L’INTERNATIONAL EN QUESTIONCité interdite à PékinOPTO 164Septembre 200926Le GuanxiAprès le concept relativementdéroutant de la face, existe unedeuxième différence culturellemajeure : le guanxi . Il s’agitdu management des relations d’unChinois avec le reste du monde.Globalement, d’après les expertsen sciences humaines (1) , les Chinoisclasseraient les gens dans quatregrandes catégories :• La famille et les amis proches.Le Chinois aura une confianceabsolue dans cette catégorie depersonne.• Les connaissances (travail,école...). Un Chinois accorderaune confiance importante à cettecatégorie de ses relations. Mêmeaprès des années sans contact,une personne de ce cercle pourrademander une faveur et l’obtenir.• Les autres Chinois. Il n’aura pasd’avis particulier sur les autresmembres de son pays mais siun jour, il doit choisir entre uneentreprise étrangère et unechinoise pour réaliser son projet,alors il y a fort à parier qu’ilchoisira la chinoise. En effet, ilspartagent la même langue et lamême culture : ils peuvent doncavoir confiance.1- Voir par exemple le livre de B. Marionproposé dans l’encadré.• Le reste du monde. Les Chinoisn’ont pas une grande confiancedans les étrangers. Ils onttoujours peur de se faire avoir, cequi, quand on considère l’histoiredu pays est compréhensible.Un aparté sur une expériencepersonnelle permet de mieuxcomprendre en quoi le guanxi estimportant. Traverser la route ici estrelativement dangereux pour unoccidental car le code de la routeest différent. Comme en France,le piéton a le droit de traverserquand les voitures ont le droit detourner. Il se trouve que la majoritédes chauffeurs qui vont tourner neferont pas attention aux piétons. Jen’entre pas dans le guanxi d’un taxidonc il n’a pas vraiment de raison defaire attention à moi. Je dois donctraverser en plusieurs temps enfaisant attention. Si je suis avec desamis Chinois, ils me retiendront sije risque de me faire écraser, alorsque si je suis toute seule, les gensautour de moi ne me retiendrontpas.Je pense que pour réussir unprojet avec la Chine, il faut rentrerdans le niveau deux du guanxi,c’est-à-dire les connaissances. Cen’est pas forcément évident maisla solution la plus simple est dese faire introduire par quelqu’unayant le même niveau de guanxi etconnaissant déjà la personne avecqui on souhaite travailler. Ainsi, oninspire confiance.La confiance est une choseprimordiale pour un Chinois et ilaura le plus grand mal à travaillerà distance avec quelqu’un qu’il n’ajamais vu. Il n’est pas impossibled’entendre : « Je ne l’ai jamais vu, jene le connais pas, je ne peux pas luifaire confiance ».Ainsi, si vous projetez d’avoir unprojet technique ou commercialavec la Chine, n’oubliez pas deprévoir de nombreux allers-retoursen Chine pour voir vos interlocuteurset leur rappeler que vous êteseffectivement intéressés par leprojet. Des rapports humains mesemblent plus importants que lesrapports technologiques - téléphoneou internet – ici. Ce qui, en soi, n’estpas une mauvaise chose.Oral vs écritDe même, les courriels ne sont pasencore totalement rentrés dansles mœurs. Un coup de téléphonesera probablement plus productif. Iln’est pas rare que les Chinois vousécrivent de leur adresse personnelleau lieu de celle de leur entreprise.S’adapter à ses interlocuteurs est la
chose la plus importante : parfois,il peut m’arriver d’envoyer un smsaprès un courriel pour être sûreque son interlocuteur lise celui-ci.Dans tous les cas, le rappeler lelendemain est toujours une bonneidée pour faire avancer les choseset s’assurer d’une bonne mutuellecompréhension.Un autre point important est queles Chinois accordent davantaged’importance à la parole qu’àl’écrit. Ainsi, les réunions peuventêtre tendues lorsqu’un point ducahier des charges n’est pas tenu.Typiquement, les Chinois diront :« mais nous n’avons jamais dit quenous savions faire ça » ou « mais àla réunion précédente, vous avez ditque c’était un point mineur ». LesEuropéens répondront que c’étaitdans le cahier des charges qui aété accepté par les deux parties.Dans tous les cas, il faut toujoursêtre très prudent sur ce qu’on dit etnoter absolument tout ce qui est ditlors d’une réunion car ce qui peutparaître un point de détail pour unedes parties ne le sera pas forcémentpour l’autre. Les deux parties,chinoise et européenne, gagnerontbeaucoup quand elles arriveront àcomprendre réellement qu’elles netravaillent pas de la même manière.Aussi évident que cela puisseparaître, ce n’est pas toujours facileà mettre en pratique dans sa façonde travailler avec autrui.En plus des différences culturelles,vient s’ajouter le problème de lalangue. Le chinois est, tout commele français, une langue complexe.Il peut donc être intéressant pourles réunions vraiment importantescomme la finalisation d’un designpar exemple de se munir d’uninterprète. Malheureusement,ceux-ci sont souvent légers quandil s’agit de parler de la techniquepure. Heureusement, les lois dela physique sont universelles etquelques formules ainsi que denombreux schémas aideront à sefaire comprendre. Cela prend certesun peu plus de temps mais c’esttellement plus efficace.Cet article ne reflète qu’une petitepartie du travail avec des Chinois. Ilne faut pas oublier que c’est un paysde la taille de l’Europe qui compte1 300 000 000 habitants, lesréactions entre un entrepreneurde la région de Shanghai et un desprovinces moins peuplées serontprobablement très différentes.Même si quelques pistes sontévoquées ici – avec un parti prisprobable – le mieux est de vous fairevotre propre expérience !Comme avoir quelques connaissancesde sociologie ne nuit pas à l’exercicedu métier d’ingénieur (ou autre), jerecommande vivement ces deux livres :- International Business Environmentand Operations , J.D Daniels, L.HRadebaugh & D.P Sullivan : quelqueschapitres intéressants sur lesdifférences culturelles, y compris ausein de l’Europe.- Réussir avec les Asiatiques,B. Marion : livre très instructif surles bonnes manières à avoir sur cecontinent.Orage sur TongliPlage paradisiaque de Sanya27 OPTO 164Septembre 2009