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critiques - La Terrasse

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32 / N°188 / mai 2011 / la terrassedanseentretien / Sasha WaltzLe corps à l’écoutedu mondeIntérieur extérieur, rumeur du dehors en dedans, attache de l’intimeau social… la danse chez Sasha Waltz résonne avec tout ce qui vibrealentour. Continu poursuit un dialogue amorcé depuis longtempsavec l’architecture. En 2009, la chorégraphe allemande a investideux musées pour créer des chorégraphies avec sa compagnie. Durantces expériences fortes, elle a accumulé sensations, mouvements etimages : autant de matériaux qu’elle a travaillés avec 24 danseurspour questionner le groupe, le couple et l’individu.Comment ces expériences menées dans lesdeux musées, intitulées Dialoge 09, ont-ellesnourri la création de Continu ?Sasha Waltz : Dans le Neues Museum de Berlin,redessiné radicalement par David Chipperfield, puis lemusée MAXXI de Rome, pensé par Zaha Hadid, nousavons proposé des installations chorégraphiques quiemmenaient le public à travers tout le bâtiment. Enévoluant dans les espaces de ces musées, en cherchantpar des improvisations les échos que l’architecture,les matières, les objets d’histoire exposésdéclenchaient dans nos corps, nous avons accumulébeaucoup de matériaux très riches qui ouvraient lavoix à de plus vastes explorations encore. Continus’inscrit à la fois dans la suite et dans un nouveauprocessus de travail. Les groupes de Dialoge 09, àBerlin et à Rome, étaient très différents, de mêmeque leurs propositions. J’ai extrait certains élémentsde ces expériences, que j’ai ici approfondis. Dansmon parcours artistique, chaque pièce est liée à laprécédente, par continuation ou par contradiction.Je crée avec ce que j’ai traversé.Quelle est concrètement l’influence de la perceptionde l’espace in situ sur le mouvement ?S. W. : Les danseurs ont totalement investi leslieux, les ont éprouvés physiquement, en utilisantles murs, les hauteurs, le sol, pour inventer dumouvement. Ils ont vraiment dansé avec l’espace.L’histoire portée par les œuvres a aussi nourri lesimprovisations, par exemple les vestiges témoignantde l’éruption du Vésuve, de l’engloutissement dePompéi et de la panique des habitants. L’énergiedégagée par la puissance volcanique, la destruction« Chercher dessensations trèsarchaïques, surle besoin de bouger,comme individuou comme groupe,sur le vouloir. » Sasha Waltzou la fuite se retrouve dans la pièce. Elle nous a servispour chercher des sensations très archaïques,sur le besoin de bouger, comme individu ou commegroupe, sur le vouloir, le rapport au destin, le désirde l’autre. Continu met en tension deux séquencescontrastées : l’une, sombre, est reliée aux émotionsbrutes, à l’impulsion, à la chair et à la terre, voire àla part sauvage de l’être ; l’autre, blanche, évoquela rationalité, la distance, la quiétude intellectuelle,l’aspiration spirituelle.Continu, création de Sasha Waltz.Quelle scénographie avez-vous conçue avecThomas Schenk, Pia Maier Schriever pourContinu ?S. W. : <strong>La</strong> scénographie ne s’inspire pas directementde l’architecture des musées, mais dessineun espace très épuré, presque vide, commeune vaste salle noire. Plutôt que de transposersur scène des décors qui nous avaient touchéslà-bas, nous laissons s’exprimer ces traces à traversle corps.<strong>La</strong> pièce rassemble 24 danseurs. Le groupeest-il important dans votre démarche chorégraphique?S. W. : J’aime chorégraphier les grands ensembles.<strong>La</strong> constitution des groupes et le rapport àl’individu sont des thèmes présents dans plusieursde mes pièces. J’en explore différentes facettes :le comportement d’une personne face à la massedes autres, l’intégration de l’un dans le nombre, lesforces qui interagissent au sein d’une formation, lacritique MantaHéla Fattoumi s’est pour laseconde fois illustrée dansun solo remarquable. Elle yréinterroge ses racines, à l’auned’un questionnement sensiblequi touche au cœur.En 1998, c’était Wasla, où la danseuse explosaitintérieurement dans une danse puisée aux sourcesde son histoire, de ses racines, de son identité defemme issue de l’autre rive de la Méditerranée.Onze ans après, c’est Manta : même envie d’interrogerce qui la fonde en tant que femme née enTunisie. Que s’est-il passé entre-temps ? Juste unglissement, cristallisé autour du voile, vêtementsymboleà peine perçu par la petite Héla lors deson enfance en Tunisie, qui barre aujourd’hui levisage des femmes de sa propre famille. Ébranléedans sa chair de femme éprise de liberté, elle achoisi de revêtir le hijab le temps d’un solo. C’étaitle moment pour elle d’éprouver ce qui se joue dansun corps ainsi entravé, sous la lourdeur du tissu etdans la pesanteur d’une prison subie. Dissimuléesous l’épais voile, elle ose et teste tout : le déhanchement,la sensualité, la transparence.Héla Fattoumi crée images etsens dans son enveloppeMue par la musique orientale qui évoque la fête,elle s’arrête soudain : dans un silence pesant,apparaît brutalement la force de son regard quisurgit, seul vecteur de son identité. Ses yeuxtranspercent l’espace comme une lame. Son solooscille alors entre la recherche d’états de corpsinduits par le port du hijab, et la mise en scène dutissu comme d’un objet plastique. Elle s’y engouffrepour lui donner forme, lui donner vie, s’inventerune existence, réinterroger sa présence en tantqu’être humain et en tant que femme. Et concluten convoquant James Brown, la parole d’unhomme qui dépeint son monde, « qui ne seraitrien, sans une femme ou une fille »…. Un travail deréaction face à l’échappée de duos ou de trios…Votre relation à la musique a évolué depuisvos premières pièces. Vous avez choisi icides œuvres de Varèse, de Vivier et deXenakis.S. W. : Le dialogue avec la musique est devenuun axe essentiel de ma recherche aujourd’hui. Macuriosité s’est aiguisée au fil des années et je mefrotte à un répertoire de plus en plus large, qui vadu XVIII e siècle à nos jours. Ce voyage à traversla musique, présent pour Dialoge 09, a égalementbeaucoup nourri Continu. Les choix musicauxallient la puissance émotionnelle à l’abstraction etirriguent toute la chorégraphie.Entretien réalisé et traduit par Gwénola DavidContinu, de Sasha Waltz. Du 18 au 22 mai 2011, à20h30, sauf dimanche à 15h. Théâtre de la Ville,2 place du Châtelet, 75004 Paris. Rens. 01 42 74 22 77et www.theatredelaville-paris.com.Quel corps de femme derrière cet étrange costume ?Celui d’Héla Fattoumi, dans Manta.haute volée qui continue encore aujourd’hui de laquestionner. Dernièrement, elle créait au FestivalDanse d’Ailleurs à Caen une performance intituléeLost in Burqa, avec la plasticienne marocaineMajida Khattari. Une façon, de nouveau, d’affirmeraux yeux de tous ce qui doit être « soustrait à lavue, ou isolé ».Nathalie YokelManta, d’Héla Fattoumi, les 13 et 14 mai à 20h30,à l’Espace 1789, 2/4 rue Alexandre-Bachelet,93400 Saint-Ouen. Tél. 01 40 11 50 23.Spectacle vu au Festival Montpellier Danse.//// pour recevoir la terrasse par internet, envoyez un mail à : la.terrasse@wanadoo.fr en objet : recevoir la terrasse ////© Sebastian Bolesch© <strong>La</strong>urent Philippe© D. R.la terrasse / mai 2011 / N°188 / 33téléchargez gratuitement notre application et lisez-nous sur votre ipaddansecritique Sans objetHomme du cirque, tout comme du théâtre ou de la danse, AurélienBory a su, dans toutes ses pièces, modeler l’espace et les corps,soutenu par un incroyable sens de la mise en scène. Avec Sans objet,il met l’accessoire au centre du dispositif, et la technologie au cœurdu vivant.On apprécie le travail d’Aurélien Bory dans sacapacité à se fondre dans un milieu, à trouver danstoutes ses collaborations des matières à bouleverserencore et toujours l’espace. S’appuyant sur leflamenco (Questcequetudeviens ?), sur l’acrobatiemarocaine (Taoub), le cirque chinois (Les SeptInsolite et magnifique, Sans objet tisse de troubles relations entre l’homme et la machine.Planches de la ruse) ou tout simplement sur lagéométrie de l’espace, chacune de ses piècesmarque également à sa façon l’idée d’un rapportétroit entre le corps et l’objet. Aurélien Bory créeSans objet en 2009, comme une surenchère àsa démarche : au centre de la scène et commeprotagoniste, une énorme machine, empruntée àl’industrie automobile. Incroyable amas de musclesd’acier, son bras articulé est un condenséde technologie, à la fois puissant, mobile et d’unegrande finesse de mouvement. Ce n’est pourtantpas ainsi qu’Aurélien Bory nous le livre. Il prend lesoin d’ôter toute référence à la fonction du robot, àson utilité même, le couvre d’une immense bâche,et laisse la bête se découvrir à nous.L’homme dépassépar la machineD’abord cachée, elle fait se mouvoir le plastiquedans une étrange danse – presque la plus belle duspectacle - qui hypnotise déjà le spectateur. C’estune masse mobile qui occupe la scène, magma oùse reflète la lumière, miroir de nos peurs, de nosfantasmes, de nos angoisses. Curieusement, decette étrange danse des matières, où les humainsLes 20 eRencontresd’Ici etd’Ailleurs////// Festival //////////////////////////////////////////////////////////////20 ans, et l’affirmation d’unfestival profondément ancré dansson territoire et dans l’art de larue qu’il a aidé à se développer.Déjà une génération d’artistes fait place à uneautre. Pour l’ouverture des Rencontres, GénérikVapeur offre un aller-retour dans son travailpar l’intermédiaire de deux pièces : <strong>La</strong> Photocommunale, reprise l’année dernière mais néeil y a dix ans, et Bivouac, créée en 1988 maistoujours d’attaque aujourd’hui. Le SAMU (SectionArtistico Musicale d’Urgence) joue le mêmejeu, à travers un répertoire qui se balade entre1986, 1991, et 2007 ! <strong>La</strong> compagnie Oposito,organisatrice de l’événement, n’en reste pas lànon plus, et tentera de battre son Record du© Mathias Olmtan’ont pas encore leur place, naît une impressionde vie. Quand le robot apparaît enfin, son corpset ses intentions n’en sont que plus troubles à nosyeux. A l’apparition des deux hommes, le spectacletourne vers la rencontre concrète entre l’humain etla technologie. Très sérieux et tirés à quatre épin-gles, ils vont faire l’expérience du partage du plateauavec la machine, partant à sa découverte parla confrontation directe dans le corps à corps. Elledevient agrès, support à l’acrobatie… ils s’amusentde ce nouveau terrain de jeu. Pourtant, c’est uneétrange sensation qui naît de cette relation : qui estla marionnette ? <strong>La</strong> machine dirigée à vue ou lesdeux pantins qui s’y suspendent ? En préambule àce spectacle insolite et magnifique, Aurélien Borymontrait la capacité de l’objet à créer seul de l’imaginaireet du poétique ; à la fin, il met en exergue lasurpuissance de la machine vis-à-vis de l’hommeet son pouvoir de création comme de destruction.Dommage qu’au milieu, les propositions des interprètesne soient pas toujours à la hauteur de lapuissance évocatrice de la « bête ».Nathalie YokelSans objet, d’Aurélien Bory, les 13 et 14 mai à 21hau Théâtre de Sartrouville, place Jacques-Brel,78500 Sartrouville. Tél. 01 30 86 77 79.Et du 19 au 21 mai à 20h45 aux Gémeaux,scène nationale de Sceaux, 49 avenue Georges-Clemenceau, 92330 Sceaux. Tél. 01 46 61 36 67.Spectacle vu au Théâtre de la Ville, à Paris.Générik Vapeur, dans Bivouac, une de leurs deux piècesprogrammées à Noisy-le-Secmonde de gonflage de ballons établi en 1987 etbattu récemment à Bagneux. Est-ce-à dire queles arts de la rue ont quelque chose d’intemporel? Tous les projets n’ont pas cette capacité depasser outre le temps… Place aux jeunes artistesenfin, avec Magali Chabroud qui présente satroisième création, Les quelques jours de l’œuf.C’est aussi la première de Silence encombrant,par la compagnie Kumulus.N. YokelLes Rencontres d’Ici et d’Ailleurs, du 17 au 21 maià Noisy-le-Sec (93). Tél. 01 48 02 80 96 etwww.oposito.fr//// VOUS CHERCHEZ UN JOB éTUDIANT, éCRIVEZ-NOUS SUR la.terrasse@wanadoo.fr ////LA VIE CIE LES 7 DOIGTS DE LA MAINEMPREINTES, ON POSERA LES MOTS APRÈSDELAVALLET BIDIEFONO / CIE BANINGACLIENTS CLOTILDE RAMONDOUSOPHIA CHARAÏTHE DIZU PLAATJIES IBUYAMBO ENSEMBLEONDES PAVILLONNAIRES ARS NOVAENSEMBLE INSTRUMENTALABATTOIR BERNADETTE APPERT / CIE ZAOUMVESTIGES CIE CENDRES LA ROUGE / MÉTALUÀ CHAHUTERRHIZIKON CHLOÉ MOGLIA / CIE MOGLICE–VON VERX+ DES FILMS & DES SURPRISES...03 27 99 66 66 / WWW.HIPPODROMEDOUAI.COMSHOW EN MAI - LA TERRASSE.indd 1 14/04/11 12:11

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