UNE Mercredi 28 février 2012 Kossonou.qxd - Cote d'Ivoire Mariage
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Politique<br />
Fraternité Matin / Mardi <strong>28</strong> <strong>février</strong> <strong>2012</strong> 5<br />
Intégration africaine Les ivoiriens ne sont pas suffisamment bien représentés dans<br />
les organismes régionaux; les opérateurs économiques non plus dans l’espace Cedeao. Suite et fin.<br />
“ Nous travaillons pour que les ivoiriens<br />
puissent s’installer partout ”<br />
adama Bictogo<br />
ministre de l’intégration africaine<br />
Comment voyez-vous la question<br />
de l’intégration en Côte d’Ivoire,<br />
dans les conflits ethniques?<br />
Si nous prenons le cas de la Côte<br />
d’ivoire, le ministère de<br />
l’intégration africaine travaille en<br />
coordination avec la Commission<br />
dialogue, vérité et réconciliation<br />
(Cdvr). parce qu’au sein du ministère,<br />
nous avons un comité d’écoute.<br />
D’ailleurs, nous avons pris une maison<br />
en location qui va être la maison<br />
de l’intégration, où nous avons la<br />
cellule Cedeao, mais également le<br />
bureau du comité d’écoute. Nous<br />
pensons que l’intégration régionale<br />
passe par une meilleure cohésion<br />
des pays membres de la Cedeao.<br />
C’est pour cela que nous voulons<br />
passer de la Cedeao des Etats à la<br />
Cedeao des peuples. pour nous, le<br />
brassage, c’est cette richesse née de<br />
la diversité des différents peuples<br />
qui constituent cette organisation.<br />
J’insiste pour dire que la Cedeao<br />
sera plus forte ! L’intégration entre<br />
les ethnies, c’est le début de l’intégration<br />
régionale. Je crois qu’on l’a<br />
si bien compris en Côte d’ivoire,<br />
que l’on a mis en place la<br />
Commission dialogue, vérité et<br />
réconciliation, pour qu’au lendemain<br />
de la crise qu’elle a connue;<br />
elle qui est elle-même un modèle<br />
d’intégration puisse renouer avec la<br />
cohésion sociale.<br />
Justement, à propos de cette intégration,<br />
des Ivoiriens ressentent<br />
comme une sorte de frustration, le<br />
fait de ne pouvoir exercer un<br />
métier dans certains pays de<br />
l’espace Cedeao.<br />
C’est une préoccupation. mais en<br />
même temps, il faut dire que pendant<br />
de longues d’années, la Côte<br />
d’ivoire, jouissant d’une prospérité<br />
très forte, était le pays dont les<br />
citoyens s’exportaient le moins.<br />
photo: mia<br />
malheureusement, les grandes crises<br />
successives ont amené beaucoup<br />
de nos jeunes à franchir le pas. mais<br />
peut-être que ce qui n’est pas à notre<br />
avantage, c’est que ces dix dernières<br />
années, la Côte d’ivoire n’a pas su<br />
entreprendre des relations de bonne<br />
intelligence avec ses voisins, en particulier,<br />
et les autres pays africains,<br />
en général. même que nous n’étions<br />
pas toujours les bienvenus dans<br />
quelques Etats européens. Je pense<br />
que c’est quelque chose qui va se<br />
régler parce que, déjà au sein de la<br />
Cedeao, j’ai posé le problème de la<br />
représentativité de la Côte d’ivoire<br />
au niveau des personnels de la<br />
Cedeao, la Boad, le Bidc, etc. C’est<br />
un travail que nous sommes en train<br />
de faire, pour permettre aux cadres<br />
ivoiriens de postuler à l’emploi dans<br />
toutes ces institutions régionales.<br />
mais surtout aux industriels et entrepreneurs<br />
ivoiriens de pouvoir s’installer<br />
dans tous les Etats membres de<br />
la Cedeao. Dès qu’ils sont confrontés<br />
à un problème d’installation ou<br />
d’établissement de leur société,<br />
qu’ils saisissent le ministère de<br />
l’intégration, dont l’une des missions<br />
est d’accompagner tous les<br />
Etats membres pour faire valoir<br />
leurs droits aussi bien au plan des<br />
affaires qu’au plan personnel.<br />
La mise en œuvre du plan d’action<br />
de l’Union du fleuve Mano<br />
débutait ce premier trimestre de<br />
<strong>2012</strong>. Qu’en est-il ?<br />
hier, (Ndlr : jeudi dernier) nous<br />
étions en séminaire pour en parler.<br />
Du 15 au 17 mars, tous les chefs d’état-major<br />
se réunissent pour la sécurité.<br />
au mois d’août, nous avons une<br />
réunion consacrée à l’aspect énergétique.<br />
Vous savez que la Côte<br />
d’ivoire doit pouvoir faire face à la<br />
demande aussi bien du Liberia, de la<br />
Sierra Leone, du Bénin, de la<br />
Guinée, du togo et du Burkina qui<br />
dépendent d’elle pour une partie de<br />
leur électricité, alors qu’aujourd’hui,<br />
nous ne disposons que de 500 mégawatts,<br />
pour des besoins évalués à 1<br />
200 mégawatts. Nous avons proposé<br />
que le Liberia qui avait déjà bénéficié<br />
d’une aide de l’Union européenne<br />
pour faire une interconnexion<br />
avec la Côte d’ivoire, puisse<br />
la réaliser d’ici la fin de l’année. En<br />
ce moment, nous sommes au niveau<br />
de la conception des projets. mais il<br />
faut savoir une chose.<br />
Laquelle ?<br />
il y a des projets, d’une part, et d’autre<br />
part, leur faisabilité. L’une des<br />
faiblesses des pays africains est que<br />
les projets existent, mais ne sont pas<br />
conçus à partir d’études. Désormais,<br />
il faut des projets identifiés à partir<br />
d’études qui soient financées par la<br />
suite. or, l’étude d’un projet peut<br />
prendre une à deux années. C’est à<br />
ce stade que nous sommes au sein<br />
de l’Union du fleuve mano. mais<br />
ceci étant, une plateforme de suivi et<br />
de veille de plans d’action a été élaborée,<br />
il y a quelques mois. on<br />
pourra, d’ici la fin de l’année, vous<br />
faire le point de la situation.<br />
À mi-parcours, quel est<br />
aujourd’hui l’état de<br />
l’intégration sous-régionale ?<br />
Si l’on s’en tient à l’évolution depuis<br />
l’arrivée du président de la<br />
République à la tête de la Côte<br />
d’ivoire et son implication au plan<br />
régional, on peut retenir que son<br />
insistance a permis le renouvellement<br />
des instances de la Cedeao.<br />
Ce, pour la simple raison qu’il voulait<br />
des réformes, afin que la Cedeao<br />
soit en adéquation avec les normes<br />
des autres institutions du monde<br />
entier, comme l’Union européenne,<br />
le Fmi, etc.<br />
autre chose à retenir, c’est qu’un<br />
certain nombre d’Etats au sein de la<br />
Cedeao ont connu une élection en<br />
conformité avec ses directives. Ce<br />
qui est important, au sein de cette<br />
organisation régionale, c’est que<br />
tout s’obtient par consensus. Quelles<br />
que soient les divergences, on arrive<br />
toujours à un consensus. Nous pensons<br />
que la Cedeao a franchi un pas<br />
au-delà de la solidarité et du principe<br />
de consensus entre les membres<br />
et qui régit son organisation. plus. il<br />
y a eu ouverture vers les partenaires<br />
au développement et les pays émergents.<br />
C’est pour cela que le renforcement<br />
de ses relations avec la<br />
Chine, le Brésil et l’Union européenne<br />
sont des avancées majeures.<br />
Cela a d’ailleurs permis au Ghana<br />
d’en tirer profit pour environ 5<br />
milliards de dollars de financement.<br />
C’est quelque chose que nous attendons,<br />
ici en Côte d’ivoire, pour pouvoir<br />
faire profiter à notre population<br />
des avancées de la Cedeao.<br />
L’intégration régionale est en<br />
marche. Disposez-vous d’une base<br />
de données du nombre d’investisseurs<br />
directs régionaux qui s’implantent<br />
dans les pays voisins ?<br />
Quels freins rencontrent-ils ?<br />
Déjà, il faut noter que la Cedeao est<br />
un espace de près de 300 millions<br />
d’habitants dont le pib est de<br />
240000 milliards de Fcfa. Je crois<br />
qu’il serait difficile de savoir combien<br />
d’investisseurs viennent dans<br />
l’espace Cedeao. C’est d’ailleurs<br />
pour cela que l’un des objectifs de<br />
l’organisation est d’arriver au visa<br />
unique. Comme c’est le cas avec le<br />
visa Schengen en Europe. pour justement<br />
avoir des statistiques fiables.<br />
L’autre élément, c’est que dans<br />
l’harmonisation juridique, on voulait<br />
que chaque investisseur puisse<br />
faire valoir le numéro de son registre<br />
de commerce dans tous les Etats<br />
membres de l’espace, afin d’avoir<br />
un identifiant unique. C’est vrai il y<br />
a encore quelques barrières, même<br />
si les textes permettent l’établissement<br />
des sociétés. il faut que nous<br />
arrivions, comme à l’Uemoa, à permettre<br />
à une banque qui se crée en<br />
Côte d’ivoire de s’implanter partout<br />
dans la zone, sans être obligée d’obtenir<br />
une autre autorisation. il suffirait<br />
qu’elle ait tous les éléments<br />
constitutifs de sa banque, qu’elle ait<br />
les moyens et la capacité d’étendre<br />
son réseau, pour que l’autorisation<br />
lui soit donnée. Ce qu’il faut retenir,<br />
entre autres : la Cedeao veut arriver.<br />
À une monnaie unique, parce que<br />
c’est un bon vecteur de rapprochement<br />
qui facilitera le commerce.<br />
La Chine construit… le siège de<br />
l’Union africaine, actuellement, à<br />
Addis-Abeba. Quelle est la fierté<br />
d’un tel continent ?<br />
La Chine a considéré qu’offrir un<br />
siège à l’Union africaine participe<br />
de ce qu’elle souhaite être un des<br />
premiers partenaires de l’afrique.<br />
Faut-il faire un lien avec notre dignité<br />
? Je ne le crois pas. Je pense que<br />
de plus en plus, le monde est en train<br />
de devenir un village planétaire. il<br />
faut que nous puissions revisiter<br />
notre perception de la souveraineté.<br />
Cette notion n’est pas remise en<br />
cause, dès lors qu’un partenaire<br />
vient aider ou participer au développement.<br />
il faut que le principe de la<br />
concession ou de partenariat ne soit<br />
pas perçu comme une renonciation à<br />
notre identité ou dignité. il faut que<br />
l’afrique comprenne qu’avec la<br />
mondialisation, il n’y a presque plus<br />
de frontière ; nous allons vers leur<br />
abolition. Nos enfants, de plus en<br />
plus, nous le démontrent d’ailleurs.<br />
Si un événement a eu lieu au Japon,<br />
à 7h du matin, par Facebook, c’est<br />
votre fils qui vous l’apprend. Je<br />
veux dire qu’il faut que nous nous<br />
départissions de ce complexe de<br />
dignité et de souveraineté qui, certainement,<br />
a survécu à une autre<br />
période. aujourd’hui, nous sommes<br />
dans une situation où le plus important,<br />
pour nous, c’est comment aller<br />
à un partenariat gagnant-gagnant<br />
pour la communauté. C’est cela la<br />
vision du gouvernement de Côte<br />
d’ivoire.<br />
iNtERViEw RéaLiSéE paR<br />
Michel Koffi<br />
Et cissé MaMadou<br />
par ouMou d.<br />
Bons chauffeurs !<br />
Il fut une période où, l’office de la sécurité routière, faisait<br />
dépendre ses campagnes du rang pitoyable qu’occupait<br />
notre pays dans le classement mondial en matière<br />
d’insécurité routière au regard de l’effarant palmarès<br />
de pertes en vies humaines. Je ne serai guère surprise si<br />
l’exploit macabre est réédité à cause de nos bons chauffeurs<br />
autoproclamés. Qui sont-ils, ces chauffeurs chevronnés<br />
? Ne vous attendez pas à ce que je vous décline<br />
les critères qui font d’un conducteur d’automobile un as<br />
du volant, un Sébastien Loeb, le champion sept fois<br />
vainqueur du rallye mondial. Les pilotes dont il est question<br />
ici, sont ceux qui ont décidé de narguer la mort en se livrant<br />
à d’invraisemblables exhibitions sur nos routes. ils mettent<br />
en danger la vie de tous ceux qui ont le malheur de se retrouver<br />
sur leur parcours, surtout quand Cupidon a touché<br />
l’un des leurs de sa flèche.<br />
Des scènes surréalistes de conduite dangereuse et délirante<br />
sont jouées dans la circulation publique par des mini-cars<br />
(gbaka), taxis communaux (woroworo), taxis compteurs,<br />
sous le prétexte de célébrer de nouveaux mariés. La fête<br />
commence dans la matinée du jeudi. Des amis, collègues et<br />
parents du futur marié appartenant au monde élargi du<br />
transport (mécaniciens, chauffeurs, syndicalistes, chargeurs,<br />
etc.) ne se gêneront pas pour vous faire partager une douche<br />
froide, dans une guérilla des sachets d’eau (eau glacée en<br />
général, savonneuse, sale) ou encore de vous badigeonner<br />
d’huile de vidange pour manifester leur joie. Si vous avez<br />
mis les pieds dans les gares ou les espaces réservés au chargement,<br />
ruisselant d’huile et d’eau sale, vous vous en tirez<br />
à bon compte. En effet, au crépuscule, le clou de la fête<br />
risque de vous donner un infarctus. Des chauffeurs, les<br />
doigts à peine posés sur le volant, à défaut de gâchette,testeront<br />
leur témérité en circulant à très vive allure dans des<br />
engins incertains et bondés, avec des passagers hurlant et se<br />
livrant à de folles acrobaties sur le toit. après avoir été<br />
témoins de telles scènes, si vous vous en sortez, malgré les<br />
embouteillages monstres causés par ces cortèges bruyants,<br />
vous avez de la chance. Les bons chauffeurs chargés de<br />
convoyer la « kogninmousso », la nouvelle mariée au<br />
domicile conjugal, eux, avant d’accomplir leur mission, se<br />
livreront à des démonstrations déroutantes sous les vivats de<br />
‘’la corporation’’. par exemple, une cible est visée, soit un<br />
poteau électrique ou même un mur. Le bon chauffeur, fonce<br />
vers la cible et freine juste à quelques petits centimètres en<br />
faisant ronfler le moteur. Deux “ bons chauffeurs ’’, dans<br />
deux voitures qui se font face, roulent et freinent brusquement,<br />
juste avant que les deux véhicules ne se percutent.<br />
Dans un déferlement de joie hystérique.<br />
il y a déjà eu plusieurs drames. Des passagers ont eu le<br />
crâne fracassé ou des membres fracturés en tombant du<br />
toit des automobiles. mais, le coût en vies humaines, en<br />
nombre de blessés, en dégâts matériels, en séquelles<br />
psychologiques, bien malin qui pourra l’établir. Cette<br />
volonté de puissance née le plus souvent dans une ignorance<br />
inconsciente, doit être sanctionnée. Les accidents de la<br />
circulation sont habituellement perçus comme une fatalité,<br />
un destin inéluctable. Cependant, quand la route devient le<br />
lieu d’expression d’une poussée d’adrénaline, d’un désir de<br />
se « rendre maîtres et possesseurs » de la circulation et de<br />
nos vies, il y a lieu de sévir. La route n’est pas une arène où<br />
le gladiateur, sous le regard ivre, concupiscent et voyeuriste<br />
d’un souverain en manque de sensations fortes et sordides,<br />
viendrait lui donner caution. il faut aborder la question<br />
des accidents de la route comme élément de santé publique.<br />
Cela relève de la responsabilité de l’Etat et de notre degré<br />
de conscience citoyenne. Les syndicats de transporteurs<br />
gagneraient aussi à sensibiliser leurs adhérents, à leur faire<br />
prendre conscience du spectre de la mort violente qu’ils font<br />
planer sur nos vies. C’est peut-être bien de fêter des noces<br />
mais ayons la décence d’épargner le pire aux autres.