabi<br />

L'illusion<br />

de l'import<br />

Qui contrôle les marchés et les<br />

prix en <strong>Algérie</strong>? A cette<br />

question, même les ministres<br />

du gouvernement Sellal et ceux<br />

d'avant n'ont pas réussi à y<br />

répondre. A l'approche de<br />

chaque ramadhan, on évoque le<br />

même refrain. Pour éviter que<br />

les prix ne flambent, il faut<br />

éradiquer les intermédiaires et<br />

les spéculateurs. Pas une fois<br />

nous avons pu voir à quoi<br />

pouvait ressembler un<br />

spéculateur. Pas une seule fois<br />

nous avons entendu parler d'un<br />

procès en justice impliquant des<br />

spéculateurs, des grossistes en<br />

fruits et légumes, des<br />

mandataires en viandes<br />

blanches, accusés<br />

d'enrichissement illégal ou<br />

encore entrave au code du<br />

commerce. D'ailleurs, la loi<br />

algérienne ne condamne pas ce<br />

genre de délit. La spéculation<br />

est immorale certes mais pas<br />

illégale. Trois ministres en<br />

charge directe du bien-être de<br />

l'estomac des <strong>Algérie</strong>ns durant<br />

le mois de jeûne ont déclaré<br />

presque en simultané que tout<br />

sera fait pour maintenir les prix.<br />

Les mêmes ministres ont par la<br />

suite précisé que les prix<br />

allaient connaître une hausse<br />

durant la première semaine<br />

pour ensuite se stabiliser. Les<br />

mêmes trois responsables<br />

visionnaires ont appelé presque<br />

en même temps les citoyens à<br />

faire preuve de retenue. Mais<br />

aucun des trois ministres n'a<br />

annoncé que certains<br />

opérateurs allaient être<br />

autorisés à importer de la<br />

viande fraîche sous vide<br />

d'origine espagnole. Une telle<br />

annonce aurait pu avoir des<br />

répercussions sur le prix de la<br />

viande locale, mais nos trois<br />

experts ont jugé inutile de le<br />

faire !<br />

Ainsi, le problème de la viande<br />

est réglé. Celui des fruits et<br />

légumes le sera aussi puisque<br />

nous commençons à importer<br />

certains légumes. Nous<br />

étalerons cela à d'autres<br />

produits, à mesure que nos<br />

responsables comprennent qu'il<br />

est plus facile d'importer que<br />

de faire baisser les prix des<br />

produits locaux ou d'améliorer<br />

la production et la productivité<br />

locale. La solution facile est<br />

celle qui donne l'impression<br />

que tout va bien alors que tout<br />

va très très mal. Un produit<br />

agricole importé est un produit<br />

que l'on ne pourra plus<br />

produire chez nous. Ce sont des<br />

postes d'emploi en plus à créer,<br />

un savoir-faire disparu à jamais.<br />

Concurrencés par la viande fraîche importée<br />

Le blues des bouchers<br />

A chaque mois de ramadhan, cette catégorie de commerçants est élevée au rang de rois des<br />

marchés. On s'y bouscule et on y laisse des plumes. Mais cette année marque un tournant.<br />

Nous sommes déjà à dix jours du mois<br />

sacré de ramadhan. Chez les bouchers<br />

que nous avons abordés à<br />

Alger, c'est plutôt le calme plat. Les<br />

prix affichent 1 480 DA/le kilo. Pour le foie,<br />

très prisé en cette période de jeûne, il faut<br />

compter 2 400 DA/le kilo et ne pas oublier de<br />

passer commande trois jours à l'avance. «Les<br />

gens sont venus en nombre deux ou trois jours<br />

avant le début de ramadhan. Certains ont fait<br />

des achats pour la semaine. Il est vrai que les<br />

prix sont très élevés, mais nous n'y sommes<br />

pour rien », nous affirme Hamid, bouchers de<br />

père en fils. Pour notre interlocuteur, qui<br />

exerce depuis plus de vingt-cinq ans, ce qui se<br />

passe cette année signe le début d'une nouvelle<br />

ère. « On nous reproche souvent d'être des<br />

profiteurs. Cette année, les profiteurs ce n'est<br />

pas nous. Les années précédentes, à cette<br />

heure-ci de la journée (15h00 ndlr), il ne me<br />

reste rien à vendre, tout est liquidé.<br />

Maintenant, constatez cela par vous-même, le<br />

frigo est toujours plein. Les gens n'achètent<br />

plus ou bien ils ont trouvé leur bonheur ailleurs.<br />

»<br />

En effet, l'année <strong>20</strong>13 a vu pour la première<br />

fois l'importation de viande fraîche sous-vide,<br />

<strong>Fr</strong>uits et légumes<br />

Baisse des prix après dix jours de jeûne<br />

Les commerçants et citoyens ont rarement<br />

connu cette situation. D'habitude, la tendance<br />

haussière des prix des fruits et légumes<br />

se maintient durant tout le mois sacré.<br />

Cette année, les prix ont sensiblement baissé au<br />

bout d’une dizaine de jours. Hier, nous avons<br />

constaté que le prix des fruits et légumes de saison<br />

ont connu une baisse, parfois légère, comparé<br />

au premier jour du mois sacré. Pour les<br />

commerçants que nous avons pu interroger, ils<br />

semblent unanimes sur un point : la baisse de<br />

la demande qui explique tout. « Les trois jours<br />

qui ont précédé le début du mois sacré, les gens<br />

avaient contracté la fièvre acheteuse. Tous se<br />

procuraient tout et n'importe quoi. Résultat,<br />

certains marchands ont profité de cette situation.<br />

Mais en réalité, on n'arrivait plus à satisfaire<br />

la demande ». Pour ce qui est de la situation<br />

aujourd'hui, notre interlocuteur répond.<br />

« Aujourd'hui, nous ne trouvons plus à qui<br />

vendre. Même en baissant les prix, il n'y a pas<br />

preneur », fulmine Fayçal, un commerçant.<br />

Pour illustrer ses dires, il explique : « La tomate<br />

en provenance du Brésil et d'Espagne. Celle-ci<br />

est vendue à 900 DA/le kilo, les consommateurs<br />

auront vite fait leur choix. « Au début, les<br />

gens étaient réticents. Après l'avoir essayée, ils<br />

en redemandent et sont satisfaits de sa bonne<br />

qualité », nous confie Youcef, boucher au marché<br />

Ferhat-Boussad. Interrogé sur le sort des<br />

autres bouchers qui vendent de la viande<br />

locale, Youcef est sans appel. « Moi aussi, je<br />

suis boucher. J'ai arrêté de vendre de la viande<br />

locale car les prix sont à un niveau où même<br />

nous, nous n'arrivons plus à suivre. Quand<br />

vous achetez dans un abattoir la moitié d'un<br />

bœuf, c'est un investissement important et un<br />

risque énorme. Les consommateurs n'achètent<br />

plus. Personne ne prend de la viande au kilo,<br />

mais plutôt des petites quantités », regrette-til.<br />

Reconverti dans la viande congelée, notre<br />

interlocuteur nous explique que tout est question<br />

de prix. « Deux jours avant le début de<br />

ramadhan, mes voisins ne savaient pas où<br />

donner de la tête tellement il y avait du<br />

monde. Aujourd'hui, ils se roulent les pouces.<br />

Il y a sur un kilo de viande plus de 500 DA de<br />

différence. Le choix est très vite fait ». Youcef<br />

nous présente son frère, Hamid, boucher lui<br />

aussi installé à Baba Hassen. Sur les affaires,<br />

qui était cédée à 90 DA au premier jour de<br />

jeûne, actuellement, elle est à 60 DA. Certains<br />

font l'effort et la bradent à 50 DA. La courgette<br />

a perdu <strong>20</strong> DA en huit jours. Le poivron est à 60<br />

DA contre 85 DA au premier jour… Ces prix<br />

ont baissé de 25% par rapport au premier<br />

jour.» Notons qu'au-delà des prix, nous avons<br />

constaté une qualité meilleure des légumes<br />

comparée aux années précédentes. Côté fruits,<br />

Tous se procuraient tout et n'importe quoi.<br />

Résultat, certains marchands ont profité de<br />

cette situation. Mais en réalité, on n'arrivait<br />

plus à satisfaire la demande ».<br />

c'est encore une fois l'importation qui sauve la<br />

mise. Certains proposent des prunes importées<br />

à 100 DA. « Je les vendais à <strong>20</strong>0 DA il y a moins<br />

de trois jours ? Je dois tout liquider ». Pour les<br />

autres fruits de saison, les pêches ont enregistré<br />

une légère baisse, entre 5 et 10 DA. « Les fruits<br />

importés sont moins chers que la production<br />

ALGERIE NEWS Samedi <strong>20</strong> juillet <strong>20</strong>13<br />

Hamid est plutôt pessimiste. « J'ai préféré fermer<br />

boutique car je ne vendais plus que la<br />

moitié de ma marchandise. J'ai pris mon<br />

congé en plein ramadhan. C'est plutôt inédit<br />

pour un boucher. Deux confrères et voisins<br />

vendent de la viande fraîche importée<br />

d'Espagne. Je n’ai pas pu résister longtemps ».<br />

Les deux frères, bien que faisant face à deux<br />

situations différentes, estiment que les importations<br />

massives ne sont pas une solution au<br />

vrai problème.<br />

Pour eux, si la viande locale ne trouve plus<br />

preneur, c'est toute la filière qui est en danger.<br />

« Nous arrivons à un point où importer de la<br />

viande coûte moins cher que de la produire<br />

localement. Ce n'est pas un problème de commerce,<br />

c'est un problème d'agriculture ». Du<br />

côté des clients, ce qui importe, c'est de la<br />

viande à bon prix. « Je l'ai essayée, elle est très<br />

bien. Je reste porté sur la viande ovine locale<br />

mais pour la viande bovine, le choix est vite<br />

fait », nous dit une dame. Les derniers chiffres<br />

du Cnis montrent clairement une hausse très<br />

nette des importations de viandes pour les<br />

cinq premiers mois de l'année. Cette tendance<br />

haussière risque de s'accentuer.<br />

Y. C.<br />

locale. Cette année, il n'y a presque pas de raisin.<br />

Le peu qui entre sur le marché est à 250 DA.<br />

Rajouter 50 DA et acheter un kilo de l'importation<br />

», nous confie-t-on. Ainsi, les commerçants<br />

ont dénoncé le dysfonctionnement de la chaîne<br />

de distribution du marché des fruits et légumes.<br />

« Il y a une bonne production des légumes pour<br />

absorber la demande durant ce mois. Mais malheureusement<br />

il n'y a pas une stratégie <strong>national</strong>e<br />

très visible de la gestion des<br />

chambres froides. Ajouter à cela que<br />

les mandataires et les grossistes qui<br />

dictent leur loi sur les prix de ces produits<br />

et qui sont à l'origine de l'augmentation<br />

inexpliquée qui s'annonce<br />

à chaque mois de ramadan ». De leur<br />

côté, les consommateurs ont confirmé que les<br />

prix ont connu une légère baisse par rapport au<br />

premier jour. « Aujourd'hui (hier ndlr) les prix<br />

commencent à baisser légèrement. C'est moi<br />

qui fais les courses, je pense que les prix sont<br />

abordables », a-t-on appris.<br />

Zohra Chender

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!