8 Le journalDossierPHARMACIENS D’OUTRE-MERZoom sur la section ESeu<strong>le</strong> section territoria<strong>le</strong>,la section E réunit l’ensemb<strong>le</strong><strong>des</strong> pharmaciens, quel que soit<strong>le</strong>ur métier. El<strong>le</strong> est administréepar <strong>le</strong> conseil central, qui comprend14 membres élus : sept déléguéslocaux élus ou présidents dedélégation et sept représentantsde la délégation auprès duconseil central.Les sous-sections loca<strong>le</strong>s tiennent<strong>le</strong> tab<strong>le</strong>au de l’<strong>Ordre</strong> et ont un rô<strong>le</strong>d’instruction en première instance,avant que <strong>le</strong> conseil central statuesur <strong>le</strong>s deman<strong>des</strong> qu’on lui soumet.Seul <strong>le</strong> conseil central disposede la compétence pourse prononcer sur <strong>le</strong>s dossiersqui lui sont présentés.<strong>Pharmaciens</strong> d’outre-mer, qui êtes-vous ?Vous êtes 1 629 exactement*, dont 75 % de pharmaciensd’officine. Pour vous rencontrer, un tour du mon<strong>des</strong>’impose. Vous exercez en effet aux quatre coins de laplanète : dans l’océan Pacifique (Wallis-et-Futuna),l’océan Indien (La Réunion et Mayotte), aux Antil<strong>le</strong>s(Guadeloupe, Martinique), en Amérique du Sud(Guyane) et dans <strong>le</strong> nord de l’Atlantique (Saint-Pierreet-Miquelon).En visitant vos officines, comparativement à la Francemétropolitaine, on constate qu’el<strong>le</strong>s disposent enmoyenne d’une surface relativement plus limitée (70 m 2en moyenne) et que <strong>le</strong> personnel y est moins important,avec un rapport titulaires/adjoints plus é<strong>le</strong>vé.<strong>Pharmaciens</strong> gérants de pharmacies à usage intérieur(PUI), vous jouez un rô<strong>le</strong> d’autant plus déterminant quevous ne disposez pas toujours d’équipes complètes àvos côtés. Par ail<strong>le</strong>urs, l’hôpital peut être dans certainscas <strong>le</strong> principal point de délivrance <strong>des</strong> médicamentsaux populations, comme à Saint-Pierre-et-Miquelon età Wallis-et-Futuna.Du côté <strong>des</strong> biologistes, on s’aperçoit que vos structuressont éga<strong>le</strong>ment en moyenne de plus petite tail<strong>le</strong>, avecun personnel plus limité que dans l’Hexagone.Enfin, vous êtes une cinquantaine de pharmaciensà exercer dans <strong>le</strong>s métiers de la fabrication et de ladistribution en gros.Un exercice aux conditions particulièresCe portrait <strong>des</strong> pharmaciens d’outre-mer ne serait pascomp<strong>le</strong>t si l’on n’abordait pas <strong>le</strong>s spécificités de <strong>le</strong>ur activité.Les officinaux doivent, notamment, composer avec <strong>le</strong>scaractéristiques économiques propres aux départements etterritoires d’outre-mer. Certaines taxes, tel l’octroi de mer,s’appliquent systématiquement aux produits importés sur<strong>le</strong> territoire et majorent <strong>le</strong>s prix à la vente.Autre particularité, certains segments de marché sontplus dynamiques, soit du fait de préférences loca<strong>le</strong>s (fortedemande en phytothérapie), soit du fait de pathologies plusprésentes – la préva<strong>le</strong>nce du diabète, aux Antil<strong>le</strong>s – oude type tropical, sur <strong>le</strong>s î<strong>le</strong>s situées près <strong>des</strong> tropiquesou de l’équateur.En cas de crise sanitaire (chikungunya à La Réunion,dengue en Guyane), <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>des</strong> pharmaciens est bien sûressentiel, en particulier pour délivrer <strong>des</strong> conseils deprécaution et de prévention et veil<strong>le</strong>r à la bonne observance<strong>des</strong> traitements. Il est d’ail<strong>le</strong>urs recommandé à ceux quisouhaiteraient s’instal<strong>le</strong>r dans <strong>des</strong> zones exposées decompléter <strong>le</strong>ur formation par <strong>des</strong> diplômes universitaires(DU) sur <strong>le</strong>s maladies tropica<strong>le</strong>s par exemp<strong>le</strong>.Approvisionnement, transports…<strong>des</strong> défis quotidiensParmi <strong>le</strong>s défis à re<strong>le</strong>ver au quotidien par <strong>le</strong>s pharmaciensd’outre-mer, l’éloignement géographique <strong>des</strong> lieuxde production et <strong>des</strong> centres logistiques de dispensationcomplique la question de l’approvisionnement.RÉPARTITION DES PHARMACIENS D’OUTRE-MERPAR TERRITOIRE ET PAR MÉTIERGUADELOUPE178titulaires d’officine123adjoints d’officine14fabricants, import.,export., distrib.en gros53biologistes31pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 399 (24,5 %)Source : CNOP.GUYANE49titulaires d’officine30adjoints d’officine5fabricants, import.,export., distrib.en gros15biologistes17pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 116 (7,1 %)SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON1titulaire d’officine2biologistes3pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 6 (0,4 %)MARTINIQUE160titulaires d’officine78adjoints d’officine11fabricants, import.,export., distrib.en gros51biologistes36pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 336 (20,5 %)MAYOTTE17titulaires d’officine14adjoints d’officine2fabricants, import.,export., distrib.en gros6biologistes7pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 46 (2,8 %)LA RÉUNION296titulaires d’officine274adjoints d’officine23fabricants, import.,export., distrib.en gros85biologistes47pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 725 (44,5 %)GLOBAL701titulaires d’officine519adjoints d’officine55fabricants, import.,export., distrib.en gros212biologistes142pharmaciens enétablissementsde santéTOTAL 1 629WALLIS-ET-FUTUNA1pharmacien enétablissementde santéTOTAL 1 (0,1%)#26• Juin 2013 • <strong>Ordre</strong> national <strong>des</strong> pharmaciens
Le journal 9DossierÉpidémie de dengue en Guyane :une mission de renfort sanitaireMarisol Touraine, ministre <strong>des</strong> Affaires socia<strong>le</strong>s et de la Santé, a décidé de mobiliserune équipe de réservistes sanitaires de l’Éprus (Établissement de préparation et deréponse aux urgences sanitaires) pour renforcer <strong>le</strong> centre hospitalier de Cayenne.En savoir plus : www.sante.gouv.frL’acheminement <strong>des</strong> médicaments est en effet étroitementdépendant de la situation <strong>des</strong> transports. À Mayotte,<strong>le</strong>s rotations aériennes sont conditionnées par <strong>le</strong> rythme dela saison touristique, avec une forte baisse hors pério<strong>des</strong> devacances scolaires. Il n’y a alors pas de vols directs. Et l’esca<strong>le</strong>à La Réunion peut retarder <strong>le</strong>s livraisons de plusieurs jours,car <strong>le</strong> fret n’est pas prioritaire par rapport aux bagages.Les conditions climatiques peuvent aussi ajourner l’arrivée<strong>des</strong> colis, comme c’est <strong>le</strong> cas à Saint-Pierre-et-Miquelon. Lalégislation interdisant de s’approvisionner sur un marchéétranger, Saint-Pierre-et-Miquelon ne peut profiter de laproximité du Canada pour s’approvisionner en cas de rupturede stock. Aucune dérogation ne peut être accordée enmatière de sécurisation de la chaîne du médicament, afin deprévenir <strong>le</strong>s risques de falsification ou de commerce illicite.Aux délais <strong>des</strong> transports s’ajoute une difficulté récurrente,liée aux températures é<strong>le</strong>vées : <strong>le</strong> respect de lachaîne du froid. À La Réunion, il n’est pas rare que <strong>des</strong>containers montent en température au-delà de 60 °C, cequi oblige à jeter <strong>le</strong>s produits. Si certains médicaments, enraison de <strong>le</strong>ur instabilité, doivent impérativement bénéficierde « conditionnements tropicalisés » (packagingsopaques contre la lumière, verres de bocaux plus épaiscontre l’humidité…), d’autres ne peuvent résister à <strong>des</strong>situations d’extrême exposition.Les mêmes règ<strong>le</strong>s qu’en métropo<strong>le</strong>En dépit de ces spécificités, <strong>le</strong> niveau de qualité <strong>des</strong> prestationsde pharmacie dans <strong>le</strong>s départements et autres col<strong>le</strong>ctivitésd’outre-mer est équiva<strong>le</strong>nt à celui de l’Hexagone. Le codede la santé publique (CSP) y est strictement appliqué, sauf surdeux territoires, dotés de statuts politiques particuliers,Wallis-et-Futuna et Saint-Pierre-et-Miquelon (voir encadré).En termes de compétences professionnel<strong>le</strong>s, de sécuritédu circuit de distribution, de missions de santé publique,<strong>le</strong>s pharmaciens d’outre-mer présentent donc <strong>le</strong>s mêmesgaranties qu’en métropo<strong>le</strong>. Sur l’ensemb<strong>le</strong> <strong>des</strong> territoires,chaque pharmacien doit être titulaire d’un diplôme, obtenuen métropo<strong>le</strong> ou reconnu par équiva<strong>le</strong>nce puisqu’il n’existepas de faculté dans ces territoires.L’inscription à la section E de l’<strong>Ordre</strong> est bien sûr obligatoire,et <strong>le</strong>s pharmaciens sont tenus de respecter l’ensemb<strong>le</strong> <strong>des</strong>règ<strong>le</strong>s déontologiques et professionnel<strong>le</strong>s. Les pharmaciensdevront, par exemp<strong>le</strong>, se soumettre aux obligationsen matière de développement professionnel continu(DPC), d’autant qu’il existe déjà <strong>des</strong> offres de formationcontinue, en présentiel comme sous d’autres formes, parexemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> e-<strong>le</strong>arning.* C’est <strong>le</strong> nombre depharmaciens inscritsen 2011 à la section E(source : <strong>Ordre</strong> national<strong>des</strong> pharmaciens).Depuis <strong>le</strong> début d’année, un autre risque se profi<strong>le</strong>. L’autorisationdu commerce é<strong>le</strong>ctronique de médicamentspourrait inciter certains pharmaciens à répondre à <strong>des</strong>deman<strong>des</strong> issues <strong>des</strong> départements et régions d’outre-meret <strong>des</strong> col<strong>le</strong>ctivités d’outre-mer (DROM-COM). Il faudradonc être très vigilant sur <strong>le</strong>s médicaments envoyés et<strong>le</strong>s circonstances d’acheminement, et toujours respecter<strong>le</strong>s normes du conditionnement tropicalisé.Enfin, certains territoires, en raison de <strong>le</strong>ur localisation,sont davantage exposés au commerce illicite et à la contrefaçon.C’est <strong>le</strong> cas de Mayotte, située près <strong>des</strong> Comores,réputées pour être une « plaque tournante » de diversesformes de contrefaçon, même si la situation s’améliore depuisque l’î<strong>le</strong> est devenue un département français en 2011.DES TERRITOIRESD’EXCEPTIONSDeux territoires dotés d’un statut territorial spécifique ont unmode d’organisation particulier de la dispensation pharmaceutique.À Wallis-et-Futuna, il n’y a pas de dispositif d’assurance maladie,et c’est l’unique pharmacien de l’hôpital qui distribue <strong>le</strong>s médicamentsgratuitement à la population.À Saint-Pierre-et-Miquelon, l’héritage du passé militaire s’illustrepar un service hospitalier à statut particulier, qui était chargé dumonopo<strong>le</strong> de la dispensation, jusqu’à la création il y a quelquesannées de l’unique pharmacie d’officine libéra<strong>le</strong>.À ces deux exceptions il faut éga<strong>le</strong>ment ajouter la situationdérogatoire de Mayotte, où <strong>le</strong>s médicaments sont, par dérogation,délivrés gratuitement par l’hôpital et <strong>le</strong>s dispensaires, et où il existeéga<strong>le</strong>ment 18 officines installées dans <strong>des</strong> zones de densitédémographique plus importante, soit environ 7 000 personnespar pharmacie.INTERVIEWVers une réformede la section ENorbert Scagliola, président du conseil central de la section EPourquoi existe-t-il une sectionspécia<strong>le</strong>ment dédiée auxpharmaciens d’outre-mer ?N. S. : El<strong>le</strong> se justifie parla particularité géographiquede ces contrées, éloignées, isoléeset, dans certains cas, avec<strong>des</strong> superficies très étenduesou au contraire très restreintes.Prenons l’exemp<strong>le</strong> de la Guyane :son territoire est 10 fois plusimportant que celui de la régionAlsace, mais el<strong>le</strong> possède 10 foismoins de pharmaciens.Les DROM-COM se distinguentéga<strong>le</strong>ment par <strong>des</strong> situationspathologiques spécifiques, avec<strong>des</strong> maladies endémiques etla préva<strong>le</strong>nce é<strong>le</strong>vée de certainespathologies lour<strong>des</strong> (diabète,drépanocytose, insuffisanceréna<strong>le</strong>, hépatite C…).Le fait de disposer d’une sectionunique permet de proposerune représentation loca<strong>le</strong>au plus près <strong>des</strong> problématiquescommunes aux pharmaciensd’outre-mer, en phase avecla mission de proximité de l’<strong>Ordre</strong>.La section E répond-el<strong>le</strong>p<strong>le</strong>inement à ses missions ?N. S. : De façon généra<strong>le</strong>, oui,mais <strong>des</strong> voies d’améliorationsont possib<strong>le</strong>s. On constate parexemp<strong>le</strong> une surreprésentation<strong>des</strong> officinaux au sein <strong>des</strong>instances loca<strong>le</strong>s et nationa<strong>le</strong>s.Enfin, <strong>le</strong>s délégations loca<strong>le</strong>sont <strong>des</strong> moyens insuffisants,ce qui génère parfois une plusfaib<strong>le</strong> possibilité d’implicationdans <strong>le</strong> traitement de certainsdossiers.Vous souhaitez une réformede la section, dans quel but ?N. S. : Nous souhaitons,en effet, modifier <strong>le</strong>s règ<strong>le</strong>sé<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>s pour mieuxéquilibrer la section entre<strong>le</strong>s différents métiers,déléguer davantage de moyenset de responsabilités dans<strong>le</strong> traitement <strong>des</strong> dossiersaux délégations et garantirà chaque pharmacien uninter locuteur dédié à son métier.#26• Juin 2013 • <strong>Ordre</strong> national <strong>des</strong> pharmaciens