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Quotidien de l'Art - Maison Populaire

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evue <strong>de</strong> pressele quotidien <strong>de</strong> l’art / numéro 384 / vendredi 24 mai 2013page09Que nous dit Anish Kapoor ?Par Cédric Aurelle« Je n’ai rien à dire », déclare Anish Kapoor auHuffington Post à l’occasion <strong>de</strong> son exposition « Kapoorin Berlin » qui vient <strong>de</strong> s’ouvrir au Martin-Gropius-Bau,insistant sur le fait qu’il n’a « jamais réalisé une œuvre quivise un contenu précis » (17 mai). On rencontre dans cetteexposition berlinoise le vocabulaire usuel <strong>de</strong> l’artiste, « <strong>de</strong>smiroirs en acier poli, du bois, <strong>de</strong> la résine, <strong>de</strong> la terre et toujoursplus <strong>de</strong> cire, lie-<strong>de</strong>-vin et visqueuse […]. L’artiste […] présentetrois décennies <strong>de</strong> production ainsi que <strong>de</strong>s œuvres nouvellesréalisées spécialement pour [le lieu] », ainsi que le rapportel’hebdomadaire hambourgeois Die Zeit (17 mai). Avec cesformes et ces matériaux, se pourrait-il que l’artiste n’aitvraiment rien à dire ? Si tel est bien le cas, d’aucuns sechargent <strong>de</strong> faire parler ses œuvres. D’abord en les replaçantdans l’histoire <strong>de</strong> l’art. Le quotidien berlinois Tagesspiegeldécrit ainsi « un énorme disque rouge qui trône au sommet d’unéchafaudage d’acier » et explique : « il s’agit du soleil auquelle titre <strong>de</strong> l’œuvre renvoie, citation <strong>de</strong> l’opéra <strong>de</strong> Malevitch <strong>de</strong>1913 Victoire sur le Soleil et <strong>de</strong> la série d’œuvres d’El Lissitzkys’y rapportant. Tout autour, <strong>de</strong>s cubes <strong>de</strong> cire rouge <strong>de</strong> 60 kgsont transportés par <strong>de</strong>s tapis roulants au bout <strong>de</strong>squels ils sontlargués pour s’accumuler sur un tas croissant sans cesse. Cettesymphonie sculpturale [rappelle] l’installation légendaire <strong>de</strong>Beuys Monuments au cerf, qui se trouvait au même endroit30 ans auparavant » (16 mai). Par-<strong>de</strong>là les références, c’estaussi un contexte historique d’intervention que la presse seplaît à souligner. Le mensuel Monopol précise que « Kapoor et[Norman] Rosenthal [commissaire <strong>de</strong> l’exposition] révèlentl’histoire du bâtiment, cellule <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnité, du Bauhaus, <strong>de</strong>la guerre, <strong>de</strong> la partition alleman<strong>de</strong> » (15 mai). Et le magazineStern d’ajouter que Kapoor « sait parfaitement que la frontièreEst-Ouest longeait directement le Martin-Gropius-Bau [ainsi quel’ancienne chambre <strong>de</strong> torture SS située à côté] ». Ici, l’artiste« qui n’a rien à dire » déclare pourtant, toujours dans Stern :<strong>de</strong>vant le Martin-Gropius-Bau, « on ne peut penser à riend’autre qu’à l’histoire alleman<strong>de</strong> » (18 mai).Ses titres ne fournissent-ils pas aussi <strong>de</strong>s orientations<strong>de</strong> lecture <strong>de</strong> ses œuvres ? « De la chambre à air en PVC grisfoncé pénétrable car gonflable, qui sous le titre <strong>de</strong> Léviathanrampait comme un ver artificiel à travers le Grand Palais àParis, l’air s’est échappé : le sac fatigué s’étale certes encore [auMartin-Gropius-Bau] sur trois salles. Mais peut-être faut-il voirici un symbole mélancolique, celui <strong>de</strong> la fin <strong>de</strong> toutes les énormesbulles spéculatives », écrit le Tageszeitung, pour qui « la mortdu Léviathan, c’est celle <strong>de</strong> l’État » (18 mai). Une questionapparemment récurrente chez Kapoor. Si au Grand Palais,le projet commandé en 2011 par l’État français offrait à soncommanditaire en Léviathan l’image échouée <strong>de</strong> sa propreboursoufflure, le Guardian nous relate le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>Kapoor sur <strong>de</strong>s contextes anglais et allemands fort opposés. Ilconsidère ainsi son exposition à Berlin comme « la meilleurequ’il ait pu mettre sur pied, ce qui est fortement lié au fait queselon lui l’Allemagne fait preuve d’un haut <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> respect pourles arts contrairement à la Gran<strong>de</strong>-Bretagne ». Et le Guardian <strong>de</strong>citer l’artiste : « En Allemagne, il semble que la vie intellectuelleet artistique soit célébrée et fasse partie d’une véritable bonneéducation, alors qu’en Angleterre, traditionnellement, <strong>de</strong>puisles Lumières, nous avons peur <strong>de</strong> tout ce qui est intellectuel,esthétique, visuel. […] Bref, la Gran<strong>de</strong>-Bretagne est foutue »(15 mai). Finalement, Kapoor a bien <strong>de</strong>s choses à dire… ❚

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