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La fausse réforme du Code criminel - Barreau du Québec

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L’affaire Coffin revisitéeRollande ParentPendant des années, les Américains ont discuté ferme del’assassinat de John Fitzgerald Kennedy survenu en 1963,alimentés qu’ils l’étaient par de nombreux ouvrages et filmsavançant diverses hypothèses. À l’instar de l’assassinat deKennedy, une affaire refait surface de temps à autre au<strong>Québec</strong>, voire au Canada : celle de l’assassinat de troischasseurs américains, en 1953, en Gaspésie. Wilbert Coffin,trouvé coupable, a été pen<strong>du</strong>. Au moins quatre livres ont étéécrits sur le sujet, en français et en anglais, tandis que lecinéaste bien connu Jean-Claude <strong>La</strong>brecque en a fait unfilm. Tout ça entre 1956 et 1980.Deux éléments récents sont venus s’ajouter au dossier. En septembre 2006, à lademande <strong>du</strong> Bloc québécois, le Groupe de révision des condamnations <strong>criminel</strong>les <strong>du</strong>ministère fédéral de la Justice est chargé d’examiner si Wilbert Coffin n’a pas étépen<strong>du</strong> à tort. Avant même qu’une décision ne soit ren<strong>du</strong>e, l’avocat Clément Fortinsaute à son tour dans la mêlée avec le docuroman L’affaire Coffin : une supercherie ?S’en tenir aux faitsDans son avant-propos, Clément Fortin indique qu’il a choisi de se fonder seulementsur les faits mis en preuve lors de l’enquête <strong>du</strong> coroner, de l’enquête préliminaire et <strong>du</strong>procès qui a <strong>du</strong>ré 19 jours. Il a en outre tenu compte de divers éléments mis enlumière dans le rapport de la commission d’enquête (en 1964) présidée par le jugeRoger Brossard, qui a enten<strong>du</strong> 214 témoins, dont les 12 membres <strong>du</strong> jury et l’auteurJacques Hébert à qui l’on doit Coffin était innocent (1958) et J’accuse les assassinsde Wilbert Coffin (1963).Programme d’Aide aux Membres <strong>du</strong> <strong>Barreau</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>, à leurconjoint(e) et aux stagiaires et étudiant(e)s de l’École <strong>du</strong> <strong>Barreau</strong>Dépression • Stress • ToxicomanieTA CAUSEN’EST PASPERDUE.Le PAMBA vous offre un accès gratuit à des servicesde psychothérapie et à des groupes d’entraide.Montréal286-0831Documentation disponible :www.barreau.qc.ca/fr/organismes/pambaExtérieur1 800 74PAMBAPAMBA070523Au terme de ce long examen, lejuge Brossard a conclu que« l’ensemble de la preuvesoumise à cette commission tendà confirmer – et non à contredire– le verdict <strong>du</strong> jury de Percé etles décisions de nos tribunaux selon lesquelles Coffin n’était pas innocent <strong>du</strong> meurtredont il était accusé. Le procès de Coffin n’a pas été une injustice. L’Affaire Coffin en aété une. »Dans L’affaire Coffin : une supercherie ?, l’avocat sexagénaire Clément Fortin, à laretraite depuis cinq ans, adopte la même position, bien qu’il invite en quelque sortechaque lecteur à se mettre dans la peau d’un juré et à ne trancher qu’une fois tous lesfaits en main.Hébert pris à partieLe juge Brossard avançait que les propos de Jacques Hébert étaient sans fondement.Pour sa part, Clément Fortin fait valoir que n’eût été le brûlot de Jacques Hébertclamant l’innocence de Coffin, l’affaire Coffin serait oubliée depuis belle lurette, et lepublic n’aurait pas si longtemps douté <strong>du</strong> bon déroulement <strong>du</strong> procès.Selon l’auteur, Hébert s’est limité à utiliser les divers éléments de preuve quipouvaient servir sa thèse et a laissé tout le reste de côté. Il rapporte que devant lacommission Brossard, Jacques Hébert a admis que sur les 80 témoignages ren<strong>du</strong>s auprocès, il n’en avait lu qu’un seul en entier, et deux autres en partie pour écrire sonpremier livre. Son explication ? « Je n’en sentais pas le besoin; ils ne m’intéressaientpas particulièrement », relate M. Fortin dans son ouvrage de quelque 400 pages.Le genre d’Hébert a tout de même beaucoup plu. Le premier volume a été tiré à12 000 exemplaires, et le second, tra<strong>du</strong>it en anglais, a été tiré à 40 000 exemplaires. Cedernier livre, signale Fortin, n’a pas manqué d’exercer une influence sur le publicquébécois et canadien. « Et elle persiste », avance-t-il.«Par le ton injurieux de ses écrits, l’affaire Coffin est devenue l’affaire Hébert. Querecherchait ce journaliste, ce fondateur des Éditions <strong>du</strong> Jour et <strong>du</strong> journal Vrai ?»,demande l’auteur, qui répond ainsi : « Jacques Hébert vouait une haineincommensurable au régime de Duplessis. Animé de ce sentiment, il présumait à tortqu’il n’avait même pas à prendre connaissance des documents pertinents pours’attaquer avec véhémence aux administrateurs de la justice. »Solidarité gaspésienneEn cours d’écriture, Clément Fortin s’est entretenu à quelques reprises avec l’exsénateurJacques Hébert. Il n’a cependant eu aucune nouvelle de sa part depuis laparution de son livre, il y a quelques semaines.Concernant le film de Jean-Claude <strong>La</strong>brecque réalisé en 1980, L’affaire Coffin,M. Fortin se limite à ce commentaire : « Ce n’est pas un documentaire, et c’estd’in<strong>du</strong>ire le public en erreur que de le lui laisser croire. »Quand Clément Fortin se rend dans la région de Matane, d’où il est originaire, et qu’ilpousse une pointe en Gaspésie, il lui arrive d’entendre des gens lui dire qu’ils onttoujours « le sentiment » que Coffin n’était pas coupable de la mort des troisAméricains. Aussi se demande-t-il parfois si bien des Gaspésiens n’ont pas toutsimplement choisi de faire preuve de solidarité à l’égard d’un des leurs.Clément Fortin, qui n’avait que 18 ans au moment de l’affaire Coffin, n’avait jamaissongé à en faire l’objet d’un livre. Jusqu’à assez récemment. « J’ai fait ça un peu àreculons. Il y a tellement d’écrits là-dessus, qu’est-ce que je vais pouvoir écrire deplus ? » répliquait-il quand des archivistes de l’Université <strong>du</strong> <strong>Québec</strong> à Rimouskiinsistaient pour qu’il revienne sur ce moment d’histoire.Pour son prochain ouvrage, se laissera-t-il influencer de pareille manière ? Là-dessus,M. Fortin se limite à dire qu’il a accumulé des caisses de documents « sur unehistoire », mais refuse d’être plus précis.Clément Fortin a été avocat en cabinet privé pendant de nombreuses années etprofesseur à l’Université de Sherbrooke; il a dirigé l’École <strong>du</strong> <strong>Barreau</strong> et la Formationpermanente des avocats et a écrit un premier docuroman en 2005 intitulé On s’amuseà mort, et auparavant, un roman historique, Les amours <strong>du</strong> Pied-de-la-Côte. On peutle croire quand il dit qu’il a encore beaucoup de pain sur la planche.L’affaire Coffin : une supercherie ?Wilson & <strong>La</strong>fleur ltée, Montréal, 3 e trimestre 2007, 384 pages.Dans la plus stricte confidentialité.18 Janvier 2008 Le Journal <strong>Barreau</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>

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